B14 - CAT devant un lymphœdème
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B14 - CAT devant un lymphœdème
B14 - 1 B14 - CAT devant un lymphœdème Le lymphœdème est la conséquence d'une stase lymphatique dans le tissu interstitiel. Celle-ci peut être consécutive à une malformation constitutionnelle du système lymphatique ou une destruction des voies lymphatiques normales. Dans le premier cas, on parle de lymphœdème primaire, dans le second, de lymphœdème secondaire. Dans la plupart des cas, il atteint les membres supérieurs ou inférieurs. 1. Lymphœdème d u membre supérieur Il est habituellement secondaire à un traitement radio-chirurgical d'un cancer du sein et survient dans 10 à 15 % des cancers du sein opérés. Dans un délai variable de quelques mois à plusieurs années et fréquemment après un effort physique ou un traumatisme, apparaît une augmentation de volume, d'abord du bras, puis de l'avant-bras. Cet œdème est initialement mou, prenant le godet, et régressif la nuit. Par la suite, l'œdème devient ferme, élastique ne prenant plus le godet. Le dos de la main présente un aspect caractéristique bombé, en verre de montre. En l'absence de traitement, l'œdème augmente de volume, atteint également les doigts qui prennent un aspect en saucisse. L'évolution est émaillée de complications essentiellement infectieuses. Parmi celles-ci la lymphangite est certainement la plus grave. Elle est marquée par une température à 39°40°, des frissons. Le membre supérieur devient rouge, chaud et douloureux. La traînée lymphangitique s'étend jusqu'à la racine du membre. L'adénopathie axillaire peut être absente du fait du curage chirurgical. La distinction de la lymphangite avec l'érysipèle est souvent difficile (cf chap A01). D'autres complications infectieuses peuvent survenir (mycose, cellulite). Elles sont plus rares. Encore plus rare, est la transformation néoplasique du lymphœdème, décrit sous le nom de syndrome de Stewart-Treves, expression d'un lymphangiosarcome de pronostic redoutable. Le lymphœdème du membre supérieur est en général secondaire au traitement du cancer du sein. Cependant, un curage axillaire et une radiothérapie pour d'autres raisons (mélanome) peuvent parfois être en cause. Le lymphœdème du membre supérieur est exceptionnellement primaire, c'est-à-dire conditionné par une malformation du système lymphatique isolé ou associé à d'autres malformations. Il est fréquemment bilatéral. © Valmi 2007 B14 - 2 T1 - Stades évolutifs Stade I : Œdème partiel régressif la nuit. Stade II Œdème permanent avec signe de Stemmer et accentuation des plis cutanés. Stade III: Éléphantiasis avec hyperkératose et papillomatose cutanée. T3 - Lymphœdèmes chronologies Le lymphœdème congénital apparaissant à la naissance et ayant souvent un caractère familial : syndrome de Milroy Le lymphœdème précoce, sans notion familiale, apparaissant dans l'enfance: syndrome de Meige Le lymphœdème de l'adulte d'apparition plus tardive. T4 - Lymphœdèmes du membre supérieur Le plus souvent secondaire Radiothérapie Cancer du sein, curage axillaire Début proximal : − lymphangites fréquentes − association pathologique rare − fréquente Rarement lymphœdème primaire Début distal (main) : - lymphangites moins fréquentes - association pathologique - souvent bilatéral 2. Lymphœdème d u membre in férieur Il est le plus souvent primaire. Plus rarement, il est secondaire à une chirurgie ganglionnaire inguinale (évidement ou simple biopsie ou encore reprise chirurgicale d'une incontinence de la crosse saphène) ou à une radiothérapie pelvienne. Le lymphœdème primaire est plutôt bilatéral et le lymphœdème secondaire est plutôt unilatéral. Les premières manifestations sont distales, atteignant d'abord le pied, la cheville, puis remontant à la jambe pour atteindre enfin la cuisse. L'aspect du pied lymphœdémateux est caractéristique : oedème du dos du pied en verre de montre, accentuation des plis cutanés, orteil cubique, signe de Stemmer. Le © Valmi 2007 B14 - 3 signe de Stemmer est décrit comme l'impossibilité de pincer la peau de la face dorsale du 2e orteil. Il est le signe de la fibrose lymphatique œdémateuse, donc d'apparition retardée. L'évolution se fait en l'absence de traitement vers l'aggravation progressive avec installation d'un éléphantiasis avec pachydermie et papillomatose cutanée, qui sont en fait des lymphangiectasies. Les complications infectieuses, notamment les mycoses, sont beaucoup plus fréquentes du fait de la macération interdigitale habituelle. Elles induisent souvent des épisodes de surinfection bactérienne (lymphangite, érysipèle) qui sont un facteur d'aggravation constant du lymphœdème. T6 - Principales caractéristiques des lymphœdème du membre inférieur Primaire (malformatif) Secondaire Enfant, adulte jeune Post-chirurgie ou post-radiothérapie Début distal Début proximal Complications infectieuses fréquentes Complications infectieuses fréquentes Association à d’autres malformations Pas d’autre malformation vasculaire vasculaires 3. Formes associées C'est au cours de lymphœdèmes primaires que peuvent se rencontrer des manifestations vasculaires associées : angiome plan, lymphangiome, angiome veineux, plus rarement malformation complexe avec varices atypiques de type Klippel Trenaunay. La stase lymphatique peut également se manifester dans d'autres territoires : lymphœdème des organes génitaux externes chez l'homme et chez la femme (postradiothérapie), lymphœdème de la face, post-thérapeutique (cancer ORL), lymphœdème du sein ou de la paroi thoracique, association avec un épanchement chyleux dans la plèvre ou dans l'abdomen, associé parfois à des lymphangiectasies intestinales. Le lymphocèle est une collection intratissulaire de lymphe, le plus souvent secondaire à un geste chirurgical. Dans la plupart des cas, le diagnostic positif est cliniquement évident. Il est possible de mesurer précisément le volume du membre atteint par une méthode volumétrique ou périmétrique afin de surveiller l’évolution. Le diagnostic étiologique ne se pose qu'au début de la maladie. C'est alors que certains examens complémentaires sont utiles. Pour le diagnostic de lymphœdème, la lymphographie radiologique ne doit plus être pratiquée car elle est traumatique et source de complications infectieuses et d'aggravation de la maladie. © Valmi 2007 B14 - 4 Lymphographie isotopique Examen de choix, il se pratique par injection, sur le dos du pied ou de la main, d'un colloïde marqué au Technétium 99, dont on suit le transit le long du membre. Cet examen a d'une part un intérêt morphologique, mais également un intérêt fonctionnel. La tomodensitométrie a également un intérêt dans la recherche des causes abdominales ou pelviennes. En outre, lorsqu'elle est effectuée au niveau des membres, elle permet de séparer les œdèmes lymphatiques vrais des lipœdèmes ou des œdèmes purement veineux. Écho-Doppler veineux Il permet de déterminer une pathologie veineuse associée (reflux, compression). La surveillance d'un lymphœdème repose sur la mesure de sa circonférence et de son volume (volumétrie). 5. Diagnostics différentiels L'étiologie de l’augmentation de volume d'un membre ne se résume pas à la pathologie lymphatique. • Au membre supérieur: peu d'autres pathologies sont à évoquer. La thrombose veineuse du membre supérieur a un caractère aigu et s'associe à une dilatation veineuse superficielle qui doit attirer l'attention. Cependant, l'association d'une thrombose veineuse profonde et d'un lymphœdème reste possible. • Aux membres inférieurs, elle pose plus de problèmes. − Unilatéral : le diagnostic est à faire entre pathologie veineuse et lymphatique, mais celles-ci sont souvent intriquées en phase chronique. − Il peut également s'agir d'un œdème bilatéral où les causes générales doivent être éliminées : cardiaque, rénale, hypoprotidémique (cf chap A01 et A02). − Lipoedème (lipodystrophie). 6. Traitement Le lymphœdème est une maladie chronique. Le traitement ne vise qu'à diminuer le volume et à améliorer la stase lymphatique ainsi qu’à éviter des complications. Moyens thérapeutiques Éducation du malade Surveillance de la peau. éviter les écorchures, brûlures, griffures, éviter l'exposition au soleil, surveillance et prévention des mycoses interdigitales. Pas de travaux de force. Pas de prise de sang ou de tension artérielle du côté malade. © Valmi 2007 B14 - 5 Contention et compression par bande ou manchon ou bas Ce traitement est l’essentiel de la thérapeutique de l’œdème lymphatique. La contention est adaptée à la sévérité clinique, à la réponse au traitement et à l’évolutivité générale de la maladie. Il s’agit généralement d’une contention de classe 2, 3 ou 4. Drainage lymphatique manuel Il doit être pratiqué par des kinésithérapeutes formés. • Méthode − Dans tous les cas il est nécessaire d'expliquer au patient l'importance de la surveillance de la peau et de son hygiène. − Il existe ensuite une phase de réduction par drainage lymphatique manuel, contention élastique multicouche et drainage déclive. − Une phase de maintien par drainage lymphatique manuel, contention par bas ou manchon et activité physique programmée. Traitement médicamenteux De nombreuses molécules possèdent l’indication “traitement ou amélioration des symptômes en rapport avec une insuffisance veinolymphatique”. Les oligomères procyanidoliques (Endotélon®) constituent un traitement d’appoint du lymphœdème du membre supérieur post-cancer du sein. © Valmi 2007