TD n°18 : Babayaga de TM. Le Tanh et R. Dautremer

Transcription

TD n°18 : Babayaga de TM. Le Tanh et R. Dautremer
Oral professionnel 2ème partie – Littérature jeunesse
CRPE
TD n°18 :
Babayaga de TM. Le Tanh et R. Dautremer
Cet album reprend le thème des contes russes et germaniques de la
sorcière ogresse, méchante femme aigrie qui dévore les enfants comme pour se
venger. Le thème de la femme ou de la mère dévorante figure dans de
nombreuses cultures (légendes africaines par exemple). Dans les contes, on
retrouve souvent l’ambivalence des relations mère/fille, avec la méchante
marâtre qui veut se débarrasser de sa belle-fille, pour ne pas souffrir de rivalité
avec elle (Blanche-Neige). Babayaga, sorcière russe (voir TD précédent), vit dans
les bois, isolée, dans une cabane (isba) reposant sur des pattes de poule, qui
tourne et se retourne (aspect diabolique du devant qui devient derrière).
Babayaga est un personnage ambivalent : dans un conte déjà étudié (La Princesse
Grenouille), nous avons remarqué qu’elle favorisait le héros (donatrice). Dans
d’autres ( Babayaga, Vassilissa…), c’est un personnage maléfique (qui irait même,
dans certaines versions, jusqu’à dévorer les cadavres de ses victimes). En Russie,
on menace les enfants qui refusent de manger d’appeler Babayaga, en rétorsion :
« si tu ne manges pas, elle te mangera ».
Les illustrations de l’album de T.M. Le Tahn et de R. Dautremer
évoquent les figures traditionnelles du folklore russe, comme les poupées, les
costumes, les images de la campagne russe dans le froid et la neige. Les teintes
de rouge, nous l’avons vu plus haut, ne sont pas anodines puisqu’elles réveillent le
thème du Petit Chaperon Rouge, de la Blanche Neige (voir aussi Vassilissa dans le
folklore russe).
1) La sorcière ogresse :
Dans vos séances de lecture en classe (cycle 2, CP CE1), expliquez d’abord
qui est Babayaga dans la culture russe. L’album s’ouvre sur une sorte d’étiologie
de la méchanceté de Babayaga, qui se révélera au fond, très malheureuse et
marginalisée. Les premières pages décrivent la sorcière et sa petite enfance
(trois premières pages). Vous lisez ces trois premières pages aux enfants et
leur demanderez de récapituler ce portrait : elle n’a qu’une seule dent, elle est
laide, elle a mangé son chien avant de s’essayer sur plusieurs camarades de
classe, on se moque d’elle. Regardez l’illustration p.3 : elle est ronde comme une
3ème partie – Etude détaillée de quelques œuvres – TD 18
Sup de Cours – Etablissement d’Enseignement Supérieur Prive RNE 0333 119 L - 73, rue de Marseille – 33001 Bordeaux Cedex
1
Oral professionnel 2ème partie – Littérature jeunesse
CRPE
boule, avec effectivement, une seule dent, ce qui accentue son côté grotesque et
tragi-comique, habillée en rouge et le visage rouge (ce qui montre un appétit pour
le sang, cf. Le Petit Poucet). Sur la photographie de classe, les autres enfants lui
font des oreilles de lapin et rient dans son dos (de sa difformité), ce qui semble
à l’origine de sa méchanceté et de son désir de vengeance. Plus elle est rejetée
pour sa laideur, plus elle devient méchante.
Observez ensuite la terrible illustration, où dans un paysage gris et
nuageux, lugubre, Babayaga est chassée par la communauté et en premier lieu
par ses parents. Le père pointe le doigt au loin. Babayaga est suivie par une nuée
de corbeaux. Le texte parle d’une « forêt de ténèbres », ce qui accentue l’aspect
morbide du personnage (qui peut se rapprocher de la tradition slave du vampire).
Plus loin, il est dit que la sorcière n’a « aucun ami » et elle ouvre un restaurant où
personne ne vient (énumération comique des plats aux enfants). La vieillesse et la
solitude accentuent encore sa méchanceté.
2) La figure de la marâtre :
Expliquez dans la deuxième séance de lecture ce qu’est une marâtre,
définition péjorative de la seconde femme du père qui est présentée comme
mauvaise et jalouse. En réalité, elle supporte l’ambivalence des relations à la
mère qu’éprouvent les petites filles : la mère disparue est idéalisée alors que la
deuxième reçoit toute la rivalité du complexe d’oedipe. C’est le cas dans Blanche
Neige : la marâtre ne supporte pas la beauté et la séduction qu’exerce sa bellefille, qui risque de la priver de tous les honneurs, alors qu’elle-même est
vieillissante. Dans Babayaga , on retrouve le thème de la beauté jalousée de
Miette.
« Miette était jolie comme un cœur/ Marâtre jolie comme un pou. Marâtre
détestait Miette ». Marâtre décide d’envoyer (mandatrice) Miette chez
Babayaga pour se débarrasser d’elle. On retrouve ici le schéma narratif du Petit
Chaperon Rouge qui est envoyée dans la forêt visiter sa grand-mère, sauf qu’ici la
haine de la mère est affichée et que Miette s’en doute un peu.
Le crapaud est un animal magique que l’on retrouve dans de nombreuses histoires
de sorcellerie. Généralement, les sorts qui sont jetés à une personne que l’on
n’aime pas la transforment en crapaud ou en corbeau (le Roi Grenouille, Les sept
corbeaux ). Le crapaud se révèle un donateur pour Miette, qui n’hésite pas à
l’embrasser malgré sa laideur « Il était si mignon ( !) qu’elle l’embrassa ». Notons
3ème partie – Etude détaillée de quelques œuvres – TD 18
Sup de Cours – Etablissement d’Enseignement Supérieur Prive RNE 0333 119 L - 73, rue de Marseille – 33001 Bordeaux Cedex
2
Oral professionnel 2ème partie – Littérature jeunesse
CRPE
les paroles ironiques du crapaud « tu t’en vas chez Gaga…heu… » (il hésite sur le
surnom de Babayaga). « Elle se déplace dans un mortier et efface ses traces
avec un vieux balai ; on dit même qu’elle a deux dents, mais ça reste à vérifier »
(le début du texte insiste sur cet objet de moquerie qu’est l’unique dent de la
sorcière).
Notons également avec les élèves les objets énumérés par le crapaud :
-ruban
-pot de graisse
-deux croûtes de fromage
-1 morceau de lard.
A quoi vont servir ces objets ? : imaginer la suite en formulant des hypothèses.
Dans la troisième séance, il sera nécessaire de résumer le début de
l’histoire. Vous décrirez ensemble le dessin de l’isba ou ferez un dessin.
Remarquez la taille des personnages : Miette toute petite et Babayaga géante,
sur l’illustration, alors que le texte parle d’un accueil chaleureux. La couleur
rouge des vêtements est un élément notable (le texte comme les illustrations se
nourrissent de références à d’autres contes). Comparez aussi la sorcière de
Babayaga avec la maison et la sorcière de Hansel et Gretel (Grimm, Anthony
Browne). Donc malgré l’accueil chaleureux, Miette observe « un filet de bave
courant sur le menton de la vieille » (qui la rend plutôt ridicule), « ainsi qu’une
légère lueur de cruauté ».
Cet aspect ridicule du personnage atténue la charge d’angoisse qu’elle suscite
puisque cela implique qu’elle sera facile à berner. Sur la page suivante, il y a une
énumération des objets personnels de la sorcière : une encyclopédie des verrues
(qui ornent le laid visage de ce type de personnages), une collection de brosses à
dents (alors qu’elle n’a qu’une seule dent). L’humour naît de la référence à des
thèmes déjà connus.
En regardant l’illustration de la page suivante, dites pourquoi Miette prend
peur et pourquoi les premières hypothèses sur l’utilisation des objets ne donnent
rien ?
3) Epreuves et dénouement :
Les épreuves vont permettre à Miette d’exercer son ingéniosité en
utilisant ces objets courants qui vont devenir magiques.
3ème partie – Etude détaillée de quelques œuvres – TD 18
Sup de Cours – Etablissement d’Enseignement Supérieur Prive RNE 0333 119 L - 73, rue de Marseille – 33001 Bordeaux Cedex
3
Oral professionnel 2ème partie – Littérature jeunesse




CRPE
Des éléments fantastiques :
Le chat avec des griffes de cran d’arrêt (morceau de lard).
Le chien écumant de haine (les dents des animaux sont aussi mal placées
que celles de leur maîtresse, si on en croit les illustrations).
Les branches menaçantes et sifflantes des arbres (ruban).
Le portail grinçant, parlant (pot de graisse).
Lors de la quatrième séance, vous étudierez le dénouement :
Miette utilise alors des objets magiques fournis par le chat allié, qui a trahi
Babayaga : la serviette et le peigne.
Elle se débarrasse à son tour de la belle-mère qui ne fait plus obstacle à la
relation avec son père. L’enfant est victime, ce qui lui permet de ne pas se
culpabiliser de son désir oedipien d’être seule avec le père. Avec la belle-mère,
Miette, la véritable héroïne de l’histoire, se débarrasse des pulsions orales et
anales (Cacayaga, celle qui empoisonne tout le monde, pour ne pas employer un
terme grotesque), pour entrer dans le complexe d’oedipe, car tel est le
cheminement du développement psychique de l’enfant, qui est retranscrit dans le
conte.
D’autres contes de sorcières dans : Les contes de le rue Broca de P.Gripari
Le livre des sorcières de S. Hayes (cycle 2-3)
Fées et Sorcières de V.Loux et Claveloux (idem).
Le crapaud perché de C.Boujon (cycle 1-2)
J’ai un problème avec ma mère B.Cole (cycle 1-2-3).
L’île du crâne A. Horowitz (cycle 3)
La sorcière Camomille de Larreula et Capdevila (cycle 1-2-3)
3ème partie – Etude détaillée de quelques œuvres – TD 18
Sup de Cours – Etablissement d’Enseignement Supérieur Prive RNE 0333 119 L - 73, rue de Marseille – 33001 Bordeaux Cedex
4