Impact rapide d`un traitement efficace sur la transmission de la
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Impact rapide d`un traitement efficace sur la transmission de la
INT J TUBERC LUNG DIS 18(9):1019–1025 © 2014 The Union Impact rapide d’un traitement efficace sur la transmission de la tuberculose multirésistante † ‡ ‡ § ‡ A. S. Dharmadhikari,* M. Mphahlele, K. Venter, A. Stoltz, R. Mathebula, T. Masotla, ‡ ¶ # † M. van der Walt, M. Pagano, P. Jensen, E. Nardell* ‡ *Division of Pulmonary and Critical Care Medicine, Brigham et Women’s Hospital, et †Division of Global Health Equity, Brigham and Women’s Hospital, Harvard Medical School, Boston, Massachusetts, Etats-Unis; ‡South African Medical Research Council, Pretoria, §Université de Pretoria, Pretoria, Afrique du Sud; ¶Department of Biostatistics, Harvard School of Public Health, Boston, Massachusetts, #Centers for Disease Control and Prevention, Atlanta, Georgia, Etats-Unis _______________________________________________________________________________RÉSUMÉ CADRE : Un traitement efficace de la tuberculose (TB) sensible aux médicaments rend rapidement les patients non infectants, bien avant que les frottis de crachats ou la culture ne se négativent. Les patients atteints de TB multirésistante (TBMDR) en cours de traitement sont jusqu’ici censés rester contagieux pendant des mois. Comme les ressources nécessaires à une hospitalisation prolongée sont un obstacle à l’expansion du traitement de la TB-MDR, la fiabilité du traitement communautaire est claire. OBJECTIFS : Estimer l’impact d’un traitement efficace sur le caractère contagieux des patients ayant une TB-MDR. MÉTHODES : Une série de cinq études de transmission de la TB de l’homme au cobaye ont testé plusieurs interventions de lutte contre la transmission de l’infection. Des cobayes ont été exposés dans des espaces contigus à l’air évacué d’un service hospitalier occupé surtout par des patients TB-MDR à frottis et culture positifs. Un test cutané à la tuberculine a été pratiqué chez les cobayes. Seul le groupe témoin de cobayes de chaque étude (sans intervention) fournit des données pour cette analyse. Le nombre de cobayes infectés dans chaque étude est rapporté et corrélé avec la sensibilité aux médicaments de Mycobacterium tuberculosis relative au traitement. RÉSULTATS : En dépit d’une exposition à des patients TB-MDR présumés contagieux, le pourcentage d’infection des cobayes allait de 1% à 77% lors des cinq expériences. Dans l’une d’elles, où les cobayes étaient exposés à 27 patients TB-MDR pendant 3 mois, la transmission est restée minimale. Dans les quatre autres expériences, où la transmission était plus importante, les cobayes avaient été exposés à des patients porteurs d’une TB ultrarésistante et non reconnue qui n’étaient pas encore traités efficacement. CONCLUSIONS : Dans ce modèle, un traitement efficace semble rendre les patients TB-MDR rapidement non contagieux. Il est cependant nécessaire de réaliser d’autres études prospectives dans ce domaine. MOTS CLÉS : tuberculose multirésistante ; impact du traitement ; transmission ; tuberculose ultrarésistante L’ORGANISATION MONDIALE DE LA SANTE (OMS) estime que près de 500.000 nouveaux cas de tuberculose multirésistante (TB-MDR) surviennent chaque année. Plus de la moitié frappent des personnes qui n’avaient jamais été traitées— résultat de la transmission et, dans de nombreux cas, d’une réinfection.1 Il y a des preuves considérables qui suggèrent qu’une proportion substantielle de transmission de la TB survient dans des hôpitaux et dans d’autres lieux de rassemblement.2–4 Dans le monde, la plupart des cas de TB-MDR sont traités en hôpital, au moins pendant les 6 premiers mois quand ils reçoivent des médicaments injectables.5,6 Ces patients restent hospitalisés jusqu’à la conversion du frottis ou de la culture, le seuil au-delà duquel les patients TB-MDR sont généralement considérés comme non contagieux. Cependant, dans de nombreux endroits durement frappés par la TB-MDR, comme l’Afrique du Sud, il y a un fossé croissant entre le besoin de traitement de la TB-MDR et la disponibilité des lits d’hôpitaux, d’où un long délai de mise en route du traitement des patients.7 Le fossé augmente actuellement avec la mise en œuvre des tests de dia- gnostic moléculaire rapides de la pharmacorésistance.8 En réponse, l’Afrique du Sud met en œuvre un traitement à base communautaire, ce qui est déjà pratiqué dans de nombreux endroits du monde.7,9 L’enthousiasme mondial vis-à-vis du traitement communautaire est cependant tempéré par des préoccupations relatives à une transmission potentielle avant la conversion du frottis de crachats et de la culture.10,11 On ne sait pas exactement combien de temps les patients TB-MDR restent contagieux après la mise en route d’un traitement efficace. Un groupe de travail de 2008 du comité consultatif des Centers for Disease Control and Prevention (CDC) pour l’Elimination de la Tuberculose (ACET) des Etats-Unis a revu la littérature de médecine et de santé publique et n’a pas trouvé d’arguments en faveur d’une politique particulière (Julian Thomas, communication personnelle). En ce qui concerne la TB pharmacosensible cependant, les politiques émanant de cinq sources de santé publique ont montré que l’isolement pouvait être interrompu après 2 semaines de traitement efficace, avec ou sans conversion des frottis de crachats ou de culture selon Auteur pour correspondance : Ashwin S Dharmadhikari, Brigham & Women’s Hospital, Harvard Medical School, 641 Huntington Avenue, Suite 3A03, Boston, MA 02115, USA. Tel: (+1) 617 432 2079. Fax: (+1) 617 432 2565. e-mail: [email protected] [Traduction de l’article : « Rapid impact of effective treatment on transmission of multidrug-resistant tuberculosis » Int J Tuberc Lung Dis 2014; 18(9): 1019–1025. http://dx.doi.org/10.5588/ijtld.13.0834] 2 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease les sources. Pendant la résurgence de TB des années 1985–1992 aux Etats-Unis, la transmission nosocomiale de la TB-MDR aux autres patients et au personnel de santé a été largement attribuée aux patients qui avaient été libérés de l’isolement après 2 semaines de traitement inefficace pour une TB présumée pharmacosensible.12 En réponse à ce qui était à ce moment considéré comme une erreur politique grave, la règle des 2 semaines a été rejetée comme non applicable à la TB pharmacorésistante.13 Manquant de données spécifiques sur l’impact d’un traitement efficace de la TBMDR, les programmes ont habituellement recommandé l’isolement respiratoire et/ou la séparation des patients TB-MDR en traitement jusqu’à la conversion du frottis ou de la culture qui survient généralement après 2–6 mois. Nous présentons ici les observations préliminaires obtenues rétrospectivement à partir d’une série de cinq expériences réalisées dans d’autres buts et discutons de la façon dont nos données, tout comme des observations épidémiologiques et expérimentales publiées précédemment et relatives à la TB pharmacosensible, montrent que la transmission de la TB-MDR est rapidement réduite après la mise en route d’un traitement efficace — bien avant la conversion du frottis de crachats et de la culture. MÉTHODES Ce rapport est une nouvelle analyse descriptive des conversions du test cutané à la tuberculine (TCT) chez des cobayes exposés à cinq expériences distinctes de transmission homme-cobaye réalisées afin de tester les interventions de lutte contre l’infection. Cette analyse ne porte cependant que sur les conversions des animaux dans les chambres témoins (sans intervention). Les cinq expériences ont été réalisées dans l’unité de recherche sur les infections par voie aérienne (AIR) de Witbank, dans la province de Mpumalanga, en Afrique du Sud. La structure de l’AIR consiste en trois chambres de patients à deux lits, un couloir, une salle commune et des sanitaires ; la majorité de l’air est rejeté à l’extérieur à travers deux grandes chambres d’exposition des cobayes dans une partie du bâtiment séparée mais adjacente. Les patients qui ont une TBMDR documentée admis au Centre de Traitement provincial adjacent de Mpumalanga pour y commencer ou y poursuivre le traitement standardisé ont été recrutés, après avoir donné un consentement éclairé, pour participer à l’étude comme sources humaines de contagion des cobayes. Le protocole de traitement standardisé de la TB-MDR du Ministère de la santé d’Afrique du Sud consistait en lévofloxacine, kanamycine, éthionamide et soit éthambutol (EMB), soit prothionamide, en fonction de la sensibilité du patient in vitro à l’EMB. Le consentement incluait l’accord pour passer au moins 20 h par jour dans la structure de l’AIR. Les patients de l’AIR ont reçu exactement le même traitement que les patients du service principal de TB-MDR où ils avaient été recrutés. La structure de l’AIR a été conçue pour tester les interventions de lutte contre les infections aériennes, comme la désinfection de l’air, les germicides à ultra- violets, les masques chirurgicaux pour les patients et les nettoyeurs mécaniques de l’air des chambres (filtration).15 Dans ces expériences, l’air des chambres des patients et du couloir était rejeté dans la chambre d’exposition d’un cobaye les jours pairs quand l’intervention était en cours, et dans les mêmes chambres d’exposition des cobayes témoins les jours impairs quand il n’y avait pas d’intervention en cours. La différence du taux d’infection des cobayes était donc une mesure directe de l’efficacité des interventions testées. Il faut noter que les infections des cobayes incluses dans l’analyse actuelle sont seulement celles des chambres d’exposition des cobayes témoins. La transmission de la TB aux cobayes témoins n’a donc pas été influencée par les interventions testées. Dans l’étude pilote seulement, les organes/tissus des cobayes qui ont développé une TB active ont été congelés et ensuite cultivés à la recherche de Mycobacterium tuberculosis avec des méthodes de culture sur agar en milieu solide. Les isolats de M. tuberculosis des tissus des cobayes ont ensuite été caractérisés en termes de test de sensibilité aux médicaments (TSM) sur milieu liquide par spoligotyping pour les relier aux isolats de source humaine présents dans le service à ce moment.14 Dans les quatre autres expériences, la culture des échantillons des cobayes n’a pas été réalisée. Les détails relatifs aux soins des animaux, au TCT, à la microbiologie et aux empreintes génétiques ont été publiées ailleurs.14 Dans toutes les cinq expériences, les sujets enrôlés ont servi en premier lieu de sources de gouttelettes infectieuses. Les critères d’inclusion ont été 1) cas nouvellement diagnostiqué de TB-MDR référé au centre de traitement provincial pour mettre en route ou continuer la chimiothérapie, 2) ayant un frottis de crachats positif, 3) une toux chronique, et 4) des cavernes à la radiographie pulmonaire (RP). Tous les critères d’inclusion n’ont pas été requis ou présents chez chaque sujet. Les critères d’exclusion ont inclus un état clinique considéré par le médecin de l’hôpital comme préterminal ou trop médiocre pour une participation à l’étude. De nouveaux sujets ont été recrutés pour remplacer les sujets existants approximativement toutes les 2–3 semaines. Dans certaines expériences, les patients chroniques sous traitement qui sont restés à frottis positif et avaient la toux, ont été admis à la structure de l’AIR pour peupler le service avec des sujets susceptible d’être contagieux. Bactériologie des patients Les références au centre de traitement de la TB-MDR sont basées sur les rapports du Laboratoire National de Référence d’Afrique du Sud sur la TB-MDR, émanant des centres qui réfèrent ou des hôpitaux généraux, généralement au cours des 2 derniers mois. Après l’admission à l’AIR, des échantillons de crachats ont été obtenus trois fois par semaine pour un frottis à la recherche de bacilles acido-alcoolo-résistants (BAAR), une culture en milieu liquide et un TSM en milieu liquide MGITTM (BD, Sparks, MD, Etats-Unis). Tous les isolats de M. tuberculosis recueillis après l’entrée dans l’étude ont été congelés pour d’éventuelles ana- Impact rapide du traitement sur la transmission de la TB-MDR 3 Tableau 1 Caractéristiques démographiques et cliniques des patients des cinq expériences de transmission de l’homme au cobaye* Etude Total patients n Age des patients années, moyen (extrêmes) 26 24 15 27 17 34 (18–68) 38 (25–60) 40 (26–64) 34 (18–56) 37 (23–59) Pilote Expérience 1 Expérience 2 Expérience 3 Expérience 4 Femmes % VIH positifs % (sur n testés) Grade du frottis BAAR à l’entrée dans l’étude* médian [IIQ] Durée du traitement avant l’entrée dans la structure AIR jours, médian 42 33 46 42 53 63 (22) 80 (20) 80 (15) 86 (21) 65 (17) 2 [1–3]* 1,5 [0–3] 3 [3–3] 3 [3–3] 2 [1–3] 24,5 0 0 0 0 * Pour l’étude pilote, le grade du frottis représente celui de la sortie de l’AIR. VIH = virus de l'immunodéficience humaine; BAAR = bacilles acido-alcoolo résistants ; IIQ = intervalle interquartile ; AIR = recherche sur les infections aériennes. lyses supplémentaires dans l’avenir, notamment un TSM de deuxième ligne et un génotypage — procédures non incluses dans nos protocoles de tests des interventions de lutte contre la transmission. Le TSM de deuxième ligne a été réalisé avec la méthode MGIT et celle des sondes en ligne par le Medical Research Council,15 qui est un laboratoire supranational de référence pour la TB. Les protocoles d’études humaines ont été approuvés par le comité d’éthique du Medical Research Council d’Afrique du Sud, à Pretoria, Afrique du Sud ; le CDC, Atlanta, GA, Etats-Unis ; l’Ecole de santé publique de Harvard, Boston, MA, Etats-Unis ; et l’hôpital Brigham & Women, Boston, MA, Etats-Unis. Les comités d’utilisation des animaux ont approuvé les protocoles du Medical Research Council d’Afrique du Sud, du CDC et de la Faculté de Médecine de Harvard. RÉSULTATS Caractéristiques des sujets Les caractéristiques démographiques et cliniques des sujets occupant le service de l’AIR dans chaque étude figurent dans le Tableau 1. Tous les patients enrôlés dans les études avaient une toux chronique, et la grande majorité des patients dans toutes les études (proportions exactes non montrées) avaient un frottis positif à l’entrée. Les études ont été réalisées de 2005 à 2010. Mise en route du traitement Les patients ont été, comme en routine, mis sous traitement de TB-MDR après une rapide évaluation initiale, incluant le recueil de crachats pour la culture et le TSM. En pratique, le traitement a été mis en œuvre généralement soit le jour de l’admission, soit le jour suivant. En moyenne, 76% des patients TB-MDR ad- Tableau 2 TSM des isolats provenant de patients des cinq expériences de transmission de l’homme au cobaye Expérience Pilote Expérience 1 Expérience 2 Expérience 3 Expérience 4 Isolats avec un TSM complet (nombre de sujets) Isolats TB-XDR Transmission au cobaye, proportion infectés % 11 (26) 10 (24) 11 (15) 21 (27) 10 (17) 3 (MGIT) 5 (MGIT) 2 (MGIT) 0 (MGIT) 2 (MGIT) 74 10 54 1 77 TSM = test de sensibilité aux médicaments ; TB-XDR = tuberculose ultra-résistante ; MGIT = Mycobacteria Growth Indicator Tube. mis à l’AIR avaient eu moins de 24 h de traitement (Tableau 1). Comme cela a été noté précédemment, les patients occasionnels admis à l’AIR avaient été traités pendant des semaines ou des mois, mais étaient restés frottis positifs et avaient toujours la toux. Ces patients ont considérablement modifiés la durée moyenne et la médiane du traitement et, rétrospectivement, certains avaient des isolats de TB ultrarésistante (TB-XDR), ce qui constitue un important résultat de cette analyse. Résultats de la microbiologie Bien qu’une preuve bactériologique de TB-MDR soit requise pour référer les patients au centre de traitement de TB-MDR de Mpumalanga, des cultures répétées à l’hôpital ont quelquefois été négatives. Ce phénomène, en plus de la contamination des échantillons conservés, est responsable du caractère incomplet des données microbiologiques de quelques patients dans plusieurs expériences. Le Tableau 2 indique la prévalence de la TB-XDR parmi les isolats de patients disponibles pour un TSM complet. L’expérience n° 3 a eu le plus faible nombre d’isolats disponibles pour le TSM. Aucun isolat TB-XDR n’a été identifié dans cette cohorte de patients, ce qui a été confirmé par la suite par le test de sonde en ligne. Transmission En dépit du recrutement cohérent de patients présumés hautement contagieux dans l’AIR, il y a eu une variation notable d’une expérience à l’autre dans la proportion de conversions du TCT parmi les cobayes exposés (chambre témoin seulement) (Tableau 3). Dans l’expérience n° 3, un seul cobaye a été infecté après trois mois d’exposition à 27 patients. Toutes les autres expériences incluaient 2–5 patients avec TB-XDR et ont été associées à un taux de transmission plus élevé. Tableau 3 Taux d’infection des cobayes dans les cinq études de transmission de l’homme au cobaye Expérience Pilote Expérience 1 Expérience 2 Expérience 3 Expérience 4 Patients n Cobayes exposés n Durée de l’exposition des cobayes mois 26 24 15 27 17 360 90 90 90 90 4 3 2 3 3 Cobayes infectes (chambres témoins seulement) n (%) 266 (74) 9 (10) 49 (54) 1 (1) 69 (77) 4 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease DISCUSSION Nous avons réalisé une analyse secondaire des cobayes exposés aux patients atteints de TB-MDR dans des études expérimentales conçues pour étudier des interventions visant à réduire la transmission aérienne. Nos données préliminaires suggèrent que le protocole standard de traitement de la TB-MDR en Afrique du Sud inhibe rapidement et efficacement la transmission. Nos observations sont en accord avec les données épidémiologiques et expérimentales rassemblées pendant plus de 60 ans sur la TB pharmacosensible et montrant qu’un traitement efficace est le facteur principal qui détermine l’arrêt de la transmission. Etudes épidémiologiques La durée de la contagiosité des patients TB mis sous traitement est devenue une question cruciale peu après l’introduction de protocoles de traitement efficaces dans les années 50. Dès 1962, Crofton, se fondant sur l’essai clinique prospectif randomisé de traitement ambulatoire à Madras (maintenant Chiennai) en Inde,16 a suggéré que l’hospitalisation n’était probablement pas nécessaire pour la prévention d’une transmission ultérieure.17 Dans cette étude, le traitement à domicile dès le début (avec seulement de l’isoniazide [INH] et de l’acide para-amino-salicylique [PAS]) n’a pas provoqué davantage d’infections à domicile ou de cas parmi les contacts familiaux que lorsque le même traitement avait été administré en totalité à l’hôpital pendant une année entière.16 Plusieurs autres études réalisées aux Etats-Unis soutiennent l’observation régulière que les patients sous traitement efficace ne se sont pas avérés contagieux vis-à-vis de leurs contacts familiers jusque-là non infectés, sans tenir compte d’un frottis de crachats positif et des résultats de la culture. En 1973, Brooks et al. ont rapporté l’absence de conversion du TCT parmi 107 contacts domiciliaires TCT-négatifs de 21 patients avec TB renvoyés chez eux après au maximum 23 jours d’hospitalisation.18 Sur ces 21 patients, 19 sont restés frottis positif à leur retour à domicile et certains d’entre eux n’ont pas eu la conversion de leur crachat en frottis négatif ce jusqu’après 5 mois de traitement. En 1974, Gunnels et al. ont rapporté le taux d’infection parmi 500 contacts familiaux de 155 patients TB renvoyés chez eux après un mois de traitement.19 Il n’y a pas eu de différence dans le taux d’infection parmi 284 contacts familiaux de 86 cas à culture positive (52 d’entre eux à frottis et culture positifs) comparés à 216 contacts familiaux de 69 cas à culture négative. Dans l’analyse de la transmission de la TB dans une étude exhaustive de 1976, l’analyse des facteurs de transmission de la TB et l’impact de la chimiothérapie, Rouillon et al. ont revu ces examens épidémiologiques et bactériologiques de conversion du TCT parmi les contacts familiaux et d’autres études et ont conclu : « Il y a de plus en plus de preuves en faveur de l’idée que la fin de la contagiosité des patients — qui se distingue de la « guérison » qui, elle, demande des mois et provient de la négativation des examens bactériologiques, directs ou par culture, qui peuvent demander des semaines – est très probablement obtenue après moins de 2 semaines de traitement. »20 Ceci semble être la première référence à ce qui est devenu la « règle des 2 semaines ». Sa large adoption dans la plupart des directives de lutte contre l’infection reconnait implicitement la discordance entre le frottis de crachats et le statut de la culture d’une part et la contagiosité des patients sous traitement d’autre part. En dépit des effets bactéricides rapides des protocoles comportant de l’INH et de la rifampicine (RMP), la conversion des frottis de crachats et de la culture survient rarement en 2 semaines. Le nombre moyen de jours avant la survenue du premier frottis de crachats négatif de la série de trois frottis consécutifs négatifs a été évaluée à 33 jours et le nombre médian, à 23 jours.21 Dans une revue critique de l’impact de la chimiothérapie sur la transmission, Menzies a exhorté à la prudence dans l’acceptation des conclusions de l’étude de Madras, les seules données d’un essai clinique prospectif randomisé, en raison des taux élevés de transmission dans la communauté qui auraient pu masquer une différence dans la transmission à domicile entre le traitement en externe et à l’hôpital.22 Comme les autres observations de contacts familiaux n’étaient pas des essais randomisés, il a noté le risque de biais potentiels si les patients les moins malades et les moins contagieux étaient renvoyés à domicile pour leur traitement. Il n’a pas fait de commentaires sur l’étude de Gunnels, dans laquelle à la fois les patients à frottis de crachats et culture positifs et négatifs ont été renvoyés chez eux. Il a ensuite fait remarquer que les contacts familiaux qui étaient exempts d’infection lors du diagnostic du cas index pourraient être des personnes qui ont une meilleure immunité, innée ou acquise, vis-à-vis de l’infection tuberculeuse et que la majorité des contacts familiaux non infectés et des agents de santé vivant aujourd'hui dans des contextes à faible prévalence de TB étaient susceptibles d’être plus vulnérables à l’infection que dans le passé. Implicite dans sa revue de la littérature est l’hypothèse courante selon laquelle les patients à frottis de crachats et culture positifs restent contagieux même sous traitement. La même hypothèse est la base d’un récent rapport du Pérou montrant que 10% des patients pharmacosensibles traités avec succès par chimiothérapie sont restés culture-positifs à 60 jours et, selon les auteurs, devraient toujours être considérés comme restant contagieux.23 Menzies a conclu qu’il n’y avait pas de preuve crédible que les patients TB à culture de crachats positive sous traitement n’étaient pas contagieux.22 Tandis que les études de Riley de transmission naturelle de l’homme au cobaye (voir ci-dessous pour une discussion plus approfondie de ces dernières) ont été citées à la fois dans les articles de Menzies et de Fitzwater et al., il n’y a pas eu de mention selon laquelle l’impact majeur sur la transmission était lié au démarrage le jour même de l’admission dans la structure d’expérience, bien avant la conversion du frottis de crachats ou de la culture.22–24 Etudes expérimentales Lors de leur première étude de transmission de l’homme au cobaye pendant 2 ans, pendant les premiers mois, Riley et al. ont observé 3–4 infections de cobaye par mois après exposition à des patients tuber- Impact rapide du traitement sur la transmission de la TB-MDR Tableau 4 Contagiosité relative des patients traités et non traités dans le service expérimental de Riley, patients pharmacorésistants et pharmacosensibles, en fonction du temps passé dans le service24 Patients TB Pharmacosensibles Non traités (n = 61) Traités (n = 29) Pharmacorésistants Non traités (n = 6) Traités (n = 11) Cobayes infectés n Risque relatif (ajusté au temps passé dans le service) 29 1 100 2 14 6 28 5 TB = tuberculose. culeux à frottis positif, chroniques, déjà traités.25 Cependant, pendant les 4 mois suivants, en dépit de l’admission continue de patients à frottis positif, les infections des cobayes se sont complètement arrêtées. Cette modification radicale de la transmission correspondait au recrutement de nouveaux patients qui n’avaient jamais été traités. Quand on a, à nouveau, admis dans le service des patients tuberculeux chronique, qui avaient déjà été traités, la transmission aux cobayes a repris au même rythme qu’auparavant, suggérant qu’un traitement efficace mis en route le jour de l’admission avait rapidement et profondément interrompu la transmission.25 Reconnaissant le puissant impact du traitement sur la transmission, pendant leur deuxième étude de 2 ans, Riley et al. ont exposé les cobayes pendant un certain temps à des patients traités et non traités.25 Le résultat a permis de comparer directement les effets relatifs du traitement sur la contagiosité des patients atteints de TB pharmacosensible et pharmacorésistante (Tableau 4). Notez qu’il n’y avait pas à l’époque de TB-MDR, car cela se passait longtemps avant l’introduction de la RMP. L’impact rapide du traitement sur la transmission était obtenu avec l’INH, le PAS et la streptomycine seuls.24 Comme dans la première étude, les patients ont été traités le jour même de l’admission dans le service — pas 2 semaines ni même 2 jours après l’admission. La diminution de 98% de la contagiosité rapportée représentait très peu de traitement avec des protocoles beaucoup moins efficaces que ceux utilisés de nos jours. Certains cas pharmacorésistants ont également répondu au traitement avec les médicaments restant efficaces mais le nombre de telles infections de sujets humains ou de cobayes était trop petit pour en tirer des conclusions fermes.24 Riley et al. ont alors conclu : « Les patients traités étaient admis au service en même temps que le traitement était mis en route et ils en sortaient généralement avant la négativation complète des crachats. La diminution de la contagiosité précédait donc l’élimination des germes des crachats, témoignant d’un effet rapide et remarquable ». En ce qui concerne la TB pharmacorésistante, ils ont été plus prudents en raison du petit nombre de patients et ont conclu seulement que « Le traitement médicamenteux a semblé être efficace dans la réduction de la contagiosité des patients ayant des bacilles pharmacorésistants, mais les données ne permettaient pas une analyse détaillée du problème ».24 5 Dans une autre étude similaire, plus récente, de la contagiosité des patients infectés par la TB et le virus de l'immunodéficience humaine (VIH), utilisant le modèle de transmission naturelle de l’homme vers le cobaye à Lima, Pérou, Escombe et al. ont observé que pratiquement toutes les transmissions étaient dues à des souches pharmacorésistantes insuffisamment traitées.26 Dans cette étude, 97 patients VIH positifs atteints de TB pulmonaire ont exposé 292 cobayes pendant plus de 505 jours. Parmi ces patients, 66 avaient une culture positive et 35 avaient un frottis de crachats positif. Sur 125 cobayes infectés, 122 (98%) ont été contaminés par des souches génétiquement liées à 9 patients TBMDR qui étaient insuffisamment traités ou chez qui le traitement avait été retardé. Trois patients pharmacosensibles ont infecté un cobaye chacun : deux patients avaient eu un retard de traitement et le troisième avait arrêté son traitement en raison d’effets secondaires. Ces données sont en accord avec les résultats de Riley et al. et les nôtres, suggérant une transmission presque exclusivement due à des patients sous traitement inefficace. Dans l’étude d’Escombe et al. approximativement 66% des patients avec des souches pharmacosensibles avaient été sous traitement pendant plus de 2 semaines au moment de l’admission (communication personnelle, R Escombe, 2013). Cependant, les 34% de patients à TB pharmacosensible, traités pendant plus de 2 semaines, représentant des patients plus susceptibles d’être contagieux, n’ont pas transmis leur infection sous traitement, sauf comme noté ci-dessus. Dans nos études, en réponse à la chute surprenante du taux d’infection observée entre notre étude pilote et la première expérience (de 74% à 10%), nous avons examiné toutes les radiographies pulmonaires disponibles et conclu que les patients semblaient avoir un même niveau de gravité de la maladie et des cavernes pulmonaires. Les scores des frottis de crachats étaient en moyenne de 1,5–3 sur 3 dans toutes les cinq expériences. La même souche Hartley de cobayes avait été obtenue du même reproducteur et les réactifs et procédures du TCT étaient identiques. Une probable explication des variations du taux d’infection n’est devenue apparente que rétrospectivement quand les résultats du TSM et du spoligotyping ont été disponibles à partir des isolats congelés de l’étude pilote provenant à la fois des patients et des cobayes. Comme nous l’avons noté dans le rapport publié dans notre étude pilote, 14 les 13 isolats de cobaye disponibles correspondaient à deux souches de patients, que nous avons rétrospectivement identifiées comme des TB-XDR. Les isolats disponibles des expériences restantes ont ensuite été envoyés pour un TSM de deuxième ligne, révélant que quatre expériences sur cinq ayant un taux élevé de transmission aux cobayes comprenaient des patients qui avaient une TB-XDR méconnue. L’expérience n° 3, où un seul cobaye a été infecté par 27 patients sur 3 mois, n’a pas réussi à identifier la TB-XDR dans un quelconque des 21 isolats de patients disponibles pour le TSM de deuxième ligne. Nos données préliminaires suggèrent que le protocole de traitement standard de la TB-MDR en Afrique du Sud a rapidement et efficacement inhibé la trans- 6 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease mission. Nos observations sont en accord avec les preuves épidémiologiques et expérimentales rassemblées sur plus de 60 années pour la TB pharmacosensible et montrent qu’un traitement efficace est le facteur principal qui détermine la transmission. La littérature épidémiologique suggère que seulement un tiers des patients TB à frottis positif en moyenne infectent leurs contacts proches.27,28 Dans les études d’échantillons d’aérosols de toux, M. tuberculosis a été cultivé à partir de seulement à peu près un tiers des patients à frottis positif.29 A la fois les sources humaines et les souches de mycobactéries varient en termes de contagiosité.30 Cependant, il est remarquable que l’absence d’isolats de TB-XDR dans l’expérience 3 a été associée à une quasi absence de transmission aux cobayes, en dépit d’une exposition de 3 mois à 27 patients TB-MDR à frottis de crachats positif sélectionnés pour leur contagiosité probable. Le mécanisme par lequel une chimiothérapie réduit rapidement la transmission est inconnu. Loudon et al. ont émis la théorie qu’à mesure que les gouttelettes respiratoires s’évaporent, la concentration des médicaments entourant les organismes aériens doit considérablement augmenter, inactivant peut-être les germes et entravant leur implantation chez l’hôte.31 Cependant, les expériences réalisées avec des M. tuberculosis sous forme d’aérosol, exposés à des concentrations sublétales d’INH qui ont continué à croitre sur les plaques n’a pas soutenu cet argument, tout au moins en ce qui concerne la culture.31 Néanmoins, en tenant compte de la discordance de la contagiosité de l’aérosol et de la possibilité de cultiver les crachats, il faut noter que les bactéries en culture ne subissent pas le stress de l’aérosolisation ou de l’exposition aux médicaments et que leur croissance est soutenue par des conditions de culture optimales tandis que les bactéries inhalées sont confrontées aux défenses innées et acquises de l’hôte. Plus intrigantes encore sont les récentes observations selon lesquelles M. tuberculosis peut rapidement subir des réponses transcriptionelles massives à des stress modérés sans effet sur leur croissance ou leur survie.32 Il est plausible que les réponses transcriptionnelles rapides aux médicaments anti-mycobactériens puissent avoir un impact sur la virulence ou la tolérance à l’aérosolisation sans avoir d’impact sur la croissance en culture. Limites de l’étude Il s’agit d’une nouvelle analyse rétrospective de données recueillies pour des études d’intervention visant à entraver la transmission. Les données cliniques et microbiologiques sont incomplètes et nous n’avons pas eu d’informations sur le TSM de deuxième ligne sur tous les patients entrant dans la structure de l’AIR. Le TSM de deuxième ligne n’est devenu que récemment disponible en routine pour les patients TB-MDR chez qui le protocole de traitement standard d’Afrique du Sud a échoué ; le diagnostic de TB-XDR n’a donc pas été disponible au moment du recrutement des patients dans nos études et ne pourrait donc pas avoir influencé leur traitement pendant leur séjour dans la structure de l’AIR. Le recueil des isolats des cobayes a également été limité. Néanmoins, nous présentons des observations qui suggèrent que la transmission est survenue largement à partir de cohortes de patients qui incluaient des sujets atteints de TB-XDR non diagnostiquée et recevant un traitement standard de TB-MDR et que dans l’unique cohorte (expérience 3) dans laquelle nous n’avons pas identifié de TB-XDR, il n’y a pratiquement pas eu de transmission. Nous reconnaissons que les cas de TB sont intrinsèquement variables en termes de contagiosité et que le hasard pourrait expliquer ces résultats, mais nos résultats sont en accord avec un grand nombre d’études épidémiologiques et deux autres études sur des cobayes démontrent clairement l’impact prédominant du traitement sur la transmission. CONCLUSION La transmission aérienne est peut-être le maillon faible de la diffusion de la TB et il est probable qu’un traitement efficace, même très limité dans le temps, puisse faire pencher la balance contre la transmission. Ceci a été reconnu pour la TB pharmaco sensible et nos données suggèrent que la même chose s’applique à la TBMDR. Même si des études ultérieures sont nécessaires pour comprendre pleinement le mécanisme de ce remarquable effet, les implications de ces observations sont profondes. Bien que de nombreux programmes traitent déjà la TB en communauté dès le début, ces données devraient renforcer la sécurité de cette politique — aussi longtemps qu’un traitement efficace peut être assuré par test moléculaire rapide et que la délivrance du traitement est assurée par la méthode d’observation directe. Ces données suggèrent également que l’approche de la lutte contre la transmission de la TB dans les institutions et dans la communauté devraient être recentrées, avec un accent sur la recherche active des cas grâce à une surveillance de la toux, un diagnostic moléculaire rapide et la mise en route rapide d’un traitement efficace soigneusement supervisé, basé sur le TSM moléculaire. Cependant, il faut rester prudent avant de mettre ces résultats en pratique. On ne peut pas assez souligner la nécessité d’un traitement efficace, bien supervisé, particulièrement dans des zones où la pharmacorésistance est très fréquente. Ce serait une profonde erreur de croire que le traitement sans confirmation moléculaire rapide de la pharmacosensibilité ou sans délivrance efficace est suffisant. Enfin, il est probable que le traitement actuel de la TB-XDR est souvent inefficace dans l’interruption rapide de la transmission. Heureusement, un ou plusieurs des nouveaux agents se présentant à l’horizon pourraient accomplir cet objectif. Remerciements Les auteurs remercient E. de Kock, de Retrasol Inc., pour son rôle comme consultant en règlementation et responsable des données de l’étude et W. Lubbe pour avoir organisé le soutien à ces études dans la structure de l’AIR. Sources de soutien/financement: NIOSH R01OH009050. Conflit d’intérêt : pas de conflit déclaré. Références 1 World Health Organization. Multidrug and extensively drug-resistant TB (M/XDR-TB): 2010 Global Report on Impact rapide du traitement sur la transmission de la TB-MDR 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 Surveillance and Response. 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