Les vierges noires - Revue des sciences sociales

Transcription

Les vierges noires - Revue des sciences sociales
MONIQUE SCHEER
Universität Tübingen
<[email protected]>
Les vierges noires
Perception, signification
et utilisation symbolique
entre le XVIIe et le XXe siècle
L
ors de ma première rencontre avec
la Vierge noire, je me suis tout de
suite demandée : pourquoi est-elle
noire ? Je ne suis pas la seule à m’être
posé cette question. En effet, j’ai pu
lire dans bon nombre de rapports1 −
et je le sais également des discussions
personnelles que j’ai pu avoir − que la
vue d'une Vierge Marie noire soulève
des interrogations toutes bâties sur le
même schéma : L’image est-elle originaire d’Afrique ? Est-ce que la Madone
doit ressembler à une africaine ? Si l’on
sait toutefois que la plupart des représentations viennent d’Europe et datent
de la fin du Moyen-Âge : est-ce que la
couleur de peau correspond à l’image
que l’on se faisait à l’époque d’une juive
de la Palestine antique ? Les associations que l’on fait, lorsque l’on voit
une Vierge noire, sont donc liées à une
image ethnique. Pour nous, il est tout à
fait logique que la couleur de peau soit,
en premier lieu, un signe d’appartenance
raciale. De plus, notre image collective
de l’apparence de la Vierge Marie ne
s’appuie pas sur les représentations cultuelles du Moyen-Âge, mais plutôt sur
la tradition iconographique du grand
Art (tout comme sûrement aussi de l’Art
populaire religieux du XIXe siècle : par
ex. les représentations faites d’après le
style des Vierges de Saint-Sulpice ou de
Lourdes) où la Vierge Marie est représentée avec le teint clair. Nous avons
76
donc tendance à en déduire que la couleur a une signification symbolique mais
elle reste cependant pour nous quelque
peu énigmatique.
« L’énigme des vierges noires »2 est
nouvelle. Les plus grands lieux de pèlerinage dans les pays catholiques jusqu’à
la fin du XVIIIe siècle possédaient leur
Vierge noire : en France (le Puy et Chartres), en Espagne (Guadalupe et Montserrat), en Italie (Lorette), en Bavière
(Altötting), en Pologne (Czestochowa)
et en Suisse catholique (Einsiedeln ;
cf. illustration 1) − pour ne citer que
les plus importants −. Il est donc très
peu probable que ces Madones aient été
considérées comme « anormales ». L’Art
populaire − et tout particulièrement l’Art
populaire religieux − s'appuie généralement sur l’aspect familier populaire. Les
Hommes sont partis par milliers en pèlerinage vers ces villes avec leurs maladies, leurs soucis, leurs problèmes et
non afin de satisfaire leur curiosité quant
à l’énigme de la Mère de Dieu. Dans
la littérature du XXe siècle, on parle
beaucoup de ce phénomène « inexplicable », « mystérieux » et « énigmatique »
car on a voulu faire de ces représentations quelque chose de peu habituel − ce
qui ne paraît pas très logique si l’on se
remémore les élans qu’elles ont soulevés
auprès des fidèles catholiques. On part,
la plupart du temps, du principe que
les représentations étaient noires dès le
début. Les auteurs catholiques taisent
plus ou moins ce phénomène, du moins
il est très peu énoncé3. Ils sont d’avis
que la couleur n’était pas intentionnelle
mais plutôt le fait du hasard, par exemple
le résultat de la suie des cierges. Les
Vierges auraient donc été à l’origine
blanches. Comparées à l’acceptation de
la couleur de peau par la croyance populaire pendant l’époque baroque ces deux
réactions − l'exotisation et le rejet de
la Vierge noire − semblent signifier un
changement radical face à la réception
de ces représentations. Ce changement
me semble lié à la perception générale
de la couleur de la peau noire, à savoir
avec le développement d’une nouvelle
perception qui en fait un signe racial.
Je ne tiens pas à m’attarder sur l’intention qui se cache derrière cette attribution de couleur. Tout d’abord parce
que l’on ne pourra jamais répondre à
cette question de façon satisfaisante et
deuxièmement parce que cette approche
ne renseigne en aucun cas sur la réception
et l’interprétation faite de la couleur par
les croyants4. J’aimerais donc aborder le
sujet en me posant les questions : quand
et pourquoi ces Vierges sont-elles devenues noires ? C’est à dire sous l’angle
de l’Histoire des perceptions (« Wahrnehmungsgeschichte »). Quelles formes
d’interprétations auraient été importantes pour les observateurs et lesquelles
auraient-ils pu avoir à leur disposition
Monique Scheer
pour trouver quelque chose de significatif
dans la couleur ? Quels changements connurent ces formes au cours des siècles ?
Peut-on espérer trouver l’explication et la
signification de cette couleur (la réponse à
la question : « pourquoi est-elle noire ? »)
dans ces interprétations ?
Je commencerai donc par une reconstruction et j’essayerai de voir depuis
quand les Vierges noires sont considérées
Ill. 1 – La Vierge noire de Einsiedeln, Suisse,
XVe siècle. Photo : P. Damian Rutishauser,
Einsiedeln.
Les vierges noires
comme telles. Je prétends que ce phénomène était en fait une partie du programme de la Contre-réforme qui avait pour
but de légitimer et d’exhorter la dévotion
vis à vis des représentations mariales
miraculeuses. Ce phénomène entraîna un
changement radical de la réception des
représentations et ne fut que par la suite
rattrapé par le discours scientifique sur
les races. Enfin, je traiterai succinctement
de la signification symbolique des Vierges noires aujourd’hui. J’ai pour objectif
d’essayer de comprendre pourquoi les
Vierges noires ont pu compter pendant
des années parmi les représentations les
plus prestigieuses en Europe pour être
reléguées par la suite au rang de curiosités inexplicables. Je restreins mon travail
de recherche aux régions germanophones
notamment parce que les représentations
que l’on y trouve ont moins éveillé l’intérêt scientifique que les représentations
françaises. Mon approche, elle, est contextuelle, raison pour laquelle je ne prétends en aucune façon que mes résultats
puissent être appliqués à la France, l’Italie ou encore l’Espagne. Cependant j’ose
espérer qu’une approche similaire des
Vierges noires de ces régions pourrait
ouvrir d’autres perspectives5.
Les cultes autour des Vierges noires ne
sont certainement pas aussi anciens que
les représentations elles-mêmes. Elles
furent en effet réalisées entre le XIIe et
le XVe siècle et elles ne furent vraisemblablement pas adorées comme images
miraculeuses dès leur apparition. L’époque à laquelle les centaines de copies de
ces représentations furent réalisées fait
également penser que le culte s’appuyant
sur ces représentations ne naquit qu’à
l’époque de la Contre-réforme. Il est
beaucoup plus difficile de savoir avec
certitude si les représentations originelles
qui faisaient l’objet d’un culte, étaient
dès le début de couleur noire. D’une
certaine manière c’est exactement cette
question qui est le centre de la polémique depuis le XIXe siècle. Les anthropologues6, les chercheurs en science des
religions comparées7, les psychologues
Jungiens8 et les chercheurs français (qui
se sont intensément intéressés à ce sujet :
le nombre de représentations de Vierges
noires étant particulièrement important
dans leur pays9) partent généralement
du principe qu’il s’agissait d’un rapport
conscient et intentionnel avec des Vierges
noires. Ils voient en ce culte la continuité
de ceux qui existaient autour des Grandes
Déesses à l’époque pré-chrétienne. Les
chercheurs allemands en « Volkskunde »
eux, se sont jusqu’alors ralliés à l’avis des
théologiens. Ils défendent en effet la thèse
que les représentations étaient à l’origine
« normales » et que leur « assombrissement » n’est que l’effet du temps. Ce
différend peut certainement s’expliquer
par le désir, en particulier des chercheurs
allemands en « Volkskunde », de se distancier des « théories de la continuité »
(« Kontinuitätstheorien »)10.
On ne peut pas dire avec assurance qui
des deux parties à raison, ni si les représentations étaient, dès le début, de couleur noire. Il ne reste aucun acte de vente
de ces représentations, aucune commande
auprès des ateliers de peintres, aucun protocole de travail pouvant attester que la
Vierge fut noire dès le début11. Dans les
documents réalisés par les observateurs,
dans les plus anciens recueils de miracles
par exemple, la couleur noire n’est pas
non plus mentionnée. Les voyageurs et
les pèlerins du XVe et XVIe siècle ne font
que très rarement mention de l’image
miraculeuse dans leurs récits12 et on n’en
connaît aucune description détaillée.
Si l’on trouve quelque chose sur cette
image, il n’est alors question que de son
origine miraculeuse. Les légendes sur ces
représentations furent collectées de façon
systématique et transcrites à partir du
XVIIe siècle13 et relatent toutes la même
chose. Il n’existe aucune différence entre
les légendes ayant trait aux Vierges noires
et celles parlant des autres Vierges14 : toutes reprennent les mêmes formulations et
les mêmes motifs. Elles traitent, en règle
générale, du grand âge de ces représentations, celui-ci est mis en valeur soit grâce
à la rencontre avec un Saint important,
soit à travers le récit de la miraculeuse
découverte de la représentation dans un
lieu où elle fut cachée pendant des siècles. Une seule légende semble avoir une
relation toute particulière avec les Vierges noires : elle relate que Luc l’Evangéliste aurait lui-même fait le portrait de
Marie de son vivant. Plusieurs Vierges
noires (mais pas toutes) sont attribuées
à Luc, par exemple la représentation de
Czestochowa. Cette représentation est en
fait originaire de Sienne et daterait de la
fin du XIVe siècle. On raconte que Marie
aurait posé dans sa maison de Nazareth.
77
La plaque était à l’origine un plateau
de table que son mari Joseph aurait luimême confectionné. D’après une autre
légende, cette maison − appelée aussi
Santa Casa − aurait été transportée par
les anges en l’an 1294 jusqu’à Lorette en
Italie. Ce fut un lieu de pèlerinage marial
prisé en Europe et l’on peut y admirer la
sculpture d’une Vierge noire attribuée à
Luc. Les représentations de Luc furent
particulièrement adorées car elles étaient
considérées comme le portrait authentique de la Vierge Marie15.
La couleur de peau des représentations
n’est pas précisée explicitement dans les
légendes. On pourrait y voir une indication comme quoi les représentations
n’étaient pas, dès le départ, noires mais
l’on ne peut pas l’assurer. Une autre
explication est pourtant elle aussi possible : la peau mate n’était peut être pas
considérée comme un phénomène qu’il
fallait à tout prix mentionner ou encore
méritant explication. En effet, elle passait sans problème dans le schéma présenté par les légendes. Certes, toutes les
représentations n’étaient pas noires, mais
quand elles l’étaient, ceci se comprenait
tout simplement du fait du grand âge de
la représentation et/ou du fait de son origine : la Terre Sainte où poussent d’autres
arbres (c’est à dire un bois plus foncé).
La proximité temporelle et locale de la
personne représentée soulignait l’authenticité de la représentation et aurait pu
suggérer la couleur mate.
Une autre source qui soutiendrait la
perception de ces représentations comme
ayant bien été noires, est constituée par
les copies, à savoir les représentations qui
furent faites à partir des représentations
cultes. Les tableaux votifs à Altötting,
par exemple, montrent une Vierge noire
− mais seulement à partir de 1700 ; auparavant l’image miraculeuse était blanche.
Est-il possible − comme on se plait à le
raconter sur les lieux − que la Vierge ne
fut pas noire à l’origine mais qu’elle le
soit devenue par la suite : cette couleur
ne serait-elle que le résultat de la fumée
des cierges ? Une comparaison avec une
chapelle − également lieu de pèlerinage
et située à environ 30 km de l’autre −
remet fortement cette théorie en question. On y trouve et adule une copie de la
Vierge de Einsiedeln, et sur les tableaux
votifs encore bien conservés, on y voit
le même motif : jusqu’à approximative-
ment 1700, une Vierge blanche et par la
suite une Vierge noire ! Est-il possible
qu’ici aussi − alors que l'on a affaire à
une représentation qui est plus jeune de
150 ans et qui était loin de connaître une
affluence comparable à celle de Altötting
− à la même époque les cierges aient pu
avoir le même effet sur la couleur, et que
de plus, ce phénomène se rencontre sur
les tableaux votifs ?
Non, je ne pense pas que les tableaux
votifs reproduisent « réellement » l’état
dans lequel était la représentation, mais
plutôt la perception que l’on en avait. De
plus, je suis d’avis que les représentations
ne montrent une Vierge noire qu’à partir
de 1700-1750 car ce n’est qu’à partir de
ce moment là que la perception et l’interprétation de la « Vierge noire » existent.
Comment est-ce que ce phénomène à pu
naître et que signifie-t-il ?
Ill. 2 – La vierge noire de Altötting, Bavière. Source : Gerhard P. Woeckel, Pietas Bavarica,
Weissenhorn, 1992.
78 Revue des Sciences Sociales, 2005, n° 34, “Le rapport à l’image”
Monique Scheer
Il est probable que l’apparition des
Vierges noires ait un rapport avec la
remise en valeur des représentations
cultuelles particulièrement prisées par
les Jésuites dans la deuxième partie du
XVIIe siècle. Lors de la Contre-réforme
et des ravages dus à la Guerre de Trente
Ans se développa un grand besoin de
coutumes religieuses. Le culte marial
basé sur des représentations de la Vierge fut particulièrement souligné parce
Les vierges noires
qu’il s’agissait d’une forme importante
de dévotion du catholicisme et qu’il se
distinguait clairement du protestantisme.
Dans la « selektive Tradition »16 (« Tradition sélective ») de la Contre-réforme, ce
sont plus particulièrement des lieux de
pèlerinage mariaux médiévaux ainsi que
des représentations qui semblent dater de
plusieurs siècles qui eurent la préférence.
Il n’était pas possible de prouver de façon
sûre qu’ils avaient été autrefois également
Ill. 3 – Plaques votives du milieu du XVIIe siècle montées sur le mur du site de pèlerinage
d’Altötting. Les images de la vierge ont la peau claire. Source : Robert Bauer, Bayerische
Wallfahrt Altötting, 4ème éd., Regensburg, 1998.
considérés comme miraculeux. Comme
un chercheur en « Volkskunde » religieuse
l’a lui-même dit :
« En raison du manque de preuves
écrites et du fait de traditions orales peu
fiables, il fut dit de lieux de pèlerinage que l’on avait ravivés qu’ils avaient
déjà été le centre d’intérêt de Culte au
Moyen-Âge. En raison du revirement de
situation [Contre-réforme], on ne pouvait
plus s’imaginer un lieu de pèlerinage sans
image miraculeuse. C’est ainsi que des
tableaux et des statues de l’époque prébaroque furent considérés comme ayant
été des représentations mariales de pèlerinages pendant le période médiévale. En
effet, il n’était pas rare que l’on prétende
qu’elles aient été le but de pèlerinage
à cette époque, alors qu’elles ne furent
confectionnées que plus tard »17.
La collecte de légendes ayant trait aux
représentations mariales miraculeuses
commença au XVIIe siècle car elle faisait
partie de la remise en valeur du culte des
représentations. Il faut comprendre cette
tentative de revitalisation en tant « qu’invention d’une tradition » : à savoir en tant
que découverte de formes particulières
dont la signification historique ne s’interprète qu’en rapport aux motivations
et aux besoins de l’époque. La remise en
valeur des images miraculeuses thaumaturgiques est liée à un discours traitant
d’un christianisme pré-réformiste idéalisé et uni dont l’incarnation n’était autre
qu’une forme imaginaire de dévotion
mariale basée sur les représentations de la
Vierge dans les grands lieux de pèlerinage. La description des représentations qui
insiste sur leur ancienneté fait référence
à un Moyen-Âge idéalisé ou encore aux
premiers chrétiens, et s’oppose aux idées
protestantes d’une Église primitive sans
représentation18.
Cette perspective apporte un éclairage
intéressant sur l’histoire des Vierges noires. Elle suggère que celles-ci connurent
l’apogée de leur succès vers la fin du
XVIIe et au cours du XVIIIe siècle parce
qu’elles commencèrent à cette époque à
représenter une tradition médiévale imaginée. La métaphore visuelle du noir et
les légendes qui existaient autour des
représentations faisaient partie d’une
« performance ». Grâce à un soutien
réciproque, elles ensevelissaient l’affirmation prétendant que la représentation
était authentique ; raison pour laquelle la
79
couleur aurait pu être utilisée de façon
plus ou moins consciente par des personnes voulant promouvoir ce culte. Bien
que Hans Belting ne mentionne pas les
Vierges noires en les séparant des autres,
il remarque à ce sujet que : « Le mythe
originel garantit aussi le rang d’un exemplaire unique d’une représentation, il se
calcule par rapport à l’âge de cet exemplaire (ou bien par rapport à sa confection
surnaturelle). L’âge était une qualité et
l’on pouvait relever celle-ci grâce à son
aspect. C’est pourquoi la forme avait,
elle aussi, (de manière réelle ou simulée)
une valeur de souvenir. L’archaïsme en
tant qu’illusion de l’âge fait partie des
signes de reconnaissance d’une nouvelle
représentation cultuelle »19. Certes, les
représentations qui furent prisées par les
Jésuites n’étaient pas toutes noires et je
ne prétends aucunement que c’est dans
ce seul but que les Vierges noires furent
« noircies ». En effet, les Vierges noires ne
sont que peu mentionnées dans la théologie jésuite ayant trait aux représentations.
Cependant la reprise des représentations
dans les récits oraux traditionnels ainsi
que dans la présentation visuelle attira l’attention sur la couleur noire des
représentations et lui donna un sens. Il
n’est pas aussi important de savoir si
cette couleur était déjà présente sur les
représentations de l’époque ou si on a
« aidé » la représentation à devenir noire.
Ce qui est important, c’est que la couleur
est finalement devenue une caractéristique indispensable à ces représentations.
C’est la raison pour laquelle les Vierges
noires sont en quelque sorte davantage
le produit d’une théologie de la Contreréforme basée sur les représentations que
celui d’une piété populaire médiévale. En
effet, la réception populaire de la notion
de Vierge noire ne semble s’établir − du
moins en ce qui concerne l'Allemagne −
qu'au début du XVIIIe siècle comme le
montrent les tableaux votifs.
Et pourtant, quand on pense à la signification péjorative qu’avait la couleur
noire − il s'agissait de la couleur du diable et les pécheurs ainsi que les damnés
avaient la peau noire dans l’iconographie
médiévale20 − il était impossible au clergé
de laisser cette couleur à la libre interprétation hasardeuse des croyants. Ils trouvèrent un soutien pour l’interprétation
de cette couleur dans un vers se trouvant
dans la Bible hébraïque. Dans le Cantique
des Cantiques de Salomon, l’Épouse dit
lors d’un tête-à-tête entre le Bien-aimé et
la Bien-aimée : « je suis noire, et pourtant
belle ». Ce passage était déjà depuis le
IIème siècle sujet à une intensive exégèse.
Il était monnaie courante depuis le XIIe
siècle de voir en l’Épouse du Cantique
des Cantiques la Vierge Marie. C’est ainsi
que les Vierges noires furent incluses de
par l’utilisation de ce vers dans une tradition théologique déjà existante21. Cette
interprétation fut également reprise lors
d’un sermon dans le petit lieu de pèlerinage bavarois dont il était question plus
haut. En 1726, pour le 100e anniversaire
du pèlerinage, le prêtre Benedikt Krumb
expliqua de cette manière la raison pour
laquelle la Vierge était noire : parce que
cela est un signe de son humilité comme
ceci est le cas de l’Épouse dans le Cantique des Cantiques22. Après avoir constaté
que la première image votive conservée
représentant une Vierge noire date de 13
ans après ce sermon, je me suis posé la
question de savoir si ce ne sont pas de tels
sermons qui auraient peut-être éveillé la
conscience des pèlerins et leur auraient
fait remarquer la couleur noire comme
une partie essentielle des représentations.
La question est donc : les Vierges noires
Ill. 4 – Image votive de la vierge d’Altötting datée de 1782. La statue est ici clairement perçue
comme “noire”. Source : Robert Bauer, Bayerische Wallfahrt Altötting, 4ème éd., Regensburg,
1998.
80 Revue des Sciences Sociales, 2005, n° 34, “Le rapport à l’image”
Monique Scheer
ne sont-elles considérées comme telles
qu’à partir du moment où l’on donne
une signification à la couleur de leur
peau ? L’emploi de la phrase : « nigra
sum sed formosa » entraîne cependant,
d’une certaine manière, un déplacement
de sens : on ne parle plus d’une représentation à couleur noire de la Vierge Marie,
mais d’une représentation de la Vierge
Marie noire. La couleur est alors comprise allégoriquement mais l’interprétation de la Madone comme représentation
d’une femme noire marque le début d’un
processus qui mène à des codifications
conflictuelles de l’incarnation noire et
entraîne enfin la disparition de son caractère d’authenticité.
Est-ce que quand les Vierges noires
sont considérées comme étant des représentations de la Vierge Marie en Épouse
du Cantique des Cantiques les représentations sont alors perçues comme la
représentation mariale en tant que femme
africaine ? Lors du sermon anniversaire
de Teising la couleur noire fut interprétée allégoriquement, tout comme c’était
aussi le cas d’une longue tradition de
commentaires du Cantique des Cantiques. Origène fut l’auteur d’une interprétation très influente, il voit en l’Épouse
du Cantique des Cantiques la Reine de
Saba qui elle, était généralement considérée comme étant africaine et qui devait,
aux yeux d’Origène, représenter l’Eglise
païenne23. Cependant la Reine de Saba
fut rarement représentée avec la peau
noire avant le milieu du XVe siècle. Dans
les rares exemples où cela est pourtant le
cas, par ex. l’autel de Nicolas Verdun au
Klosterneuburg (près de Vienne) qui fut
réalisé à la fin du XIIe siècle, la couleur
de peau n’est cependant pas accompagnée des stigmates secondaires typiques
aux africains. De plus, elle est représentée avec de longs cheveux blonds tout
comme la Vierge de Einsiedeln. Il semble
que la couleur noire de l’Épouse du Cantique des Cantiques n’est une connotation
d’origine africaine que si elle est mise en
rapport avec la Reine de Saba et encore
même quand c’est le cas, il semble que
les significations allégoriques aillent dans
le sens de l’interprétation d’Origène24.
Qu’en est-il de la perception des
Hommes d’Afrique au début des Temps
Modernes ? Jusqu’à la fin du XVe siècle,
on faisait plus attention aux aspects symboliques qu’au respect anthropologique
Les vierges noires
lors des représentations des Africains dans
l’Art populaire, comme le fait remarquer
Jean Devisse25. En résumé, au MoyenÂge, pour les Européens, les Africains
faisaient d’abord partie d’un des groupuscules les plus importants et diversifiés
de non-chrétiens − païens ou musulmans
− et cette catégorisation religieuse était
plus importante à cette époque que la
couleur de peau. Ceci se retrouve bien
dans l’appellation médiévale « Maure »
qui est relativement significative d’un
point de vue religieux et ne l’est absolument pas en ce qui concerne la couleur de
peau : ce terme s’adressait plus ou moins
à toute la population du continent africain ainsi qu’à celle du Proche-Orient,
de la Turquie, etc.26. Si l’on considère
cet aspect ambigu de la représentation
visuelle et linguistique des Africains, la
question de savoir si la couleur de peau
mate d’une « vraie représentation » de la
Vierge Marie reflèterait de façon fidèle
son appartenance ethnique, paraît alors
secondaire, en admettant qu’elle se posât
alors. L’apparition de l’interprétation du
nigra sum est le début de cette interrogation, mais une interprétation qui parvient
encore à surmonter les contradictions
qu’elle fait naître.
Cette catégorisation ambiguë de la
peau noire fut peu à peu remplacée vers
la fin du XVIIIe siècle par le nouveau
discours scientifique sur les « races
humaines ». Celui-ci commença vers
1735 lorsque que Carl von Linné classifia les couleurs de peau des hommes
en un système de quatre tempéraments ;
c’est-à-dire qu’il divisa l’humanité en
quatre groupes selon leur couleur : blanc,
noir, rouge et jaune. Le terme actuel de
« Caucasien » vient de Johann Friedrich
Blumenbach qui développa, dans les
années 1770, un système racial divisé en
cinq groupes. C’est à cette même époque
que se fixa l’idée d’homme « blanc » et
d’homme « noir » : avec elle naît la qualification des Africains comme « Maures »,
terme qui fut remplacé vers 1800 par le
mot « Nègre » (en allemand : « Neger » −
un emprunt fait aux langues romanes et
qui reprend le code des couleurs27).
L’accord scientifique affirmant que la
couleur de peau qualifie une race, ne se
rencontre, en ce qui concerne les Vierges
noires dans les discours hors-clergé, qu’à
partir de la première partie du XIXe siècle. Il était auparavant courant chez les
intellectuels qui critiquaient les religions
en général (mais plus particulièrement le
Catholicisme) pour leurs côtés arriérés
et anti-progressistes, de considérer les
Vierges noires simplement comme des
laideurs. C’est le cas de Henry Swinburne qui écrit dans ses souvenirs de voyage
qu’il effectua en Italie en 1783 : « There
are in Italy and elsewhere some dozens
of black, ugly Madonnas » (« Il y a en
Italie et en d’autres lieux quelques douzaines de Vierges noires laides ») qui
sont adulées comme originaux de Luc28.
Comme Swinburne, l’auteur allemand
Theodor Mundt rejette lui aussi la crédibilité de la légende. Il ne montre dans son
récit sur les impressions de son voyage
à Czestochowa édité en 1840 que raillerie pour les pèlerins et leurs formes de
croyance. Mais le côté repoussant de
cette représentation ne se borne pas cette
fois-ci seulement à sa « laideur » : « La
Vierge Marie noire », comme il l’appelle
continuellement, n’évoque pour lui rien
d’autre que des associations ethniques. Il
trouve naturellement absurde la légende
de Luc, tout comme le fait que c’est Sainte-Hélène qui l’aurait trouvée − « Comme
si cela ne suffisait pas que l'on perçoive
cette représentation noire du portrait de la
Mère de Dieu tout d’abord à Byzance où
beaucoup d’éléments égyptiens et éthiopiens auraient participé à l’attribution de
ce coloris de la Vierge Marie »29. Il me
semble tout à fait probable que Theodor
Mundt connaissait l’avis de Goethe −
publié 24 ans plus tôt − sur les Vierges
noires :
« Comment la plus piètre des représentations de la Mère de Dieu, la représentant avec la peau noire, a pu se glisser lors
de certaines occasions : venant d’Égypte,
d’Éthiopie ou d’Abyssinie (…) pourrait
certainement être très clairement prouvé
par des recherches spécialisées de l’Histoire de l’Art de ces localités… »30
Ici on voit tout d’abord, dans le cadre
d’une critique rationaliste des formes du
Catholicisme, comment la peau noire
de la Vierge commence à indiquer une
origine africaine. Je pense que cette perception se serait propagée avec l’ampleur du modèle de pensée sur les « races
humaines ». Il aurait été plus difficile
au cours du XIXe siècle d’expliquer la
raison pour laquelle la représentation de
la Vierge Marie qui fut réalisée lors de
son vivant représente une Africaine. La
81
réduction de la couleur de peau à une
appartenance raciale aurait radicalement
ébranlé le statut antérieur des Vierges
noires. Cette couleur de peau − autrefois
signe de digne dévotion − ne fut alors
plus comprise comme telle, comme le
montre l'exemple de la Vierge de Chastreix qui, lors de sa restauration en 1892,
reçut une nouvelle couche de couleur
noire : après la restauration, la paroisse
se serait plainte de la transformation de
leur Madone en une « négresse ».31 Des
autorités cléricales tout comme le Jésuite
Stephan Beissel rejettent l’interprétation
du nigra sum et argumentent, face à l’interprétation concurrentielle représentée
par la science des religions comparées,
que la couleur de peau n’est le résultat
que du hasard32. Il est en effet préférable
de faire disparaître la couleur noire en
faisant référence à la couleur « réelle »
qui se trouve en dessous. C’est encore le
cas à l’heure actuelle comme le montre
une déclaration du journal espagnol El
Mundo : « ‘La Moreneta’ es blanca »33.
La presse allemande y rajoutera : « Die
schwarzbraune Madonna von Montserrat
ist in Wirklichkeit weiß » (« La Vierge
noire de Montserrat est en réalité blanche ».)34 L’effet d’authenticité de la couleur avait disparu et avec lui aussi la base
pour une argumentation consciente (ou
inconsciente) de l’échelle des valeurs de
ces représentations. On fit à ce moment
des Vierges noires l’énigme que l’on connaît encore aujourd’hui.
Quelles valeurs symboliques ont les
Vierges noires aujourd’hui ? Ce sont les
disciples d’une religiosité plutôt anticléricale et centrée sur la Femme35 qui
s’intéressent actuellement le plus à elles.
Cependant la Madone n’a pas pour autant
perdu sa valeur religieuse traditionnelle :
le plus grand pèlerinage marial au monde
est à l’heure actuelle celui de la Vierge de
Guadalupe à Mexico. Elle est considérée comme étant une Vierge noire même
si elle n’est pas typique en son genre.
Cette représentation tient son appellation d’une Vierge noire d’Espagne dont
le culte de dévotion connut son apogée
lors de la « Découverte » du Mexique et
qui fut introduite dans le pays comme
protectrice des Conquistadores. De plus,
son iconographie venant également de la
meilleure tradition européenne est justement de couleur noire ! Cependant elle
est considérée par les Mexicains comme
une des leurs justement parce qu’elle est
représentée avec le teint mat36. L’image
fut imprimée spontanément sur la cape
du devin après une apparition mariale,
il s’agit donc d’un « vrai portrait ». Ici
la valeur symbolique de la couleur noire
est un signe ethnique qui pourrait être
directement lié à la tradition européenne
(le noir représentant l’authentique). À
Einsiedeln, se passe peu à peu quelque
chose de similaire : lors d’une discussion
sur les lieux, un père bénédictin m’a tout
d’abord dit que la couleur noire n’était le
résultat que d’un « hasard » − une sorte
de "mégarde ». Mais il a par la suite
remarqué que les réfugiés africains et
tamouls qui ont trouvé refuge à Einsiedeln, et que l’on voit très régulièrement
à l’église, se réjouissent peut-être que la
Mère de Dieu, sujet de dévotion, soit ici,
une femme noire. Il semble possible que
le multiculturalisme en Europe ouvre la
porte à de nouvelles interprétations des
Vierges noires.
Traduit de l’allemand par
Nathalie Peillex
Notes
1. Les chercheurs se posent cette question
dès qu’ils sont confrontés à ce sujet, cf.
par ex. Leonard W. Moss et Stefen C.
Cappannari : In quest of the black virgin : she is black because she is black, in
James J. Preston (ed.) : Mother Worship.
Theme and Variations, Chapel Hill, 1982,
p. 53-74. Kröll, Ursula : Das Geheimnis
der schwarzen Madonnen. Entdeckungsreisen zu Orten der Kraft, Stuttgart, 1998,
p. 175. Birnbaum, Lucia Chiavola : Black
madonnas. Feminism, religion and politics in Italy, Boston, 1993, p. 41.
2. Titres de quelques publications sur ce
sujet, comme par ex. Jacques Huynen :
L‘énigme des Vierges Noires, Paris, 1972 ;
Franz A. Schmitt : Vom Geheimnis der
Schwarzen Madonnen, in Königsteiner
Jahrbüchlein, Königstein i. Taunus, 1957,
p. 85-87.
3. Dans l’article traitant des images miraculeuses dans le « Handbuch der Marienkunde » ce sujet n’est même pas abordé. Il est
même tu, dans le long article sur la Vierge
de Lorette où l’on ne trouve pas une ligne
signalant qu’il s’agit d’une Vierge noire
82 Revue des Sciences Sociales, 2005, n° 34, “Le rapport à l’image”
célèbre dont la couleur fut reprise dans
des centaines de copies faites au cours
du XVIIe siècle. (Karl Kolb : Typologie
der Gnadenbilder, in Wolfgang Beinert/
Heinrich Petri (ed.) : Handbuch der Marienkunde. 2e Ed., Regensbourg, 1997, p.
449-482, cf. p. 467-468). Le Clergé réagit
lui aussi de manière réticente. Comme
Leonard Moss n’obtint aucune réponse
à sa question : « pourquoi est-elle noire »
qu’il posa à un prêtre italien, il décida de
s’intéresser de très près lui-même à ce
sujet. Lorsqu’il présenta le résultat de ses
recherches lors d’un congrès scientifique
en 1952, un grand nombre de Religieux et
de femmes appartenant à un ordre auraient
quitté la salle de façon très significative.
(Moss / Cappannari, p. 54-55). Ursula
Kröll relate des faits similaires. Alors
qu’elle demandait à un prêtre Capucin
de Stühlingen : « « Savez-vous pourquoi
votre Madone est noire ? », « Oui, parce
qu’elle l’est « , lui répondit-il (…) Cela
n’a pas une grande signification. Mais
en tous cas, elle ne vient pas d’Afrique. »
(Kröll, p.175).
4. On trouve une approche semblable des
Vierges noires dans le livre de Klaus
Schreiner : Maria. Jungfrau, Mutter, Herrscherin, Munich, 1994, p. 213-248.
5. Les idées fondamentales de cet essai sont
présentées dans : Monique Scheer : From
majesty to mystery : Change in the meanings of black madonnas from the 16th to
the 19th centuries, American Historical
Review, décembre 2002, p. 1412-1440.
6. Comme Moss et Cappannari
7. Stefen Benko : The virgin goddess. Studies in the pagan and Christian roots of
Mariology, Leiden, 1993 (Studies in the
history of religions, 59) p. 213-216.
8. Frederick Gustafson : The black Madonna,
Boston, 1990.
9. Par exemple : Marie Durand-Lefébvre :
Étude sur l’origine des Vierges noires,
Paris, 1937 ; Emile Saillens : Nos vierges
noires, leurs origines, Paris, 1945 ; Sophie
Cassagnes-Brouquet : Vierges Noires.
Regard et Fascination, Rodez, 1990.
10. Ce désir n’est valable − ce qui est bien
connu − que pour l'histoire moderne de
cette matière. On retrouve l’origine de
la « Kontinuitätstheorie » (« théorie de la
continuité ») ayant trait aux Vierges noires
dans la Volkskunde allemande de Jacob
Grimm, Deutsche Mythologie, Graz, 1968
(livre contrefait à partir de la 4e édition de
1875-8), p. 195, remarque 1. Cependant
Hermann Sökeland s’était exprimé à l’encontre de la thèse qui expliquait « l’assombrissement » de la peau des Vierges noires
par l’effet du temps. Cf. Dunkelfarbige
Marienbilder, in Zeitschrift des Vereins für
Volkskunde 18 (1908), p. 281-295.
Monique Scheer
11. Cf. Schreiner, p. 240.
12. Les pèlerins allemands qui partaient
pour Saint-Jacques de Compostelle ou
Rome prenaient souvent le chemin passant par Einsiedeln. Cf. Theodor Hampe :
„Deutsche Pilgerfahrten nach Santiago
de Compostella und das Reisetagebuch
des Sebald Örtel (1521-22)“, Mitteilungen
aus dem Germanischen Nationalmuseum (1895), p. 61-82 ; Hermann Künig
von Vach : Die Walfahrth und Straß zu
Sankt Jakob (Strasbourg, 1495) ; Reisebuch der Familie Rieter, R. Röhricht and
H. Meisner, eds. (Tübingen, 1884) (Bibliothek des literarischen Vereins in Stuttgart, 168) ; Des böhmischen Herrn Leo‘s
von Rožmital Ritter-, Hof- und Pilgerreise durch die Abendlande 1465-1467.
Beschrieben von zweien seiner Begleiter : J. A. Schmeller, ed. (Stuttgart, 1844))
(Bibliothek des literarischen Vereins in
Stuttgart, 7).
13. Les classiques de ce genre : Guilielmo
Gumppenberg : Atlas Marianus sive de
imaginibus Deiparae per orbem Christianum miraculosis, Volumes I et II, Ingolstadt, 1657 ; et Guilielmo Gumppenberg :
Atlas Marianus quo Sanctae Dei genitricis Mariae imaginum miraculosarum
origines duodecim historiarum centuriis
explicantur, Munich, 1672.
14. Le corpus de cette estimation est de quelques 60 légendes, extraites de recueils
réalisés par Gumppenberg ainsi que par
Wilhelm Herchenbach : Die heiligen
katholischen Gnaden- und Wallfahrtsorte
mit den Heiligthümern und Reliquien.
Nach geschichtlichen Quellen und Legenden, Stuttgart/Nürtingen, 1884. Cf. également : Stephan Beissel : Diskussionen zu
Legenden und Wallfahrtsorten. Wallfahrt
zu Unserer Lieben Frau in Legende und
Geschichte, Fribourg-en-Brisgau, 1913 ;
et Cassagnes-Brouquet : p. 39-74.
15. Cf. David Freedberg : The Power of Images. Studies in the History and Theory
of Response, Chicago/London, 1989,
p. 205-212. pour une discussion sur la
croyance que : une représentation authentique (vera effigies) est particulièrement
miraculeuse et digne de dévotion.
16. Wolfgang Brückner : Erneuerung als
selektive Tradition. Kontinuitätsfragen im
16. und 17. Jahrhundert aus dem Bereich
der konfessionellen Kultur, in Der Übergang zur Neuzeit und die Wirkung von
Traditionen, Göttingen, 1978 (Veröffentlichungen der Joachim Jungius-Gesellschaft der Wissenschaft 32).
17. Hans Dünninger : Zur Geschichte der
barocken Wallfahrt im deutschen Südwesten, Barock in Baden-Württemberg. Vom
Ende des Dreißigjährigen Krieges bis
zur Französischen Revolution, Ausstel-
Les vierges noires
lungskatalog, Badisches Landesmuseum
Karlsruhe, Vol. 2. Bruchsal 1981, p. 415.
18. Cf. Hans Belting : Bild und Kult. Eine
Geschichte des Bildes vor dem Zeitalter
der Kunst, Munich 1990, p. 26. Des traités
(tractati) influents d’images théologiques,
de l’après Concile de Trente, d’auteurs
italiens de la fin du XVIe siècle mettent
également l’accent sur une longue tradition comme facteur de légitimation pour
une utilisation adéquate des représentations. Christian Hecht propose un aperçu
général détaillé dans : Christian Hecht :
Katholische Bildertheologie im Zeitalter
von Gegenreformation und Barock. Studien zu Traktaten von Johannes Molanus,
Gabriele Paleotti und anderen Autoren,
Berlin, 1997.
19. Belting : Bild und Kult, p. 24.
20. Le noir est interprété depuis l’Antiquité
comme étant l’incarnation de tout ce qui
est négatif et de l’Autre. Cf. Theodor
Klauser u.a.(Hg.) : Reallexikon für antike
und Christentum, Stuttgart, 1950-1998,
s.v. Farbe. Dans la Culture populaire allemande le noir avait une très forte connotation négative. Cf. Hans Bächtold-Stäubli
(Hg.) : Handwörterbuch des deutschen
Aberglaubens, Berlin/New York, 1987
(Unveränderter Nachdruck der Erstaufgabe von 1927-1942), s.v. Farbe.
21. Cf. Schreiner, p. 239-242.
22. Cette source fut citée et commentée de
façon détaillée par Martin Lechner :
„Schön schwarz bin ich“ − zur Ikonographie der schwarzen Madonna der Barockzeit, in Heimat an Rott und Inn (Sans lieu
d’édition), 1971, p. 44-61.
23. Origène voyait en l’Eglise païenne un rôle
positif, raison pour laquelle il recommanda comme traduction de cette phrase : « je
suis noire et belle ». Cf. Ernst Benz : „‚Ich
bin schwarz und schön’ (hohes Lied 1,5).
Ein Beitrag des Origenes zur Theologie
des negritudo“, in Hans-Jürgen Greschat/
Hermann Junggraithmayr (eds) : Wort
und Religion. Kalima na dini. Studien
zur Afrikanistik, Missionswissenschaft,
Religionswissenschaft, Stuttgart, 1969,
p. 225-242.
24. Paul H. D. Kaplan : The Rise of the Black
Magus in Western Art, Ann Arbor, 1985
(Studies in the fine arts. Iconography 9),
p. 42.
25. Jean Devisse : The image of the Black
in Western Art, Vol. II. From the Early
Christian Era to the ‘Age of Discovery’.
Part 1 – From the Demonic Threat to
the Incarnation of Sainthood, Cambridge/
Londres, 1979 (Publications of the Menil
Foundation, Inc. Ladislas Bugner, Ed.),
p. 136.
26. La recherche très complète de Peter Martin
concernant la perception des Africains en
Allemagne présente une discussion plus
élaborée du sujet : Peter Martin : Schwarze
Teufel, edle Mohren, Hambourg, 1993,
p. 83. Le terme de « Maure » était d’une
certaine manière un signe de respect, le
« Maure » représentait en effet une Haute
Culture (voire même une Culture supérieure) et était craint comme un Incroyant
agressif et militaire. Cf. Kaplan, Black
Magus, p. 4.
27. À propos de la notion de race dans les
régions germanophones, voir : Martin :
Schwarze Teufel ; et Sander, Gilman : On
Blackness without Blacks. Essays on the
image of the Black in Germany, Boston,
1982.
28 Travel in the Two Sicilies, Vol. I. Londres
1783, p. 123 ; cité dans Moss / Cappannari, p. 64-65.
29. Theodor Mundt : Völkerschau auf Reisen,
Vol. 1, Stuttgart, 1840, p. 234.
30. « Wie sich aber die tristeste aller Erscheinungen eingeschlichen, daß man, wahrscheinlich aus ägyptischen, äthiopischen,
abyssinischen Anlässen, die Mutter Gottes
braun gebildet... mag sich bey besonderer
Bearbeitung der Kunstgeschichte jenes
Theils genauer nachweisen lassen... » :
Johann Wolfgang von Goethe : Ästhetische Schriften 1816-1820. Über Kunst
und Altertum I-II, Hendrik Birus Ed.,
Frankfort-sur-le-Main, 1999 (Sämtliche
Werke. Briefe, Tagebücher und Gespräche. Vol. 20), p. 75/76.
31. B. Craplet : « Vierges romanes », Richesses de la France, Le Puy-de-Dôme, 44
(1960) : p. 66-68. Cité dans Ileene Forsyth, Throne of wisdom. Wood sculptures
of the Madonna in Romaesque France,
Princeton 1972, p. 21.
32. Cf. Stephan Beissel : Geschichte der Verehrung Marias in Deutschland während
des Mittelalters. Ein Beitrag zur Religionswissenschaft und Kunstgeschichte,
Fribourg-en-Brisgau, 1909, p. 345-346.
33. 15 Avril 2001.
34. 26 Avril 2001.
35. Il s’agit d’un groupe qui voit dans les
Vierges noires le successeur des Grandes
Déesses pré-chrétiennes. Cf. Birnbaum,
Kröll et Begg, Ean : The cult of the black
virgin, Londres, 1985.
36. À propos de la perception de la Vierge
noire de Guadalupe dans les interviews
citées par Daniel Andersson : The Virgin
znd the Dead. The Virgin of Guadalupe
and the day of the Dead in the Construction of Mexican Identities, Göteborg,
2001. Cf. également : Stafford Poole :
Our Lady of Guadalupe. The origins and
sources of a Mexican national symbol,
1531-1797, Tucson / Arizona, 1996.
83

Documents pareils