CULTURE IN VITRO DES BOURGEONS AXILLAIRES DE CHÊNE

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CULTURE IN VITRO DES BOURGEONS AXILLAIRES DE CHÊNE
73
Bull. Soc. Pharm. Bordeaux, 2002, 141, 73-88
CULTURE IN VITRO DES BOURGEONS
AXILLAIRES DE CHÊNE-LIÈGE
(QUERCUS SUBER L.)
I - Influence des cytokinines sur l’organogenèse et la
callogenèse de nœuds de plantules (*)
M. L. EL KBIACH
(1)
, A. LAMARTI
A. BADOC ( 2 )
(1)
, A. ABDALI
(1)
,
Le débourrement in vitro des bourgeons axillaires de
plantules de Chêne-liège a été abordé. L’influence de cytokinines
ou de composés à activité cytokinine, seuls ou combinés aux
auxines ou à l’AG3, sur l’induction des bourgeons, l’élongation
des pousses feuillées et la formation des cals a été étudiée.
Dans le milieu de culture WPM, additionné des
microéléments et du mélange vitaminique MS, la BA à 4,5 µM
favorise la caulogenèse.
Son association à d’autres régulateurs de croissance ne
permet pas une amélioration du taux de débourrement. En
revanche, à 4,5 µM et combinée à 7 µM d’ANA, la callogenèse est
importante.
(*)
(1)
(2)
Manuscrit reçu le 20 septembre 2001.
Laboratoire de Biotechnologie et d'Amélioration des plantes, Département de
Biologie, Faculté des Sciences M’hannech II, BP 2121, 93002 Tétouan, Maroc.
[email protected]
Laboratoire de Mycologie et Biotechnologie végétale, Faculté des Sciences
Pharmaceutiques, Université Victor Segalen Bordeaux 2, 146, rue Léo Saignat,
33076 Bordeaux Cedex. [email protected]
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INTRODUCTION
Le Chêne-liège (Quercus suber L., Fagaceae) est une espèce
endémique du bassin méditerranéen occidental présentant une plasticité
écologique quant à la température et la pluviométrie. Il s’étale à cheval sur
les bioclimats subhumide et semi-aride. Il occupe une place importante dans
le patrimoine forestier marocain. La subéraie marocaine représente 20 % de
la subéraie mondiale et 7 % de la forêt marocaine [23].
Au Maroc, le Chêne-liège est considéré comme essence noble par
son écorce, matière première pour les agglomérés de liège et la
bouchonnerie, son bois de bonne capacité calorifique et ses glands doux,
comestibles et appréciés par le bétail [7]. De plus, l’arbre joue un rôle
économique, social, écologique et récréatif de premier ordre, de sorte que
les subéraies, au même titre que les cédraies, sont les premières forêts
aménagées [4-5].
Comparé aux autres essences forestières, le Chêne-liège connaît ces
dernières années un dépérissement prenant des proportions inquiétantes en
Méditerranée Occidentale. La majorité des peuplements subéricoles sont
âgés et le déliègeage répété accélère la mortalité des arbres [1].
Par ailleurs, si les travaux d’éclaircies et de subériculture se font sans
gros problèmes, la régénération des peuplements est difficile, voire
quasiment absente, en raison de facteurs anthropozoogènes [3].
Pour remédier à cette situation, des actions de reboisement à base de
plants de qualité doivent être entreprises. La multiplication in vitro peut être
d’un grand secours [8].
Dans ce travail, la régénération de plantes entières à partir de la
micropropagation de bourgeons axillaires issus de plantules de Chêne-liège
a été obtenue.
L’influence des cytokinines seules ou associées à d’autres
régulateurs de croissance sur la reprise et le développement des bourgeons
en pousses feuillées a été étudiée. Des substances à propriétés cytokinine
dérivées de l’urée, la diphénylurée et le thidiazuron, ont aussi été testées.
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MATÉRIEL ET MÉTHODES
Les glands proviennent d’un pied de Chêne-liège élite de plus de 50
ans et ont été fournis par le Centre de Conservation des Semences d’Ain
Rami (Chefchaouen, Rif occidental, 560 m, 35°08’09’’N, 05°16’39’’W,
pluviométrie moyenne de 1400 mm, bioclimat subhumide à hiver frais). Ils
ont été récoltés en octobre 1999 et stockés dans des sachets de toile noire à
l’obscurité et à 4 °C.
Avant la mise en germination, les glands sont imbibés 48 heures à
l’obscurité puis placés dans des sachets de toile ouverts renfermant de la
tourbe, préalablement stérilisée à l’autoclave à 135 °C pendant une heure.
Les sachets sont placés dans une salle climatisée à 26 °C et 75 % d’humidité
relative. L’éclairement d’une intensité de 800 lux, est fourni 16 heures par
jour par des tubes fluorescents de type blanc de luxe (Phillips - 40 W). Les
cultures sont arrosées une fois par semaine par la solution minérale de
Gautheret [15 ] additionnée du Fe-EDTA du milieu MS de Murashige et
Skoog [27]. Pour prévenir les infections fongiques, on pulvérise en même
temps une solution de Benlate à 2 %. Après trois mois, les plantules
mesurent en moyenne une quarantaine de centimètres.
Seuls les nœuds de la partie médiane des plantules à 10 cm de l’apex
et 10 cm de la base ont été prélevés. Les pétioles des nœuds de 1 cm sont
sectionnés à quelques millimètres de la tige afin de ne pas abîmer les
bourgeons axillaires au cours de la désinfection.
Les nœuds sont lavés à l’eau courante afin d’éliminer toute trace de
produits phytosanitaires. Les explants sont stérilisés 20 minutes dans une
solution aqueuse d’hypochlorite de calcium (120°) à 7 % contenant
quelques gouttes de Tween 80, puis deux minutes par une solution aqueuse
de chlorure mercurique à 0,1 %. HgCl2 est ensuite éliminé par trois rinçages
successifs de cinq minutes à l’eau distillée stérile.
Les macroéléments WPM de McCown et Lloyd [2 1 ] et les
microéléments et vitamines MS ont été additionnés de 0,7 % d’agar, 3 % de
saccharose et 100 mg/l de méso-inositol.
L’adénine, la BA (6-benzyladénine), la kinétine, la zéatine, la DPU
(diphénylurée) et le TDZ (thidiazuron, Dropp®) ont été testés. La BA a été
testée seule ou combinée à l’ANA (acide 2-naphthalène acétique), l’AIB
(acide indole 3-butyrique), l’AIA (acide indole 3-acétique) ou l’AG3 (acide
gibbérellique 3). Le pH des milieux est ajusté à 5,5-5,8 avant stérilisation 20
minutes à 120 °C.
76
Les explants sont disposés verticalement à la surface des milieux
nutritifs dans des tubes à essais (18 x 180 mm) à raison d’un bourgeon par
tube. Ces derniers, contenant 15 ml de milieu, sont bouchés par du coton
hydrophile, puis recouverts d’une feuille d'aluminium.
Les cultures sont placées dans une chambre climatisée à 26 °C
pourvue de tubes "Phillips-40W" assurant un éclairement de 2000-2500 lux.
La photopériode est de 16 heures de lumière par jour.
Trente explants ont été utilisés pour chaque expérience et les
résultats sont la moyenne de trois répétitions.
Pour évaluer le développement des explants, les critères suivants ont
été retenus :
- Pourcentage d’explants caulogènes : nombre d’explants formant
des pousses feuillées relativement au nombre total d’explants
- Pourcentage d’explants callogènes : nombre d’explants formant des
cals entourant le bourgeon relativement au nombre total d’explants
- Longueur moyenne des bourgeons (cm)
- Nombre moyen de bourgeons par explant
- Morphologie des cals : taille, friabilité et couleur.
RÉSULTATS
L'effet de différentes concentrations (2 ; 4 ; 4,5 et 7 µM) d’adénine,
de trois cytokinines (BA, kinétine et zéatine) et de deux composés à activité
cytokinine (diphénylurée et TDZ) sur l'induction et le développement des
bourgeons axillaires de Chêne-liège après 4 semaines de culture est résumé
dans le Tableau I.
La BA est favorable à l'induction des bourgeons axillaires (Photos 1
et 2). Un maximum de 86 % de caulogenèse a été enregistré à 4,5 µM. La
longueur moyenne des bourgeons est alors maximale (0,44 cm). Les
bourgeons sont généralement vert foncé et ne s’accompagnent pas de cal.
La kinétine donne des taux de bourgeonnement relativement faibles.
Un maximum de débourrement est observé à 4 et 4,5 µM (36 %). La
longueur moyenne des bourgeons reste faible et pratiquement inchangée.
Les bourgeons développent des feuilles étroites chlorophylliennes et la
callogenèse est absente.
77
Tableau I :
Influence de 3 cytokinines, de l'adénine et de 2 composés dérivés de la
phénylurée (DPU et TDZ) sur le développement des bourgeons
axillaires des nœuds de plantules de Chêne-liège après 4 semaines de
culture (n = 30, 3 répétitions)
Phytohormone
(µM)
BA
Kinétine
Zéatine
Adénine
DPU
TDZ
Pourcentage de nœuds
Nombre moyen
de bourgeons
par nœud
Longueur
moyenne des
bourgeons
(mm)
Caulogènes
Callogènes
2
45,5
0
1,41 ± 0,13
1,5 ± 0,3
4
61,8
0
1,44 ± 0,16
1,5 ± 0,8
4,5
86,1
0
1,52 ± 0,21
4,4 ± 0,3
7
57,1
0
1,32 ± 0,17
2,5 ± 0,3
2
27,3
0
1,14 ± 0,10
1,2 ± 0,2
4
35,3
0
1,15 ± 0,14
1,0 ± 0,1
4,5
36,4
0
1,13 ± 0,11
1,0 ± 0,2
7
23,5
0
1,13 ± 0,09
1,0 ± 0,1
2
25,8
74,2
1,12 ± 0,11
1,6 ± 0,5
4
32,3
67,7
1,18 ± 0,12
1,6 ± 0,5
4,5
58,8
41,2
1,13 ± 0,10
2,0 ± 0,2
7
37,5
54,2
1,15 ± 0,10
4,1 ± 0,6
2
20,0
80,0
1,10 ± 0,12
1,6 ± 0,8
4
16,7
78,9
1,10 ± 0,09
1,6 ± 0,1
4,5
15,6
71,6
1,12 ± 0,10
2,5 ± 0,1
7
14,5
65,7
1,13 ± 0,08
1,4 ± 0,1
2
10,0
0
1,10 ± 0,08
1,0 ± 0,2
4
6,7
0
1,10 ± 0,05
1,0 ± 0,1
4,5
6,7
0
1,10 ± 0,04
1,0 ± 0,1
7
3,4
0
1,10 ± 0,03
1,0 ± 0,1
2
26,7
63,3
1,18 ± 0,11
1,7 ± 0,5
4
16,7
66,0
1,11 ± 0,08
1,7 ± 0,1
4,5
10,0
73,1
1,10 ± 0,06
1,7 ± 0,2
7
7,7
91,4
1,12 ± 0,05
1,6 ± 0,1
BA : Benzyladénine
DPU : Diphénylurée
TDZ : Thidiazuron
78
La zéatine donne un meilleur pourcentage de caulogenèse à 4,5 µM
(59 %). La longueur moyenne des bourgeons augmente avec la
concentration jusqu'à atteindre 0,4 cm à 7 µM. La chlorose apparaît sur tous
les bourgeons et s'accentue après la deuxième semaine de culture. Le
maximum de callogenèse est observé à 2 µM (74 %) et le minimum à 4,5
(41 %). Le cal est généralement blanc, compact, dur et peu développé.
En présence d'adénine, le débourrement des bourgeons axillaires est
très faible (maximum de 20 % à 2 µM) et au fur et à mesure que la
concentration augmente, le pourcentage de caulogenèse diminue. De même,
la longueur moyenne des bourgeons ne dépasse pas 0,25 cm à 4,5 µM. Les
bourgeons ont, en général, un aspect vert clair et jaunissent après 3 semaines
de culture. Après une semaine de culture, des boursouflures tassées les unes
contre les autres apparaissent autour du pétiole entourant ainsi le bourgeon
axillaire. Elles évoluent ensuite pour produire un cal chlorophyllien. La
callogenèse est importante à 2 µM (80 %) et tend à diminuer avec la
concentration. Les cals sont peu développés et d’aspect vert, compact et dur.
La diphénylurée donne un pourcentage négligeable de caulogenèse.
La longueur moyenne des bourgeons reste faible et inchangée. Les
bourgeons jaunissent et se nécrosent après deux semaines. On n’a pas de
callogenèse.
Avec le thidiazuron (TDZ), le taux de caulogenèse est faible et passe
de 27 % à 2 µM à 7 % à 7 µM. Les bourgeons sont jaunes et courts. Le
pourcentage de callogenèse est important et augmente avec la concentration
(maximum de 91 % à 7 µM). Le cal est vert, compact et peu développé.
La BA apparaît la mieux adaptée au débourrement des bourgeons
axillaires du Chêne-liège. Cette cytokinine a donc été retenue pour les essais
ultérieurs.
L'effet de la BA (4,5 µM) associée à une auxine (ANA, AIB ou
AIA) à différentes concentrations (0 ; 0,5 ; 2,5 ; 5 et 7 µM) ou à l'AG3 (0 ;
0,29 ; 1,44 et 2,89 µM) a été testé sur l'induction et le développement des
bourgeons axillaires de Chêne-liège. Les résultats après 4 semaines de
culture sont consignés dans le Tableau II.
L'ANA a un effet d’autant plus inhibiteur sur la caulogenèse que sa
concentration est élevée (Photo 3). Les bourgeons sont généralement vert
foncé et leur longueur moyenne diminue aux fortes doses.
L’ANA favorise manifestement la callogenèse, maximale à 7 µM
(93 %). Les cals à la base de l’explant sont vigoureux, blancs, compacts,
friables et peuvent atteindre un diamètre d’1,1 cm (Photos 3 et 4).
79
Tableau II :
Influence de la BA (4,5 µM) associée à une auxine
(ANA, AIB et AIA) ou à l'AG3 à différentes concentrations
sur le développement des bourgeons axillaires des nœuds de plantules
de Chêne-liège après 4 semaines de culture
(n = 30, 3 répétitions)
Auxine
(µM)
Pourcentage de
nœuds
Caulogènes
Nombre
moyen de
bourgeons
par nœud
Longueur
moyenne des
bourgeons
(mm)
Callogènes
Témoin
0
86,1
0
1,52 ± 0,21
4,4 ± 0,3
ANA
0,5
2,5
5
7
60,0
36,7
13,3
6,7
40,0
60,0
86,7
93,3
1,43 ± 0,18
1,40 ± 0,16
1,34 ± 0,15
1,10 ± 0,06
3,2 ± 0,1
2,5 ± 0,8
2,7 ± 0,5
2,1 ± 0,1
AIB
0,5
2,5
5
7
53,3
30,0
11,1
11,1
46,7
46,7
77,9
69,4
1,35 ± 0,16
1,21 ± 0,13
1,12 ± 0,09
1,10 ± 0,08
3,5 ± 0,8
3,2 ± 0,8
2,5 ± 0,1
2,5 ± 0,1
AIA
0,5
2,5
5
7
33,3
23,3
23,3
10,3
65,5
66,7
65,0
61,7
1,14 ± 0,11
1,12 ± 0,10
1,11 ± 0,10
1,10 ± 0,07
2,3 ± 0,3
2,3 ± 0,6
2,2 ± 0,1
2,1 ± 0,7
AG3
0,29
1,44
2,89
61,3
53,3
46,7
0
0
0
1,42 ± 0,18
1,31 ± 0,14
1,18 ± 0,12
3,7 ± 0,2
2,7 ± 0,5
2,4 ± 0,9
AIA : Acide indolacétique
AIB : Acide indolbutyrique
AG3 : Acide gibbérellique
BA : Benzyladénine
ANA : Acide naphtalène acétique
Les fortes doses d'AIB inhibent aussi la caulogenèse : le taux et la
longueur moyenne des bourgeons débourrés diminuent de 0,5 à 7 µM
d’AIB. Ces bourgeons sont d’abord vert clair puis deviennent jaunes après
la troisième semaine de culture.
80
1
2
3
4
Planche 1 : Influence des régulateurs de croissance
sur le développement des bourgeons axillaires du Chêne-liège.
1 : Bourgeon axillaire après 30 jours de culture sur le milieu WPM
additionné de 2 µM de BA.
2 : Bourgeon axillaire bien développé après 30 jours de culture sur le
milieu WPM additionné de 4,5 µM de BA.
3 : Cal après 30 jours de culture sur le milieu WPM additionné de 4,5 µM
de BA et 7 µM d’ANA.
4 : Bourgeon axillaire après 30 jours de culture sur le milieu WPM
additionné de 4,5 µM de BA et de 7 µM d’ANA. Un cal friable est ici
formé à la base de l’explant, mais non du bourgeon.
81
L'AIB induit la callogenèse, maximale (78 %) à 5 µM. Les cals sont
blancs, compacts et friables. Les diamètres des cals restent faibles comparés
à ceux obtenus en présence d'ANA.
L’AIA a aussi un effet inhibiteur marqué sur la caulogenèse aux
fortes doses. Le maximum de débourrement (33 %) est obtenu à 0,5 µM.
Les bourgeons jaunissent et se nécrosent après la troisième semaine de
culture. Leur longueur moyenne est relativement insensible à la variation de
concentration.
Des pourcentages importants de callogenèse ont été enregistrés pour
toutes les concentrations d’AIA. Les cals néoformés sont de taille moyenne
(diamètre de 0,4 à 0,7 cm), blancs, compacts et friables.
Le pourcentage de bourgeonnement diminue avec la concentration
en AG3. À 0,29 µM, le pourcentage reste appréciable (61 %). Les bourgeons
sont légèrement hyperhydriques et leur longueur moyenne tend à diminuer
aux fortes concentrations. On n’a pas de callogenèse.
DISCUSSION ET CONCLUSION
Dans ce travail, différentes cytokinines ont été comparées pour leur
effet sur le débourrement des bourgeons axillaires de Chêne-liège. Un
pourcentage élevé d’explants caulogènes a été obtenu en présence de BA.
Les autres cytokinines (kinétine ou zéatine) réduisent le développement des
bourgeons, ce qui est en accord avec d’autres auteurs pour divers Chênes
[6,9,18,33,43].
L’addition de BA au milieu de culture stimule la formation de
bourgeons à 4,5 µM. Le taux de bourgeonnement atteint 86 %, alors que les
faibles et les fortes doses diminuent le nombre de bourgeons débourrés et
agissent négativement sur leur développement ultérieur. Nos résultats sont
concordants avec d’autres travaux sur le Chêne-liège [2,29,33 ]. Divers
auteurs [14,28,35-37,44-45] ont aussi utilisé pour d’autres Chênes la BA à
4,5 µM.
Cependant, Schwarz [38 ] considère que les cytokinines ont peu
d’influence sur les explants de Quercus rubra. Récemment, Puddephat et al.
[3 2 ] ont testé sur le milieu GD [1 7 ] l’effet de la BA à plusieurs
concentrations (0 ; 0,44 ; 0,88 ; 1,76 ; 2,64 ; 3,52 et 4,4 µM) sur le
débourrement des bourgeons axillaires de Quercus robur et n’ont pas
observé de différence significative.
82
Les concentrations de BA permettant un débourrement de bourgeons
chez les Chênes peuvent être nulles, faibles ou élevées.
Pour Manzanera et Pardos [19], la présence de BA dans le milieu est
indispensable pour l’initiation et le développement des bourgeons de
Quercus suber. Cependant, Volkaert et al. [46 ] ont pu propager Quercus
petraea sur le milieu WPM dépourvu de régulateur de croissance, mais
contenant du charbon actif.
À 0,2 µM de BA, Gebhardt et al. [16] ont obtenu un pourcentage
élevé de caulogenèse chez Quercus petraea sur le milieu GD additionné de
20 g/l de saccharose. Toujours sur le milieu GD et en présence de 0,44 µM
de BA, San-José [ 34 ] et Marks [20 ] ont obtenu le débourrement des
bourgeons axillaires de Quercus robur. Juncker et Favre [18] ont obtenu un
meilleur débourrement des bourgeons de Quercus robur sur MS dilué de
moitié additionné de 0,44 µM de BA. Pevalek-Kozlina et Jelaska [31] ont
obtenu un débourrement des bourgeons apicaux et axillaires de Quercus
robur sur le milieu GD additionné de 0,9 µM de BA. Ces mêmes auteurs
[30 ] ont obtenu 100 % de caulogenèse chez Quercus robur et Q. petraea
cultivés sur le milieu ACM (Aspen Culture Medium) en présence de 2,2 µM
de BA. Cette concentration permet le débourrement des bourgeons apicaux
et axillaires de Quercus robur cultivés sur GD et WPM [22].
Deidda et al. [12] ont observé un débourrement des bourgeons de
Chêne-liège sur le milieu Durzan [13 ] additionné de 10 µM de BA.
Néanmoins, Favre et Juncker [14 ] ont obtenu chez Quercus robur une
croissance anormale des bourgeons et une callogenèse sur MS dilué de
moitié et additionné de concentrations de BA supérieures à 4,4 µM. De
même, Ostrolucka et Bezo [28 ] ont montré chez plusieurs Chênes que
l’augmentation de la concentration en BA (8,8 µM) aboutit à des bourgeons
anormaux ou au développement de cals qui couvrent l’explant, empêchant le
bourgeon de se développer.
La BA seule aux concentrations utilisées (Tableau I) ne donne pas de
cals autour des bourgeons. Elle a cependant permis des taux importants de
callogenèse à partir des nœuds de Quercus robur cultivés sur le milieu GD
surtout à 1 µM (91,6 %), avec des cals compacts et nodulaires [31].
Chez le Chêne-liège, l’effet de l’adénine et de la diphénylurée est
étudié pour la première fois, mais la caulogenèse n’est pas améliorée.
Cependant, Chalupa [10] a montré qu’en présence d’adénine les bourgeons
de Quercus robur sont bien développés.
83
De même, c’est la première fois qu’on obtient chez Quercus suber
des cals à partir de nœuds en présence du thidiazuron, mais le pourcentage
de débourrement diminue, en concordance avec les résultats de Chalupa [10]
chez Quercus robur. Des résultats similaires ont été observés chez
Phaseolus lunatus [25,26]. Une faible caulogenèse a été obtenue alors que
chez Quercus muehlenbergii, Vyapari et Khatamian [47] n’ont pas observé
sur le milieu WPM de production de bourgeons axillaires.
Les travaux de Skoog [42 ] et Miller et Skoog [24 ] ont mis en
évidence un effet inhibiteur des auxines sur le développement des
bourgeons. Cependant, Chalupa [9] a montré que l’addition de faibles
concentrations d’auxines (AIB ou ANA à 0,25-0,5 µM) n’affecte pas
significativement le débourrement des bourgeons de Quercus robur.
En combinant la BA avec l’ANA, l’AIB ou l’AIA, on observe une
diminution du pourcentage de caulogenèse avec l’augmentation de la
concentration en auxine. Nos résultats ne contredisent pas ceux de Schwarz
et Schlarbaum [39] qui ont cultivé des bourgeons axillaires de Quercus alba,
excisés de plantules de 3 mois, en présence de BA (0,044 ; 0,44 ; 4,44 et
44,4 µM) combinée à l’ANA (0 ; 0,001 et 10 µM) et ont observé un
maximum de débourrement avec 4,44 µM de BA additionnée ou non de
0,001 µM d’ANA (100 % et 72 % respectivement).
Parmi les auxines testées en combinaison avec la BA, l’ANA donne
les meilleurs pourcentages de callogenèse (87 et 93 % à 5 et 7 µM). La
combinaison ANA/BA est employée couramment pour l’induction de cals.
Ainsi, chez Quercus rubra, Seckinger et al. [40,41] ont obtenu un cal dense
jaune-blanc et nodulaire se développant à la périphérie des segments de tige
cultivés pendant un mois sur un milieu MS modifié contenant ces deux
phytohormones.
Récemment [11], des entre-nœuds de Quercus robur ont été cultivés
à l’obscurité sur le milieu MS additionné d’hydrolysat de caséine (0,5 g/l),
de saccharose (30 g/l), de BA (2,2 ; 4,5 et 8,9 µM) et d’ANA (5,37 ; 10,74
et 21,48 µM) ou d’AIB (4,92 ; 9,84 et 19,68 µM). Après deux semaines de
culture, 90 à 100 % des explants sont devenus callogènes, surtout en
présence d’ANA. Les cals blancs deviennent chlorophylliens après transfert
à la lumière.
L’addition, pour la première fois chez le Chêne-liège, d’AG3 au
milieu de culture, a un effet inhibiteur sur la caulogenèse des nœuds. De
plus, elle n’a pas permis une élongation des bourgeons, ce qui est en accord
avec les résultats obtenus chez Quercus robur par San-José et al. [35].
84
RÉFÉRENCES
1-
Bakry (M.), Abourouh (M.) - Nouvelles données sur le dépérissement
du Chêne-liège (Quercus suber L.) au Maroc. - Ann. Rech. For.
Maroc, 1996, 29, 24-39.
2-
Belaizi (M.), Boxus (P.) - In vitro shoot multiplication of cork oak
(Quercus suber L.). Influence of different carbohydrates. - Bull. Rech.
Agron. Gembloux, 1995, 30(1-2), 39-46.
3-
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ABSTRACT
In vitro culture of axillary buds of cork oak (Quercus suber L.)
I - Influence of cytokinins on the organogenesis and callogenesis of
nodal segments of seedlings
The in vitro induction and development of axillary buds excised
from cork oak seedlings were tackled. The influence of cytokinins or
cytokinin-like substances, alone or combined with auxins or GA3, was
studied on induction, bud elongation, and callus formation.
In WPM culture medium supplemented with MS micronutrients and
vitamins, 4.5 µM BA improved caulogenesis.
Its association to other growth regulators did not allow an
improvement of the rate of axillary bud induction. On the other hand, the
callogenesis was significant in presence of 4.5 µM BA combined to 7 µM
NAA.
Key-words: adenine, axillary bud, callogenesis, cork oak, diphenylurea, in
vitro culture, thidiazuron.
__________

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