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ONE ON ONE RENCONTRE 28 destinations cover en couverture Paul Gross War wounds Actor-director Paul Gross has the talent to match his considerable ambitions. This fall, he will release his gut-wrenching First World War film, Passchendaele. Les canons de Passchendaele L’acteur et réalisateur Paul Gross s’est donné les moyens de ses ambitions. Il nous offre cet automne Passchendaele, un film coup-de-poing sur la Première Guerre mondiale. Mémoire affective. By | Par Mathieu Chantelois Photo Hamish Kippen destinations 29 Photo: Alliance Films Photo: CBC Television 1 2 My film is a war story, but it’s also a story of courage and determination. Paul Gross was only 15 at the time, but he’ll never forget a particular fishing trip he took with his grandfather, Michael Dunne. “Everyone has lived through life-changing experiences, events that transform the way they see life. For me, the conversation I had with my grandfather on the boat that day was one of those moments.” Dunne, the father of five daughters, fought in the war between 1915 and 1918. After three years at the front he was shipped back to Canada, seriously wounded. Gross’s grandfather never spoke of the horror of combat. Except for that day out on the lake. “I still remember our conversation very clearly. It was as if a door opened and I suddenly understood that men’s actions sometimes have terrible consequences. Ever since, I’ve been haunted by those memories of war.” Gross went on to grow up nurturing the idea of making a film about the Great War. “I feel like I’ve spent my whole life working on it,” says the 49-year-old Alberta native, a true Canadian star thanks to roles such as Chris in Men with Brooms and RCMP officer Benton Fraser in the television series Due South. Passchendaele tells the story of Sergeant Michael Dunne (played by Gross), a soldier who is badly wounded in France and goes home to Canada so his many 30 destinations Paul Gross n’avait que 15 ans, mais il n’oubliera jamais le voyage de pêche qu’il a fait avec Michael Dunne, son grand-père. « Tout le monde a vécu des moments qui font basculer l’existence, qui chamboulent la façon de voir la vie. Pour moi, la discussion que j’ai eue avec mon aïeul ce jour-là sur le bateau est d’une telle importance… » Dunne, père de cinq filles, a combattu à la guerre de 1915 à 1918. Après trois années au front, il a été rapatrié au Canada, gravement blessé. Le grand-père de Gross ne parla jamais des horreurs des combats. Jamais, sauf sur le lac, ce jour-là : « Je me rappelle encore très bien notre conversation. C’était comme si une porte s’ouvrait et que je me rendais compte que les actions des hommes avaient parfois des conséquences terribles. Depuis, je suis hanté par ces souvenirs de guerre. » C’est ainsi que Paul Gross a grandi : avec l’idée de faire un film sur la Grande Guerre. « J’ai l’impression que j’ai passé ma vie à travailler là-dessus ! », lance l’Albertain de 49 ans, véritable star du Canada anglais pour son rôle de Chris dans Quatre gars et un balai (Men with Brooms) et du policier fédéral Benton Fraser dans la télésérie Un tandem de choc (Due South). Passchendaele raconte l’histoire du sergent Michael Dunne (Paul Gross), un soldat brutalement blessé en France et qui retourne au pays soigner ses nombreuses blessures. Lors de son séjour à l’hôpital militaire de Calgary, Photo: Chris Large 1 paul gross in the television series due south paul gross dans la télésérie due south (un tandem de choc) 2 with the crew of passchendaele in alberta avec l'équipe de tournage de passchendaele en alberta 3 filming a battle scene dans une scène de champ de bataille 3 Mon film est une histoire de guerre, mais aussi de détermination et de courage. injuries can mend. While convalescing in a Calgary veterans’ hospital, he meets a nurse, Sarah (Caroline Dhavernas), and falls in love. When his sweetheart’s asthmatic younger brother enlists to fight in Europe, Michael decides to return to active duty to protect him. Like thousands of Canadians, they fought in the third Battle of Ypres, a bloody 15-day clash commonly known as the Battle of Passchendaele. “My film is a war story, but it’s also a story of courage and determination. I wanted to show the heroism of everyone who fought and of the people who supported them. It’s also a tribute to the 67,000 Canadians who died in that war,” explains Gross, who’s clearly happy to be able to give voice to so many voiceless heroes. Filming combat is a dangerous and, above all, costly business. Gross estimates that a movie like Passchendaele would have cost $100 million to make in Hollywood. He did it for $20 million, “which is an astronomical figure for Canada,” he notes. “In Canada, the private sector doesn’t usually finance films. For three years I had to pull out all the stops and set up a string of dinners with very wealthy people. I should have brought a little camera along and made a movie called My Dinners with the Billionaires! I met some really fascinating people. You know, talking to a man who made a fortune in oil and asking him to invest il rencontre Sarah (Caroline Dhavernas), une infirmière dont il tombe amoureux. Lorsque le jeune frère asthmatique de sa douce s’enrôle pour combattre en Europe, Michael décide de retourner à la guerre pour le protéger. Comme des milliers d’autres Canadiens, ils iront combattre à la troisième bataille d’Ypres, un combat sanglant de 15 jours que l’on appelle communément la bataille de Passchendaele. « Mon film est une histoire de guerre, mais aussi de détermination et de courage. Je voulais montrer l’héroïsme de tous ceux qui ont combattu, et de ceux qui les ont appuyés. C’est aussi un long métrage qui rend hommage aux 67 000 Canadiens morts au combat », explique Gross, visiblement heureux de donner une voix à tous ces « sans-voix ». Filmer la guerre est une entreprise périlleuse et… coûteuse. Paul Gross estime qu’un film comme Passchendaele aurait coûté 100 millions de dollars à nos voisins du sud. Il a fait son long métrage avec 20 millions, « ce qui, au Canada, est une somme astronomique », rappelle-t-il. « Ici, le secteur privé n’a pas l’habitude de subventionner le cinéma. Pendant trois ans, j’ai dû foncer et organiser une tonne de soupers avec des gens très riches. J’aurais dû trimballer une petite caméra avec moi pour faire un film intitulé “Mes soupers avec des milliardaires” ! J’ai vraiment rencontré des gens fascinants ! Vous savez, parler à un homme qui a fait sa fortune dans le pétrole et lui demander d’investir de l’argent dans un film, ce n’est pas nécessairedestinations 31 Prestige premiere Photo: Alliance Films Passchendaele will open the 33rd Toronto International Film Festival, which runs from September 4 to 13. It’s a major honour, since the eyes of the whole movie world are focused on the opening-night gala. Gross took the news with humility. “Of course the organizers are giving us a feather in our cap. But, as far as I’m concerned, the real test will be the film’s theatrical release, in October.” All the same, it will be a real pleasure for the movie buffs gathered in Toronto to watch the star walk down the red carpet with the film’s leading lady, Caroline Dhavernas (below with Gross). (M.C.) Ouvrir le bal Le film Passchendaele donnera le coup d’envoi au 33e Festival international du film de Toronto qui se déroule dans la Ville reine du 4 au 13 septembre. Il s’agit d’un prestigieux honneur, puisque le Gala d’ouverture est une véritable fenêtre sur le monde. Paul Gross prend la nouvelle avec un brin de modestie : « C’est évident que c’est une belle fleur que nous font les organisateurs. Mais le vrai test pour moi, ce sera quand le film se retrouvera en salle, en octobre prochain. » N’empêche que ce sera un vrai plaisir pour les cinéphiles à Toronto que de voir la star fouler le tapis rouge au bras de l’actrice Caroline Dhavernas (ci-dessus avec Gross). 32 destinations in a movie isn’t as easy as it sounds. But I really believed in the project, and I think my enthusiasm was contagious.” It was so contagious that Gross managed to convince then-premier Ralph Klein to open Alberta’s coffers to the tune of $5.5 million to allow filming to start. The day after the announcement, the official opposition and taxpayers’ groups denounced the largesse. “I wasn’t expecting it at all. It was a real shock,” Gross says. “It’s true that the Alberta government gave us a lot of money, but then again it’s a government that has a lot of money. I was sorry about the reaction, and also sorry that those people didn’t have ideas of their own that inspired the premier to provide funding!” Does he have any particular memories of the filming? “Those were the best times of my career,” he says without hesitation. “My character’s house is in Calgary, one of the most beautiful places in the world. Everything was perfect! There wasn’t a single day when I didn’t wake up and take a moment to think about how fortunate I am to be working in the film business.” The beauty of Calgary stood in contrast to the gruelling battlefield shoots. “Those were by far the worst working conditions I’ve ever experienced. We had to shoot in the rain and we had waist-deep mud. The ment évident. Mais j’y croyais tellement. Je crois que mon enthousiasme a été contagieux. » Si contagieux, que Paul Gross a même convaincu l’ex-premier ministre Ralph Klein d’ouvrir les coffres de l’Alberta et de lui donner 5,5 millions de dollars pour permettre le premier tour de manivelle. Au lendemain de l’annonce, l’opposition officielle ainsi que des groupes de contribuables ont dénoncé cet élan de générosité : « Je ne m’attendais pas du tout à cela. Ce fut un choc, se rappelle Gross. C’est vrai que le gouvernement de l’Alberta nous a donné beaucoup d’argent… Mais, en même temps, c’est un gouvernement qui a beaucoup d’argent. Je suis désolé de cette réaction, désolé aussi que ces gens n’aient pas trouvé d’idées afin de recevoir, eux aussi, une subvention du premier ministre ! » Que reste-t-il comme souvenirs de tournage au principal intéressé ? « Les plus beaux moments de ma carrière ! », lance-t-il d’emblée. « La maison de mon personnage est située à Calgary, l’un des plus beaux endroits au monde. Tout était parfait ! Il ne s’est pas passé une seule journée où je me suis levé sans prendre le temps de me rappeler la chance unique que j’ai de travailler en cinéma. » Toute cette beauté a trouvé un contraste dans les longs tournages des scènes de champs de bataille. « C’était de loin les pires conditions dans lesquelles j’ai travaillé. Nous devions tourner sous la pluie et nous avions de la boue jusqu’à la taille. L’eau qui simulait la pluie venait water for simulating rain came from a river, so it was freezing. If you dropped anything in the mud, it was gone. We once had to stop filming because one of the extras couldn’t move anymore—he was stuck in the mud. It took four people to pull him out. We had countless cases of hypothermia. Every day, I told myself I had the worst job in the world, and that I should never have gone into the film business!” He pauses for a moment, as if to watch memories of filming—and his childhood memories—replay. “At the same time, we had to stop and remember, after those long workdays, that we were lucky to have a roof over our heads and food to eat, and that nobody had tried to kill us that day. When you film scenes like that, you develop enormous respect for soldiers like my grandfather.” Gross chokes up a little. It seems like a good time to wrap up the interview, but one more question needs to be asked: what does he think his grandfather would say if he could see the film? “He’d probably want to correct all kinds of details! But, at the same time, I think he’d essentially appreciate it. Canadian cinema has been silent on this disturbing time in our history. I think he would be proud to see that I’m making my own modest contribution.” d’une rivière, elle était donc glacée. Si on laissait échapper quelque chose dans la boue, c’était perdu. Parfois, il fallait arrêter de tourner parce que l’un des figurants n’était plus capable de bouger et qu’il était pris dans de la terre gluante. Il fallait quatre personnes pour le sortir de là. Nous avons eu d’innombrables cas d’hypothermie… Tous les jours, je me disais que j’avais le pire métier du monde, que je n’aurais jamais dû travailler en cinéma ! » Gross fait une pause, un peu comme pour regarder une fois de plus les images du tournage et de son enfance défiler de nouveau : « Et en même temps, il fallait que l’on se rappelle, à la fin de ces journées de travail, que nous avions la chance d’avoir un toit et de la nourriture… et que personne n’avait tenté de nous tuer durant la journée. On gagne un respect immense pour les soldats comme mon grand-père, en tournant des scènes comme celles-là. » L’acteur a la gorge serrée. On voudrait bien le laisser aller, mais on ose tout de même une dernière question. On ne peut s’empêcher de lui demander ce que dirait son grandpère, s’il voyait son film. « Il voudrait probablement corriger une tonne de détails ! Mais, en même temps, je crois qu’il en apprécierait l’essence. Le cinéma d’ici a été silencieux sur cette page troublante de notre histoire. Je crois qu’il serait fier de voir que, bien modestement, j’apporte ma contribution. » destinations 33