texte de l`intervention

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texte de l`intervention
ADAPTATION DE L’EVALUATION DES CAPACITES EXPERIMENTALES
POUR LES ELEVES EN SITUATION DE HANDICAP
Qu’est-ce que l’ECE ?
Une grande partie de l’horaire d’enseignement en PC et SVT se fait sous forme de TP (travaux
pratiques) et met en jeu des capacités qui ne sont évaluées au baccalauréat que depuis 2004 (PC) et
2005 (SVT).
L’épreuve d’ECE :
ƒ constitue une partie de l’épreuve de physique – chimie et de celle de sciences de la vie et de
la Terre au bac S,
ƒ compte pour 4 points sur les 20,
ƒ est organisée dans l’établissement au 3eme trimestre,
ƒ évalue les capacités mises en œuvre pendant les TP (raisonnement – communication –
maîtrise de techniques).
L’organisation au sein du lycée permet la souplesse, mais exige également un pilotage et un
encadrement précis.
Comment se présente un sujet ?
En SVT comme en SPC, chaque sujet conduit l’élève à raisonner dans le cadre d’une situation
pratique pour résoudre une question scientifique, à mettre en œuvre un protocole expérimental et à
utiliser des moyens de communication adaptés aux sciences expérimentales (tableaux, graphes,
dessins, schémas, traitement d’images ou/et de données numériques…).
Un exemple de sujet en SVT : « La photosynthèse dans une tige ».
Dans ce sujet, le candidat doit :
- raisonner sur la situation proposée (la photosynthèse se fait habituellement dans les feuilles ;
comment la repérer dans une tige chlorophyllienne ?)
- Effectuer des gestes techniques (coupe fine dans une tige, réalisation et observation d’une
préparation microscopique)
- Mettre en œuvre des moyens de communication (ici, numérisation et traitement d’image
remplaçant le traditionnel dessin d’observation).
L’épreuve d’ECE, en SVT et en SPC, met en jeu différents types d’activités selon les sujets
concernés :
- mise en œuvre d’une manipulation selon un protocole,
- observations (utilisations d’appareils numériques en SPC, de microscope ou de loupe
binoculaire en SVT),
- utilisation d’appareils de mesure et de banques de données numériques.
Comment prendre en compte la situation de handicap ?
La prise en compte de la situation de handicap constitue une priorité : il s’agit de permettre au
maximum de candidats de passer l’épreuve. Elle est limitée par la nécessité de ne pas dénaturer
l’évaluation (il est hors de question de limiter celle-ci aux questions de connaissances, évaluées par
ailleurs : on veut pouvoir évaluer des capacités expérimentales, notamment un geste technique).
En-dehors de la dispense d’épreuve, prévue par les textes, il existe de multiples possibilités
d’adaptation tenant compte de différentes situations de handicap.
Le cadre réglementaire prévoir la possibilité d’un temps supplémentaire (souvent appelé « tiers
temps »), de la présence d’un assistant (qui pose bien entendu le problème de son rôle dans cette
épreuve particulière). La souplesse recommandée par les IA-IPR aux équipes de professeurs joue
également sur l’adaptation :
ƒ du tirage au sort (choix restreint de sujets),
ƒ du sujet lui-même (ex. : format des documents),
ƒ du poste de travail.
Les données de la session 2008
Une enquête systématique, à l’occasion du bilan annuel de l’épreuve, a permis au groupe SVT de
l’inspection générale de recenser les situations, les difficultés rencontrées et les solutions mises en
œuvre. Une autre enquête, menée à l’initiative du groupe de SPCFA de l’inspection générale et
relayée par les IA-IPR de SPC et les IEN de Mathématiques-Sciences Physiques auprès des centres
d’examens d’ECE et de TP des Baccalauréats professionnels, aboutit aux mêmes constatations. Les
cas signalés sont de l’ordre d’un candidat sur 1000 (la fréquence réelle est nettement plus
importante)
Outre quelques cas de handicaps moteurs lourds (qui conduisent en général à des dispenses
d’épreuves), les situations de « handicap » signalées touchent la motricité (notamment la motricité fine
des membres supérieurs), la vision (malvoyance, mais aussi daltonisme), des cas de dyslexies (assez
nombreux) et de trisomies 21 légères, des allergies, des sensibilités particulières (risques de malaise
à la vue du sang, ou lors de la réalisation de dissections…), des situations de handicap temporaires
(bras ou poignet cassés)…
Les solutions mises en œuvre sont souvent d’ordre réglementaire classique (temps supplémentaire,
assistant). D’autres conduisent à adapter le cadre soigneusement prévu par les textes, en
aménageant pour le tirage au sort un choix restreint adapté à la situation (évitement des sujets
comportant des traitements vidéo, de l’optique ou des indicateurs colorés en cas de daltonisme ; de
ceux exigeant une habileté manuelle dans les cas de handicaps moteurs…), en remaniant le format
de certains documents du sujet (format A3 pour malvoyants,…), en adaptant le poste de travail
(hauteur du plan de travail). Il est à signaler que, dans certains cas limités, le barème de notation a été
adapté.
Une académie décrit un cas particulier qui permet de souligner ce qui pourrait être mis en œuvre en
amont de l’épreuve. Le handicap est dû à une agénésie de la main gauche (absence de doigts) :
l’élève peut utiliser sa main pour appuyer sur un objet, mais pas pour tenir un objet. L’équipe
enseignante a pris contact avec l’ergothérapeute de l’élève dès la classe de première. Une séance de
présentation générale des manipulations potentiellement problématiques a été organisée. Les
enseignants et l’ergothérapeute ont alors conçu un « pack handicap » de manipulation, disponible à
tout moment pour cet élève. Ce dernier a pu passer l’épreuve d’évaluation des capacités
expérimentales comme les autres, avec la même adaptation du poste que pendant l’année, en
bénéficiant d’un tiers temps. L’anticipation dès la classe de première lui a permis de se familiariser
avec le dispositif conçu pour son cas particulier.
Le cas des assistants mérite un peu d’attention. Dans certaines académies, on signale le cas
d’assistants manipulant à la place des candidats. Qu’évalue-t-on et qui évalue-t-on dans ce cas ?
Faut-il considérer, comme l’estiment des équipes pédagogiques, qu’il est inutile alors de faire passer
cette épreuve, qui se réduit à la résolution d’un exercice virtuel et qui perd sa raison d’être ? D’autant
que cet avis n’est pas partagé par ceux qui signalent que c’est selon les indications de l’élève que
l’agent de laboratoire ou l’assistant manipulent...
Par ailleurs, faut-il aller jusqu’à adapter l’épreuve pour des élèves déclarant une sensibilité particulière
à la vue du sang, à la pratique d’une dissection… ? (Certains médecins de famille ont délivré des
certificats d’inaptitude à la dissection… des cas ont été soumis au Conseil de l’Ordre). Plus largement,
qu’est-ce exactement qu’une situation de handicap ?
Conclusions provisoires
L’organisation de l’ECE au sein de chaque lycée, le pilotage étroit par les IA-IPR, le cadrage national
ont permis une grande souplesse pour adapter l’épreuve au plus grand nombre possible de cas
particuliers. L’ECE constitue donc un contexte privilégié pour réfléchir à l’adaptation des épreuves.
Pour les candidats en situation de handicap il ne s’agit nullement de travestir l’épreuve au point de
dénaturer les capacités évaluées, il faut une juste appréciation des compétences qu’ils peuvent mettre
en œuvre dans ce cadre. Il est donc nécessaire de définir de façon plus précise les limites de
l’adaptation de cette épreuve, en conservant les exigences qui la fondent. Compte tenu de la
lourdeur de l’organisation, il convient également, pour la pérennité, de se garder du militantisme et de
rester dans les limites de la faisabilité matérielle. Le simple respect des textes (dispense, tiers temps,
assistant…) doit s’accompagner d’une meilleure connaissance de l’épreuve par ceux qui mettent
ces instructions en pratique, notamment les médecins scolaires (les IA-IPR ont un rôle-clé à jouer
dans cette information).
Faut-il encadrer les pratiques par un arsenal réglementaire plus précis ? Définir par des bornes fixes
la situation de handicap ? Le terrain attend des directives claires, mais le risque est de figer par les
textes une réponse qui doit pouvoir conserver souplesse et initiative.
Qu’ils aient été ou non confrontés à ce problème, les professeurs souhaitent avoir des informations
sur les dispositions qui peuvent être prises en fonction des handicaps rencontrés. Il est cependant
largement partagé que l’adaptation doit conçue au cas par cas, dans le respect de l’élève, en tâchant
de valoriser au mieux les compétences dont il fait preuve malgré le handicap. Hormis pour les
handicaps lourds, les enseignants estiment qu’il est possible de trouver des sujets adaptés aux
différents handicaps rencontrés parmi l’ensemble de ceux qui sont proposés.
Certains proposent le recensement, en début d’année scolaire et au plan national, des candidats en
situation de handicap, de façon à adapter certains des sujets qui pourraient être proposés à leur
situation spécifique. Cela permettrait l’enrichissement progressif d’une banque de sujets adaptés à
partir de situations déjà rencontrées.
Enfin, certains établissements soulignent que le problème de l’adaptation des activités pratiques
se pose tout au long de l’année, et pas seulement au moment de l’examen. La prise en compte
du handicap dès le début de la scolarité au lycée est un facteur d’efficacité pour la compensation
nécessaire. Dans ce cadre, il est en particulier nécessaire de prévoir l’accessibilité des laboratoires,
d’utiliser les moyens donnés par l’expérimentation assistée par ordinateur, ainsi qu’une paillasse au
moins permettant l’utilisation d’un fauteuil roulant en toute sécurité.
Compléments sur les TP de Sciences Physiques et Chimiques des bacs pros pour l’ASH
Les baccalauréats professionnels comportent une épreuve terminale de travaux pratiques de
Sciences Physiques et Chimiques. Les compétences évaluées sont sensiblement les mêmes que
celles qui le sont dans l’épreuve d’évaluation des capacités expérimentales des baccalauréats
généraux. A ceci près que cette épreuve « pèse » pour 75% de la note finale de SPC, soit 15 points
sur 20 (alors que l’épreuve d’ECE ne représente que 20% de la note de SVT ou SPC du bac). C’est
dire s’il est important de permettre aux élèves porteurs d’un handicap de la passer dans de bonnes
conditions.
Les difficultés et les solutions rencontrées sont sensiblement les mêmes que celles qui ont été
exposées pour l’ECE : nécessité d’adapter les postes de travail (paillasses trop hautes en chimie ou
trop basses en physique pour les élèves en fauteuils roulants), adaptation des documents ou mise à
disposition de moyens informatiques adaptés (mal voyants), assistants pour manipuler (avec les
mêmes questions sur ce qui est évalué), choix orienté de sujets, « kit » de manipulation adapté au
handicap et mis au point au cours de la formation, tiers temps.
Les demandes des enseignants recoupent également celles évoquées pour l’ECE, à signaler en
particulier :
- éviter certains champs de TP pour que l'élève puisse réaliser le TP dans les meilleures conditions
possibles (par exemple pas de chimie pour un élève en fauteuil) ;
- adapter les locaux, les paillasses et le matériel ;
- utiliser l'EXAO (expérience assistée par ordinateur) pour répondre à de nombreuses difficultés liées
au handicap (expression et prise de parole, manipulation, vision, …) ;
- connaître à l’avance la nature des handicaps des candidats et avoir une personne référente capable
d’informer sur les textes officiels et d’orienter vers les mesures à prendre ;
- développer la formation des enseignants pour répondre aux situations de handicap (un enseignant
titulaire du 2CA-SH par établissement).
Jean-Louis Michard et Daniel Assouline,
Groupes des Sciences de la Vie et de la Terre et de Sciences Physiques et Chimiques de l’Inspection
Générale de l’Education Nationale.