Printemps 2013.pub - L`Accolade Santé mentale
Transcription
Printemps 2013.pub - L`Accolade Santé mentale
Printemps 2013 - Volume 20, numéro 2 Équipe du journal Maladie mentale, sexualité et médicaments : une réalité négligée La recherche sur les maladies mentales a beaucoup progressé durant le dernier siècle. Malheureusement, certains tabous ont persistés avec le temps. Encore aujourd’hui de nombreux spécialistes, intervenants et parents n’osent discuter de l’intimité et de la sexualité de la personne atteinte, par gêne, manque d’information ou incompréhension. L’histoire explique en grande partie cette situation. Il faut se rappeler que jadis les hôpitaux étaient gérés par des communautés religieuses et que la sexualité n’y avait pas sa place. Mais quand est-il maintenant? Une étude, datant de 1998, stipule que plus de 50 % des schizophrènes affirmaient être sexuellement actifs. Additionnez les autres maladies mentales et ce pourcentage augmentera assurément. Pourtant nous retrouvons peu d’articles scientifiques sur le sujet, même en 2013. Comme si le fait de ne pas en parler permettait de l’occulter. Malheureusement, vingt pour cent des Canadiens seront personnellement aux prises avec une maladie mentale au cours de leur vie. Bien que la plupart des maladies mentales apparaissent à l'adolescence et dans la jeune vie adulte, des personnes de tous âges, de toutes cultures et de tous les niveaux de scolarité ou de revenu peuvent en souffrir. Beaucoup de gens devront composer avec la maladie mentale et ses conséquences. Types de maladies mentales Les maladies mentales prennent plusieurs formes, dont : les troubles de l'humeur, tels que la dépression et le trouble bipolaire, qui affectent la manière dont une personne se sent; (Suite page 2) Responsable de la production Line Lambert, directrice générale Collaborateurs à la rédaction des textes Line Lambert Nathalie Haché Michel Gamache Impression, diffusion Lucie Longtin Le verbe aimer est un des plus difficile à conjuguer : son passé n’est pas simple, son présent n’est qu’indicatif et son futur est toujours conditionnel. Dans ce numéro : Maladie mentale, sexualité et médicaments : une réalité négligée 1 Témoignage de Jean Forest : itinérance et maladie mentale 7 Assemblée générale 10 Formations 10 Conférences 12 Groupes d’entraide 13 Centre de documentation 14 (Suite de la page 1) la schizophrénie, qui affecte sa perception du monde; les troubles anxieux, qui font en sorte qu'une personne a peur de certains endroits, événements ou situations; les troubles de la personnalité, qui affectent la manière dont une personne se voit par rapport aux autres; les troubles alimentaires, tels que l'anorexie et la boulimie, qui ont un effet sur la façon dont la personne perçoit les aliments et son image corporelle. raît un peu partout. Un tabou qui persiste même dans les équipes de traitement. Pourtant des études ont démontrées que plusieurs patients ne prenaient pas leurs médicaments à cause de l’effet des médicaments sur leur corps et leur sexualité, principalement la prise de poids et les dysfonctions sexuelles. Une préoccupation qui devrait être davantage prise en considération, surtout lors de la non-observance au traitement. Au-delà des symptômes de la maladie, les personnes atteintes ont des besoins et des droits. Le développement d’une relation humaine saine peut s’avérer très efficace pour le maintien de l’équilibre personnel et l’amélioration de la qualité de vie. Causes des maladies mentales Les maladies mentales sont causées par une interaction complexe entre divers facteurs, dont les suivants : la génétique, la biologie, Les maladies mentales et la sexualité la personnalité, le statut socio-économique et les événements de la vie. Schizophrénie Les premiers symptômes de la maladie afSymptômes des maladies mentales fectent le développement de la sexualité Les maladies mentales sont caractérisées chez plusieurs personnes atteintes de schizopar des changements au niveau de la pen- phrénie, particulièrement lorsqu’il y a prédosée, de l'humeur et du comportement ou minance de symptômes négatifs et de retrait une combinaison des trois. La personne qui social. Généralement, ces personnes ont leur en souffre présente des symptômes de dé- première relation sexuelle à un âge plus tresse important et elle est incapable de avancé et ont moins d’activités sexuelles fonctionner normalement pendant une que les gens de leur âge. Certaines n’ont jalongue période. Ces symptômes peuvent mais eu de rapports sexuels avec un(e) parêtre bénins ou graves, en fonction de la ma- tenaire. Par ailleurs les femmes qui sont touladie mentale, de l'individu, de sa famille et chées par la maladie à un âge plus avancé de l'environnement du patient. ont eu davantage d’expériences sexuelles avant la maladie. Lors des décompensations psychotiques des symptômes sexuels peuDiagnostic et tabou La personne atteinte a généralement eu vent survenir: délire amoureux ou relié à une vie avant le diagnostic, donc des rela- l’identité sexuelle, obsessions sexuelles, hytions intimes, et possiblement des relations persexualité, comportements sexuels inapsexuelles avec une autre personne. Mais propriés. Chez certaines personnes, la psyquand est-il après le diagnostic et le séjour à chose est plutôt associée à une diminution l’hôpital? Encore aujourd’hui certains psy- de l’intérêt pour la sexualité. chiatres et médecins ne posent aucune question sur l’intimité du patient et ils n’abor- Les personnes atteintes de schizophrénie dent pas toujours l’effet des médicaments pratiquent principalement la masturbation, sur la sexualité. Comme si cette réalité n’exis- car peu d’entre elles ont un(e) partenaire. tait pas. Pourtant nous sommes dans une so- Celles qui ont eu des rapports sexuels avant ciété très sexualisée et un torrent de mes- la maladie sont plus enclines à répéter l’exsages et de photos à teneur sexuelle appa- périence malgré des symptômes résiduels. 2 Le cœur à chœur - Printemps 2013 En ce sens, les femmes atteintes de schizophrénie rencontrent un partenaire, ont des relations sexuelles, cohabitent et ont des enfants plus souvent que les hommes atteints de schizophrénie. Les personnes atteintes d’un trouble de santé mentale sévère ont plus de risque de contracter une MTS, le virus du SIDA, de vivre des grossesses non désirées et des interruptions volontaires de grossesse. Une pauvreté du jugement, des connaissances limitées au sujet de la sexualité, un manque de contrôle des impulsions, de la difficulté à entrer en relation interpersonnelle et un taux élevé de consommation de drogue et d’alcool contribuent à l’éclosion de ces problèmes. tent des comportements sexuels impulsifs et dans certains cas, de la compulsion sexuelle. Comparativement à la population générale, elles ont plus de comportements homosexuels ou bisexuels et davantage d’attitudes érotiques. Elles ont aussi plus de préoccupations et d’insatisfactions liées à leur sexualité. Ces personnes utilisent souvent la sexualité pour compenser une faible estime de soi, pour acquérir un sentiment de pouvoir ou pour éviter la solitude et l’ennui. La relation sexuelle est une façon de « se combler » et de se sentir aimé. Les partenaires multiples et la prostitution sont des réalités fréquentes pour ces personnes. Les effets de certains médicaments La dépression La perte d’intérêt pour les activités sexuelles est un symptôme de la dépression rapporté par une grande majorité des personnes atteintes. Des troubles d’excitation et d’orgasme peuvent aussi survenir lors d’une dépression. La satisfaction sexuelle est généralement affectée par la diminution de la capacité à ressentir le plaisir, qui est en fait un symptôme de la maladie. D’autres éléments reliés à la dépression peuvent aussi affecter la sexualité, telles la diminution de l’estime de soi, la modification de l’image corporelle, la fatigue, les difficultés conjugales, etc. Dysfonction sexuelle L’effet des médicaments psychotropes sur la Trouble anxieux Comparativement à la population générale, sexualité est difficile à évaluer, car la dépresles personnes qui souffrent d’un trouble an- sion et la schizophrénie s’accompagnent xieux sont plus sujettes à présenter des fréquemment de dysfonctions sexuelles et troubles du désir, des troubles érectiles ou de ce, indépendamment des médicaments. On estime que la prévalence d’un trouble l’anorgasmie (absence d’orgasme). sexuel en schizophrénie est entre 50 % et 80% et de 25 % à 75 % concernant la perte Trouble obsessif-compulsif Les personnes qui présentent un trouble ob- de libido lors de la dépression. Généralesessif-compulsif sont également plus sujettes ment, les troubles sexuels incluent : la baisse à souffrir d’anorgasmie ou à vivre une cer- de désir sexuel, l’aversion sexuelle, les troubles érectiles et éjaculatoires, la séchetaine aversion pour la sexualité. resse vaginale, les troubles de l’orgasme et les relations sexuelles douloureuses. Trouble de personnalité limite Environ la moitié des personnes souffrant d’un trouble de personnalité limite présenLe cœur à chœur - Printemps 2013 (Suite page 4) 3 (Suite de la page 3) Impact de la pharmacologie Étant donné que le sujet est très vaste, nous ciblerons principalement les effets des antidépresseurs et des antipsychotiques. sexuelle. Des troubles du désir, de l’excitation et de l’orgasme sont rapportés avec la prise d’antidépresseur. Dans la classe des antidépresseurs qui inhibent la recapture de la sérotonine (ISRS), tous peuvent causer des dysfonctions Il est possible de résumer une relation sexuelles. La paroxétine (PaxilMD) causerait sexuelle en quatre stades : désir (libido), excile plus de problème érectile et retarderait tation, orgasme et résolution (satisfaction). l’éjaculation comparativement à la Les difficultés peuvent se vivre dans un stade fluoxétine (ProzacMD) et la sertraline ou dans plusieurs. Différents neurotransmet- (ZoloftMD), qui ont un effet moindre. L’escitalopram (CipralexMD) et la fluvoxamine teurs sont impliqués dans une relation sexuelle et ils sont les cibles des antipsycho- (LuvoxMD) semblent être les médicaments qui affecteraient le moins la fonction tiques et des antidépresseurs, d’où leur imsexuelle parmi les ISRS. pact sur la fonction sexuelle. Les plus importants neurotransmetteurs sont la dopamine Concernant la classe des inhibiteurs de la (effet sur la libido et la stimulation), l’acétyl- recapture de la sérotonine et de la noradrécholine (facilite l’érection), la norépinephrine naline (ISRN), la venlafaxine (EffexorMD) et la duloxétine (CymbaltaMD) peuvent retarder (effet sur la libido), l’oxyde nitrique (facilite l’érection), la prolactine (influence la libido, l’éjaculation, mais les troubles sexuels induits l’érection et l’orgasme) et la sérotonine (frein seraient moindres avec la duloxétine. Les antidépresseurs tricycliques (ATC) et les inhibisur le désir sexuel et le plaisir associé). teurs de la monoa-mine oxydase (IMAO) sont d’autres molécules à risque de causer Causes des dysfonctions des dysfonctions sexuelles. Outre la médication et la maladie psychiatrique qui sont des facteurs importants, Enfin, les antidépresseurs comme la mirtazad’autres médicaments ou situations peuvent pine (RemeronMD), le bupropion occasionner ce problème. De plus, la sexua- (WellbutrinMD) et la trazodone (DesyrelMD) entraînent beaucoup moins d’effets seconlité des patients peut aussi être influencée daires sexuels. Si vous avez des doutes, parpar des problèmes de contact social, un lez-en avec votre pharmacien ou votre mésentiment de persécution, des réactions ex- decin. trapyramidales, une prise de poids reliée à la médication, etc. Les antipsychotiques Les antidépresseurs Entre 4 % et 73 % des personnes qui prennent un antidépresseur vont développer une dysfonction sexuelle. On peut observer des différences selon l’agent pharmacologique choisi. Nous savons par exemple que les ISRS, une famille d’antidépresseur largement utilisée, affectent fréquemment la fonction 4 De 35 % à 45 % des patients sous antipsychotique présentent une dysfonction sexuelle. Les troubles les plus courants sont : la diminution ou l’absence de désir sexuel, les troubles érectiles chez les hommes, l’absence d’orgasme ou son retard et l’absence d’éjaculation chez l’homme. Les femmes présentent souvent de l’aménorrhée (absence de Le cœur à chœur - Printemps 2013 ser davantage de troubles érectiles et éjacumenstruations) et de la galactorrhée mais le latoires comparativement aux autres médicaments de 2e génération. Avec la quétiarapportent peu. pine (SeroquelMD), il y a entre 50 % et 60 % Plusieurs cas ont été mis en évidence par la de prévalence de dysfonctions sexuelles, mère qui, lors de la lessive, remarquait des mais la sévérité est moindre en comparaison taches sur le soutien-gorge. Les dysfonctions avec la rispéridone, l’olanzapine et l’halopésexuelles constituent l’effet indésirable le plus ridol. L’aripiprazole (AbilifyMD) ne semble pas être associé à des dysfonctions sexuelles. dérangeant pour les patients, mais peu d’entre eux vont le rapporter spontanément à leur médecin. Nous savons que certaines Interventions possibles Les dysfonctions sexuelles doivent être rappersonnes cessent leur traitement pharmaportées au médecin traitant qui pourra évacologique pour cette raison. luer si elles sont causées par la médication. Si tel est le cas, les alternatives de traitement Les antipsychotiques de 1re génération sont: diminuer la dose à un niveau qui percomme l’halopéridol (HaldolMD), la chlorpromazine (Largactil MD), la perphénazine mettra d’éliminer les effets indésirables sexuels tout en conservant une bonne maî(Trilafon MD) ou le zuclopenthixol (Clopixol MD) affectent le plus la fonction sexuelle en trise des symptômes de la maladie; changer raison de leur action au niveau de la prolac- le traitement pour une médication qui induit tine. L’augmentation de la prolactine peut peu ou pas d’effet indésirable sexuel; presinduire chez la femme l’aménorrhée/ crire une médication permettant de corriger galactorrhée ainsi qu’une diminution de la les troubles sexuels. Ces interventions doivent libido alors que chez l’homme, elle entraîne être faites sous la supervision du médecin une baisse du désir et parfois une impuistraitant. sance. Et si on en parlait… Du côté de la 2e génération, c’est la rispéridone (RisperdalMD) qui affecte le plus la fonction sexuelle, car elle peut causer une augmentation du niveau de prolactine. Les autres molécules de 2e génération sont moins à risque d’augmenter la prolactine, mais elles ne sont pas dénuées d’effets sur la fonction sexuelle. En effet, avec l’olanzapine (ZyprexaMD), plus de 50 % des patients ont rapporté une dysfonction sexuelle, une diminution de la libido et de l’impuissance, mais Malgré le malaise il est important d’aborder le sujet avec la personne concernée. Une ceci est moins important qu’avec la rispéridone et l’halopéridol. Concernant la cloza- sexualité saine est bonne pour la santé men(Suite page 6) pine (ClozarilMD), la molécule risque de cau(Suite de la page 4 Le cœur à chœur - Printemps 2013 5 (Suite de la page 5) tale de tout individu. Réussir à nouer des relations épanouissantes permet un meilleur équilibre. Une bonne façon de parler de sexualité est de rester simple et de tirer profit des évènements du quotidien pour engager le dialogue comme un film à la télé, la rencontre d’une belle femme dans la rue, un article dans le journal, un voisin homosexuel, etc. laisser l’espace pour grandir et connaître l’amour malgré la maladie et ses réalités. Chacun devra définir clairement ses frontières, ses valeurs et ses limites dans le respect. Prendre le temps pour des moments à deux permettra de faire le plein d’amour et de plaisir! Chaque changement impose de nouvelles données à regarder, le plus possible, ensemble. Au besoin, une consultation avec un professionnel pourrait vous aider pour retrouver une vie intime et sexuelle satisfaisante. En tant que conjoint, il peut être précieux d’ouvrir le dialogue pour maintenir l’intimité et trouver un rythme qui convient aux deux. Parler ouvertement et calmement de vos besoins et de vos limites. L’humour est souvent Line Lambert un bon moyen pour alléger la discussion tout comme le jeu. Bibliographie Mélanie Couette et Julie Charbonneau, pharmaÊtre parent et accompagner une personne ciennes, Médicaments, sexe et rock and roll, Pharm Accro, Volume 1, numéro 3, juin 2012 atteinte de maladie mentale demande beaucoup de souplesse et il est fréquent que la sexualité du couple vacille sous le poids des préoccupations, de l’inquiétude, de la peine, des responsabilités, des différences d’opinion, etc. Pottier Bernard, Sexualité et santé mentale : le choc des tabous, Mentalité, volume 4, numéro 2, 2011. Drolet Marie-Eve, Vivre sa sexualité à travers sa maladie mentale, Revue Alpabem, novembre 2012. Proulx Isabelle, Sexologue clinicienne, Maladie men- HUMOUR Être parent et vivre avec son enfant adulte tale et sexualité : double tabou, atelier présenté lors demande aussi beaucoup d’ingéniosité pour du colloque de la FFAPAMM, juin 2002 et repris par ouvrir sur le sujet et trouver une façon de lui Entre nous en Estrie, janvier 2009. 6 Le cœur à chœur - Printemps 2013 TÉMOIGNAGE Itinérance et maladie mentale Un sursaut d’humanité : mon vœu le plus sincère pour 2013 Les malades mentaux sont tellement maganés, tellement malades? Tellement abandonnés, voilà le vrai problème. Le devoir, 9 janvier 2013 On a posé une chape de plomb sur la ques- de Rimouski et qu’une autorité judiciaire tion du traitement de la maladie mentale et quelconque a décidé de renvoyer, manu fait comme si ces dizaines de milliers de vies militari ou presque, chez ses parents il y a sacrifiées n’existaient pas. trois mois. Pourtant Dieu sait que sa famille a tout fait depuis 24 ans d’abord pour préve- Il y a de cela une éternité… en fait c’était le nir la progression de sa maladie et ensuite 24 décembre dernier (!), Le Devoir titrait à la pour lui assurer des soins adéquats. Peine une que les itinérants d’aujourd’hui sont tel- perdue, notre système de soins en santé lement « malades », tellement maganés mentale, bien à l’abri derrière les murs des qu’une réinsertion sociale est exclue dans ailes psychiatriques de nos hôpitaux, a joué bien des cas. Une telle affirmation du direc- de toutes les astuces pour se dérober à ses teur du journal de rue L’itinéraire à Montréal obligations professionnelles et littéralement n’allume-t-elle pas une lumière dans votre l’abandonner, lui et tant d’autres grands esprit? En vertu du régime de soins de santé malades. L’article de Mme Isabelle Porter universel et gratuit du Québec, tout le (que l’on peut lire à ledevoir.com) le dé- monde n’a-t-il pas le droit d’être soigné montre une fois de plus, le système actuel adéquatement ? Que se passe-t-il pour les condamne trop souvent à la rue ou les qu’un nombre croissant de citoyens québé- renvoie à la charge de leurs familles. cois, jeunes très souvent, atteints d’un Exemple patent d’une médecine à deux trouble mental persistant, voient leur avenir vitesses, déshumanisée et sournoisement pri- spolié et soient forcés de vivre dans la rue, la vatisée. misère, la violence et la toxicomanie ? Estce vraiment cela que les Québécois et les Les propos de M. Lareault n’avaient rien de Québécoises veulent en 2013 ? léger ou d’irréfléchi, lui et ses partenaires s’investissent corps et âme depuis une ving- Ce texte témoigne de l’itinéraire tragique taine d’années à reconstruire des centaines d’une de ces personnes : il s’agit malheu- d’hommes et de femmes jetés à la rue. Mal- reusement de mon fils de 39 ans, schizo- heureusement, a-t-il expliqué, leur tâche est phrène, qui a partagé le sort des sans-abri de plus en plus lourde et ardue. Au point Le cœur à chœur - Printemps 2013 7 (Suite de la page 7) Une vie bousillée et quel avenir ? qu’il s’interroge sur la valeur des prix d’ex- Quelques dates et faits pour illustrer son cellence que le ministère de la Santé et des parcours : 1974, nous adoptons des ju- Services sociaux leur a remis en 2004 et meaux, un garçon et une fille, à leur nais- 2012. Comment se fait-il que cette entre- sance ; 1989, première psychose de la fille vue n’ait encore suscité aucune réaction et hospitalisation de trois mois à Montréal ; publique d’un décideur ou d’un interve- 1990, son jumeau est vu par une psychiatre nant en autorité ? Le texte du Devoir s’est de l’hôpital Notre-Dame par précaution ; pourtant retrouvé dans toutes les revues de 1991-1992, apeuré par la maladie de sa presse gouvernementales et sur les bureaux sœur, il décroche et alterne sans succès de la première ministre et de son ministre entre petits boulots et retours à l’école, de la Santé, non ? Il y a une réponse : la frôle souvent la psychose ; 1993, il suit ses maladie mentale est une affaire classée au parents et sa sœur en Gaspésie ; souvent Québec depuis 1980. La mise au rancart du désorganisé, il est vu en psychiatrie, mais beau projet de désaliénation des ministres n’est pas hospitalisé ; 1995-2002, il démé- Laurin, Lazure et autres du cabinet Lé- nage à Rimouski où les manifestations psy- vesque a entraîné des économies si astro- chotiques se poursuivent en crescendo, au nomiques que l’on a posé une chape de point de forcer un internement plombé plomb sur cette question du traitement de d’un diagnostic de schizophrénie para- la maladie mentale et fait comme si ces noïde. Il a alors 28 ans ; 2002-2006, psy- dizaines de milliers de vies sacrifiées n’exis- choses à répétition, hospitalisations, inter- taient pas. C’est pourtant une véritable ventions policières et judiciaires, erreurs honte, comme le rappelait Mme Lise techniques diverses, soit à Rimouski, soit en Payette dans sa chronique du 4 janvier. Gaspésie, où il se réfugie très souvent lors- Vraiment, est-ce cela que les Québécois et que la crise s’annonce ; 2007, de moins en les Québécoises du printemps érable veu- moins capable d’autonomie, il passe l’an- lent en 2013 ? née avec nous et la termine par une tentative de suicide ; hospitalisation plus longue Vous comprendrez qu’à titre de parent de et prescription d’un séjour de six mois dans deux enfants malades, je suis de ceux qui une ressource intermédiaire supervisée. La souhaitent un véritable réveil des cons- psychiatre accepte de ne pas lui imposer ciences, un sursaut d’humanité, de com- un régime médicamenteux obligatoire « passion et de solidarité de la part de tous parce qu’il ne le veut pas », tout comme les Québécois et au premier chef de leurs elle l’autorise à quitter la ressource intermé- dirigeants politiques. Je ne puis formuler de diaire après trois mois « parce qu’il le de- vœu plus sincère pour 2013. mande ». Retour à Rimouski où, laissé à lui(Suite page 9) 8 Le cœur à chœur - Printemps 2013 (Suite de la page 8) cadrer en 24 ans d’efforts soutenus de la même (sauf le soutien d’urgence de ses part de sa famille, va-t-il l’intégrer mainte- parents) et sans médicaments, il s’enfonce nant ? Notre système de soins en santé graduellement dans la toxicomanie (jeu et mentale étant malade, il engendre injus- alcool), le vagabondage et la criminalité tice, inhumanité, détresse, itinérance et cri- de survie. L’aide sociale en profite pour minalité. Cessons de nous fermer les yeux amputer son chèque de montants élevés et réformons-le, le Québec en est capable et lui plaque une dette de près de et notre peuple n’en sera que plus grand. 14 000 $. 2012, cumul d’interventions judiciaires, emprisonnement de six mois et im- Tellement maganés, tellement malades, position d’une probation jusqu’en avril tellement abandonnés… ça vous dit 2013 avec quelques causes pendantes en quelque chose de concret dorénavant ? prime. *** Et dans quel état le retrouvons-nous début Jean Forest - New Richmond octobre ? Un être traqué, totalement désorganisé, très nerveux, bourré de tics et de manies, alcoolique, décroché de la réalité, en proie à des voix fortes, mais qui ne semblent pas malignes, fumeur invétéré vivant de nuit, lugubre et peu communicatif. Aucune ressource ne peut intervenir, car il ne possède pas de dossier actif ici. Seule l’Aide juridique, qui a répondu avec beaucoup de compréhension à l’appel des parents, peut agir, mais au rythme imposé par le système judiciaire évidemment, soit en février prochain… peut-être. Trois mois plus tard, mon fils reste dans le L’équipe et les membres du conseil d’administration souhaitent à tous une Joyeuse Pâques! déni de sa maladie et sa capacité à toute forme d’autonomie personnelle demeure amoindrie malgré les petits gestes réconfortants qu’il peut poser. Un baume sur un quotidien très difficile à vivre pour son entourage, mais une question terriblement Veuillez noter que nos bureaux seront fermés en raison du congé de Pâques le vendredi 29 mars et le lundi 1 avril. En cas d’urgence, veuillez communiquer avec le Centre de crise au 450 699-5935 ou au 1 866 277-3553. douloureuse nous déchire le coeur : comment ce système, inapte à l’aider et à l’enLe cœur à chœur - Printemps 2013 9 AGA 2013 Assemblée générale Participer à l’assemblée générale annuelle (AGA) c’est une contribution essentielle pour maintenir une association vivante. Sans ses membres L’Accolade n’a pas de raison d’exister car l’organisme est né pour répondre à vos besoins. Son rôle est de créer un lieu d’appartenance et de partage accessible à tous. Nous vous attendons en grand nombre pour un souper entre amis et une soirée dynamique où nous présenterons un bilan des services et des dépenses pour l’année 2013. Nous en profiterons pour rendre hommage à notre bénévole de l’année et à nos membres du conseil d’administration. Venez joindre votre voix à la nôtre pour vous exprimer et influencer l’avenir de l’organisme. Nous vous attendons en grand nombre. Date : 18 juin 2013 à 18 h Endroit : Maison Le Pailleur au 54, boulevard Salaberry Sud, Châteauguay Réservation : 450 699-7059 Sans frais : 1 866 699-7059 Début 10 3 avril 201 LÂCHER-PRISE Lâcher prise est un des grands défis de la vie et il est parfois difficile de savoir comment y arriver. Voici trois ateliers pour vous aider à lâcher prise. ■ Atelier 1 : Lâcher prise : définitions, freins et cycle de résignation. ■ Atelier 2 : Le changement : enjeux, zone de pouvoir et zone de confort. ■ Atelier 3 : Vers mon objectif : caractéristiques et trousse d’urgence. Déroulement des rencontres : Les trois rencontres auront lieu à toutes les deux semaines, les mercredis, de 18 h 30 à 21 h. Date : 10 avril, 24 avril et 8 mai. Endroit : 127, boul. St-Jean-Baptiste, 2ième étage, Châteauguay. Réservation : 450 699-7059 Sans frais : 1 866 699-7059 Inscription : Limitée à 10 participants et 10 $ pour le matériel pédagogique 10 Le cœur à chœur - Printemps 2013 Le but de ce programme de six rencontres est de vous outiller afin de mieux comprendre et utiliser les techniques d’affirmation de soi et de communication, avec un souci particulier d’être en meilleure harmonie avec votre proche atteint. Début 1 4 mars L’atelier vous permettra de : ■ Développer vos connaissances sur les techniques de communication. ■ Susciter votre réflexion afin d’identifier quel type de communicateur vous êtes. ■ Amener des changements dans votre style de communication. Déroulement des rencontres : Les six rencontres auront lieu à toutes les deux semaines, les jeudis, de 18 h 30 à 20 h 30. Endroit : 127, boul. St-Jean-Baptiste, 2ième étage, Châteauguay. Réservation : 450 699-7059 Sans frais : 1 866 699-7059 Inscription : Limitée à 10 participants et 10 $ pour le matériel pédagogique. L’affirmation de soi, c’est un comportement qui permet à une personne d’agir au mieux de son intérêt, de défendre son point de vue sans anxiété exagérée, d’exprimer avec sincérité et aisance ses sentiments et d’exercer ses droits sans dénier ceux des autres. Réf : Alberti et Emmons, 1974 Composer avec le Trouble de personnalité limite (TPL) Objectifs visés Début 1 8 mars Développer vos connaissances sur la problématique du trouble de la personnalité limite. Comprendre le trouble de la personnalité limite (TPL) ainsi que sa dynamique relationnelle. Susciter la réflexion sur la relation que vous avez avec une personne souf- Déroulement des rencontres : Dix rencontres hebdomadaires consécutives , les lundis, de 18 h 30 à 21 h , comprenant un contenu théorique et des exercices pratiques, le tout enrichi par des échanges avec les participants (es). Endroit : 127, boul. St-Jean-Baptiste, 2ième étage, Châteauguay. Réservation : 450 699-7059 Sans frais : 1 866 699-7059 Inscription : Limitée à 10 participants et 20 $ pour le matériel pédagogique. Le cœur à chœur - Printemps 2013 11 24 mars 2013 Déjeuner-conférence Retour de Carole Miville pour rire un peu Gérer ses émotions sans devenir fou « Les émotions qui ne s’expriment pas s’impriment à l’intérieur et font des ravages » Gérer ses émotions est l’une des habiletés les plus difficiles à acquérir et pourtant il existe des façons simples et accessibles à tous de le faire. Cette conférence vous permettra d’apprivoiser vos émotions avec beaucoup d’humour et découvrir des outils de prévention afin de provoquer plus d’émotions positives que négatives dans votre vie. Quand : Dimanche, le 24 mars 2013, déjeuner à 9 h, conférence de 10 h à 12 h. Endroit : Restaurant Nobel, 252, boul. St-Jean-Baptiste, Châteauguay. Coûts : Gratuit pour les membres et 10 $ pour les non-membres. Santé mentale au 450 6997059 ou sans frais au 1 866 699-7059. Pour vous inscrire, veuillez communiquer au 450 699-7059 ou sans frais au 1 866 699-7059. 17 avril 2013 Un tour d’horizon sur l’aide sociale et la maladie mentale La loi concernant l’aide sociale a beaucoup changé depuis quelques années. Malgré ces changements, l’exclusion sociale et la pauvreté sont trop souvent le lot des gens souffrant de maladie mentale. Qu’est-ce qui fait qu’un individu peut recevoir du soutien de la part de l’État? À combien se chiffre exactement cette aide? La personne peut-elle ou non travailler un peu? Et si elle vit chez ses parents? Peut-elle ou non se faire déclarer inapte à vie ou temporairement avec sa maladie? Quelles sont les conséquences? Madame Gervais, de l’organisme RIAPAS (défenses des droits) répondra à toutes ces questions ainsi qu’aux vôtres. Quand : Mercredi, le 20 février 2013 à 19 h. Endroit : Clinique externe en santé mentale, 26 rue St-Pierre, St-Constant, au sous-sol. Coûts : Gratuit pour les membres et 10 $ pour les non-membres. Pour vous inscrire, veuillez communiquer au 450 699-7059 ou sans frais au 1 866 699-7059. 12 Le cœur à chœur - Printemps 2013 Groupe de partage à Saint-Constant Partager, Accepter, Comprendre L’entraide, c’est une aide naturelle que des personnes se donnent lorsqu’ils vivent des moments difficiles à surmonter. C’est l’action de s’aider les uns les autres, c’est choisir de partager ses expériences et apprendre de nos pairs. Grâce à l’entraide on peut trouver ses propres solutions. Un moyen efficace et enrichissant de régler des difficultés. Venez participer au groupe de partage, un endroit où l’acceptation, la compréhension et l’échange avec les autres sont à l’agenda. Les rencontres auront lieu de 19 h à 21 h, à la Clinique externe de santé mentale à StConstant au 26 rue St-Pierre Ouvert à tous ceux qui ont un proche atteint d’une maladie mentale et animé par une intervenante de L’Accolade. Entrée libre, l’inscription n’est pas nécessaire. Date des prochaines rencontres : 28 mars, 25 avril, 30 mai et 27 juin 2013 Relâche en juillet et août Groupe d’entraide thématique à Châteauguay, toutes problématiques de santé mentale Mardi, le 12 mars 2013 : Le deuil, pas seulement lors d’un décès. Mardi, le 9 avril 2013 : Sa sécurité et ma liberté. Mardi, le 14 mai 2013 : La culpabilité : Saine ou malsaine? Mardi, le 11 juin 2013 : Écouter : Sortir du dialogue de sourd. Juillet 2013 : Relâche– Il n’y aura pas de rencontre Mardi, le 13 août 2013 : Sujet surprise! Les rencontres ont toujours lieu le 2ième mardi du mois, de 19 h 30 à 21 h 30. Un dépliant informatif sur le contenu de la rencontre est remis aux participants. Elles sont animées par Carole, membre de notre organisme. Endroit : L’Accolade Santé mentale Entrée libre. Il n’est pas nécessaire de s’inscrire. Le cœur à chœur - Printemps 2013 13 Livres, vidéocassettes, audiocassettes, dépliants à votre disposition. Voici quelques unes de nos nouvelles acquisitions. Votre cerveau n’a pas fini de vous étonner Boris Cyrulnik On savait que le cerveau était l’entité la plus complexe de l’univers connu. Mais les nouvelles découvertes démontrent que ses possibilités sont bien plus étonnantes qu’on ne le croyait. Non seulement il est totalement élastique—même âgé, handicapé, voire amputé, il peut se reconstruire, apprendre, inventer -, mais aussi totalement social—un cerveau n’existe qu’en résonnance avec d’autres: nous sommes neuronalement constitués pour entrer en empathie. La combinaison de ces deux facultés permet de supposer que l’Homo sapiens peut évoluer en changeant lui-même sa structure. Nous avons le pouvoir d’influer sur l’évolution de notre propre cerveau—encore faut-il savoir comment il fonctionne. Patrice Van Eersel est rédacteur en chef du magazine Clés, aborde ces questions avec cinq spécialistes, tous médecins et chercheurs.. Privé de soins Alain Vadeboncoeur On entend souvent que malgré notre bonne volonté, nous n’avons plus les moyens de faire fonctionner notre système de santé public. Il coûte trop cher. Mais pour le Dr Vadeboncoeur, c’est un préjugé qui résulte d’une équation mal posée : si notre priorité est effectivement de soigner le mieux possible l’ensemble de la population, le système public est le plus efficace et le moins coûteux. À ce compte, nous n’avons pas les moyens de nous en priver. Comment être heureux et le rester Sonja Lyubomirski Augmenter votre bonheur de 40 % , C’est possible! Ces 40 % sont la part de bonheur qu’il est en votre pouvoir de changer, quels que soient votre héritage génétique et les circonstances de votre vie. Tout d’abord, déterminez où vous en êtes en effectuant les tests que vous propose l’auteur. Vous saurez d’où vous partez. Puis faites le test d’auto-évaluation qui vous permettra de sélectionner, parmi douze stratégies gagnantes, celles qui sont les plus adaptées à votre tempérament et à vos valeurs. Ce livre vous aidera à trouver la cadence qui est la votre, à varier vos activités, à produire des efforts continus. Ainsi , vous échapperez à ;a routine et au découragement. Vous éviterez même de vous habituer au bonheur, comme on s’habitue à toute chose... Sonja Lyubomirsky est professeur à l’université de Californie où elle dirige le laboratoire de psychologie positive.. Rebondir DR Daniel Dufour Une approche créative pour surmonter les obstacles Séparation, perte d’emploi, maladie, un jour ou l’autre, nous sommes tous confrontés aux difficultés de la vie. Pourtant, quelle que soit notre situation, nous disposons de toutes les ressources nécessaires pour rebondir. C’est ce que nous révèle Daniel Dufour qui croit en la capacité de chacun à se battre pour soi-même afin de surmonter les obstacles. Se centres sur soi, reconÀ mesure qu’il propose des solutions concrètes aux naître, ressentir et exprimer ses émotions, s’enraciner défis posés par le maintien du régime public de soins, dans son noyau fondamental et son savoir inné : Aucet essai taille en pièce les mythes véhiculés par les tant d’étapes sur le chemin de la guérison. promoteurs du privé : l’exploration des coûts de la santé, la supériorité du modèle PPP, l’efficacité du Ce retour à soi fait de chacun de nous un créateur de sa vie plutôt qu’une victime du destin. privé, etc. Dr Alain Vadeboncoeur est président des Médecins québé- Dr Daniel Dufour est médecin depuis 1979. Il pratique une cois pour le régime public et chef du service d’urgence de médecine globale dans laquelle les causes de la maladie sont traitées autant que les symptômes. l’institut de cardiologie de Montréal 14 Le cœur à chœur - Printemps 2013 Noël à L’Accolade... Le cœur à chœur - Printemps 2013 15