Le député à Paris

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Le député à Paris
 Le député à Paris...
Question au Gouvernement publiée le mercredi 17 septembre 2008 sur le site www.jeandionis.com
Jean Dionis intervient dans un colloque au sujet de l'évolution du droit
de l'internet.
A l’occasion des 10 ans de Juriscom.net
« Enjeux des nouveaux réseaux Internet : du contributif au coopératif »
17 septembre 2008 de 14h à 18h30
FIEEC, 11 rue Amiral Hamelin 75116 PARIS
Introduction et présentation
Lionel Thoumyre (fondateur de Juriscom.net, MySpace France)
Ouverture
Franck Supplisson (Cabinet d’Eric Besson)
Table ronde 1 – Le contributif, nouvelle donne du web 2.0
Animateur : Alexandre Menais (EBay Europe)
Un nouveau pouvoir citoyen : certification des contenus et expression politique
Me Jean‐Philippe Hugot (Avocat)
Laure Kaltenbach (DDM)
Jean Dionis du Séjour (Député)
De nouveaux obstacles aux échanges : enjeux de l’interopérabilité
Me Frédéric Sardain (Avocat)
Marc Mossé (Microsoft France)
Texte de l'intervention de Jean Dionis :
1 – La LCEN :
Le constat me paraît évident, et j'imagine que vous avez eu l'occasion d'en discuter ensemble, elle est
aujourd'hui clairement datée.
Nous ne devons pas perdre de vue qu'il s'agit de la transposition de la directive européenne relative au
commerce électronique du 8 Juin 2000.
Pour prendre un exemple qui fait débat dans l'actualité jurisprudentielle, en 2000, E‐bay existe à peine en
France (création d'ebay aux USA en 1996 et lancement en France du site ebay.fr en octobre 2000). En bref,
le web 2.0, le web contributif n'est même pas un concept. Les contentieux au sujet du régime de
responsabilité des « hébergeurs » dont le rôle était appelé à évoluer devaient être laissés à l'appréciation
du juge.
Car la LCEN reprend les principes fondateurs de la directive en matière de responsabilité.
Elle définit l'hébergeur, c'est à dire « la personne ou la société qui assure, même à titre gratuit pour mise à
disposition du public par des services de communication au public en ligne, le stockage de signaux,
d'écrits, d'images, de sons ou de messages de toute nature fournis par des destinataires de ces services ».
La nouveauté du statut d'hébergeur est qu'il prévoit, par rapport à celui d'éditeur, une responsabilité
limitée pour les contenus illlicites.
Cela veut dire que la loi considère que l'hébergeur, à la différence de l'éditeur, peut ne pas avoir
connaissance du caractère illicite des informations qui figurent sur son site.
La LCEN pose ainsi le principe d'irresponsabilité générale des hébergeurs, avec pour limite la notification.
Autrement dit la responsabilité civile ou pénale des hébergeurs n'est engagée que s'ils ont eu
effectivement connaissance et « n'ont pas agi promptement pour retirer ces informations ou en rendre
l'accès impossible ».
Ceci est corrélé à l'obligation de mise en place d'un service de signalement des contenus illicites («
dispositif facilement accessible et visible permettant à toute personne de porter à leur connaissance ce
type de données »). Il s'agit de ce qu'on appelle le régime des « contenus odieux », à savoir « la
pornographie enfantine, l'apologie des crimes contre l'Humanité, l'incitation à la haine ».
L'exonération de responsabilité de l'hébergeur repose sur les moyens qu'il offre pour permettre le
transfert de cette responsabilité aux éditeurs d'une part et sur sa propre bonne volonté à assurer le «
nettoyage » du site en cas de signalement.
Ce régime est problématique car il est souvent considéré par les ayants droits notamment, comme trop «
confortable »pour les hébergeurs, et la multiplication des contentieux liée à l'essor du web 2.0 montre
bien les difficultés générées par ce régime de responsabilité.
2‐ La recrudescence des contentieux
Ces contentieux opposent différents acteurs :
Assez régulièrement des ayants droits à des services de courtiers en ligne (place de marché, enchères en
ligne):
ebay contre LVMH en France (pour l'instant gagné par LVMH, ebay condamné à 38 millions d'euros)
ebay contre L'Oréal en Belgique (pour l'instant gagné par ebay)
ebay contre le joaillier américain Tiffany aux Etats Unis (pour l'instant gagné par ebay)
Mais ces contentieux opposent aussi des ayants droits avec des sites coopératifs :
daily motion contre Lafesse (gagné par dailymotion)
daily motion contre TF1 (pas encore tranché)
youtube contre Viacom (qui lui réclamait 1 milliard de dollars)
fuzz contre Olivier Martinez
sans citer myspace, wikipedia, etc.
3 – les tendances jurisprudentielles actuelles : le juge ne parvient pas à donner une orientation claire
Il semble que 2 courants jurisprudentiels se soient créés dans les tribunaux français.
Le premier tend à considérer que les sites participatifs ou coopératifs sont des «éditeurs» de contenus
plutôt que des hébergeurs et reconnaissent alors leur responsabilité dans la diffusion de contenus
illlicites. Myspace, tiscali media et Fuzz ont ainsi perdu certains procès.
Un second courant paraît retenir le statut d'hébergeur pour ces fameux sites du web 2.0 comme
Dailymotion. Le juge établit son jugement sur le fait que « les contenus diffusés sont fournis par les
utilisateurs eux‐mêmes », bien que Dailymotion mette en oeuvre une certaine structuration de
l'information avec un classement, des chaînes, etc.
4 – Notre analyse de législateur sur cette évolution du droit – les conclusions du rapport de la LCEN
(Dionis/Erhel 2007)
les limites de la loi LCEN : Cette loi comporte une lacune forte, l'abscence de définition du statut
d'éditeur.
la notion d'Editeur n'est pas définie parce qu'il n'y a pas eu d'accord au Parlement et que la jurisprudence
devait être amenée à le préciser.
Conclusion : Que doit‐on faire? ‐ La nécessité de légiférer.
On constate tous que le WEB 2.0 a rendu poreuse la frontière entre les acteurs de l'internet, qui
concerne des sites majeurs comme ceux que j'ai cités.
En l'absence de convergence de la jurisprudence, due entre autres aux lacunes de la LCEN, l'impératif de
sécurité juridique implique une LCEN 2, une loi qui sera nécesairement plus restrictive même si la notion
de liberté doit rester au coeur du droit de l'internet.
Or la sécurité juridique conditionne évidemment l'exercice des droits des citoyens mais surtout le
développement économique.
Et il s'agit d'un secteur économique majeur, un secteur en très forte croissance, où les évolutions
technologiques et sociétales sont ultra rapides, et qui font une place de plus en plus grande aux « users
génerated contents ».
Les montants en jeux sont énormes et les acteurs concernés ne peuvent supporter une telle insécurité.
C'est donc cette nécessité de sécurité juridique dans sa composante «stabilité et clarté de la norme » qui
me laisse penser qu'on ne parviendra pas à surmonter «l'anarchie » jurisprudentielle sans une LCEN 2.
5 – Le chemin probable :
Nouvelle directive européenne 2010 ?
Transposition 2011
En attendant, .....bon courage mes amis de Juriscom....
© Jean Dionis
http://www.jeandionis.com