Réunion Bayard-Milan presse 9 janvier V1

Transcription

Réunion Bayard-Milan presse 9 janvier V1
Réunion La Charte – Le Grill – Snac – Bayard et Milan presse
Le 9 janvier 2012, à l’initiative de La Charte, des représentants de cette organisation,
accompagnés d’un représentant du Grill (association d’illustrateurs de Strasbourg) et d’un
représentant du Snac ont rencontré des représentants du groupe de presse Bayard/Milan.
Etaient présentes Florence Guémy, directrice de Milan presse et directrice adjointe de Bayard
presse, Sabine Madeleine, directrice juridique du groupe, Valérie Saint-Pierre en charge des
questions de Propriété intellectuelle pour Bayard et Milan, et Sylvaine Hartout, responsable
des droits et du numérique chez Bayard Presse.
Pour la Charte : Marie Quentrec, présidente, Marie Sellier, ex-présidente et Gwendoline
Raisson, responsable administrative.
Pour le Grill : Pascal Reynaud, avocat.
Pour le Snac : Emmanuel de Rengervé, délégué général, juriste
***
En guise d’introduction, Florence Guémy a tenu à rappeler que le groupe Bayard presse avait
toujours été attaché à la création, et qu’ils étaient convaincus que cette création n’allait pas
sans les auteurs.
Elle a d’ailleurs tenu à préciser que leurs actionnaires ne réclament pas des dividendes mais
juste la qualité de la création. « Notre projet, notre attachement à la création, ne va pas sans
les auteurs. » « Pour nous, la relation aux auteurs est au cœur du processus de création. » (Une
fois ce préambule posé, Florence Guémy reviendra sur les difficultés de la presse, l’économie
des médias qui nécessitent de s’adapter).
Dans ce contexte, la publication par Rue89 d’un article mettant en cause l’attitude de Milan
presse envers ses auteurs, a été perçue comme injuste. Et de regretter que la présente réunion
n’ait pas eu lieu avant la parution de cet article, qui les a « extrêmement remués » et
« attristés ».
Emmanuel de Rengervé et Marie Quentrec reviennent sur les témoignages d’auteurs et
d’illustrateurs faisant état d’un réel chantage de la part de Milan et Bayard presse. « Le terme
est dur, a reconnu Emmanuel de Rengervé, mais il est approprié, quand on dit à quelqu’un
« ou tu signes ou on ne travaille plus ensemble » (un autre intervenant parlera de « tu signes
ou tu dégages »).
De son côté, Pascal Reynaud a évoqué cette « impression de faire un chèque en blanc »
ressentie par les auteurs, à la lecture de la lettre accord cadre Milan.
Parmi les consignes entendues par les auteurs, quelqu’un évoque enfin le « Vous signez, et
vous n’avez rien le droit de biffer. »
Ce à quoi il est aussitôt répondu par Sylvaine Hartout : « Oh mais, des contrats biffés, on en
a en permanence ! C’est négociable. »
Florence Guémy confirme : « Ces contrats sont négociables (…) Il n’y a aucune fermeture ».
Ajoutant toutefois que pour ce qui concerne le numérique, il peut y avoir quand même de
grosses difficultés.
Mais alors, pour être précis et pratique que peut-on « biffer » ? demande Emmanuel de
Rengervé.
Réponse : Sur le numérique, ça dépend quoi.
Sabine Madeleine : Nous proposons un cadre à nos auteurs. Si le cadre ne leur convient pas,
nous ne travaillons plus ensemble. Sur des points essentiels et stratégiques pour nous, ce n’est
pas possible, sinon, pourquoi pas… Il y a des évolutions sur lesquelles nous sommes capables
d’aller, mais pas au-delà.
Le périmètre de cession
Emmanuel de Rengervé : La cession des droits sur une œuvre doit-elle être exclusive ou pas ?
Est-ce que, selon vous, il y a des droits qui restent ou qui peuvent rester la propriété de
l’auteur ?
Réponse : Pour Bayard, les droits exclusifs sont le « print » c'est-à-dire l’édition presse
imprimée et le numérique.
Emmanuel de Rengervé : « On peut comprendre une volonté de cohérence
papier/numérique » mais le problème, c’est qu’à la périphérie, vous voulez beaucoup plus que
le papier presse et le numérique. Il y a une vraie perte de contrôle de l’exploitation et de la
diffusion de son œuvre par l’auteur.
Le périmètre des cessions est trop large, il est peu clair. Même des juristes ont du mal à tout
saisir. Vous voulez avoir tous les droits, mais la question est : si vous n’exploitez pas, que se
passe-t-il ? »
L’engagement de publication (= obligation de publication)
Valérie Saint-Pierre : il serait possible d’indiquer un délai dans lequel nous nous engageons à
exploiter ces droits.
Nous avons pris la mesure du problème et votre demande d’un engagement de publication.
Si cet engagement n’était pas tenu, l’auteur pourrait récupérer ses droits.
Sont alors évoqués les délais suivants : 3 ans après signature du contrat, ou 18 mois après
remise des textes/images (délais discutés au sein du groupe de travail auteurs/ éditeurs sur le
livre numérique, au ministère de la Culture, dans les négociations SNE/CPE).
La clause de réexamen, anciennement appelée « clause de revoyure ».
Marie Sellier fait remarquer que cette clause ne figure pas dans les contrats presse
Bayard/Milan, alors même que c’est un point acquis entre les éditeurs et les auteurs au sein
des négociations du CSPLA (Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique). Et de
marteler une nouvelle fois à propos des droits cédés pour le numérique : « On ne peut tout de
même pas s’engager sur la durée de la propriété littéraire et artistique (70 ans après la mort de
l’auteur) pour ce mode d’exploitation dont on ne sait rien sur le plan économique, ni vous ni
nous…».
La première réponse, déjà fournie aux auteurs par le passé : « Vu le nombre de contrats œuvre
par œuvre signés chaque année par Bayard, ce n’est pas possible. »
Marie Sellier et Emmanuel de Rengervé rappellent qu’avec la mention « avec tacite
reconduction », en l’absence de rediscussion, le contrat peut se poursuivre. Et il y a fort à
parier que seuls quelques auteurs se manifesteront pour renégocier leurs droits. Ce serait donc
tout à fait gérable par Bayard.
C’est alors que le ton change :
- Nos contrats sont amenés à évoluer, intervient Sabine Madeleine, on entend le point sur le
réexamen. C’est un point que nous avons noté…
- Un point sur lequel les éditeurs ont beaucoup évolué, fait remarquer Marie Sellier.
- Un point sur lequel nous pouvons encore évoluer, réaffirme Sabine Madeleine, nous
réalisons qu’il est bloquant pour certains auteurs.
Les cessions Bayam, anciennement « Bayard kids »
Une rémunération forfaitaire unique de 10 % du forfait initial est prévue, pour une période de
3 ans. Tous les 3 ans, si son oeuvre continue à être exploitée sur ce site, l’auteur touche 10 %
de son forfait initial.
D’après Bayard, il y aurait impossibilité à ce jour de comptabiliser les œuvres
vues/lues/cliquées.
La lettre accord cadre n’est valable que 10 ans.
Il est suggéré de réécrire la forme pour mieux en comprendre le fond : s’il n’y a pas de
renouvellement au bout de dix ans, le contrat s’arrête. Il est proposé d’ajouter : « à l’issue de
cette durée, en cas de désaccord, Milan cessera toute exploitation de l’œuvre. » Le principe
semble accepté.
Pascal Reynaud fait remarquer : « juridiquement, vous courez un risque avec cette lettre
accord cadre. »
Réponse : « On en est conscient, on ne peut pas faire mieux. (…) Mais 10 ans c’est trop
long, on entend. Ça fait peur, et ça n’était pas notre souhait. »
Il est question de passer cette durée à 3 ou 4 ans.
Question : Pourquoi pas aussi une durée limitée pour les contrats Bayard presse ?
Réponse : « Historiquement, les contrats sont gérés œuvre par œuvre chez Bayard… »
Rétroactif
Les modifications et autres avancées qui seraient apportées dans le futur à la lettre accord
cadre pourraient être rétroactives : c'est-à-dire que ceux qui auraient déjà signé la lettre accord
cadre, avant les changements, bénéficieraient des conditions de la nouvelle lettre.
Pourquoi, en cas de cession à un tiers, l’auteur ne touche que 30 % des
recettes brutes, alors que c’est 50 % dans les usages de l’édition ?
D’abord c’est plus que ce que Bayard avait proposé au début et puis c’est historique, c’est une
question d’économie générale…
Les recettes internationales sont plus rares en presse et impliquent beaucoup de ressources
humaines, les prix de vente sont très bas à l’étranger, les investissements et le marketing sont
importants… Et puis en fait, c’est ce qui a été négocié avec les journalistes professionnels du
groupe.
Emmanuel de Rengervé fait observer que le statut des journalistes salariés et des auteurs n’a
rien à voir, il n’est donc pas possible de comparer la situation des uns et des autres, et de caler
la rémunération des uns sur celles des autres.
Forfaits rémunération
Quelle politique maison pour la réévaluation des forfaits ?
La politique de Milan sur le sujet devrait bientôt évoluer. De nouveaux barèmes sont prévus,
avec une augmentation globale de 2 à 3 %.
Et chez Bayard presse ? ça se fait « au fil de l’eau », dans le cadre par exemple de nouvelles
formules. En tout état de cause, ça relève des rédactions directement. « Ce sont elles qui
décident ».
Le droit moral
Emmanuel de Rengervé : le sentiment qui se dégage à la lecture de ces lettres accord, c’est
qu’il y a une perte de contrôle de l’auteur sur l’utilisation et l’exploitation qui pourront être
faites de son œuvre, notamment sur le terrain du numérique. Cela perturbe à juste titre l’auteur
et c’est un vrai problème de fond. Que pouvez-vous faire pour donner des garanties à
l’auteur ?
Réponse : C’est peut-être pas dit comme ça, mais dans les faits, ça se passe comme ça : toute
modification de l’œuvre est validée par l’auteur.
Marie Sellier suggère d’ajouter cette mention au contrat.
Le principe semble accepté.
Le droit préférentiel
La philosophie en la matière : Bayard investit sur des œuvres dans le cadre de ses publications
presse et craint de voir ces créations partir ailleurs, sans récolter le fruit de leur travail
d’accompagnement. Ex : une série, un personnage, Tom Tom et Nana, etc.
« Dans le cadre de la lettre accord cadre Milan, il n’est pas légal », fait remarquer Emmanuel
de Rengervé.
« On ne l’enlèvera pas, c’est fondamental pour nous » répond Sabine Madeleine.
Est toutefois évoquée la possibilité de faire figurer cette clause sur chaque bon de commande,
œuvre par œuvre donc, plutôt que sur la lettre accord cadre elle-même.
Emmanuel de Rengervé convient qu’il n’est pas un fan absolu de la philosophie que cette
clause implique, mais qu’à la rigueur, le principe pourrait être accepté si la durée était plus
courte et que la formulation de cette clause était sensiblement différente.
Du coup il est convenu de réfléchir à la façon de formuler ce principe de droit préférentiel de
manière plus douce pour l’auteur.
« Au prorata de leurs contributions respectives »
Les co-auteurs n’étant quasi jamais en contact dans le cadre de leurs collaborations pour
Bayard et Milan, ils ne connaissent pas le ratio entre leurs droits respectifs. Quand cela est
possible, il serait souhaitable de préciser quelle est la répartition des droits entre les coauteurs, d’autant plus qu’elle est généralement de 50/50, nous assure-t-on.
EN BREF…
Nous retiendrons donc de cette réunion que :
•
Négociable. Les contrats presse Bayard et Milan sont négociables, et peuvent être
rayés ou modifiés dans une certaine mesure. Les seules cessions exclusives exigées
par l’éditeur sont l’édition presse papier et le numérique (à l’exclusion donc des autres
droits cédés).
•
Obligation de publication. Bayard/Milan s’engagent à faire figurer dans leurs
contrats un délai au delà duquel, si l’œuvre n’est pas exploitée en numérique, l’auteur
peut récupérer ces droits. 3 ans après signature, ou 18 mois après remise des
textes/images.
•
Clause de réexamen. Une clause de réexamen prévoira la possibilité pour l’auteur de
renégocier le montant des droits numériques cédés, au bout de trois ans, afin de tenir
compte de l’évolution du marché, avec tacite reconduction.
•
Durée limitée. La durée de validité de la Lettre accord cadre Milan, de 10 ans, devrait
baisser à 3 ou 4 ans. Au delà de cette durée, l’auteur pourra récupérer tous ses droits.
•
Rétroactivité. Les modifications et autres avancées qui seront apportées à la lettre
accord cadre Milan seront rétroactives, pour ceux qui auraient signé l’ancienne
version.
•
Droit moral. Bayard/Milan s’engagent à faire figurer dans les contrats les mentions
assurant le respect du droit moral de l’auteur, notamment pour tout ce qui touche aux
adaptations numériques de son œuvre.
•
Droit préférentiel. Bayard/Milan s’engagent à formuler le principe de droit
préférentiel et de prévoir sa mise en œuvre, de manière « plus douce » pour l’auteur.
•
Prorata des contributions respectives. Quand elle est connue, Bayard/Milan
préciseront désormais dans leurs contrats quelle est la répartition des droits entre les
co-auteurs, afin que la formule « Au prorata de leurs contributions respectives »
corresponde à un taux précis et connu de tous les co-auteurs.
CONTACT AUTEURS
Bayard tient à disposition des auteurs une lettre explicative d’accompagnement à la lecture de
ses contrats. (Elle est désormais également disponible auprès de la Charte.)
Toutes les demandes des auteurs concernant leurs contrats, le droit préférentiel, et autres
questions juridiques, peuvent être adressées à :
Sylvaine Hartout
01 74 31 69 13
[email protected]

Documents pareils