Place de la rééducation dans les syndromes de la traversée thoraco
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Place de la rééducation dans les syndromes de la traversée thoraco
Mise au point Place de la rééducation dans les syndromes de la traversée thoraco-brachiale Ann. Kinésithér., 1982, 9, 71-77 •.... J.Y. BOUCHET" A. FRANCO" B. MORZOL Ch. QUESSADA 2, H. GUIDICELLI 2 1 Les éléments vasculo-nerveux qui traversent le défilé thoraco- brachial peuvent subir des compressions mécaniques qui dépendent plus ou moins de la tonicité des muscles postérieurs des épaules. Les manifestations cliniques, neuro-vasculaire, sont surtout marquées par des dysesthésies, des acroparesthésies, des troubles vasomoteurs, une claudication artérielle positionnelle ou une stase veineuse. La symptomatologie, parfois discrète, peut être invalidante. La rééducation est systématiquement proposée à ces patients qui sont souvent améliorés et évitent ainsi les traitements plus agressifs. Le syndrome de la traversée thoraco-brachiale recouvre les manifestations cliriiques des compressions vasculo-nerveuses à l'intérieur du défilé thoraco-brachial (1). Les compressions sont d'ordre mécanique. Elles peuvent se situer à l'intérieur de trois espaces compris entre le bord interne des scalènes et le bord inférieur du petit pectoral. Elles sont plus ou moins importantes selon la position du membre supérieur par rapport au tronc. Cette notion impose l'étude statique et dynamique des régions intéressées qui sont successivement: - la traversée intercosto-scalénique, - la traversée du défilé costo-claviculaire, - et la traversée du tunnel sous-pectoral. 1. Consultation d'Angéiologie, Clinique Médicale A (Pr Y. Mazare) ; 2. Service de Chirurgie Vasculaire iPr R. Gautier, Pr H. GuidicelliL C.H.U.R. F 38700 Grenoble. 71 ANATOMIE A. - FONCTIONNELLE La traversée intercosto-scalénique Elle est triangulaire, située entre les scalènes antérieurs et moyens en haut et la face supérieure de la première côte en bas. L'élément vasculo-nerveux est constitué par l'artère et les troncs du plexus brachial. Les dimensions de cet espace peuvent varier surtout en fonction de l'insertion du muscle scalène antérieur; mais cette malposition anatomique ne paraît pas avoir de conséquence sur le cheminement artériel. Sur le plan dynamique, l'association d'une extension du cou, d'une rotation de la tête du côté examiné et d'une inspiration forcée, provoque un rétrécissement du défilé inter-scalénique. l'artère est alors comprimée. Si l'on combine une abduction du bras et une rétropulsion de l'épaule, le tronc primaire inférieur du plexus brachial est mis en extension contre le scalène moyen. Ces associations de mouvements dans les amplitudes physiologiques peuvent donc avoir des répercussions sur l'artère et sur le nerf. B. - Traversée du défilé costo-claviculaire Il est situé entre la face inférieure de la moitié interne de la clavicule et la face supérieure des segments moyen et antérieur de la première côte. Sur le plan dynamique, l'abaissement et la rétropulsion de l'épaule ont tendance à rapprocher la clavicule de la première côte, de même que l'abduction maximale du bras et l'inspiration forcée. Cette modification de l'espace costo-claviculaire tend à comprimer l'artère et le nerf. A l'autre extrémité de cet espace, lors des abductions forcées, la veine vient s'aplatir contre le muscle sous-clavier. C. - Traversée du tunnel sous-pectoral L'abduction forcée entraînerait un étirement nerveux qui chemine sous le petit pectoral. du paquet vasculo- A l'intérieur de ces 3 traversées, le paquet vasculo-nerveux ne dispose, dans certaines combinaisons de mouvement, que d'un espace restreint. Les moindres variations anatomiques de cette région peuvent entraîner une compression de l'artère, de la veine ou du nerf avec des répercussions fonctionnelles importantes. Ces variations pourront être d'ordre individuel, en fonction de l'âge, en fonction du sexe, ou en fonction du biotype. Elles seront éventuellement d'ordre anatomique avec des variations de l'appareil scalénique, de la première côte ou du muscle sous-clavier. 72 Elles pourront également être des malformations acquises ou congénitales: malformations de la première côte ou présence de côte cervicale. CLINIQUE \ l Les mécanismes compressifs des éléments vasculo-nerveux traversée vont déclencher l'apparition de troubles cliniques. A. - de la Circonstances étiologiques Ce syndrome se rencontre surtout chez la femme. Le maximum de fréquence est situé entre 30 et 50 ans. Les traumatismes révèlent ou aggravent fréquemment cette affection. B. - Signes d'appel (1) - Les douleurs: crampes violentes, douleurs du membre, parfois simple impatience. On n'observe pas de caractéristiques très précises ni de topographie bien définie. Elles sont électivement provoquées par certains efforts (travail des bras en hyper-abduction, placer ou ranger des objets sur des étagères haut situées, porter une valise lourde ...). Dans tous les cas, on retrouve la nécessité d'interrompre le mouvement pour obtenir une sédation rapide de la douleur. - La gêne fonctionnelle: ressentie comme une diminution de la force musculaire ou comme une incapacité de se servir d'une main comme de l'autre. - Les phénomènes vaso-moteurs: ces manifestations sont très variables. Elles se limitent parfois à un ou deux doigts. Ils peuvent prendre la forme d'un syndrome de Raynaud avec sensation de mains froides. - Les paresthésies. - L'œdème: on observe fréquemment main et des doigts. J l un gonflement intermittent de la - Les troubles trophiques: ulcérations, engelures ... apparaissent lorsque le syndrome a évolué pendant de longues années. - Les manifestations cérébro-vasculaires: relativement rares. Les formes cliniques peuvent être différenciées selon la prédominance de l'atteinte artérielle, veineuse ou nerveuse. Les manifestations douloureuses peuvent se limiter à de simples sensations de fourmillement et d'engourdissement des doigts. Mais, le plus 73 du MS moteurs aiblesse d)e neux L souvent, il s'ajoute à cette symptomatologie des douleurs nocturnes qui réveillent le patient et des phénomènes vaso-moteurs; les signes sont parfois plus importants, pouvant aller jusqu'à l'artérite digitale et la thrombose veineuse. La symptomatc,logie clinique peut être résumée par le tableau l, TABLEAU sensitivo-moteur veineuse Tinel (Erb) Tinel (Poignet) Neurologique Neurologiques EXAMEN 1. - D'après A. Vila et A. Franco (3) Chaleur Troubles Allen locale Distaux Lourdeur-Œdème Chaleur Manœuvres Collatéralité Déficit locale Proximaux Examens Modifications Claudication Douleurs Déficit sensitivo-moteur Pouls ROT Acrocyanose Acroparesthésies Signes fonctionnels CLINIQUE Statique: inspection et palpation au niveau de la main pouvant rendre compte de l'état vaso-moteur. - Dynamique: c'est le plus important. Il consiste à rechercher les modifications du pouls radial en effectuant les manœuvres tendant à augmenter l'exiguïté de la traversée thoraco-brachiale : - - La manœuvre des scalènes ou d'Adson: elle associe une inspiration forcée bloquée, une extension du cou et une rotation de la tête du côté examiné. le La manœuvre de la pliure costo-claviculaire ou manœuvre d'Eden: c'est « garde à vous ». - La manœuvre d'hvper-abduction ou manœuvre de Wright: elle associe une abduction à 1800 et une rotation externe du bras. 74 La fidélité de ces épreuves a été diversement appréciée. En pratique nous associons une abduction rotation externe du bras à une extension du cou et rotation de la tête côté examiné, dans une seule manœuvre. Nous recherchons, dans cette position, un souffle de l'artère sous-clavière. Le doppler permet une interprétation plus précise. Les examens demandés sont les radiographies de la colonne cervicale et l'électromyogramme avec étude de la vitesse de conduction nerveuse (3). TRAITEMENTS Chirurgical Il consiste le plus souvent en la résection de la première côte. Médical - Prophylactique: il vise à éviter les complications vasculo-nerveuses. On conseille au patient d'éviter les positions qui compriment les éléments vasculo-nerveux, les hyper-abductions du membre supérieur, le travail avec les bras surélevés, les exercices violents des membres supérieurs, le port d'objets lourds. - Médicamenteux: éventuellement. - Kinésithérapique: il a pour but de lutter contre la chute physiologique des moignons des épaules, responsable d'une certaine horizontalisation de la clavicule. Il faudra donc tonifier les muscles suspenseurs des épaules en évitant des positions contraingantes pour le défilé. Un protocole a été proposé par Peet et coll. en 1956. Il consiste en un programme bi-quotidien d'exercices (2). Nous nous sommes inspirés de ces données pour proposer aux patients le travail suivant, au rythme d'une séance par jour pendant un mois, puis trois par semaine pendant le mois suivant, puis deux fois par semaine le troisième mois. 1. - Patient assis sur une chaise en position corrigée. On demande une élévation des moignons des épaules. Nous appliquons une résistance manuelle permettant d'effectuer l'exercice 10 fois. 2. - Même exercice que précédemment, mais nous appliquons la résistance sur la face postérieure des moignons des épaules: le patient « hausse les épaules en serrant les omoplates)} - 10 fois. 3. _- Même position de départ: abduction des bras jusqu'à 90° avec une résistance manuelle au-dessus des coudes. 10 répétitions. 4. - Inclinaisons latérales du cou. Résistance manuelle surie temporal. 10 répétitions de chaque côté. 5. - Anté-pulsion des bras à 90°. Résistance manuelle au-dessus du coude. 10 répétitions. 75 6. - A partir de la station debout, en face d'un coin de salle, les mains posées à plat sur chaque mur, le patient fléchit les bras sans bouger les pieds. Il doit toucher avec la tête l'angle du mur. 10 répétitions. Chaque série d'exercices est répétée deux fois avec un temps de repos d'environ 1 minute. La respiration est rythmée sur chaque temps, mais nous demandons d'éviter les inspirations forcées qui entraînent une élévation de la première côte et qui diminuent l'espace intercosto-claviculaire. Les exercices ne doivent pas déclencher de douleurs ou paresthésies. Pendant le deuxième et troisième mois, les patients ont un programme d'exercices à faire à la maison. Nous reprenons les mêmes exercices, mais la résistance est assurée par deux bouteilles d'eau minérale plus ou moins pleines. INDICATIONS DES TRAITEMENTS Le traitement chirurgical est proposé dans les formes proximales avec gêne fonctionnelle importante. Le traitement conservateur s'adresse aux formes distales. Le traitement chirurgical pourra éventuellement être mis en œuvre, s'il n'y a aucun résultat après trois mois de traitement médical et si le malade est très invalidé. RÉSULTATS Peet et coll. ont traité une série de 55 patients (20 hommes et 35 femmes) pendant une durée de 1 à 4 ans. Nous avons une série de 32 patients: 22 femmes et 10 hommes dont les âges varient de 20 à 52 ans: 60 25,5 21,8 10,9 100 3,6 18,8 53,2 6,2 ts %) 55 14 76 Notre 26 217 32 série 33 (Patients %) Peet Les 2 patients de notre série, qui se sont aggravés, ont été operès (résection de la première côte). L'un a eu un très bon résultat, l'autre n'a pas été amélioré. 76 L DISCUSSION - L'amélioration, lorsqu'elle s'est produite, est survenue entre la 5e séance et la 30e séance. Il faut, avant d'affirmer que le traitement conservateur est inefficace, le poursuivre pendant au moins deux mois. - Les bons résultats de la rééducation ne semblent pas liés à une symptomatologie particulière. Cependant les symptomatologies artérielles et douloureuses semblent plus sensibles à la rééducation que les atteintes veineuses. - Il semble que plus le patient est traité rapidement, meilleures sont les chances de succès. - Il est à noter que les sportifs ayant arrêté leur activité présentent de bons résultats avec une récupération rapide du tonus musculaire. - Il est nécessaire d'entretenir le tonus muscu!aireaprès le traitement pour conserver l'amélioration éventuelle. CONCLUSION L'efficacité actuellement reconnue, parfois spectaculaire de la kinésithérapie dans le traitement du Syndrome de la Traversée Thoraco-Brachiale, a contribué à renforcer une meilleure connaissance de cette pathologie. Cependant, il peut exister un décalage important entre les perturbations anatomiques et leur expression clinique. Ce décalage est difficile à expliquer, de même que le mécanisme exact de la kinésithérapie. Celle-ci reste efficace dans la majorité des cas et doit toujours être prescrite en première intention. La rééducation du Syndrome de la Traversée Thoraco- Brachiale doit entrer dans la pratique kinésithérapique quotidienne. Références 1. MERCIER (CI.), HUGUET (J.F.). - Les syndromes vasculaires de la traversée thoraco-brachiale. Masson Ed., Paris, 1976. 2. PEET (P.M.) et Coll. - Thoracic outlet syndrom: evaluation of a therapeutic exercice programm. Proc. Mayo Clinic, 1956,31,281. 3. VILA (A.). OUVRARD (A.M.). FRANCO (A.), REYMOND (F.). QUESADA (Ch.). - Le Syndrome Revue de la Traversée Thoraco-brachiale: Intérêt et limites de l'Electromyographie. d'Electromyographie et de Neurophysiologie Clinique (A paraître). 77