“He`s earned his stripes!” « Il a gagné ses

Transcription

“He`s earned his stripes!” « Il a gagné ses
rail tales histoires sur rails
by // par robert lévesque
Camillien Houde
“He’s earned
his stripes!”
« Il a gagné
ses épaulettes ! »
camillien houde (at podium) and maurice duplessis (laughing).
Assis à l’avant et s’esclaffant avec camillien houde,
maurice duplessis.
© Fonds camillien houde, Bibliothèque et Archives nationales du Québec
/ Direction du Centre d’archives de Montréal
Georgette Houde and her three daughters made an elegant arrival in Sherbrooke on August 14,
1944. A legislator loyal to her husband had driven them
there. The day was to be a triumphant, maybe even historic one: the federal government had just freed prisoner
Camillien Houde, the former mayor of Montreal, from its
internment camp in Fredericton, New Brunswick. Camillien, as he was known to his voters, was finally going to
return to his city. Four years earlier, on August 5, 1940, the
Mounties had taken him into custody outside city hall for
having expressed public opposition to the conscription of
French Canadians. Ever the wag, he sang “Alouette, gentille
alouette...”
Taken overnight to Camp Petawawa, in Ontario, the huge
and colourful ex-mayor (who had been unceremoniously
stripped of his office), had become prisoner 694—dressed
in a bathing frock with a red circle on the back, the better
to snipe him should he try to escape. He was assigned to
cutting the camp’s stove wood. Toward the end of 1941,
they transferred him to Fredericton. On several occasions,
the political prisoner refused to sign a statement in which
he would agree, if freed, to keep quiet until the end of the
war. Camillien, keep quiet?
As a populist politician—in other words, a man close
to his voters—Houde refused to accept how the Liberal
government of Mackenzie King, after solemnly promising
Quebec voters that they would never be conscripted, forced
to fight alongside the English in Europe, flip-flopped and
imposed just such a conscription on all Canadians. Houde
paid for his intransigence with his liberty and his health. As
soon as he was arrested, politicians and the media stayed
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destinations
Georgette Houde et ses trois filles étaient arrivées
pimpantes à Sherbrooke le 14 août 1944. Un député fidèle
à son mari les y avait conduites en voiture. La journée allait
être triomphale, sinon historique : le gouvernement fédéral
venait de libérer du camp militaire de Fredericton au Nouveau-Brunswick le prisonnier Camillien Houde, ex-maire de
Montréal. « Camillien », comme l’appelaient familièrement ses
électeurs, allait enfin revenir dans sa ville. Quatre ans plus tôt,
le 5 août 1940, il avait été cueilli à la sortie de l’hôtel de
ville par la Gendarmerie royale du Canada pour s’être publiquement opposé à la conscription des Canadiens français ;
cabotin de nature, il avait alors chanté : « Alouette, gentille
alouette » …
Transporté de nuit au camp de Petawawa en Ontario,
le coloré et massif maire (démis illico de ses fonctions) était
devenu, habillé d’une défroque de bagnard avec un cercle
rouge dans le dos (pour qu’un tireur d’élite vise le fuyard), le
prisonnier 694 fut affecté à la coupe de bois pour le chauffage du camp. Fin 1941, on le transféra à Fredericton. Le
prisonnier politique refusa à plusieurs reprises de signer un
texte stipulant que, libéré, il accepterait de se taire jusqu’à la
fin du conflit. Camillien, se taire ?
Il faut comprendre que, politicien populiste, autrement dit
proche de ses électeurs, Houde n’avait pas accepté que le
gouvernement libéral fédéral de Mackenzie King, après avoir
juré aux électeurs du Québec de ne jamais recourir à une
conscription obligeant ceux-ci à aller se battre en Europe
avec les Anglais, ait « viré capot » et imposé à tous les Canadiens la fameuse conscription. Il paya de sa liberté, et de sa
santé, cette intransigeance. Sur le coup, lors de son arrestation, hommes politiques et journalistes gardèrent le silence, la
camillien houde campaigning in montreal, 1938.
Camillien houde en plein discours
électoral à montréal en 1938.
© Fonds Conrad Poirier, Bibliothèque et Archives nationales du Québec
/ Direction du Centre d’archives de Montréal
mum, since the War Measures Act trumped all other laws.
People did not take to the streets. But things would be different when the war ended and Camillien was freed.
August 14, 1944: news of Camillien’s release came over
the radio, and Montrealers spilled out onto their balconies
and into the streets. Mrs. Houde and her daughters went
to Sherbrooke, because it was there, at Union Station on
Dépôt Street (now a restaurant), that the Fredericton train
would stop so that they could reunite and ride the final
leg together in the hero’s car. All the papers had report­
ers on the platform. The tired, drawn man of 55 hugged
his loved ones as countless flash bulbs popped. When the
train got rolling again, the press followed by car. During
a whistle-stop in Saint-Hyacinthe, Camilien leaned out
a window and, in fine fettle, gave a crisp answer to a reporter who asked him if he planned a political comeback.
“How could I not?”
At Windsor Station, the assembled throng had been in
high spirits for several hours when, late in the afternoon,
“Camillien’s train” arrived. Thousands welcomed him.
Nothing but shouts, hurrahs, flowers, laughter. They
reached out to touch him—a hand, a shoulder, a sleeve.
Then Camillien, Georgette, and their little girls got into a
convertible. An impromptu parade ushered them to their
home on Saint-Hubert Street between Marie-Anne and
Mont-Royal. A parade punctuated by horns, over which
could be heard, here and there, in an outpouring of French
Canadian pride, “He’s earned his stripes!”
Camillien Houde ran unopposed for mayor of Montreal
and was duly acclaimed. He held the office until his retirement in 1954, and died on September 11, 1958.
Loi sur les mesures de guerre primant toute autre loi. Le peuple
ne descendit pas dans la rue. Ce devait être tout autre chose
la guerre finie et Camillien libéré…
Le 14 août 1944, donc, alors qu’à la radio la nouvelle
de sa libération a fait sortir les Montréalais sur les balcons
puis dans les rues, madame Houde et ses filles arrivent à
Sherkrooke, car il était prévu que c’est là, rue Dépôt, à la
gare Union (devenue aujourd’hui une brasserie jouxtant la
station d’autobus), que le train de Fredericton s’arrêterait pour
qu’elles puissent vivre les retrouvailles et monter dans le wagon du héros. Toute la presse est sur le quai. C’est un homme
de 55 ans, fatigué, amaigri, qui embrasse les siens sous les
flashs des photographes. Le train reparti, la presse le suit en
voiture, et c’est à la gare de Saint-Hyacinthe, le temps d’un
arrêt, que Camillien, penché à la fenêtre du wagon et qui
se ragaillardit, répondra à un journaliste lui demandant s’il
prépare un retour en politique : « Comment pourrais-je ne pas
le faire ? »
À la gare Windsor, la cohue est joyeuse depuis plusieurs
heures quand, en fin d’après-midi, « le train de Camillien » arrive. Ils sont des milliers à l’acclamer. Ce n’est que cris, hourras,
fleurs, rires. On cherche à le toucher, une main, une épaule,
une manche. Puis Camillien, Georgette et leurs fillettes montent dans une voiture décapotable. Un défilé s’organise aussitôt pour les raccompagner chez eux, rue Saint-Hubert, entre
Marie-Anne et Mont-Royal. Un concert de klaxons à travers
duquel on entendait, ici et là, des gens, par fierté canadienne-française, lui chanter : « Il a gagné ses épaulettes… ».
Très vite, Camillien Houde sera réélu maire de Montréal
par acclamation, sans rival. Il conservera la mairie jusqu’à sa
retraite, en 1954, et mourra le 11 septembre 1958.
destinations
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