Société civile agricole et activité commerciale

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Société civile agricole et activité commerciale
Chronique Juridique
03/07/2012
Pour parution Vienne Rurale 05/07/12
GAEC et prestations de service sont incompatibles.
Les GAEC sont souvent tentés de compléter leurs revenus par des prestations de nature
commerciale (travaux agricoles, achats pour revente, prestations de traitements antiparasitaires,
production et revente d’électricité photovoltaïque….). On entend souvent dire que ces activités
sont « tolérées » dans la limite de « 30% » des recettes agricoles. En réalité, il y a confusion entre
la fiscalité et le droit.
L’origine de la confusion : la fiscalité
La confusion vient du principe de rattachement des produits des activités accessoires commerciales
(qui relèvent de la catégorie d’imposition des bénéfices industriels et commerciaux, « BIC ») aux
bénéfices agricoles (« BA »), pour les exploitants soumis à un régime réel d’imposition1.
Toutefois, ces dispositions ne sont que des tolérances fiscales.
Or, les sociétés agricoles ne peuvent avoir qu’un objet civil agricole. Et cet objet ne tolère pas les
activités commerciales, même accessoires…et les prestations de service sont des activités
commerciales !
L’objet agricole : la définition juridique
Les GAEC, en tant que sociétés civiles d’exploitation agricole, ont pour objet l’exercice d’activités
agricoles. Cette notion est définie par le code rural, dans son article L.311-1. Les activités réputées
agricoles sont donc les activités de production (végétales ou animales), les activités qui sont le
prolongement de la production (comme la transformation et la vente des produits) ou les activités
qui « ont pour support l’exploitation » (par exemple les activités de tourisme et d’hébergement à la
ferme). Il est à noter que les activités de culture marine sont des activités agricoles.
On assimile également à l’activité agricole la préparation et l’entraînement des chevaux (pour les
centres équestres, à l’exception des activités de spectacle), la production et la commercialisation
de biogaz, d’électricité et de chaleur par méthanisation, si au moins la moitié des matières utilisées
proviennent de l’exploitation.
Il faut mentionner également la production d’énergie photovoltaïque, qui depuis la loi Grenelle II
du 12 Juillet 20102 est autorisée dans les sociétés civiles agricoles dans les limites de la tolérance
fiscale.
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Ce principe trouve deux applications en agriculture :
possibilité de rattacher aux BA les recettes accessoires commerciales, lorsque la moyenne annuelle
des recettes accessoires commerciales des trois années civiles précédant la date d’ouverture de
l’exercice ne dépasse ni 30% des recettes tirées de l’activité agricole, ni 50 000 euros (Article 75 du
Code Général des Impôts).
possibilité de rattacher aux BA les recettes provenant des activités photovoltaïques et éoliennes, si au
titre de l’année civile précédant la date d’ouverture de l’exercice, les recettes provenant de ces
activités, majorées des recettes des activités accessoires prises en compte pour la détermination des
bénéfices agricoles en application de l’Article 75 ci-avant, n’excèdent ni 50% des recettes tirées de
l’activité agricole, ni 100 000 euros (Article 75 A du Code Général des Impôts).
Loi n°2010-788 du 12 juillet 2010
Par conséquent, en dehors des possibilités offertes par l’article L.311-1 et la loi Grenelle II, il n’est
pas possible d’exercer une activité commerciale au sein d’une société civile agricole. Les GAEC sont
donc concernés.
Que risque-t-on ?
Un juge pourrait considérer que l’objet de la société est illicite et dans ce cas la sanction encourue
serait la nullité de la forme sociale (article 1844-10 alinéa 1 du Code civil). On pourrait également
considérer que l’exercice d’une activité commerciale fait apparaître une société de fait
commerciale, avec pour conséquence une responsabilité solidaire et indéfinie de chaque associé
vis-à-vis des tiers, pour les dettes de la société.
Une société civile pourrait également être condamnée à des dommages et intérêts pour
concurrence déloyale. Ce fut le cas d’un GAEC, condamné par la Cour d’Appel de Versailles le 10
février 1994, pour avoir exercé une activité de travaux agricoles.
Si les sanctions ci-dessus peuvent concerner toutes les sociétés civiles d’exploitation agricole
(EARL, GAEC, SCEA), les GAEC encourent une sanction supplémentaire : la suppression de leur
agrément, indispensable pour se prévaloir la forme juridique « GAEC ».
Cette sanction a notamment été rappelée dans la circulaire du 27 avril 2011 en ces termes : « il
appartient au comité départemental des GAEC de prononcer ce retrait d’agrément pour tout
dysfonctionnement de ce type (exercice de prestations de service) au sein du GAEC, qui ne
respecterait pas la réglementation en vigueur ».
Que faire si on veut tout de même exercer ce type d’activités ?
Un conseil : Préférez la création d’une nouvelle structure, qui sécurisera vos opérations.
Nathalie MICHEL,
Chambre d’Agriculture de la Vienne
Tel : 05.49.44.74.74
Permanence téléphonique : tous les jours de 9 H 00 à 12 H 00
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