La pauvreté en Belgique
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La pauvreté en Belgique
DIRECTION GÉNÉRALE STATISTIQUE ET INFORMATION ÉCONOMIQUE COMMUNIQUÉ DE PRESSE 17 octobre 2008 La pauvreté en Belgique • A l’occasion de la ‘Journée Mondiale du Refus de la Misère’ du 17 octobre, la Direction générale Statistique et Information économique du SPF Economie a dressé le profil de la population vivant dans la pauvreté. En Belgique, 1 personne sur 7 est considérée comme pauvre (14,7%). Il s’agit de personnes isolées dont les revenus disponibles mensuels nets sont inférieurs à € 860 et de ménages (2 adultes et 2 enfants) dont les revenus disponibles mensuels nets sont inférieurs à € 1.805. • Certains profils sociaux présentent un risque accru de pauvreté: les inactifs (notamment les chômeurs et les retraités), les personnes seules et les parents de familles monoparentales en particulier, les locataires bien que la moitié des pauvres soient propriétaires d’un logement. • Les pauvres sont, dans de nombreux domaines, bien plus exposés à l’isolement social. • La situation des personnes vivant sous le seuil de pauvreté est systématiquement plus précaire, tant en ce qui concerne les biens de consommation que la qualité de l’habitation et la participation sociale. -1- Mesurer c’est savoir A la lumière des récents événements, la pauvreté et son éradication sont des thèmes plus que jamais d’actualité. Pour lutter efficacement contre la pauvreté, il faut d’abord la mesurer. C’est la logique appliquée par les dirigeants européens lorsque, sous la présidence belge, lors du sommet de Laeken, ils ont lancé l’idée de l’enquête EU-SILC. EU-SILC (‘European Union Statistics on Income and Living conditions’) est une enquête annuelle sur les revenus et les conditions de vie. Cette enquête constitue de loin le principal outil de mesure de la pauvreté et de l’exclusion sociale, tant au niveau belge qu’européen. Elle est la source des chiffres annuels de la pauvreté et nous donne aussi une image des conditions de vie au sens large des ménages interrogés, notamment en termes d’emploi, d’instruction, de santé et de bien-être. Sur base de l’enquête, nous pouvons mesurer non seulement les implications monétaires de la pauvreté mais aussi son impact sur certains aspects du mode de vie. En Belgique, l’enquête EU-SILC est organisée par la Direction générale Statistique et Information économique (anciennement I.N.S.) du SPF Économie, P.M.E, Classes moyennes et Énergie. Chaque année, environ 6.000 ménages (11.000 personnes) sont interrogés et suivis pendant maximum quatre années consécutives. Les chiffres les plus récents, en Belgique comme au niveau européen, datent de 2006 et portent sur les revenus annuels de 2005, donc bien avant la crise actuelle. Ces chiffres n’en sont pas moins importants pour autant et ce pour deux raisons : d’une part, nous identifions les groupes sociaux exposés à la pauvreté ; d’autre part, ces chiffres constituent un point de comparaison pour le futur et pour mesurer l’impact de la crise actuelle. Des chiffres plus récents seront disponibles, en principe, début de l’année prochaine. Seuil de pauvreté et risque Le seuil de pauvreté est un montant de référence. Une personne est considérée comme pauvre si son revenu net disponible est inférieur à ce montant de référence. Tous les pays membres de l’union utilisent la même méthode de calcul pour parvenir à ce montant. La méthode de calcul est assez technique et le montant varie par exemple selon la taille du ménage. Vous trouverez davantage d’informations sur le calcul du seuil de pauvreté dans l’annexe technique. Pour 2006, le seuil de pauvreté s’élevait à € 10.316,44 par an soit € 860 par mois pour une personne isolée et à € 21.664,52 par an soit € 1.805 par mois pour un ménage composé de deux adultes et deux enfants. En Belgique, le risque global de pauvreté, à savoir le pourcentage de personnes qui se trouvent sous ces seuils, s’élève à environ 15% (14,7% pour être précis). Il est stable par rapport à 2005 (14,8%) et en légère hausse par rapport à 2004 (14,3%). Un des grands objectifs poursuivis par l’enquête SILC est de vérifier dans quelle mesure ce pourcentage varie dans les différents groupes sociaux et identifier ainsi les groupes particulièrement exposés à la pauvreté. Les locataires, par exemple, courent plus de risques que les propriétaires. 28,2 % des locataires sont pauvres contre 10,2 % des propriétaires. Etre actif sur le plan économique protège (bien entendu) fortement de la pauvreté. 4,2% des personnes qui travaillent sont pauvres contre 31,2% des chômeurs et 20,3% des retraités. Au niveau socio-démographique, on constate surtout le risque accru de pauvreté des personnes seules et surtout des parents de familles monoparentales. 23,7% des personnes isolées vivent sous le seuil de pauvreté. Chez les parents de familles monoparentales, ce chiffre atteint même 31,7%. -2- Qui sont les pauvres ? Une autre façon d’aborder les choses consiste non pas à calculer le risque de pauvreté dans certains groupes mais bien à étudier la composition du groupe des personnes pauvres. En comparant la structure de l’échantillon complet de l’enquête EU-SILC avec la population pauvre, il est possible d’identifier certaines catégories surreprésentées. De cette manière, on voit apparaître une image de la personne pauvre. Le tableau ci-dessous montre la distribution de la population totale et de la population pauvre selon le sexe, l'âge, l'activité principale et le type de ménage. En % Population totale EU_SILC (en %) 49,2 50,8 Population en risque de pauvreté (en %) 45,9 54,1 Moins de 16 ans 16-24 ans 25-49 ans 50-64 ans 65 ans et + 18,8 10,9 35,7 18,5 16,1 19,2 12,3 26,3 16,9 25,4 Propriétaire Locataire 75,5 24,5 52,5 47,5 Hommes Femmes Travailleur Inactif (total) Chômeur Retraité Inactif, autre 48,5 51,5 8,8 20,9 21,8 13,9 86,1 18,9 29,1 38,1 Isolé Ménage sans enfant (couple ou autre) Famille monoparentale Couple avec 1 ou 2 enfant(s) Couple avec 3 enfants ou + Autre avec enfant(s) 14,5 34,1 5,9 27,2 10,8 7,5 23,3 29,9 13,2 15,1 10,6 7,9 EU-SILC 2006 : comparaison de la population totale et de la population en risque de pauvreté en fonction du sexe, de l’âge, de l’activité principale et du type de ménage -3- Quelques constatations frappantes : • Les locataires courent clairement un risque accru de pauvreté mais représentent proportionnellement une part moins importante des pauvres dans l’échantillon (ils sont moins nombreux dans la population générale puisque seulement un quart des personnes sont locataires). A l’inverse, les propriétaires ont moins de risque d’être pauvres mais représentent la moitié des pauvres (ils sont plus nombreux, leur risque de pauvreté plus faible fait que le groupe des propriétaires pauvres est équivalent à celui des locataires pauvres). Ce phénomène est aussi lié au nombre important de personnes âgées parmi les pauvres. Les plus de 65 ans représentent 16% (16,1%) de l’échantillon total mais plus d’un quart des pauvres (25,4%), même si beaucoup d’entre eux sont propriétaires. Trois quarts (74,2%) des plus de 65 ans pauvres sont propriétaires. Toutefois, étant donné que posséder une maison peut être considéré comme une sorte de revenu (les locataires doivent en effet payer un loyer), il existe des projets de calcul alternatif de la pauvreté qui tiendrait explicitement compte du fait d’être propriétaire ou non. • La part d’inactifs dans l’échantillon total dépasse tout juste les 50% (51,5%). Chez les pauvres, leur part est de 86,1%. Les retraités constituent près de 21% (20,9%) de l’échantillon mais 29,1% de la population pauvre. Près de trois pauvres sur dix sont donc retraités. 8,8% de l’échantillon est au chômage mais les chômeurs représentent presque 1/5e (18,9%) de la population pauvre. • Près d’un quart des pauvres sont des personnes seules alors que ces dernières ne représentent que 14,5% de l’échantillon total. 5,9% de l'échantillon appartient à une famille monoparentale contre 13,2% des pauvres. Les pauvres et leur mode de vie La pauvreté se répercute évidemment aussi sur le niveau de vie. Le tableau en annexe présente une série de facteurs liés au mode de vie, répartis entre la population pauvre et la population dont les revenus dépassent le seuil de pauvreté. Ces chiffres donnent une image plus tangible de la pauvreté et de son impact sur divers aspects de la vie. Les pauvres rencontrent par exemple nettement plus de difficultés à financer le chauffage de leur habitation. Près d’un pauvre sur trois déclare avoir des problèmes dans ce domaine (30,8%) contre seulement une personne sur neuf dans le reste de la population (11,7%). L’habitation des personnes pauvres est aussi nettement moins confortable: les pauvres manquent plus souvent d’espace (11,5% contre 3,7%) ou du confort élémentaire (5,7% contre 1,6%) et sont deux fois plus nombreux à trouver leur logement trop sombre (16,6% contre 8,9%). Par manque de moyens financiers, les personnes pauvres sont plus nombreuses à ne pas posséder certains biens de consommation élémentaires comme une télévision et surtout une voiture et un ordinateur. En ce qui concerne la voiture par exemple, sept fois plus de pauvres déclarent ne pas pouvoir s’en permettre une (25,2% contre 3,6% du reste de la population). Pour l’ordinateur, cette proportion passe à 5 fois plus (20,9% de pauvres pour 4,3% du reste de la population). -4- Pourcentage de personnes appartenant à un ménage Population confronté au problème suivant: totale Peu d’espace (moins d’une pièce par personne) Problèmes financiers pour chauffer suffisamment l’habitation Pas de confort élémentaire (absence de bain/douche ou de toilette ou d’eau chaude) Logement sombre, peu de lumière du jour Population en risque de pauvreté Population qui ne court pas de risque de pauvreté 4.9% 11.5% 3.7% 14.5% 30.8% 11.7% 2.2% 10% 5.7% 16.6% 1.6% 8.9% Impossibilité d’inviter des amis une fois par mois Impossibilité de partir une fois par an en vacances pendant une semaine Impossibilité de manger tous les 2 jours de la viande/du poisson 11.6% 31% 8.3% 24.9% 59.5% 18.9% 4.2% 13.7% 2.6% Pas les moyens d’avoir la télévision Pas les moyens d’avoir un ordinateur Pas les moyens d’avoir une voiture 0.4% 6.8% 6.8% 1.4% 20.9% 25.2% 0.2% 4.3% 3.6% EU-SILC 2006: comparaison de la population totale et de la population en risque de pauvreté sur base d’indicateurs non monétaires Les conséquences sont aussi sociales. Le tableau ci-dessous énumère une série d’activités sociales et culturelles et indique dans quelle mesure les pauvres diffèrent des personnes qui ne le sont pas. Au cours des 12 derniers mois Population totale Population en Population qui ne risque de court pas de risque de pauvreté (en %) pauvreté (en %) N’est jamais allé voir un film au cinéma N’est jamais allé au musée ou à une exposition 52,6 58,4 69,8 76,8 49,6 55,2 N’a jamais rencontré de membres de la famille ou n’a pas de membres de la famille (qui n’habitent pas sous le même toit) 3,5 8,2 2,6 5,3 9,9 4,5 5,7 11,1 4,8 9,1 16,8 7,9 5,3 11 4,4 N’a jamais rencontré d’amis ou n'a pas d’amis N’a pas eu de contacts avec des membres de la famille (par mail, téléphone,...), n’a pas de famille N’a pas eu de contacts avec des amis (par mail, téléphone,...), n’a pas d’amis Ne peut compter sur l’aide de voisins, de la famille ou d’amis EU-SILC 2006: comparaison de la population totale et de la population en risque de pauvreté en ce qui concerne la participation sociale Globalement, les pauvres apparaissent surtout plus isolés. Les pauvres sont plus nombreux à n’avoir jamais de contact avec des amis ou des membres de la famille et à ne pas pouvoir compter sur l’aide d’autres personnes. -5- Informations techniques Quelques caractéristiques de l’enquête SILC 2006 en Belgique EU-SILC (Study on Income and Living Conditions) est un panel que l’on interroge chaque année sur les revenus et les conditions de vie et qui se compose à la fois de personnes déjà interrogées précédemment et de nouveaux répondants. 55% des 14 329 personnes (enfants y compris) qui ont fourni des informations en 2006 étaient interrogées pour la deuxième fois. Les panels, et surtout les enquêtes-panels portant sur les revenus, sont très sensibles au phénomène que l’on appelle l’attrition sélective. Les personnes ne sont pas toujours disposées à participer d’année en année à l’enquête, en particulier au sein de la population pauvre. Le niveau de participation plus faible de la partie pauvre de la population peut avoir pour conséquence une sous-estimation artificielle de la pauvreté en général ou dans certains groupes socio-économiques et démographiques spécifiques. Cela ne semble pas avoir été le cas à grande échelle mais, jusqu’à nouvel ordre, nous ne pouvons exclure que ce phénomène ait joué un rôle spécifique dans les tendances observées. Nous avons intégré au niveau de l’échantillon du panel EU-SILC une série de mesures destinées à prévenir ce type d’effets. Cependant, ces mesures ne jouent pleinement leur rôle que quand le panel tourne à plein régime. En tout état de cause, et certainement dans le contexte économique actuel, il faudra attendre les données plus récentes (disponibles fin de cette année ou début de l’année prochaine) pour tirer davantage de conclusions. Calcul du risque de pauvreté Le seuil de pauvreté équivaut à 60% de la médiane, à l’échelle individuelle, du revenu disponible. Cela correspond à la moyenne arithmétique suivante: 60% de € 17.194 par an équivaut pour une personne isolée à un seuil de € 10.316,44 par an, soit € 860 par mois. Pour obtenir le seuil de pauvreté des ménages, il ne suffit pas de multiplier ce chiffre par le nombre de membres du ménage. Partant du principe que les membres d’un ménage partagent les charges et les dépenses, un deuxième adulte dans un ménage se voit appliquer un facteur de 0,5 dans le calcul du seuil de pauvreté et les enfants (<14 ans) un facteur de seulement 0,3. Le seuil de pauvreté d’un ménage composé de deux adultes et de deux enfants se calcule donc en multipliant le seuil des personnes isolées par un facteur 2,1 (10.316,44*2,1=21.664,52 soit € 1.805 par mois). Ce facteur de 2,1 s’obtient en attribuant un ‘poids’ de 1 au chef de famille, de 0,5 au deuxième adulte du ménage et de 0,3 à chacun des enfants. Renseignements complémentaires De plus amples renseignements peuvent s’obtenir auprès de M. Freddy Verkruyssen : ☎ 02/277.70.76 [email protected] Mention de la source SPF Économie – Direction générale Statistique et Information économique. -6-