PRÉVENTION DES ESCARRES pression, cisaillement, friction
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PRÉVENTION DES ESCARRES pression, cisaillement, friction
A N A LYS E internationale PRÉVENTION DES ESCARRES pression, cisaillement, friction et microclimat en contexte document de consensus A N A LYS E internationale RÉDATEUR EN CHEF : Lisa MacGregor EXPERTS MEMBRES DU GROUPE DE TRAVAIL ÉDITEUR, WOUNDS INTERNATIONAL : Suzie Calne Mona Baharestani, Spécialiste en soins des plaies/Formation et recherche, James H Quillen Veterans Affairs Medical Center, Johnson City, Tennessee, É.-U.; et Professeur associé, Faculté de médecine Quillen, Université d’état East Tennessee, Johnson City, Tennessee, É.-U. ÉDITEUR : Kathy Day Joyce Black, Professeur associé, University of Nebraska Medical Center, College of Nursing, Omaha, Nebraska, É.-U. PRODUCTION : Alison Pugh Keryln Carville, Professeur associé, Soins infirmiers à domicile, Silver Chain Nursing Association & Curtin University of Technology, Osborne Park, Australie Occidentale IMPRIMÉ PAR : Printwells, R.-U. Michael Clark, Consultant indépendant, Cardiff, R.-U. ÉDITÉ PAR : Wounds International Enterprise House 1–2 Hatfields Londres SE1 9PG, R.-U. Tél. : + 44 (0)20 7627 1510 Fax : +44 (0)20 7627 1570 [email protected] www.woundsinternational.com © Wounds International 2010 Janet Cuddigan, Professeur associé, Présidente, Adult Health and Illness Department, College of Nursing, University of Nebraska Medical Center, Omaha, Nebraska, É.-.U. Carol Dealey, Directrice de recherche, Centre hospitalier universitaire de Birmingham, NHS Foundation Trust et Université de Birmingham, Hôpital Queen Elizabeth, Birmingham, R.-U. Tom Defloor, Professeur titulaire, Unité des sciences infirmières, Département de santé publique, Université de Gand, Belgique Amit Gefen, Professeur associé, Département d’ingénierie biomédicale, Faculté d’ingénierie Iby and Aladar Fleischman, Université de Tel-Aviv, Israël Keith Harding, Professeur en médecine de rééducation (Cicatrisation des plaies), Chef du département de dermatologie et cicatrisation des plaies, Université de Cardiff, Cardiff, R.-U. Nils Lahmann, Professeur associé, Département en sciences infirmières, Charité Universitätsmedizin Berlin, Berlin, Allemagne Soutenu par une bourse d’études illimitée fournie par KCI. Maarten Lubbers, Chirurgien, Département de chirurgie, Centre médical académique, Université d’Amsterdam, Pays-Bas Courtney Lyder, Doyenne et professeur, École des sciences infirmières, Directrice assistante de l’Académie des sciences infirmières, Centre médical Ronald Reagan UCLA, Université de Californie, Los Angeles, É.U. Takehiko Ohura, Président, Centre de recherche sur les escarres et la cicatrisation des plaies (Kojinkai), Sapporo, Japon Les opinions exprimées dans ce document sont celles des auteurs et ne reflètent pas nécessairement celles de KCI. Comment citer ce document : Analyse internationale : Prévention des escarres : pression, cisaillement, friction et microclimat en contexte. Document de consensus. Londres : Wounds International, 2010. Heather L Orsted, Directrice – CAWC Institut de traitement et de prévention des plaies et Consultante clinique et formatrice, Association canadienne du soin des plaies, Calgary, Alberta, Canada Vinoth K Ranganathan, Responsable de programme, Département de médecine physique et de réadaptation, Clinique de Cleveland, Cleveland, Ohio, É.U. Steven I Reger, Directeur émérite, Technologie de réadaptation, Département de médecine physique et de réadaptation, Clinique de Cleveland, Cleveland, Ohio, É.U. Marco Romanelli, Consultant en dermatologie, Unité de recherche sur les plaies, Département de dermatologie, Université de Pise, Italie Hiromi Sanada, Infirmière spécialisée en plaies, ostomies et continence, Département de soins infirmiers en gérontologie et de traitement des plaies, École supérieure de médecine, Université de Tokyo, Tokyo, Japon Makoto Takahashi, Professeur associé, Ingénierie des systèmes biomédicaux, Bioingénierie et bioinformatique, École supérieure des sciences et technologie de l’information, Université d’Hokkaido, Sapporo, Japon DÉVELOPPEMENT ET PROCESSUS DE CONSENSUS L’élaboration de ce document a nécessité l’analyse du texte par un groupe de travail constitué d’experts et une révision par les auteurs. Un consensus a été obtenu, comme l’indique l’approbation de chaque membre du groupe de travail et de chaque auteur. Pression, cisaillement, friction et microclimat en contexte HL Orsted, T Ohura, K Harding L’objectif global des soins cliniques est de rétablir ou de maintenir l’état de santé. Malheureusement, des lésions iatrogènes se produisent parfois. Bien que toutes les escarres ne soient pas iatrogènes, la plupart peuvent être évitées. Les escarres sont les lésions iatrogènes le plus souvent rapportées dans les pays développés. Des techniques de soin inappropriées comme le fait de laisser des patients vulnérables dans des positions potentiellement délétères pendant de longues périodes de temps, ou le massage de zones cutanées inflammées, sont encore en pratique bien que des données probantes aient montré que ces techniques étaient délétères ou inefficaces. La formation est un élément clef pour permettre de s'assurer que tous les membres d'une équipe clinique agissent afin de prévenir et traiter les escarres en fonction des meilleures données probantes disponibles. La définition la plus récente des escarres, qui a été élaborée par une collaboration internationale entre le National Pressure Ulcer Advisory Panel (NPUAP) et l’European Pressure Ulcer Advisory Panel (EPUAP), souligne la compréhension actuelle du rôle de facteurs extrinsèques dans le développement des escarres1,2 (Encadré 1). La pression, souvent liée à une diminution de la mobilité, a longtemps été considérée comme le facteur extrinsèque le plus important dans le développement des escarres. Cependant, une étude récente en cours révèle que le cisaillement, la friction et le microclimat jouent également des rôles importants, et qu’il existe des relations importantes et complexes entre tous les facteurs extrinsèques. Ainsi, la pression et le cisaillement sont étroitement liés, la friction a un rôle dans l'apparition d'un effet de cisaillement, et le microclimat influence la sensibilité de la peau et des tissus mous aux effets de la pression, du cisaillement et de la friction. Des concepts complexes sous-tendent la compréhension de la pression, du cisaillement, de la friction et du microclimat, ainsi que de leurs effets synergistiques dans la formation des escarres. Par conséquent, les experts du groupe de travail impliqués dans l’élaboration du document intitulé « Prévention des escarres : prévalence et incidence en contexte3 » ont proposé un nouveau document pour faciliter la compréhension de ces facteurs extrinsèques. Le groupe d’experts a décidé que, bien que la pression, le cisaillement, la friction et le microclimat sont inextricablement liés, ce nouveau projet aborderait chaque facteur extrinsèque individuellement afin d’améliorer la compréhension des aspects en jeu. Cette compréhension devrait permettre aux cliniciens de mieux appréhender les évolutions dans ce domaine, et surtout, de soutenir la mise en œuvre efficace et cohérente de protocoles de prévention des escarres. Les trois articles (Pression en contexte, Cisaillement et friction en contexte, et Microclimat en contexte) suivent une structure identique. Ils débutent par une définition des facteurs extrinsèques traités et comment, pris isolément, ces facteurs participent à l’étiologie des escarres. Les relations entre les facteurs sont expliquées et soulignées, et les données probantes à l’appui du rôle de ces facteurs dans la formation des escarres sont également discutées. Les dernières rubriques des trois articles décrivent comment les patients présentant un risque pour chaque facteur extrinsèque peuvent être identifiés. Les articles expliquent ensuite les types et l’argumentaire des interventions cliniques ayant pour objectif de prévenir ou de soulager les effets indésirables de chacun des facteurs extrinsèques discutés. Il est à noter que, bien que le document aborde plusieurs aspects importants de la prévention des escarres, une discussion exhaustive des protocoles de prévention dépasse le cadre de ce document. De nombreuses recherches sont à entreprendre pour mieux comprendre les causes intrinsèques et extrinsèques des escarres. Cependant, comme le démontre ce document, il existe d’importants principes à la base de la prévention des escarres résultant des facteurs extrinsèques de pression, cisaillement, friction et microclimat. Tous les cliniciens devraient comprendre ces principes et les mettre en œuvre dans le cadre de leur pratique quotidienne. RÉFÉRENCEs 1. National Pressure Ulcer Advisory Panel and European Pressure Ulcer Advisory Panel. Prevention and treatment of pressure ulcers: clinical practice guideline. Washington DC: National Pressure Ulcer Advisory Panel, 2009. 2. European Pressure Ulcer Advisory Panel and National Pressure Ulcer Advisory Panel. Prevention and treatment of pressure ulcers: quick reference guide. Washington DC, USA: National Pressure Ulcer Advisory Panel, 2009. Accessible à l’adresse suivante : www.npuap.org and www.epuap.org (accessed 23 November 2009). 3. International guidelines. Pressure ulcer prevention: prevalence and incidence in context. A consensus document. London: MEP Ltd, 2009. ENCADRÉ 1 Nouvelle définition NPUAP/EPUAP des escarres1 « Une escarre est une lésion localisée de la peau et/ou des tissus sous-jacents généralement situés au-dessus d'une saillie osseuse, résultant d'une pression, ou d'une pression associée à un cisaillement. Un certain nombre de facteurs contributifs ou confondants est également associé aux escarres. La signification de ces facteurs doit encore être élucidée. » PRESSION, CISAILLEMENT, FRICTION ET MICROCLIMAT EN CONTEXTE | 1 Pression en contexte M Takahashi, J Black, C Dealey, A Gefen INTRODUCTION La pression est considérée depuis plusieurs années comme le facteur extrinsèque le plus important dans la formation d’escarres. Par conséquent, elle occupe une place prédominante dans les définitions des escarres, y compris celle récemment élaborée par le National Pressure Ulcer Advisory Panel (NPUAP) et l’European Pressure Ulcer Advisory Panel (EPUAP)1,2. Cet article explique ce qu’est la pression et comment elle participe à la formation des escarres, ainsi que la manière d’identifier les patients à risque de lésion par pression. Il décrit ensuite l’argumentaire et le mécanisme d’action des interventions permettant de diminuer l’ampleur et la durée de la pression, et par conséquent, le risque de formation d'escarres. FICHE TECHNIQUE ●● La notion de force est utilisée pour décrire l’effet d’une influence externe sur un objet. La force possède une direction et une ampleur. ●● Des forces perpendiculaires entraînent une pression. ●● La pression à l'intersection entre la peau et une surface de support est souvent appelée « pression d’interface ». Figure 1 Définition de la pression QU’EST-CE QUE LA PRESSION ? La pression est définie par la quantité de force appliquée perpendiculairement à une surface par zone d'application. Une force appliquée sur une petite surface produira une pression plus forte qu'une force identique appliquée à une zone plus étendue (Figure 1). L’unité pour exprimer la force est le newton (N). La pression est exprimée en newton par mètre carré (N/m2), pascals (Pa) ou en millimètres de mercure (mmHg). En plus de la force perpendiculaire impliquée par la pression, des forces peuvent être appliquées parallèlement à la surface de la peau (Figure 2). Il s’agit de forces de cisaillement qui participent aux contraintes de cisaillement, qui sont également mesurées en terme de force par unité de surface (voir Cisaillement et friction en contexte3, pages 11–18). Le terme générique « contrainte » désigne les effets définis en terme de force par unité de surface d’application. force perpendiculaire (N) Force zone (m2) Force Pressure (N/m2) = Zone d’application Force identique, zone plus petite = pression plus élevée Quels types de contrainte interne la pression entraîne-t-elle ? Lorsqu'une pression est appliquée à la peau, particulièrement au-dessus d’une saillie osseuse, cette pression déforme la peau et les tissus mous sous-jacents. Dans le modèle représenté à la Figure 3, les lignes horizontales immédiatement sous la saillie osseuse se rapprochent, ce qui indique une compression tissulaire. À d’autres endroits, particulièrement sous la saillie osseuse, les lignes sont également allongées, ce qui indique des contraintes de tension (étirement) et de cisaillement (déformation). Ceci signifie que même lorsque seule une pression est appliquée (c.-à-d. la force appliquée est uniquement perpendiculaire), des contraintes de tension et de cisaillement se produisent également au sein des tissus proches de saillies osseuses4. EFFETS CLINIQUES DE LA PRESSION Chez les patients conscients, les effets d’une pression continue indiquent généralement que de petits et fréquents mouvements corporels sont nécessaires pour soulager la charge et rétablir l'irrigation des tissus5. Les patients inconscients, sous sédation, anesthésiés ou paralysés ne peuvent sentir ou répondre à ces signaux et ne bougent pas spontanément. Par conséquent, la peau et les tissus peuvent être soumis à des pressions prolongées et non soulagées. Physiopathologie des lésions liées à la pression La peau ayant été soumise à des niveaux de pression potentiellement délétères est dans un premier temps pâle en raison d'une diminution de l'irrigation sanguine et d'une oxygénation inadéquate (ischémie). Lorsque la pression est soulagée, la peau devient rapidement rouge en raison d’une réponse physiologique appelée hyperémie. Si l’ischémie est d’une durée suffisamment courte, l’irrigation sanguine et la couleur de la peau redeviendront finalement normales. Force perpendiculaire Force de cisaillement Force identique, zone plus étendue = pression plus faible Unités de pression 1N/m2 = 1Pa = 0,0075 mmHg 1 000 N/m2 = 1kPa = 7,5 mmHg N/m2 = newtons par mètre carré ; Pa = pascal ; mmHg = millimètre de mercure 2 | ANALYSE INTERNATIONALE : PRÉVENTION DES ESCARRES Force de cisaillement Figure 2 Forces appliquées à une surface Figure 3 Déformation tissulaire résultant de la pression (adapté de6) Le fléchissement des lignes en (b) montre que lorsqu'une pression externe est appliquée au-dessus d'une saillie osseuse, il se produit des contraintes de compression, de cisaillement (déformation) et de tension (étirement ) (voir texte en gras à la page 2). FICHE TECHNIQUE ●● On pense qu’une pression localisée contribue à la formation d’une escarre par déformation de la peau et des tissus mous ; souvent entre une structure osseuse et la surface externe (un lit ou une chaise par exemple), ce qui déforme les cellules, diminue l'irrigation sanguine et entraîne une ischémie et une nécrose. ●● Bien qu’il soit fréquent de dire que la pression de fermeture des capillaires (c.-à-d. la pression qui interrompt le flux sanguin capillaire) est de 32 mmHg, cette pression est en réalité très variable. Figure 4 Lésion tissulaire profonde (autorisé par J. Black) LTP au-dessus de la région sacrée secondaire à une longue intervention chirurgicale. Cette lésion a progressé jusqu’à une perte cutanée et une exposition de tissus sous-cutanés nécrosés. Tissus } Os Os Contrainte de cisaillement Contrainte de compression (a) } Contrainte de tension (b) Tissus Pression de contact Une ischémie plus longue peut provoquer une agrégation des cellules sanguines et provoquer un blocage des capillaires, faisant perdurer l'ischémie. Les parois capillaires peuvent également être endommagées, permettant aux globules rouges et au liquide de passer dans l’espace interstitiel. Ce processus entraîne un érythème ne disparaissant pas à la pression, une coloration de la peau et une induration qui sont observés en cas d’escarres de Catégorie ou Stade I. Un prolongement de l’ischémie entraîne une nécrose de la peau et des tissus sous-jacents et on observe un délabrement des tissus superficiels et profonds en cas d'escarres de catégorie ou de stade plus élevé. Il est également admis qu'une pression élevée altère physiquement le tissu musculaire en déformant et détruisant les cellules musculaires. Lésion tissulaire profonde La nouvelle classification NPUAP/EPUAP des escarres comporte une catégorie supplémentaire pour les É.-U. : les lésions tissulaires profondes1. L’expérience clinique suggère que les patients atteints présentent généralement une peau violacée approximativement 48 heures après un épisode de pression (ex : rester inconscient sur le sol puis développer rapidement une nécrose en dépit de soins) (Figure 4). QUE SAVONS-NOUS À PROPOS DU LIEN ENTRE LA PRESSION ET LES ESCARRES ? Étant donné que l’on pense que le mécanisme primaire d’atteinte tissulaire liée à la pression est une diminution du flux sanguin, les articles qui traitent des escarres mentionnent fréquemment une recherche effectuée par Landis dans les années 30. Ce travail a révélé que la pression dans l'extrémité artériolaire d'un capillaire de doigt était, chez l’homme, d'environ 32 mmHg7. Cette valeur a ensuite été généralisée par erreur comme étant la pression nécessaire pour comprimer les capillaires et bloquer le flux sanguin (pression de fermeture capillaire), et la pression sous laquelle les dispositifs de redistribution de la pression devaient diminuer la pression d'interface. Cependant, plusieurs études ultérieures ont également démontré un large éventail de pression dans les capillaires en fonction de leur localisation anatomique, avec des valeurs dépendantes de l’âge et de la présence éventuelle de maladie concomitante. Relation entre la durée et l’intensité de la pression Avant le milieu du 20e siècle, on soupçonnait que la durée de la pression représentait un facteur dans la formation des escarres8,9, mais on ne disposait pas de données quantitatives, jusqu’à la publication des résultats des expériences de Kosiak en 1959. Ces expériences concernent la soumission de tissus à des pressions connues pendant des durées spécifiques. La viabilité des tissus a été évaluée par un examen histologique10,11. Kosiak a rapporté une relation entre la quantité de pression, la durée d’application et l’apparition d’une atteinte tissulaire lors d'essais chez le chien et le rat10,11. Il a indiqué que « des modifications pathologiques microscopiques ont été notées dans les tissus soumis à une pression aussi faible que 60 mmHg pendant une heure seulement »10. Courbe pression-durée d’application Dans les années 70, Reswick et Rogers ont publié des directives fondées sur des observations chez PRESSION, CISAILLEMENT, FRICTION ET MICROCLIMAT EN CONTEXTE | 3 FICHE TECHNIQUE ●● La capacité d’une pression donnée à entraîner une atteinte tissulaire est liée à la durée d’application et à l’intensité (quantité) de la pression appliquée. ●● Il a été démontré qu’une pression sur la peau produit des diminutions plus importantes du flux sanguin dans une artère profonde que dans des capillaires. ●● La pression d’interface est relativement facile à mesurer, mais présente des limites en terme de facteur prédictif des contraintes tissulaires internes. ●● Lorsqu’une pression est appliquée au-dessus d’une saillie osseuse, les plus fortes contraintes internes sont subies par les tissus mous les plus proches de cette saillie. ●● Les patients les plus à risque de pression sont ceux incapables de bouger seuls ou de demander à être déplacés. Durée et niveau de pression intolérables Pression Figure 5 Modification proposée à la courbe pression-durée d'application de Reswick et Rogers (adapté de1,15-17) L’aire au-dessus des courbes représente les durées et les niveaux de pression susceptibles d’entraîner une lésion tissulaire par opposition à l’aire sous les courbes qui représente les durées et niveaux de pression non susceptibles d’entraîner une lésion tissulaire. Durée et niveau de pression tolérables Temps Courbe originale de Reswick et Rogers Courbe proposée l’humain qui décrivaient des niveaux et durées d’exposition délétères ou non à des pressions d’interface particulières12 (Figure 5, page 4). Bien que cohérentes avec le travail de Kosiak, les courbes aux extrémités de l'échelle de temps étaient fondées sur une extrapolation plutôt que sur des données13,14. Il a été récemment proposé de modifier la courbe de Reswick et Rogers pour refléter davantage les données récentes issues des études animales et de l’expérience clinique qui indiquent que des pressions élevées peuvent entraîner des atteintes dans un laps de temps relativement court et que des pressions plus faibles peuvent être appliquées sur de longues périodes de temps sans produire d’atteinte1,15-17 (Figure 5). Pression et température Les effets de la pression peuvent être modulés par la température cutanée. Les travaux de Kokate et al et d’Iaizzo et al chez le porc ont permis de conclure que les lésions de la peau et des tissus mous résultant d'une pression pouvaient être réduites par un refroidissement cutané local18,19 (voir Microclimat en contexte20, pages 19–25). Effets physiologiques Une pression comprise entre 0 et 175 mmHg a été appliquée à la peau, lors d’une expérience chez l’humain visant à mesurer les effets de la pression sur le flux sanguin de l'avant-bras. Les résultats ont montré que la pression sur la peau affecte davantage le flux sanguin d’une artère profonde que d’un capillaire cutané21. De futures études visant à mesurer le flux sanguin dans les tissus profonds pourraient contribuer à améliorer la compréhension des facteurs d'ischémie dans le mécanisme de formation des escarres. Comment les contraintes internes peuvent-elles être mesurées ? Plusieurs études sur le rôle de la pression dans 4 | ANALYSE INTERNATIONALE : PRÉVENTION DES ESCARRES la formation d’escarres mesurent la pression à la surface de la peau (pression d’interface). Toutefois, les travaux en bio-ingénierie menés depuis les années 80 montrent que les mesures de la pression d’interface ne permettent pas de prédire les contraintes tissulaires internes13,14. Les contraintes au sein des tissus mesurées sur un modèle animal ont montré que la pression interne est trois à cinq fois supérieure à proximité d’une saillie osseuse à la pression appliquée audessus de cette saillie22. Un modèle informatique a confirmé que les contraintes les plus élevées étaient situées à proximité de la saillie osseuse23. IDENTIFICATION DES PATIENTS À RISQUE DE PRESSION Les patients présentant le risque le plus élevé de pression sont ceux chez qui la pression sur la peau ne serait pas soulagée si les soignants ne les changeaient pas de position dans leur lit ou leur chaise. Une première étape importante consiste à se demander : « Le patient perçoit-il la pression et peut-il changer de position ou demander à d’autres de le changer de position ? ». Une réponse négative à cette question permet à l'ensemble de l'équipe d'identifier rapidement les patients à haut risque. L’évaluation générale du patient révèlera d'autres facteurs tels qu'une diminution de l'irrigation tissulaire ou une mauvaise alimentation, qui expose encore davantage un patient aux effets de la pression. Certains de ces facteurs augmentent le risque en amplifiant les effets du cisaillement et de la friction, ou en réduisant la tolérance cutanée et tissulaire à la pression (voir Cisaillement et friction en contexte3, pages 11–18 et Microclimat en contexte20, pages 19–25). Plusieurs outils, fondés sur un certain nombre de facteurs, y compris la pression24-26, sont disponibles pour l’évaluation du risque global de formation d’escarres. Bien que l’utilisation de ce type d’outils soit limitée1 et que d'autres approches aient été suggérées27, les outils d’évaluation du risque sont très appréciés en pratique clinique. DIMINUTION DU RISQUE DE PRESSION Les meilleures pratiques de soin aux patients à risque d’escarre comportent de nombreux aspects visant à améliorer les effets des facteurs de risque intrinsèque (tels que malnutrition, maladie concomitante, peau sèche) et des facteurs extrinsèques (tels le cisaillement et la friction, ou l'incontinence). (Voir Cisaillement et friction en contexte3, pages 11–18 et Microclimat en contexte20, pages 19–25.) FICHE TECHNIQUE Les interventions visant à diminuer le risque d’un patient lié aux effets de la pression doivent : ●● être planifiées dans le contexte d’autres exigences de soin et de traitement ●● centrer sur l’encouragement des patients à changer de position de manière autonome, sur le repositionnement des patients et l’utilisation de supports ●● prendre en compte l’ensemble des besoins des patients, particulièrement au moment de déterminer la fréquence des repositionnements et les positions adoptées. Vis-à-vis de la pression, les efforts se concentrent sur une diminution ou un soulagement de la pression appliquée à la peau de patients vulnérables. Ces principes s’appliquent également aux patients présentant une lésion liée à la pression constituée. Les patients devraient éviter de s’assoir ou de s’allonger sur les zones présentant un érythème ne disparaissant pas à la pression ou des escarres. Si ces zones ou ces plaies ne sont pas soulagées ou se détériorent, les professionnels de santé doivent examiner la possibilité qu’une pression continue sur la zone contribue au problème. Le jugement clinique est essentiel pour déterminer la meilleure manière de fournir des soins aux patients qui risquent de développer une lésion liée à la pression. nécessaire chez les patients qui se déplacent spontanément. Il convient de rappeler de bouger aux patients réticents à changer de position en raison d’une douleur réelle ou anticipée liée au mouvement, ou en raison des effets sédatifs d’une analgésie. L’impact de petits et fréquents mouvements a été étudié en testant l’hypothèse que l’équipe de soins pourrait déplacer légèrement les patients à chaque contact (en levant une de ses jambes ou en déplaçant un bras) afin de soulager la pression31,32. Les études suggèrent que la pression d’interface était réduite sous les zones déplacées31. Une petite étude a montré une diminution du nombre d'escarres32. Cependant, il convient d’être prudent : à moins de déplacer les talons et le bassin, le niveau et la durée de la pression à ces localisations critiques ne sont que faiblement diminués par ces mouvements corporels. REDISTRIBUTION DE LA PRESSION Une redistribution de la pression peut être obtenue en éliminant la pression de la zone affectée ou en diminuant la pression en répartissant le poids sur une plus grande surface (Figure 6). Repositionnement Un repositionnement devrait être envisagé chez tous les patients que l'on juge à risque d'escarre1,33. Les patients plus mobiles seront en mesure de se repositionner eux-mêmes (voir ci-dessus), tandis que les autres peuvent avoir besoin d'aide. Un repositionnement peut ne pas être adapté à certains patients. Certains patients en état critique peuvent être déstabilisés par un repositionnement. Cependant, ce n’est pas toujours le cas, même chez les patients dont l’état hémodynamique est mauvais34. Par conséquent, la décision de repositionner un patient en état crique devrait être prise au cas par cas. Mouvement autonome Le mouvement spontané est la méthode habituellement utilisée pour soulager la pression par les personnes dont le système neurologique est intact. Une des premières études sur le sujet a révélé que les patients qui changeaient spontanément de position moins de 25 fois par nuit présentaient un risque significativement plus élevé d’escarres que ceux qui changeaient plus fréquemment de position30. Lorsque cela est possible, les patients devraient être encouragés à changer seuls de position. Aucun repositionnement supplémentaire n'est parfois Fréquence des repositionnements Une étude systématique des stratégies de prévention des escarres liées à la pression a révélé qu’il n’existe pas suffisamment de données probantes Redistribution de la pression Une augmentation de la surface de contact diminue la pression d’interface Repositionnement du patient pour augmenter la zone de contact, ex. position inclinée à 30° Figure 6 Méthodes de redistribution de la pression (adapté de28,29) Supports statiques* ex. mousse, dispositifs remplis de gel ou d’air, d’air fluidisé Un soulagement de la pression élimine la pression d'une zone vulnérable Repositionnement du patient pour éliminer la pression d'une localisation anatomique particulière Supports dynamiques* ex. pression alternée Surélever des parties du corps pour permettre une décharge totale ex. talonnières * Un support statique possède la capacité de modifier les propriétés de distribution de la charge uniquement en réponse à l’application d’une charge; tandis qu’un support dynamique est en mesure de modifier les propriétés de distribution avec ou sans application d’une charge. PRESSION, CISAILLEMENT, FRICTION ET MICROCLIMAT EN CONTEXTE | 5 pour appuyer un schéma de repositionnement en particuler35. La fréquence des repositionnements devrait se fonder sur les caractéristiques suivantes : tolérance tissulaire, niveau de mobilité, état médical général du patient et surface de support utilisée1. Le schéma conventionnel de repositionnement toutes les 2 heures peut fournir un point de départ utile pouvant être adapté au patient. L'efficacité d'un schéma de repositionnement sera révélée par l'absence d'érythème persistant au-dessus de saillies osseuses. La présence d'un érythème persistant peut indiquer que des repositionnements plus fréquents sont nécessaires et que le support utilisé n'est peutêtre pas optimal pour le patient. FICHE TECHNIQUE Les supports statiques, tels que les mousses, les dispositifs remplis d’air ou de gel, ou à air fluidisé, fournissent une redistribution de la pression par l’immersion et l’enveloppement. Figure 7 Immersion et enveloppement Immersion L’utilisation d’un support de redistribution de la pression n’élimine pas le besoin de repositionner le patient. Cependant, il est possible de diminuer la fréquence des repositionnements. Lors d’une étude, par exemple, un retournement toutes les 4 heures de patients allongés sur un matelas en mousse viscoélastique a été associé à une plus faible incidence des escarres de catégorie/stade II et plus, par rapport à un retournement toutes les 2 ou 3 heures de patients allongés sur un matelas standard33. Pour les patients assis en chaises ou en fauteuil roulant, il est recommandé de réaliser un repositionnement au moins toutes les heures36. Les patients confinés en fauteuil roulant devraient apprendre à changer de position toutes les 15 minutes en se soulevant du fauteuil roulant ou en se penchant vers l'avant37. Positions Pour les patients alités, il est mieux d'éviter le décubitus latéral à 90° ou la position semiallongée, car ces positions augmentent la pression respectivement située au-dessus des saillies osseuses trochantérienne et sacrée1. Il convient de repositionner plus fréquemment les patients dont la tête de lit doit être surélevée, en raison d’une Enveloppement 6 | ANALYSE INTERNATIONALE : PRÉVENTION DES ESCARRES dyspnée ou pour prévenir une aspiration résultant d’une alimentation par sonde gastrique. Le décubitus latéral à 30° consiste placer le patient allongé à 30° le long de l’axe vertical par rapport à la position allongée1. Cette position ne convient pas à tous les patients, mais peut représenter une alternative pour certains. Les patients en fauteuil roulant peuvent bénéficier d'une inclinaison du fauteuil qui contribue à lever de la pression des tubérosités ischiatiques. SUPPORTS REDISTRIBUANT LA PRESSION Des supports permettant de redistribuer la pression sont disponibles sous plusieurs formes, ex. surmatelas, matelas et systèmes intégrés au lit. Un surmatelas est un dispositif placé au-dessus d’un matelas. Ces dispositifs peuvent élever la surface jusqu’au niveau des barrières de sécurité. Le risque de chute doit donc être évalué. Idéalement, les barrières devraient se trouver au moins 10 cm (4 pouces) au-dessus du matelas. Les matelas répartissant la pression peuvent souvent être utilisés pour remplacer les matelas conventionnels, ce qui peut permettre de conserver le cadre de lit existant. Un système intégré combine un cadre de lit et un support (généralement un matelas à pression alternée). Ces dispositifs sont le plus souvent utilisés chez les patients présentant un risque extrêmement élevé, pour le traitement des escarres et chez les patients ayant subi une reconstruction chirurgicale de leurs escarres à l’aide de lambeaux. SUPPORTS STATIQUES L’immersion et l’enveloppement constituent deux principes importants du mécanisme de redistribution de la pression des supports statiques. L’immersion fait référence à la capacité d’un support à laisser un patient s’y enfoncer29 Immersion partielle avec enveloppement plus d’effort en raison du haut degré d’immersion et d’enveloppement. Figure 8 Effet hamac Le revêtement tendu empêche l’immersion et l’enveloppement du patient, ce qui entraîne une suspension au-dessus du support et l’absence de diminution de la pression. Revêtement tendu Support lâche Zone de contact réduite ; aucune diminution de la pression FICHE TECHNIQUE ●● Les supports dynamiques (également connus sous le nom de systèmes à pression alternée) redistribuent principalement la pression par gonflement et dégonflement de zones du support. ●● Des études sont en cours sur les indications précises en faveur des différents types et modèles de support permettant la redistribution de la pression ainsi que leur efficacité relative. Figure 9 Support à pression alternée Les cellules d’air sont mises successivement en pression haute puis en pression basse pour éliminer la pression des tissus mous. (Figure 7). Étant donné que le corps s’enfonce, davantage de surface corporelle se trouve en contact avec le support, ce qui répartit le poids du patient sur une plus large zone et diminue la pression. L’immersion est plus importante sur les surfaces plus molles. Elle a également le potentiel d’être supérieure sur les surfaces plus épaisses. Cependant, si un matériau est trop mou, le patient peut « s’enfoncer au plus bas » (c.-à-d. se retrouver finalement en position assise ou couchée sur la structure sous-jacente du lit ou de la chaise en raison de la compression très importante du support). L’enveloppement fait référence à la capacité d’un support à se mouler au corps du patient et à s’ajuster aux zones irrégulières (telles que des plis dans les vêtements ou les draps)29 (Figure 7). Une étude récente indique que le degré d'immersion et d'enveloppement d'un support peut être altéré par une augmentation de la tension à la surface du support, particulièrement lorsqu'il existe un relâchement du support lui-même38. Par exemple, un revêtement tendu au-dessus d’un matelas ou d’un coussin peut créer un effet hamac qui empêche le support de se mouler au corps du patient et produit des pressions élevées au-dessus d’une petite surface (Figure 8). L’immersion et l’enveloppement ont d’importantes implications pour la mobilité et l’indépendance des patients. Par exemple, relativement peu d’efforts sont nécessaires pour s’assoir ou s’allonger sur du bois (qui ne possède aucune capacité d’immersion et d’enveloppement) mais les mêmes manœuvres sur l’eau nécessitent Cellules en pression alternée Mousse Les matelas de mousse de base sont devenus le matelas standard des patients hospitalisés ou en soins de longue durée. Les matelas de mousse comportant des spécifications plus élevées (ex. ceux constitués de couches de mousse de différentes densités, ou de mousse viscoélastique) sont recommandés pour diminuer l’incidence des escarres chez les personnes à risque39. La mousse se dégrade et perd de sa fermeté avec le temps, et donc une perte de sa capacité à s’ajuster. Lorsqu’un matelas de mousse est usé, le patient peut « s’enfoncer au plus bas ». La durée de vie de tout support est influencée par le nombre d’heures d’utilisation et le poids appliqué. Une surface utilisée par des personnes minces aura une durée de vie supérieure à celle utilisée par des patients bariatriques. Dispositifs remplis d’air ou de gel Les supports remplis d’air ou de gel comprennent les colonnes ou compartiments remplis d’air ou de gel. Le degré d’immersion et d’enveloppement fourni dépend de la pression de l’air ou du gel dans les compartiments, la profondeur des compartiments, et l’« élasticité » de la surface. Les supports remplis d’air sont parfois désignés sous le terme de supports motorisés à faible perte d’air. Cependant, strictement parlant, une faible perte d’air est liée à la propriété de certains supports à laisser l’air s’échapper des cellules pour faciliter la gestion de la température et l’humidité de la peau (voir : Microclimat en contexte20, pages 19–25). Air fluidisé Les supports à air fluidisé sont les supports qui fournissent l'immersion et l’enveloppement les plus importants. Une immersion des deux tiers du corps peut être obtenue. Un support à air fluidisé est composé de perles de silicone ou de verre avec de l'air sous pression. Les perles adoptent les caractéristiques d’un liquide grâce à l’air forcé sous pression. Plusieurs études contrôlées et randomisées ont montré que l’issue en termes de cicatrisation chez les patients porteurs d'escarres de Catégorie/Stade III et IV pris en charge sur des supports à air fluidisé est meilleure par rapport à celle des patients sur des lits ou matelas en mousse standards ainsi que d’autres supports non fluidisés40-43. SUPPORT DYNAMIQUE – PRESSION ALTERNÉE Les supports à pression alternée redistribuent la PRESSION, CISAILLEMENT, FRICTION ET MICROCLIMAT EN CONTEXTE | 7 TABLEAU 1 Utilisations des supports redistribuant la pression Ce tableau est conçu pour fournir une vue générale des utilisations des différents types de supports redistribuant la pression. Les spécifications, qualité et utilisations de chaque produit peuvent varier. Les cliniciens doivent consulter la documentation du fabricant pour des informations sur les indications, précautions d’emploi et contre-indications de chaque produit. Types de supports redistribuant la pression Patients pouvant en bénéficier Remarques Mousse à spécificité élevée n Patients à risque faible à modéré d’escarre en raison de l’immobilité et l’inactivité n Dispositifs remplis d’air* ou de gel n Patients à risque faible à modéré d’escarre en raison de l’immobilité et l’inactivité n Patients très lourds, rigides ou difficiles à repositionner n Certains supports remplis d’air à pression constante et faible peuvent être ajustés selon le poids et la répartition du poids en adaptant la quantité et la pression d’air pompé n Air fluidisé n Les patients présentant des escarres constituées et ne pouvant être détournés de l’escarre ou présentant des escarres sur deux surfaces de retournement ou plus (ex. sacrum et trochanter) n Les patients se rétablissant d’une chirurgie par lambeau pour réparation d’une escarre n n n Supports statiques Lorsque cela est possible, éviter l’utilisation de produits en plastique comme les couches d’incontinence, afin de minimiser la rétention de chaleur et d’humidité sur la peau Des accidents se sont produits lorsque les cellules sont brusquement dégonflées puis regonflées, ex. à la suite d’une coupure électrique. Ils devraient idéalement être utilisés lorsqu'un générateur électrique de dépannage est disponible n Les supports remplis de gel peuvent augmenter l’humidité cutanée Les patients présentant de larges plaies ouvertes peuvent se déshydrater en raison d’importants volumes d’air se déplaçant à travers le support. n Certains patients ne sont pas capables de tolérer la sensation de flottement ou de chaleur de la surface Supports dynamiques Pression alternée Patients qui ne peuvent être tournés d’un côté à l’autre ou ne peuvent bouger Le gonflement et le dégonflement peuvent être désagréables, en particulier chez certains groupes de patients, notamment ceux atteints de démence n Les patients peuvent se sentir perturbés par le bruit ou avoir froid *Les supports remplis d’air sont parfois désignés sous le terme de supports motorisés à faible perte d’air. Cependant, strictement parlant, une faible perte d’air est liée à la propriété de certains supports à laisser l’air s’échapper des coussins pour faciliter la gestion de la température et l’humidité de la peau (voir : Microclimat en contexte20, pages 19–25). FICHE TECHNIQUE À moins d'une contreindication médicale, il convient de poursuivre les repositionnements des patients placés sur un support pour leur confort et leur capacité fonctionnelle, ainsi que pour le soulagement de la pression. pression en gonflant et dégonflant successivement les zones du support (Figure 9). Par conséquent, ils sont moins fiables que les supports statiques sur les propriétés d'immersion et d'enveloppement pour redistribuer la pression. Les valeurs idéales en termes de fréquence, durée, ampleur et taux de gonflement et de dégonflement n’ont pas été déterminées. Un document de consensus non définitif a récemment proposé une méthode standardisée pour évaluer les supports dynamiques44. Iglesias et al ont rapporté que les matelas à pression alternée sont susceptibles d’avoir un meilleur rapport coût-efficacité que les surmatelas à pression alternée45. De plus, le temps moyen de formation d’une escarre a été supérieur de plus de 10 jours sur les matelas à pression alternée par rapport aux surmatelas à pression alternée45. Lorsque les matelas 8 | ANALYSE INTERNATIONALE : PRÉVENTION DES ESCARRES à pression alternée ont été comparés aux matelas de mousse viscoélastique, Vanderwee et al n'ont pas mis en évidence de différence significative de l'incidence des escarres46. Les escarres de la région sacrée ont eu tendance à être plus importantes sur les matelas à pression alternée chez les patients identifiés comme nécessitant des mesures préventives fondées sur l'échelle de Braden46. Une méta-analyse portant sur 15 essais contrôlés et randomisés a permis de conclure que lorsque les questions méthodologiques sont prises en compte, les matelas à pression alternée sont plus susceptibles d'être plus efficace que les matelas d'hôpital standards pour la prévention des escarres47. Sélection d’un support La sélection d’un support adéquat pour la FICHE TECHNIQUE Un suivi régulier est essentiel pour évaluer l’efficacité des stratégies de redistribution de la pression : tout signe d’atteinte liée à la pression doit inciter à réaliser rapidement une réévaluation des stratégies en œuvre. redistribution de la pression (Tableau 1) ne doit pas être fondée sur le score d'évaluation du risque seul. Les éléments suivants doivent également être pris en compte : ■■ Niveau de mobilité dans le lit – c'est à dire jusqu’à quel point le patient peut bouger dans le lit et est-il en mesure de sortir seul de son lit ou a-t-il besoin d’aide pour le faire ? ■■ Confort du patient – certains patients trouvent certains supports inconfortables ■■ Besoin d’une prise en charge du microclimat – certains supports aident à gérer la chaleur et l'humidité directement sous le patient (voir: Microclimat en contexte20, pages 19–25) ■■ Contexte des soins – par exemple, certains systèmes intégrés ne sont pas adaptés à un contexte de prise en charge à domicile en raison de leur poids et de la nécessité de disposer d'une source d'énergie de remplacement, ex. un générateur, en cas de perte de courant. Toutefois, une étude montre que les politiques de remboursement, et non l’état du patient, étaient clairement associées à la sélection d’un support48. Les matelas en mousse supérieure (ex. matelas en mousse viscoélastique) sont adaptés à plusieurs patients à risque, mais ceux à risque plus élevé nécessiteront un support motorisé à faible perte d’air capable de modifier les propriétés de distribution de la charge. Les patients bariatriques peuvent être trop lourds pour certains supports de redistribution de la pression et nécessiter un dispositif plus large ou comportant des caractéristiques visant à s’adapter à des patients dont le poids est important. Des caractéristiques supplémentaires des systèmes intégrés peuvent être la rotation latérale ou la vibration du support pour aider les patients ayant des problèmes de ventilation et perfusion. L’option « aide au retournement » est conçue pour faciliter le repositionnement, les examens et les changements de draps. Elle n'est pas destinée à être utilisée par les patients pour se retourner eux-mêmes. OBSERVATION ET RÉ-ÉVALUATION Une fois que des stratégies de redistribution de la pression ont été mises en œuvre, il est important d’en évaluer l’efficacité. L’indicateur le plus important est la présence ou l’absence de modification cutanée, particulièrement audessus de saillies osseuses. S’il y a des indications d’atteinte liée à la pression, il pourrait être nécessaire d’augmenter et/ou de modifier les stratégies de prévention. Des modifications de l’état des patients et leur niveau de risque permanent devraient également être suivis car ils peuvent modifier les stratégies de prévention nécessaires. Lorsqu’un support spécialisé est utilisé, les soignants doivent vérifier régulièrement que le dispositif fonctionne adéquatement et s’assurer que : ■■ un matelas en mousse reprend toujours sa forme originale lorsque la pression est éliminée ■■ les dispositifs remplis à l’air sont adéquatement gonflés ■■ les matelas en gel comportent du gel dans toute leur structure et qu’il n’y a pas de zone où le gel aurait été déplacé. ■■ les matelas à pression alternée gonflent et se dégonflent adéquatement ■■ un dispositif motorisé est branché à l’alimentation électrique. Tous les supports, lits d’hôpital et systèmes intégrés ont une durée de vie limitée, même si la durée de vie exacte n'est actuellement pas connue. Les professionnels de santé doivent être attentifs à cela et lorsqu’une escarre ne cicatrise pas, ils doivent envisager la possibilité qu’un support « usé » en soit la cause ou joue un rôle. CONCLUSION En plus d’un effet direct, la pression agit également indirectement par la production de contraintes de cisaillement pour conduire à une escarre. La capacité de la pression à produire une atteinte aux tissus mous est liée à l’intensité et la durée de la pression appliquée. Les patients incapables de bouger ou de demander à être changés de position sont ceux le plus à risque des effets de la pression. Les interventions visant à diminuer l’effet de la pression et à diminuer l’incidence des escarres comportent le repositionnement des patients et l’utilisation de supports spécialisés. Les décisions relatives au choix du support peuvent être améliorées par l'évaluation du fonctionnement des supports et de leur adaptation à quel type de patient. Cependant, en dépit de l’opinion clinique experte, le choix d’un support est souvent fait sur une base financière. Des études sur l’efficacité des systèmes de redistribution de la pression pour réduire l’incidence des escarres guidera les priorités pédagogiques, contribueront à la prise de décision et aideront à s’assurer d’un financement pour des supports appropriés, indépendamment du contexte des soins. RÉFÉRENCES 1. National Pressure Ulcer Advisory Panel/ European Pressure Ulcer Advisory Panel. Pressure Ulcer Prevention & Treatment: Clinical Practice Guidelines. Washington DC, USA: National PRESSION, CISAILLEMENT, FRICTION ET MICROCLIMAT EN CONTEXTE | 9 Pressure Ulcer Advisory Panel, 2009. 2. European Pressure Ulcer Advisory Panel and National Pressure Ulcer Advisory Panel. Prevention and treatment of pressure ulcers: quick reference guide. Washington DC, USA: National Pressure Ulcer Advisory Panel, 2009. Accessible à l’adresse suivante : www.npuap.org and www.epuap.org (accessed 23 November 2009). 3. Reger SI, Ranganathan VK, Orsted HL, et al. Shear and friction in context. 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Ainsi, la définition la plus récente des escarres, qui ont été élaborées par une collaboration internationale entre le National Pressure Ulcer Advisory Panel (NPUAP) et l’European Pressure Ulcer Advisory Panel (EPUAP), souligne le rôle de la pression et indique que le cisaillement peut être impliqué en association à la pression dans le développement des escarres1. Le même travail de collaboration cite également le cisaillement dans le contexte de lésions tissulaires profondes, définies comme « causées par une atteinte des tissus mous sous-jacents liée à la pression et/ou au cisaillement »1. Bien qu’il n’y ait pas de consensus sur le fait que la friction soit une cause directe d’escarre, cet article aborde cet élément en raison de son association étroite au cisaillement. La pression et le cisaillement sont également intimement liés : une pression sur les tissus mous, particulièrement audessus d’une saillie osseuse, entraînera un certain degré de cisaillement par déformation des tissus2,3. La première partie de cet article définit clairement le cisaillement et la friction et discute du rôle de chacun dans la formation d'une escarre. La deuxième partie de l’article examine comment reconnaître les patients à risque de lésion de la peau ou des tissus mous en raison d’un cisaillement et d’une friction. Le texte aborde alors les actions qui peuvent être prises pour éviter ou minimiser le cisaillement et la friction et donc compléter d’autres mesures pour diminuer le risque global de formation d’escarres. DÉFINITIONS La terminologie relative au cisaillement peut être déroutante : le terme « cisaillement » est souvent utilisé pour signifier « contrainte de cisaillement » ou « force de cisaillement ». De plus, le cisaillement et la friction sont souvent tous deux mentionnés dans le contexte de l’étiologie des escarres, et parfois, de manière inexacte, ces termes sont utilisés de manière interchangeable. Qu’est-ce que le cisaillement ? La contrainte de cisaillement résulte de l’application d’une force parallèle (tangentielle) à la surface d’un objet, tandis que la base de l’objet reste stationnaire. (Remarque : La pression est le résultat d’une force appliquée perpendiculairement (en angle droit) à la surface d’un objet (voir : Pression en contexte3, pages 2–10).) La contrainte de cisaillement entraîne une modification de la forme de l’objet (déformation) (Figure 1). L'importance de la déformation causée par une contrainte de cisaillement est quantifiée en termes de tension de cisaillement. Tout comme la pression, la contrainte de cisaillement est calculée en termes de force sur la zone à laquelle elle est appliquée (Encadré 1) (voir : page 14 et Encadré 2 pour plus de détails). La contrainte de cisaillement est exprimée selon les mêmes unités que la pression : le plus souvent en pascals (Pa), ou parfois en newtons/mètre carré (N/m2). Qu’est-ce que la friction ? La friction est définie comme la force qui résiste au mouvement relatif de deux objets en contact. Elle est mesurée en newtons (N). Cependant, le terme « friction » est également souvent utilisé pour signifier l’action d’un objet qui frotte contre un autre (voir : page 14 et Encadré 2 pour plus de détails). QU’EST-CE QUI EST À L'ORIGINE DES CONTRAINTES DE CISAILLEMENT? La gravité produit une force qui attire un patient sur le support sur lequel il repose. La force opposée produite par le support peut être divisée en deux composantes : ■■ une composante perpendiculaire – qui entraîne une pression ■■ une composante tangentielle – qui entraîne des contraintes de cisaillement (Figure 2 page 12). ENCADRÉ 1 Définition de la contrainte de cisaillement Contrainte de = Force tangentielle appliquée (N) cisaillement Zone d’application d’une force (pascals ou N/m2) (m2) 1 Pa = 1 N/m2 Objet avant application d’une force externe Force tangentielle (parallèle) L’application d’une force tangentielle entraîne une déformation et une contrainte de cisaillement Angle produit par la déformation = contrainte de cisaillement 1 kPa = 1000 N/m2 Définitions de la contrainte de cisaillement : ●● « Une action ou une contrainte résultant de forces appliquées et qui entraîne ou tend à entraîner deux parties internes contiguës du corps à se déformer selon le plan transversal (c.-à-d. une tension de cisaillement). »4 ●● « La force par unité exercée parallèlement au plan d’intérêt. »5 PRESSION, CISAILLEMENT, FRICTION ET MICROCLIMAT EN CONTEXTE | 11 FICHE TECHNIQUE Les contraintes de cisaillement sont causées par : ●● la friction, ex. glisser en bas du lit ●● une distribution inégale de la pression, ex. au-dessus d’une saillie osseuse. Figure 2 Pression et cisaillement appliqués à la région sacrée d’un patient partiellement incliné (adapté de9) La friction contribue à la formation de contraintes de cisaillement en tendant à conserver la peau en place contre le support, tandis que le reste du corps du patient se déplace vers le pied du lit ou le bord du siège Le mouvement relatif de la peau et des tissus sous-jacents entraîne des contraintes de cisaillement se développant dans les tissus mous au-dessus des saillies osseuses, telles que le sacrum. L’angle du support dorsal du lit ou l’angle du dossier d’une chaise ou d’un fauteuil roulant influencent fortement le niveau de contrainte de cisaillement dans les tissus6,7. Tous les angles entre une position assise droite et une position allongée entraîneront des contraintes de cisaillement causées par la tendance du corps à glisser vers le bas selon la pente. Une position allongée avec un dossier selon un angle de 45° entraînera une combinaison particulièrement élevée de contraintes et de pression au niveau des fessiers et de la zone sacrée, car, dans cette position, le poids du haut du corps se répartis de manière égale en forces perpendiculaire et tangentielle6,8. Les contraintes de cisaillement dans les tissus peuvent également être causées par une pression locale appliquée à une surface cutanée. L’application de pression entraîne une compression des tissus, et ce faisant, déforme les tissus adjacents (Figure 3). Ceci est parfois appelé « pincement-cisaillement ». Des gradients de pression importants (c.-à-d. d’importantes modifications de la pression sur une petite surface) sont susceptibles de produire un pincementcisaillement élevé. Composante tangentielle Composante perpendiculaire Pression = Force produite en conséquence de la gravité qui attire le patient dans le lit composante perpendiculaire de la force zone de contact Contrainte de = cisaillement composante tangentielle de la force zone de contact 12 | ANALYSE INTERNATIONALE : PRÉVENTION DES ESCARRES Os Contrainte de cisaillement (pincementcisaillement) } Contrainte de tension Contrainte de compression Tissus Pression à la surface Figure 3 Distribution inégale de la pression comme cause de contrainte de cisaillement (adapté de10) COMMENT LES CONTRAINTES DE CISAILLEMENT CONTRIBUENT-ELLES À LA FORMATION D’UNE ESCARRE ? On estime que les contraintes de cisaillement agissent en conjonction avec la pression pour produire l’atteinte et l’ischémie de la peau et des tissus plus profonds qui entraîne des escarres. Les mécanismes impliqués comportent la déformation des tissus, le pincement et l’occlusion des capillaires sur les plans de tissu, les diminutions du flux sanguin et la perturbation physique des tissus ou des vaisseaux sanguins. Déformation des tissus Sur les objets couchés (ex. les tissus corporels), les contraintes de cisaillement peuvent entraîner un déplacement plus important d’une couche par rapport à une autre (Figure 4). Lorsque des contraintes de cisaillement sont appliquées à des tissus, la quantité de mouvement entre les couches de tissus (c.-à-d. le niveau de potentiel d’occlusion d’un vaisseau sanguin et de perturbation physique des tissus) est affectée par le relâchement des fibres de tissus conjonctifs entre les couches11 et la rigidité relative des couches tissulaires. Lorsque la peau est âgée, l’élasticité de la peau et son humidité tendent à diminuer. Par conséquent, des mouvements de tissu cutané plus prononcés peuvent se produire au niveau de la peau et des couches sous-dermiques lorsque des forces externes sont appliquées12. Des différences de rigidité de chaque couche tissulaire signifient que la déformation de chaque couche diffère lorsqu’une force externe est appliquée. Des tissus plus rigides se déforment moins que les matériaux moins rigides. Le Tableau 1 montre que la différence de rigidité la plus importante des tissus adjacents (c.-à-d. le potentiel Figure 4 Effet des contraintes de cisaillement sur les couches de tissu corporel (avec la permission de T Ohura) Lorsqu’une force de cisaillement est appliquée, la friction entre la peau et le support tend à retenir la peau en place tandis que les tissus plus profonds sont déplacés. La quantité de déplacement (c.-à-d. la tension de cisaillement) est supérieure à proximité de l’os par rapport aux couches de tissus superficiels. FICHE TECHNIQUE ●● Les contraintes de cisaillement agissent en conjonction avec et amplifient les effets de la pression pour produire l’ischémie et la lésion tissulaire qui peuvent entraîner la formation d’escarres. ●● Bien que les contraintes de cisaillement puissent être mesurées à la surface et que les modèles informatiques soient utiles, il est nécessaire de concevoir des dispositifs qui mesurent directement les contraintes de cisaillement dans les tissus profonds, ex. muscle et tissus adipeux. Os Muscle Force de cisaillement Tissu adipeux Peau Support le plus important de formation de contraintes de cisaillement) se situe entre l’os et le muscle13-15, mais que le potentiel de formation de contraintes de cisaillement se produit également entre les muscles et les tissus adipeux, ainsi qu’entre les tissus adipeux et la peau. Ceci aide à expliquer pourquoi les escarres se produisent fréquemment au-dessus de saillies osseuses, où les pressions d’interface tendent également a être le plus fortes16,17. Les patients présentant des saillies osseuses sont particulièrement prédisposés aux contraintes de cisaillement et à la pression. Les personnes minces tendent à présenter des contraintes de cisaillement et une pression plus élevées au coccyx et au sacrum que les personnes obèses18. Effets sur les vaisseaux sanguins Les contraintes de cisaillement diminuent ou bloquent le flux sanguin par l’intermédiaire d’un certain nombre de mécanismes : ■■ compression et occlusion directes des vaisseaux sanguins (Figure 4) ■■ l’étirement et le rétrécissement des lits capillaires du derme. Lorsque des niveaux de contrainte suffisamment élevés sont appliqués, le diamètre des capillaires devient inadapté pour le flux sanguin19,20. ■■ courbure et pincement des vaisseaux sanguins perpendiculaires à la surface cutanée21. Les capillaires des tissus adipeux sont également vulnérables aux effets des contraintes TABLEAU 1 Rigidité relative des tissus corporels (sur la base des études chez l’animal)13-15 Tissu corporel Rigidité (indiquée par module d’élasticité (kPa)) Os 20.000.000 Muscle 7 Tissu adipeux 0,3 Peau 2–5 Friction entre la peau et le support de cisaillement, car les tissus adipeux ne disposent pas d’une résistance à la traction (c.-à-d. qu’elle se déforme et se déchire facilement)22. Les vaisseaux sanguins plus profonds et de plus gros calibre peuvent également être affectés par les contraintes de cisaillement. L’irrigation sanguine de la peau et des tissus sous-cutanés peut être retracée jusqu’aux artères qui se trouvent en dessous des fascias profonds et des muscles. Ces artères – connues sous le nom de vaisseaux perforants – tendent à être perpendiculaires à la surface et irriguer des zones très importantes. Leur trajet perpendiculaire les rend particulièrement propices aux contraintes de cisaillement et peut expliquer que l’on observe que certaines des escarres sacrées les plus importantes tendent à suivre le réseau de vaisseaux sanguins spécifiques. La pression et les contraintes de cisaillement contribuent ensemble à diminuer le flux sanguin. Les modèles biomécaniques ont démontré que les contraintes de cisaillement appliquées en plus de la pression peuvent entraîner une occlusion et une déformation plus importante des capillaires des muscles squelettiques autour des saillies osseuses que ne le fait la pression seule20. À des niveaux de contrainte de cisaillement suffisamment élevés, seule la moitié de la pression est nécessaire pour produire une occlusion vasculaire par rapport à une situation dans laquelle peu de contraintes de cisaillement sont présentes23. Inversement, si les contraintes de cisaillement sont diminuées, les tissus peuvent tolérer des pressions plus élevées sans occlusion du flux sanguin20. Mesure des contraintes de cisaillement Plusieurs dispositifs sont disponibles pour mesurer les contraintes de cisaillement aux interfaces cutanées18,24,25 ; certains dispositifs mesurant simultanément la pression d’interface15,26. Les contraintes de cisaillement internes sont difficiles à mesurer directement, mais ont été estimées à l’aide de modèles informatiques27 et par modèle informatique associé à l’imagerie par résonance magnétique (IRM)16,17. PRESSION, CISAILLEMENT, FRICTION ET MICROCLIMAT EN CONTEXTE | 13 FICHE TECHNIQUE ●● L’importance de la force de friction dépend de la force perpendiculaire et d’une caractéristique de l’interaction entre les deux objets que l’on appelle coefficient de friction. ●● Une peau humide possède un coefficient de friction supérieur à celui d’une peau sèche. Elle est donc plus susceptible d’être exposée à des niveaux supérieurs de friction et de contraintes de cisaillement. ●● De nombreuses recherches sont nécessaires pour totalement élucider de quelle manière les contraintes de cisaillement entraînent une atteinte tissulaire, l’effet de la fréquence et/ou la vitesse des changements de position sur les contraintes de cisaillement, et quels sont les patients le plus à risque de lésion par contrainte de cisaillement4. ●● Plusieurs des interventions visant à diminuer les contraintes de cisaillement et la friction tournent autour de tentatives par les professionnels de santé, les soignants ou les patients euxmêmes pour bouger ou repositionner les patients, étant donné que le risque de contrainte de cisaillement et de friction est le plus important durant ce type de manœuvre. QU’EST-CE QUI AFFECTE LA FRICTION ? La force de friction à l’interface entre le patient et le support dépend de la force perpendiculaire et le coefficient de friction de la peau avec la surface de contact (Encadré 2). Plus la force perpendiculaire est élevée, plus la force de friction sera élevée. De même, plus le coefficient de friction est élevé, plus la force de friction est élevée et plus la force nécessaire pour faire bouger le patient par rapport au support est importante. Le coefficient de friction des textiles ou d’autres matériaux contre la peau est principalement influencé par : ■■ la nature du textile – ex. les textiles rugueux produisent des coefficients de friction plus élevés ■■ l’humidité de la peau et l’humidité au niveau du support – ces éléments augmentent le coefficient de friction et sont particulièrement pertinents dans le contexte clinique ■■ lorsque la peau est moite en raison de la transpiration ou du fait d’une incontinence (voir : Microclimat en contexte28, pages 19–25) ■■ l’humidité ambiante – une humidité ambiante élevée peut augmenter l’humidité de la peau et entraîner une transpiration et par conséquent, augmenter le coefficient de friction (voir cidessus)29. Une étude examinant l’interaction entre la peau et un textile en polyester et coton a confirmé qu’à mesure que l’humidité de la peau augmentait, le coefficient de friction augmentait également29. La même étude a révélé que le coefficient de friction d’un tissu humide sur la peau était plus du double de celui d’un tissu sec29. COMMENT LA FRICTION POURRAIT-ELLE PARTICIPER À LA FORMATION D’UNE ESCARRE ? L’importance de la friction dans le contexte des escarres réside principalement dans sa participation à la production de contraintes de cisaillement. Des abrasions, ulcérations cutanées ou phlyctènes peuvent se produire lorsque la force tangentielle appliquée par friction à la surface de la peau est plus large que la force perpendiculaire (pression) ou lorsqu’une petite quantité de pression avec une force tangentielle large est appliquée à la peau. Une atteinte superficielle résultant d’une friction se produira plus facilement si la peau est déjà irritée ou inflammée, ex. en raison d’une macération, d’une dermatite associée à l’incontinence ou l’infection, des atteintes superficielles. Une friction appliquée à la peau peut également entraîner des contraintes de 14 | ANALYSE INTERNATIONALE : PRÉVENTION DES ESCARRES ENCADRÉ 2 Friction La force de friction s’oppose aux forces appliquées à l’extérieur. Le mouvement d’une surface contre une autre ne se produira que lorsque la force appliquée est supérieure à la force de friction. La force de friction produite par deux surfaces en contact dépend de la force perpendiculaire (liée au poids de l’objet) et le coefficient de friction. Le coefficient de friction est une valeur qui dépend des propriétés des deux objets en contact. Force appliquée poussant le matériau supérieur Force perpendiculaire Force de friction (N) = force perpendiculaire x coefficient de friction Définitions issues de Support Surface Standards Initiative5 : ■ Friction – « La résistance au mouvement dans une direction parallèle à la frontière commune de deux surfaces. » ■ Coefficient de friction – « Mesure de la quantité de friction présente entre deux surfaces. » cisaillement dans les couches tissulaires plus profondes telles qu’un muscle. Mesure de la friction Les expériences liées à la mesure de la friction déterminent généralement le coefficient de friction des matériaux étudiés. Une méthode standardisée fréquemment utilisée calcule le coefficient de friction entre un bloc de métal et un tissu30. Cette normalisation devrait faciliter la comparaison entre les textiles. Cependant, les différences d’équipement et de méthodes de mesure utilisées dans les études menées, rendent difficiles la comparaison des résultats29-33. Par ailleurs, le rôle des textiles dans la prévention et la formation des escarres est insuffisamment étudié34,35. PRISE EN CHARGE DES CONTRAINTES DE CISAILLEMENT ET DE LA FRICTION En plus de la redistribution de la pression, du repositionnement et de la mobilisation du patient, les stratégies pour diminuer les contraintes de cisaillement et la friction constituent une partie importante des meilleures pratiques cliniques pour diminuer le risque global des patients vis-à-vis de la formation d’escarres. Un certain nombre de directives pour la prévention des escarres ont élaboré des recommandations pour aider la prise de décision sur des soins appropriés. Ces recommandations comportent les récentes directives élaborées par la NPUAP et EPUAP1 et celles de l’Association des infirmières et infirmiers autorisés de l’Ontario36. Les décisions de soins nécessiteront un jugement clinique fondé sur le risque du patient, la disponibilité des ressources, le confort et les souhaits du patient et d’autres traitements ou besoins de soin. Les principes impliqués par une minimisation des effets des contraintes de cisaillement et de la friction comportent : ■■ une diminution des forces tangentielles – ex. lorsque le patient est allongé, en minimisant l’élévation de la tête du lit, et lorsque le patient est assis, en évitant qu’il ne glisse vers le bas/l’avant7 ■■ éviter les gestes qui provoquent une déformation des tissus – ex. éviter de faire glisser ou de trainer les patients, en s’assurant qu’ils sont positionnés de manière à ne pas leur permettre de glisser facilement et en s’assurant de ne pas tirer sur les tissus corporels pendant le repositionnement ou de ne pas les laisser déformés après un repositionnement ■■ augmenter la surface de contact avec le support – ceci répartit les charges perpendiculaire et tangentielle et la force de friction sur une zone plus large, diminuant ainsi la pression locale et les contraintes de cisaillement11. FICHE TECHNIQUE Les patients présentant un risque particulier de cisaillement et de friction sont ceux : ●● à risque de lésion liée à la pression ●● qui nécessitent une élévation de la tête de lit ●● présentant une peau moite ou endommagée ●● qui sont difficiles à repositionner. Figure 5 Atteinte liée à la friction (avec la permission H Orsted) Ce patient présente des abrasions superficielles liées à une brûlure par les draps et un traumatisme par grattement lié à la bague d’un soignant. L’utilisation de textiles à faible coefficient de friction pour recouvrir les supports diminuera la force de friction et les contraintes de cisaillement. Cependant, un équilibre est nécessaire : si le coefficient de friction est trop faible, le patient peut glisser du support et être difficile à replacer en position stable. Démarches de pratique clinique La meilleure pratique clinique débute par l’identification des patients à risque et s’achève par une évaluation de l’impact de la mise en œuvre (c.-à-d. l’effet de l’incidence et de la prévalence des escarres). Les recommandations cliniques des directives récentes1 de la NPUAP et EPUAP qui sont particulièrement liées à la contrainte de cisaillement et à la friction sont passées en revue dans les étapes de pratique ci-dessous. La majorité de ces recommandations sont classées comme ayant un « niveau de preuve = C », signifiant qu’elles sont appuyées par des données probantes indirectes et/ou une opinion d’experts1. Étape 1 : Identifier les personnes à risque de contraintes de cisaillement et de friction ■■ Établir une politique d’évaluation des risques dans tous les contextes de soins de santé1. ■■ Envisager l’impact potentiel des éléments suivants facteurs sur le risque d’apparition d’une escarre liée à la pression d’un individu : friction et cisaillement, perception sensorielle, état de santé général et température corporelle1. L’encadré 3 (page 16) énumère les types de patients à risque de contraintes de cisaillement et de friction. Les trois échelles de risque d’escarre les plus souvent utilisées (Braden, Norton et Waterlow) reconnaissent toutes l’humidité et l’incontinence comme facteurs de risque d’escarres40-42. Cependant, seule l’échelle de Braden évalue spécifiquement la friction et le cisaillement, sur la base du niveau d’aide nécessaire pour bouger, la fréquence des glissements dans un lit ou chaise et la présence de spasticité, de contractures ou d’agitation responsables de friction40. Étape 2 : évaluer les personnes à risque de contraintes de cisaillement et de friction ■■ S’assurer qu’une évaluation cutanée exhaustive face partie intégrante de la politique de dépistage du risque en place dans tous les contexte de soin1. Une évaluation cutanée complète permettra aux cliniciens de déterminer la présence d’escarres constituées et de rechercher des signes qui indiquent que le patient est à risque de contraintes de cisaillement et de friction (voir Étape 1). Bien qu’il soit très important de distinguer cliniquement une escarre de lésions liées à l'humidité telles que la dermatite associée à l'incotinence43. La présence de lésions associées à l’humidité augmente le coefficient de friction de la peau et par conséquent le risque de contraintes de cisaillement et de friction. Si des atteintes liées à des contraintes de cisaillement et de friction sont constituées, déterminer comment le cisaillement et la friction ont été impliqués pourrait suggérer des interventions pour empêcher des atteintes supplémentaires. Par exemple, si l’utilisateur d’un fauteuil roulant développe une atteinte, une analyse sur la manière dont sont réalisés les transferts peut révéler que le patient est « tirer » et suggérer des interventions pour que ce phénomène diminue. Étape 3 : Fournir des soins aux personnes à risque de contraintes de cisaillement et de friction Soins cutanés ■■ Ne pas frotter vigoureusement la peau à risque d’escarres1. Le frottement de la peau représente une pratique dépassée qui malheureusement persiste dans PRESSION, CISAILLEMENT, FRICTION ET MICROCLIMAT EN CONTEXTE | 15 ENCADRÉ 3 Patients à risque de contraintes de cisaillement et de friction Patients qui : ●● doivent avoir une élévation de la tête du lit en raison de difficultés respiratoires ou l’utilisation de dispositifs médicaux tels des ventilateurs ou un système d’alimentation par sonde ●● sont difficiles à repositionner sans glisser sur les draps ou le support ●● glissent d’une position dans laquelle ils ont été placés dans un lit, une chaise ou un fauteuil roulant – ex. les patients incapables ou trouvant difficile de se placer seuls, car ils sont immobiles, ont une perte sensorielle ou sont physiologiquement instables ●● sont trop faibles ou trop instables pour être en mesure de se repositionner efficacement sans être tirés sur les draps ou les supports ●● ont une peau humide, mouillée ou ayant macéré aux endroits où la peau touche un support ou une autre surface cutanée (plis cutanés/pannus) – ex. en raison d’une transpiration, d’incontinence ou de pansements qui fuient ●● sont exposés à de fortes pressions, particulièrement audessus de saillies osseuses – ex. patients très minces ●● sont obèses – le risque peut être accru en raison de l’immobilité et de difficultés à effectuer des transferts ou à se repositionner, augmentant la transpiration et une mauvaise irrigation du tissu adipeux37 ●● présentent une diminution de l’élasticité cutanée et/ou turgescence cutanée – ex. en raison d’un vieillissement ou d’une déshydratation ●● ont une peau fragile – ex. en raison de l’administration de stéroïde ou d’anticoagulant, de tissu cicatriciel audessus d’une escarre cicatrisée, d’une inflammation ou d’un œdème ●● ont des signes d’atteinte cutanée par friction constituée – ex. abrasions superficielles ou phlyctènes sur les zones en contact avec le support (Figure 5) ●● ont une escarre ou une escarre cicatrisée ●● ont développé un sapement d’une escarre constituée – ceci peut signifier que les contraintes de cisaillement sont appliquées. Le sapement dans ce cas sera en direction d’une saillie osseuse sousjacente38 ●● présentent une escarre de forme irrégulière39 ●● tendent à frotter leurs talons sur le lit en raison d’une agitation – ex. secondairement à la douleur ou la démence ●● Les pansements de ces patients présentent un décollement partiel le long d’un bord – les forces impliquées pouvant provenir du côté du décollement. certains endroits. Lorsque des cliniciens frottent des tissus déjà rouges et inflammés, il y a une possibilité d'atteinte aux vaisseaux sanguins sousjacents et/ou à la peau fragile36,44,45. Si des émollients sont appliqués à la peau, ils doivent être appliqués avec douceur pour éviter 16 | ANALYSE INTERNATIONALE : PRÉVENTION DES ESCARRES un traumatisme inutile. Il convient d’éviter que des émollients soient non totalement absorbés, car ils laissent un résidu sur la peau et peuvent augmenter le coefficient de friction. Des données non confirmées indiquent que l'application de lotions à base de silicone sur la peau de patients qu'il est difficile de tirer ou qui présentent une résistance durant le repositionnement peut soulager la friction. La prise en charge de l'humidité cutanée pour éviter qu’elle ne devienne moite ou macérée et augmenter le coefficient de friction de la peau (voir: Microclimat en contexte28, pages 19–25). ■■ Envisager l’utilisation d'un pansement film cutané pour protéger des zones cutanées à risque de lésion par friction ou de risque de lésion liée au pansement1. Une gamme de plus en plus importante de pansements (y compris des pansements film) qui visent à diminuer les contraintes de cisaillement et de friction sur les zones vulnérables est actuellement à l’étude46. Les pansements transparents, ex. films, aide au suivi de la peau sous-jacente. Une étude sur l’animal a révélé que les pansements film génèrent une diminution plus importante des cisaillements et de la pression que d'autres types de pansement26. Les types de pansement évalués lors d’études cliniques comportent un pansement hydrocolloïde ayant un faible coefficient de friction à la surface externe. Il a été démontré que ce pansement permettait une diminution des forces de cisaillement appliquées aux zones propices aux lésions par cisaillement, telles que les talons47, et de diminuer significativement l’incidence des érythèmes persistants au-dessus du grand trochanter48. Dans une étude plus récente, l’application d’un pansement à base de silicone doux au sacrum chez les patients de soins intensifs à risque élevé a été associée à une élimination de l'incidence des escarres sacrée49. Positions ■■ Sélectionner une position acceptable pour l’individu et qui minimise la pression et le cisaillement exercés sur la peau et les tissus mous1. ■■ Limiter l’élévation de la tête du lit à 30 degrés pour un individu alité, à moins de contreindication médicale. Encourager les patients à dormir en position latérale entre 30 et 40 degrés ou à plat si cela n'est pas contre-indiqué1. ■■ Utiliser des aides au transfert pour limiter la friction et le cisaillement. Soulever (ne pas tirer) l’individu lors des repositionnements1. ■■ S'il est nécessaire de s’assoir dans le lit, éviter l’élévation de la tête du lit ou une position avachie qui place la pression et le cisaillement sur le sacrum et le coccyx1. L’apport des conseillers spécialisés sur la position assise et le support peut être nécessaire pour s'assurer que le patient est placé dans une position confortable qui minimise le cisaillement et la friction et évite l’élévation de la tête du lit. Une légère surélévation en flexion du support au niveau des genoux peut contribuer à éviter que le patient ne glisse du lit. La recommandation pour limiter l’élévation de la tête du lit est fondée sur une étude réalisée sur des volontaires sains. Cette étude a révélé que la position semi-Fowler à 30° (qui implique une élévation de la tête du lit et des jambes à 30°) a généré une pression et des contraintes de cisaillement plus faibles que la position assise avec la tête du lit à 30°50. La même étude a révélé que la position latérale à 30° produisait des pressions d’interface plus faibles que la position latérale à 90°50. Cependant, le positionnement doit envisager l'ensemble des besoins du patient. Par exemple, si le patient est ventilé, les protocoles de soins critiques peuvent recommander une élévation de la tête du lit entre 30 et 45°. Le risque de brûlure par friction peut être diminué en repositionnant attentivement les patients afin d’éviter de les tirer sur la couverture du support, et l’utilisation de draps de retournement ou d’aides au transfert51. Supports ■■ Fournir un support qui est adéquatement adapté aux besoins du patient pour une redistribution de la pression, une diminution du cisaillement et un contrôle du microclimat1. La sélection d’un support peut nécessiter l'opinion d'une équipe multidisciplinaire. En plus du soulagement de la pression et des contraintes de cisaillement, la sélection d’un support doit prendre en compte des facteurs tels que la capacité à prendre en charge les aspects liés au microclimat, ex. humidité et température de la peau (voir: Microclimat en contexte28, pages 19–25). Après repositionnement, certains cliniciens recommandent que le patient soit rapidement retiré du support pour aider à libérer les forces de cisaillement qui se sont constituées pendant la manœuvre. Ceci fournit également une opportunité pour vérifier que le support n'est pas froissé et que la peau du patient est lisse et ne s’est pas déformée. Les forces de cisaillement peuvent être diminuées lors des changements de draps lorsqu’un patient, en position assise avec les genous pliés, et en faisant correspondre les points de courbure du corps avec ceux du lit18. ■■ Prévenir le cisaillement lorsque des dispositions de rotation latérale sont utilisées. Évaluer fréquemment l’état de la peau à la recherche d’atteinte liée au cisaillement1. Les caractéristiques de rotation de certains lit permettent au patient d’être tourné d’un côté à l’autre par un mouvement mécanique du lit. Cependant, ces lits ne peuvent pas repositionner totalement les patients et des aides au positionnement seront nécessaires pour maintenir un alignement corporel approprié et prévenir les déplacements dans le lit. Les patients doivent être observés régulièrement pendant plusieurs rotations pour vérifier l’absence de mouvement de glissement pouvant causer un cisaillement ou une friction. CONCLUSION Les contraintes de cisaillement, et par assocation, la friction, représentent d’importants facteurs extrinsèques impliqués dans l’apparition, et parfois la persistance, des escarres. Cependant, plusieurs incertitudes persistent sur le rôle et les niveaux critiques de contrainte de cisaillement et friction dans la formation d’une escarre. Toutefois, une compréhension claire de la façon dont les contraintes de cisaillement et la friction se produisent aidera sans doute les cliniciens à la mise en œuvre cohérente des aspects des protocoles de prévention des escarres conçus pour minimiser les contraintes de cisaillement et éviter d’augmenter le coefficient de friction de la peau. RÉFÉRENCES 1. National Pressure Ulcer Advisory Panel and European Pressure Ulcer Advisory Panel. 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Il y a depuis peu un intérêt grandissant sur la manière dont une modification de l'environnement à la surface de la peau ou à sa proximité (microclimat) peut affecter le risque d'apparition d’une escarre4,5. Cet article définit les principaux paramètres impliqués dans la compréhension actuelle du microclimat et explore ce que l’on connaît de la relation entre le microclimat et le développement des escarres. Il décrit également les interventions qui pourraient modifier de manière bénéfique le microclimat. La discussion comporte l’effet de différents supports sur le microclimat et la manière dont la prise en charge du microclimat peut aider à éviter les escarres. FICHE TECHNIQUE Dans le contexte des escarres, la notion de microclimat fait généralement référence à la température et aux conditions d’humidité à l’interface entre la peau et le support. QU’EST-CE QUE LE MICROCLIMAT ? En 1976, Roaf a rapporté que la première conférence en Grande-Bretagne sur les escarres avait souligné des facteurs contributifs connus d'apparition d'une escarre: « Nous savons comment éviter les escarres du décubitus et la nécrose tissulaire – en maintenant la circulation, évitant une pression continue sur une longue période de temps, les abrasions, les températures très élevées ou très basses, en maintenant un microclimat favorable et en évitant les liquides irritants et les infections »6. Le maintien d’un microclimat favorable était perçu dans les premières publications sur les escarres comme un facteur modifiant clé de la capacité de la peau et des tissus sous-jacents de supporter une contrainte prolongée, c.-à-d. la pression et le cisaillement. Le rôle important d’une modification du microclimat dans la prévention des escarres a été largement occulté depuis les années 70, mais attire de nouveau de l’attention. Le microclimat a été suggéré par Roaf pour inclure la température de la peau, l’humidité et les mouvements d’air6. Cependant, le terme « microclimat » en rapport avec les escarres fait généralement aujourd’hui référence à : ■■ la température de la surface de la peau ou des tissus, et ■■ l’humidité ou l’humidité cutanée à l'interface entre le corps et le support2,7. Comme décrit plus bas, certains supports utilisent les mouvements d’air pour influencer la température et l’humidité à l’interface entre la peau et le support. Des études évaluant les effets des éléments du microclimat sur la peau et la formation des escarres ne sont pas cohérentes en termes de définitions utilisées, ce qui rend difficile l'interprétation et la comparaison. Certaines des définitions utilisées sont discutées ci-dessous. Température à la surface de la peau Les méthodes utilisées pour mesurer la température à la surface de la peau comportent : ■■ une mesure à « l’équilibre radiatif » – c.-à-d. la température de la peau exposée à atteint l’équilibre après exposition à l’air ■■ mesure de l’interface peau – support avec le patient encore en contact avec la surface ou très peu de temps après l’avoir retiré du contact avec le support. La première méthode (mesure à l’équilibre radiatif) fournit une indication de la température « intrinsèque » de la peau (et non la température corporelle centrale) du patient (bien que cela soit sujet à des variables externes telles que la température ambiante). La deuxième méthode fournit une indication de la température à l’interface entre la peau et le support. La température peut être mesurée directement, ex. avec un thermomètre, ou indirectement par l’utilisation de l’imagerie thermique par infrarouge (thermographie)8. Humidité Dans la littérature relative au microclimat, l’ « humidité » et l’« humidité cutanée » sont parfois utilisées comme synonymes. Cependant, strictement parlant, l’humidité est liée à la quantité de vapeur d’eau dans l’air : ■■ l’humidité absolue – est exprimée en terme de poids d’eau en grammes par mètre cube d’air (g/m3) ■■ l’humidité relative (souvent abrégé humidité) – est le rapport exprimé en pourcentage de la quantité de vapeur d’eau dans l’air à une température de l’air spécifique rapportée à la quantité maximale de vapeur d'eau que ce volume d'air retiendrait à cette température (Encadré 1). L'humidité relative de l’environnement en général est connue sous le terme d’humidité ambiante. L’humidité absolue est affectée par la température de l’air : de l’air chaud est capable de retenir davantage de vapeur d’eau que de l’air froid. Par conséquent, pour la même humidité absolue, un PRESSION, CISAILLEMENT, FRICTION ET MICROCLIMAT EN CONTEXTE | 19 ENCADRÉ 1 Définitions de l’humidité Humidité absolue (g/m3) = poids de la vapeur d’eau volume d’air Humidité relative à une température spécifique (%) = quantité de vapeur d’eau dans l’air à une température spécifique quantité maximale de vapeur d'eau qui peut être retenue dans l'air à cette température FICHE TECHNIQUE ●● Les définitions de chaque élément du microclimat nécessitent d'être clarifiées. La terminologie relative à l'humidité cutanée et à l'humidité peut être particulièrement peu claire. ●● Une augmentation de la température cutanée peut être liée à une escarre en augmentant la sensibilité aux effets ischémiques de la pression et des contraintes de cisaillement, et en affaiblissant la couche cornée. air plus chaud aura une humidité relative plus faible qu’un air plus froid. L’humidité relative est mesurée à l’aide d’un dispositif appelé hygromètre. Par rapport à la peau, l’humidité relative peut être mesurée à l’interface entre la peau et le support ou juste au-dessus de la peau exposée9,10. Humidité cutanée L’humidité de la peau est difficile à définir : elle peut faire référence à la présence de liquide à la surface secondaire à la transpiration, à l’incontinence, ou à un drain de plaie ou de fistule, ou au contenu en eau de la couche la plus externe de la peau elle-même (couche cornée). L’humidité de la peau peut être évaluée de manière subjective, ex. à l’aide de la sous-échelle d’humidité de l’échelle de Braden visant à évaluer le risque d’escarre : elle classe la peau comme sèche ou ayant un certain degré d’humidité indiqué par la fréquence du changement de drap et la détection de moiteur à la surface de la peau11. Les méthodes pour évaluer quantitativement le contenu en humidité de la couche cornée comportent la mesure des propriétés électriques telles que la conductance ou la capacitance12. Mouvement d’air Le déplacement de l’air constitue le facteur le moins étudié de la définition originale du microclimat par Roaf, mais il est utilisé par certains supports pour contribuer au contrôle du microclimat en modifiant la température et l'humidité/humidité cutanée. Le flux d’air peut être exprimé quantitativement en termes de vitesse du flux sur la peau (ex. en mètres par seconde) ou par le taux auquel l’air est pompé à travers un support, ex. en litres par minute. DE QUELLE MANIÈRE LA TEMPÉRATURE À LA SURFACE DE LA PEAU EST LIÉE AU RISQUE D’ESCARRE ? L’augmentation de la température corporelle (fièvre) est un facteur de risque reconnu d’escarre13,14. Il est bien établi qu’une augmentation 20 | ANALYSE INTERNATIONALE : PRÉVENTION DES ESCARRES de 1°C de la température corporelle augmente l’activité métabolique (c.-à-d. le besoin en oxygène et en énergie) des tissus corporels d’environ 10 %15. Par définition, une ischémie se produit lorsque l’irrigation tissulaire n’est pas suffisante pour satisfaire les besoins des tissus. Par conséquent, en cas d’augmentation des besoins métaboliques, une ischémie résultera d’une diminution plus faible de l’irrigation tissulaire par rapport à une situation dans laquelle les besoins métaboliques sont stables. Ceci suggère que chez un patient dont la température corporelle est élevée et l’irrigation tissulaire compromise en raison d’une exposition à la pression et au cisaillement, l’ischémie et l’atteinte tissulaire peuvent se produire plus rapidement et à des niveaux plus faibles et/ou des durées plus courtes de pression/cisaillement que si sa température corporelle était normale16. Ce concept a été étendu pour suggérer qu’une augmentation de la température de la peau pouvait jouer un rôle dans la formation d’escarres. De plus, la température affecte la résistance de la couche cornée : à 35 °C, la résistance mécanique de la couche cornée est de 25 % celle à 30 °C17. Inversement, une température corporelle centrale basse pendant une intervention chirurgicale est associée à l’apparition d’escarres14. Pour examiner si la prévention de l’hypothermie pendant la chirurgie pourrait diminuer l’incidence des escarres, Scott et al ont fourni un traitement par air chaud forcé pendant une intervention chez 338 patients. Il y a eu une diminution du risque absolu de l’incidence des escarres de 4,8 % et une réduction du risque relatif de 46 % entre les patients ayant reçu l’air chaud et ceux ayant bénéficié de soins standards. Cependant, cette différence n’a pas été statistiquement significative18. Qu’est-ce qui affecte la température de la peau ? On peut intuitivement supposer qu’une augmentation de la température corporelle centrale serait corrélée à une augmentation de la température cutanée et que ceci pourrait peut-être expliquer pourquoi la fièvre est un facteur de risque d’escarre. Cependant, il n’y a pas de preuve claire d’une corrélation et une petite étude a révélé une corrélation négative entre ces paramètres19. D’autres facteurs pouvant augmenter la température de la peau incluent une température ambiante élevée, une humidité ambiante élevée, une faible exposition à l’air et un contact avec une autre surface (ex. vêtement, support, pansement et couche d’incontinence). La peau a un rôle majeur dans la régulation de la température corporelle. Les deux principaux FICHE TECHNIQUE ●● La température de la peau varie de manière importante. Elle est influencée par un vaste éventail de facteurs environnementaux, physiologiques et pathologiques, y compris l’humidité et la température ambiantes ainsi que l’évolution pathologique. ●● Des études supplémentaires sont nécessaires pour établir si la température de la peau peut être utilisée pour déterminer le risque ou prédire le développement imminent d’une escarre. ●● Les modèles animaux ont suggéré qu'un refroidissement de la peau peut protéger les tissus contre les effets de la pression. Cependant, l'association entre l’hypothermie intraopératoire et les escarres suggèrent qu’il pourrait y avoir un stade auquel une vasoconstriction induite par le froid peut exacerber la pression induite par l’ischémie. mécanismes impliqués dans le refroidissement sont : ■■ la vasodilatation dermique – qui augmente le flux sanguin cutané et entraîne une perte de chaleur par convection et conduction ■■ la transpiration – elle refroidit la peau par évaporation Ces réponses peuvent être déclenchées par des augmentations de la température corporelle centrale, ex. lors d'une fièvre causée par une maladie ou par une activité physique, des augmentations de la température ambiante, ou le recouvrement de la peau par un linge ou un support. La transpiration locale augmente considérablement lorsque la peau est réchauffée au-dessus de 33 °C20. La transpiration peut également être déclenchée dans des conditions telles qu'un choc, une hyperthyroïdie, et une hypoglycémie. Lorsque l’humidité ambiante est élevée, l’évaporation de la transpiration peut être ralentie causant une accumulation sur la peau. L’augmentation de la transpiration est particulièrement pertinente vis-à-vis du risque d'escarre, car l'humidité à la surface de la peau peut diminuer la résilience de la peau et augmenter son coefficient de friction, la rendant plus encline aux effets de la pression, des contraintes de cisaillement et à la friction (voir Pression en contexte21, pages 2–10 et Cisaillement et friction en contexte22, pages 11–18). Inversement, la contribution de la peau à la conservation de la chaleur corporelle est largement médiée par une vasoconstriction dermique. Quelle est la température de la peau normale ? Étonnamment, il n’existe que peu d’information sur la température de la peau normale aux sites anatomiques prédisposés à l’apparition d’une escarre. Une étude clé a proposé que les sites prédisposés au développement d’escarres soient plus froids que les sites corporels adjacents23. Cependant, cette étude comportait plusieurs points faibles. Ainsi, la température ambiante n’a pas été rapportée, ni la durée pendant laquelle la peau a été exposée à la température ambiante avant le recueil de la température. La température à la surface de la peau peut-elle prédire l’apparition d’une escarre ? Plusieurs études ont examiné la température de la peau associée à une lésion précoce liée à la pression (Catégorie/Stade 1). Ces études ont révélé des modifications non constantes de la température de la peau des zones affectées par la pression : la température pouvait être augmentée (possiblement secondairement à l’inflammation), identique ou diminuée (possiblement en raison de l’ischémie) par rapport à la température des zones non affectées24,25. Les quelques études qui ont examiné si la température de la peau pouvait prédire la formation d’une escarre ne sont pas concluantes. Lors d’une étude de cohorte prospective, Clarke a mesuré la température de la peau de la région sacrée de 52 patients âgés hospitalisés9. Dans cette cohorte, six patients ont développé des escarres. Cependant, la température de la peau des patients ayant ou n'ayant pas développé d'escarre était identique. Cette étude a été démentie par une allocation non uniforme des supports aux sujets recrutés9. Cependant, une petite étude chez des patients présentant une atteinte neurologique a révélé que la température de la peau au niveau de la zone sacrée pouvait augmenter d'au moins 1,2 °C, 24 à 96 heures avant l’apparition d’une escarre26. Une étude récente a examiné si la régulation de la température cutanée pouvait prédire l’apparition d’une escarre27. Un petit échantillon de patients d'une maison de retraite porteurs, pendant cinq jours consécutifs, de moniteurs de la température cutanée fixés sur la ligne mi-axillaire droite. L'étude a révélé que les patients à risque élevé ou qui développaient en fin de compte des escarres présentaient une moindre variabilité de la température cutanée, suggérant un dérèglement de la régulation de la température cutanée27. Cependant, on ignore si la capacité réduite à réguler la température cutanée est directement liée à l’apparition d’escarres ou s’il s’agit d’un marqueur général d’un déclin de l'état physiologique. Comment une modification de la température cutanée locale affecte-t-elle l’apparition d’une escarre ? Certains investigateurs ont examiné comment une modification de la température cutanée locale affecte l’effet de la pression sur les tissus. Dans une étude chez l’animal, une pression connue (100 mmHg) a été appliquée pendant cinq heures à l'aide d'éléments d'indentation chauffés à 25, 35, 40 ou 45 °C28. Des atteintes musculaires modérées ont été observées à 35 °C et des atteintes cutanées et des tissus profonds à 40 et 45 °C (il est à noter qu'il est possible qu'il y ait eu un élément d'atteinte thermique à 45 °C)28. Aucune atteinte cutanée ni musculaire n’a été observée lorsque la charge a été appliquée à 25 °C, ce qui suggère qu'un refroidissement local pourrait avoir un effet protecteur. Plus récemment, Lachenbruch a avancé sur la base d’études antérieures (y compris celle de Kokate et al28) qu'une diminution de 5 °C de la température à l’interface entre la peau et le support pourrait conférer des effets protecteurs au niveau tissulaire d’ampleur identique aux diminutions de PRESSION, CISAILLEMENT, FRICTION ET MICROCLIMAT EN CONTEXTE | 21 pression d’interface permises par les supports les plus onéreux20. Cette hypothèse reste à être testée. Bien qu’un refroidissement puisse fournir certains effets protecteurs, il a été mentionné qu’une hypothermie lors d’une intervention chirurgicale pouvait participer à l’apparition d’escarres postopératoires17. Figure 1 Dermatite associée à l’incontinence (avec la permission de J. Black) FICHE TECHNIQUE ●● Une humidité excessive de la peau et une humidité relative élevée affaiblissent la peau et augmentent son coefficient de friction, augmentant ainsi la probabilité de lésion par pression, cisaillement et friction. ●● La peau sèche est affaiblie et plus vulnérable aux atteintes, ex. par pression, contraintes de cisaillement et friction. ●● Des études sur les effets des mouvements de l’air doivent être réalisées pour confirmer ou infirmer que cet aspect du microclimat est significatif dans l'étiologie des escarres. ●● Jusqu’à ce que les fourchettes thérapeutiques relatives à la température et l’humidité/humidité de la peau à l’interface entre le patient et le support ne soient définies, il convient d’exercer un jugement clinique pour éviter les valeurs extrêmes (élevées ou basses) de ces facteurs. DE QUELLE MANIÈRE L’HUMIDITÉ ET L’HUMIDITÉ DE LA PEAU SONT-ELLES LIÉES AU RISQUE D’ESCARRES ? L’augmentation de l’humidité de la peau (particulièrement en cas d’incontinence) est depuis longtemps reconnue comme un facteur de risque important d'escarres29-31. Cependant, il n’existe que peu de données quantitatives relatives à l'humidité de la peau ou à l'humidité pour appuyer cette opinion. Clark a rapporté que l’humidité située juste audessus de la peau de la région sacrée de patients âgés hospitalisés ayant par la suite développé des escarres de Catégorie/Stade II, était plus élevée que celle des patients indemnes9. Une augmentation de l’humidité de la peau mesurée par capacitance électrique a été révélée dans une étude menée en Indonésie et lors d’une petite étude pilote sur la corrélation avec le développement des escarres32,33. Cependant, des études supplémentaires sont nécessaires pour déterminer si la mesure de l’humidité de la peau selon cette méthode sera utile pour identifier les patients susceptibles de bénéficier d’interventions supplémentaires pour prévenir les escarres. Effets d’une humidité excessive de la peau On estime qu’une humidité excessive à la surface de la peau (ex. en raison d’une transpiration, d’une incontinence urinaire ou fécale, d’un drain de plaie ou de fistule, de vomissements) contribue à une augmentation du risque de formation d’une escarre par affaiblissement de la peau. L’humidité peut affaiblir les liaisons entre les fibres de collagène du derme et assouplir la couche cornée34. Ceci peut entraîner une macération (ou une dermatite associée à l’incontinence si le liquide est de l’urine – Figure 1) et également augmenter l’exposition des vaisseaux sanguins sous-jacents aux effets de la pression et des contraintes de cisaillement. De plus, une humidité excessive peut augmenter significativement le coefficient de friction de la peau35, entraînant une probabilité accrue d’atteinte cutanée par friction et contraintes de cisaillement (voir : Cisaillement et friction en contexte22, pages 11–18). L’humidité relative affecte également la résistance de la couche cornée : à une humidité 22 | ANALYSE INTERNATIONALE : PRÉVENTION DES ESCARRES relative de 100 % la couche cornée est 25 fois plus faible qu’à une humidité relative de 50 %16. Effets de la peau excessivement sèche La peau vieillissante est moins résiliente et plus vulnérable aux atteintes que la peau plus jeune, car elle est généralement plus fine et plus faible et plus sèche sur le plan structurel36. La peau sèche possède moins de lipides, d’eau, sa résistance à la traction, sa flexibilité et l'intégrité jonctionnelle entre le derme et l’épiderme sont également moindre. Une humidité ambiante faible diminue le contenu d’eau de la couche cornée12. Aux É.-U., l’Agency for Health Care Policy dans les Research guidelines on the prevention of pressure ulcers, recommande d’éviter une humidité relative inférieure à 40 % afin de réduire la probabilté de peau sèche37. DE QUELLE MANIÈRE LES MOUVEMENTS DE L’AIR SONT-ILS LIÉS À LA FORMATION DES ESCARRES ? Il semble qu’aucune recherche spécifique n’ait été conduite sur le rôle possible des mouvements d’air sur l'étiologie des escarres. La pertinence des mouvements de l’air pourrait être liée à la possibilité qu’ils puissent affecter la température de la peau et son contenu en humidité par convection et évaporation. QUE NE SAVONS-NOUS PAS AU SUJET DU MICROCLIMAT COMME CAUSE DES ESCARRES ? Le volume de littérature établissant un lien entre les escarres et le microclimat est relativement faible, et ne comporte que peu de caractérisation des interactions entre la peau et le tissu (ex. recouvrement des supports). Par ailleurs, il y a des données probantes d’importantes différences intra- et inter-individuelles dans les paramètres du microclimat cutané, et l'effet de ces paramètres sur la formation des escarres n'est pas clair. L’interprétation des données disponibles est donc difficile. Les études expérimentales in vivo qui ont été menées sur les interactions entre la peau et les tissus ont rarement conduit à des résultats significatifs ou des conclusions définitives38. Ceci peut être en partie expliqué par les différences considérables d'état cutané (ex. humidité, rugosité de surface, adhésion entre les couches cutanées) d’un individu à l’autre et entre les différentes localisations anatomiques chez un même individu38. PRISE EN CHARGE CLINIQUE DU MICROCLIMAT Les besoins du patient devraient être attentivement évalués avant d’effectuer des modifications de la température et de l’humidité ou de l'humidité de la peau. Un élément clé de la prise en charge du microclimat est le contrôle des causes sousjacentes de valeurs extrêmes de température ou d’humidité cutané, ex. fièvre ou incontinence. Les patients qui ont chaud peuvent être rafraîchis par des mesures simples telles que diminuer le nombre de couvertures, éviter les recouvrements de matelas en plastique, le repositionnement fréquent, l’utilisation d’un ventilateur et le port de vêtements en coton qui laissent respirer la peau. Lorsqu’ils sont disponibles dans les régions où l’humidité ambiante est élevée, l’air conditionné peut être utile pour refroidir et diminuer l’humidité. Repositionnement L’importance du rôle des repositionnements dans le contrôle du microclimat ne devrait pas être sousestimée. Certains recouvrements de matelas sont faits de matériaux qui empêchent la dissipation de la chaleur. Les repositionnements des patients permettent à la peau qui a été en contact avec le recouvrement du matelas d’être exposée à l’air et de se rafraîchir. Ils fournissent également la possibilité à la transpiration de s’évaporer. FICHE TECHNIQUE La prise en charge du microclimat est l’une des composantes de la prévention des escarres et doit se réaliser dans le contexte d’un protocole complet de prévention des escarres qui prend en compte le confort du patient. Figure 2 Infection à Candida dans un pli cutané chez un patient bariatrique (avec la permission de J. Black) Soins cutanés Les crèmes et vaporisateurs barrières peuvent être utiles pour la protection de la peau humide contre davantage de dommages, en particulier causés par l’urine2,39. Cependant, il est mieux de prendre en charge l’incontinence lorsque cela est possible, de sorte que la peau ne soit pas en contact avec l’urine. Chez les patients incontinents et nécessitant l’utilisation de couches absorbantes, il est préférable d’utiliser des couches qui laissent respirer la peau et permettent le passage de la vapeur. Des soins sont nécessaires pour s’assurer que l'utilisation des couches n'interfère pas avec la redistribution de la pression ou les propriétés de gestion du microclimat du support utilisé. Les patients bariatriques susceptibles de présenter une transpiration excessive peuvent bénéficier de lavages fréquents et d’un changement de vêtements et de draps également fréquents pour contrôler l’humidité de la peau. L’accumulation d’humidité dans les plis cutanés des patients bariatriques peut représenter un problème particulier et entraîner une dermatite intertrigineuse avec infections bactériennes et à Candida (Figure 2). L’utilisation d’émollients peut améliorer la peau sèche et diminuer le risque de lésion cutanée2. Ils doivent être appliqués généreusement et fréquemment (ex. jusqu’à trois à quatre fois par jour) lorsque la peau est très sèche et après la douche ou le bain pour aider à retenir l’eau dans la peau. Rôle des supports dans la prise en charge du microclimat Toute surface qui est en contact avec la peau peut altérer le microclimat en modifiant la vitesse d’évaporation de l’humidité et celle avec laquelle la chaleur se dissipe à partir de la peau. L’effet global sur le microclimat dépend de nombreux facteurs, y compris la nature du support lui-même (c.-à-d. le matériau dont il est constitué, la manière dont ce matériau se conforme et par quoi est-il recouvert)15,40. Par exemple, les supports en mousse tendent à augmenter la température de la peau, car ils possèdent de faibles propriétés de transfert de la chaleur15. L’effet des produits en mousse sur l’humidité dépend de la porosité du recouvrement15. Les produits remplis de gel peuvent initialement avoir un effet refroidissant qui s’atténue après plus de deux heures de contact avec le patient. Ils ont tendance à augmenter l’humidité à la surface de la peau15. Les produits remplis de liquides à haute capacité calorifique peuvent diminuer la température cutanée15. Les matelas à pression d’air alternée peuvent limiter les augmentations de température cutanée41. Certains supports spécialisés possèdent des caractéristiques qui participent à la prise en charge active du microclimat en permettant à l'air de circuler à travers le support (ex. support motorisé à faible perte d'air ou à air fluidisé). Le flux d’air refroidit la peau par convection et évaporation de l’humidité de la surface cutanée42. Supports motorisés à faible perte d’air Les supports motorisés à faible perte d’air pompent l’air dans une série de coussins, puis permettent à l’air de s’échapper par de petits trous (cellules de porosité) à travers les housses de coussin. Les flux d’air le long d’une couche perméable à la vapeur se trouvant en Vapeur d’eau Housse perméable à la vapeur – la vapeur d’eau est attirée par le flux d’air de l’autre côté de la housse Cellules motorisées à faible perte d’air Figure 3 Mécanisme d’action des supports motorisés à faible perte d’air PRESSION, CISAILLEMENT, FRICTION ET MICROCLIMAT EN CONTEXTE | 23 Figure 4 Mécanisme d’action des supports à air fluidisé Une housse poreuse permet à l'air et aux liquides de passer à travers Perles de silicone en suspension dans le flux d’air Air chaud comprimé contact avec le patient permettent d'attirer l'humidité et la chaleur à travers la couche et l'éloigner de la peau16 (Figure 3). Il a été démontré que les supports motorisés diminuaient la température cutanée et produisaient un gain d'humidité inférieur aux matelas d'hôpital standards43. Supports à air fluidisé Les supports à air fluidisé comportent des particules de silicone solide de la taille de grains de sable à travers lesquelles de l’air est forcé. Les flux d’air font que les particules possèdent les propriétés d’un liquide. La housse au-dessus des particules est poreuse, ce qui permet à l’air de s’échapper et aux liquides corporels (ex. transpiration, urine) de circuler (Figure 4). Les lits à air fluidisé sont considérés comme les supports les plus asséchant. La perte de liquide augmente de manière linéaire avec l’augmentation de la température du flux d’air44. Le flux d'air à travers un dispositif motorisé à faible perte d’air ou à air fluidisé est généralement réchauffé entre 28 et 35 °C et peut être réglé. Cette caractéristique est sans conteste utile, mais doit être utilisée avec beaucoup de précautions pour éviter un refroidissement ou un réchauffement inapproprié. FICHE TECHNIQUE ●● Les systèmes motorisés à faible perte d’air et à air fluidisé fournissent des mécanismes de contrôle actif du microclimat. ●● En l’absence de preuve clinique, le choix d’un support pour la prise en charge du microclimat repose sur le jugement clinique. ●● Des études supplémentaires sont nécessaires pour évaluer l’efficacité des caractéristiques de contrôle du microclimat dans la prévention des escarres. Choisir un support pour prendre en charge le microclimat En dépit de la disponibilité de plusieurs types de systèmes motorisés à faible perte d'air et à air fluidisé, il n'existe que peu d'information pour orienter la décision sur le support à utiliser selon le patient. Le choix d’un support sera guidé par le jugement clinique et prendra en compte de nombreux facteurs, y compris la nécessité d'une redistribution de la pression, la taille du patient, sa capacité à se tourner ou à bouger seul et sa température corporelle, la présence d’humidité sur la peau ou encore d'affections concomitantes telles que l'incontinence. (Voir : Pression en contexte21, pages 2–10, pour plus d’informations sur les supports de redistribution de la pression.) Même si les systèmes motorisés à faible perte d’air peuvent être utiles pour garder frais et secs les patients immobiles, il est important de reconnaître 24 | ANALYSE INTERNATIONALE : PRÉVENTION DES ESCARRES que ces patients doivent encore être tournés et repositionnés sur ces dispositifs. Selon les besoins du patient, la fréquence des positionnements peut être diminuée par rapport à celle utilisée avec les matelas standards (voir : Pression en contexte21, pages 2–10). Une étude récente a souligné l’importance de minimiser les couches de draps entre les patients et les supports motorisés à faible perte d'air afin d'éviter des augmentations de la température cutanée45. Impact de la prise en charge du microclimat sur la prévention des escarres Les supports conçus pour faciliter la prise en charge du microclimat fournissent également une redistribution de la pression. Ceci complique l’évaluation de l’impact de la prise en charge du microclimat sur l’incidence des escarres et il n'y a pas actuellement de données probantes démontrant que cette prise en charge diminue directement l'incidence des escarres. Toutefois, des études cliniques ont démontré que certains supports avancés qui affectent la température et l’humidité de la peau, ex. les supports à air fluidisé ou motorisé à faible perte d’air, sont plus efficaces que les matelas en mousse standards pour le traitement des escarres46. De plus, certaines données montrent que les lits motorisés à faible perte d’air diminuent l’incidence des escarres en soins intensifs47. CONCLUSION Le concept de microclimat en rapport avec les escarres existe depuis un certain temps. Cependant, le microclimat et ses éléments doivent être totalement définis et sa relation avec la formation d’escarres clairement caractérisée. Les données actuelles suggèrent que les valeurs extrêmes en termes de température cutanée et/ou humidité/humidité de la peau semblent augmenter la sensibilité de la peau vis-à-vis des effets délétères de la pression, des contraintes de cisaillement et de friction. Ceci suggère donc, que l’objectif global de la prise en charge du microclimat devrait être d’éviter la température ou l’humidité extrêmes de la peau et d’améliorer le confort du patient. Cependant, des études supplémentaires sont nécessaires pour établir les effets des interventions préventives « conventionnelles » (telles que le repositionnement) celles des supports sur les éléments du microclimat cutané et l’incidence des escarres. Les supports motorisés à faible perte d’air et les lits à air fluidisé sont conçus pour participer à la prise en charge du microclimat, mais en l’absence de données définissant les niveaux optimaux de température et d’humidité cutanées, le jugement clinique est de rigueur pour une utilisation efficace et sans danger. RÉFÉRENCES 1. Lyder CH. Pressure ulcer prevention and management. JAMA 2003; 289(2): 223-26. 2. National Pressure Ulcer Advisory Panel and European Pressure Ulcer Advisory Panel. Prevention and treatment of pressure ulcers: clinical practice guideline. Washington DC: National Pressure Ulcer Advisory Panel, 2009. 3. European Pressure Ulcer Advisory Panel and National Pressure Ulcer Advisory Panel. 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