Protocole recherche CMDO
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LA PROMOTION DE LA SAINE ALIMENTATION CHEZ DES FEMMES ENCEINTES À RISQUE DE DÉVELOPPER DU DIABÈTE GESTATIONNEL Protocole de recherche Lydi-Anne Vézina-Im, Ph.D. (cand.)1,2 Étudiante au doctorat en nutrition Julie Robitaille, Ph.D., Dt.P.1,2,3 Professeure agrégée et directrice de recherche Simone Lemieux, Ph.D., Dt.P. 1,2 Professeure titulaire et co-directrice de recherche 1. Département des sciences des aliments et de nutrition, Faculté des sciences de l’agriculture et de l’alimentation, Université Laval 2. Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels (INAF), Université Laval 3. Axe endocrinologie et néphrologie, Centre de recherche du CHU de Québec 1 Mise en contexte du projet Le diabète gestationnel se définit comme une intolérance au glucose qui apparaît ou qui est diagnostiquée pour la première fois durant la grossesse1. Au Canada, la prévalence du diabète gestationnel chez la population non autochtone est de 3,7%1. Les facteurs de risque pour le diabète gestationnel sont : 1) diagnostic antérieur de diabète gestationnel, 2) accouchement d’un enfant de poids élevé, 3) origine ethnique à haut risque (autochtone, hispanique, sudasiatique ou africaine), 4) âge de 35 ans ou plus, 5) indice de masse corporel de 30 kg/m2 ou plus, 6) syndrome des ovaires polykystiques, 7) acanthosis nigricans et 8) prise d’un corticostéroïde1. Le diabète gestationnel peut avoir de graves conséquences pour la femme enceinte et pour le fœtus. À titre d’exemple, les femmes avec un diabète gestationnel sont à risque de développer du diabète de type 2 après leur grossesse2 et les enfants de ces femmes sont à risque de développer de l’obésité, de l’intolérance au glucose et du diabète3. Des études prospectives ont démontré qu’une alimentation saine, riche en fruits et légumes, pourrait diminuer le risque de développer le diabète gestationnel4 et le diabète de type 25. L’effet positif des fruits et légumes sur le diabète serait en partie causé par leur teneur élevée en fibres, en nutriments antioxydants et en magnésium6. Ils pourraient également être bénéfiques pour prévenir l’apparition du diabète en ayant un impact sur le poids corporel6. En fait, notre groupe de recherche a démontré que le gain de poids excessif, particulièrement lors du premier trimestre, était associé à un risque accru de développer le diabète gestationnel7. Il est donc possible que la consommation de fruits et légumes ait un impact positif sur le diabète gestationnel en permettant de limiter le gain de poids gestationnel. Une récente méta-analyse8 indique que l’utilisation d’interventions de type activation des intentions est efficace pour promouvoir la saine alimentation chez la population générale avec une taille d’effet moyenne (d de Cohen : 0,50). L’activation des intentions est une technique théorique de changement du comportement qui implique la complétion d’un questionnaire qui comporte une liste de situations problématiques de type si (e.g., Si je suis pressée…) et de solutions de type alors (…alors je vais utiliser des légumes surgelés déjà apprêtés)9,10. Cet outil permet de surmonter les barrières pouvant nuire à l’adoption du comportement en permettant aux individus d’anticiper les situations nuisibles et en prévoyant à l’avance une réponse appropriée11. Cette stratégie post-motivationnelle est indiquée lorsque des individus ont une intention élevée d’adopter un comportement, mais ils ne passent pas à l’acte. Or, une étude récente menée chez 108 femmes ayant déjà été atteintes de diabète gestationnel a indiqué que ces femmes avaient une intention élevée (score moyen de 3,7 ± 0,8 sur 5) d’adopter une saine alimentation et qu’aucune d’entre elles n’atteignait les portions recommandées pour tous les groupes alimentaires du Guide alimentaire canadien12. Ce résultat est similaire à ceux d’études précédentes qui avaient identifiés que la consommation de fruits et légumes des femmes avec un antécédent de diabète gestationnel est généralement en-deçà des portions recommandées13,14. En effet, dans le cadre d’une étude menée auprès de 226 femmes diagnostiquées avec un diabète gestationnel au cours des 6 à 24 derniers mois, seulement 5% d’entre elles consommaient cinq portions de légumes et deux portions de fruits par jour14. Enfin, à notre connaissance une intervention de type activation des intentions n’a jamais été testée chez des femmes enceintes à risque de développer du diabète gestationnel afin de les encourager à consommer des fruits et légumes. Hypothèses et objectifs L’objectif est d’évaluer l’efficacité d’une intervention de type activation des intentions chez des femmes enceintes à risque de développer du diabète gestationnel. 2 Les hypothèses sont : 1. Les femmes enceintes exposées à l’intervention auront une augmentation significativement plus élevée de la quantité quotidienne moyenne de fruits et légumes consommée comparativement à celles du groupe contrôle. Par le fait même, une plus grande proportion de femmes enceintes du groupe expérimental aura une consommation quotidienne de fruits et légumes qui respectent les 7 à 8 portions quotidiennes recommandées par le Guide alimentaire canadien15 comparativement à celles du groupe contrôle. 2. Les femmes enceintes exposées à l’intervention auront un gain de poids gestationnel moyen à chaque trimestre et un gain de poids gestationnel total moins élevés comparativement à celles du groupe contrôle. Ainsi, une plus grande proportion de femmes enceintes du groupe expérimental aura un gain de poids gestationnel qui respecte les recommandations de l’Institute of Medicine16 sur le gain de poids gestationnel comparativement à celles du groupe contrôle. 3. À la fin de la grossesse, une proportion moins importante de femmes enceintes exposées à l’intervention aura un test de diagnostic du diabète gestationnel positif comparativement à celles du groupe contrôle. Méthodologie Population à l’étude et critères d’admissibilité Un échantillon de 150 femmes enceintes à risque de développer du diabète gestationnel (75 pour le groupe expérimental et 75 pour le groupe contrôle) sera nécessaire. Ce calcul de la taille de l’échantillon a été effectué en spécifiant les éléments suivants dans le logiciel GPower : 1) type de test : différence entre deux moyennes indépendantes «two-tailed», 2) taille d’effet : 0,50, selon la méta-analyse sur l’efficacité de l’activation des intentions pour augmenter la saine alimentation chez la population générale8, 3) niveau alpha : 0,05, 4) puissance statistique : 80%, 5) ratio d’allocation : 1, 6) nombre de groupes : 2 (expérimental et contrôle) et 7) taux d’attrition : 15%. Pour être admissibles à l’étude, les femmes enceintes devront répondre à un des huit facteurs de risque pour le diabète gestationnel selon l’Association canadienne du diabète1, soit : 1) diagnostic antérieur de diabète gestationnel, 2) accouchement d’un enfant de poids élevé, 3) origine ethnique à haut risque (autochtone, hispanique, sud-asiatique ou africaine), 4) âge de 35 ans ou plus, 5) indice de masse corporel de 30 kg/m2 ou plus, 6) syndrome des ovaires polykystiques, 7) acanthosis nigricans et 8) prise d’un corticostéroïde. Les femmes ayant un diabète de type 1 ou 2 avant le début de leur grossesse, ayant accouché prématurément (<37 semaines) ou avec grossesse multiple seront exclues de l’étude. L’admissibilité à participer à l’intervention sera vérifiée lors d’un appel téléphonique avec la responsable de l’étude, Lydi-Anne Vézina-Im (418-656-2131, poste 6639). Approche méthodologique La complétion d’un questionnaire est la modalité d’intervention. En fait, la technique d’activation des intentions est généralement effectuée à l’aide d’un questionnaire autoadministré9. L’intervention sera effectuée en début de grossesse (entre la 10e et la 12e semaine de gestation). Les participantes du groupe expérimental recevront un formulaire de consentement et un questionnaire comprenant deux sections (questionnaire version A): 1) mesure des cognitions (e.g., intention, efficacité personnelle) et 2) activation des intentions. La section 1 du questionnaire portera sur la mesure des cognitions et sera composée d’items sur les croyances associées à la consommation de légumes et d’autres sur la consommation de fruits puisque ce sont deux comportements distincts. Ces questions seront mesurées à l’aide d’échelle de type Likert à 5 points (e.g., très en désaccord, plutôt en désaccord, ni en 3 désaccord, ni en accord, plutôt en accord, très en accord). Il y aura au moins trois items par construit (intention et efficacité personnelle) afin de permettre le calcul de coefficients alpha de Cronbach17, un indice de la consistance interne d’un construit. Les items avec un coefficient alpha inférieur à 0,70 ne seront pas conservés dans l’analyse finale puisqu’ils auraient une fidélité jugée trop faible18. La section 2 du questionnaire portera sur l’activation des intentions sera basée sur les croyances saillantes modales concernant les barrières, facteurs facilitant et pistes de solutions qui auront été identifiées lors du volet 3. Cette section du questionnaire est présentement en développement. Les participantes du groupe contrôle recevront un formulaire de consentement et un questionnaire contenant uniquement la section 1 sur la mesure des cognitions (questionnaire version B). La consommation de fruits et légumes et les cognitions seront évaluées au début de l’intervention et à chaque trimestre de la grossesse. La consommation de fruits et légumes sera mesurée à l’aide du questionnaire de Godin et ses collaborateurs19. Ce type d’outil de mesure auto-déclarée de l’alimentation a été sélectionné compte tenu de sa facilité à être complété seul par les participantes20. Les participantes auront également à compléter un journal alimentaire de trois jours en début et en fin de grossesse afin d’avoir un portrait d’ensemble de leur alimentation en début et à la fin de l’intervention. Les données nutritionnelles recueillies à l’aide du journal alimentaire serviront à évaluer les apports alimentaires des femmes enceintes et par le fait même, à produire le bilan alimentaire qui leur sera remis à la fin de l’intervention afin de les remercier pour leur participation au projet. Tous les documents seront distribués dans des enveloppes pré-adressées et préaffranchies. Les mesures du gain de poids gestationnel seront effectuées par le médecin lors des visites médicales, soit pour la durée totale de la grossesse et pour chaque trimestre. Le diagnostic du diabète gestationnel sera obtenu selon les critères de diagnostic de l’Association canadienne du diabète1. Pour les femmes enceintes suivies dans un hôpital du CHU de Québec et qui nous donneront leur autorisation, les mesures de gain de poids gestationnel et le résultat du test de diagnostic du diabète gestationnel seront obtenus à partir de leurs dossiers médicaux. Pour les femmes suivies dans un autre établissement ou qui auront refusé l’accès à leur dossier médical, ces mesures seront auto-rapportées deux semaines après la date prévue de l’accouchement lors d’un appel téléphonique effectué par la responsable de l’étude. Analyses statistiques La principale variable dépendante est la consommation quotidienne moyenne de fruits et légumes au cours des trois trimestres de la grossesse. Les autres variables dépendantes secondaires sont le gain de poids gestationnel moyen à chaque trimestre de la grossesse, le gain de poids gestationnel total et l’issue du test de dépistage du diabète gestationnel à la fin de la grossesse. La consommation quotidienne moyenne de fruits et légumes, le gain de poids gestationnel moyen à chaque trimestre et le gain de poids gestationnel total sont des variables continues alors que le test de dépistage du diabète gestationnel est de par sa nature une variable dichotomique (test positif ou négatif). Avant de débuter les analyses statistiques, nous allons premièrement vérifier l’équivalence du groupe expérimental et contrôle (randomization check). Si nécessaire, nous allons considérer certaines variables comme covariables dans les analyses. Ensuite, un modèle linéaire mixte (proc mixed) sera utilisé pour tester si le groupe expérimental a augmenté sa consommation quotidienne moyenne de fruits et légumes durant la grossesse comparativement au groupe contrôle (objectif 1). Le même type d’analyse statistique sera utilisé pour tester si le groupe expérimental a limité son gain de poids moyen à chaque trimestre et son gain de poids total (objectif 2). Le principal avantage de l’utilisation du modèle linéaire mixte est qu’il permet des analyses longitudinales 4 pour des études ayant des données manquantes21. Un modèle mixte généralisé (proc genmod) sera utilisé pour tester si l’exposition à l’intervention de type activation des intentions a permis de prévenir l’apparition du diabète gestationnel à la fin de la grossesse (objectif 3). Cette analyse est une extension du modèle linéaire mixte qui permet d’avoir une variable dépendante dichotomique21. Enfin, nous allons vérifier si l’effet de l’intervention s’explique par un changement dans les cognitions à travers le temps à l’aide d’analyses de médiation. Toutes les analyses seront effectuées avec SAS (SAS Institute, Inc., Cary, NC) avec un niveau alpha fixé à 0,05. Contributions à l’avancement des connaissances Le projet de recherche permettra l’implantation d’une intervention de type activation des intentions et ainsi d’évaluer l’efficacité de ce type d’intervention chez des femmes enceintes à risque de développer du diabète gestationnel. Ce volet contribuera à l’avancement des connaissances dans le domaine de la promotion de la santé, car à notre connaissance, une intervention de type activation des intentions n’a jamais été testée chez des femmes enceintes à risque de développer du diabète gestationnel afin de les encourager à consommer des fruits et légumes. Dans l’éventualité où une intervention de type activation des intentions s’avérerait efficace, elle pourrait être implantée en milieu clinique. Par exemple, elle pourrait être appliquée par les nutritionnistes qui sont en charge de rencontrer les femmes enceintes ayant un diabète gestationnel afin de les aider à augmenter et/ou maintenir leur consommation de fruits et légumes et ainsi favoriser la gestion de leur glycémie et/ou poids corporel durant leur grossesse. Enfin, en raison de ses conséquences importantes sur la santé des individus qui en sont atteints et de leurs proches, de sa prévalence grandissante et des coûts élevés qui lui sont associés, il n’est pas surprenant que la prévention du diabète demeure une priorité de santé publique pour l’Organisation mondiale de la santé22, l’Agence de la santé publique du Canada23 et l’Institut national de santé publique du Québec24. Il est ainsi tout à fait justifié de mettre en place et d’évaluer l'impact d’une intervention de type activation des intentions dont l’efficacité a été démontrée pour promouvoir la saine alimentation chez la population générale, chez des femmes enceintes à risque de développer du diabète gestationnel afin de les encourager à consommer des fruits et légumes. 5 Bibliographie 1. Association canadienne du diabète. Lignes directrices de pratique clinique 2008 de l'Association canadienne du diabète pour la prévention et le traitement du diabète au Canada. Can J Diabetes. 2008;32(Suppl. 1):s1-s225. 2. Bellamy L, Casas JP, Hingorani AD, Williams D. Type 2 diabetes mellitus after gestational diabetes: a systematic review and meta-analysis. Lancet. May 23 2009;373(9677):1773-1779. 3. American Diabetes Association. Gestational diabetes mellitus. Diabetes Care. 2004;27(suppl. 1):s88-s90. 4. Zhang C, Schulze MB, Solomon CG, Hu FB. 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