sa 1997 evolution_criminalite_organisee
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Sommaire Sommaire Avant-propos Marcel Leclerc 7 Allocution de la cérémonie d’ouverture Jean-Louis Debré – Summary – Resumen 9 14 15 Intercenter Claudio Zanghi – Intercenter – Intercenter 17 18 18 Présentation générale du XVIIIe Cours de haute spécialisation pour les forces de police Marcel Leclerc – Summary – Resumen 19 31 32 Présentation de la criminalité organisée 33 Essai de géopolitique de la criminalité organisée Hervé Bolot – Summary – Resumen 35 44 45 Empirical Criminological Research on Organised Crime The State of Affairs in Europe Cyrille Fijnaut – Résumé – Resumen 47 58 59 Sociological contributions to the study of organised crime Michael Levi – Résumé – Resumen 61 69 70 Les dimensions juridiques de la criminalité organisée : aspect transnational et coopération entre États Michel De Salvia – Summary – Resumen 71 83 84 Le crime organisé : constat et stratégie de lutte en France Bernard Gravet – Summary – Resumen 87 92 93 Les nouvelles formes de la criminalité organisée 95 Les nouvelles voies du trafic de drogue international Gilles Leclair – Summary – Resumen 97 119 120 Evolución del narcotráfico y nuevas tendencias de la lucha contra esa plaga en Colombia Luis Enrique Montenegro Rinco – Résumé – Summary 123 131 132 La coopération et la communication internationales dans la lutte contre le trafic illicite des matières nucléaires et d’autres sources radioactives Sven Thorstensen – Summary – Resumen 133 150 151 L’action de l’ICOM dans la lutte contre le trafic illicite des biens culturels Elisabeth Des Portes – Summary – Resumen 153 161 162 Organized crime in the former USSR Serguei Avdienko – Résumé – Resumen 163 171 172 Boryokudan, Japanese Organised Crime Groups Katsushi Ikeda – Résumé – Resumen 173 189 190 Les nouveaux enjeux de la lutte contre la criminalité organisée 191 Terrorism and organised crime Alan Brown – Résumé – Resumen 193 201 202 La criminalité organisée et les trafics d’êtres humains Wassyla Tamzali – Summary – Resumen 203 220 221 Table ronde – débat sur la coopération policière en matière de criminalité organisée 223 Une criminalité fortement institutionnalisée Raymond Kendall – Summary – Resumen 225 230 231 La création d’Europol et ses fonctions dans la lutte internationale contre la criminalité organisée Jürgen Storbeck – Summary – Resumen 233 239 240 La coopération policière en matière de lutte contre la criminalité organisée Jean-Louis Sabathier – Summary – Resumen 241 251 252 La cooperazione di polizia nei confronti della criminalità organizzata Maurizio Ludovici – Summary – Résumé – Resumen 253 260 260 261 Les instances de coopération policière internationale en matière de crime organisé Le Traité de Maastricht – Les accords de Schengen Gérard Seroussi 263 – Summary 274 – Resumen 275 L’evoluzione della criminalita organizzata : la cooperazione di polizia Arnaldo Grilli – Summary – Résumé – Resumen 277 284 285 286 L’enjeu économique de la lutte contre la criminalité organisée 287 Nouvelles stratégies économiques de la criminalité organisée : guérillas et mafias Jean-Christophe Rufin – Summary – Resumen 289 294 294 L’enjeu économique de la lutte contre la criminalité organisée Félix Baënziger – Summary – Resumen 295 303 304 Crime organisé et délinquance informatique Philippe Rosé – Références – Summary – Resumen 305 316 317 318 La criminalité informatique le rôle de la police judiciaire Daniel Padoin – Summary – Resumen 319 325 326 Sciences et technologies mises au service de l’enquête 327 The analyst’s note book Mario De Cocq – Résumé – Resumen 329 334 334 Le fichier automatisé des empreintes digitales (FAED) Eric Brendel – Summary – Resumen 335 342 342 Le Groupe d’action financière (GAFI) et la lutte contre le blanchiment de capitaux Jean Spreutels – Summary – Resumen 343 351 351 Operational police cooperation in the area of money laundering: United States Customs Service Paul Beaulieu – Résumé – Resumen 353 360 361 Les réponses judiciaires 363 La direction nationale anti-mafia : son rôle et ses expériences dans la réalité judiciaire italienne Bruno Siclari – Summary – Resumen 365 372 373 American witness protection programs against organized crime Eugène L. Coon, Jr – Résumé – Resumen 375 385 386 Gestione penitenziaria della criminalita’organizzata Salvatore Cianci – Summary – Résumé – Resumen 387 397 397 398 United Nations and organised crime 399 The vulnerability of transition countries to drug trafficking, drug abuse and organized crime Bernard Frahi – Résumé – Resumen 401 415 416 The activity of United Nations against organised crime Dimitris Vlassis – Résumé – Resumen 417 426 427 Synthèse finale du XVIIIe Cours international de haute spécialisation pour les forces de police Marcel Leclerc – Summary – Resumen 429 439 440 Allocution de clôture du XVIIIe Cours de haute spécialisation pour les forces de police Claude Guéant – Summary – Resumen 441 446 447 Avant-propos Marcel Leclerc, président du comité d’organisation du XVIIIe Cours international de haute spécialisation pour les forces de police Le XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police s’est déroulé au centre des conférences internationales de Paris, du 17 au 24 septembre 1996. Placé sous la coprésidence de Jean-Louis Debré, ministre de l’Intérieur et de Claudio Zanghi, président du Centre international d’études sociologiques, pénales et pénitentiaires de Messine (Intercenter), il a réuni plus de 250 experts répartis en 82 délégations nationales en provenance des cinq continents. L’originalité de sa thématique centrale intitulée «.L’évolution de la criminalité organisée.» est d’avoir abordé la criminalité transnationale sous un angle transversal et non plus catégoriel (lutte contre telle mafia ou contre tel trafic). Ces travaux ont été animés par des conférenciers avertis associant des universitaires de renom et des praticiens représentant l’ensemble des forces de sécurité engagées à travers le monde dans la lutte contre le crime organisé. Toutes les organisations et les diverses instances internationales concernées par ces questions étaient également présentes et représentées au plus haut niveau. Ce colloque a été l’occasion de dresser, avec lucidité, l’état des enjeux de la lutte contre le crime organisé et d’identifier les principales causes rendant son éradication difficile. Il a aussi et surtout permis de faire connaître un certain nombre d’expériences prometteuses et de pistes à suivre par les acteurs publics. Le contenu de ces interventions est versé in extenso dans le présent ouvrage. Chacune d’entre elles est suivie d’une synthèse rédigée dans les autres langues officielles de ce symposium. La France a été honorée d’avoir été choisie par le comité directeur d’Intercenter pour organiser ce XVIIIe Cours. Le ministre de l’Intérieur lui-même a tenu à inaugurer cette opération de prestige international pour les forces françaises de sécurité. Allocution de la cérémonie d’ouverture Jean-Louis Debré, ministre français de l’IntérieurAllocution de la céromonie d’ouverture La lutte contre la criminalité organisée constitue une préoccupation sociale majeure, parce qu’elle menace l’équilibre de nos démocraties. Cette lutte est une nécessité. L’ampleur du phénomène exige de la part des États, réflexions et efforts permanents, dans le respect des droits et des libertés fondamentales des personnes. Le phénomène mafieux, pour utiliser un terme d’ordre générique, se manifeste comme un ensemble d’organisations criminelles structurées qui s’infiltrent dans l’économie légale d’un pays, dans les services publics comme dans les entreprises privées. Par ce biais, le phénomène mafieux tend à créer une sorte de culture visant à l’assujetissement et au contrôle des populations. Il se caractérise par une activité criminelle intense et organisée, une pluralité d’auteurs, un caractère transnational et le recours systématique à des méthodes telles que la menace physique, le racket, l’enlèvement et le réglement de compte. Ce phénomène ancien aux États-Unis, au Canada, en Europe et en Asie reste actuel dans ces pays mais s’est récemment développé en Russie et en Océanie, témoignant de la vivacité du phénomène mafieux. Son développement, son intensité, sa dangerosité exigent nécessairement des États une réaction qui doit être considérée comme une priorité. Parce qu’il s’agit d’une criminalité qui ignore depuis longtemps l’existence des frontières, seule une coopération active entre les États permettra de lutter efficacement contre elle. Au-delà de la vision traditionnelle que l’on pouvait avoir de la mafia organisée autour de grandes familles, le phénomène mafieux a connu des évolutions tant en termes d’implantations qu’en termes de structures. Les organisations criminelles traditionnelles (italienne, japonaise, chinoise) se sont étendues à l’Amérique du Nord et du Sud et pénètrent actuellement d’autres zones dont l’Europe de l’Est. Pour les pays qui, comme la France, ne connaissent pas ce type d’organisations, certains trafics internationaux doivent cependant être appréhendés comme des phénomènes de caractère mafieux. Il en est ainsi du trafic international de stupéfiants et du blanchiment de l’argent. Organisés parfois par des mafias étrangères, ces trafics, en raison des méthodes mises en œuvre, de l’origine des capitaux utilisés et de l’importance des profits en résultant, sont proches de la criminalité mafieuse. Ils peuvent constituer des «.têtes-de-pont.» pour des organisations internationales, voire susciter des économies parallèles et souterraines propices à de tels développements. Il importe donc, pour prévenir cette évolution, de prendre en compte, outre les organisations mafieuses proprement dites, ses principaux vecteurs que sont le trafic de stupéfiants et le blanchiment de l’argent. Les problèmes particuliers liés à la lutte contre la criminalité organisée internationale rendent également nécessaire un renforcement permanent et une intensification des efforts aussi bien dans le cadre de la coopération judiciaire que policière et douanière. Ce sont les spécificités de cette criminalité organisée par rapport à la criminalité courante qui peuvent expliquer son développement considérable. Quelles en sont les caractéristiques.? 1) Une activité criminelle systématisée qui se manifeste par l’évasion fiscale, l’extorsion de fonds, les jeux clandestins, les contrebandes et fraudes en tout genre, les contrefaçons, les contrôles d’adjudications publiques. 2) Une implantation internationale fréquente lui permettant de s’intéresser où qu’elle se trouve à toutes les formes de criminalité rentable. Implantation qui facilite les possibilités de fuite et les obstacles aux poursuites. 3) Des méthodes modernes de gestion par le recrutement d’experts et spécialistes en fiscalité, en finance, en droit, en informatique, afin d’être en mesure de traiter les affaires au plus haut niveau sans oublier le recours permanent aux méthodes expéditives de la violence et de l’intimidation garantissant le secret et la loi du silence. 4) Des profits considérables qui donnent à ces organisations une telle surface financière qu’il devient difficile de mettre à jour les activités de blanchiment par des sociétés, la plupart du temps intégrées au tissu économique. La France ne subit pas l’implantation de groupes structurés de type mafia, yakusas, ou triades chinoises qui reposent sur un mode d’organisation bien particulier : – un enracinement sociologique traditionnel.; – une structure hiérarchique.; – un intérêt collectif.; – une dimension économique, voire une stratégie politique. En revanche, la France est utilisée comme base de repli ou pays de transit, notamment dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur. Ce phénomène ne doit pas être confondu avec le banditisme classique parfois régional même si certaines de ses manifestations peuvent faire penser à la criminalité organisée. La libre circulation des personnes et le développement des réseaux de transmission des données ont favorisé la pénétration sur notre territoire de Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 10 criminels venant de l’étranger, pour y investir ou y créer des réseaux de contacts utiles à leur activité. En France, le ministère de l’Intérieur disposait déjà de moyens éprouvés alliant notamment renseignement policier et répression pénale. Je citerai pour mémoire, la création d’un Office Central pour la Répression de la Grande Délinquance Financière destiné à lutter contre le blanchiment d’argent. Face à l’apparition de ces phénomènes nouveaux très internationalisés, notre pays a également développé un système de ripostes plus spécialisées. Nous sommes ainsi depuis plus de vingt ans membre avec les ÉtatsUnis, le Canada, l’Italie, du comité chargé de suivre le trafic de stupéfiants et des capitaux. Nous avons mis en place, dans de nombreux pays et en accord avec eux, des officiers de liaison spécialisés dans la lutte contre le trafic de stupéfiants. D’autres officiers de liaison couvrant des secteurs différents mais complémentaires ont également été installés souvent dans les mêmes pays. Depuis 1992, pour répondre à la menace d’une pénétration mafieuse en France et afin de coordonner l’ensemble des services impliqués dans la lutte contre le crime organisé, a été créée l’Unité de coordination et de recherches anti-mafias (UCRAM), à vocation interministérielle. L’Italie nous avait montré la voie dans ce domaine. D’évidence, cette lutte contre la criminalité organisée ne peut plus être menée localement dans chaque pays. Elle exige des forces de police une spécialisation renforcée et l’extension de la coopération internationale grâce à des structures et des organisations permanentes. Ceci ne signifie pas toujours mondialisation de la coopération. Face aux réseaux régionaux des organisations criminelles qui couvrent parfois tout un continent, il convient de développer une riposte géographiquement adaptée au moyen d’une coopération multilatérale, régionale dans les domaines judiciaires et policiers, des instruments de coopération policière et judiciaire régionalement compétents. Ces deux niveaux de riposte existent d’ores et déjà sur le plan mondial au travers d’institutions telles que : – le Programme des Nations-unies pour le contrôle international des drogues (PNUCID).; – la Commission des Nations-Unies pour la prévention du crime et la justice pénale.; – l’Organisation internationale de police criminelle Interpol (OIPC) et l’Organisation mondiale des douanes (OMD) qui, toujours à l’échelle planétaire, constituent un support à la coopération opérationnelle entre les États. La volonté politique de faire face à cette menace s’est manifestée au sein du G7 lors du sommet d’Halifax par la constitution d’un groupe d’experts de haut niveau sur la criminalité transnationale organisée. Il en est résulté 40 recommandations pratiques et opérationnelles que les chefs d’État et de gouvernement ont adoptées en juin dernier à Lyon. Allocution de la céromonie d’ouverture 11 Ce même sommet du G7-P8 a également décidé de placer ce groupe d’experts auprès de l’OIPC Interpol sous le nom de groupe de Lyon. À l’instar de ce qui est fait au sein des Nations-Unies ou du G7-P8, la France conduit également à l’échelon régional une action européenne spécifique contre la criminalité organisée. Celle-ci reste diversifiée et concerne : – l’Union Européenne.; – les Pays de l’Europe centrale et orientale (PECO).; – la zone Caraïbes où la France est présente par ses départements des Antilles, ce qui est aussi le cas de l’Amérique du Sud avec le département de Guyane. Cette présence géographique particulière conduit également notre pays à participer au dialogue transatlantique. L’une des plus récentes manifestations de la volonté d’une coopération opérationnelle au niveau européen contre le crime organisé s’est traduite à l’occasion de la présidence française de l’Union européenne, par la conclusion de la Convention Europol instituant un office européen de police criminelle. Europol développera ainsi la coopération déjà entreprise depuis janvier 1994 à douze puis à quinze par l’Unité Drogues installée à La Haye. Jusqu’à présent, la phénomène mafieux n’est pas parvenu à s’enraciner mais la menace existe notamment au travers du trafic de stupéfiants et des activités de blanchiment. Nous devons être attentifs aussi à l’argent trop rapidement gagné, en dehors de tout contrôle, par un ou plusieurs clans ou familles grâce à des opérations d’investissement d’apparence légale. Au fil des années, la distinction traditionnelle entre banditisme et délinquance financière s’est estompée. C’est une évolution irréversible car les profits retirés d’activités criminelles classiques sont parfois d’une telle ampleur (trafics de stupéfiants,...) qu’ils ne peuvent être réutilisés sans trop de risques qu’après avoir été blanchis. Parce que ces investissements ont une façade légale, parce que les mécanismes financiers sont extrêmement complexes, parce que les réseaux s’étendent sur plusieurs pays et que les moyens juridiques pour établir la fraude sont difficiles à mettre en œuvre, il est malaisé de prouver le caractère illicite de la provenance de l’argent. Seule une coopération étroite entre les pays concernés permettrait de remonter jusqu’à l’origine des capitaux investis. Enfin, nous assistons à une évolution et à une mutation du crime organisé, qui se traduit par l’émergence de nouvelles activités criminelles de profits : détournements d’aide humanitaire, fraudes aux subventions européennes, ventes de technologies nucléaires, etc. Il est utile de renforcer l’action commune contre la criminalité organisée internationale, en développant les échanges d’information et en harmonisant les mécanismes de répression. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 12 Cela suppose de tenir compte également de la vulnérabilité des pays d’Europe centrale et orientale à l’égard de ce phénomène, en raison des transitions économiques et politiques qui y sont en cours. La coopération internationale implique aussi une véritable solidarité avec les États qui, en raison de leur situation géographique, économique et politique, sont les plus fragiles face aux organisations criminelles internationales. C’est pourquoi nous devons aussi les aider à concevoir leurs lois, à construire leurs administrations et à former leurs cadres. Les organisations criminelles internationales constituent une menace grandissante pour la sécurité de nos États. Elles affaiblissent les nouvelles démocraties partout dans le monde, elles ruinent l’intégrité des systèmes financiers et nourrissent la corruption. Lutter contre les organisations criminelles internationales c’est œuvrer pour des systèmes économiques justes, c’est vouloir des citoyens libres et en définitive, c’est défendre la démocratie. Allocution de la céromonie d’ouverture 13 Summary Official opening Jean-Louis Debré The fight against organised crime is a major concern for the reason that it threatens the very foundations of our democratic states. Its violence and level of risk do call for attention and require permanent efforts in the respect of basic rights and freedoms of the people. The main characteristics of this type of crime are: systematic criminal activities, most frequently an international network or support, the implementation of modern management techniques generating huge profits. The main power lines of those activities are drug trafficking and money laundering. The situation of today France is not on line with the most targeted countries like Italy, Japan or the USA The country is nevertheless a back stage area and a transit zone (this is particularly true for the south-east provinces). A effective fighting plan against organised crime and Mafia type organisations implies first the creation of specialised central services. France made those steps in the nineties with the creation of the Central major frauds and money laundering unit (OCRGDF) and the Central anti-Mafia intelligence and co-ordination unit (UCRAM). It proves then necessary to strengthen both the bi-lateral lines of communication (liaison officers) and the multilateral international police co-operation structures. For that reason the G7 Halifax summit charged a group of experts with the study of transnational organised crime. As it is housed by the ICPO general secretariat, this is called the Lyon group. France also has a specific European regional policy against organised crime. This concerns the European Union, the Central European and Eastern European countries (PECO) and even the Caribbean regional sector. Moreover, the Europol convention which created a European criminal police agency was confirmed under French presidency. This co-operation proves to be a prime tool in the fight against the financial resources of organised crime. To fight against international criminal organisations is contributing to right and proper economic systems, is preserving the freedom of individuals and is fighting for democratic rule. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 14 Resumen Alocución de la ceremonia de apertura Jean-Louis Debré La lucha contra la criminalidad organizada constituye una preoccupación mayor porque amenaza el equilibrio de nuestras democracias. Su intensidad y su peligrosidad requieren hoy reflexiones y esfuerzos permanentes en el respeto de los derechos y libertades fundamentales de las personas. Las características esenciales de esta criminalidad son : una actividad criminal sistematizada, una implantación internacional frecuente, métodos modernos de gestión y provechos considerables. Los principales vectores de estas actividades son el tráfico de estupefacientes y el blanqueo de dinero. Actualmente, la situación de Francia no se puede comparar con la de países más expuestos como ltalia, Japón o Estados Unidos. Sin embargo resulta una base de repliegue, un pais de tránsito (región Provence – Alpes – Côte d’Azur principalmente). Una lucha eficaz contra el fenómeno mafioso supone en primer lugar la instalación de servicios nacionales especializados. Francia se metió en esta vía durante los años 90 con la creación de OCRGDF y UCRAM. Luego es conveniente reforzar los medios bilaterales (intercambio de oficiales de enlace) y multilaterales de cooperación policial internacional. Así durante la cumbre de Halifax, el G7 constituyó un grupo de expertos sobre la criminalidad transnacional organizada ubicada en OIPC-Interpol (Grupo de Lyon). Francia conduce también al nivel regional una acción europea específica contra la criminalidad organizada, dentro de la Unión europea, con los Países de Europa Central y Oriental (PECO) o en la zona Caribe. Por otro lado, el convenio Europol que instituye un oficio europeo de policía criminal se concluyó durante la presidencia francesa. Esta cooperación se revela como el instrumento indispensable para una lucha eficaz contra el dinero del crimen organizado. Luchar contra las organizaciones criminales internacionales, es laborar par sistemas económicos justos, es querer ciudadanos libres y finalmente, es defender la democracia. Allocution de la céromonie d’ouverture 15 Intercenter Claudio Zanghi, président d’IntercenterIntercenter M. Zanghi, président d’Intercenter, a rappelé que ce centre a été créé en 1978, à Messine en Italie. Etant une organisation non gouvernementale, ce centre international, qui étudie les problèmes de droit pénal et sociologiques, peut agir sans contrainte étatique ni politique. La préoccupation majeure du «.Cours International.» a été de concevoir son action, dans le respect des droits de l’homme. C’est un cours de spécialisation ouvert à tous les pays du monde. Intercenter 17 Intercenter Claudio Zanghi M. Zangui, chairman of Intercenter reminded the members that this centre was created in 1978 in Messina in Italy. This international centre studies criminal Law and sociological problems and is in a position to work outside of any state or political pressure as it is a non governmental organisation. The main concern of the “International Course” was to round up its action within the respect of human rights. It is a specialisation course open to all the countries in the world. Intercenter Claudio Zanghi El señor Zanghi, Presidente de Intercenter, recordó que este centro ha sido creado en 1978, en Mesina en Italia. Este centro internacional, que es una organización no gubernamental, y que estudia los poblemas de derecho penal y sociológicos, puede actuar sin molestia estatal ni política. La preocupación mayor del «.Curso International.» fue concebir su acción, en el respeto de los derechos del hombre. Es un curso de especialización abierto a todos los países del mundo. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 18 Présentation générale du XVIIIe Cours de haute spécialisation pour les forces de police Marcel Leclerc, préfet, directeur de l’IHESI, président du Comitée d’organisation du XVIIIe Cours générale du XVIII Cours de haute spécialisation pour les Présentation forces de police Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, Il m’est à nouveau très agréable d’avoir pour mission de vous présenter le XVIIIe Cours international de haute spécialisation pour les forces de police. J’avais déjà eu cet honneur en 1994, en ma qualité de Préfet délégué pour la sécurité à Lyon, à l’occasion du XVIe Cours dont les travaux avaient été consacrés à la gestion des crises de sécurité publique. Cet intérêt de la France pour cette manifestation s’inscrit dans une longue tradition puisqu’en 1987 déjà, notre pays avait accueilli une session régionale ouverte aux pays de la communauté européenne et aux pays africains francophones. Je tiens tout d’abord, après Monsieur le ministre de l’Intérieur et Monsieur le président Zanghi, à vous remercier pour votre participation aussi importante à ce colloque international. La présence de 80 pays constitue un record absolu dans les annales du Cours et représente la plus belle des récompenses pour mes collaborateurs et moi-même qui avons œuvré une année durant pour préparer ce congrès. Ce niveau de participation souligne l’étonnante intuition qu’avaient eue les pères fondateurs d’Intercenter en prenant en 1978 l’initiative de réunir la communauté policière internationale pour l’inviter à réfléchir sur les problèmes essentiels de la sécurité et l’amélioration des moyens d’action. Cela me donne l’occasion de saluer publiquement le président Zanghi et mes amis Giacomo Barletta et Edouard Janssens avec lesquels j’entretiens des relations chaleureuses et confiantes depuis cette époque. Cette fois encore leur expérience et leurs conseils nous ont été profitables. Chers congressistes, vous êtes ici à Paris au cœur de la capitale française qui est heureuse et fière de vous accueillir. Cette ville chargée d’histoire a été le siège d’une multitude d’événements qui, très souvent, n’étaient pas sans lien avec les problèmes de sécurité. Il n’est d’ailleurs pas surprenant que ce soit à Paris qu’André Bertillon ait jeté les premiers fondements de l’anthropométrie criminelle moderne qui, avec la dactyloscopie développée par son confrère Galton, a révolutionné en son temps la science du crime. Je vous indique aussi que dans ce centre des congrès internationaux que le ministre des Affaires étrangères a eu l’obligeance de mettre à notre disposition, dans l’enceinte même où vous vous trouvez en ce moment, se sont déroulées des rencontres historiques telles que : – la conférence pour la paix au Vietnam de 1968 à 1973.; – la conférence Nord-Sud en 1975 et 1976.; – la conférence des chefs d’États de France et d’Afrique en 1978 et 1981.; – le Conseil de l’OTAN en 1983.; – la réunion de l’Union de l’Europe occidentale en 1984.; – la conférence ministérielle des pays producteurs et consommateurs de pétrole en 1991. Je ne doute pas que l’esprit et la volonté d’aboutir qui ont imprégné ces précédents historiques vont également souffler sur notre réunion pour lui donner un contenu marquant. Mais avant d’en venir au déroulement même de ces huit journées, je souhaiterais m’attarder quelques instants sur les raisons qui ont présidé au choix du thème retenu. Choix et signification du thème central du XVIIIe Cours Pour en comprendre la genèse, il faut remonter à l’automne dernier. C’est Jean-Louis Debré, lui-même qui a souhaité, en sa qualité de ministre de l’Intérieur et en tant qu’ancien magistrat, que des praticiens et des experts internationaux se réunissent pour faire l’état des menaces représentées par les différentes formes de la criminalité organisée et pour dégager des voies susceptibles de mieux ajuster la riposte. Présentée par mes soins à Taormine, à l’occasion de la clôture du XVIIe Cours, cette proposition a reçu l’agrément de l’assemblée générale d’Intercenter. Qu’il me soit permis d’insister quelques instants sur le libellé adopté pour la problématique centrale du XVIIIe Cours, à savoir «.L’évolution de la criminalité organisée.». Chacun de ces termes a en effet largement guidé le choix des conférences et la désignation des intervenants. Pour nous, professionnels de la sécurité, l’étude de la criminalité organisée n’est pas un phénomène récent. On pourrait même dire qu’elle a justifié la création d’une institution telle qu’Interpol il y a plus de 70 ans. Depuis plusieurs années, elle a, en outre, servi de thème à de nombreux colloques internationaux. Elle focalise les discussions des diverses enceintes de coopération policière internationale et de nombreux congrès lui ont été consacrés, de sorte qu’on pourrait être tenté de penser que tout a déjà été dit en ce domaine. Ce serait méconnaître gravement la réalité que d’imaginer le crime organisé comme un phénomène figé. Il est au contraire éminemment évolutif et ceci explique d’ailleurs pour une large part sa difficile éradication. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 20 Les organisations criminelles transnationales sont constamment à la recherche de nouveaux vecteurs illicites lucratifs et de nouveaux modes opératoires toujours plus efficaces. C’est à cette formidable capacité d’innovation et d’adaptation aux ripostes les plus diverses, que nous allons consacrer l’essentiel de nos propos au cours de ces huit journées de travail. À titre liminaire, je tiens à souligner les deux axes principaux qui ont présidé à la programmation du XVIIIe cours. L’internationalisme tout d’abord. Le crime organisé est, par essence, un phénomène transnational qui ignore les frontières. Chacun de nos pays peut donc être considéré comme partie prenante dans le bras de fer qui nous oppose au crime organisé. Certains abritent sur leur territoire, contre leur gré, des organisations puissantes en mesure de faire vaciller sur le plan économique et social les autorités étatiques en place. D’autres ne sont que des pays de repli, des lieux de transit ou encore des sites de placement financier pour ces mannes imposantes issues des trafics en tout genre. Les règles de fonctionnement de ces sociétés du crime tendent de plus en plus à être calquées sur celles des firmes multinationales auxquelles elles empruntent leur logique économique. Aussi, toute activité, licite ou illicite, mérite-t-elle d’être investie par leurs agents dès lors qu’elle représente une rentabilité certaine. Ce phénomène d’internationalisation a donc justifié le choix des conférenciers qui, en provenance des cinq continents, représentent d’un côté la panoplie des services de sécurité impliqués dans la lutte contre ce fléau criminel, de l’autre l’éventail des réflexions les plus pertinentes qui ont été développées sur ces sujets. Il explique également que de nombreuses interventions seront consacrées à la coopération policière internationale. Faute, en effet de disposer d’un véritable droit pénal international intégré, celle-ci reste encore le meilleur moyen d’opérer pour neutraliser à grande échelle de telles organisations. Il sous-tend enfin le choix des thématiques abordées qui, par leur transversalité, intéressent chacun d’entre nous. Je constate que l’objectif de mobilisation recherché est en marche, si j’en juge par le nombre des délégations présentes dans cette salle qui représentent près de la moitié des nations de la planète. La recherche de l’interactivité est la seconde dominante de ce programme. Le comité d’organisation désire, en effet, vous donner le plus possible la parole. À cette fin, la quasi totalité des interventions en assemblée plénière laisseront place à un temps de débat que je souhaite le plus fructueux possible. La traduction simultanée en quatre langues est de nature à faciliter cette prise de parole. De plus, et comme il est de tradition pour ce Cours, il y aura des travaux en groupes ayant trait à certains aspects actuels de l’activité criminelle organisée, tels que : – le proxénétisme international.; – le tourisme sexuel, et les trafics d’enfants.; – l’immigration clandestine. Présentation générale du XVIIIe Cours de haute spécialisation pour les forces de police 21 Structures et déroulement du XVIIIe Cours Il me faut maintenant en venir au déroulement du congrès. Sa thématique centrale a été déclinée en quatre thèmes généraux d’inégale importance mais servant de fil conducteur à la programmation des travaux. Présentation du concept de criminalité organisée Le premier sujet de réflexion concerne la définition même de la criminalité organisée. Force est de constater, en effet, que cette matière est sujette à un important paradoxe. Alors qu’il existe un éventail très large de vocables sociaux pour la désigner, les praticiens se heurtent à une véritable sécheresse juridique pour la qualifier. Les pays anglo-saxons utilisent volontiers le concept d’«.organized crime.». Les auteurs de cette terminologie éprouvent cependant des difficultés à lui donner un contenu consensuel précis et à trouver la césure exacte avec l’activité des gangs. Ils insistent tous sur la nécessité d’appréhender ledit phénomène dans sa globalité, à l’instar d’une véritable entreprise. Aussi, me contenterais-je de livrer à votre sagacité une définition particulièrement topique de cet état d’esprit nord-américain. Pour le criminologue américain Howard Abadinski, «.le crime organisé est une entreprise non idéologique impliquant un certain nombre de personnes dans des rapports sociaux fermés, organisés sur une base hiérarchique avec au moins trois niveaux ayant pour finalité de s’assurer des profits en s’engageant dans des activités légales ou illégales.» (in «.Organized Crime.», 3e édition, p. 5). Les pays européens, et l’Italie en particulier, lui préfèrent le terme générique de mafia. L’appellation précise dépend de l’origine géographique du groupe mafieux. Chacun d’entre eux a son histoire, ses structures et ses modes de fonctionnement propres. Leur point commun est cependant un fort enracinement socioculturel car comme l’affirmait le célèbre juge Giovani Falcone assassiné à Palerme avec son épouse en 1992 : «.la mafia n’est pas un cancer né par hasard sur un tissu sain.» (in Causa nostra). Elle puise ses origines dans un contexte socio-économique défavorisé et, surtout, elle prend appui sur une structure familiale à laquelle sont systématiquement rattachés «.les hommes d’honneur.». En Asie du Sud-Est, les organisations criminelles sont davantage identifiées par leur origine nationale que par leurs activités illégales. On parle ainsi des triades chinoises ou des boryokudan japonais. N’oublions pas non plus la terminologie des cartels ayant cours en Amérique latine et centrale pour désigner des structures criminelles agissant essentiellement dans les trafics de stupéfiants et dans le blanchiment de l’argent en résultant. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 22 Devant une telle diversité d’appellations et de contenus, il n’est pas étonnant que les différentes instances internationales ne soient pas encore parvenues à élaborer une définition unique du crime organisé. Dans le souci d’apporter notre contribution à cet important mouvement de conceptualisation, nous consacrerons la première journée de nos travaux à cerner la notion de crime organisé au moyen d’une approche pluridisciplinaire. Ce n’est jamais chose facile que d’ouvrir les débats d’un colloque international. J’ai donc confié cette délicate mission à M. Hervé Bolot, conseiller diplomatique du ministre de l’Intérieur qui, en diplomate averti, se livrera devant vous à un essai de géopolitique de la criminalité organisée. Cette vision planétaire du phénomène devrait permettre d’ouvrir largement le champ de la discussion. Nous avons ensuite fait appel à deux universitaires de renom international pour vous présenter une approche criminologique empirique et une approche sociologique du crime organisé. Ces conférences seront respectivement assurées par M. Cyrille Fijnaut, professeur de criminologie à l’Université catholique de Louvain (Belgique) et par M. Michael Levi, son confrère de l’Université de Cardiff (Pays de Galles). M. Michel De Salvia sera le premier d’une longue série d’intervenants représentant les instances internationales impliquées dans une meilleure appréhension de ce phénomène. En tant que secrétaire général adjoint de la commission européenne des droits de l’homme du Conseil de l’Europe, il nous présentera, en juriste qualifié, les dimensions juridiques de la criminalité organisée. Celle-ci génère, en effet, de multiples difficultés d’application des textes répressifs tant du point de vue du fond que de la procédure. Elle impose, en outre, un nécessaire encadrement juridique des activités des services répressifs chargés de la combattre. Nous terminerons cette première journée par une approche policière de la criminalité organisée que M. Bernard Gravet, directeur central de la police judiciaire française, m’a fait l’amitié de prendre à sa charge. Les nouvelles formes de la criminalité organisée La journée de demain sera dévolue au second thème majeur du XVIIIe cours, à savoir : «.nouvelles formes de la criminalité organisée.». Cette nouveauté est relative en fonction du secteur criminel concerné. Il n’échappe pas cependant aux observateurs avisés que les structures criminelles transnationales investissent sans cesse des secteurs d’activités plus ou moins récents mais toujours renouvelés. Il ne saurait être question de consacrer un symposium au crime organisé en éludant le sujet des trafics illicites de stupéfiants. L’actualité nous conduit à constater que les itinéraires empruntés se diversifient tout autant que la gamme des produits psychotropes proposés aux consommateurs. Le commissaire divisionnaire Gilles Leclair, chef de l’Office central de répression du trafic illicite des stupéfiants, nous exposera ces nouvelles voies Présentation générale du XVIIIe Cours de haute spécialisation pour les forces de police 23 du trafic qui viennent de conduire son service à procéder à la saisie record, à Rouen, de 20 tonnes d’herbe de cannabis, qui était dissimulée dans un conteneur expédié depuis la Colombie. Phénomène encore plus préoccupant pour la sécurité de nos concitoyens, il semble que le crime organisé soit aujourd’hui en passe de s’impliquer dans des trafics d’armes et les trafics de matières radioactives. L’effondrement des États membres du Pacte de Varsovie a conduit à la déshérence de certains potentiels d’armements de destruction massive. Il peut dès lors être tentant pour des organisations criminelles, soit de les acquérir, soit de servir d’intermédiaire pour les proposer au plus offrant. Il incombe à la «.division garanties.» de l’Agence internationale de l’énergie atomique à Vienne de suivre avec précision le devenir de ces armements. Nous bénéficierons de l’expertise de l’un de ses responsables, en la personne de M. Svein Thorstensen, assistant du directeur général de cette division. Ce même esprit de lucre explique également pourquoi les organisations criminelles participent activement à l’alimentation du marché parallèle des œuvres d’art. Le Conseil international des musées (ICOM), organisation non gouvernementale rattachée à l’Unesco, compte parmi les principales instances dénonçant ce pillage systématique et cette mise en péril du patrimoine artistique mondial. Mme Elisabeth Des Portes, son secrétaire général, viendra nous présenter l’arsenal des mesures préventives et dissuasives que les professionnels ont mis au point pour contrecarrer ce commerce illicite. La dernière partie de la journée s’intéressera aux mafias nouvelles par leurs formes ou leurs activités. Nous oscillerons en ce domaine entre actualité et tradition. Actualité dans la mesure où la décennie quatre-vingt-dix correspond à l’émergence des mafias dans les pays de l’ex-CEI. L’émancipation de la mafia russe est à cet égard riche d’enseignements. Elle constitue une réelle source de préoccupation au niveau international, tant par la violence de ses méthodes que par sa capacité à exporter ses activités en Europe et en Asie. M. Serguei Avdienko, officier de liaison de la république de Russie, détaché à l’OIPC-Interpol, viendra nous faire le point sur ces nouveaux phénomènes. Tradition enfin, dans la mesure où M. Katsushi Ikeda, sous-directeur de la deuxième division de l’agence de police nationale japonaise, nous fera un exposé sur les activités actuelles des boryokudan japonais. Qu’il me soit permis de souligner le caractère assez exceptionnel d’une telle conférence dans une enceinte internationale. Hormis la légende selon laquelle les yakusas puiseraient leurs origines chez les samouraïs et se soumettraient au rite de l’auto-ablation des phalanges en cas de manquement au code de l’honneur, l’organisation, le fonctionnement et les moyens des boryokudan restent encore peu connus. Je remercie donc tout particulièrement M. Ikeda, d’avoir accepté, en qualité d’expert, de lever pour nous le voile de l’ignorance sur un groupe mafieux dont la nocivité sociale est sans nul doute comparable à celle des triades. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 24 Les nouveaux enjeux de la lutte contre la criminalité organisée Les développements actuels du crime organisé entraînent un certain nombre de risques de distribution, même pour les États les mieux établis et ceux-ci doivent concevoir les ripostes en termes d’enjeu, qui, comme nous le verrons, revêtent différents aspects. À partir du jeudi 19 septembre, nous consacrerons donc une journée et demie à l’étude de ces enjeux qui nous ont paru correspondre à cinq grandes catégories de préoccupations. L’enjeu de sécurité des populations tout d’abord. Dans le prolongement de la conférence sur les trafics d’armements nucléaires, nous donnerons la parole au Chief Superintendent Alan Brown, directeur adjoint du groupe «.crime organisé.» de Scotland Yard. Il s’agira, pour lui, d’évaluer quelles sont les interconnexions supposées ou avérées entre les organisations criminelles et les mouvements terroristes. Indiscutablement, en effet, la multiplication des «.zones grises.» sur notre planète a favorisé la confusion des genres et engendré le mélange terrorisme-banditisme qui est au cœur du phénomène que certains ont baptisé «.guérillas dégénérées.». Autre variante de cette menace : le trafic des êtres humains. Selon un récent rapport des Nations Unies que je cite : «.L’un des développements les plus graves de la criminalité transnationale est l’augmentation de la contrebande des personnes. Celle-ci revêt plusieurs dimensions, la plus importante étant le trafic d’immigrants illégaux. Selon une estimation bien fondée, les organisations criminelles s’efforcent actuellement de transférer illégalement un million de personnes par an des pays pauvres vers les pays plus riches. Non seulement ce trafic représente une menace pour la souveraineté nationale, mais de plus il expose les immigrants eux-mêmes à de graves dangers.» (rapport Conseil économique et social du 18/08/1994 69 p. 21). Cette implication sans cesse croissante du crime organisé dans les trafics d’êtres humains donne lieu à des comportements inacceptables du point de vue de la défense de la dignité humaine. La lutte contre le crime organisé prend de ce fait une dimension à la fois sociale et philosophique. C’est la raison pour laquelle, nous avons souhaité consacrer nos travaux de groupes aux trafics d’êtres humains. Pour introduire efficacement ces réflexions, nous avons fait appel à Mme Wassyla Tamzali. En qualité de chef de l’unité de coordination des activités relatives aux femmes pour le compte de l’Unesco, Mme Tamzali bénéficie d’une expertise avertie dont elle nous fera part en ce qui concerne les trafics de prostitution internationale. Cette thématique générale des trafics d’êtres humains sera déclinée en sous-thèmes (proxénétisme international, tourisme sexuel et trafic d’enfants, immigration clandestine). Chacun des huit groupes de travail abordera l’une de ces problématiques. Présentation générale du XVIIIe Cours de haute spécialisation pour les forces de police 25 Vous trouverez dans la mallette qui vous a été remise la répartition des groupes de travail. Je vous indique que cette répartition a été élaborée sur la base d’affinités linguistiques puisque ces travaux de groupe ne bénéficieront pas d’interprétariat. Dans chacun de ces sous-groupes de travail, il sera procédé à la désignation d’un rapporteur. Ce dernier sera chargé de faire, en fin de congrès, un rapide compte rendu des discussions qui auront eu lieu au sein de son groupe et des conclusions qui peuvent en être tirées. Comme vous avez pu le noter, la programmation de ces ateliers est réalisée en alternance avec la table ronde sur la coopération internationale. Nous aborderons ensuite l’enjeu professionnel puisque le développement du crime organisé renvoie les praticiens à leur capacité à travailler ensemble et à coopérer afin de démanteler des structures mafieuses d’envergure internationale. L’activité des structures de coopération policière internationale sera au cœur d’une table ronde-débat avec la salle. Cette table ronde sera organisée en deux sessions, une le matin et l’autre l’après-midi. Comme je viens de le préciser, ces sessions seront suivies par la moitié des congressistes en alternance avec les travaux de groupes. Nous aurons le privilège de bénéficier de la participation à ces tables rondes, de deux personnalités de stature internationale, en la présence de M. Raymond Kendall, secrétaire général d’OIPC-INTERPOL et de M. Jürgen Storbeck, actuel coordonnateur d’UDE-Europol. Pour les assister, nous avons fait appel à des spécialistes français de ces questions qui s’attacheront à nous présenter les travaux des autres enceintes de coopération, à l’instar de Schengen. Il s’agira pour la table ronde matinale du commissaire divisionnaire Jean-Louis Sabathier, conseiller technique au cabinet du directeur général de la police nationale française, et pour celle de l’après-midi de son collègue Gérard Seroussi, chef de la division des relations internationales à la direction centrale de la police judiciaire française. Deux personnalités italiennes participeront également en alternance à ce débat : – le préfet de police Maurizio Ludovici, directeur de la deuxième section de l’école supérieure de police de Rome.; – le général des carabiniers Arnaldo Grilli, qui a exercé d’importantes responsabilités en matière de lutte contre le terrorisme et la mafia. Nous aborderons, au cours de la matinée du 20 septembre, les deux autres enjeux actuels de la criminalité organisée : a) Compte tenu du mercantilisme qui inspire ces organisations criminelles et de la rentabilité avérée de certains des trafics illicites auxquels elles participent, nous ne saurions faire l’impasse sur l’enjeu économique du combat à livrer. Les experts estiment en effet le chiffre d’affaires annuel du crime organisé à quelques 500 milliards de dollars. Deux conférences complémentaires vous apporteront un peu de lisibilité sur les arcanes financières internationales empruntés par le crime organisé. Spécialiste de l’économie des guérillas, M. Jean-Christophe Rufin, directeur de Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 26 recherches à l’Institut des relations internationales, nous présentera les nouvelles stratégies économiques de la criminalité organisée. Il était difficile de prétendre accéder à la compréhension des circuits financiers et bancaires mondiaux sans avoir l’éclairage d’un praticien helvétique. Aussi suivrons-nous avec beaucoup d’intérêt la présentation des techniques de blanchiment de l’argent auxquelles ces organisations criminelles ont recours, par un magistrat rompu à ces mécanismes. Il s’agit de M. Félix Bäenziger, substitut du procureur de la Confédération helvétique. b) Nous clôturerons cette matinée avec la mise en relief de l’enjeu technologique. Le XXe siècle est, en effet, celui de la communication. Des progrès techniques substantiels ont été réalisés en ce domaine au cours des dix dernières années. Des moyens de communication comme la téléphonie, la télématique ou l’informatique nous permettent de procéder en temps réel à des échanges d’informations ou de marchandises aux quatre coins de la planète. Il était dès lors inévitable que le crime organisé, investisse ces vecteurs performants pour les utiliser à son profit. J’ai souhaité que deux conférenciers particulièrement informés des aspects de la révolution informatique nous présentent les formes actuelles et prévisibles d’implication de la criminalité organisée dans la délinquance informatique et, notamment le détournement à des fins criminelles du réseau Internet. Le premier, M. Philippe Rosé est un journaliste spécialisé dans ce domaine. Le second est un policier averti puisqu’il s’agit du commissaire Daniel Padoin, chef du service d’enquête sur les fraudes aux technologies de l’information à la police judiciaire de Paris. Pour chacun de ces enjeux, il conviendra d’exposer la parade appropriée. Nous consacrerons donc la quatrième et dernière partie de nos travaux à passer en revue les ripostes contemporaines efficaces qui sont mises en œuvre, sur le plan national et international, par les autorités chargées de la lutte contre la criminalité organisée. Les réponses contemporaines des pouvoirs publics à la criminalité organisée Sans prétendre à l’exhaustivité, nous ferons état de certaines expériences récentes porteuses d’espoirs quant aux résultats de cette véritable guerre livrée par la justice et les forces de sécurité. Nous avons mis en exergue trois grandes catégories d’expériences. Chacune fera l’objet d’une demi-journée de travail. En ce qui concerne les réponses policières, nous avons souhaité mettre l’accent sur deux orientations récentes de la lutte contre le crime organisé. Il faut savoir tout d’abord que les pouvoirs publics ont eux aussi entendu mettre la science et les technologies au service de l’enquête de police. L’expérience de l’analyse scientifique du crime et des enquêtes assistées par ordinateur, mise en œuvre par INTERPOL, nous en fournit une première Présentation générale du XVIIIe Cours de haute spécialisation pour les forces de police 27 illustration que M. Mario De Cocq, chef de l’unité d’analyse criminelle de l’OIPC, viendra nous exposer. En second lieu, les polices techniques et scientifiques du monde entier ont fait un effort considérable pour mettre au point des systèmes d’identification formelle et recevable en justice des auteurs d’infractions. Si des méthodes telles que l’identification génétique, vocale ou oculaire sont en plein développement, il n’en reste pas moins que l’empreinte dactyloscopique demeure un outil quotidien d’investigation judiciaire. Cet outil est de plus en plus performant grâce à l’informatisation. Le commissaire principal Eric Brendel, du service central de l’identité judiciaire français, nous présentera le fichier automatisé des empreintes digitales (FAED) en service à la direction centrale de la police judiciaire. Cette technique sophistiquée a notamment permis d’identifier les auteurs de la vague d’attentats commis en France durant l’été 1995. Les autorités policières cherchent également à éradiquer sur le plan international le phénomène du blanchiment de «.l’argent sale.» découlant d’activités illicites. Pour ce faire, les sept pays les plus industrialisés ont mis en place en 1990, le Groupe d’action financière internationale ou GAFI. Cet organisme a reçu pour mandat d’étudier les circuits financiers internationaux, d’y détecter les éventuelles prises de participation du crime organisé, d’en informer les États concernés et d’élaborer des dispositifs de veille afin de prévenir de tels agissements. M. Jean Spreutels, magistrat belge et représentant du royaume de Belgique au GAFI, nous fera part des résultats concrets les plus récents obtenus par ce dispositif. Par ailleurs, il s’avère que la coopération policière bilatérale ou multilatérale reste souvent le moyen de lutte le plus efficace contre le blanchiment. M. Paul Beaulieu, attaché de l’US CUSTOMS à l’ambassade des États-Unis à Paris, nous en fera la démonstration à la faveur de certaines affaires que son administration a eu à diligenter avec ses homologues étrangers. Après le court intermède du week-end, nous reprendrons nos travaux le lundi 23 septembre par la présentation en matinée des réponses judiciaires au crime organisé. Etant confrontés depuis de longues années aux agissements du crime organisé, il n’est pas surprenant que les USA et l’Italie aient su mettre en place un arsenal juridique et pénal achevé pour ce qui concerne le traitement de cette catégorie d’auteurs. Outre l’élaboration d’une législation dérogatoire du droit commun, ces pays se sont dotés de structures et de dispositifs propres à endiguer le crime organisé. Nous avons retenu trois de ces expériences les plus significatives : 1) La spécialisation des magistrats est sans nul doute une des raisons expliquant les succès rencontrés ces dernières années par les autorités italiennes dans la lutte sans merci qu’elles livrent à l’hydre mafieuse. Nous aurons l’honneur d’accueillir un de ces hauts magistrats en la personne de M. Bruno Siclari, procureur national anti-mafia, qui nous fera part de l’expérience du parquet national anti-mafia dans la République transalpine. 2) Plus encore que dans d’autres domaines, une lutte efficace contre le crime organisé suppose l’obtention d’informations précises et fiables sur son mode de fonctionnement et sur ses activités. Réussir à détecter et à recruter de tels informateurs implique en contrepartie l’obligation d’assurer leur sécurité. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 28 À cette fin, plusieurs pays ont mis en œuvre des programmes de protection des témoins pour ces procès sensibles. M. Eugène Coon, assistant du directeur pour la sécurité judiciaire de l’US Marshall Service, nous présentera le programme américain. 3) Enfin, mieux que des témoins indirects, il s’est agi ces dernières années de susciter, via des réductions substantielles de peines, des «.repentis.» chez les acteurs mêmes du crime organisé. Cette collaboration avec les services de police et de justice n’est pas sans poser de graves difficultés pour la gestion carcérale de ces «.traîtres.» aux yeux de l’organisation du crime. L’incarcération des responsables mafieux entraîne l’obligation pour les services pénitentiaires de faire preuve d’une vigilance extrême afin d’empêcher que ces détenus particuliers puissent continuer à gérer leurs activités criminelles de l’intérieur même de leur lieu de détention. Le docteur Salvatore Cianci, actuel procureur général de la Cour suprême de cassation italienne et ancien directeur de l’administration pénitentiaire, nous présentera dans le détail les modalités pratiques de la gestion pénitentiaire de la criminalité organisée. L’après-midi sera entièrement dévolue aux réponses internationales apportées au crime organisé à la faveur d’une double intervention spécifiquement consacrée à l’action des Nations Unies. M. Bernard Frahi, commissaire divisionnaire de la police française détaché à l’ONU à Vienne, traitera, lui, du Programme des Nations Unies pour le contrôle international des drogues (PNUCID). Chef de la section régionale pour l’Europe et le Moyen-Orient de cet organisme international, il nous fera part de la vulnérabilité des pays en transition face aux trafics de drogues internationaux. Nous laisserons ensuite la parole à M. Dimitris Vlassis, expert auprès de la commission pour la prévention du crime et pour la justice pénale du Conseil économique et social de l’ONU à Vienne. Comme vous le savez, les Nations Unies sont à l’origine d’un important mouvement de réflexion sur le concept de crime organisé et sur les modalités d’adoption d’une convention répressive internationale le concernant. L’organisme auquel appartient M. Vlassis a été l’initiateur de la conférence ministérielle mondiale tenue à Naples en novembre 1994, conférence dont il nous présentera les conclusions et les développements actuels. Synthèse et perspectives Après qu’il aura été procédé à la restitution des travaux de groupes et à l’examen de leurs propositions, je procéderai à la synthèse du XVIIIe cours. Avant de nous séparer, et comme il est de tradition, le congrès sera clos par M. le préfet Claude Guéant, directeur général de la police nationale française. Ce dernier animera, en compagnie de M. Edouard Janssens, viceprésident d’Intercenter, la cérémonie de remise des diplômes. *** Présentation générale du XVIIIe Cours de haute spécialisation pour les forces de police 29 Pour achever cette présentation je vous rappellerai que dans la conclusion de son ouvrage consacré à la criminalité internationale, André Bossard, alors secrétaire général d’OIPC-Interpol, s’interrogeait sur le point de savoir si en définitive elle ne constituait pas «.le reflet malsain du monde dans lequel nous vivons.» (in La criminalité internationale, «.Que sais-je.», PUF 1991). Il est possible que les travaux qui vont nous occuper cette semaine nous conduisent à confirmer cette appréciation. Quoiqu’il en soit, il ne saurait cependant être question pour les forces de sécurité de se laisser aller à la résignation et au renoncement. «.Accepter une défaite, c’est déjà être vaincu.» affirmait péremptoirement le maréchal Foch, généralissime des forces alliées durant le premier conflit mondial. Si le crime organisé entend livrer à notre ordre social une véritable guerre, nous devons chercher à mieux cerner l’adversaire et à parfaire une stratégie d’ensemble de nature à éradiquer les racines du mal. Comme vous l’a dit M. Jean-Louis Debré, la France souhaite que le XVIIIe Cours international de haute spécialisation pour les forces de police participe activement à l’élaboration de cette stratégie. Je suis conscient que ce n’est pas chose aisée et qu’il nous faudra du courage et de la pugnacité. Nous savons tous cependant que les batailles perdues d’avance sont celles qu’on ne livre pas. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 30 Summary General presentation of the Marcel Leclerc XVIIIth course The 18th police advanced specialisation course was oriented toward the changes in organised crime. Its subject study had been determined in the fall of 1995 following a proposal made by the minister of the interior Jean-Louis Debré to the managers of Intercenter. Truly, the transnational criminal organisations do show a major capacity of adaptation linked to a profit seeking objective. The main objective of the seminar has been to show that international character of the activities of organised crime and the need for o-operation of all public agencies concerned. An approach toward the changes in organised crime has been seen through the following four questions: –What is organised crime? The term is used very frequently but the concept of organised crime covers a meaning that has no precise legal definition. –What are the new shapes and forms of organised crime? There are the traditional activities and organisations. But there are also new organisations and structures with different targets and methods. –What is now at stake in the fight against organised crime? This questions is obviously linked to the previous one. Organised crime seeps into the economy and social network of nations. It requires an overall thinking and response from governments. –What are the modern responses that can be opposed to organised crime? The public sector can only prove efficient under the condition of national and international co-operation of all law enforcement agencies, whether judiciary of police. In the end, only a truly strategic plan will prove of any use and value. Présentation générale du XVIIIe Cours de haute spécialisation pour les forces de police 31 Resumen Presentación general del XVIII curso internacional de alta especialización para las fuerzas de policía Marcel Leclerc La temática central del XVIII curso International de Alta Especialización para las Fuerzas de Policía, dedicada a «.la evolución de la Criminalidad organizada.», ha sido determinada durante el otoño de 1995 según la propuesta hecha en nombre del Señor Ministro Jean-Louis Debré ante los dirigentes de Intercenter. En efecto, las organizaciones criminales transnacionales se caracterizan por una estupenda capacidad de adaptación asociada con una finalidad de provecho. En este marco, la programación de este coloquio se dedicó a tener en cuenta el internacionalismo que guía las actividades del crimen organizado, y la necesaria actividad concertada de todos los actores públicos empeñados para combatirlo. El enfoque de la evolución de la criminalidad organizada ha sido efectuado con el cuádruple cuestionario siguiente. ¿ Qué es el crimen organizado.? Vocablo muy empleado socialmente, el concepto de crimen organizado es una noción cuyos contornos jurídicos quedan imprecisos. ¿ Qué son las nuevas formas del crimen organizado.? A1 lado de organizaciones y actividades criminales tradicionales, se abren paso otras estrúcturas y otros vectores de ingenuidad social comparable. ¿, Qué son las nuevas puestas de la lucha contra la criminalidad organizada.? Incontestablemente, este cuestionario es encadenado al anterior. En efecto, la criminalidad organizada es un fenómeno que inviste de manera más o menos difusa el conjunto de sectores económicos y socialcs de las naciones. Por consiguiente provoca una reflexión global y múltiple de parte de los gobiernos. ¿ Qué son las respuestas contemporáneas alegadas en el crimen organizado.? La eficiencia del despliegue de los poderes públicos exige una acción concertada en el terreno nacional e internacional de todos los servicios represivos de orden policial o judicial. Finalmente, es una verdadera estrategia que debe ser puesta en práctica. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 32 Présentation de la criminalité organisée Essai de géopolitique de la criminalité organisée Hervé Bolot, diplomate et conseiller diplomatique du ministre français de l’IntérieurEssai de géopolitique de la criminalité organisée Introduction La tentative de définir une géopolitique de la criminalité organisée est incontestablement un héritage du géostratégique qui a dominé la réflexion dans les relations internationales depuis la dernière guerre jusqu’à la chute du mur de Berlin. La géopolitique, c’est se livrer à l’étude d’un phénomène au regard de son ou de ses aires géographiques et de son poids sur les structures et les évolutions politiques régionales ou globales. Très vite interviennent deux difficultés majeures. D’une part, la difficulté de définir et de globaliser le phénomène de criminalité organisée. D’autre part, la difficulté d’une identification statistique et géographique précise, peu compatible avec une démarche de type scientifique. Nous tenterons donc d’établir les liens et les rapports de force entre la ou les criminalités organisées d’une part, et les États ou les ensembles d’États d’autre part. Cette réflexion nous mènera à nous poser deux questions : – La criminalité organisée comporte-t-elle une dimension stratégique avec une réelle capacité à affecter les relations régionales ou mondiales.? – La CRI peut elle directement et notablement influencer la sécurité collective des États.? Il est certain, et c’est un truisme de le rappeler, que la criminalité organisée (ou non) n’est pas un élément structurant de la vie sociale et économique. Elle utilise les systèmes pour les détourner et, de ce fait, contribue à déliter les systèmes politiques et économiques, même si ce n’est pas son objectif premier. Il est une évidence pour chacun de vous qui participez à la lutte contre la criminalité que les menaces sur les ordres internes sont bel et bien réels. Le sujet demandé n’est qu’une approche préliminaire, car peu de gens se sont essayés à une géopolitique élaborée de la criminalité organisée. Après avoir esquissé une typologie, nous tenterons d’en dégager ensuite les traits communs des organisations criminelles et leurs conséquences à l’échelon international, avant d’examiner les facteurs de développement et de s’essayer, pour finir en conclusion, sur les dangers et aussi les obligations politiques auxquels devront faire face les États individuellement et dans leur ensemble. Essai de typologie de la criminalité organisée La réflexion sur la criminalité est marquée par les phénomènes les plus anciens, à caractère régional. Ils ont marqué les concepts et le vocabulaire. Pour simplifier, il convient de distinguer deux types d’organisation criminelle. Les organisations classiques ou historiques Sans chercher à décrire ces organisations, ce que d’aucuns dans la salle pourraient faire bien mieux que moi, je regrouperais dans cette catégorie, à tout seigneur tout honneur, les mafias italiennes (mafia sicilienne, camorra, a ’Ndrangheta et plus récemment la sacra corona unita), les yakuzas japonaises, les triades chinoises. Toutes ces organisations ont comme point commun une forte assise locale, voire régionale ou à l’échelle d’un pays. Elle comportent deux caractéristiques qui ont tendance à s’estomper dans d’autres organisations : – au départ, rôle de protection et même de protection sociale.; – rôle de régulation de la délinquance, la criminalité organisée contribuant à contenir la délinquance occasionnelle ou de petite envergure. Il convient, en terme de transition, de faire une mention particulière de la «.cosa-nostra.» américaine qui, dans l’entre-deux guerres, avait les caractéristiques d’une organisation mafieuse de type traditionnel mais qui a été l’instrument d’une dissémination mafieuse, avec un retour d’activité vers la Sicile, et s’est montrée pionnière dans la modernisation des méthodes et de l’extension des zones d’activités. Les nouvelles formes de criminalité transnationale organisée Il convient de regrouper les organisations apparues plus récemment dont les caractéristiques sont celles d’un plus grand éclatement géographique et d’une très grande diversification des activités. Dans ce groupe, il convient de classer : – les cartels de la drogue (Cali, Medellin et les cartels mexicains).; – Les mafias russes, néologisme commode et relativement journalistique, permettant d’englober plus de 5.000 groupes réunis dans 150 à 160 organisa- Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 36 tions criminelles et regroupant, selon les estimations, environ 100.000 membres. C’est sans doute face au développement des mafias russes, qu’une prise de conscience, en tout cas en Europe, sur la criminalité organisée s’est fait jour depuis la chute du mur de Berlin. Pourtant, ce vocable est partiellement inexact car sous l’adjectif se cachent à la fois des groupes ukrainiens, géorgiens, azerbaodjanais, arméniens, lituaniens et tchétchènes. C’est dire s’il faut se méfier des catégories et des analyses globalisantes simplificatrices en matière de criminalité organisée. Cela est encore plus vrai avec ce que d’aucuns ont baptisé les guérillas dégénérées et les organisations des zones dites grises issues principalement des grands bouleversements politiques récents tels que les suites de la guerre d’Afghanistan, du conflit de l’ex-Yougoslavie et, d’une manière générale, toutes les zones subissant le contrecoup de changements politiques, économiques et militaires brutaux. Dans cet essai de typologie brossé à grands traits, ne sont pas comprises les organisations qui apparaissent ça et là dans des pays émergeant à la criminalité tels que l’Afrique du Sud. À ce stade, l’on constate que l’on va vers une criminalité organisée très diversifiée et de plus en plus éclatée, où il est difficile de distinguer des lignes forces de stratégies politiques communes. Autre trait, la caractérisation par la nationalité tend à s’estomper. Deux groupes apparaissent alors entre eux pour lesquels une caractéristique géographique ne convient plus guère et ceux pour lesquels l’appartenance ethnique occulte complètement la dimension «.nationale.». L’examen comparatif montre que la criminalité classique à structure verticale, hiérarchisée qui avait, à sa manière, un rôle de régulation de la délinquance tend à ne plus être le «.modèle.». Les traits communs Partant de ces premiers constats, il paraît important de dégager les caractéristiques traditionnelles de la criminalité organisée, puis ensuite les nouvelles tendances. Les caractéristiques traditionnelles Elles sont incluses dans le titre adopté sur le plan international, à savoir criminalité transnationale organisée. a – La taille et le niveau d’organisation qui permettent de distinguer la criminalité organisée de la délinquance et même du grand banditisme en introduisant l’idée de permanence des structures. L’axiome en est la durée de l’organisation, notamment au-delà de la disparition souvent violente de ses dirigeants, la hiérarchie et la continuité des méthodes. Essai de géopolitique de la criminalité organisée 37 b – La transnationalité. Il est clair qu’au niveau international, même une structure sophistiquée du grand banditisme à fortes implantations nationales a peu d’intérêts en termes géopolitiques si elle n’a pas de ramifications ou d’activités dans deux ou plusieurs pays. Ceci est d’autant plus vrai que la criminalité, quelle que soit sa nature, vit et prospère dans le refus du cadre juridique et de l’ordre public au sein d’un pays et que, par extension, elle se moque des limites frontalières et des compétences des différents systèmes juridiques comme des obstacles, bien au contraire. Les tendances récentes Si, dans le passé, l’on a pu voir des accointances entre criminalité et idéologies, une des caractéristiques de la criminalité est de ne pas avoir de support ni idéologique, ni religieux. Elle les utilise parfois par plaquage, mais ce n’est pas consubstantiel à l’activité criminelle. Par ailleurs, s’il y a nouveauté dans le développement de la criminalité organisée, ce n’est pas dans le type d’organisation et le type systémique, mais c’est dans l’échelle, la vitesse d’exécution et d’action et les ramifications internationales. L’apparition d’un véritable danger sur le plan international vient de celle de la naissance de stratégies plurinationales avec des alliances occasionnelles ou construites, voire de véritables contrats de prestations de services de type entrepreneurial entre organisations. Il y a également une tendance nouvelle très forte à la délocalisation des spécialités criminelles, notamment dans le domaine de la drogue où les terroirs de production traditionnels du cannabis, de la coca ou du pavot sont en train de se disperser. Quelques exemples : le cannabis à plus haute teneur au monde est maintenant cultivé aux Pays-Bas. La saisie la plus importante de cannabis réalisée en Europe a été faite en France d’une production venant de Colombie, territoire traditionnel de trafic de coca et destinée au marché hollandais. De même l’on note une très forte délocalisation de la production de pavot des aires géographiques traditionnelles, l’éclatement étant à son maximum lorsqu’il s’agit des productions de drogues chimiques (ecstasy). Enfin, il y a atypisation des sources de profit. Alors que les groupes criminels traditionnels avaient bâti leur fortune et leur réseaux sur une activité dominante comme la prohibition (Cosa-Nostra), la drogue, le marché noir dans les pays dits de la mafia russe, etc..., comme dans les grandes entreprises transnationales, il y a une diversification des sources de profit dans tous les domaines pouvant générer des gains très rapides et importants. Enfin, le caractère national ou ethnique de certaines de ces activités se prolonge par les diasporas de par le monde qui sont souvent d’ailleurs à l’origine les premières victimes du chantage. Elles servent par la suite de relais pour ces organisations. C’est le cas, par exemple, de la diaspora chinoise Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 38 comptant environ 60 millions d’individus de par le monde ou de la dissémination en Europe occidentale des personnes originaires des pays d’Europe orientale. Ces traits communs permettent une meilleure appréhension du phénomène afin de développer une analyse géopolitique. En elle-même, elle ne servirait à rien si elle ne pouvait contribuer à la mise en commun d’éléments pour développer moyens et structures de lutte au niveau international. Essai de définition Le problème majeur que je soulignais plus haut est que la criminalité ne se trahit pas par ses structures, mais seulement par ses activités et que souvent il est plus facile d’analyser certains secteurs criminels plutôt que les organisations. Cette difficulté d’appréhension sur le plan international se traduit par les difficultés de parvenir à une définition communément admise. La conférence de Naples sur la criminalité transnationale organisée en 1994, afin de se concentrer sur ses recommandations, a délibérément laissé de côté le problème de la définition de la CTO et de ses caractéristiques. Il en a été de même dans la conduite des travaux du groupe d’experts à haut niveau contre la criminalité organisée du G7-P8. Seuls deux organismes ont tenté de se livrer à cet exercice qui, bien sûr, ne fait l’objet d’aucun consensus universel. Je me permettrai simplement de rappeler ces deux définitions qui sont : a) Celle de l’Union Européenne Pour qu’une infraction ou un groupe criminel ressortisse à la criminalité organisée, au moins six des caractéristiques énumérées ci-dessous doivent être présentes, dont obligatoirement celles énoncées 1, 5 et 11. 1 – collaboration entre plus de deux personnes.; 2 – des tâches spécifiques étant attribuées à chacune d’elles.; 3 – sur une période de temps assez longue ou indéterminée.; 4 – avec une forme de discipline et de contrôle.; 5 – suspectées d’avoir commis des infractions pénales graves.; 6 – agissant au niveau international.; 7 – recourant à la violence ou à d’autres moyens d’intimidation.; 8 – utilisant des structures commerciales ou de type commercial.; 9 – se livrant au blanchiment d’argent.; 10 – exerçant une influence sur les milieux politiques, les médias, l’administration publique, le pouvoir judiciaire ou l’économie.; 11 – agissant pour le profit et/ou le pouvoir. b) Celle d’Interpol «.Toute association ou tout groupement de personnes se livrant à une activité illicite continue, dont le premier but est de réaliser des profits sans souci des frontières nationales.». Essai de géopolitique de la criminalité organisée 39 Les facteurs d’évolution et de développement Notre réflexion doit nous mener à présent à examiner le poids de la criminalité organisée sur les équilibres mondiaux. Il est clair qu’il ne s’agit pas là d’une nouvelle menace mais que la nouveauté réside dans le volume, la vitesse et la transnationalité de plus en plus grande des activités de ces organisations. Par rapport aux périodes antérieures, en tout cas pour les organisations dites «.historiques.», où elles se substituaient par certains côtés à un certain manque institutionnel et organisationnel dans des territoires limités, les organisations criminelles transnationales jouent sur plusieurs ressorts de l’évolution récente des relations internationales. D’une certaine manière, elles réalisent sur une échelle souvent très large ce que les sociétés multinationales ont mis de nombreuses années à réaliser et à obtenir. Elles laissent les structures d’État souvent immobilisées et inefficaces par l’importance de leurs moyens, mais surtout par leur souplesse et leur rapidité. Plusieurs facteurs se conjuguent pour faciliter leur tâche dans le monde d’aujourd’hui. Tout d’abord l’extension de la liberté des échanges des personnes et des marchandises. La constitution en plusieurs régions du monde, d’ensembles et de sous-ensembles économiques et politiques, est exploitée par la criminalité organisée qui profite de l’unification des marchés au même titre que toute autre entreprise cherchant à s’exporter. C’est ainsi qu’est apparue une nouvelle forme de criminalité aux subventions communautaires. La deuxième révolution est celle des transmissions de l’information. La révolution technologique, tant des transports aériens que de l’information (fax, électronique, téléphonie sans fil, mais aussi de la monétique), est largement utilisée par les organisations criminelles pour fluidifier l’ensemble de leurs communications. L’ensemble de ces technologies a permis à ces organisations, souvent limitées à l’origine dans l’espace, de se rencontrer, de passer des alliances et de se livrer à des activités internationales complémentaires sur différents trafics. Une affaire récente de grande importance a conduit à l’arrestation en France des membres d’une filière d’importation de drogue impliquant à la fois des Colombiens, des Espagnols, des Roumains, des Bulgares et des Français, sur un parcours en zigzags impliquant de nombreux intervenants dans 6 pays. Face à cela, force est de constater la pesanteur et la rigidité mais aussi l’hétérogénéité des systèmes de défense des pays cibles, de préférence pays développés à revenus national et individuel élevés. C’est ainsi que sur le plan législatif, des procédures judiciaires et pénales, les différentiels sont utilisés par les organisations criminelles de façon à échapper le plus possible à une éventuelle répression. Chaque point faible dans le dispositif répressif international définit directement ou indirectement un espace d’impunité qui est immédiatement utilisé par les organisations à leur profit. Cette hétérogénéité des systèmes répressifs est le principal handicap de nos sociétés pour lutter efficacement contre la criminalité organisée. Si chacun croit pouvoir espérer échapper à certaines de ces manifestations en pactisant d’une certaine manière avec ces organisations, il se nuit à lui-même à long terme, mais contribue également à désorganiser une lutte d’ensemble efficace. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 40 À cet égard, le cas des paradis fiscaux est à la fois révélateur de ces situations différenciées et facteur du développement de la criminalité organisée. À partir du moment où des havres permettent aux organisations de placer et de recycler les profits de leur crime, la lutte revêt un caractère inégal. Sur le long terme, les paradis fiscaux qui encouragent ces pratiques contribuent à la reproduction du phénomène. Ces facteurs : – zones de libre échange et de facilité de transports.; – moyens de transmission de l’information et de l’échange des biens.; – hétérogénéité des systèmes de défense.; à quoi, il convient d’ajouter, l’affaiblissement des structures étatiques et judiciaires dans bon nombre d’États, vont permettre aux organisations criminelles d’étendre d’une part les zones grises où elles sont plus à l’aise, notamment dans la production des biens tels que la drogue, et pour le recrutement de leurs personnes, tout en brouillant à loisir les pistes dans les pays cibles. Ces facteurs de développement vont conduire inévitablement à des évolutions qui sont déjà largement en germe ou même entamées : – sur le plan relationnel, dans des systèmes démocratiques et d’économie libérale reposant sur la confiance et dans des systèmes fiduciaires, le fait que certaines de ces organisations œuvrent plus ou moins à visage découvert, minent ces systèmes de confiance économiques et financiers, mais aussi sociaux et politiques. Certaines des crises relationnelles des pays d’Amérique latine en sont en partie l’exemple. – sur le plan régional, nous le voyons bien dans la construction européenne, les conditions d’adhésion et de coopération entre pays membres incluent maintenant un certain nombre de paramètres liés au développement des activités de coopération policière et judiciaire qui n’étaient même pas abordés au moment d’adhésions plus anciennes telles que celles de l’Espagne, du Portugal ou de la Grèce. D’une certaine manière, ces questions ont également pesé sur les rapports au sein de l’Alena. Enfin, reste la question de savoir si les groupes criminels peuvent, par le biais notamment du trafic de matières radioactives et/ou chimiques, parvenir à une maîtrise et un commerce d’armements de nature à exercer un chantage et un déséquilibre sur les États ou groupe d’États. À ce stade, il ne paraît pas vraisemblable dans l’immédiat que ce scénario se déroule puisque la recherche d’un profit rapide et le plus large possible constitue le premier objectif des organisations criminelles. Une pénétration, qualifiée de douce et lente dans les appareils économiques et politiques, s’avère sur le long terme plus «.payante.» que la possession beaucoup plus conflictuelle et difficile à maîtriser des matières chimiques ou nucléaires pouvant leur donner une dimension criminelle stratégique. Cela dit, il est évident que l’intérêt commun des États que nous représentons, est d’être très vigilant sur les éventuels développements de ce type de trafic, pour éviter que cela ne dérape. Essai de géopolitique de la criminalité organisée 41 Conclusions À ce stade d’une analyse géopolitique, il ne semble pas que l’on puisse se livrer à un exercice aussi développé et de nature quasi scientifique tel que celui ayant eu cours dans le domaine stratégico-militaire. Les difficultés de définition, d’analyse, d’appréciation statistique sur les volumes et les connexions de la criminalité rendent d’ailleurs ce travail délicat, voire impossible, puisque ces activités échappent à une statistique même simpliste. De plus, le morcellement, la diversité des mouvements s’ils ont des conséquences semblables, parallèles, voire conjointes en termes de destruction des appareils économiques, politiques et sociaux, ne relèvent pas à ce stade de stratégies unifiées ou coordonnées avec pour objectif de parvenir à une sorte de directoire ou de pouvoir politique plus ou moins occulte. Il faut donc nous méfier dans le développement de cette réflexion de plusieurs éléments : Le premier écueil est politique. Il faut éviter de faire de la CRI un nouveau Léviathan, un ennemi commun de nos sociétés qui nous conduirait à rechercher des solidarités politiques potentielles plus ou moins artificielles au détriment de la recherche et de la coopération opérationnelle. L’autre écueil politique est de systématiquement internationaliser les causes et de rechercher artificiellement des racines et des solutions extérieures pour, en partie, se défausser des responsabilités propres à chaque État face au développement de la criminalité organisée sur son territoire d’une part, et des contacts et des interactions recherchés par ces mouvements d’autre part. Depuis que le géostratégique est devenu moins prééminent dans la réflexion des relations internationales, il faut donc se garder de rechercher a priori un ou plusieurs ennemis communs en vue de refaçonner une politique d’alliances fondée sur ce seul thème ou critère. Si cette recherche d’une coopération internationale est absolument indispensable dans la lutte opérationnelle contre la criminalité organisée, mon propos reste de mettre en garde de se tromper de finalité. Il est impératif d’adopter une approche opérationnelle efficace dans chacun des domaines d’activités criminelles et d’éviter de façon consciente ou non, de déplacer le problème sur le terrain politique. En effet, la finalité de la criminalité organisée telle que nous la connaissons, n’est pas essentiellement politique. Il faut donc nous convaincre de la fragilité de nos modes de pensée face aux modes d’action très diversifiés et éclatés des organisations criminelles et de la fragilité de mise en place de critères d’analyses globales face à des gens qui, certes sont organisés dans le but de profiter, voire de désorganiser les systèmes économiques, politiques et sociaux, mais n’ont d’esprit de système dans leur essence même. En un sens, essayer de dégager une géopolitique est en fait l’expression optimale d’une analyse rationnelle alors que nous sommes face à des phénomènes qui jouent des failles de nos systèmes politiques, judiciaires et économiques, plutôt que de bâtir des systèmes alternatifs. *** Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 42 En prenant une image météorologique, nous tentons de faire une analyse globale des grands courants cycloniques et anticycloniques et des ouragans des guerres alors que la criminalité organisée, c’est de l’eau qui sourd dans les fondations de nos maisons respectives. Essai de géopolitique de la criminalité organisée 43 Summary Essay of Geopolitics on organised crime Hervé Bolot Geopolitics consists in “studying a phenomenon regarding its geographical areas and its weight on the structures and the regional or global political evolutions”. There are two difficulties. First, the difficulty to define and globalise the phenomenon of organised crime. Secondly, the difficulty to obtain precise statistical and geographical identification. Crime does not betray itself by its structures but by its activities. The threats on internal orders are still well and truly real. 1) Essay of typology on organised crime First of all, there are the classical or historical organisations found in the Italian Mafias, the Japanese Yakuzas and the Chinese Triads. The common feature of these organisations is a strong local, regional or national implantation. New forms of trans-national organised crime have appeared lately, and are characterised by a wider geographical spread and a great diversification of activities. Among them are the drug cartels (Cali, Medelin, and the Mexican cartels), Russian Mafias which mean over 5,000 groups gathered together, within between 150 to 160 organisations, and count, according to reckonings, about 100,000 members. The observation shows that we are moving towards a very diversified and more and more spread out organised crime, where it is difficult to distinguish the main themes of the political strategies. 2) Common features Traditional characteristics are the size, the level of organisation, the permanence of structures and trans-nationality. What are the tendencies? One of the characteristics of contempory crime is to be devoid of ideological or religious medium. Novelty is within the scale, the rapidity of execution and action, and the international ramifications. There is also a very strong new tendency towards delocalisation of criminal specialisations, especially in the domain of drugs, where the traditional areas for cannabis, coca or poppy are breaking up. Among these new tendencies, it is also obvious that the sources of profit in all domains become atypical, and can generate very rapid and important gains. Finally, it is noticeable that the national or ethnic characteristic of certain of these activities prolongs itself via the different diaspora scattered around the world. Any attempt towards a definition? At the international level, difficulties arise to reach a commonly accepted definition. The Naples Conference on organised crime in 1994 left this problem on the side deliberately, in order to concentrate on recommendations. As for the European Union, it adopted in 1995 a definition counting eleven characteristics (among which a collaboration between more than two persons, suspected of having committed serious criminal offences in order to gain profit and/or power). In 1988, the ICPO-Interpol gave the following definition: “Any association or group of people engaged in continuous illicit activities, the prime objective being to make profit without concern for national boundaries.” 3) Factors of evolution and development The new factor concerning the weight of organised crime on the world equilibrium does not show through new threats, but in the volume, the rapidity and the trans-nationality of these organisations’activities, which are facilitated by the free circulation of people and goods and by the transmission of information thanks to technological progress. It is noticed that facing this, there is a certain heaviness, and even the rigidity and the heterogeneity of the defence systems of the targeted countries. A strong international co-operation is indispensable in the organisational combat against organised crime, according to an efficient operational approach. However, the problem should not be shifted on a terrain which would be only political. We must guard against a too globalising way of thinking. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 44 Resumen Ensayo de geopolítica de la criminalidad organizada Hervé Bolot La geopolítica consiste en «.estudiar un fenómeno respecto a su o sus áreas geográficas y de su peso en las estructuras y evoluciones políticas regionales o globales.». Dos dificultades aparecen. Primero la dificultad de definir y globalizar el fenómeno de criminalidad organizada. Luego, la dificultad de identificación estatística y geográfica precisa. La criminalidad no se traiciona por sus estructuras sino sólo por sus actividades. Sin embargo, las amenazas sobre las organizaciones internas son muy reales. 1) Ensayo de tipología de la criminalidad organizada. Primero hay las organizaciones clásicas o históricas que reagrupan las mafias italianas, las yakuzas japonesas y las tríadas chinas. El punto común de estas organizaciones es un fuerte asiento local, hasta regional o al nivel de un país. Nuevas formas de criminalidad transnacional organizada aparecieron hace poco y se caracterizan por una más grande fragmentación geográfica y una muy grande diversificación de las actividades. Figuran dentro los cárteles de la droga (Cali, Medelín y los cárteles mejicanos), las mafias rusas que abarcan más de 5.000 grupos reunidos en 150 a 160 organizaciones y que reagrupan, según las estimaciones, poco más o menos 100.000 miembros. El balance realizado es que vamos hacia una criminalidad organizada muy diversificada y más y más diseminada, en la que es dificil distinguir los objetivos principales de estrategías políticas. 2) Los rasgos comunes. Las características tradicionales son la dimensión, el nivel de organización, la permanencia de las estructuras y la transnacionalidad. ¿ Qué son las tendencias.? Una de las características de la criminalidad contemporánea es de ser desprovista de todo soporte ideológico o religioso. La novedad reside en la escala, la velocidad de ejecución y de acción y las ramificaciones internacionales. Hay también una nueva tendencia muy fuerte para deslocalizar las especialidades criminales, especialmente en el campo de la droga donde las tierras tradicionales del cannabis, de la coca o de la adormidera van dispersándose. En estas nuevas tendencias hay también algo atípico de las fuentes de provecho en todos los dominios que pueden procurar beneficios muy rápidos e importantes. Por fin, se nota que el carácter nacional o étnico de ciertas de estas actividades se prolonga por las diasporas dispersadas en el mundo. ¿ Hay un intento de definición.? En el terreno internacional, se manifiestan dificultades para llegar a una definición que todos admiten. La Conferencia de Nápoles de 1994 sobre la criminalidad organizada había deliberadamente dejado a un lado el problema de la definición para concentrarse en sus recomendaciones. Por su parte, la Unión Europea adoptó, en l 995, una definición en once características (de las cuales una colaboración entre más de dos personas, sospechadas de haber cometido infracciones penales graves, actuando para el provecho y/o el poder). En 1988, el OlPC-lnterpol había dado la definición siguiente : «.Toda asociasión o toda agrupación de personas que se dedican a una actividad ilícita continua, cuya primera meta es realizar provechos sin preocuparse de las fronteras nacionales.». 3) Los factures de evolución y de desarrollo. La novedad que concierne el peso de la criminalidad organizada en los equilibrios mundiales no reside en nuevas amenazas sino en el volumen, la velocidad y la transnacionalidad de las actividades de las organizaciones favorecidos por la libertad de los Essai de géopolitique de la criminalité organisée 45 intercambios de personas, de mercancías y de la transmisión de las informaciones gracias a los progresos tecnológicos. Frente a esto, se observó cierta poca vivacidad, hasta la rigidez y la heterogeneidad de los sistemas de defensa de los países tocados. Una cooperación internacional fuerte es imprescindible en la organización de la lucha contra la criminalidad organizada, según un acercamiento operativo eficaz. Sin embargo, es conveniente no cambiar el problema hacia un terreno sólo político. Hay que evitar modos de pensamiento demasiado generales. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 46 Empirical Criminological Research on Organised Crime The State of Affairs in Europe Cyrille Fijnaut, professor at the Catholic University of Leuven (Belgium) Introduction The StateEmpirical of AffairsCriminological in Europe Research on Organised Crime Organised crime and in particular the containment of organised crime has become an important political issue in Europe. To substantiate this thesis one could refer to a large number of transnational and national initiatives and developments. In the framework of this exposé I shall confine myself to mentioning just a few of them. At the level of the United Nations reference has to be made to the important World Ministerial Conference on Organised Transnational Crime in Naples, Italy, on 21-23 November 1994.1. The council of Europe has made, up to this moment, great efforts to enhance the suitability and applicability of the mutual legal assistance system of its member-states, notably with a view to the repression of laundering the proceeds of (organised) crime.2. Time and again the European Union, in all its different shapes, –so, not only the European Council but also the European Parliament– has clearly expressed the viewpoint that organised crime makes up a major threat, not only for the member-states but also for the Union itself.3. The issue of organised crime dominates most of the initiatives that are taken in the framework of justice and home affairs co-operation (Chapter VI, Treaty of Maastricht), above all the 1. See the background document Problems and dangers posed by organised transnational crime in the various regions of the world, United Nations, Economic and Social Council, E/Conf. 88/2, 18 August 1994. 2. W.C. Gilmore, Dirty money: the evolution of money laundering counter-measures, Strasbourg, Council of Europe Press, 1995. 3. The European Council has always stressed in the conclusions of its summit that the containment of organised crime and in particular the drugs trade is of vital interest for the Union and the member states alike. In the conclusions of the recent Florence summit it states that in the context of the revision of the treaties also the improvement of the means and instruments to fight terrorism, organised crime and drugs trade should be considered (Cfr. Europese Raad van Florence, 21 en 22 juni 1996, “Conclusies van het Voorzitterschap”, Europa van Morgen, 3.7.1996, pp. 55-56). The European Parliament already established several committees of inquiry into the problems of organised crime. See e. g. the 1992 Report drawn up by the committee of inquiry into the spread of organised crime linked to drugs trafficking in the member states of the European Community, European Parliament, 1991-1992, Session Documents, PE 152.380/fin. establishment of Europol.1. The so-called fight against EC-fraud, via the special co-ordination unit in the European Commission, has grown in importance since the time when the relevant problems were phrased in terms of organised crime.2. All over Europe at a national level we have seen the normalisation and modernisation of undercover policing, the introduction of more intrusive investigative powers like tapping and bugging, the corresponding specialisation of police forces and prosecution services at a local as well as a central level, the adoption of new (penal and administrative) sanctions, the development of preventive anti-corruption programmes, the use of administrative means to keep away criminal groupings from the construction industry, etc. etc..3. In other words: organised crime has become not only an important issue in itself, its importance has as much to do with its great impact on criminal law, the administration of criminal justice and, gradually, also the local, regional and central public administration. Against this background it is, indeed, absolutely justified to ask the question in which way criminology in Europe or, perhaps better, European criminologists has/have dealt with the issue of organised crime, particularly –because that is the question of the organising committee– in the form of empirical research. To answer this question I have divided it into three sub-questions. First of all what is the actual state of affairs with respect to empirical criminological research in this field? My answer to this question that this research does not look promising, leads to the second one: which factors may explain this negative state of affairs? The answer to this question gives rise to the third question: what could be done to improve the situation? In conjunction with the foregoing it yet must be underlined that my answers to these questions are not only based on reading and rereading the most relevant European and American writings on organised crime and its containment. They are also heavily founded on my experiences with academic research on behalf of three successive (Belgian and Dutch) parliamentary committees of inquiry into problems of serious (organised) crime and its 1. C. Fijnaut, “Intergovernmental co-operation on drug control: debates on Europol”, in: N. Dorn, J. Jepsen and E. Savona (eds.), European drug policies and enforcement, London, MacMillan, 1996, pp. 195-212. Cfr. also the second report of H. Nassauer on Europol on behalf of the Committee on Civil Liberties and Internal Affairs of the European Parliament (European Parliament, 29 February 1996, PE 215.803/fin.). 2. C. Fijnaut, “De connecties tussen EG-fraude en georganiseerde misdaad”, in: H. de Doelder (red.), Bestrijding van EEG-fraude, Arnhem, Gouda Quint, 1990, pp. 87-96. 3. An adequate overview of all of this is still missing, but reference can be made to: W. Gropp (Hrsg.), Besondere Ermittlungsmassnahmen zur Bekämpfung der Organisierten Kriminalität, Freiburg, Max-Plank Institut für ausländisches und internationales Strafrecht, 1993, P. Tak a. o., De normering van bijzondere opsporingsmethoden in buitenlandse rechtsstelsels, Den Haag, Ministerie van Justitie, 1996; C. Fijnaut and G. Marx, Undercover, police surveillance in comparative perspective, The Hague, Kluwer Law International, 1995. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 48 containment.1. It is important to note this because especially in Europe many of the problems of empirical literature and government documents. As a consequence of this the public debate on these problems is generally on a low level. Let me see whether I can raise it a little bit now... The actual state of empirical research In order to present an assessment of the actual state of empirical criminological research on organised crime in Europe it is of course necessary to clarify the notion of organised crime that is used. To this end I want to refer to the definition the criminological research group I headed for the Dutch parliamentary committee of inquiry into undercover policing developed on the basis of the international literature on organised crime.2. This definition goes as follows: there is a question of organised crime in the case that groups which primarily aim at illegal profits, in a systematic way commit crimes with serious societal consequences, and are able to shield these crimes off in a rather effective way, in particular by showing a willingness to use violence or to rule people by means of corruption. In the presentation of this definition we put forward the arguments why organised crime, at least in theory, from an analytical viewpoint, should be distinguished from professional crime, terrorism and white-collar crime or corporate crime. Equally we made clear that organised crime, as it had been defined, may these days be composed of two essential kinds of crime: on the one hand the provision of illicit goods and services (drugs, weapons, gambling, prostitution) and on the other hand the infiltration of legitimate businesses (construction, toxic waste disposal, garment industry, transportation).3. 1. The first committee of inquiry was a committee of the Belgian Parliament that made an inquiry into the problem of white slavery (trade in women) in the years 1992-1994. Cfr. its report (also in French) in the Documents of the Chamber, 1991-1992, nr. 673/7. I wrote two reports for this committee: one about a white slavery case inthe city of Rotterdam, the Netherlands (Officier van Justitie versus Bende van de Miljardair, Antwerpen, Kluwer Rechtswetenschappen, 1993), another one on white slavery, prostitution and police corruption in the city of Antwerp, Belgium (Prostitutie; vrouwenhandel en (vermeende) politiecorruptie in Antwerpen, Leuven, Acco, 1994). The second committee of inquiry was a committee of the Dutch Parliament that made an inquiry into the problem of undercover policing in the years 1994-1996. Cfr. its general final report, Inzake opsporing, in the Documents of the Second Chamber, 1995-1996, nr. 24072/10 (The Hague, SDU-Uitgevers). The criminological research group I headed wrote all in all 7 reports for this committee on the different kinds and aspects of organised crime in Netherlands at a national and local level (in the city of Amsterdam), including the role of the liberal professions and the banking system. All these reports have also been published by SDU-Uitgevers (The Hague) in the Documents of the Second Chamber (nr. 24072/16 (final report) – nr. 24072/23). The third committee is again a committee of the Belgian Parliament. It was established last June in order to make an inquiry into the criminal investigations in the notorious and unsolved case of the so-called “bandits of Nijvel” who in the years 1983-1985 killed some 30 people in the course of hold-ups, raids on supermarkets etc. This committee has asked me and some colleagues to make an empirical analysis of those investigations. An earlier attempt of the Minister of Justice to let such an analysis be made by me and a colleague of mine, R. Verstraeten, broke down after several months (November 1995-March 1996) on the argument of the Court of Cassation that our mission was against the law and particularly not in conformity with the doctrine of the separation of powers. The report we wrote for the Minister of Justice on our experiences in that period of time was handed over the Parliament and provoked the establishment of the named committee. Cfr. C. Fijnaut and R. Verstraeten, Over het onderzoek, in opdracht van Minister van Justitie S. De Clerck, betreffende het gerechtelijk onderzoek inzake de “bende van Nijvel”, K.U. Leuven, Instituut voor Strarecht, 1996.. 2. C. Fijnaut, F. Bovenkerk, G. Bruinsma en H. van de Bunt, Einrapport Onderzoeksgroep Fijnaut, Second Chamber, 1995-1996, Documents, 24072/16, pp. 22-28. 3. In this regard the design of the research project was heavily influenced by the contributions in C. Fijnaut and J. Jacobs (eds), Organised crime; a transatlantic initiative, Deventer, Kluwer Law and Taxation, 1991. Empirical Criminological Research on Organised Crime The State of Affairs in Europe 49 It is nearly self-evident that where in practice organise crime and professional crime are easily linked in the first of crime, organised crime and corporate crime may easily coincide with each other in the second kind of crime.1. Looking through the glasses of this definition to the empirical criminological organised crime literature in Europe I can only show you a rather bare landscape. On a transnational level no more or less original empirical research has been done up to now. On this level only some sensible and useful writings –predominantly articles in scientific and professional journals– have been produced, most of the time based on government documents, unclear police sources, other people’s research and press reports..2. This enormous gap has to some extent been filled by journalistic books but their drawbacks are well-known: a very alarmist line of reasoning without giving account of methods and sources.3. The fact that these books nevertheless exert a lot of influence on the public debate, including the political discussion, on organised crime problems in Europe can for the rest not only be attributed to the lack of adequate empirical criminological research. This is also a result of the inability of the European institutions concerned –Council of Europe, European Union, Interpol (European Secretariat– to prepare meaningful reports on organised crime in Europe, or at least of their unwillingness to publish such reports, assuming that they are capable of making them (as it is the case in some fields). Anyhow, one way expect that in the future they will drastically change their policy in this regard. The annual report of the UCLAF/European Commission on the fight against fraud and the first general situation report of the Europol Drugs Unit on drug production and drug trafficking are signs which hopefully do not deceive us.4. At a national level the situation with respect to somewhat comprehensive empirical research on organised crime is very uneven from one country to another. Due to a lack of time it is impossible to discuss the differences and similarities between them from a more qualitative point of view and to pay some 1. Cfr. a. o. H. Abadinsky, The criminal elite; professional and organised crime, W, estport, Connecticut, Greenwood Press, 1983; J. Albanese, Where organised and white collar crime meet: predicting the infiltration of legitimate business, Paper presented at the Annual Meeting of the American Society of Criminology, Miami, Florida, November 1994; H. Edelhertz, “White-collar and professional crime”, American Behavioral Scientist, 27, 1983, 1, pp. 109-128. 2. See e. g. Y-K. Chu, “The triad threat to Europe”, Policing, 10, 1994, 3, pp. 205-215; Crossland, J., “Trends krimineller Aktivitäten in Europa; Konsequenzen des britischen National Criminal Intelligence Service”, Kriminalistik, 1994, 4, pp. 261-262; M. Joutsen, “The potential for the growth of organised crime in Central and Eastern Europe”, European Journal on Criminal Policy and Research, 1, 1993, 3, pp. 77-86; M. Levi, “The extent of cross-border crime in Europe: the view from Britain”, European Journal on Criminal Policy and Research, 1, 1993, 3, pp. 57-76; V. Ruggiero, “War markets: corporate and organised criminals in Europe”, Social and Legal Studies, 5, 1996, 1, pp. 5-20; G. Ulber, “Europa-Paradies für Kriminelle”, Kriminalistik, 1992, 2, pp. 81-86; H. Zachert, “Organisierte Kriminalität in einem Europa offener Grenzen”, Magazin für die Polizei, 24, 1993, 212, pp. 32-39. Nevertheless already a few widely diverging attempts have been made to present a more comprehensive picture of what is going on. See S. Flood (ed.), Illicit drugs and organised crime: issues for a Unified Europe, Chicago, III., The University of Illinois at Chicago, Office of International Criminal Justice, 1992. 3. Cfr. F. Calvi, L’Europe des parrains; la mafia à l’assaut de l’Europe, Paris, 1993; E. Koch, Grenzenlose Geschäfte; organisierte Wirtschaftskriminalität in Europa, München, Knesebeck und Schuler, 1988; J. Roth and M. Frey, Die Verbrecher Holding; das vereinte Europa im Griff der Mafia, München, Piper, 1992. 4. See European Commission, Protecting the Community-s financial interests; the fight against fraud; annual report 1995, Brussels, 8 May 1996, COM (96) 173, and Europol Drugs Unit, European Union general situation report on drug production and drug trafficking, The Hague, September 1995. For the rest one should not lose sight of the fact that sometimes also other transnational institutions publish very relevant reports, e. g. International Organisation for Migration, Trafficking and prostitution: the growing exploitation of migrant women from Central and Eastern Europe, Budapest, 1995. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 50 attention to e. g. the methods and sources used, the basic image of organised crime (an “alien conspiracy” or just another essential component of our society) that is at the root of the research design, and the kinds and/or aspects of organised crime which have been studied. I have to limit myself to a quantitatively oriented comparison, that for the rest also fits better in the lay-out of this contribution in general. From such a perspective the European countries can be divided in three categories. The first category includes certainly Italy, Germany and the Netherlands. In these countries and, for obvious reasons, especially in Italy a number of important empirical criminological studies on organised crime have been made.1. In addition to this it must be noted that –parallel to a long-standing (Italy) or a yet evolving scientific research tradition (Germany and the Netherlands)– also in these countries on a regular basis the most qualified government situation reports are prepared.2. This connection, that could easily be enlarged by also including the journalistic books on this subject, is of course not accidental. At least it shows that in the countries concerned organised crime has become a public issue, how divergent the seriousness of the problem for the rest may be. The second category relates to countries like Spain, Portugal, the Scandinavian countries, but also France and the United Kingdom. As far as I know no empirical criminological research of any significance has been done in those countries up to now. Parallel to this, it is in relation to this category of countries equally not accidental that the governments –be it the ministries of justice and/or home affairs, be it the police forces themselves– do not regularly issue qualified reports on the situation. This, of course, raises the question whether in the foregoing years these countries have not yet faced organised crime problems an/or whether opinion leaders were not yet aware of such problems or did not phrase them in terms of organised crime. My provisional answer would be that the latter thesis is the most probable one. The reason for this is that in some of these countries only recently e. g. the Parliament by means of a special inquiry, has expressed its growing concern on organised 1. As far as Italy is concerned reference can be made to P. Arlacchi, Mafia business; the mafia ethic and the spirit of capitalism, London, Verso, 1986; D. Gambetta, The Sicilian mafia; the business of private protection, Cambridge, Mass., Harvard University Press, 1993; J. Walston, The mafia and clientelism; roads to rome inpost-war Calabria, London, Routledge, 1988, and L. Paoli, Mafia associations as secret societies; the case of Sicilian cosa nostra and Calabrian ’ndrangheta families, Firenze, European University Institute, 1995 (Ph. D. thesis). Important publications on organised crime in Germany are E. Rebscher and W. Vahlenkamp, Organisierte Kriminalität in der Bundesrepublik Deutschland, Wiesbaden, Bundeskriminalamt, 1988; U. Dörmann, Organisierte Kriminalität – Wie gross ist die Gefahr?, Wiesbaden, Bundeskriminalamt, 1990, and U. Sieber and M. Bögel, Logistik der Organisierten Kriminalität, Wiesbaden, Bundeskriminalamt, 1993. The most comprehensive and extensive research studies on organised crime in the Netherlands have been made by the criminological research group – C. Fijnaut, F. Bovenkerk, G. Bruinsma and H. van de Bunt – for the Dutch Parliamentary committee of inquiry into undercover policing (cfr. footnote 7). Apart from these reports mention can be made of P. van Duyne, R.F. Kouwenberg and G. Romeijn, Misdaadondernemingen; ondernemende misdadigers in Nederland, ’s-Gravenhage, Wetenschappelijk Onderzoek – en Documentatiecentrum, 1990. A revised version of this report has been published in 1995 under the title: Het spook en de dreiging van de georganiseerde misdaad (’s-Gravenhage, SDU-Uitgeverij). 2. The best reports are those which are published on a yearly basis by the Italian Ministry of Home Affairs. See e. g. the English version of the report on 1993: Ministero dell’Interno, 1993 Report on organised crime in Italy, Roma, 1994. The secret annual reports of the Bundeskriminalamt (Lagebild organisierte Kriminalität Bundesrepublik Deutschland 1992, 1993 etc.), however, are also very important to understand the situation in Germany. The statistical overviews of criminal groups which the Dutch Central Criminal Intelligence Service prepares every 2, 3 years since 1988 contain in some respects useful information, but can not bear any comparison with the Italian and the German reports. Empirical Criminological Research on Organised Crime The State of Affairs in Europe 51 crime issue.1. Moreover, in the case of the United Kingdom it has to be stressed that not only the National Criminal Intelligence Service (NCIS) has started to publish reports, but also that the academics world is taking some interest in the issue.2. Countries like Switzerland and Belgium belong, I would say, to the third category, a transitional category between the two foregoing ones. In this category of countries the government and the Parliament have already come to the conclusion that organised crime is, indeed, a real social problem and have ordered empirical criminological research projects. Under the pressure of the Parliament in 1992-1993 the Swiss government spent some money on a general overview of the situation in the country, whereas in the same period of time the Belgian Parliament ordered empirical research on the issue of white slavery.3. In addition it may be mentioned that the Belgian government –in the framework of a recent action program against organised crime– has stated that a comprehensive empirical study of organised crime in the country will be made.4. For the rest it is said that the Belgian federal police (Gendarmerie) has over the years prepared numerous reports on organise crime issues, but these have never been published. In conjunction with this third category of countries one could identify a fourth one. This category contains the Middle and East European countries whose governments and Parliaments are well aware of the organised crime problems but are not willing or not capable, for all sorts of reasons, to further empirical research and/or to assess on a regular basis the actual development of those problems.5. In short, the situation of empirical criminological research is –notwithstanding the foregoing classification– indeed very different from one country to another country. One of the consequences hereof it that the great lack of research at a European level is not compensated by research at a national level, and that e. g. a reasonable European picture of the situation can not be constructed by putting the national pieces together. It is exactly this 1. In relation to France, see F. d’Aubert and B. gallet, Rapport de la commission d’enquête sur les moyens de lutter contre les tentatives de pénétration de la mafia en France, Assemblée Nationale, 1993, no 3251. As far as the United Kingdom is concerned one can refer to: Home Affairs Committee, Organised crime, London, House of Commons, Session 1994-95, third report. 2. Cfr. D. Hoobs, “Professional and organised crime in Britain”, in: M. Maguire, R. Morgan and R. Reiner (eds.), The Oxford handbook of criminology, Oxford, Clarenton Press, pp. 441-468. The NCIS has published An outline assessment on the threat and impact by organised/enterprise crime upon United Kingdom interests, London, National Criminal Intelligence Service, 1993. 3. With respect to Switzerland, see M. Pieth and D. Freiburghaus, Die Bedeutung des organisierten Verbrechens in der Schweiz, Basel, 1993 (not published), M. Pieth, “Die bekämpfung des organisierten Verbrechens in der Schweiz”, Schweizerische Zeitschrift für Strafrecht, 109, 1993, 3, pp. 257-271, andP. Bernasconi, “Organisierte Kriminalität in der Schweiz; die Rolle der Schweizer und der Ausländer”, in: Schweizerische Arbeitsgruppe für Kriminologie (hrsg), Ausländer, Kriminalität und Strafrechtspflege, Chur-Zürich, Verlag Rüegger, 1993, pp. 266-286. In relation to Belgium, see footnote 7. Also B. de Ruyver and F. Tulkens prepare some empirical studies for the parliamentary committee in question. 4. Cfr. the Actieplan van de regering tegen de georganiseerde criminaliteit, Brussels, June 1996, pp. 2-5. 5. As far as I know only a few academics are doing research in this field, A. Marek (Torum, Poland) and P. Gilinsky (St Petersburg, Russia). In relation to Russia it has to be said that most of the existing (journalistic and academic) publications have been written by foreigners. See e. g. V. Coulloudon, La mafia en Union Soviétique, Paris, Lattès, 1990; A. Waksberg, Die Sowjetische Mafia; organisiertes Verbrechen in der Sowjetunion, München, Piper, 1991, and S. Handelman, Comrade criminal: Russia’s new mafia, New Haven, 1995. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 52 finding that raises the question why empirical criminological research on organised crime is that scarce in Europe. Why such a paucity of original research? In order to give a sensible answer to the last question I not only draw on the relevant European literature and my own experiences as a researcher but I have also taken advantage of many American writings in this field. Indeed, one should not lose sight of the fact that although in European eyes American research is far ahead of research in Europe, in American eyes the number of really important empirical American studies can be counted on the fingers of two hands.1. Therefore it makes sense to take into account the factors which American researchers have listed to explain the paucity of original research on organised crime in their country. In conjunction with the remarks which were made in the last paragraph with respect to the differences in empirical research between the European countries, first of all, it must be stated that until the 1980s in most countries organised crime was considered to be a foreign, not to say an exotic problem. It was seen as a problem of (the southern part of) Italy (Mafia), of China and Hong Kong (triads), of Japan (yakuza) and of the United States (cosa nostra), but not as a challenge or threat in France, Germany, the United Kingdom, Belgium, the Netherlands, et alone the Scandinavian countries. So, organised crime was, for a long time, not a real, serious public issue in Europe. This explains for a large part why governments and Parliaments did not stimulate empirical research on organised crime or were in need of its results: it was just a non-issue for them.2. In this regard the situation is rapidly changing these days in some countries as was demonstrated in paragraph II. On the other hand, however, and in the second place, one should at the same time take into account the state of affairs in European criminology. Particularly one may not lose sight of the fact: –that in many European countries criminology has not yet developed into an empirical discipline and, it is by far the case that criminologists dominantly view criminality as an individual matter rather than as an organisational matter.3; –that organised crime is not traditionally an important subject in criminology, not even in American criminology as has been underlined already; this means 1. The best recent bibliography has been published by J. Jacobs in his book Busting the mob; United States v. Cosa Nostra, New York, New York University Press, 1994, Part III, pp. 243-267. It relates to books, articles and governmental reports since 1980. The hard core of the American empirical literature on organised crime has been identified by M. Jones and P. J. Ryan in the journal Criminal Organisations, 10, 1996,2, pp. 4-5. 2. See in relation to the United Kingdom M. Anderson, “The United Kingdom and organised crime – the international dimension”, European Journal of Crime, Criminal Law and Criminal Justice, 4, 1993, 1, pp. 292-308, and F. Martens and F. Pulley, “Cross-cultural reflections of organised crime”, International Journal of Comparative and Applied Criminal Justice, 8, 1984, 1, pp. 63-74. As far as the Netherlands are concerned, see A. Block, “American criminals abroad”, in: A. Block (ed.), Perspectives on organising crime; essays in opposition, Dordrecht, Kluwer Academic Publishers, 1991, pp. 228-242. 3. Cfr. the observations made by D. Cressey, “Methodological problems in the study of organised crime as a social problem”, The Annals of the American Academy of Political and Social Science, 1967, 374, pp. 105-106. Empirical Criminological Research on Organised Crime The State of Affairs in Europe 53 that a fixed and well-known body of empirical research does not exist, that adequate theories have not been developed, and that research experience is not transferred from one generation to another one.1; –and that, given these circumstances and the fact that doing research on organised crime also presupposes a lot of legal, financial, administrative and economical insight, it is not that easy in many countries to quickly build up some scientific potential for making valuable criminological studies on organised crime problems. But, thirdly, even in countries where there is some tradition in doing empirical criminological research, qualified criminologists are not always very willing to get involved in research on organised crime. This might be for various reasons. The first reason is that they are of the opinion that “organised crime” is not a real problem, but a fake problem, artificially created by the media and/or police and justice authorities to secure their own interests: the increase of viewing and reading figures and in this way the earnings from advertising, the advancement of institutional interests: budgets, personnel and equipment, investigative powers, etc. A second reason can be that renowned criminologists, although they are not that sceptical about the true nature of the problem of organised crime, do not value research on this problem as an important contribution to criminology in general and, in this way, not as a good means to level up their status in the society of criminologists; on the contrary: such research could bring their status into disrepute, e. g. because of the theoretical, ethical and methodological problems which relate to the impossibility of always creating full openness about the information that has been collected, or because of the fact that other criminologists will judge any involvement as support for a bad (political, ideological) cause. The third and last reason I want to make mention of in this framework, is that organised crime from a criminologist’s perspective is in some respects a dirty problem, a problem with which one easily can get his fingers burnt. Research on this problem not only entails that one has to do his job in the midst of all sorts of power struggles (ideological, institutional, financial), but also implicates the risk that one becomes the controversial target of such struggles: political parties which do not like independent research on their alleged relationships with notorious criminal groups and are willing to spread false rumours on the researchers in question, important industries which come to the conclusion that organised-crime-related criminological research would be in contradiction with their social and financial interests and try to prevent or to stop it, defence lawyers who –in their own interest or in the interest of their clients– start legal proceedings against researchers, on the basis of the fact that their right to privacy has not been sufficiently respected, etc..2. 1. See R. Aniskiewicz, “Meta-theoretical issues in the study of organised crime”, Journal of Contemporary Criminal Justice, 10, 1994, 4, pp. 314-324; T. Bynum (ed.), Organised crime in America: concepts and controversies, Monsey, N.Y., Willow Tree Press, 1987, pp. 3-12; G. Potter, Criminal organisations; vice, racketeering, and politics in an American city, Prospect Heights, III., 1994, pp. 1-46; P. Reuters, “Research on American organised crime”, in: R. Kelly, K-L. Chin and R. Schatzberg (eds.), Handbook of organised crime in the United States, Westport, Conn., Greewood Press, 1994; pp. 91-120. 2. All the illustrations given here are to a greater or lesser extent based on my personal experiences as an expert to the committees of inquiry mentioned in footnote 7. To get some understanding of the problems raised here, see W. Chambliss, “State-organised crime”, Criminology, 27, 1989, 2, pp. 183-208, and B. Leuthardt, Festung Europa; Asyl, Drogen, “Organisierte Kriminalität”: die “innere Sicherheit” der 80er und 90er Jahre und ihre Feindbilder, Zürich, Rotpunkverlag, 1994. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 54 The presence, however, of criminologists who are not afraid of operating in the public arena or are even willing to run the risk of becoming the victim of a dirty tricks campaign, is a necessary, but not a sufficient condition for successful criminological research on actual organised crime problems. To be successful they have to get access to the relevant government institutions –police forces, prosecution services, regulatory agencies, local and central public administration, intelligence services– and in particular, of course, to the information they dispose of. Here we have a fourth factor that helps to explain the paucity of original empirical research. It goes nearly without saying that doing scientific research on organised crime entails the making of compromises: the safety of informers, e. g., or the outcome of ongoing investigations will –within limits– determine to some extent what information can be published at a given moment. A greater problem, however, is that important institutions are not willing to give access to their information because of the most diverging, but illegitimate, reasons.1. They can refuse access because they are not willing to lose the monopoly of (their) information and so their capability to present the problem of organised crime in a way they like it most. Access may be refused because institutions do not want outsiders to know that their information is not that good and/or their capacity to analyse it in an adequate way, is rather limited: particularly in the case that a “police war” is going on, such an insight by outsiders can be very damaging. A reason why institutions may also refuse access to their information, is that they fear that researchers will collect dirty data about the ways criminal information is gathered or criminal investigations are managed, e. g. data on debatable undercover operations or on the illegal use of bugs. All these reasons explain for the rest why many of the most valuable books and reports on organised crime have been written in the framework of (governmental and parliamentary) committees of inquiry which dispose of the power and legitimacy to overcome institutional resistance, or could only be prepared thanks to the long-standing and intimate relationship of researchers with police task forces, prosecutors, investigating judges and so on, who are involved in the fight against organised crime. The fifth and last factor relates to the much-heard observation that criminologists should not draw that much on government sources but should study organised crime straight away: by observing the perpetration of illegal activities, by interviewing organised criminals and their supporters, and so on. Indeed, such an approach can, in certain circumstances, lead to very good results. William Chambliss’book On the take is the most-cited piece of evidence for this argument.2. On the other hand, one may not overlook the important limits of this approach: heavy criminals who just do not want to talk with outsiders about their businesses or only want to tell them their version of the facts; people, informers, who carry the risk of losing their life by telling the “truth” to outsiders; the danger that participant observation of researchers ultimately 1. Cfr. Ch. Corns, “Inter-agency relations: some hidden obstacles to combating organised crime?”, Australian Journal of Criminology, 25, 1992, 2, pp. 169-185; P. Reuters and J. Rubinstein, “Fact, fancy and organised crime”, The Public Interest, 1978, 53, pp. 45-68, and G.T. Marx, “Notes on the discovery, collection, and assessment of hidden and dirty data”, in: J. Schneider and J. Kitsuse (ed.), Studies in the sociology of social problems, Norwood, N.J., Ablex Publishing Corp., 1984, pp. 78-111. 2. W. Chambliss, On the take; from petty crooks to criminals, Bloomington, Indiana University Press, 1988. Empirical Criminological Research on Organised Crime The State of Affairs in Europe 55 ends up in a disaster: they get blackmailed or get themselves involved in illegal operations.1. It is not that wonderful that –apart from life histories– only a few good studies on organised crime have been made without the support of governmental institutions.2. In conclusion: some observations on the future of empirical organised crime research The first question that with a view to the future of empirical criminological research on organised crime has to be answered is the question whether it is important to put much more energy in such research. My answer would be an affirmative one. In line with the reasoning that has been developed in the foregoing paragraphs I would, on the one hand, argue that more research in this field would be of great interest for the criminological enterprise itself. It would enhance the theoretical discussions, it would challenge the overvaluation of quantitative research, it would further the social legitimacy of criminology and in this way reinforce its institutional position in the universities. But on the other hand I am eager to underline that –given the growing impact of the organised crime issue on criminal law, the administration of criminal justice and public administration– it has become the more important that policy-making in this field is as far as possible based on realistic, well-informed views on the seriousness of the problem: its nature, its proportions and the damage it causes to individual persons, the social climate and economic life, and our society’s democratic institutions.3. In order to further empirical research on organised crime different, but complementary things have to be done. First of all, the few criminologists in Europe who are involved in this research, could build up a network and try –by means of colloquia and publications– to convince the scientific community that organised crime is a public issue that deserves much more attention in the academic world, that solutions can be found for the political, ethical and methodological dilemmas, and that it is worthwhile investing a lot of energy in the schooling of young researchers. Those among them who do not like to do research in the political arena, should be aware of the fact that the hundreds of big cases which have been investigated in the foregoing years all over Europe, offer tremendous opportunities for research in this area.4. 1. On the limits of a “direct approach”, see C. Fijnaut, “Researching organised crime”, in: R. Morgan (ed.), Policing organised crime and crime prevention, Bristol, Bristol and Bath Centre for Criminal Justice, 1990, pp. 76-81, and, by the way of an example, D. Gambetta, The Sicilian mafia; the business of private protection, Cambridge, Mass., Harvard University Press, 1993, p. 9. 2. Important recent examples of “life histories” in Europe are e. g. P. Arlacchi, Les hommes du deshonneur; la stupéfiante confession du repenti Antonino Calderone, Paris, Albin Michel, 1993, and F. Bovenkerk, La bella Bettien; het levensverhaal van een Nederlandse go-between voor de Columbiaanse drugskartels, Amsterdam, Meulenhoff, 1995. 3. P. Reuter, Disorganised crime; illegal markets and the mafia, Cambridge, Mass., The MIT Press, 1983, pp. 174-187. 4. Cfr. J. Jacobs, Busting the mob; United States v. Cosa Nostra, New York, New York University Press, 1994, p. XI. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 56 But, these opportunities can only be exploited if the police, judicial authorities, local administrations, regulatory agencies are willing to open their files for criminological research. This leads to my second point: Parliaments, governments and the named institutions should more and more try to overcome the (unjustified) resistance in their circles to independent and impartial scientific research in this field. They should come to see that not only general societal interests would be well-served by academic research, but in the longer run also their own interests. One of the reasons e. g. why even perfectly legitimate forms of undercover policing and other more intrusive means of investigation are in general viewed with great suspicion, is that police and justice authorities themselves have not succeeded in convincing important sections of the population that the use of such means is sometimes necessary in order to contain organised crime. So, also for them time has come to take the initiative and to invite academic researchers to look at the problems. The Ad Hoc Working Group on Organised Crime of the EU member-states could perhaps become a suitable forum for the exchange of ideas between policy makers and academics on the future of research on organised crime in this part of Europe. Empirical Criminological Research on Organised Crime The State of Affairs in Europe 57 Résumé Approche criminologique empirique de la criminalité organisée Cyrille Fijnaut 1) Quelle est la situation de la criminologie empirique européenne concernant le crime organisé.? Il convient de distinguer la criminalité organisée, le crime professionnel, le terrorisme, la criminalité en col blanc et les actes illégaux au bénéfice de grandes sociétés. Au niveau transnational, aucune recherche empirique originale n’a été faite pour l’instant. Les ouvrages journalistiques ont l’inconvénient d’être trop alarmistes. Les institutions européennes seraient dans l’impossibilité de préparer des rapports sur la criminalité organisée ou du moins de les publier. Toutefois, la Commission européenne de lutte contre la fraude et l’Unité drogue d’Europol ont fait des publications intéressantes. Quatre catégories de pays peuvent être distingués : 1) L’Italie, l’Allemagne et la Hollande : dans ces pays, pour des raisons évidentes, beaucoup d’études ont été faites. La criminalité organisée est devenue un thème d’ordre public. 2) L’Espagne, le Portugal, les Pays scandinaves, la France et le Royaume-Uni : il n’y existe aucune recherche criminologique empirique significative. Les leaders d’opinions n’y sont pas conscients de ces problèmes ou ne se les représentent pas en terme de criminalité organisée. Pour la France, les préoccupations sont récentes (exemple : le rapport d’Aubert en 1993). 3) La Suisse et la Belgique : il s’agit ici d’une catégorie intermédiaire de pays dont les gouvernements sont préoccupés par la criminalité organisée et où il existe des rapports. 4) Les pays d’Europe centrale et orientale : les gouvernements sont très conscients des problèmes de criminalité organisée mais ne sont ni désireux, ni capables pour toutes sortes de raison, de promouvoir une recherche empirique sur ces questions. En conséquence, il existe très peu de recherches au niveau européen et peu au niveau des nations. 2) Pourquoi une telle pauvreté des recherches originales.? Jusqu’aux années 80, la plupart des pays considéraient le crime organisé comme un problème étranger, voire exotique mais du tout comme une menace réelle. La criminologie n’a pas constitué un véritable enjeu en Europe. Dans beaucoup de pays européens la criminologie ne s’est pas développée en tant que discipline empirique. En outre, la criminologie traditionnelle s’intéresse aux individus et non aux groupes. Enfin, le crime organisé est un problème très complexe avec des aspects légaux, financiers, administratifs et économiques. Même des criminologues qualifiés ne sont pas disposés à effectuer des recherches sur le crime organisé. Ils estiment que le crime organisé est un faux problème artificiellement créé par les médias et la police, que la recherche sur ce sujet ne peut pas promouvoir leur statut de criminologues. La criminalité organisée serait pour eux un sujet sensible car débordant inévitablement sur la corruption dans la sphère politique. Les chercheurs risquent alors d’être victimes de campagnes d’opinions ou de poursuites judiciaires pour atteinte à la vie privée. Les institutions officielles ne veulent pas céder leurs informations. Aussi, les meilleurs rapports sont d’origine parlementaire parce qu’ils ont des sources d’informations auxquelles chercheurs indépendants ne peuvent accéder. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 58 Les criminologues devraient étudier le crime organisé directement mais cette approche est très difficile. 3) Le futur ou l’avenir de la recherche empirique sur le crime organisé. Il faut conduire davantage de recherches en ce domaine, car il y aurait entre autres avantages, la possibilité d’enrichir les discussions théoriques, méthodologiques, éthiques, etc. Les criminologues européens étudiant le crime organisé devraient mettre au point un réseau et convaincre la communauté scientifique que de donner plus d’attention au crime organisé. Les institutions de la police, de la justice, les administrations locales devraient ouvrir leurs dossiers aux chercheurs car, à long terme, la recherche universitaire va défendre leurs intérêts. Resumen Enfoque criminologico empirico de la criminalidad organizada Cyrille Fijnaut I. ¿ Cuál es la situación de la criminología empírica europea en lo que concierne el crimen organizado.? Es conveniente distinguir la criminalidad organizada, el crimen profesional, el terrarismo la criminalidad de cuello blanco y los actos ilegales a beneficio de grandes sociedades. Al nível transnacional. ninguna investigación empírica original ha sido hecha por el momento. Las revistas periodísticas tienen como inconveniente de ser demasiado alarmistas Las instituciones europeas estarían en la imposibilidad de preparar informes sobre la criminalidad organizada o por lo menos de publicarlos. Sin embargo, la Comisíon Europea de lucha contra el fraude y la Unidad droga de Europol han hecho, publicaciones interesantes. Se pueden distinguir cuatro categorias de países : 1) Italia, Alemania, y Holanda : se hicieron muchos estudios en estos países, por razones evidentes. La criminalidad organizada ha sido un tema de orden público. 2) España, Portugal, Países Escandinavos, Francia y E1 Reino Unido : no existe ninguna investigación criminológica empírica significativa. Los líderes de opiniones no son conscientes de estos problemas o no se los representan en término de criminalidad organizada. Para Francia, las preocupaciones son recientes (ejemplo : el informe de Aubert en 1993). 3) Suiza y Bélgica : se trata de una categoría intermediaria de países cuyos gobiernos están preocupados por la criminalidad organizada y donde existen informes. 4) Los Países de Europa Central y Oriental : los gobiernos son muy conscientes de los problemas de criminalidad organizada pero no desean, ni son capaces por toda clase de razón, de promover una investigación empírica sobre estas preguntas. Por consiguiente, existen muy pocas investigaciones al nivel europeo y pocas al nivel de las naciones. II. ¿ Por qué tal pobreza en las investigaciones originales.? Empirical Criminological Research on Organised Crime The State of Affairs in Europe 59 Hasta los años 80, la mayoría de los países consideraban el crimen organizado como un problema extraño, hasta exótico pero no como una amenaza real. La criminalogia no constituyó una verdadera apuesta en Europa. En machos países europeos la criminología no se desarrolló como disciplina empírica. Además, la criminolgía tradicional se interesa por los individuos y no por los grupos. Por fin, el crimen organizado es un problema muy complejo con aspectos legales, financieros, administrativos y económicos. Hasta criminólogos cualificados no estan dispuestos a efectuar investigaciones sobre el crimen organizado. Consideran que el crimen organizado es un falso problema artificialmente creado por los medias y la policía, que la investigación sobre este asunto no puede promover su estatuto de criminólogos. La criminalidad organizada sería para ellos un asunto sensible desbordante inevitablemente sobre la corrupción en la esfera política. Entonces los investigadores corren peligro de ser víctimas de campañas de opiniones o de persecuciones judiciales por delito en la intimidad. Las instituciones oficiales no quieren dar sus informaciones. Así, los mejores informes son de origen parlernentario porque tienen fuentes de informaciones que los investigadores independientes no pueden obtener. Los criminólogos tendrían que estudiar el crimen organizado directamente pero esto es muy difícil. III. El futuro o el porvenir de la investigación ernpírica sobre el crimen organizado. Hay que dirigir más investigaciones es este terreno, porque hubiera coma ventajas la posibilidad de enriquecer las discuciones teóricas, metodológicas, éticas, etc. Los criminólogos europeos que estudian el crimen organizado tendrían que poner a punto una red y convencer la comunidad científica de poner más cuidado en el crimen organizado. Las instituciones de la policía, de la justicia, las administraciones locales deberían abrir sus informes a los investigadores, porque a largo plazo la inveshgación universitaria va a defender sus intereses. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 60 Sociological contributions to the study of organised crime Michael Levi, professor of criminology, University of Cardiff, Wales The study of organised crime is a minority pursuit within criminology and, a fortiori, within sociology. Most of the few of US criminologists who are interested in it have a social commitment to reducing levels of social harm and insecurity. However, as analysts of the subject that Sutherland and Cressey (1940) once termed the analysis of “the making of laws, the breaking of laws, and society’s reaction towards the breaking of laws”, we laws are obliged also to stand back somewhat from the politics-driven pursuit of criminal justice polices and ask what are the intended and unintended consequences of social action including, for example, the criminalisation of “vices” such as narcotics use and sexual services that are in popular demand. Sociologists interested in organised crime have asked how subcultures of criminality are created and sustained; how those subcultures interact with the rest of “society”. –formal systems of social control such as police, courts, and electoral processes; –less formal systems such as the economy and value systems. And how and for what purposes we build up our images of criminal organisation. In this sense, there is a considerable overlap between the substance of Professor Fijnaut’s paper and my own : criminology, after all, is largely a hybrid product of sociology, social and individual psychology, and law, and the Anglo-Dutch traditions of criminology and sociology are fairly empirical. Sociological contributions to the study of organised crime What have sociologists contributed to the study of organised crime? First, until Santa Barbara professor Cressey’s 1969 book Theft of the Nation, they displayed little explicit interest in it. What they had discussed was the effect of social disorganisation and differential social organisation on the stability of cities and upon the coherence of value systems as successive waves of immigrants (mostly from Europe) arrived in the “melting pot” (no pun intended) of America. Reflecting on this today, one could observe that the need of those immigrants to find people who could sponsor and employ them, and who could communicate with them in their own language, acted to solidify ethnic groupings in the short term and concentrate ethnic populations in particular parts of particular cities (This has, of course, contemporary relevance for Europeans, whether one is dealing with migrators who are Fukinese Chinese, Iraqi, Maghreb, Russian-speakers, or Turks). Combined with the democratised and decentralised system in the US of electing police chiefs and judges directly, this gave the politically powerful in the locality a chance to exert far greater control over the criminal justice process than was the case in Britain, France or Germany, for example. Thus, it was little surprise to sociologists that labour unions who exerted considerable solidarity should be able to extort money from employers (or that trusted senior officials should be able to divert many such payments to their personal accounts). Corruption – the exchange of money for power – will also tend to flow in the realpolitik of political economy towards those who have the power to license (or not license) activities such as land development or the safety of products or premises, especially where it is anticipated that there will be no substantial downside risk from corrupt offers. The perception (as well as the reality) that people take public positions not out of duty but for profit assists in that judgement process, and sociological insights into value strains and reactions to value conflicts, as well as the learning of corrupt values once they have become established, have become common. Cressey’s study Theft of the Nation was largely derived from FBI accounts and the testimony of one of the earlier American pentiti, Joseph Valachi. Whether Cressey was the subject of deliberate disinformation or whether he, Valachi (in his testimony designed to get him out of trouble), and the FBI itself were largely reflecting the ideological beliefs of then FBI Director J. Edgar Hoover is open to debate. However, sociologists would be interested not only. • (i) in whether his version of the American Mafia as a sort of line management national organisation organised on “Fordist” production lines fitted the facts about the way that “crime” was organised, but also. • (ii) an empirical question about whether our (mis) use of term “crime” is too wide. For example, are we arguing that burglary, robbery, car theft, theft from cars, insider trading, frauds or various types – all these domestic and commercial crimes – are all “organised” by vertically and horizontally criminal groups? If not, then we should be careful about what we mean by the economic structure of criminal markets and the implication that they will become monopolistic. Furthermore, there is the question, for example, as to whether to classify Nigerian of Zairian plastic card or “advance fee” fraudsters (or those Britons and Germans who combine in pyramid selling “Ponzi” schemes) as “organised criminals”. Also, in a different mode, • (iii) about the explicit or implicit social objectives of the FBI itself in promoting this view of organised crime : it is arguable, for example, that with the decline of the Cold War, the FBI needed some federal moral panic to which they might respond, thereby justifying themselves (Similar arguments might be raised today about the need of the intelligence agencies to find a role in find a role in fighting international organised crime). It is tempting to demonise whole nations just because many of the people Westerners encounter behave a criminal way. Perhaps, too, people want to find some sinister conspiracy rather than cope with the messy, complex reality. For my personal part, however, although the analysis of bureaucratic motivation is an interesting and important academic discipline which makes some commentators look sceptically at accounts of organised crime by officials, it is too easy for academics and the media to become distracted by this and to neglect the more difficult and, arguably, more socially Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 62 important task of examining how crime is organised and what factors determine these modes of organisation.1. In doing the latter task, we should not shrink from reviewing the close links between business, politics and organised criminals. Chambliss (1978) pointed out that organised crime in Seattle was more properly described as a coalition (I would suggest, a shifting coalition between business people, local politicians, union leaders, and gangsters (though he neglected the fact that much extortion of business people by racketeers was unwanted). Similarly, the conception of Italian organised crime as the defiance of the State by dangerous ethnic and family groupings has been undermined (since tangentopoli and the pentiti) and replaced by the understanding that organised crime represented an alliance between criminal families, some business people, politicians, and some sections of policing institutions (including tax and security services), which remained unchallenged so long as the threat of communism gave them a value as a bulwark against that ideology. (Of course, some business people found that the unofficial taxation was an unreasonable burden, and complaints about that and about improper awarding of contracts led eventually to tangentopoli : see Levi and Nelken, 1996). Mc lntosh (1975) once defined the study of criminal organisation as the study of the organisation of society in the way it bore upon crime (which one might refine into) opportunities and motivation). Thus sociologists such as Gambetta (1993) discuss the importance of trust in social relations, and the role of the mafia in ensuring reciprocal dealings, using their reputations as violent enforcers to ensure that both sides to transactions performed their roles. One might develop those insights and use them to develop anti-crime strategies, for example using the system of what in England were called “supergrasses” and in Italy are “pentiti” (though the latter term should be treated ironically, since penitence is rarely a feature of their lives) to destroy underworld trust. One the trust has gone, stable relationships are manageable only via fear of reprisal, and even that valuation of fear is limited where offenders face death or very long prison sentences anyway. So knowledge of subcultural value systems is important for optimising control measures : for some groups, stigma may be enough, whereas for others it may be useless. In North-western Europe organised crime as a criminal economy is essentially a cross-border crime-trade, certainly as far as the Netherlands are involved (Van Duyne, 1993). Whatever criminal trade is being carried out one cannot avoid border crossing. An organised crime trade should be looked upon as situated in an international market of supply and demand in which the crime-entrepreneur operates as a criminal merchant. Though crime-entrepreneurs have to operate in an economic “underworld”, by which is meant all those forms of trade and industry which are systematically on the wrong side of the law, it is not an “other world” phenomenon. Some crime-entrepreneurs are continually in search of establishing bridgeheads with the respectable “upperworld” through corruption or through the social mechanism of courting 1. This task is hard for policing agencies as well as for academics, and usually requires longer time frames for research than funding agencies are keen to supply : it is seldom possible for academics to provide in a few months ’correct’analyses of criminal organisation that professionals have spent decades trying to build up. Sociological contributions to the study of organised crime 63 friendship with the high and mighty. Some are operating directly within the “respectable” circles of the legitimate trade and industry. Others simply meet in prison, if fraudsters, lawyers or accountants have been jailed for fraud of money-laundering offences. This many sided relation between the upper-and underworld is an important though difficult and sensitive aspect of any research on organised crime. Crime-entrepreneurs (a) are in essence free traders and (b) do not start their business in a cultural vacuum. As free tradesmen they are not primarily oriented toward bureaucratic organisational development but rather are pragmatic “activists”, whose trading organisations develop bit by bit by selecting (unconscious) models they find in their immediate environment. If the normal (licit) business nucleus in Southern Italy, Turkey or Pakistan is the (extended) family (Ianni and Reuss-Ianni, 1972), in Northern Europe there are no such social-economic family units. Here legal and criminal business patterns develop pragmatically along trusted networks of friends and connections (Rebscher and Vahlenkamp, 1988; Weschke and Heine-HeiB, 1990). The exceptions are the crime-enterprises of minorities in Europe whose businesses are family matters, which should not be equated with impersonal “Syndicates” (Ianni, 1974). Given the multi-ethnic composition of present day Europe it is clear that any static definition of organised crime will not conform to any monolithic presentation of organised crime. A West Indian crime family (matriarchate) differs widely from a Turkish family (patriachate) in organising their (crime) businesses. The former looks to the outsider a mere spectacle of organised chaos, while the latter seems to operate along strict hierarchical principles. After the French revolution modern strong nation states developed in Western Europe where under the rule of law violence became a state monopoly. The rural banditry shifted to other badly controlled regions like Southern Italy and the Balkan area. In Italy where a traditionally corrupt state did little to unite its citizens under the rule of law, the southern regions despised their wealthy northern businesslike co-patriots and the government alike. The traditional crime networks, The Camorra and “Ndrangheta survived and adapted to the 20th century circumstances (Albadinsky, 1991; Paoli 1994). The Mafia developed its own fateful momentum (Arlacchi, 1986). It is arguable that the present abolition of the border controls between most of the Member States of the European Union, the uncertain situation at the EU-east border and the undeniable flow of homeless fortune hunters and desperate refugees does not contain similar constituent elements for criminal gang building, as a first stage of organised crime development as is was before and during the French revolution. Contemporary Turkish crime-enterprises are in essence patriarchal family enterprises. The members of such family enterprises reside in other European countries as well as in Turkey which accounts for the “integrated trading line” between the supply in Turkey to the distribution points in the consumer countries, while the transport is also being carried out by members of the family or well known friends from the region of origin, often mutually connected by family ties. Such family-enterprises, headed by the senior member (s) of the family should not be confused with western hierarchical line-organisations. According Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 64 to the police, the Turkish family crime-enterprises are characterised by a “cell-structure”. The executive segments of these family-enterprises should be considered independent “cells”, having insight into only a part of the trade flow and organisation. According to the police such a cell structure accounts for the strength of the Turkish organisations. However, notwithstanding such delegation mechanism as “cells”, the important leaders showed little inclination to delegate the operation of segments to these alleged cells. Very often they interfere with the business because that is their temperament, generating confusion. Indeed, it is possible that the so-called “cell-structure” is no more than a (western) police projection on culture where “men of respect” (in the culture of machismo) do not delegate to cells, but – often risking their own incrimination – give orders while standing in the front-line. This classical family pattern is open to changes and adaptation to the Western way of doing business, just as is the case with the development of the Turkish minority in Europe. In van Duyne’s research, two heroin wholesalers enterprises were observed who had developed Western European business traits. They no longer only used their family members for the carrying out of the transport and made use of Dutch and German front companies. The German and Dutch organisations, comprising several Turkish crimefamilies, co-operated in the import and transit of heroin. The German branch was quite remarkable. It was led by a woman : mother Kaba Arslan (the “hard handed lioness”) who developed good relations with her Dutch counterpart Yilmaz Manay (The “invincible greengrocer”), who had a vegetable shop. The turnover of the families was approximately 1000 kilos of which 600 was seized. The Arslan family was firmly ruled by the mother who shrewdly penetrated the market place of other rival families. Though the kernel of this business was formed by the two families many tasks concerning the transport were carried out by non family-members : Turks, but also Dutchmen and Germans. Against them discipline was more restrained than could otherwise be observed in the Turkish heroin trade. These hauliers were alert professionals who did not take chances. If they suspected police action they dropped the cargo or left the expensive truck along the road. Such objective failures were not punished. However, the failure to pay was heavily corrected : friends and relatives of debtors were taken hostage or beaten up. Mother Arslan was widely feared for her debt collection : “Kaba Arslan is looking for you’was a well known unpleasant warning. Still the German police described the little woman, who officially worked hard in her carpetshop, as a normal and integrated resident. The same applies to the much more peaceful Manav who bought his heroin from Arslan under his greengrocer’s cover, were on could not even find a carrot. From the telephone taps on could learn that the families were looking for better legal covers. They were integrated indeed, acting like most of the Dutch or German crime-entrepreneurs. Thus, we see the way that subcultures, patterns of social migration, and forms of economic behaviour interact (a point that might be made also about other migratory cultures such as the Chinese, especially the Fukinese). Next in the sociological model comes the issues of money-laundering and social integration into respectability. The American sociologist Daniel Bell once described organised crime as “the queer ladder of social mobility”. In a Sociological contributions to the study of organised crime 65 culture dominated by “new money”, where status is based upon what one possesses rather than heredity (as it remains partly in some European countries such as Britain), yesterday’s gangster is today’s leading community figure. In more traditional societies, such reintegration is more difficult. The social divisions between underworld and upperworld thereby create barriers (which may reduce the sophistication of criminal activities within the underworld, but which also protects fraudsters from the stigma of association with “organised crime” and from the heavier police interest from that association). But blackmail, vice and greed can bring upperworld and underworld together. Problems arise especially for those crime-entrepreneurs who have their economic homes in Europe or North America. In a highly elaborate tax and banking control system, one has to make really special money-laundering precautions to get away from the patient painstaking analysis of one’s paper trail by the fiscal or “real” police. Still, most detected laundering techniques of indigenous crime-entrepreneurs consist of crude loan-back constructions. If the loan back system is sufficiently spread over many jurisdictions, preferably the Caribbean or Dutch Indies, Panama and the Middle East, the fiscal authorities or the police will have a really hard time to follow the paper trail. Surprisingly most of the crime-entrepreneurs, especially the drug traffickers, only use “local” loanback loops over Luxembourg, and sometimes Austria, the Channel Islands or Liechtenstein (though it may be hard to see how those countries can subscribe to the FATF or other money-laundering conventions while continuing their practices, and unlike Turkey, they have not been formally by FATF). Nevertheless, this crude summary serves to emphasise the linkages between underworld, business and professional elites, and systems of social detection and surveillance. In conclusion, there are many varieties of sociologist, including some very abstract theoreticians who yield little understanding of anything. However, sociologists have made some contribution to helping us (including law enforcement) understand the complex interplay between legal repression and actual behaviour. By tracing the forms of social and family organisation (including links to the business world, for example among Asians), one should be able to predict the forms of trust and co-operation and work out disruption strategies accordingly. The historical insight into the problems experienced through repressive alcohol policies in high-demand cultures such as America should have enabled us to predict the consequences of narcotics repression : but sometimes such messages are unwanted. Besides, in Islamic societies, where demand is much lower, the effect of formal prohibition may not be so negative (though they may also be unnecessary). A more critical deconstruction of the term “crime” into types of criminal activity ought also to induce greater caution into the of the usage of the term “organised crime” : as the work of Reuters (1983) implies, there was never any question of American crime syndicates dominating all types of crime for gain in all American cities. My own interests as a lawyer-sociologist specialising in criminology are in understanding better the barriers to entry into serious crime for gain for different people in terms of : –ease of access to knowledge of how to commit crime; –value systems about tolerance of crime (s); Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 66 –access to like-minded potential criminals (for those organised crimes that require criminal co-operation, which some organised frauds may not do); –realistic opportunities to commit crime (freedom from family, police, or victim surveillance); –perceptions of risks and consequences of committing crime occasionally or regularly (applied to people at different levels, from petty blackmailers to lawyers). Understanding the way that such barriers and criminal markets function combines economic and political sociology, and enables us to appreciate better the chances of disruption and incapacitation strategies in dealing with “organised crime”, and also, in knowing when such strategies are unlikely to be fruitful and it may be pragmatically better to deal with “crime problems” as “social and health” problems, or to redesign bureaucratic systems (such as EU regulation and social security) so as to reduce opportunities for organised fraud and corruption. In conclusion, there are almost two separate strategic problems. The first is to get the public, politicians, and policing colleagues to take organised crime seriously. The second is the strategy for discovering how crimes are organised and what factors influence their development. Sometimes, the imagery one develops in achieving the former objective may get in the way of rational planning to act against the latter one. Réferences Abadinsky, H., Organised crime. Chicago, Nelson-Hall, 1991 d’Aubert, F., L’Argent sale. Enquête sur un krach retentissant. Paris, Plon, 1993 Arlacchi, P., Mafia business. The mafia ethic and the spirit of capitalism. London, Verso, 19986; Block, A.A. en W.J. Chambliss, Organizing Crime. New York, Elsevier1981; Chaikin, D. Money laundering : an investigatory perspective. Criminal Law Forum, 1991, nr. 3, pp. 467-510; Cressey, D.R., Theft of the nation; the structure and operations of organised crime in America. New York Harper & Row, 1969; Duyne, P.C. van, Crime-enterprises and the legitimate industry in the Netherlands. In C. Fijnaut and J. Jacobs (eds.) Organised crime and its containment. A transatlantic Initiative. Deventer, Kluwer Law and Taxation Publishers, 1991; Duyne, P.C. van, Organised crime and business crime-enterprises in the Netherlands. 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De même, le crime organisé italien peut être conçu comme une alliance entre des familles criminelles, certains hommes d’affaires, des politiciens, et certaines sections des institutions policières (y compris les services des impôts). M. Gambetta (The sicilian Mafia, 1993), a souligné le rôle de la Mafia dans l’établissement de relations de confiance entre les parties d’une transaction économique. Ainsi, pour combattre la Mafia, il faut ruiner les bases de cette confiance en faisant parler les «.repentis.». Les facteurs culturels ont un impact sur le crime organisé. Dans les pays où la famille compte beaucoup dans la vie économique, le crime organisé se développe sur une base familiale (Italie). Aussi, le crime n’est pas organisé de la même façon dans une famille antillaise (matriarcale) que dans une famille turque (patriarcale). Le crime organisé s’est développé, historiquement, sur les franges des États-nations européens (sud de l’Italie, Balkans). On peut se demander si l’ouverture actuelle des frontières entre les membres de l’Union européenne, combinée avec la situation instable des pays de l’Europe centrale et orientale et avec un afflux d’immigrés économiques, ne constitue pas la première étape d’un développement du crime tel qu’il a existé avant la Révolution française.? Les entreprises criminelles turques contemporaines sont des entreprises familiales. Il existe des filières familiales qui effectuent le transit entre la Turquie et les autres pays où la famille est implantée. Ces entreprises criminelles ont une structure de «.cellule.».? Chaque segment de l’entreprise familiale est une «.cellule.» indépendante qui ne perçoit qu’une partie du flux commercial et de l’organisation. Lorsqu’elles s’implantent en Europe, ces cellules perdent certains traits qui les caractérisaient, elles ne font plus nécessairement appel à des membres de la famille. Les criminels organisés, en s’appuyant sur les activités clandestines qu’ils développent, cherchent à créer des ponts avec le monde des activités légales (en employant par exemple la corruption, ou en finançant des affaires respectables). Les sociologues se sont intéressés à ce passage entre le monde de la criminalité organisée et le monde des affaires respectables. Ce passage est plus facile dans les pays où le statut est défini par ce que l’on possède plutôt que par ce que l’on hérite (États-Unis, Royaume Uni). Dans les sociétés traditionnelles, ce type d’intégration est plus difficile. En conclusion, les sociologues ont aidé à comprendre l’interaction complexe entre la répression légale et les formes effectives de comportement. Connaissant les formes d’organisation sociale et familiale, on peut prévoir les formes de confiance et de coopération sur lesquelles repose la criminalité organisée, et élaborer des stratégies de dissolution de ces entreprises. L’étude du fonctionnement des marchés criminels et des barrières à l’entrée de ces marchés constitue elle aussi un apport (savoir comment commettre des crimes, systèmes de valeurs tolérant le crime, possibilité d’instaurer une coopération entre criminels, occasions de commettre des crimes, perception des risques de l’activité criminelle). Sociological contributions to the study of organised crime 69 Resumen Las contribuciones soclológicas al estudio del crimen organizado Michael Levi ¿ Cómo se organiza el crimen y cuáles son los factores que determinan los modos de organización.? Así son los dos problemáticos centrales con que se confrontan los sociólogos. Hay que subrayar los lazos estrechos entre criminalidad organizada, el mundo de los negocios y el mundo político. Un estudio de 1978 relativo a la ciudad de Seattle mostró que estos lazos definían una coalición inestable entre hombres de negocios, políticos locales, líderes sindicales y gángsters. Del mismo modo, el crimen organizado italiano puede aparecer coma una unión entre familias criminales, ciertos hombres de negocios, políticos y ciertas secciones de las instituciones policiales (incluso los servicios que se ocupan de impuestos). El señor Gambetta (The sicilien Mafia, 1993) subrayó el papal de la Mafia en la elaboración de rclaciones de confianza entre las partes de una transacción económica. Así, para luchar contra la Mafia, es necesario que arruinemos las bases de esta confianza tomando declaraciones de los «.arrepentidos.». Los factores culturales tienen un impacto sobre el crimen organizado. En los países donde la familia tiene gran importancia en la vida económica, el crimen organizado se desarrolla en una base familiar (Italia). También el crimen no se organiza del mismo modo en una familia antillana (matriarcal) y en una familia turca (patriarcal). El crimen organizado se desarrolló, históricamente, en los confines de los Estados-naciones europeos (sur de Italia, Balcanes). Podemos preguntarnos si la apertura actual de las fronteras entre los miembros de la Unión europea, combinada con la situación inestable de los países de la Europa central y oriental y con una afluencia de inmigrados económicos, no constituye la primera etapa de un desarrollo del crimen tal como existió antes de la Revolución francesa. Las empresas criminales turcas contemporáneas son empresas familiares. Existen redes familiares que efectúan el tránsito entre Turquía y los otros países donde vive la familia. Estas empresas criminales tienen una estructura dc «.célula.». Cada segmento de la empresa familiar es una «.célula.» independiente que sólo percibe una parte del flujo mercantil y de la organización. Cuando se establecen en Europa, estas células pierden algunas características y no recurren necesariamente a miembros de la familia. Los criminales organizados, apoyándose en las actividades clandestinas que desarrollan, se esfuerzan por crear puentes con el mundo de las actividades legales (utilizando par ejemplo la corrupción o financiando negocios respetables). Los sociólogos se interesaron por este traslado entre el mundo de la criminalidad organizada y el mundo de los negocios respetables. Este traslado es más fácil en los países donde el estatuto se determina antes por lo que se posee que por lo que se hereda (Estados Unidos, Reino Unido). En las sociedades tradicionales, este tipo de integración es más difícil. Como conclusión, los sociólogos ayudaron a entender la interacción compleja entre la represión legal y las formas efectivas de comportamiento. Conociendo las formas de organización social y familial, podemos prever las formas de confianza y cooperación en que se fundamenta la criminalidad organizada, y establecer estrategias de disolución de esas empresas. E1 estudio del funcionamiento de los mercados criminales y de las barreras en la entrada de estos mercados también constituye un complemento (saber cómo cometer crímenes, sistemas de valores que toleran el crimen, posibilidad de instaurar una cooperación entre criminales, ocasiones de cometer crímenes, percepción de los riesgos de la actividad criminal). Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 70 Les dimensions juridiques de la criminalité organisée : aspect transnational et coopération entre États Michel De Salvia, secrétaire général adjoint de la Commission européenne des Droits de l’Homme, Conseil de l’Europe aspect transnational Les dimensions et coopération juridiques entre de la criminalité États organisée : Dans les sociétés démocratiques, la défense efficace de l’ordre social dépend de la capacité des pouvoirs publics a réagir de façon prompte et adéquate, c’est-à-dire mesurée, aux atteintes à la légalité émanant de comportements réprimés par la loi pénale. Ainsi, il est un principe communément admis en matière de politique criminelle suivant lequel le degré de riposte de la société doit être proportionné à la gravité de l’infraction commise. Les différents codes pénaux et les autres lois répressives indiquent quels sont les comportements susceptibles d’entraîner des sanctions pénales. Avec plus ou moins de différences quant à l’étendue des sanctions encourues, l’on peut déceler une sorte de noyau commun de comportements sanctionnés de façon similaire dans tous les systèmes juridiques : le meurtre, les coups et blessures, le vol, l’abus de confiance (fraude, escroquerie), etc. Toutefois, étroitement liée aux conceptions prévalant dans une société donnée, la loi pénale revêt essentiellement un caractère national et territorial : en principe, la sanction suit l’établissement d’une responsabilité pénale pour un fait commis sur le territoire de l’État concerné. Pour atteindre ses buts tendant à accroître les profits illicites et à déstabiliser la société afin de mieux asseoir son emprise, la criminalité a de tout temps cherché à opérer un saut qualitatif en s’organisant et en se structurant. Tout cela a conduit et conduit à une division des tâches parmi les personnes composant l’organisation criminelle (tâches de direction et tâches d’exécution) ainsi qu’à une véritable hiérarchie reposant sur des règles propres à l’organisation. L’«.association de malfaiteurs.» et les infractions dites «.collectives.» sont parmi les notions juridiques élaborées pour essayer de prendre en compte et de combattre ce phénomène criminel dont l’ampleur dans certains pays non seulement sape la crédibilité des pouvoirs publics, mais met en danger également les institutions démocratiques du pays. Il n’est que de citer la criminalité mafieuse qui s’étend désormais comme une gangrène à nombre de pays européens. Entre le crime, qui est le fait d’une ou plusieurs personnes agissant pourrait-on dire de façon impromptue et impulsive, et le crime organisé, qui s’inscrit dans un dessein délibéré et constitue un acte de révolte permamente contre les règles établies par la société, il y a plus qu’un degré de gravité. Ce sont les principes de légalité et de prééminence du droit qui sont atteints par le crime organisé.; c’est la confiance elle-même des citoyens dans l’ordre social qui se trouve menacée. Par «.crime organisé.», il faut entendre les formes les plus évoluées, et donc les plus dangereuses, de l’illégalité érigée en système de même que de la violence utilisée comme moyen de lutte. À partir des années soixante, deux éléments ont contribué, me semblet-il, à modifier les données du problème auquel sont confrontées les sociétés européennes et celles de la planète en général. D’abord, au fur et à mesure des progrès économiques et techniques, la «.criminalité organisée.» s’est dotée des moyens matériels les plus modernes, qu’il s’agisse d’armes nouvelles que la miniaturisation rend redoutables, ou d’explosifs de plus en plus meurtriers, ou, enfin, de moyens de détection et de transmissions les plus sophistiqués. Ensuite, en même temps que les pays s’ouvraient sur l’extérieur, tant pour ce qui est des produits manufacturés qu’en ce qui concerne la possibilité pour les citoyens de circuler librement et de s’établir ailleurs que dans leur propre pays, en même temps que s’affirmait, dès lors, une véritable supranationalité des comportements individuels et collectifs en rendant perméables et donc illusoires les frontières nationales, le crime organisé nouait des relations étroites dans différents pays. Il profitait en même temps du cloisonnement des systèmes juridiques pour ce qui est de la répression. À la différence du droit pénal, le crime organisé ne connaît pas de frontière.; il s’abrite souvent derrière l’écran opaque de la souveraineté nationale pour déjouer poursuites et sanctions. Ces deux éléments conjugués – des moyens techniques évolués et la perméabilité des frontières – ont produit un décalage croissant entre le crime organisé, désormais «.citoyen du monde.», et la riposte des sociétés soumises, elles, aux sujétions de la loi nationale. C’est donc le «.crime organisé.» à dimension internationale qui doit être frappé si l’on veut éradiquer une criminalité, comme celle liée au trafic de drogue et d’autres marchandises sources de profits importants (voitures, armes, matériels radioactifs, etc.) que l’on croirait à tort réduite à des dimensions nationales. Certes, la coopération internationale et en particulier européenne s’est, elle aussi, organisée. La Convention européenne d’extradition de 1957, la Convention européenne d’entraide judiciaire en matière pénale de 1959 ainsi que, plus récemment, la Convention européenne pour la répression du terrorisme de 1977 – textes élaborés dans le cadre du Conseil de l’Europe – témoignent de la volonté des États d’agir ensemble contre un danger commun. Malgré les indéniables progrès accomplis en la matière, cette coopération reste néanmoins fragile. En effet, il faut bien prendre conscience qu’avec l’éclatement des barrières nationales, le crime organisé est devenu en grande partie et, pour ses aspects les plus pernicieux, un phénomène transnational. Les dimensions juridiques de ce phénomène doivent désormais intégrer un niveau international, Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 72 étranger en principe à la justice pénale. D’où la nécessité d’une coopération entre États d’autant plus indispensable qu’elle se place à l’intérieur d’un réseau d’intérêts communs : réalisation d’un espace économique unique, harmonisation des législations en matière économique et sociale, élaboration des grands principes en matière de droits fondamentaux. Le crime organisé : phénomène transnational Il est hors de doute que la grande criminalité a tendance à calquer son organisation et sa stratégie sur celles des regroupements qui s’opèrent au niveau transnational, qu’il s’agisse de regroupements entre États ou dans le cadre des relations économiques internationales. Deux raisons à cela. D’abord, un espace économique plus important amplifie bien évidemment les profits, en assurant du même coup une grande mobilité aux criminels qui peuvent multiplier leurs entreprises tout en variant de cible. Ensuite, le crime organisé s’accomode très bien des clivages nationaux. Bien mieux, il essaie de bénéficier du cloisonnement du droit en tirant avantage des traditions juridiques et des sensibilités nationales. Malgré les efforts accomplis dans certains pays pour donner une épaisseur à un phénomène aux contours flous comme l’est celui du «.crime organisé.», il s’avère malaisé de donner une définition exhaustive de cette notion (la notion d’association de malfaiteurs et, plus, encore celle d’association de type mafieux du droit italien paraissent à cet égard les moins imprécises). Ceci est d’autant plus vrai pour ce qui est de la notion de crime organisé dans un contexte international car il manque à l’évidence, sur ce plan, une base juridique qui pourrait servir à la circonscrire, si ce n’est quelques indications puisées dans des textes internationaux. En droit national et en règle générale, l’élément «.international.» ne saurait, en tant que tel, être pris en considération pour définir une infraction, voire une série d’infractions, ce qui à l’évidence affaiblit les poursuites et empêche de bien comprendre ce phénomène délictueux. Il s’agit là d’un véritable vide juridique pour ce qui est du déclenchement des poursuites et de l’«.infliction.» de sanctions pénales commises dans un environnement international. Seuls les crimes de guerre et ceux contre l’humanité, de même que certains autres crimes particulièrement odieux, comme ceux ayant trait à l’exploitation sexuelle des enfants, semblent échapper à la règle de la territorialité. À moins d’en arriver à un code pénal transnational ou international, ne fût-ce que pour certaines catégories de crimes, ce qui semble toutefois pour l’instant relever de vœux très pieux, le combat contre le fléau du crime organisé, qui déborde par ses activités les frontières d’un seul pays, ne peut être mené efficacement que moyennant une action internationale qui dépasserait le stade d’une simple coopération. Il faut s’entendre bien évidemment sur le contenu à donner à la notion de «.crime organisé à dimension internationale.». Les dimensions juridiques de la criminalité organisée : aspect transnational et coopération entre États 73 Ce n’est qu’au début des années soixante-dix, avec les détournements illégaux d’avions civils, que l’on semble avoir pris conscience de la dimension internationale du crime, c’est-à-dire d’infractions pénales organisées, préparées et exécutées souvent sur le territoire de plusieurs pays. Une résolution du Comité des ministres du Conseil de l’Europe du 29 juin 1970 (no 70/23) relative à la piraterie aérienne invite les États membres à coopérer avec les organismes internationaux compétents, «.en vue d’une action internationale rapide contre la piraterie aérienne et le sabotage au sol et en vol des avions.». Les actes de terrorisme perpétrés dans plusieurs pays européens dans les années soixante-dix ont constitué un autre facteur de prise de conscience de la dimension internationale du crime organisé. Par sa recommandation 703 de mai 1973, l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe condamnait «.les actes de terrorisme international qui, quelle qu’en soit la cause, devraient faire l’objet de sanctions pénales en tant qu’actes criminels graves entraînant le meurtre ou l’enlèvement de personnes innocentes ou mettant leur vie en danger.». Comme nous le verrons, la Convention pour la répression du terrorisme du 27 janvier 1977, élaborée dans le sillage de cette Recommandation, vise à circonscrire la notion d’«.infraction politique.» et à faciliter la poursuite des auteurs d’actes criminels graves liés au terrorisme qui se trouvent sur le territoire des parties contractrantes. Les liens étroits qui peuvent se tisser entre le crime organisé et le monde des affaires et de la finance internationale ont amené le Conseil de l’Europe à étudier la mise en place de moyens pour faire face à un défi des plus subtils. Par sa recommandation du 27 juin 198O (no R (80) 10) relative aux mesures contre le transfert et la mise à l’abri des capitaux d’origine criminelle, le Comité des ministres du Conseil de l’Europe a estimé que «.le transfert de capitaux d’origine criminelle d’un pays à un autre et leur blanchissage par insertion dans le circuit économique suscitent de graves problèmes, favorisent la commission de nouveaux actes criminels et étendent ainsi le phénomène aussi bien sur le plan national qu’international.». Dans le même ordre d’idées, le Comité des ministres du Conseil de l’Europe, par sa recommandation du 25 juin 1981 (no R (81) 12) sur la criminalité des affaires, s’est déclaré convaincu que «.les États membres du Conseil de l’Europe.» ont le plus grand intérêt à développer des lignes de politique criminelle communes contre ce fléau et à améliorer rapidement leur entraide dans ce domaine «.. Auparavant, il avait considéré que.» la croissance considérable de l’activité économique dans les États membres du Conseil de l’Europe et le développement des relations économiques internationales donnent souvent lieu à la commission d’infractions pénales «.et que.» la criminalité des affaires nuit à l’économie nationale et/ou internationale ». Ainsi, par petites touches et presque de façon subreptice, a pris corps une notion transnationale de «.crime.» d’une particulière gravité, nécessairement organisé, car il peut bénéficier du support logistique de réseaux criminels ou terroristes ou peut s’appuyer sur des structures liées au monde économique et financier, et qui opèrent indistinctement au niveau national et international. Il serait vain de chercher une définition plus précise de cette notion dans les textes nationaux ou internationaux. Toutefois, trois instruments élaborés dans le cadre du Conseil de l’Europe fournissent plus qu’un éclairage sur ce que l’on doit considérer comme relevant de la grave criminalité qui appelle, par ellemême, une coopération internationale. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 74 À l’évidence, les infractions terroristes se rangent dans cette catégorie de crimes. La Convention européenne pour la répression du terrorisme du 27 janvier 1977 en fournit un exemple. En son article 1, cette Convention précise que ne sont pas considérées comme infractions «.politiques.» ou connexes à pareille infraction ou inspirées par des mobiles politiques, les infractions suivantes : «.a. les infractions comprises dans le champ d’application de la Convention pour la répression de la capture illicite d’aéronefs, signée à La Haye le 16 décembre 1970.; b. les infractions comprises dans le champ d’application de la Convention pour la répression d’actes illicites dirigés contre la sécurité de l’aviation civile, signée à Montréal le 23 septembre 1971.; c. les infractions graves constituées par une attaque contre la vie, l’intégrité corporelle ou la liberté des personnes ayant droit à une protection internationale, y compris les agents diplomatiques.; d. les infractions comportant l’enlèvement, la prise d’otage ou la séquestration arbitraire.; e. les infractions comportant l’utilisation de bombes, grenades, fusées, armes à feu automatiques, ou de lettres ou colis piégés, dans la mesure où cette utilisation présente un danger pour des personnes.; f. la tentative de commettre une des infractions précitées ou la participation en tant que coauteur ou complice d’une personne qui commet ou tente de commettre une telle infrcation. » Un autre instrument élaboré dans le cadre du Conseil de l’Europe, la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime du 8 novembre 1990, vise à combattre «.la criminalité grave.» qui est, comme l’affirme son préambule, «.de plus en plus un problème international.». L’idée maîtresse de cette Convention est qu’il importe de «.priver le délinquant des produits du crime.». En principe, ce texte concerne tout type de criminalité, mais l’accent est mis en particulier, comme le précise le rapport explicatif, sur les «.crimes graves.», et en particulier «.les infractions en matière de stupéfiants, le trafic d’armes, les infractions terroristes, le trafic d’enfants et de jeunes femmes et d’autres infractions rapportant des profits inportants.». Enfin, l’Accord du 31 janvier 1995 relatif au trafic illicite par mer, mettant en œuvre l’article 17 de la Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes, vise, ainsi qu’il ressort de son préambule, la répression du trafic de stupéfiants comme faisant partie de la «.lutte contre la grande criminalité, qui est de plus en plus un problème international.». Criminalité grave, grande criminalité, crimes graves, autant de notions qui recouvrent la même réalité : un phénomène criminel d’envergure, et le plus souvent structuré, qui, dans le monde ouvert des relations économiques, tend à se fondre dans le tissu de la société, nationale et internationale. Pour accroître ses profits, ce phénomène utilise les canaux les plus divers, dont les réseaux Les dimensions juridiques de la criminalité organisée : aspect transnational et coopération entre États 75 financiers et bancaires constituent les instruments de blanchiment des produits du crime les plus performants. Ce n’est pas un hasard, donc, si dans l’impossibilité de maîtriser le crime organisé en amont, on ait voulu frapper les profits réalisés par ce dernier en aval, en prévoyant une obligation à charge des États de criminaliser le blanchiment. Déjà la Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes du 20 décembre 1988 avait prévu cette obligation. La Convention du Conseil de l’Europe sur le blanchiment a étendu cette obligation (article 6) à tout produit du crime, c’est-à-dire «.tout avantage économique tiré d’infractions pénales.» au sens de l’article 1 de la Convention. En particulier l’infraction de blanchiment doit viser tout acte commis intentionnellement à : «.la conversion ou au transfert de biens dont celui qui s’y livre sait que ces biens constituent des produits, dans le but de dissimuler ou de déguiser l’origine illicite desdits biens ou d’aider toute personne qui y est impliquée dans la commission de l’infraction principale à échapper aux conséquences juridiques de ses actes.;....». Par «.bien.», il faut entendre au sens de l’article 1-b de la Convention «.un bien de toute nature, qu’il soit corporel ou, incorporel, meuble ou immeuble, ainsi que les actes juridiques ou documents attestant d’un titre ou d’un droit sur le bien.». La nature internationale du crime organisé et les liens existant entre l’économie et la criminalité montrent à l’évidence qu’une lutte efficace passe par une action concertée entre États. La coopération internationale dont il faut renforcer les structures et les méthodes devient plus qu’indispensable. Sans elle, la répression deviendrait un vain mot. La coopération entre États : forces et faiblesses Depuis des décennies déjà, la coopération entre États pour faire face à la montée en puissance du crime organisé s’est développée, tant au niveau des forces de police, qu’au niveau juridique et judiciaire proprement dit. Ce n’est pas à vous que j’apprendrai qu’au niveau des relations entre les polices nationales, Interpol est une réalité qui a permis et permet d’atteindre d’importants résultats. Mais bien évidemment, cette coopération policière doit s’inscrire dans un cadre juridique précis et ne peut, à elle seule, résoudre les problèmes qui se posent lorsqu’il faut adopter, au niveau national, des mesures spécifiques de contraintes sur les personnes et sur les biens. C’est la raison pour laquelle la coopération juridique entre États revêt une importance primordiale. Cette coopération s’est développée, surtout dans le cadre européen, pour des raisons évidentes : des pays sur la voie d’une union plus étroite, pour reprendre la formulation du statut du Conseil de l’Europe, se doivent de mettre en place une ferme coopération en vue de poursuivre, comme l’indique le préambule de la Convention de novembre 1990 concernant les mesures devant Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 76 frapper les produits du crime, «.une politique pénale commune tendant à la protection de la société.». Pour ce qui est de notre propos, cette coopération devrait revêtir deux aspects. Un aspect général s’isncrivant dans les rapports que les États entretiennent tout naturellement et qui ont trait aux formes classiques de collaboration : l’extradition et l’entraide judiciaire notamment. Un aspect plus spécifique qui vise les problèmes particuliers posés par les formes les plus graves de criminalité. En ce qui concerne le premier aspect, le Conseil de l’Europe a élaboré, dès les années cinquante, une série d’instruments juridiques à caractère multilatéral, tendant à harmoniser les matières de l’extradition et de l’entraide judiciaire en favorisant ainsi une maîtrise plus efficace du phénomène criminel. La Convention européenne d’extradition du 13 décembre 1957, la plus ancienne des conventions élaborées dans le domaine pénal par le Conseil de l’Europe, pose le principe de l’obligation d’extrader. Elle constitue une sorte de convention cadre car elle précise les principes généraux en matière d’extradition contenus dans bon nombre de traités d’extradition entre États (en matière de faits donnant lieu à extradition, d’infractions politiques, de respect de la règle de la spécialité, de procédures à suivre pour la remise de l’intéressé etc.). Cette Convention a été complétée par deux protocoles additionnels, l’un du 15 octobre 1975 qui exclut du champ des infractions politiques notamment les crimes contre l’humanité, et qui précise les modalités d’application du principe ne bis in idem, l’autre du 17 mars 1978 qui concerne en particulier l’extradition pour infractions fiscales et celle consécutive à un jugement par défaut dans l’État requérant. La Convention européenne d’entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959 constitue une autre pièce maîtresse de la coopération entre États au sein du Conseil de l’Europe. Elle concerne, au sens très large, la coopération en matière de commissions rogatoires et de remise d’actes de procédure et de décisions judiciaires. Elle a été complétée par un protocole additionnel du 17 mars 1978 qui vise à restreindre le pouvoir des États de refuser une extradition pour le seul motif que la demande se rapporte à une infraction que la partie requise considère comme fiscale. La Convention européenne sur la valeur internationale des jugements répressifs du 28 mai 1970 est un instrument ambitieux de coopération en matière pénale. Elle vise à dépasser le principe de territorialité pour ce qui est des effets des décisions judiciaires et à proposer des solutions aux problèmes de validité des jugements étrangers. Comme il ressort du rapport explicatif à cette Convention, divers facteurs sont à l’origine de ce problème, parmi lesquels la mobilité accrue des populations ainsi que le développement des ressources économiques à la disposition du crime. Qu’il suffise de rappeler à cet égard que le principe fondamental posé par cette Convention est l’assimilation d’un jugement étranger à un jugement émanant des tribunaux d’un autre État contractant, mais que les modalités d’exécution de ce principe sont soumises à de nombreuses contraintes. Les dimensions juridiques de la criminalité organisée : aspect transnational et coopération entre États 77 Le domaine qui intéresse de manière plus spécifique la criminalité organisée est traité par les deux textes dont on a déjà parlé : la Convention relative au blanchiment des produits du crime et l’Accord relatif au trafic illicite par mer de produits stupéfiants, ainsi que par la Convention sur les opérations financières des «.initiés.» du 20 avril 1989. Le premier instrument (Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime) est peut-être la tentative la plus achevée dans ce domaine, car il tend à priver les délinquants des instruments et des fruits de leurs activités illégales où que ces derniers (biens meubles ou immeubles) se trouvent. Il s’agit d’un instrument qui, à la différence d’autres instruments élaborés dans le cadre du Conseil de l’Europe, est ouvert à d’autres États, même non européens, mais qui partagent les mêmes conceptions que celles qui prévalent au sein de cette organisation. Le principe général retenu par la Convention est celui de la coopération la plus large possible «.aux fins d’investigations et de procédures visant à la confiscation des instruments et produits.» (article 7 par. 1), de même que l’entraide la plus large possible aux fins d’investigations «.pour identifier et dépister les instruments, les produits et les autres biens susceptibles de confiscation..» (article 8). La coopération peut revêtir trois formes : deux concernent les décisions et procédures de confiscation, une les mesures provisoires à adopter en vue d’une confiscation. Il est à souligner qu’il s’agit d’obligations assumées par un État vis-à-vis d’autres États : la partie requise doit en principe déférer, sauf refus dûment motivé, aux demandes de la partie requérante. Ainsi, il existe une obligation de prendre des mesures provisoires (article 11, par. 1), exécutées conformément au droit interne de la partie requise (article 12) de même qu’une obligation de confiscation, suite à une demande formulée par une partie à la Convention. À cet égard, l’article 13 paragraphe 1 dispose ce qui suit : «.Une partie qui a reçu d’une autre partie une demande de confiscation concernant des instruments ou des produits, situés sur son territoire, doit : a. exécuter une décision de confiscation émanant d’un tribunal de la partie requérante en ce qui concerne ces instruments ou ces produits.; ou b. présenter cette demande à ses autorités compétentes pour obtenir une décision de confiscation et, si celle-ci est accordée, l’exécuter ». Les procédures permettant d’obtenir et d’exécuter la confiscation sont régies par la loi de la partie requise (article 14). Il est intéressant de noter qu’en ce qui concerne les biens confisqués, la partie requise en dispose selon son droit interne, mais que des accords particuliers peuvent régler le partage de ces biens entre les parties coopérantes (article 15). Selon le rapport explicatif, «.ce partage international est destiné à promouvoir l’esprit de coopération consacré par la convention.». S’agissant du produit de l’infraction, la Convention a prévu que les parties peuvent appliquer un autre système de confiscation, celui non du bien mais de la valeur (article 13, par. 4). La confiscation de la valeur consiste dans l’obligation, pour celui qui y est assujetti, de verser une somme d’argent calculée d’après une estimation de la valeur des produits tirés directement des infractions ou des biens de substitution. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 78 Il est évident que le champ d’application de la Convention est limité à des activités délictueuses et que la coloration pénale ressort sans ambigüité du texte. Toutefois, il y a lieu de préciser que le fait que dans certains États la confiscation ne soit pas considérée comme une sanction pénale n’est pas pertinent, dans la mesure où la confiscation visée par cet instrument est liée à une activité criminelle. Ce que l’on demande aux États est, en règle générale, d’envisager l’adoption de techniques nouvelles qui, tout en sauvegardant les droits fondamentaux, permettent de combattre efficacement la grande criminalité. Enfin, la Convention sur les opérations financières des «.initiés.» du 20 avril 1989 tend à développer l’échange d’informations entre États, en matière de criminalité des affaires. Elle concerne un des aspects les plus difficiles à maîtriser, lorsque les enquêtes portent sur des faits commis dans un cadre international. Si l’on envisage un cadre plus large de coopération internationale, l’on constate que la communauté internationale a, dès 1988, fourni un instrument dont l’efficacité dépend bien sûr de la bonne volonté des parties, et qui a le grand mérite non seulement d’exister mais de poser les jalons d’une procédure internationale comportant l’adoption de mesures et de comportements précis de la part des États. Il s’agit de la Convention du 19 décembre 1988 contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes. Ce texte a d’ailleurs inspiré non seulement l’Accord conclu dans le cadre du Conseil de l’Europe pour réprimer le trafic illicite de ces substances par mer, mais également la Convention relative au blanchiment et autres mesures frappant les produits du crime. Les États membres du Conseil de l’Europe ont étendu le champ d’application de la Convention des Nations Unies, en particulier en ce qui concerne l’adoption de mesures de saisie et de confiscation, aux produits du crime en général et non seulement de ceux issus du trafic illicite de stupéfiants. Le préambule de la Convention des Nations Unies est on ne peut plus explicite quant aux menaces que le trafic illicite de stupéfiants fait peser sur les sociétés. Il s’agit là d’une «.activité criminelle internationale.» qui est la «.source de gains financiers et de fortunes importantes qui permettent aux organisations criminelles transnationales de pénétrer, contaminer et corrompre les structures de l’État, les activités commerciales et financières légitimes et la société à tous les niveaux.». Il importe donc de «.priver ceux qui se livrent au trafic illicite du fruit de leurs activités criminelles.» en supprimant ainsi leur principal mobile. Ces principes se traduisent dans la Convention par des obligations précises, afin que les États puissent s’attaquer avec plus d’efficacité aux divers aspects du trafic illicite de stupéfiants qui ont une dimension internationale (article 2, par. 1). Elles consistent, notamment, dans l’obligation de criminaliser, entre autres, la production et la distribution de stupéfiants (article 3). Les tribunaux nationaux devraient tenir compte, en particulier, de circonstances factuelles conférant une particulière gravité à l’infraction, telles que la participation de l’auteur à «.d’autres activités criminelles organisées internationales.» (article 3, par. 5 b). À cet égard, des mesures doivent être adoptées pour permettre à un État de poursuivre l’auteur de l’infraction si celle-ci a été commise sur son territoire (article 4, par. 1, a, i). Des poursuites peuvent être engagées égale- Les dimensions juridiques de la criminalité organisée : aspect transnational et coopération entre États 79 ment contre l’auteur présumé de l’infraction si l’infraction a été commise par un de ses nationaux ou par une personne résidant habituellement sur son territoire. L’obligation de confiscation des produits des infractions est prévue à l’article 5 de la Convention. Cette confiscation peut revêtir la forme de confiscation de la valeur des produits. Enfin, la Convention prévoit l’obligation d’extrader (article 6) ou, à défaut, de poursuivre l’auteur de l’infraction, ainsi que l’obligation d’entraide judiciaire «.la plus étendue.» (article 7). L’Accord du Conseil de l’Europe relatif au trafic illicite de stupéfiants par mer se greffe sur la Convention des Nations Unies, car il est destiné à donner application à l’article 17 de cet instrument qui prévoit l’adoption de mesures dans un cadre régional pour mettre fin au trafic par mer. L’Accord du Conseil de l’Europe prévoit certaines mesures précises pouvant être adoptées en haute mer, c’est-à-dire au-delà des eaux territoriales. Ainsi, après avoir reçu l’autorisation de l’État du pavillon, un autre État – l’État intervenant – peut accomplir diverses mesures : arraisonner le navire, fouiller la cargaison, saisir des objets, contraindre le navire et les personnes à se faire escorter jusqu’au territoire de l’État intervenant (article 9). Si des preuves de la commission d’une infraction liée au trafic de stupéfiants sont rassemblées, les personnes concernées peuvent être arrêtées (article 10, par. 1). Toutefois, l’État du pavillon peut décider d’exercer sa compétence préferentielle à poursuivre les auteurs présumés d’infractions (article 14). Dans ce cas, les navires, cargaisons, les personnes et les preuves lui sont remis par l’État intervenant (article 15). Le contenu de ces instruments internationaux montre que l’une des forces de la coopération réside, comme on le voit aisément, dans le fait que les États ont pris conscience de la nécessité pour eux de coopérer activement à la recherche de techniques nouvelles à la hauteur des défis auxquels ils sont confrontés. En ce qui concerne les États membres du Conseil de l’Europe, cette prise de conscience – qui a permis d’aller de l’avant en de nombreux domaines – a été favorisée par les solidarités qui se sont tissées entre ces États et qui ont donné naissance à un espace judiciaire des droits de l’homme axé sur la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Les résultats obtenus grâce à la coopération internationale ne doivent pas faire passer sous silence les faiblesses, congénitales pourrait-on dire, de cette coopération. Schématiquement, et pour ce qui est de notre propos, elles peuvent être groupées sous trois chapitres. D’abord, il ne faut pas surestimer la nature des obligations assumées par les États, car elles sont souvent assorties de limitations qui en réduisent singulièrement la portée. Ainsi, pour ne prendre qu’un seul exemple récent puisé dans la pratique européenne, la coopération internationale prévue par la Convention relative au blanchiment du Conseil de l’Europe, peut être refusée en particulier dans le cas où la mesure sollicitée serait contraire aux principes fondamentaux de l’ordre juridique de la partie requise ou bien l’exécution de la demande risque de porter atteinte à la souveraineté, à la sécurité, à l’ordre public ou à d’autres intérêts essentiels de la partie requise (article 18, par. 1). Il s’agit là, comme on peut le constater, de motifs suffisamment amples pour justifier un refus. Ce qu’il importe de préserver, ce sont donc des relations Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 80 fondées sur la confiance et le respect mutuels entre États qui, seules, peuvent garantir une coopération efficace. Ensuite, une autre faiblesse réside dans la possibilité ouverte aux États d’émettre des réserves, ce qui peut réduire d’une façon considérable parfois la nature des obligations. Ainsi, et pour reprendre l’exemple de la Convention relative au blanchiment déjà rappelée, des réserves ont été émises tant en ce qui concerne la nature des infractions, objet des mesures de confiscation (article 2, par. 1), que pour ce qui est des infractions auxquelles s’applique l’obligation de criminaliser le blanchiment des produits du crime (article 6, par. 1). Enfin, et ceci constitue à l’évidence une des faiblesses les plus importantes, la non-ratification des instruments par plusieurs États fait peser une sérieuse hypothèque sur l’efficacité de la coopération internationale. Toujours pour ce qui est de la Convention sur le blanchiment du Conseil de l’Europe, ouverte à la signature le 8 novembre 1990, elle n’est entrée en vigueur (trois ratifications) que le 1er septembre 1993 et n’a été ratifiée à ce jour que par 9 des 39 États de l’Organisation. *** Le constat auquel nous venons de nous livrer est loin d’être rassurant. Face à l’internationalisation croissante des activités criminelles, toutefois, les États ont pris la mesure du danger et la coopération qui s’établit entre eux, à tous les niveaux et au niveau policier en premier lieu, témoigne de leur détermination à adapter les méthodes d’enquête et de poursuite à la nouvelle donne. Par ailleurs, les principes de respect de la prééminence du droit et des droits fondamentaux peuvent être considérés comme constituant autant de butoirs qui retardent une coopération de plus en plus évidente. Mais, au niveau européen, cette difficulté apparente constitue cependant un des aspects positifs de la coopération internationale et peut servir d’exemple à d’autres États, groupés au sein d’organismes régionaux. En effet, par son réseau d’accords et de conventions, le Conseil de l’Europe constitue le fer de lance d’une coopération appelée à se développer et à se recentrer. Le saut qualitatif qu’implique une coopération plus étroite conduisant à l’établissement d’un véritable espace judiciaire européen, également en matière de poursuites pénales, est facilitée par les solidarités qui lient déjà les États membres de cette Organisation et qui font qu’en matière de droits de l’homme et de libertés fondamentales, il existe un véritable droit commun auquel ils peuvent et doivent se référer. La réglementation internationale, on l’a vu, présente des failles dues en grande partie à une conception trop traditionnelle de la souveraineté nationale. À y voir de plus près, toutefois, l’on s’aperçoit que les atermoiements, voire les réticences des États, se fondent sur d’éventuels conflits, réels ou supposés, entre la réglementation internationale et le respect des principes constitutionnels et des concepts fondamentaux des systèmes juridiques des différents États. Or, dans les instruments élaborés au sein du Conseil de l’Europe, des références explicites sont faites à la Convention européenne des droits de Les dimensions juridiques de la criminalité organisée : aspect transnational et coopération entre États 81 l’homme ainsi qu’à la jurisprudence des organes de la Convention. Reconnaître un jugement étranger, admettre le bien-fondé d’une demande (de collaboration ou d’exécution d’une mesure) émanant d’une autorité étrangère présuppose à l’évidence une certaine confiance dans la justice de même que dans les autorités étrangères. Une coopération plus étroite en vue de combattre efficacement les formes les plus graves de criminalité et qui implique l’adoption de mesures d’une particulière importance (arrestation de suspects, remise de prévenus, saisies et confiscations de biens, reconnaissance de jugements étrangers) ne peut être menée à bien que si la confiance s’est établie entre les différents systèmes répressifs nationaux. En Europe, cela implique que les mêmes principes (de prééminence du droit, de respect des droits de la défense et du procès équitable) s’appliquent aux procédures diligentées au niveau national, ce qui doit être le cas pour les États parties au système européen de protection des droits de l’homme. Il ne faut pas oublier que le justiciable européen dispose, avec le droit de recours individuel, d’un moyen judiciaire pour faire contrôler au niveau supranational le respect de ces principes. C’est donc en sauvegardant pleinement les droits fondamentaux que l’on peut asseoir sur des bases solides, parce que fondées sur la confiance mutuelle, une coopération internationale qui seule peut garantir une lutte efficace contre une criminalité organisée pour qui les cloisonnements nationaux représentent de plus en plus la meilleure arme de défense. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 82 Summary Juridical dimensions of organised crime: trans-national aspect and co-operation between States Michel De Salvia The extent of the activities set up by criminal organisations of the Mafia type, in some countries, affects the authorities’credibility and puts democratic institutions at risk, and transgresses the principle of lawfulness as well as the pre-eminence of Law. In the sixties’, criminal organisations are believed to have provided themselves with the most modern equipment, such as new arms, explosives, as well as the most sophisticated means of detection and communication, taking advantage of the beginning of free circulation of people and goods. It is believed that it is at that time that organised crime linked tightly with several countries. In order to combat organised crime, which ignores boundaries, international co-operation, and particularly European co-operation also organised itself, even if it remains fragile. Nowadays, it is a trans-national phenomenon, which demands a necessary co-operation between the States. 1) Organised crime: trans-national phenomenon Organised crime knew how to take advantage of a large economic space and of the compartmentalisation of the internal legislations. An exhaustive definition of this notion does not exist at the international level. The wording of an international penal code, if only for certain categories of crime, is only wishful thinking. The international dimension of organised crime seems to have been apparent only in the 70’s with the hijacking of civil planes, followed by terrorists acts in several European countries. Recommendations or resolutions were adopted. For example, observing the narrow bonds between organised crime and the world of business and international finance, a recommendation dated 27 June 1980 emphasised that “capital gained from crime was being transferred from one country to another and laundered through being inserted into the economical circuits”. Other instruments, such as the European Convention for the fight against terrorism dated 27 January 1977, the Convention concerning money laundering, detection, seizure and confiscation of the proceeds of crime dated 8 November 1990, which were elaborated within the European Council, give enlightenment and call for international co-operation. 2) Co-operation between states: strengths and weaknesses This co-operation developed for decades in a very tight juridical framework, both at Police forces level (ex. Interpol) and at judicial and the Judiciary level. It still has to take on a general aspect relating to the classical forms of co-operation (ex. extradition) and a more specific aspect concerning organised crime following the example of the Convention concerning money laundering, detection, seizure and confiscation of the crime proceeds. The general principle retained by this Convention is the widest co-operation possible, addressing even non European States which would be willing to adhere to it, with the condition that they share the notions prevailing within the Council of Europe. The strength of these international instruments is the awareness of the necessity to co-operate actively seeking new techniques within a judicial space of human rights, centred on the European Convention of the safeguard of human rights and of fundamental liberties. Their weaknesses stand in the possibility to insert limitations which reduce the import of the text, the ability to express reserves which lighten the nature of obligations, and even the non-ratification by several States which diminishes its international dimension. As an example, the Convention on money laundering dated 8 November 1990 has only been ratified by 9 out of the 39 States of the European organisation. The aforesaid instruments show the States’determination to adapt investigating and prosecuting methods modelled on the principle of parallelism with the forms of the organised crime activities, within a European judicial space enabling criminal prosecution. Still, flaws exist due to a too rigid notion of national sovereignty. A tighter co-operation starts with the establishment of mutual confidence. Les dimensions juridiques de la criminalité organisée : aspect transnational et coopération entre États 83 Resumen Las dimensiones juridicas de la criminalidad organizada : aspecto transnacional y cooperacion entre Estados Michel De Salvia La amplitud de las actividades llevadas a cabo por la criminalidad organizada de tipo mafioso atenta, en algunos países, contra la credibilidad de los poderes públicos y pone en peligro las instituciones democráticas, transgrediendo los principios de legalidad y de preeminencia del derecho. Las organizaciones criminales, en los años 60, se equiparon con los medios materiales más modernos, tanto en armas como en explosivos y en medios de transmisión y de detección sofisticados, aprovechando los comienzos de la libre circulación de personas y bienes. Durante este período que el crimen organizado habría establecido relaciones estrechas en diferentes países. Para luchar contra el crimen organizado, que no conoce fronteras, la cooperación internacional, y en particular, la cooperación europea también se ha establecido, aunque continúa siendo frágil. Hoy, el crimen organizado es un fenómeno transnacional (1) que llama a una necesaria cooperación entre Estados (2). 1) El crimen organizado : fenómeno transnacional. El crimen organizado ha sabido sacar provecho de la ampliación del espacio económico y de la compartimentalización de las legislaciones internas. No existe una definición exhaustiva de esta noción en el plano internacional. La redacción de un código penal internacional, aunque sea para algunas categorías de crímenes, no pasa de ser un deseo. La dimensión internacional del crimen organizado sólo apareció a comienzos de los años 70 con los secuestros de aeronaves civiles, seguidos de actos terroristas en varios países europeos. A raíz de esto fueron adoptadas recomendaciones o resoluciones. Por ejemplo, constatando los estrechos lazos existentes entre el crimen organizado y el mundo de los negocios y de las finanzas internacionales, una recomendación del 27 de junio de 1980 hacía hincapié en «.la transferencia de capitales de origen criminal de un país a otro y su blanqueo por inserción en el circuito económico.». Otros instrumentos, como la Convención Europea para la Represión del Terrorismo del 27 de enero de 1977, la convención relativa al blanqueo, a la detección, a la detención y a la confiscación de los productos del crimen del 8 de noviembre de 1990, elaborados en el marco del Consejo de Europa, suministran más que una aclaración y llaman a una cooperación internacional. 2) La cooperación entre estados : fuerzas y debilidades Esta cooperación es desarrollada desde hace decenas de años en un marco jurídico muy estricto tanto a nivel de las fuerzas de policía (Ejemplo : Interpol) como a nivel jurídico y judicial. Aún le falta revestir un aspecto general concerniendo la formas clásicas de colaboración (Ejemplo : la extradición) y un aspecto más específico concerniendo la criminalidad organizada, a la manera de la Convención relativa al blanqueo, a la detección, a la incautación y a la confiscación de los productos del crimen. El principio general retenido por esta Convención es el de una cooperación lo más amplia posible, dirigiéndose incluso a los Estados no europeos que quieran adherir, con la condición de compartir las concepciones del Consejo de Europa. La fuerza de estos instrumentos internacionales es la toma de conciencia de la necesidad de cooperar activamente en la búsqueda de nuevas técnicas en un espacio judicial de derechos del hombre, basados en la Convención Europea de protección de los derechos del hombre y de las libertades fundamentales. Sus debilidades residen en la posibilidad de insertar limitaciones que reducen el alcance del texto y en la facultad de emitir reservas que aligeren la naturaleza de las obligaciones, llegando a una no ratificación por parte de varios Estados que reduciría la dimensión Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 84 internacional. Por ejemplo, la Convención sobre el blanqueo de capitales del 8 de noviembre de 1990 sólo fue ratificada por 9 de los 39 Estados de la organización europea. Los elementos citados anteriormente testimonian la determinación de los Estados a adoptar métodos de investigación y de persecución calcados sobre el principio del paralelismo con las formas de las actividades de la criminalidad organizada, en un espacio judiciario europeo que autorice las persecuciones penales. Sin embargo, existen fallas debidas a una concepción demasiado rígida de la soberanía nacional. Una cooperación más estrecha supone la instalación de una confianza mutua. Les dimensions juridiques de la criminalité organisée : aspect transnational et coopération entre États 85 Le crime organisé : constat et stratégie de lutte en France Bernard Gravet, directeur central de la Police judiciaire française Concept et réalitéLe crime organisé : constat et stratégie de lutte en France C’est autour des années 1920, dans l’Amérique de la prohibition que naît et se vulgarise l’expression «.organized crime.» pour désigner les gangs mafieux qui sévissent alors outre-Atlantique, tenant en coupe réglée et à grande échelle, par la violence et la corruption, l’essentiel des activités illicites de l’époque (jeux, alcool, drogue, prostitution...). En quelques soixante-dix années, ce terme de «.crime organisé.» s’est étendu bien au-delà des limites du territoire nord-américain. Il est venu, en de nombreux points du globe, tenter de traduire l’inquiétante réalité d’un phénomène criminel permanent, structuré et insidieux, ressenti à juste titre comme une menace pour les démocraties. Force est cependant de constater que si le vocable même de «.crime organisé.» s’est assez largement répandu, le concept qui s’y rattache reste, lui, d’une consistance plus empirique et intuitive que juridique. Ni le code pénal, ni le code de procédure pénale français ne définissent ce qu’est le crime organisé. C’est donc ailleurs, sous la plume des théoriciens du droit et dans l’expérience des praticiens de la lutte contre la grande criminalité, qu’il nous faut chercher à en esquisser les contours. Ainsi, pour le professeur Raymond Gassin, le crime organisé est l’antithèse de la criminalité spontanée ou occasionnelle. Il s’entend «.du crime dont la préparation et l’exécution se caractérisent par une organisation méthodique et qui, le plus souvent, procure à ses auteurs leur moyen d’existence.». Cette définition correspond assez bien à ce que l’on dénomme habituellement «.le crime professionnel.» et que le code pénal qualifie, suivant les circonstances, d’«.association de malfaiteurs.» ou d’agissements en «.bande organisée.». Elle ne rend toutefois qu’imparfaitement compte de cette autre forme du crime organisé, forme plus complexe, plus élaborée oserait-on dire, qu’est le «.crime syndiqué.». Qu’il s’intitule «.Cosa Nostra.» a u x É t ats - U nis, «.Camorra.», «.N’Drangheta.» ou encore «.Sacra Corona Unita.» en Italie, «.Triades.» en Chine, «.Boryokudans.» ou «.Yakusas.» au Japon, «.Cartels.» en terres colombiennes, le crime syndiqué ou de type mafieux se singularise par son très haut degré d’organisation et par sa capacité à détenir de façon permanente le monopole de la criminalité sur un territoire donné. On parle avec lui d’«.empire.» ou d’«.industrie du crime.», et quoi que ces formules soient quelque peu empreintes de sensationnalisme, elles n’en expriment pas moins tout ce qu’il y a à redouter de ces sociétés parallèles, brutales et corruptives dont les activités se placent en marge du contrôle des citoyens et des gouvernements et s’inspirent, dans la recherche du profit illicite, de toutes les techniques modernes de gestion économique. Les études relatives au crime organisé, pris dans son acception la plus large, sont relativement récentes et de ce fait, peu nombreuses. La plupart d’entre elles insistent néanmoins sur deux paramètres majeurs à retenir dès lors que l’on s’efforce aujourd’hui de cerner le phénomène. Il s’agit, d’une part, du caractère transnational du crime organisé.; d’autre part, de sa propension à infiltrer le tissu économique d’un grand nombre de pays. C’est sur la base de tels constats qu’en 1988, l’Organisation Internationale de Police Criminelle, Interpol, a retenu pour définir le crime organisé l’énoncé fédérateur suivant : «.Toute association ou regroupement de personnes se livrant à une activité illicite, dont le premier but est de réaliser des profits, sans souci des frontières nationales.». Le crime organisé dans l’hexagone Les manifestations du crime organisé tel que nous venons d’en tracer les lignes générales sont multiples et peuvent relever aussi bien de l’action violente que des trafics illicites et de la délinquance financière. Aucun secteur n’est à vrai dire épargné. Qu’il s’agisse, par exemple, de traite des êtres humains, de trafic de drogue ou bien encore de trafic d’armes, d’œuvres d’art ou de véhicules volés, que l’on évoque le grand banditisme ou le faux-monnayage, et tout aussitôt se discerne l’entreprise de groupes ou d’organisations criminelles structurés. Depuis 1994, la statistique française de la criminalité et de la délinquance établie par le ministère de l’Intérieur à partir des données collectées au plan national par les services de police et les unités de gendarmerie, comporte un agrégat spécifique de rubriques, une sorte de «.panier de valeurs.», destiné à mieux mesurer, au sein de la criminalité globale du pays, la part des infractions imputables d’ordinaire aux agissements du crime organisé. En 1995, l’agrégat en question a permis de recenser 36.804 faits de cette nature ce qui représente un peu plus de 1.% du total des crimes et délits constatés cette année-là en France. Ce pourcentage peut à priori apparaître faible, voire peu préoccupant, comparé à l’importance numérique des cambriolages, des vols de voiture et de toutes ces autres infractions de petite ou moyenne délinquance qui affectent l’Hexagone comme elles affectent une majorité de ses voisins. Qu’on ne s’y trompe cependant pas. Pour qui sait lire derrière la sécheresse des chiffres statistiques leur traduction à l’aune du quotidien, leur signification en terme d’enquêtes judiciaires longues et complexes, l’activité du Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 88 crime organisé ne laisse pas d’inquiéter et d’exiger une mobilisation de chaque instant. Bien que régulièrement confrontée à des agissements de grande criminalité, la France n’est, pour l’heure, pas touchée par l’implantation sur son territoire de «.sociétés criminelles.» participant d’un schéma mafieux. Elle n’en a pas moins détecté et combattu à diverses reprises et avec succès ces dernières années les manœuvres d’organisations internationales du crime visant à faire de l’Hexagone, soit l’un des champs de passage ou d’extension de leurs trafics, soit une nouvelle plate-forme de blanchiment et d’investissement pour les capitaux générés par leurs entreprises illicites. Tel fut le cas en 1990, par exemple, lorsqu’en avançant derrière un montage financier international particulièrement complexe, une branche de la mafia italienne, issue de la région de San Remo, tenta de racheter le casino de Menton, sur la Côte-d’Azur, afin de recycler par ce biais une partie de son «.argent sale.». De la même façon, il fallut à la police judiciaire française réagir au plus vite en 1994 pour mettre à jour et démanteler, à l’issue d’une opération d’envergure baptisée «.Margarita.», tout un réseau de trafic de drogue et de blanchiment de fonds tissé dans le pays par les cartels colombiens. Les desseins de ces derniers échouèrent comme avaient échoué, dans les années 1980-1984, ceux de la triade 14 K, l’une des plus actives associations criminelles d’origine asiatique présentes en Europe, lorsqu’à l’époque, elle chercha à installer en France des filières étendues de distribution d’héroïne. La menace constituée par ces tentatives d’infiltration, et d’autres encore, doit être prise très au sérieux. Parce qu’il sait avec rapidité tirer parti de toutes les failles ouvertes dans les systèmes de sécurité d’une société par la survenance de mutations technologiques, économiques et comportementales, le crime organisé s’affirme comme un danger permanent, un danger qui requiert de la part de ceux qui ont pour mission d’en empêcher l’essor, une forte et continuelle capacité d’adaptation et de réaction. Une stratégie d’évaluation et de riposte La France ne dispose pas d’une législation spécifique visant à réprimer le crime organisé en tant que tel comme le fait l’Organisation Crime Control Act de 1970 aux États-Unis ou la loi no 646 du 13 septembre 1982 en Italie. Les textes en vigueur, au plan pénal et procédural, lui permettent néanmoins, grâce notamment à certains aménagements prévus dans les conditions de la garde-à-vue et de la perquisition, de conduire une action répressive efficace dans la lutte contre la criminalité organisée. Cette lutte revient principalement, au sein de la Police Nationale française, à la direction centrale de la police judiciaire qui présente l’avantage d’être, face à des malfaiteurs professionnels, une police criminelle centralisée, fortement spécialisée et dotée d’une compétence territoriale étendue. Le crime organisé : constat et stratégie de lutte en France 89 La police judiciaire traite 88.% des affaires comptabilisées chaque année par la statistique officielle dans son agrégat relatif à la grande criminalité. Elle le fait en s’appuyant sur vingt directions et services régionaux ainsi que sur des divisions et des offices centraux. Organismes à vocation interministérielle accueillant des gendarmes dans leurs rangs, les offices centraux de police judiciaire sont au nombre de sept. Le faux-monnayage, le trafic de stupéfiants, le banditisme, la grande délinquance financière, le trafic d’œuvres d’art, celui des explosifs, des armes et des matières nucléaires, la traite des êtres humains enfin, forment le champ de leurs compétences respectives. À l’intérieur de ce champ, les offices centraux de police judiciaire ont pour mission de centraliser et de traiter toutes les informations disponibles à l’échelon national, mais aussi d’animer, de coordonner et de soutenir, en liaison avec les magistrats, l’activité opérationnelle des services d’enquête. Ils sont, de ce point de vue, des pièces maîtresses dans le dispositif français de lutte contre le crime organisé. L’existence de telles structures est une chose. Faire en sorte qu’elles se maintiennent à un haut niveau d’efficacité face, nous l’avons dit, à des organisations criminelles sans cesse en quête de brèches nouvelles à exploiter, en est une autre. C’est la raison pour laquelle la direction centrale de la police judiciaire s’efforce d’adapter en permanence tous les moyens et les méthodes mis en œuvre à l’occasion de cette lutte par les quelques huit mille hommes et femmes qui travaillent dans ses rangs. Ainsi, le développement de la police technique et scientifique, de son identité judiciaire, de ses laboratoires, de sa documentation criminelle, autrement dit, de toutes ces composantes dont l’apport précieux au cours des investigations n’est plus à démontrer, constitue l’une de ses priorités, une priorité à ne jamais perdre de vue dès lors qu’il s’agit de rester efficient devant le crime organisé comme d’ailleurs, pourrait-on ajouter, devant la délinquance en général. Les performances du fichier automatisé des empreintes digitales, les résultats déjà enregistrés grâce aux progrès faits dans la recherche et le recueil d’indices sur la scène de crime et leur exploitation en laboratoire suffiraient à eux seuls, s’ils n’étaient associés à bien d’autres perfectionnements, à confirmer l’importance de la place qu’il convient d’accorder à la police technique et scientifique dans une stratégie moderne de répression de la grande criminalité. Une telle stratégie ne saurait pas non plus se concevoir en l’absence d’outils de coopération opérationnelle internationale. C’est à travers eux en effet, que se joue dans une large mesure la partie engagée dans chaque pays par les services de sécurité contre des organisations et des malfaiteurs dont les agissements, les trafics, les placements financiers ont de longue date adopté une dimension transnationale. Placé au sein de la direction centrale de la police judiciaire, le bureau central national-France de l’OIPC-Interpol, le SIRENE-France pour Schengen et l’unité nationale Europol sont les instruments actifs de cette coopération devenue désormais essentielle. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 90 Dans son combat contre le crime organisé, la police judiciaire française privilégie également la formation de ses personnels spécialisés, une formation qui vise non seulement à une parfaite pratique des techniques opérationnelles, comme par exemple les surveillances et les filatures reposant de plus en plus sur des moyens sophistiqués, mais aussi à la maîtrise de ces technologies récentes telles l’informatique ou la télématique que ne manquent pas d’utiliser les malfaiteurs professionnels, via Internet ou d’autres réseaux. À toute extension des domaines d’action du crime organisé doit correspondre une riposte rapide et appropriée des services répressifs. Il ne faut laisser s’installer aucun «.no man’s land.». C’est dans ce souci que la direction centrale de la police judiciaire a mis en place en son sein une brigade nationale de répression de la criminalité informatique de même qu’un groupe central de lutte contre les fraudes communautaires et une unité spécialisée dans la lutte anti-contrefaçons. Dans tous ces secteurs, à des degrés plus ou moins forts, la grande criminalité a déjà manifesté des velléités d’emprise. Mieux connaître l’adversaire pour mieux le combattre, telle est l’exigence première du développement de toute stratégie. Depuis sa création en 1907, la police judiciaire française a acquis une profonde et large connaissance des milieux du crime sévissant sur l’Hexagone, de leurs secteurs d’influence et de leurs modes opératoires. Fondé sur l’expérience et la pratique, alimenté par une documentation rigoureuse, ce savoir s’est cependant vu mettre à rude épreuve en cette fin du XXe siècle par l’évolution d’une criminalité de plus en plus transversale et diffuse dans ses agissements, de plus en plus étendue dans son envergure. Partant de ce constat, la direction centrale de la police judiciaire s’est dotée en 1995 d’une centrale du renseignement et de l’analyse criminelle chargée de faire converger vers elle et d’exploiter à des fins stratégiques et opérationnelles tous les renseignements, parfois épars, touchant au crime organisé et recueillis par les services de sécurité français et leurs correspondants étrangers. Cette centrale qui travaille en liaison avec l’Unité de coordination et de recherche anti-mafia (UCRAM) de la Police nationale s’intéresse à toutes les formes de criminalité professionnelle détectées sur le sol français et en particulier à celles d’émergence récente. Adaptation là encore, recherche incessante d’efficacité. C’est à ces conditions et à elles seules, appliquées sur tous les plans, qu’ils soient juridiques, techniques, opérationnels, qu’ils aient trait à la formation ou encore à la coopération internationale, que devra se gagner notre lutte de tous les jours, celle d’aujourd’hui et déjà celle de demain, contre les groupes et les organisations criminelles. Le crime organisé : constat et stratégie de lutte en France 91 Summary Organised crime: acknowledgement and combat strategy in France Bernard Gravet 1) Concept and reality The expression “organised crime” was born in the twenties, at the time of prohibition in America, to refer to Mafia gangs using violence and corruption for the benefit of their illegal activity such as gambling, selling alcohol, prostitution... This term spread well above the limits of the northern American territory, and nowadays, conveys a worrying reality in many countries. There is no common international definition, since the forms of the organisations vary and their activities are complex. (because of the various forms that the organisations take and the complexity of their activities.) Still, they all have in common a high degree of organisation and the monopoly of crime on a territory. Recent studies emphasise the trans-national characteristic of organised crime, also called “empire” or “crime industry”, and its capacity to infiltrate the economic threads of several countries. It is on the basis of such an acknowledgement that ICPO-INTERPOL retained in 1988 the following definition: “Any association or group of people engaged in illicit activities, the prime objective being to make profit without concern for national boundaries.” 2) Organised crime in France Since 1994, French statistics elaborated by the Ministry of the Interior, on a national scale, integrates an aggregate of specific rubrics meant to measure more accurately, within crime, the part imputable to organised crime. It represents slightly over 1% of the total criminal offences committed in 1995, that is to say 36,804 offences, in fields such as human trade, drug trafficking, trafficking in arms, in works of art and antiques, of stolen vehicles, forgery and counterfeiting. Although French territory is not affected by the implantation of “criminal society”, it may be used as lines of communication for traffics in which the Mafia is taking part, and for financial activities meant to launder “dirty money” (examples : the attempted buying out of the Casino in Menton in 1990 or the “Margarita” operation in 1994). The organised crime threat exists, it is a permanent danger which demands a continuous capacity of adaptation and reaction. 3) A strategy for assessment and retaliation Although, unlike the United States or Italy, France dœs not have a specific legislation, the existing law provides means of combating this phenomenon. This role is essentially given to the DCPJ (Serious Crime Investigation National Headquarters), as it deals with 88% of the recorded serious crime cases, which numbers 18,000 police officers, and to its 20 regional headquarters and services, its divisions and its 7 central offices, which liaise with other ministries and the Gendarmes. Each office has a distinctive field of activity. They are master pieces in the combat disposal against organised crime. With the judiciary, they lead, co-ordinate and support the investigating departments’operations. In order to carry out its combat strategy against organised crime, the DCPJ also counts resource departments such as the Scientific and Forensic Police, the scene of crime and identification departments, the criminal documentation and the computerised finger prints file. It is within the DCPJ that the NCB-France from ICPO-Interpol, the SIRENE-France for Schengen and the National Unit for Europol operate. Besides, the DCPJ is concerned not Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 92 to let any “no man’s land” set in, and favours the training of specialised personnel. In 1995, it endowed itself with a central intelligence and criminal analysis bureau, liaising with the “Unité de Coordination et de Recherche Anti-Mafia – UCRAM” (Anti-Mafia co-ordination and Detection Unit), in its concern towards adaptation and ceaseless search for efficiency in order to combat criminal groups and organisations. Resumen El crimen organizado : constatacion y estrategia de lucha en Francia Bernard Gravet 1) Concepto y realidad : La expresión «.organized crime.» surgió en los años 20, en la América de la prohibición, para designar a las bandas mafiosas que actuaban a través de la violencia y de la corrupción, en actividades ilícitas como el juego, el alcohol, la prostitución... Este término se extendió más allá de los límites del territorio norteamericano y traduce actualmente una realidad inquietante en numerosos países. No existe una definición común internacional ya que las formas de organización son variadas y sus actividades complejas. Sin embargo, todas tienen en común un alto grado de organización y el monopolio del crimen en un territorio determinado. Recientes estudios subrayan el carácter internacional del crimen organizado, también llamado «.imperio.» o «.industria del crimen.», y su capacidad para infiltrarse en el tejido económico de numerosos países. Sobre la base de estas constataciones la OIPC-Interpol había retenido, en 1988, la siguiente definición : «.Toda asociación o grupo de personas que ejercen una actividad ilícita, cuyo principal objetivo es el de obtener beneficios, indiferentemente de las fronteras nacionales.». 2) El crimen organizado en Francia : À partir de 1994, las estadísticas francesas elaboradas por el Ministerio del Interior, a escala nacional, incluyen un agregado específico de rúbricas destinado a medir mejor, dentro de la criminalidad global, la parte correspondiente a actividades del crimen organizado. Este último representa un poco más del 1.% del total de los crímenes y delitos en 1995, es decir, 36.804 actos delictivos, en sectores como el tráfico de seres humanos, de drogas, de armas, de obras de arte, de vehículos robados y de moneda falsa. Si bien el territorio francés no ha sido objeto de la implantación de «.sociedades criminales.», puede servir como vía de comunicación en tráficos donde la mafia toma parte y en actividades financieras de blanqueo de «.dinero sucio.» (Por ejemplo, el intento de compra del casino de Menton en 1990 o la operación «.Margarita.» en 1994). La amenaza del crimen organizado existe. Es un peligro permanente que necesita una continua capacidad de acción y de reacción. 3) Una estrategia de evaluación y de respuesta : Si bien Francia no cuenta con una legislación específica, como existe en los Estados Unidos o en Italia, para reprimir el crimen organizado, los textos en vigor le permiten luchar contra este fenómeno. Este rol es cumplido esencialmente por la DCPJ (88.% de los casos incluidos en la gran criminalidad), que cuenta con más de dieciocho mil funcionarios en sus veinte direcciones Le crime organisé : constat et stratégie de lutte en France 93 y servicios regionales, sus divisiones y sus siete oficinas centrales, con vocación interministerial y participación de gendarmes. Cada oficina tiene un campo de competencias diferente. Constituyen las piezas claves en el dispositivo de lucha contra la criminalidad organizada. Promueven, coordinan y apoyan, en relación con los magistrados, la actividad operacional de los servicios de investigaciones. Para llevar a cabo su estrategia de lucha contra la criminalidad organizada, la DCPJ dispone también de la policía técnica y científica, de la identidad judiciaria, de su documentación criminal y del registro automatizado de huellas digitales. En su seno funcionan la «.Oficina Central Nacional Francia.» de la OIPC-Interpol, el «.Sirene-Francia.» para Schengen y la «.Unidad Nacional Europol.». Además, la DCPJ se preocupa por no dejar que se instale ninguna «.no mans land.» y privilegia la formación de personal especializado. En 1995, fue dotada de una central de información y de análisis criminal que trabaja en relación con la Unidad de Coordinación y de Investigación Antimafia (UCRAM), con un objetivo de adaptación y de búsqueda incesante de eficiencia en la lucha contra los grupos y los organismos criminales. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 94 Les nouvelles formes de la criminalité organisée Les nouvelles voies du trafic de drogue international Gilles Leclair, commissaire divisionnaire, chef de l’Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants de la direction centrale de la police judiciaire française Les nouvelles voies du trafic de drogue international Vouloir parler de nouvelles voies du trafic suppose qu’il en existait d’anciennes. Vouloir parler de nouvelles voies suppose-t-il pour autant que les anciennes aient disparu.? Pourquoi d’ailleurs parler de nouvelles routes de la drogue.? Il faut à mon sens replacer le sujet dans le contexte du marché international de la drogue. Le trafic de drogue est un commerce. Il a toutes les caractéristiques d’un commerce licite : culture, production, transformation, importation, exportation, vente, achat, bénéfice... Il n’est particulier que par son côté illicite. Il est cependant fondé sur un certain nombre de règles liées à l’évolution de la politique mondiale et à celles des États. Des nouvelles routes se sont donc développées face aux anciennes en fonction des transformations de l’échiquier mondial (guerre dans l’ex-Yougoslavie, chute du Mur de Berlin, éclatement du Bloc de l’Est, retour à la démocratie de l’Afrique du Sud...). Les trafiquants ont exploité les faiblesses de certains États (manque de moyens, police et douanes faibles, facilitation des allées et venues dans les pays démocratiques....). Ces nouvelles routes sont issues également de l’ouverture de nouveaux marchés. La mondialisation de la drogue, de la toxicomanie ont entraîné le développement de ces nouvelles voies et ont, ainsi, bouleversé cet équilibre relatif qui existait précédemment. Cette universalisation a amené une nouvelle organisation des trafics.; conséquemment, on assiste à un enchevêtrement des routes, les traditionnelles croisant les nouvelles ou se superposant. Les trafiquants, les entreprises criminelles profitent ou utilisent les innovations technologiques. En 5 ou 6 ans, l’ecstasy, les amphétamines ont conquis d’immenses parts de marché. Les producteurs de cannabis n’échappent pas, non plus, à la tentation productiviste : à côté des producteurs traditionnels, des nouveaux trafiquants se développent. Ils manipulent les gênes des plants pour augmenter la teneur en principe actif (cf Canada, Pays-Bas,...). Dans ce meli-melo j’essaierai de vous montrer les grandes tendances en me fondant sur les données dont nous disposons (celles de l’ONU, de l’OIPC, de l’OMD, des grands services anti-drogues et des informations de nos agences à l’étranger...). Pour vous donner cette image, je crois que le plus simple est d’étudier les voies du trafic par produit. Nous verrons donc successivement les routes de l’héroïne, de la cocaïne, du cannabis et des drogues de synthèse. Nous verrons d’ailleurs que parfois les réseaux constitués pour le trafic de l’une de ces drogues utilisent les infrastructures existantes pour vendre d’autres produits. Nous verrons également que des échanges de produits existent (héroïne contre cocaïne par exemple) pour éviter la circulation d’argent difficile à recycler. Toutes ces tendances nouvelles constituent l’évolution du marché, il n’en reste pas moins que les routes traditionnelles sont encore florissantes. Toutes ces évolutions, toutes ces nouvelles tendances sont donc indissociables des voies classiques. Elle ne peuvent donc être montrées qu’à partir de l’existant. Le marché de l’heroïne Dans les années 1970, la France figurait parmi les pays producteurs d’héroïne. Ces fabrications, à en croire les analyses chimiques, étaient même remarquables pour leur pureté. Elles s’opéraient quasi exclusivement dans la région marseillaise et alimentaient presque uniquement à l’époque le marché de consommation nord-américain. Il faut rappeler que cette situation avait envenimé les relations franco-américaines et suscité du côté français des mesures policières énergiques. Celles-ci devaient effectivement révéler l’ampleur du trafic (la production annuelle d’héroïne se situait, selon certaines estimations de l’époque, entre sept et huit tonnes). La matière première provenait principalement des régions situées dans le Croissant d’or, la Turquie ou le Liban. L’évolution allait se faire assez rapidement avec l’éclosion des filières du Triangle d’Or. Cette filière française allait ensuite être remplacée par les réseaux asiatiques dont les passeurs arrivaient de Hong Kong, Bangkok, Kuala Lumpur, mais aussi des Pays-Bas. Au milieu des années 80 apparaissaient ensuite les filières nigérianes, qui transportaient l’héroïne du «.croissant d’or.», en transitant très souvent par Lagos et Abidjan. D’une manière plus éphémère, des filières tamoules et sri lankaises ont également pris part à cette époque au trafic d’héroïne. Elles semblent maintenant en sommeil pour ce qui concerne l’héroïne saisie en France. Elles se caractérisaient par des itinéraires de transport beaucoup plus Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 98 variés : Bombay, Madras, Colombo, Moscou, Varsovie, les Emirats, la Tunisie, l’Algérie ou encore Malte. En vingt-cinq ans, les données du problème se sont totalement transformées, aussi bien pour la France que sur le plan international, les filières traditionnelles se croisant avec de nouvelles zones de production et, conséquemment, engendrant de nouvelles routes. Au plan international, la liste des pays impliqués dans la fabrication ou le trafic des stupéfiants n’a fait que s’allonger et se diversifier sur tous les continents. Rien n’indique que ce mouvement puisse se ralentir. Bien au contraire, l’évolution récente nous révèle de nouveaux risques, favorisés par la libéralisation croissante des échanges de marchandises, la libre circulation des personnes, la disparition du bloc soviétique ou encore l’impossibilité chronique de nombreux États à établir des situations politiques stables. La situation, malgré les efforts qui sont accomplis partout dans le monde, est réellement grave. L’OIPC, dans son document «.le défi global de l’héroïne.» la décrit en ces termes : «.Le trafic international de l’héroïne a été alimenté par les énormes profits réalisés au cours des deux dernières décennies. Ce qui était au départ une activité nécessitant une organisation complexe est devenu un véritable commerce qui est allé bien au-delà des craintes et des prévisions de tous les services de répression concernés, avec de graves conséquences pour l’avenir. L’augmentation de la consommation des drogues dans le monde aura une influence déterminante sur la production d’héroïne au cours de la décennie actuelle, et le marché obéira à la loi de l’offre et de la demande....». La grosse artère du trafic : la route des Balkans qui s’abreuve aux sources du Croissant d’Or Depuis plusieurs années, l’itinéraire des Balkans est utilisé pour acheminer en quantités de plus en plus importantes l’héroïne qui se déverse dans les pays européens. Cette situation permet d’indiquer qu’environ 80.% de l’héroïne saisie en Europe emprunte ce circuit et provient des mêmes pays sources. Si dans les années passées une route principale, d’ailleurs la plus directe au plan routier, était bien cernée, celle-ci s’est désormais éclatée, sous la pression des événements : déclenchement du conflit en Yougoslavie, fin de l’isolationnisme de l’Albanie, éclatement du bloc soviétique avec pour conséquence l’apparition d’itinéraires moins surveillés dans ces pays dont la situation économique, sociale, judiciaire totalement archaïque, inadaptée, est impropre à mener la lutte contre le trafic des stupéfiants. Ces pays, qui s’ouvrent sur l’ère moderne, deviennent, de plus, de nouveaux lieux de consommation, ce qui rend le marché d’autant plus prospère. La route traditionnelle des Balkans qui aboutissait au nord en Autriche et au sud en Italie, était un axe commercial classique bien connu. Pour le trafic d’héroïne, elle avait dans les années 70, servi à l’acheminement de la morphine base vers les laboratoires marseillais. Dans les années 80, c’est l’héroïne Les nouvelles voies du trafic de drogue international 99 elle-même qui, venant du Pakistan, d’Afghanistan, d’Iran et du Liban, via la Turquie (véritable gare de triage), suivait alors cet itinéraire. Une partie de cette drogue poursuivait également sa route vers les États-Unis. La route des Balkans s’est maintenant tellement diversifiée et a tellement éclaté que l’on peut se demander si ce terme, mis au singulier, est encore d’actualité. Les itinéraires passent aujourd’hui au nord par la Bulgarie, la Roumanie, la République Tchèque, la République Slovaque, et au sud par la Macédoine et l’Albanie. Fait nouveau également, des saisies de cocaïne destinée à l’Europe sont désormais réalisées dans ces différents pays.! Trois circuits se dessinent ainsi : la route classique et directe qui, depuis la Turquie, remonte par la Grèce, la Macédoine ou la Bulgarie vers Belgrade, Zagreb et Lubliana, puis l’Autriche et l’Allemagne. la route sud qui va vers la Grèce et l’Italie en partant de Turquie ou encore du port roumain de Contenta sur la mer Noire. la route centrale qui traverse la Bulgarie, la Roumanie, la Hongrie, la République Slovaque, la République Tchèque et aboutit en Autriche, ou en Allemagne. Les événements ont tantôt favorisé tel ou tel circuit mais il apparaît que, depuis 1990, les saisies réalisées dans les pays de la route centrale ont progressé de manière constante. Dans la très grande majorité des cas, elles ont été opérées à l’encontre de camions TIR immatriculés en Turquie. Depuis deux à trois ans des saisies d’héroïne sont également réalisées dans des véhicules de tourisme, immatriculés ou conduits par des européens, ainsi que dans des autobus. La route est en effet de plus en plus utilisée par des trafiquants nigérians pour les transports en petites quantités, mais lorsqu’il s’agit des poids lourds, les quantités sont toujours considérables (395 kilogrammes en une seule saisie) et les expéditions restent sous le contrôle direct de trafiquants turcs. La tension latente entre la Macédoine et la Grèce a également dans un premier temps favorisé, du fait du renforcement des contrôles aux frontières, les saisies d’héroïne. La Macédoine continue de jouer un rôle dans le trafic, non seulement en raison de la situation géographique de ce pays mais aussi du fait de la présence sur son territoire d’importantes communautés d’origine grecque, turque ou albanaise. Les pays du transit sur les routes des Balkans L’Albanie compte 3,5 millions d’habitants et émerge de cinquante années d’isolement communiste. Des Albanais sont régulièrement arrêtés en Italie avec de l’héroïne. La Roumanie et la Bulgarie sont désormais des lieux avérés de transit. Les services de police de ces pays ont ainsi saisi en 1994 : 383 kilos d’héroïne Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 100 pour la Roumanie (dont 112 kilogrammes au cours d’une seule prise réalisée à Bucarest dans un autobus) et 422 pour la Bulgarie. La Drug Enforcement Autority estime qu’actuellement plus d’une tonne d’héroïne turque transite chaque année sur le territoire roumain. La Hongrie, depuis le début du conflit yougoslave, enregistre également une progression alarmante des saisies en héroïne (le phénomène est d’ailleurs flagrant pour les prises réalisées à l’aéroport de Budapest). Saisies d’héroïne : 1990 : 9 kilos 1993 : 427 kilos 1991 : 8 kilos 1994 : 822 kilos 1992 : 78 kilos Au débouché de ces itinéraires Les pays européens C’est par exemple la Grèce qui constitue l’un des premiers fusibles du dispositif occidental. Les saisies d’héroïne ont considérablement évolué dans le pays au cours des dernières années (42 kilos en 89, 283 en 1994). Pour l’Italie, les chiffres des saisies montrent également le gonflement du flux de trafic d’héroïne, malgré l’amorce apparente de tassement en 1993. Il faut également mentionner les saisies réalisées en Allemagne qui se situent elles aussi à un niveau très élevé : 1989 : 727 kilos 1992 : 1.426 kilos 1995 : 933 kilos 1990 : 844 kilos 1993 : 1.075 kilos 1991 : 1.594 kilos 1994 : 1.514 kilos L’examen détaillé des saisies fait apparaître, dès 1994, le rôle de points de transit pour les régions de l’ex-RDA et indique que des importations d’héroïne s’opèrent désormais depuis la Pologne. En remontant le courant du trafic La Turquie Ce pays est au cœur du problème. Passerelle entre l’Europe et l’Asie, fort de ses 60 millions d’habitants, il est devenu la véritable gare de triage du trafic d’héroïne venu d’Afghanistan et du Pakistan. Des laboratoires de transformation de morphine base y opèrent depuis plusieurs années. Cette implication de plus en plus profonde de la Turquie permet maintenant aux spécialistes d’indiquer que 80.% voire, peut-être 90.%, de toute l’héroïne saisie en Europe a transité (et pour partie a été transformée) dans ce seul pays. De 1988 à 1995, 15 laboratoires d’héroïne y ont été détruits. Concentrés plutôt vers les zones voisines de l’Iran, leurs implantations les plus récentes se sont désormais disséminées vers le centre et l’ouest, ainsi que dans les environs d’Istanbul. Il s’agirait souvent de laboratoires «.mobiles.», c’est-à dire-susceptibles d’être installés, démontés et déplacés en peu de temps. Les nouvelles voies du trafic de drogue international 101 La majeure partie du trafic turc reste opérée au moyen des ensembles routiers TIR. Le contrôle de ce flux s’avère particulièrement difficile, car, il faut le rappeler, ce pays compte 8.000 kilomètres de frontières maritimes, quatre ports internationaux, et plus de 400 entreprises de transport international sont répertoriées. Selon l’OIPC une cinquantaine de ces sociétés seraient propriétaires de mille camions. En dehors des poids lourds, et comme il l’a été indiqué plus haut, les saisies opérées à l’encontre d’autres types de véhicules (véhicules de tourisme ou autobus) se sont multipliées dans la période récente. Ce phénomène n’a pas manqué de retenir l’attention d’Interpol qui relève en effet que, dans la zone Europe, 112 véhicules particuliers qui ont été contrôlés positivement transportaient au total 1.200 kilogrammes d’héroïne. Les saisies réalisées en Turquie : Héroïne : 1990 : 1.245 kilos 1991 : 1.446 kilos 1992 : 960 kilos 1993 : 2.001 kilos 1994 : 2.172 kilos 1995 : 2.500 kilos Morphine base : 44 kilos 118 kilos 1.408 kilos 2.203 kilos 243 kilos 500 kilos Il y a peu d’information disponible actuellement sur les saisies réalisées dans les pays de l’ex-Yougoslavie, il est cependant toujours mentionné dans les rapports de l’OIPC ou du PNUCID que les villes de Belgrade et de Zagreb restent des points de passage obligés du trafic. On peut d’ailleurs supposer que depuis la fin du conflit, cette route va reprendre de la vigueur. En 1992, l’OIPC avait par exemple recensé 72 cas de trafic d’héroïne qui mettaient en cause près de 140 ressortissants ex-yougoslaves. Ceux-ci avaient transporté en Europe 1.100 kilos d’héroïne. En amont des routes des Balkans : les pays sources, Pakistan, Afghanistan, Iran Il s’agit du «.Croissant d’Or.» Le Pakistan C’est en quelque sorte l’une des deux racines principales du trafic. Ce pays, dans lequel l’opium est cultivé illicitement, n’a interdit qu’en 1979 la consommation de l’héroïne, et il rencontre maintenant, de l’aveu même de ses autorités, un énorme problème d’usage dont le niveau retient l’attention. Désormais les autorités pakistanaises recensent un million et demi d’usagers d’héroïne et 250.000 fumeurs d’opium. Ces chiffres sont souvent repris par les instances internationales spécialisées (PNUCID et OIPC). Ils conduisent à penser que chaque année les Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 102 usagers toxicomanes pakistanais consomment probablement dans le pays cinquante tonnes d’héroïne.! Si l’on considère d’autre part que ce pays produit illicitement environ 200 tonnes d’opium par an, il est alors probable que le marché pakistanais «.importe.» 300 tonnes d’opium de chez son voisin afghan. Pour l’OIPC, 80.% de l’héroïne saisie en Europe et 25.% de celle saisie aux États-Unis sont fabriquées dans ces deux pays. Pour illustrer parfaitement cette situation, il suffit d’indiquer qu’en 1979 un seul kilogramme d’héroïne pakistanaise avait été découvert en Europe, alors qu’en 1993 ce chiffre a atteint 7.000 kilogrammes.! Au Pakistan, les régions de transformation de la morphine base se situent plus volontiers dans les zones frontalières et montagneuses qui bordent le nord et l’ouest du Pakistan (Bajour, Khyber, Mohmand...). Il s’agit de régions sous influence tribale que le gouvernement central ne contrôle qu’avec difficulté. Les saisies réalisées en Iran lors des transits de drogue attestent elles aussi de l’importance croissante de la zone : Lors d’une cérémonie de destruction de stupéfiants qui eut lieu le 26 juin 1996, le ministre de l’Intérieur iranien, s’inquiétant de la constante augmentation des saisies d’héroïne dans son pays, citait pour 1995 les chiffres suivants : 135 tonnes d’opium, 12 tonnes de morphine base et 2 tonnes d’héroïne. Les données qui concernent l’Afghanistan sont très fragmentaires. Toutes confirment cependant la dégradation de la situation et l’extension considérable de la production d’opium. Pour ce pays les indications chiffrées précises font défaut mais les estimations habituelles suggèrent que la production annuelle d’opium serait comprise en 1.500 et 3.000 tonnes par an. Cependant l’étude la plus récente, qui résulte d’une enquête menée sur place en avril 1995 par le PNUCID, indique que 68.000 à 76.000 hectares seraient consacrés à la culture du pavot, notamment dans les provinces de Helmand, de Kandahar et de Oruzgan au centre du pays. Ainsi, en 1994, ce sont peut-être 3.000 à 3.600 tonnes d’opium qui ont été récoltées. Il apparaît aussi que, depuis le départ des troupes soviétiques, les zones de culture se sont étendues à d’autres régions d’Afghanistan, celles qui entourent Kaboul (Lowgar, Paktia, Konar, Laghman, Pervan) mais aussi aux provinces plus à l’ouest ou au nord (Bamian, Badakshan, Jowzian, Herat). Pays charnière entre les pays d’Asie de l’ouest et de l’est, l’Inde est aussi sur la route du trafic. En 1993, 1,5 tonne d’opium est saisie et plusieurs laboratoires sont détruits dans les États de Madhya Pradesh et du Rajasthan. En 1994, 2,1 tonnes d’opium et 1 tonne d’héroïne y sont saisies. Le phénomène s’étend également aux républiques méridionales de la CEI ainsi qu’à celles du Caucase (Azerbaïdjan, Géorgie, province Tchétchène). Il semble que l’action des mafias locales s’est considérablement accrue dans le domaine des stupéfiants. Il est ainsi mentionné qu’un très important Les nouvelles voies du trafic de drogue international 103 laboratoire de fabrication d’héroïne, sous le contrôle de mafieux tchétchènes et d’anciens du KGB, s’est installé dans la ville de Chali dès la fin de l’année 1991. S’il n’a pas survécu au bombardement russe de janvier 1995, il aurait néanmoins produit au plus fort de son activité, en 1994, 30 tonnes d’héroïne. La saisie, en Ouzbékistan, en août 1993, de 1.159 kilogrammes d’héroïne afghane dans un conteneur frigorifique qui devait être expédié vers la Turquie puis l’Europe, confirme elle aussi la gravité de la situation dans ce secteur. Au Kirghizistan, la même année, 36 laboratoires d’amphétamines ayant été détruits, il est permis de redouter que ce pays qui, apparemment dispose de talents en matière de chimie, ne bascule à son tour dans le trafic d’héroïne. L’étude des filières d’héroïne nécessite par ailleurs de s’interroger sur la situation actuelle du Liban. Ce petit pays, qui a longtemps figuré parmi les gros pourvoyeurs d’héroïne et de cannabis dans le monde entier pendant les années 80, semble désormais sorti du circuit. En effet, depuis la «.reprise.» en main de la situation par les autorités syriennes, des campagnes d’éradication du pavot de la plaine de la Bekaa ont été menées sans discontinuer depuis 1991. Les chiffres de l’OIPC confirment cette amélioration, mais il ne faut pas négliger que dernièrement les autorités libanaises ont indiqué qu’environ deux tonnes d’opium seraient à nouveau ou encore transformées en héroïne dans le pays. Il est par ailleurs certain que les communautés libanaises, installées dans de nombreux pays, apparaissent dans le trafic, et de plus en plus maintenant, dans celui de la cocaïne. La deuxième grosse racine du trafic et de la production de l’héroïne Le fameux Triangle d’Or L’appellation «.Triangle d’Or.» correspond à trois pays d’Asie du SudEst qui sont le Myanmar (ex-Birmanie), la Thaïlande et le Laos. À eux trois ils constituent, pour le moment, la deuxième grande région de production de l’héroïne dans le monde. Bien qu’éloignée de l’Europe, elle fournit entre 20 et 30.% de l’héroïne qui y est consommée. D’après Interpol, ces trois pays produiraient 3.000 tonnes d’opium par an, la part du roi revenant cependant au Myanmar qui à lui seul produirait 2.500 tonnes, soit 250 tonnes d’héroïne. Les trois quarts de celle-ci seraient destinés au marché nord-américain. Bien que voisins ces pays ne sont donc pas dans des situations équivalentes. Depuis des lustres l’opium y a été cultivé et a alimenté la consommation locale. Ancrée dans la tradition, cette pratique a été tolérée pendant longtemps par les autorités. Ce n’est qu’en 1994 que le Laos a proclamé dans les instances internationales qu’il allait interdire la consommation d’opium. On observe cependant de nombreux changements dans la zone. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 104 Changements dans les régions de culture de pavot à opium en Asie du Sud-Est Myanmar On estime aujourd’hui que le Myanmar (l’ex-Birmanie) produit environ 60.% de l’héroïne que l’on trouve dans le monde, soit le double environ de la quantité produite en 1988, avant que le gouvernement des États-Unis ne mette fin à l’aide fournie dans le cadre du programme de destruction des cultures de pavot mis en œuvre par le Myanmar. Thaïlande Depuis la mise en œuvre, avec succès, en 1986 du programme d’arrachage à la main, le gouvernement thaïlandais a virtuellement réduit à néant l’importante production de pavot. L’année dernière, la production d’opium a été estimée à dix-sept tonnes, quantité inférieure à la consommation locale estimée. La Thaïlande est donc devenue un nouveau pays importateur d’opium. Laos Le Laos est considéré comme le plus grand producteur d’opium, après le Myanmar et l’Afghanistan. Toutefois, on y a également observé une diminution progressive de la quantité de pavot à opium cultivée au cours des six dernières années. Cependant, cette année, les conditions climatiques favorables ont permis une récolte sensiblement plus importante pour la première fois depuis de nombreuses années. Viet Nam Le gouvernement vietnamien a signalé une petite production de pavot à opium dans le nord-ouest du pays, le long de la frontière avec le Laos. Changements observés dans la physionomie du trafic d’héroïne Auparavant, le trafic d’héroïne était considéré comme un problème myanmaro-thaïlandais. Il est aujourd’hui manifeste que l’acheminement de l’héroïne d’Asie du Sud-Est a pris une dimension véritablement régionale et qu’il touche les pays avoisinants. Thaïlande La Thaïlande est, traditionnellement et historiquement, la porte de sortie exclusive de l’héroïne d’Asie du Sud-Est mais la situation évolue rapidement. La fermeté dont fait preuve le gouvernement thaïlandais et le renforcement des moyens de répression de la Police Royale thaïlandaise et de l’Office Central de Lutte Antidrogue ont amené les organisations de trafiquants à explorer des itinéraires nouveaux et différents afin d’écouler sur le marché l’héroïne produite au Les nouvelles voies du trafic de drogue international 105 Myanmar. Ces itinéraires passent par la Chine, le Laos, le Cambodge et le Viet-Nam. Chine La Chine est apparue comme un important pays de transit, derrière la Thaïlande. La drogue est acheminée par la voie terrestre via le sud de la Chine jusqu’à Guangshou, puis de là à Taïwan ou à Hong Kong. Le secrétariat général d’Interpol a présenté, dans le message hebdomadaire no 21/96, un résumé de la situation du trafic de drogues en Chine, où les autorités ont signalé la saisie de 2.376 kg d’héroïne et de 1.110 kg d’opium en 1995. Laos Le Laos est devenu un important pays de transit. Les autorités laotiennes ont enquêté sur les nombreux passeurs arrêtés à l’aéroport de Wattay avec d’importantes quantités d’héroïne. En février 1996, les autorités laotiennes ont signalé la saisie d’un laboratoire d’héroïne et d’amphétamine en activité, implanté dans la province de Bokéo, près de la frontière avec le nord de la Thaïlande. Cambodge Le Cambodge est également de plus en plus utilisé. Un nombre croissant de passeurs de drogues choisissent de partir de l’aéroport de Phnom Penh afin de n’avoir qu’à transiter par Bangkok lorsqu’ils se rendent sur les marchés internationaux, évitant ainsi d’avoir à franchir les contrôles de douane à l’aéroport de Bangkok. Le Cambodge apparaît également comme un nouveau producteur de feuilles de cannabis, qui sont exportées par la voie maritime. Viet Nam Comme on l’a indiqué précédemment, le Viet Nam est à la fois un pays producteur d’opium et, de plus en plus, un pays de transit pour l’héroïne. Avec la normalisation des relations politiques et économiques avec l’Occident, les trafiquants d’héroïne auront de plus en plus de possibilités de se livrer au trafic d’héroïne à destination de ces pays. Succès en matière de lutte Les succès remportés dans la lutte antidrogue ont contribué aux changements intervenus dans la physionomie du trafic de drogues, le plus connu étant la reddition de Khun SA au Myanmar, et la mise en accusation de douze de ses principaux lieutenants résidant en Thaïlande. Tous les douze ont été placés en détention provisoire en attendant d’être extradés aux États-Unis (le premier d’entre eux a d’ailleurs été extradé le 25 mai 1996). Ces arrestations auraient mis hors de course plusieurs courtiers de premier plan, chargés d’écouler l’héroïne pour le compte de Khun SA, et réduit ses possibilités non seulement de vendre son héroïne, mais aussi de recueillir les fonds provenant d’anciennes transactions. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 106 De nouveaux protagonistes du trafic d’héroïne L’Amérique du Sud Désormais, c’est un fait marquant du début des années 90, trois pays déjà impliqués dans le trafic de cocaïne figurent parmi les sources de l’héroïne. Il s’agit de la Colombie, du Mexique et du Guatemala. Au Mexique, l’héroïne dénommée «.black tar.» est extraite à partir du jus de l’opium. Une partie est consommée dans le pays, le reste est acheminé vers l’ouest et le sud-ouest des États-Unis où l’on estime que ce produit représente environ 25.% des saisies. En 1992, les autorités mexicaines avaient signalé la destruction de 11.548 hectares de pavot. Au Guatemala, le pavot est également cultivé illicitement dans les provinces de Huehuetenenango et de San Marcos. Il n’y a pas d’indication précise quant à l’importance de ces plantations. La «.palme d’or.» revient une fois de plus à la Colombie.! Des cultures de pavot sont localisées dans les départements de Cundinamarca, de Huila, de Caqueta, de Cauca, de Tolima et les autorités du pays pensent qu’un peu plus de 6.000 hectares sont encore plantés. Les saisies suivantes ont ainsi été réalisées : Héroïne 1994 : 95 kilos 1995 : 145 kilos (+52.%) Morphine 1994 : 84 kilos 1995 : 290 kilos (+238.%) Opium 1994 : 128 kilos 1995 : 144 kilos (+12.%) ha. détruits 1994 : 5.314 ha 1995 : 5.074 ha En dehors de la Colombie, les États-Unis sont le seul pays qui enregistre officiellement depuis plusieurs années des saisies importantes d’héroïne colombienne. D’autre pays semblent cependant connaître le même phénomène. Il convient ainsi de signaler qu’en 1995, 53 kilogrammes d’héroïne ont été saisis au Venezuela et qu’en 1994, 761 hectares de pavot y ont été détruits. Il peut s’agir d’une production locale étant donné que des cultures ont été détectées dans le pays, mais vu la quantité appréhendée il paraît probable qu’il s’agisse d’héroïne colombienne. Au Pérou, également, 579 kilos d’opium (sous forme liquide) ont été découverts en décembre 1994 à Tarapoto, à 400 kilomètres au nord de Lima, zone où sont implantés de nombreux trafiquants colombiens. En février 1966, une saisie d’un kilogramme d’héroïne qui semble d’origine colombienne a été réalisée dans l’île de Saint-Martin (France – Guadeloupe). Le produit était en tout état de cause en possession d’un couple de trafiquants colombiens. Enfin, le Brésil indique avoir saisi, en 1994, 12,7 kilogrammes d’héroïne dont la provenance paraît être la Colombie. Les nouvelles voies du trafic de drogue international 107 La situation de la cocaïne Les zones principales de production Alors que la production d’héroïne tend à se diffuser dans de nouveaux pays, la cocaïne paraît de son côté demeurer l’apanage de l’Amérique latine. Elle semble par contre conquérir de nouveaux marchés de consommation, en corollaire du développement de nouvelles sphères de liberté... Avant tout exportée vers les États-Unis, la cocaïne, au tournant des années 80, s’est insinuée en Europe. À cette date, les saisies réalisées en France ne représentaient que 57 kilogrammes et seuls 63 trafiquants avaient été interpellés. Malgré les variations, la courbe est, depuis cette époque, ascendante (864 kilos saisis en 1995) et a même, en 1994, enregistré, ce qui semble être un record, un total national de 4.742 kilogrammes. Selon les estimations des organisations internationales spécialisées, la production mondiale de cocaïne se situerait à 1.300 tonnes par an et serait concentrée sur trois pays qui sont la Colombie, le Pérou et la Bolivie. C’est au Pérou que se situent les plus grandes surfaces de culture de cocaïers. Elles atteignent probablement 200.000 hectares et existent dans le pays depuis la civilisation Inca. Plus de 200.000 tonnes de feuilles seraient récoltées chaque année. Les cultures occupent, dans la région centrale et orientale du pays, des espaces situés entre 500 et 1.200 mètres d’altitude. Celles de Bolivie ou de Colombie ne dépasseraient pas quant à elles 50.000 hectares. Pour l’année 1995 les services péruviens ont d’autre part saisi : 14,9 tonnes de pâte de cocaïne et détruit 19 laboratoires, 193 cuves de macération et 61 pistes d’atterrissage clandestines. Au cours des six premiers mois de 1996, ces services ont saisi 9 tonnes de pâte de cocaïne et procédé à l’arrestation de plus de 4.300 trafiquants (y compris ceux se livrant au trafic de chanvre). Selon la police péruvienne, les trafiquants ont produit en 1994 environ 640 tonnes de pâte de cocaïne. La Bolivie figure aussi comme pays producteur de feuilles de coca et arrive en deuxième position, heureusement assez loin derrière le Pérou. La pâte de cocaïne qui est récoltée (principalement dans le Chapare) est également transformée sur place en produit fini, c’est-à dire-en chlorhydrate. Ces activités de trafic semblent nombreuses et disséminées dans ce pays où les services répressifs ont obtenu les résultats suivants : en 1993 : destruction ou saisie de 938 laboratoires, 1.127 puits de macération, 9,5 tonnes de cocaïne, 21 pistes d’aviation. en 1994 : 1.613 laboratoires, 2.753 puits de macération, 8,7 tonnes de cocaïne, 8 pistes d’aviation. en 1995 : 2.064 laboratoires, 2.978 puits de macération, 9,5 tonnes de cocaïne, 3 pistes d’aviation. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 108 La Bolivie ne constitue pas une source d’approvisionnement régulière du trafic qui s’est opéré vers la France au cours de l’année écoulée (2,4 kilos), à la différence de ce qui a été observé avec le Brésil (293 kilogrammes). Cependant des quantités significatives de cocaïne saisies sur le territoire national ont eu dans le passé une provenance bolivienne directe : 133 kilos en 1993 et 81 kilos en 1992. La Colombie. Il paraît à peine nécessaire de décrire la situation de ce pays tant sa réputation ne semble plus à faire dans le monde et tellement son nom est associé a celui de cocaïne et de cartel de la drogue. Comme les États voisins, il connaît d’importants problèmes de violence et de terrorisme liés à la pauvreté et au narco-trafic. Selon les sources les plus sérieuses, les cultures de cocaïers occuperaient environ 40.000 hectares, mais la spécialité du pays reste la transformation de la pâte de cocaïne en produit fini et l’exportation de celui-ci partout dans le monde. Malgré le climat difficile qui est abondamment décrit dans tous les médias et qui vise même la plus haute personnalité de Colombie en la personne du chef de l’État, les services de répression mènent une lutte réelle et constante contre les trafiquants. On l’a vu avec la chute des cartels de Medellin et de Cali. Les résultats obtenus sont les suivants pour l’année 1995.1 : Cocaïne : 27,9 tonnes Feuilles de coca : 394,2 tonnes Cocaïne base : 31 tonnes Plantations détruites : 25.402 hectares Laboratoires : 573 Pistes d’avions : 99 À l’occasion des actions entreprises, 22 agents des forces de l’ordre ont été tués et 46 blessés. Vivement critiqué outre-Atlantique, le Président colombien a présenté en personne, à l’occasion d’une conférence de presse, les résultats obtenus dans la lutte contre le trafic des stupéfiants au cours du premier semestre 1996. Ils s’établissent comme suit : 18 tonnes de cocaïne.; 247 tonnes de feuilles.; 409 laboratoires.; 67 pistes d’atterrissage. Les efforts paraissent donc plus que maintenus dans ce pays. Il est vrai cependant que les cartels de Cali, de Bogota ou de la côte sont encore très actifs et que les chefs des cartels emprisonnés continuent de gérer leurs affaires en prison. En ce qui concerne l’Europe, une grosse partie de la cocaïne saisie est expédiée en utilisant la voie maritime. La voie aérienne traditionnelle, tout en restant très active, semble en repli régulier. 1. Selon le bilan d’activité présenté par la police colombienne. Les nouvelles voies du trafic de drogue international 109 Dans le cas français en 1995, 416 kilogrammes de cocaïne de fabrication colombienne qui ont été saisis (sur un total de 865) avaient été acheminés par voie maritime soit 48.%. Dans le passé, les transports sur les vecteurs aériens au moyen de «.mules.» étaient beaucoup plus nombreux. À la fin des années 80, des expéditions importantes de cocaïne avaient été réalisées au moyen de petits avions de tourisme dans toute la région Caraïbe. Plusieurs saisies d’appareils de ce type ayant été effectuées par les services répressifs, dont l’OCRTIS, les trafiquants colombiens ou brésiliens ont depuis cette période changé de méthode et procèdent désormais au largage de la drogue qui est ensuite récupérée en mer par ses destinataires. Autre évolution, les «.mules.», en partance directe de Colombie, qui presque toujours étaient de nationalité colombienne, ne représentent plus maintenant que la moitié des individus interpellés en France, soit 22 sur 44, les autres passeurs se trouvant être maintenant des européens (16 individus). Quant à la destination de la cocaïne saisie en France en 1995, il apparaît que, sur les 864 kilogrammes, seuls 276 venaient directement de Colombie, soit 32.% du tout. À noter que 34.% avaient le Brésil comme point de départ. Pour l’ensemble des saisies opérées en France, la cocaïne était destinée : à l’Espagne (36.% des cas).; aux Pays-Bas (11.%).; et à l’Italie (8.%). Cette situation diffère sensiblement des années antérieures où de très importantes quantités de cocaïne arrivaient en France via la péninsule ibérique. Les pays voisins des sources de production de la cocaïne et les nouvelles zones de transit Comme pour l’héroïne, nous assistons là aussi à un réel phénomène de contamination dans les pays de la zone. Certains, comme cela semble naturel, ne jouent qu’un rôle de pays de transit vers les principales destinations de la cocaïne dont, pour une large part les États-Unis. Mais comme cela a été pointé plus haut, de nouvelles sphères de consommation apparaissent et se développent en Europe occidentale, c’était prévisible, mais aussi dans les pays de l’ex-Union soviétique. Ceux-ci jouent maintenant un double rôle de pays de consommation naissante et de plaque tournante du trafic. Une des illustrations les plus flagrantes de ce phénomène a été la saisie d’un conteneur d’une tonne de cocaïne sud-américaine à Saint Petersbourg. Egalement des passeurs venant de l’ex-Empire soviétique sont interpellés avec des stupéfiants un peu partout en Europe. En 1994, c’est un total de 550 kilogrammes de cocaïne qui ont été découverts dans les pays d’Europe de l’Est (Bulgarie, Croatie, R. Tchèque, Hongrie, Pologne, Russie, Slovénie, Ukraine). Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 110 En 1996, une enquête menée par l’OCRTIS, qui a permis de saisir au Venezuela plusieurs centaines de kilogrammes de cocaïne, a révélé que cette importante quantité de drogue était en partance pour la Roumanie où elle devait être stockée. L’Afrique du Sud, par l’intermédiaire des filières d’Afrique de l’Ouest, est devenue une zone de transit importante dont il faut déjà se préoccuper. De même, on assiste à des saisies de plus en plus fréquentes dans des pays épargnés jusqu’à présent, le Maroc, le Liban ou les pays du Moyen Orient, les nouveaux marchés sont donc ouverts..... Quant aux autres pays d’Amérique latine, si certains d’entre eux signalent l’existence de cultures de cocaïers, la plupart ne fait que figurer comme point de passage du chlorhydrate de cocaïne fabriqué en Colombie. Parmi ces pays, le Brésil doit retenir l’attention tant il occupe une place stratégique dans la région. Avec ses 160 millions d’habitants et ses 8 millions et demi de kilomètres carrés, il compte aussi plusieurs milliers de kilomètres de frontière amazonienne avec les pays sources. De plus, il s’ouvre largement par son immense façade maritime, aussi bien vers les Caraïbes que le vieux continent, tout en jouxtant le département français de Guyane. Les efforts entrepris par les autorités portent visiblement leur fruits et révèlent que des quantités croissantes de drogue transitent dans le pays. Une seule saisies réalisée en juin 1994 a atteint 7,5 tonnes et, globalement pour l’année, 11,8 tonnes de cocaïne ont été saisies. Les saisies ont progressé comme suit : 1988 : 1,6 tonne 1989 : 1,2 tonne 1990 : 2,6 tonne 1991 : 4 tonnes 1992 : 2,3 tonnes 1993 : 7,9 tonnes 1994 : 11,8 tonnes Pour l’année 1995, les statistiques de police fédérale brésilienne font état des résultats suivants : cocaïne : 5,2 tonnes.; pâte de cocaïne : 590 kilogrammes.; laboratoires : 2, qui étaient situés dans l’état du Mato Grosso, c’est-à-dire à proximité de la frontière avec la Bolivie. À côté du Brésil, nombre d’autre pays apparaissent ou se confirment comme nouveaux axes du transit de la cocaïne. Le Mexique et le Venezuela ont pris une place essentielle également dans le transit. Le Mexique et ses cartels semblent avoir pris une importance non négligeable dans le trafic vers les USA et le Canada. Quant au Venezuela, il est la première base vers l’Europe ou la Caraïbe, nombre de malfaiteurs européens y étant très présents. Il s’agit non seulement de l’Equateur, mais aussi de Cuba, de la République Dominicaine, du Surinam, des Bahamas, du Nicaragua, de l’Argentine, du Panama, de Porto Rico, etc.. Les nouvelles voies du trafic de drogue international 111 Sans examiner la situation détaillée de chacun de ces pays, on peut simplement indiquer par exemple qu’en 1990 en Argentine, 846 kilos de cocaïne avaient été saisis mais qu’en 1995, la quantité a dépassé deux tonnes. À Cuba, entre janvier et juillet de cette année, c’est 1 tonne qui a été saisie. Les services américains (la DEA) pensent qu’effectivement ce pays est devenu une véritable plaque tournante du trafic. Ils ont ainsi détecté l’an passé 28 vols aériens suspects au départ de ce territoire. Ceux-ci n’ont pas été interceptés. Au cours de l’année 1994, 2,6 tonnes de cocaïne ont été saisies en République Dominicaine, 1,5 tonne en Equateur, 2,4 tonnes dans les Antilles françaises, 3 tonnes au Panama, 4,5 tonnes à Porto Rico. Dans les autres États qui ont été mentionnés, les saisies ont toutes avoisiné ou légèrement dépassé 500 kilogrammes. Les routes de cannabis Les lieux de production de cannabis destiné à la consommation en tant que drogue peuvent être regroupés en trois zones : américaine, africaine et asiatique. Dans les pays européens, qui sont essentiellement des zones de consommation, les grosses saisies effectuées ces dernières années et surtout en 1995, attestent de l’augmentation du trafic de cannabis. En 1995, en a saisi : Espagne : 181 tonnes.; France : 42 tonnes.; Pays-Bas : 308 tonnes.; Royaume-Uni : 34 tonnes.; Belgique : 24 tonnes.; Pologne : 12 tonnes.; Norvège : 22 tonnes. Toujours en Europe, l’examen des pays de provenance du cannabis saisi en 1995 montre que le Maroc et la Colombie (le premier pour la résine, le second pour l’herbe), restent largement en tête, avec près de 250 tonnes, suivis beaucoup plus loin par le Pakistan et le Nigeria. D’autres pays sont néanmoins à signaler comme producteurs, tels le Liban, le Cambodge, la Jamaïque, le Kenya, l’Amérique Centrale ou le Ghana. La zone américaine Le Mexique et la Colombie sont de toute évidence les plus gros producteurs, mais les USA, le Canada et la Jamaïque sont aussi très présents. Les USA et le Canada sont d’ailleurs très en pointe (comme les Pays-Bas en Europe) pour la Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 112 culture du cannabis en intérieur et pour l’utilisation de méthodes très élaborées permettant d’obtenir du cannabis avec une teneur en THC plus élevée. Au Mexique, le cannabis, qui pousse dans la plupart des États, est souvent dissimulé dans des parcelles de cultures licites. La surface totale cultivée est estimée entre 30.000 et 40.000 hectares. Ce cannabis alimente essentiellement les deux grands États nord-américains que sont les États-Unis et le Canada. En Colombie, le cannabis cultivé sur près de 8.000 hectares, est lui aussi exporté en grande partie vers l’Amérique du Nord mais aussi vers l’Europe, comme en témoignent d’importantes saisies en Allemagne, aux Pays-Bas et en France. Ces saisies impressionnantes (20 tonnes en Allemagne, 22 en Norvège et 25 en Colombie même destinées aux Pays-Bas) nous montrent que l’acheminement du cannabis colombien en Europe continue mais, très certainement aussi, que la production colombienne a augmenté depuis deux à trois ans. À propos des USA, gros marché potentiel de consommation, la plupart des estimations laissent à penser que 20 à 25.% du cannabis consommé dans le pays est cultivé sur le territoire même des États-Unis. Toutefois, il est très rare et donc difficile de trouver des approximations sur l’étendue des surfaces cultivées. S’agissant du Canada, la part de cannabis cultivé dans le pays, par rapport à ce qui arrive de l’extérieur, est comparable à celle des USA. Néanmoins, il semble que le Canada bénéficie moins du cannabis mexicain que les USA mais par contre, des saisies en provenance du Pakistan (surtout résine) ne sont pas rares. Enfin, dernier producteur, quelque peu emblématique de cette zone américaine : la Jamaïque. La «.Ganja.» jamaïcaine (herbe de cannabis) reste aux yeux des initiés le «.must.» de la marijuana. Il n’est pas exagéré de parler pour certains de pèlerinage en Jamaïque. Les surfaces cultivées sont importantes (1.000 hectares environ), elles peuvent sembler bien faibles par rapport à d’autres pays producteurs. Cela tient pour l’essentiel à la taille du pays (1.000 ha en Jamaïque pour un pays de 10.000 km2 et 30 à 40.000 ha au Mexique pour 2.000.000 de km2). Malgré des campagnes de destructions, des saisies en Jamaïque même (1,4 tonne à Kingston et 4 tonnes à Montéo Bay en 1994) et aussi aux USA et au Canada, venant de ce pays, forcent à constater que l’implication de cette île caribéenne dans le trafic de cannabis de la région est encore très importante. La zone africaine Dans cette région, on ne dispose que de peu de données fiables permettant d’estimer les productions de cannabis. Le côté ancestral de la culture du cannabis en Afrique a toutefois fait place, aujourd’hui, à un côté beaucoup plus mercantile. Le cannabis, en raison des profits élevés qu’il procure, tend parfois à remplacer des cultures vivrières. Les nouvelles voies du trafic de drogue international 113 C’est le cas de l’arachide au Sénégal, du millet au Tchad et du sorgho au Zaïre. D’énormes saisies sont aussi réalisées dans divers pays d’Afrique. 1993 Afrique du Sud Algérie Kénia Nigeria Côte d’Ivoire Malawi Sénégal Maroc ... /... 1,5 2,3 7,3 1,6 4,6 34. 1994 (en tonne) 20 1,2 4,2 19 1,6 5,2 1,5 130 À l’intérieur même de la région, le trafic n’est pas négligeable, mais peu structuré. Au contraire au niveau international, existent des réseaux bien mieux structurés et où sont souvent introduits des ressortissants des pays occidentaux. Si l’Afrique de l’Ouest (Sénégal, Ghana, Nigeria) reste une sous-région productrice d’herbe de cannabis, elle est dépassée aujourd’hui par l’Afrique Centrale (Zaïre, Congo, Centre-Afrique, Gabon) et aussi par l’Afrique de l’Est et du Sud-Est (Kenya, Ouganda, Zambie, Malawi, Afrique du Sud et Madagascar), qui s’affirme de plus en plus comme en passe de devenir la principale zone de production d’Afrique sub-saharienne. Les saisies indiquées précédemment en 1993 et 1994 en témoignent. Mais de toute cette zone africaine, c’est évidemment le Maroc qui intéresse surtout l’Europe de l’Ouest et la France. C’est un des tout premiers pays producteurs au monde, à la fois dans l’estimation des surfaces cultivées (proche de 50.000 ha), dans celle du rendement, et aussi par le pourcentage d’occupation des cultures comparé à la superficie du pays. Le Maroc est le principal pays de provenance du cannabis saisi en Europe. Si les chiffres bruts donnent 60.% du cannabis saisi en Europe, la réalité est d’au moins 80.%. En effet le pays de provenance est parfois l’Espagne ou le Portugal alors qu’il ne s’agit en fait que d’un pays de transit. Pour des raisons géographiques et historiques, la France est, avec l’Espagne, le point d’entrée principal du cannabis marocain vers l’Europe. Une majorité de trafiquants (79.% selon les chiffres d’Interpol) important le cannabis du Maroc sont des Européens (Français, Néerlandais, Allemands, Espagnols et Britanniques), ce qui met donc en évidence l’intérêt d’organisations européennes dans le trafic de cannabis du Maroc vers l’Europe. Les deux principaux pays de redistribution, en Europe, sont de loin l’Espagne et les Pays-Bas. En ce qui concerne l’Espagne, il s’agit presque uniquement de cannabis marocain, tandis que pour les Pays-Bas, il est fréquent d’y trouver de la marijuana colombienne, de la résine afghane ou pakistanaise, et aussi du «.nederwiet.» dont nous traiterons en fin d’exposé. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 114 La zone asiatique En Asie du Sud-Est, du cannabis est encore cultivé illicitement, surtout au Myanmar en Thaïlande, aux Philippines et en Indonésie. La Thaïlande continue d’alimenter en herbe de cannabis, l’Amérique du Nord et l’Australie. Le pays reçoit aussi du cannabis de ses voisins laotiens et cambodgiens. Les Philippines sont aussi un pays de production, alimentant les USA, l’Australie et le Japon. En Indonésie, les cultures répondent surtout à la demande intérieure. Hong-Kong et le Japon reçoivent des chargements de cannabis de la sous-région, le premier pour la réexportation vers l’Europe et les USA, le second pour la consommation interne du pays, où les organisations criminelles traditionnelles sont désormais impliquées. En Asie du Sud-Ouest et au Moyen-Orient, l’on trouve ici les plus gros producteurs de cannabis au monde (Pakistan, Afghanistan, Inde, Népal, Liban). Le Pakistan, l’Afghanistan, mais aussi les républiques d’Asie Centrale de l’ex-URSS, sont devenus la première sous-région productrice mondiale. Le cannabis y pousse d’ailleurs à l’état sauvage, mais il est aussi cultivé à certains endroits de manière plus intensive. Une grande partie des récoltes est transformée en résine de cannabis, reconnaissable à sa couleur très foncée, parfois même noire. C’est environ 2.000 tonnes qui sont fabriquées chaque année et certainement près de 10.000 tonnes d’herbe récoltées au total. En Inde et au Népal, la culture est pratiquée à grande échelle, suivant des pratiques séculaires. La majeure partie de la production est consommée sur place. Nous ne disposons, là encore, que peu de chiffres en matière de surfaces cultivées pourtant en 1994, les autorités ont saisi dans ces deux pays plus de 200 tonnes de cannabis. Le Liban reste un important cultivateur et donc fournisseur de cannabis sur le marché mondial, malgré les campagnes d’éradication réalisées depuis quelques années. La plupart des stocks constitués auparavant, étaient destinés à l’Amérique du Nord et à l’Europe. En 1993, 20 tonnes ont été saisies et en 1994, près de 50 tonnes. Une part importante du trafic (80.%) s’effectue au départ du Liban par voie maritime vers l’Europe. Quelques cas ont été signalés à Interpol en Israël, en Jordanie, et en Syrie. Le cas spécifique du cannabis hydroponique Pour achever ce chapitre et conclure sur le cannabis, il convient toutefois d’évoquer un nouveau phénomène, c’est-à-dire une nouvelle méthode de culture du cannabis, celle de la culture en intérieur ou hydroponique. Cette nouvelle méthode connaît un succès grandissant, elle concerne l’Europe puisqu’elle prend des proportions inquiétantes aux Pays-Bas ou au Les nouvelles voies du trafic de drogue international 115 Canada. Elle permet de toute évidence d’obtenir des taux de THC (tétrahydrocannabinol) important (10.% au moins) et donc de dégager d’énormes profits. De plus cette culture hydroponique permet plusieurs cycles végétatifs annuels, donc plus de quantités récoltées et évite les risques liés au transport (trafic). À titre d’exemple, la production néerlandaise alimenterait aujourd’hui plus de 50.% des Koffieshops du pays. De plus cette méthode semble faire des émules, certains pays de l’est européen s’y emploieraient déjà. La situation des drogues de synthèse Il faut désormais prendre pleinement en considération la diffusion croissante de ces nouveaux produits, issus de synthèses chimiques connues depuis le début du vingtième siècle. Cette nouvelle forme de trafic amène le développement de voies de trafic et la création de groupes de plus en plus structurés qui le réalisent. Cette évolution repose sur la combinaison de plusieurs facteurs dont certains méritent d’être mentionnés : – phénomène de mode caractéristique pour des produits qui sont souvent perçus ou présentés comme valorisants pour l’individu (plus de joie, plus de performances,...), et qui ne sont pas toujours immédiatement identifiés comme stupéfiants, mais presque comme «.potions.» médicamenteuses.; – effets détournés des campagnes d’information sur le Sida et les dangers de la toxicomanie à l’héroïne.; – mode de consommation de ces produits qui ne nécessitent pas de matériel particulier.; – prix de vente moindre que pour l’héroïne et la cocaïne, facilitant ainsi l’usage par les jeunes consommateurs. Il apparaît qu’en France les usagers sont effectivement 76.% de jeunes âgés de moins de 26 ans. – accessibilité des produits qui sont avant tout élaborés en Europe du Nord et de l’Est. Dans le cas français, 80.% des saisies avaient pour provenance les Pays-Bas et la Belgique. Le LSD provenait quant à lui dans 96.% des cas des seuls Pays-Bas. – disponibilité assez grande des précurseurs chimiques nécessaires à leur fabrication, surtout dans les pays immédiatement voisins de l’Union européenne et qui appartiennent à l’ex-empire soviétique. – forte plus value dégagée à partir de matières premières peu coûteuses. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 116 Les produits dont il s’agit Certains de ces produits appartiennent tout d’abord au groupe des amphétamines dont les premiers usages pharmacologiques ont permis entre autre le traitement des troubles nerveux. Parallèlement aux fabrications licites qui ont été réglementées dans les années 50, le trafic de ces produits a pris son essor à cette période en Amérique du Nord et en Asie de l’Est. Les principales amphétamines illicites connues sont les suivantes : MDA (méthylène dioxy amphétamine), MMDA (méthyle méthylène dioxy amphétamine), MDMA (méthylène dioxy métamphétamine). Ce dernier produit est aussi plus communément désigné sous le nom d’«.Ecstasy.». Parmi les nombreux autres substances qui figurent comme perturbateurs du système nerveux central, le LSD est le plus diffusé et sera seul envisagé ici. Devant l’augmentation réelle et inquiétante de l’usage et de la fabrication de ces types de drogues depuis quelques années, les instances spécialisées (OICS et OIPC) ont focalisé l’attention des services répressifs et mené des études pour mieux décrire et endiguer le phénomène. À titre d’exemple, au plan européen, les données disponibles indiquent en premier lieu une augmentation du nombre des trafiquants interpellés avec des drogues de synthèse, soit en 1995, 1.756 individus contre 1.303 en 1994. *** Les quantités d’amphétamines saisies sont ainsi en hausse, après une accalmie observée au début des années 1990. Mais il faut le noter, que cette progression moyenne de 18.% est observée dans la totalité des pays européens. Quant à leur provenance, trois pays apparaissent désormais comme sources principales des amphétamines saisies en Europe : – la Pologne pour 112 kilogrammes.; – les Pays-Bas avec 625 kilogrammes saisis dans ce pays, contre 281 en 1994.; – l’Allemagne pour 115 kilos.1. • Le MDMA (Ecstasy) connaît lui aussi une progression en Europe, car seize pays ont signalé des saisies et 720 trafiquants, contre 476 qui ont été arrêtés en 1995. Pour cette drogue, il est clairement établi que «.les Pays-Bas arrivent en tête des pays de fabrication.» (Rapport Interpol 1995 sur les psychotropes, page 3). En effet, au cours de l’année de référence, 25 laboratoires clandestins ont été démantelés par les services néerlandais. Les axes du trafic révèlent actuellement des itinéraires orientés du nord au sud, vers la Grande Bretagne, la France, l’Espagne et l’Italie. 1. L’OIPC, qui communique ce chiffre, indique qu’il correspond en fait à une saisie de 100 kilogrammes réalisée en Grande-Bretagne, et précise que «.l’origine réelle de la drogue est de toute évidence les Pays-Bas.». Les nouvelles voies du trafic de drogue international 117 • Le LSD parait connaître un tassement de sa diffusion en Europe où onze pays seulement ont signalé des saisies à l’OIPC. Une augmentation n’est enregistrée qu’en Allemagne. La raison résulte probablement de la montée en «.prestige.» de l’ecstasy, mais des conclusions prématurées ne doivent pas être faites. Si les Pays-Bas sont là encore souvent mentionnés pour l’origine du LSD, ce sont les services britanniques qui ont en 1995 démantelé un laboratoire dans lequel des centaines de milliers de doses auraient pu être fabriqués, à partir de matières premières venant des États-Unis. Les États-Unis constituent en effet et probablement toujours la source principale du LSD saisi dans le monde. La situation en France L’examen des données nationales révèle que l’usage des drogues de synthèse se développe dans un mouvement régulier depuis 1990. En effet, pour l’ensemble des produits concernés, même si les chiffres paraissent modestes, 1.864 individus ont été interpellés en 1995 pour l’usage et la revente de ces produits sur un total de 62.325 mis en cause. Pour le trafic, il s’agit alors de 343 individus sur un total de 7.107. Les quantités saisies connaissent la même évolution, malgré le repli relatif du LSD, dont la courbe est en dent de scie, et peut passer du simple au double en une opération : – 70.217 doses de LSD 273.779 doses d’Ecstasy 103,6 kilos d’amphétamines. La barre des 10 kilogrammes d’amphétamines est atteinte en 1989, et cette même année le seuil des 10.000 doses de LSD est franchi. L’Ecstasy quant à elle décolle dès 1988 puisqu’elle passe de 30 doses à 5.047 doses. Quant à la destination des substances saisies en France, 39.% de l’ecstasy devaient partir vers l’Espagne, 28.% devaient être consommés en France, 13.% en Grande Bretagne, 11.% en Italie et 2.% au Portugal. Pour les autres amphétamines, l’Espagne apparaît très nettement comme la principale destination dans 85.% des cas (soit 85 kilos sur 103,6), suivie de la Grande Bretagne (15 kilos) et de la France (2,6 kilos). Au plan international, bien entendu, le développement de l’usage et du trafic de ces substances est constant sur l’ensemble de la planète. Les Pays d’Amérique du Nord ont ressenti la même hausse de consommation et des sources de production se sont développées au Mexique pour alimenter le marché américain. Le Japon est un grand consommateur de stimulants (amphétamines notamment ou ice en provenance des Philippines). On constate des prises de plus en plus fréquentes dans le Sud-Est asiatique, ou en Orient, voire dans le Maghreb, ou au Liban. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 118 Summary The new roads of international drug traffic Gilles Leclair Prohibition confers drug traffic its peculiarities. The modalities of its organization depend of the evolution of international and national politics, and also of the emergence of new markets. New roads take place today beside – and in relation with – traditional and still flourishing roads. 1) Heroin market Since the beginning of the 1970’s, the extension of production has modified the global situation so far as heroin is concerned. In the new economic and political world order, there is the risk to amplify a situation already worrying. 80.% of heroin seized in Europe has come through the Balkans. This main axis branches out nowadays in three channels: • a classic road from Turkey to East Europe, Austria, and Germany, • the south road mainly from Turkey and irrigating Greece and Italy, • the central road through East Europe to Austria and Germany. The seizures of heroin happen essentially in international trucks immatriculated in Turkey. This country, bridge between Europe and Asia, has become the marshalling yard of heroin traffic. The two main roots of traffic and production of heroin are the “golden crescent” (Pakistan, Afghanistan and Iran), and the “golden triangle” (Myanmar, Thailand and Laos). However, new protagonists have appeared in the beginning of the 1990’s, especially Colombia, Mexico and Guatemala, those three countries already highly involved in cocaine traffic. 2) The situation of cocaine Latin America seems to remain the exclusive cocaine producer. On the other hand, with the emergence of new spheres of liberty, markets of consumers are diversifying. Colombia, Peru and Bolivia share the world production of cocaine, estimated at 1,300 tons a year. Among them, Peru is in possession of the largest areas of culture of cocaine, remains of Inca civilization. Colombia, in spite of the struggle, maintains its particular branch of transformation of cocaine into a consumable product. The seaway is more and more used to bring cocaine to Europe, to the prejudice of travel by air. Another evolution : european frontier runners seem to replace progressively colombian agents. The seizures prove that recent consumer countries, for instance in East Europe, are agregated to the traffic. Brazil, on account of its strategic situation in the production zone, is crossed by more and more important quantities of drugs. Mexico and Venezuela are among the new axis of transit of cocaine. 3) The roads of cannabis The traffic of cannabis is rising, and its production seems to belong to three areas: american, african and asian. In the american zone, Mexico and Colombia are the two largest producers, beside which the USA, Canada and Jamaica play a non negligeable part. If most of colombian and mexican cultures are intended to North America, huge seizures of colombian cannabis prove a growing traffic towards Europe. However, insufficient data do not allow to have an estimation of cannabis production in the african zone. In this area, Morocco must be noticed, since it is among the first world producers. For geographical and historical reasons, the main entrance of moroccan cannabis in Europe are France and Spain. According to Interpol, 79% of agents making the transit are european. Redistribution is then mainly operated by Spain and the Netherlands. In South East Asia, cannabis is cultivated mainly in Myanmar, Thailand, the Philippines, and Indonesia. But the biggest world producers (Pakistan, Afghanistan, India, Nepal, Lebanon) belong to South West Asia and Middle-West. A new way of cultivating this substance deserves to be noticed: in-room culture, already currently carried out in the Netherlands and Canada, and allowing to make huge profits and to avoid the risks of transit. Les nouvelles voies du trafic de drogue international 119 4) The situation of synthetic drugs From now on, it is important to take account of the growing diffusion of products originating in chemical synthesis, organized by groups better and better structured. Accessibility of these products, an easy way to consume them, are among the factors that are favorable to their development. Some of these substances belong to the family of amphetamines. Traffic of these substances (“Exctasy”, etc.) began in the 1950’s in North America and East Asia. Quantities of amphetamines seized are growing in the european countries. Countries where they are fabricated are Poland, the Netherlands and Germany. Resumen Las nuevas vias del trafico internacional de drogas Gilles Leclair La prohibición confiere al tráfico de drogas toda su singularidad. Las modalidades de su organización obedecen también a la evolución de las políticas nacionales e internacionales así como a la emergencia de nuevos mercados. Junto a las todavía prósperas rutas tradicionales, aparecen hoy las nuevas vías, indisociables de las anteriores. 1) El mercado de la heroína : A partir de los años 70, la extensión de la producción modificó profundamente la representación a escala universal de la heroína. Actualmente, el nuevo orden económico y político mundial podría amplificar una situación de por sí inquietante. El 80.% de la heroína incautada en Europa pasa por la ruta de los Balcanes. Este eje principal se ramifica actualmente en tres circuitos : La ruta clásica y directa que parte de Turquía y abastece Europa del Este, Austria y Alemania. La ruta sur que tiene su fuente principal en Turquía y abastece a Grecia e Italia. La ruta central que atraviesa Europa del Este para terminar en Austria o Alemania. Los secuestros de heroína realizados implican esencialmente convoys TIR inmatriculados en Turquía. Este país, pasarela entre Europa y Asia, se ha convertido en el la estación de separación del tráfico de heroína. Las dos raíces principales del tráfico y de la producción de heroína son la «.medialuna de oro.» (Pakistán, Afganistán e Irán) y el «.triángulo de oro.» (Myanmar, Tailandia y Laos). Sin embargo, a comienzos de los 90 aparecieron nuevos protagonistas. Los principales son Colombia, México y Guatemala, tres países ya fuertemente implicados en el tráfico de cocaína. 2) La situación de la cocaína : América Latina conservaría la exclusividad de la producción de cocaína. Por el contrario, junto con la emergencia de nuevas esferas de libertad, los mercados de consumidores se diversifican. Colombia, Perú y Bolivia se dividen la producción mundial de cocaína, estimada en mil trescientas toneladas por año. Entre ellos, Perú posee la mayor superficie de cultivo, vestigio de la civilización Inca. Por su parte, Colombia, a pesar de la competencia, conserva su especialidad, que consiste en la transformación de la pasta de cocaína en producto final. La vía marítima es la más utilizada para llevar la cocaína a Europa, siendo cada vez menos utilizada la clásica vía aérea. Otra evolución consiste en la sustitución de las «.mulas.», agentes generalmente colombianos, por pasadores europeos. Las incautaciones realizadas prueban que los países de consumo naciente, los países de Europa del Este, se Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 120 agregan al tráfico. Brasil, en virtud de su situación estratégica en la zona de producción, ve cantidades crecientes de droga transitar por su territorio. México y Venezuela figuran entre los nuevos ejes del tránsito de cocaína. 3) Las rutas del cannabis : El tráfico de cannabis está en aumento y su producción parecería repartirse en tres zonas : americana, africana y asiática. En la zona americana, México y Colombia son los dos grandes productores, al lado de los cuales EE. UU, Canadá y Jamaica tienen un rol no despreciable. Si bien la mayor parte del cultivo colombiano y mexicano está destinado a América del Norte, la confiscación de grandes cantidades de cannabis colombiano confirma el envío creciente hacia Europa. Por el contrario, la insuficiencia de datos confiables no permite estimar la producción de cannabis en la zona africana. En esta parte del globo, Marruecos reviste un interés particular, figurando entre los primeros productores mundiales. Por motivos geográficos e históricos, Francia, junto con España, es la principal puerta de acceso del cannabis marroquí a Europa. Según Interpol, el 79.% de los agentes de tránsito son europeos. La redistribución es luego realizada principalmente por España y Holanda. En la zona asiática, Asia del sudeste presenta cultivos de cannabis sobre todo en Myanmar, Tailandia, Filipinas e Indonesia. Pero los mayores productores mundiales están en Asia del sudœste y en Medio Oriente (Pakistán, Afganistán, India, Nepal, Líbano). Un nuevo modo de cultivo de esta substancia merece ser citado : se trata del cultivo de interior o hidropónico. Esta forma ya es corrientemente utilizada en Holanda y Canadá, y permite realizar enormes beneficios y evitar los riesgos del tránsito. 4) La situación de las drogas sintéticas : De ahora en adelante, será necesario tomar en cuenta la creciente difusión de los productos obtenidos de síntesis químicas, orquestada por grupos cada vez más estructurados. La accesibilidad a estos productos y su sencilla forma de consumo son factores, entre otros, que condicionan el desarrollo de este fenómeno. Una parte de estas substancias pertenece a la familia de las anfetaminas. El tráfico de estos productos ilícitos (MDA, MMDA, MDMA O «.Éxtasis.») apareció en los años 50 en América del Norte y en el sudeste asiático. La cantidad de anfetaminas confiscada va en aumento en el conjunto de los países europeos. Los países de fabricación de las substancias incautadas son Polonia, Holanda y Alemania. Les nouvelles voies du trafic de drogue international 121 Evolución del narcotráfico y nuevas tendencias de la lucha contra esa plaga en Colombia Luis Enrique Montenegro Rinco, Brigadier Général, subdirector de la Policià Nacional en Bogota contra esa Evolución plaga endel Colombia narcotráfico y nuevas tendencias de la lucha El trabajo a presentar pretende mostrar a Vds, dentro del tema «.Evolución de la criminalidad organizada.», el desmantelamiento de la cúpula del cártel de Cali considerado como el mayor éxito de la policía colombiana ante el mundo, bajo la dirección del Señor General Serrano. El modelo o guía de operaciones tácticas y de inteligencia, lo voy a exponer con las fallas y los aciertos, o sea con toda la sinceridad, para que sirva de modelo a otros países que tienen problemas similares. Estos 45 minutos, la primera parte, la primera media hora es exponer estas inquietudes, y el último cuarto de hora un vídeo que complementa mi exposición. Como testigos de esta situación de nuestro país está el doctor Martinez Neira, embajador de Columbia en París (Francia), quien fue, hace poco, ministro de justicia, está el Señor Coronel Perdomo de la Fuerza aérea colombiana, está mi amigo y amigo de Colombia el Coronel Michel Alcaraz, quien estuvo durante cuatro años como delegato del servicio de cooperación técnica internacional de policiá, también nuestro amigo Barletta y el señor Leclair conocen muy bien la problemática de Colombia. La primera instancia es mostrar cómo se desarticuló el cártel de Cali, luego las incidencias de esa desarticulación : el problema de la coca, la eradicación de cultivos, la interdicción del narcotráfico, los costossociales y de vidas que ha costado esa lucha, y un problema que tenemos, las movilizaciones compesinas en zonas donde hay narcocultivos. Unas propuestas al final. La siguiente ayuda muestra cómo se organizó un ente, una unidad como bloque de búsqueda, dedicado a capturar a los «.capos.» de la droga, dependiendo ese bloque de búsqueda del director y subdirector de la policía exclusivamente. Ese bloque debía localizar a la cúpula del cártel de Cali. Estaba compuesto por la parte de inteligencia, una parte táctica operativa, y un fiscal para efecto de blamamiento. Estaba asesorado por un grupo similar a Intercenter Mesina o Altos estudios de seguridad del interior que nos daba ideas y cómo fortalecer la persecusión de este cártel. Sin embargo, a la vez, toda la policía de Colimbia estaba persiguiendo los narcocultivos, los laboratorios para que fucra integral la acción contra el narcotráfico de manera que se debilitara todos frentes, el económico, el social, hasta lograr la captura de los cabecillas. Pienso que la lucha integral no es solamente capturar al «.capo.» y meterlo a la cárcel porque, pronto con dinero, de pronto con poder, puede manejar mejor el narcotráfico detrás de las rejas que fuera de ellas, Vds ven todos los frentes, la estructura financiera, las comunicaciones, y debemos admitir que había corrupción policial. Nosotros admitimos que había corrupción policial, y por eso el Señor General tomó medidas para que la situación se solucionara. De resto, no hubiera sido posible que hubiéramos podido capturar a esta gente. Se hizo control de aeronaves, de vehículos, de armas que tenían las escoltas, el comercio de químicos y también el tráfico de droga. La primera estrategia era fortalecer la inteligencia, la contrainteligencia, porque estos elementos del cártel de Cali nos interfectaban las líneas telefónicas a nosotros, a la fuerza pública, y sabían lo que hacíamos, cuando los íbamos a perseguir. Pues, había que fortelecer nuestra inteligencia hacia la inteligencia de ellos, sobre todo a nivel de sistemas electrónicos. Estando el doctor Martinez Neira, aqué presente, como ministro de Justicia, pudimos tener una ley para poder hacerlo. Anteriormente, cualquiera persona compraba un equipo para interceptar teléfonos y lo hacía con libertad. Ahora ya no, en virtud del artículo 128 que, en este momento, permite controlar esos sistemas. Se necesitaba interceptar todos los sistemas celulares, todos los «.bipers.», porque la mafia colombiana utiliza todas esas tecnologías sofisticadas. Lo que fue más duro ellos, es que más corría el tiempo y como no podíamos capturarlos, pues decidimos enseñar por televisión los rostros de esos delincuentes y había una recompensa para los que los denunciaban. Estofue el guantazo más fuerte que hayan recibido porque estaban publicados, sus pueblos se veían por televisión con recompensas, y estos anuncios hechos por televisión, por vía de prensa precisaban llamar a un número y que sepodía así denunciar a las personas para que podamos localizarlas más fácilmente luego. Otro punto muy importante, señor Barletta, pienso que el objetivo esencial de esta acción es que hemos logrado empobrecer el tráfico de estupefacientes, arruinarbo porque, ahora, si esa gente estuviera en la cárcel, con dinero, sería más peligrosa que si estuviera en libertad. Lo más importante es desmantelartotalmente las estructuras financieras, impedir que inviertan en el sector agrícola, en laboratorios, en actividades deportistas, en la construcción immobiliaria. En Cali, logramos reducir el peso que tenían en la contrucción de un 10 a un 4.% porque unos edificios fueron decomisados, o destruidos, ocupados por la fuerza pública, ya no se encontraban en el mercado de la venta immobiliaria. Habían constituido activos immobiliarios y hemos lanzado acciones en contra de este estado de hecho. Los aviones Este control de los aviones, de las acronaves, es muy importante porque estos, en contenedores, permiten transportar cantidades colosales de drogas. Pedimos a la OAC que participara en el control de las licencias de los pilotes, de los planes de vuelos, en particular en zonas externas a Colombia y a Francia, y cuando se transporta droga. Ya lo saben Vdes, el control es muy Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 124 difícil. Tenemos otra cosa, hemos parado a más de cien aéronaves en Colombia que iban a entregar droga a otros países. Los vehículos, en Cali Uttilizan los taxis. El cártel de Cali los pagaba para que ellos dieran información sobre el movimiento de las tropas y de la policía. Tenían teléfonos celulares, «.bipers.», radios, e informaban a los miembros del cártel de los desplazamientos de las tropas. Un día, hemos paralizado más de mil taxis, es exagerado quizás, pero tuvimos que hacerlo.; lo hicimos para lanzar una operación y constatamos, efectivamente, que los taxis telecomunicación de los mafiosos. Las armas Los secuaces utilizan armas de manera legal. También hemos lanzado una acción, era un abuso, pero para saber quién era quién y saber quién tenía esas armas. Detuvimos a esas personas y así supimos quiénes eran. Se trataba de personas pagadas por el cártel para asegurar la seguridad. Vds pueden imaginar todo lo tuvimos que hacer para llegar a los cabecillas. Hay empresas privadas, que no son policías, sino guardas, que se encargan de la seguridad de sus casas y hemos intervenido sus armas para establecer la relación de estos guardas con los miembros del cártel. En el marco del narcotráfico, uno no se puede únicamente satisfacer de detener a los «.peces gordos.» pero se necesitaba identificar las rutas que seguía la droga y la lucha se llevaba en todos los frentes. El comercio de los productos químicos Tratábamos de detener a los «.peces gordos.», pero al mismo tiempo, tratábamos, al nivel nacional e internacional, de teprimir el comercio de los productos químicos. Y como lo dijo el doctor Barletta, es muy importante que haya un intercambio de informacíon para el contol de estos productos químicos y especialmente con los países productores, de lo contrario esta histotia no se terminará nuanca. También teníamos el apoyo del gobierno para lanzar esas operaciones con la ayuda de las fuerzas armadas, de la Fiscalía que nos daba las autorizaciones para intervenir líneas telefónicas y hacer grabaciones. Otra cosa, la empresa de la telefónica estaba, de hecho, infiltrada por el cártel de Cali. La situación era difícil. Se intervenían líneas, pero ellos llegaban a anularlas porque infiltraban telecomunicaciones. Teníamos, por cierto, la ayuda del DAS, del Departamento administrativo de seguridad, con participacíon Evolución del narcotráfico y nuevas tendencias de la lucha contra esa plaga en Colombia 125 de la CIA, de la DEA, de Interpol, hablo de la cooperación internacional.; el doctor Barletta participó con nosotros en una actividad en Buenos Aires con el Secretario General, el señor Kendall, y hemos hablado detodas esas cuestiones y trabajamos efectivamente. Gracias a Interpol Paris y Lyon, pudimos detener a un traficante de menores por ejemplo, gracias a esos intercambios de información. También tenemos enlaces internacionales y de cooperción encargados de controlar el blanqueo de activosporque puede haber estos blanqueos en los Estados Unidos, en Francia.; entonces, esas personas tienen contactos obligatoriamente. Pues, es necesario tener un enfoque muy crítico y saber exactamente lo que ocurre. Difusión Es necesario poder difundir ciertas informaciones por vía de prensa y no que la prensa pueda difundir algunas informaciones que ella quiere lanzar. Dábamos información sobre nuestras operaciones pero, sabe Vd, señor Barletta, que siempre es difícil manejar a la prensa, porque, después de dos meses de operaciones, os dice : «.¿ Qué habéis hecho a nivel de los capos, a nivel de los.» peces gardos «.?.», y, por supuesto, ejerce una presión demasiado fuerte y, a veces, es bastante perjudicable para mantener la dinámica y lograr hacer nuestro trabajo sin tomar en cuenta la presión de los periodistas. Nos reuníamos cada jueves con el presidente y el doctor Neira para informarlos del avance de nuestras investigaciones, sobre todo, lo concierniente a los capos de la droga. Saben Vds, no se trata únicamente de un problema colombiano. Existen también otros cárteles fuera de Cali, con rutas diferentes y este señor XXX, de nacionalidad columbiana, estaba instalado en Panamá y, desde Buenaventura, gestionaba su tráfico, se trada aquí de un puerto en el Pacífico. Se ha movilizado a los policías de Ecuador, de Perú, de Bolovia y de Panamá con objetivo de arrestarlo. Es un ejemplo. Si se unen todas las policías del mundo, podemos realizar este tipo de detención. Pero, es necesario entrar verdaderamente en el problema, conocerlo a fondo, si queremos poder llegar a alcanzar este tipo de objetivo. Pero, como lo he dicho, lo más importante, es la divisa que tenemos, señor Barletta, es hacerlo todo para empobrecer a los narcotraficantes, quitarles el dinero, las propiedades immobiliarias, congelar las cuentas, es la única manera de hacer fracasar el tráfico de droga en el mundo. Si no lo hiciéramos así, podríamos seguir haciendo reuniones «.ad vitam eternam.» sobre este punto sin poder acabar con esa plaga. Otra operación que me gustaría enseñarles, es ésta. Es una operación simultánea que hicimos con la DEA e Interpol, en Miami, New Jersey, en Swiza, en España, en Bogota y en varias ciudades colombianas contra los activos. En Miami, hay algo muy interesante, hay un banco que se llama Banco Atlántico que trabaja, en el marco de operaciones al nivel de una dirección de Bogotá. Hemos encontrado que había una empresa de transportes aéreos y, en el recinto de esta empresa, detrás de esta facahda, no había ninguna empresa de transportes aéros, sólo se trataba de una sucursal ficticia del Banco Atlántico Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 126 de Miami. La gente depositaba dólares sin control legal y la operación constaba como si se hubiera hecho en el mostrador del Banco Atlántico. La vicepresidenta de este banco en Miami tenía contactos con el responsable de este banco ficticio. Pudimos descubrir esta operación que puede producirse en algunos de sus países, simplemente porque hay empresas ficticias que sirven al blanqueo de los activos y eso puede ocurrir en cualquier país. Al cabo de sis meses, neutralizamos el cártel de Cali, pero nos faltaba Pacho Herrera. Era alguien quien conocía muy bien la ciutad de Cali y las demás ciudades. Era impossible capturarlo. Henios ejercido una presión sobre los medios de comunicación, hemos dicho que era homosexual, que tenía vínculos con la guerilla, que era el enemigo público no 1 para que haya una presión sobre él. Envió una carta al general Serrano, le dijo que estaba harto, de dejar en paz a su familia porque siempre la estábamos vigilando y porque hacíamos registros.; pues, envió una carta diciendo : «.Me entregare entre sus manos en Cali, este domingo, tal dia.». Fuimos a Younbo y Pacho Herrera se entregó en una iglesia. Ahora está entre rejas. Aquí, Vds pueden ver quehemos encarcelado a los capos del cártel de Cali pero, antes, hemos desmantelado todas las estructuras de sus «.empresas.» : la parte financiera, las aeronaves, las cuentas bancarias, etc. Permítanme decir una anécdota que es bastante extraña. Ya lo saben Vds, hace tres años, yo estaba aquí y pronuncié un discurso similar, pero hablaba de lo íbamos a hacer, pues tres años después, les presento los resultados de una acción internacional, de una acción llevada a cabo por la policía colombiana. Como policías, debemos reflexionar sobre una cosa bastante extraña. Tenemos que conocer el perfil del mafioso : le gustan las mujeres guapas, siempre belleza.; los mafiosos está con los reinas de belleza, finanza los concursos de belleza.; los mafiosos están presentes en las actividades deportistas y, al lado de esto, no les gusta que la fuerza pública hostigue a sus familias y que se hagan registros en sus casas.; esto no les gusta. Les gustan mucho las cartománticas, les gusta que se les echen la buenaventura, les gusta mucho esto. En el caso de Gilberto Riguez Jolifuera, el anciano, el decano de los cárteles de Cali, fue necesario efectuar verdaderamente muchas vigilancias en Cali antes de detenerlo. Pero, lo denunció uno de sus secuaces finalmente y esa persona utilizaba un perfume muy particular y no sabíamos en que planta del edificio que vigilábamos se encontraba Don Gilberto. Este hombre de armas entraba en el edificio, subía en ascensor pero perdíamos su pista. Sabíamos que era uno de los grandes fieles del gran jefe. Gracias a las «.chicas.», luego, que entraron con él, pudimos detectarlo... merced al perfume. Y el segundo día, subieron para localizar el perfume, así pudieron descubrir que se encontraba a la séptima planta. La unidad de intervención que tenía caretas contra gases, todo lo necesario para supervivir, pero era necesario saber que un botón permitía que se desplazara una pared para esconderlo. Fue el perfume de su hombre de armas que traicionó a Don Rodrigo. Era un hombre quien tenía siempre una vela encendida pues tenía una gran devoción por la Virgen. También lo seguimos gracias a la denuncia de un hombre de armas. Pero, ¿ qué ocurrió exactamente.? En general, a cierta hora, apagaba las luces de todas las habitaciones pero la vela quedaba encendida y, a las dos, encontramos a Miguel Rodrigo. Intervinimos a las dos : estaba rezando efectivamente Evolución del narcotráfico y nuevas tendencias de la lucha contra esa plaga en Colombia 127 delante de la vela donde pedía que la policía no lo detuviera. Todas estas molestais, después de mochos sacrificios, nos permitieron, por cierto, detener a esos jefes del cartel. Entonces, ¿ cuáles son las incidencias del desmantelamiento en el plan internacional.? En los países como Bolivia y Perú, disminuyó el tráfico. Los precios incrementaron del 50.% al por mayor y, también, al por nienor. Hay una tendencia en reducir la pureza de la droga mezclándola con productos similar. es importante, por ejemplo, trabajar mano en la mano con Méjico, pues pensamos que pueden volverse hacia Méjico. Pero, efectivamente, es muy posible que otras organizaciones en países productores de pasta de coca intenten ocupar los espacios dejados vacíos por el cártel. El problema de la coca : los países, como decía el señor Leclair, que tenien cultivos de hojas de coca son los siguientes : Perú, Colombia, Bolivia con los cifras que Vds están viendo en esta diapositiva. No sólo hemos neutralizado el cártel de Cali, hemos intervenido varias toneladas de drogas, hemos congelado activos, hemos destruido laboratorios y pistas, y también hemos embargado aeronaves. Entonces, hay un fenómeno en nuestro país, es lo que llamamos la «.narcoguerrilla.». En realidad, la guerrilla en Colombia tiene una imagen diferente. No tienen un negocio social o político, son simples delincuentes que aprovechan que en ele sur del país hay cultivos de estupefacientes. ¿ Qué hacen.? Aseguran la protecciíon de estos cultivos y cobran dinero así. Es uno de los problemas más graves que tenemos en Colombia. ¿ Cuál fue nuestra reacción.? Hemos intensificado la fumigación de los cultivos en las zonas que Vds vieron en la diapositiva anterior. tenemos que tratar cincuenta mil hectáres pero ya hemos fumigado más de veinte mil, sea con aeronaves, sea manualmente. La movilización campesina en los zonas de cultivos de estupefacientes es un verdadero rompecabezas.; yo hablaba de esto con el señor Martinez, en los tres departamentos que Vds ven en esta diapositiva, la economía de la coca existía hasta hace quince años, es decir que era una actividad tradicional. Ahora, intervinimos, y más de cuarenta mil campesinos se opusieron a la fuerza pública y, entre allos, los delincuentes de los cuales hablé hace poco porque hemos afectado sus fuentes de financiacíon, y no quieren dejar esta producción, y tenemos un gran problema : quieren impedir la fumigación aérea de los cultivos ilícitos. Y no vamos a transigir. Iremos continuando, intensificando esto, tanto la fumigación como la destrucción de los culitivos por vía aérea y manual. Hemos logrado controlar la gasolina, porque saben Vds que la gasolina se utiliza también para el tratamiento de las hojas de coca. todo ello para decirles nuestra situación actual. Ahora, si lo permiten, al punto no 8, las propuestas : Es necesario, en el plan mundial, desarrollar estrategias de cooperación. Hay que identificar los delitos que tienen un carácter internacional : los narcotráficos con aviones, también con pasadores, incluso por vía corporal, el tráfico de niños, los tráficos de precursores químicos, contrabando de armas, el tráfico ilegal, también, de vídeos pornográficos. Proponemos la adopción de un Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 128 mecanismo multilateral para montar operciones mundiales contra el crimen, en general del tipo del convenio existente en Naciones Unidas. Es absolutamente necesario que nos comprometamos, no podemos regresar a nuestro país sólo con un documento, hay que participar verdaderamente, es preciso que lo que se propone aquí, en el narco de esta reunión, sea eficaz en su país. Como ya lo he dicho, tenemos que conocer el perfil del que blanquea los activos, de toda la organización de los estupefacientes para poder alcanzar nuestros objectivos. Nos hace falta también una cooperación técnica, por ejemplo, tener los medios de interceptar un móvil o un fax. Tenemos que estar al más alto nivel de la tecnología porque el mafioso, íl, tiene la tecnología más moderna. Entonces, se necesita la cooperación técnica que nos permita hacer esto. El señor Barletta decía que, en Colombia, hay un centro de investigacíon que nos da orientaciones, de tipo Intercenter, y que nos permite efectivamente acertar en esta lucha contra los cárteles al nivel mundial. En su acción de lucha contra el crimen organizado, la ONU organizó foros : hay el convenio de Nápoles (contra la delincuencia organizada) de noviembre de 1984.; se trada del documento más importante. Creo que, con la ayuda de los Estados Unidos, hay que promover la lucha contra estos delitos transnacionales. El presidente estaba en Cochabamba en Bolivia, y destacó la importancia que hay de tener un seguimiento de esta cooperación contra los narcotráficos. Hace falta también tener un conjunto legislativo que nos permita esto y, también, mejorar las estructuras sociales. Propuesta para una policía del año 2000 : Hace falta una voluntad de los estados para modernizar las fuerzas policiales, que haya un centro de formación internacional para luchar contra el delito internacional y, también, integrar en íl las policías de los países en desarrollo. hace poco tiempo, Francia y Colombia firmaron un convenio, un acuerdo de alto nivel entre la formación del Centro de Estudios de Investigación sobre la policía y el Instituto de estudios políticos y la Universidad de ciencias sociales del Centro de Toulouse y la policía nacional. El objeto es establecer reglas, normas de ayuda e intercambios en el plan universitario y en materia de investigación entre las dos instituciones. El objetivo es tener una ayuda mutua, una ayuda entre las entidades policiales. Con este fin, proponemos un banco de datos sobre los delitos transnacionales para poder conocer los «.modus operandi.» del blanqueo de activos, del tráfico de armas, del narcotráfico y dar información sobre las legislaciones para adelantar en este terreno a los delincuentes. ¿ Cuál fue el coste de la lucha contra los traficantes.? Destruyeron aviones cuando hacíamos fumigaciones, helicópteros, vehículos y, es la parte máS dolorosa, de 1986 a 1996, trrs mil quinientos policías murieron cumpliendo sus deberes. Es un precio muy elevado para combatir esa plaga nacional. Lo que pedimmos, es que no haya más indiferencia internacional frente a este sacrificio inmenso. Señor Barletta, pido ahora un minuto de silencio para los tres mil quinientos policías colombianos, para todas las víctimas policiales del mundo, todos los miembros de la justicia que murieron en la lucha contra esa plaga del narcotráfico frente a esa lucha al nivel internacional. Pido un minuto de silencio para rendirles homenaje. Pido al señor Martinez que cronometre ese minuto. Evolución del narcotráfico y nuevas tendencias de la lucha contra esa plaga en Colombia 129 Policía nacional de Colombia – La apocalipsis de los cárteles : Desde la aparición del narcotráfico, hace más de dos decenios, el pueblo colombiano luchó contra esa plaga y logró éxitos excepcionales. Sin embargo, si no hemos acabado con esa plaga, hemos reducido mucho sus manifestaciones y, particularmente, la venta de la marijuana, la cocaína, y más recientemente, la heroína. Aunque el tráfico haya aumentado más que regresado, hay que reconocer que si la Policía Nacional no hubiera realizado operaciones muy importantes contra esa plaga, el problema resultaría más complejo, no sólo para Colombia sino para el mundo entero. Hemos capturado al jefe más importante de ese cártel. Así se pudo neutralizar el período más dramático vivido por nuestro país. Saben Vds que fue al final de los años 80 cuando el narcoterrorismo mató a personas públicas y, tamblén, a policías y a miembros de la justicia. A partrir de 1985, la Policía Nacional lanzó una estrategia particular pora identificar al cártel de Cali que era impenetrable. Ese cártel tenía una estructura delictiva, de tipo «.negocio.»,, y montamos operaciones para reducir su capacidad financiera controlando los ingresos, las rutas de los aviones y montando operaciones especiales. También hemos utilizado el sistema de recompensas por vía de carteles, televisión y prensa. estas tareas seguidas permitieron desmantelar ese cártel de que, basándose en previsiones de las agencias antidrogas americanas, yo diría que más del 90.% del mercado concernía la cocaína. Hemos capturado y llevado ante la justicia a los principales jefes que representaban esa oganización. Por asunto de tiempo, vamos a cortar la presentación y vamos a presentar los tres últimos minutos de este vídeo. Si hay alguna expresión que sintetiza con justicia cuál es el peor enemigo y la mayor repercusión en la lucha contra el crimen internacional en la cooperación mundial, termino diciendo que Vds son testigos de las condiciones adversas por las que hemos tenido que pasar, los colombianos, pero repito que no habrá claudicación.; así mismo, con el concurso de Vds, lograremos que las noticias que el mundo sobre Colombia tengan que ver con la vida, con la paz y no con la muerte. Muchas gracias por haberme escuchado. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 130 Résumé L’évolution du narcotrafic et les nouvelles tendances de la lutte contre ce fléau en Colombie Luis Enrique Montenegro Rinco 1) Le démantèlement du Cartel de Cali Au cours de ces trois dernières années, les forces de sécurité colombiennes ont focalisé leurs efforts, en liaison avec de nombreux services étrangers (pays andins, DEA et CIA, Interpol), sur le démantèlement du Cartel de Cali. L’objectif avoué n’était pas uniquement l’arrestation de ses chefs, ce qui fut chose faite, mais également la neutralisation de leurs principaux hommes de main (via un contrôle sévère de la détention d’armes) et surtout l’éradication de la structure en elle-même. Dans le cadre de la lutte intégrale mise en œuvre, la priorité essentielle était de démanteler l’infrastructure économique. L’appauvrissement du Cartel s’est opéré à la faveur de saisies immobilières et des actifs financiers mais aussi grâce au gel des comptes. L’activité du Cartel a été neutralisée par une approche globale du trafic de cocaïne : – la production par une fumigation systématique des cultures.; – la transformation par un contrôle rigoureux des produits chimiques et de l’essence nécessaires au traitement de la feuille de coca.; – le transport via le contrôle des licences des pilotes et l’interception de plus de 100 aéronefs.; – les réseaux de communication du Cartel. Ainsi plus de 1.000 chauffeurs de taxis, agents de renseignement notoires des Cartels sur l’activité des forces de police, ont été immobilisés. L’action de démantèlement fut combinée à une gestion des relations avec les médias. Les incidences de cette action sont réelles. Le prix de la cocaïne, au gros comme au détail, s’est accru de 50.%. Le coupage s’est généralisé. Cependant, le coût payé par les forces de police est conséquent : 3.500 policiers sont morts dans l’accomplissement de leur devoir. 2) Il convient d’adopter une stratégie de coopération mondiale pour faire face au crime organisé transnational. Cette stratégie comporte au moins quatre volets. D’une part, l’identification et l’adoption de textes visant les délits internationaux. D’autre part, la mise en œuvre d’une coopération mondiale contre le crime sous l’égide des Nations unies. Ensuite, le développement de la coopération technique pour permettre aux forces de police d’utiliser en toute sécurité les technologies de pointe, notamment en matière de communication. Enfin, la modernisation de la formation grâce à l’établissement d’un centre international de formation pour combattre les délits internationaux. Evolución del narcotráfico y nuevas tendencias de la lucha contra esa plaga en Colombia 131 Summary The evolution of drug trafficking and the new tendencies of the combat against this calamity in colombia Luis Enrique Montenegro Rinco 1) The dismantling of the Cali Cartel During the last three years, the Colombian security forces have focused their efforts, liaising with several foreign organisations (Andean authorities, DEA, CIA, Interpol), on the dismantling of the Cali Cartel. The avowed objective was not only the arrest of its leaders, although this was achieved, but also the neutralisation of their main hit-men (via a severe control of detention of arms) and above all the eradication of the organisation itself. Within the integral combat set in action, the essential priority was to dismantle the economic infra-structure. The Cartel’s impoverishment was operated through the seizures of estates and financial assets, as well as the freezing of accounts. The Cartel’s activity was neutralised through a global approach of the trafficking in Cocaine: –production, by systematic fumigation of the crops –transformation, by a strict control of the chemical products and petrol needed for the treatment of the coca leaf –transport, via the control of the pilots’licences and the interception of over 100 planes –the Cartel’s communication networks, through the immobilisation of over 1,000 taxi drivers, who were notoriously acting as intelligence agents for the Cartels to feed them with information on the Police forces’activity. The dismantling operation was combined with the monitoring of relationship with the media. The effects of this action are real. The wholesale price of cocaine as well as its retail price have increase by 50%. Blending was generalised. Still, the cost paid by the Police forces is sizeable: 3,500 police officers died in the course of their duty. 2) A world-wide co-operation strategy must be adopted to face trans-national organised crime. This strategy counts at least four sections. On the one hand, to identify and adopt Law aiming at international offences. On the other hand, to set up a world-wide co-operation against crime under the aegis of the United Nations. Then, to develop technical co-operation, in order to enable the Police forces to use high technology safely, especially in communication matters. Finally, to modernise training by creating an international training centre in order to combat international offences. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 132 La coopération et la communication internationales dans la lutte contre le trafic illicite des matières nucléaires et d’autres sources radioactives Sven Thorstensen, assistant du directeur général de la division garanties de l’agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) de Vienne le trafic illicite La coopération des matières et la nucléaires communication et d’autres internationales sources radioactives dans la lutte contre De par son statut, l’AIEA a une double tâche : –aider les États membres en ce qui concerne les applications de la science et des techniques nucléaires à des fins pacifiques, comme la production d’énergie nucléaire, et à utiliser des sources radioactives (ou les isotopes radioactifs), notamment dans la recherche, la médecine, l’industrie et l’agriculture.; – prévenir ou détecter l’utilisation non autorisée de matières nucléaires dans le but de fabriquer des armes nucléaires, activités qui entrent dans le cadre de ce que l’on dénomme souvent la non-prolifération nucléaire ou les garanties. Les activités concernant la non-prolifération découlent du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), dont 180 États sont signataires. Le rôle que joue l’AIEA dans la lutte contre le trafic illicite est fondé sur sa compétence et ses ressources en la matière, en particulier dans le domaine de la non-prolifération. Introduction et généralités Le trafic illicite est le mouvement non autorisé de matières nucléaires et d’autres sources radioactives. Pour les besoins de l’exposé, il convient de préciser que l’expression «.matières nucléaires.» désigne les matières radioactives qui peuvent contribuer principalement à la production d’armes nucléaires et qui peuvent avoir des effets nocifs sur la santé, tandis que l’expression «.autres sources radioactives.» désigne les matières radioactives qui peuvent avoir des effets nocifs sur la santé mais qui n’ont que peu ou pas d’intérêt pour la prolifération des armes nucléaires. Les cas de trafic signalés concernent aussi bien des matières nucléaires que des sources radioactives, et les craintes qu’ils ont soulevées portent à la fois sur la menace de prolifération et les risques pour la santé publique. Ils ont éveillé l’inquiétude du public et risquent de nuire à la crédibilité des systèmes de contrôle établis tant pour les matières nucléaires que pour les sources radioactives. Les échanges légitimes de matières nucléaires et de sources radioactives ont lieu en vertu de la réglementation de l’État et dans les limites qu’elle trace. Les États sont directement responsables de la sécurité des matières nucléaires et des sources radioactives ainsi que de leur manipulation, leur contrôle et leur compatibilité. ces tâches exigent un cadre réglementaire solide. Le directeur général a porté le problème du trafic illicite à l’attention de la Conférence générale de l’AIEA à sa session de septembre 1994, pour lequel elle a adopté une résolution engageant les États à «.prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher le trafic illicite de matières nucléaires.». La conférence générale a confirmé que les gouvernements et les administrations nationales continueront d’assumer au premier chef la responsabilité de ces questions, mais a néanmoins souligné l’importance d’une coopération étroite entre les États membres et a invité l’Agence à renforcer son soutien aux États membres en ce domaine. En mars 1995, le directeur général a présenté des propositions en vue d’intensifier les activités de l’Agence, qui avaient été examinées par le Conseil des gouverneurs à sa réunion de décembre 1994, et le Conseil a demandé que l’on continue d’élaborer un programme dans le domaine du trafic illicite. Ainsi, tant le Conseil des gouverneurs que la Conférence générale, ont donné mandat à l’Agence d’aider les États membres dans un certain nombre d’activités concernant : – la prévention, qui consiste à aider les États à améliorer les infrastructures nationales pertinentes dans les domaines de la législation, de la protection physique, de la comptabilité et du contrôle des matières nucléaires, du contrôle et de la sécurité des sources radioactives et du contrôle des exportations et importations.; – l’intervention, qui consiste à aider les États, sur demande, à détecter les mouvements transfrontières et à y faire face ainsi qu’à analyser les matières nucléaires et les sources radioactives confisquées et à exploiter la base de données de l’Agence sur le trafic illicite pour fournir en temps voulu, aux États et aux médias, des informations fiables et faisant autorité sur les incidents de trafic.; – la formation, qui consiste à mettre au point et à dispenser une formation en matière de prévention et d’intervention.; – l’échange d’informations, qui s’effectue dans le cadre de réunions et conférences internationales et interorganisations. En avril 1996, lors du Sommet sur la sûreté et la sécurité nucléaire tenu à Moscou, les participants ont réaffirmé la nécessité d’une gestion sûre des matières fissiles en tant que garantie contre le risque de trafic illicite des matières nucléaires. Ils ont également reconnu la nécessité pour les nations de coopérer aux niveaux bilatéral et multilatéral et par l’intermédiaire de l’Agence pour faire en sorte que les systèmes nationaux de contrôle des matières nucléaires restent efficaces. Ce qui est particulièrement intéressant pour l’Agence, c’est que les participants au sommet ont noté que les efforts internationaux pour réprimer le trafic illicite devraient porter sur ce qui suit : Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 134 – le stockage sans danger et en sécurité des matières nucléaires et la protection, le contrôle et la comptabilité efficaces de ces matières pour en empêcher le détournement.; – l’action concertée des services de renseignement, des douanes et de répression pour empêcher le transport et la vente de matières détournées.; – les efforts conjoints pour identifier et réprimer la fourniture et la demande illicites de matières nucléaires et pour décourager les trafiquants en puissance. Bien que l’AIEA n’ait ni le mandat ni les ressources voulues pour moderniser les infrastructures nationales de réglementation, elle peut jouer et joue effectivement un rôle utile en coordonnant les efforts de certains États membres dans ce domaine, en cernant les divers problèmes et préoccupations, en fournissant des services d’experts, en définissant des orientations qui font l’objet d’un consensus international, en encourageant l’échange d’informations et en favorisant et dispensant la formation nécessaire. Ces activités sont conçues de manière à compléter l’important soutien bilatéral qu’apportent actuellement un certain nombre d’États qui fournissent des ressources pour lutter contre le trafic illicite de diverses matières. Prévention Pour pouvoir prévenir le trafic illicite, le plus important est de disposer de systèmes nationaux de contrôle des matières nucléaires et des sources radioactives qui soient efficaces. Le programme de l’Agence met donc l’accent sur l’aide à apporter aux États pour qu’ils établissent et/ou renforcent leurs systèmes nationaux de contrôle et appliquent les mesures qui préviendront ou décourageront l’utilisation ou la manipulation non autorisée de ces matières et sources. Les systèmes nationaux de contrôle doivent reposer sur une législation et une réglementation qui incorporent les normes modernes et répondent aux obligations et aux engagements pris par l’État en vertu des conventions et traités internationaux auxquels il est partie. Les systèmes nationaux de contrôle doivent aussi comprendre des mesures visant à prévenir, détecter et décourager les activités non autorisées au niveau de l’État. Les matières nucléaires exigent des systèmes et procédures pour la protection physique, la comptabilité et le contrôle des exportations/importations, tandis que les mesures pertinentes de contrôle et de sécurité des sources radioactives doivent comprendre, en plus du contrôle des exportations/importations, une infrastructure pour 1) la déclaration des sources radioactives, leur enregistrement, la délivrance des autorisations les concernant et leur inspection, et 2) la prévention des vols ou toute autre intervention de tiers qui pourrait compromettre le contrôle des sources. Un exemple de l’assistance de l’Agence en matière de lutte contre le trafic illicite et de non-prolifération est celui de l’élaboration et de la mise en œuvre de «.plans d’appui technique coordonné.» destinés aux États nouvellement indépendants issus de l’ex-Union Soviétique. Depuis 1992, des fonction- La coopération et la communication internationales dans la lutte contre 135 le trafic illicite des matières nucléaires et d’autres sources radioactives naires de l’AIEA ont effectué plusieurs missions d’enquête et des visites techniques dans ces États, ce qui leur a permis de recueillir des informations sur les besoins des divers États, qu’ils ont transmises aux donateurs potentiels. Les États bénéficiaires ont ensuite, en collaboration avec les États donateurs de l’Agence, formulé des plans, adoptés d’un commun accord, pour fournir un appui technique coordonné dans le but d’aider les États nouvellement indépendants à contrôler et comptabiliser les matières nucléaires conformément à leurs obligations en vertu du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP). Des plans de ce type ont été établis pour tous les États nouvellement indépendants dans le cadre du programme. Les pays donateurs sont l’Australie, les États-Unis, la Finlande, la Hongrie, le Japon, la Norvège, le RoyaumeUni et la Suède. Législation et réglementation Un système de contrôle national solide doit pouvoir reposer sur une législation et une réglementation appropriée. Pour les États Membres de l’Agence, les obligations internationales de base concernant les matières nucléaires sont énoncées dans le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) et les accords de garantie conclus avec l’AIEA (INFCIRC/153 et 66). Dans les États qui ont un accord de garantie en vigueur avec l’Agence, celle-ci est tenue de vérifier la présence des matières nucléaires soumises aux garanties en vertu de l’accord, et l’État est tenu, entre autres, d’envoyer un rapport à l’Agence s’il pense que des matières nucléaires ont été ou ont pu être perdues. Les systèmes législatifs antérieurs des États nouvellement indépendants étaient identiques à ceux du système soviétique ou s’en inspiraient. Cette situation ainsi que l’adhésion graduelle de ces États aux conventions et traités internationaux, en tant qu’États non dotés d’armes nucléaires, les a incités à adopter des programmes pour améliorer leur législation en se fondant sur les principes visant à définir les droits et devoirs des organes de réglementation, des exploitants d’installations et des personnes physiques dans l’application des mesures de non-prolifération et de sûreté, de manière à se conformer aux normes et procédures internationales. Les activités de soutien en matière législative, qui ont été demandées par les États nouvellement indépendants et décidées d’un commun accord avec eux, ont été définies et leur coordination entre les pays donateurs est encouragée. Quatre pays donateurs ont établi un groupe international d’experts juridiques où l’Agence est représentée. Les activités d’appui dans le domaine de la législation et de la réglementation visent à aider à établir un cadre de lois et règlements qui réponde aux normes internationales, compte tenu des engagements pris par les divers États en vertu de conventions et d’accords internationaux comme le TNP, les accords de garantie conclus avec l’Agence, la Convention sur la protection physique des matières nucléaires, la Convention de Vienne relative à la responsabilité civile en matière de dommages nucléaires et la Convention sur la sûreté Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 136 nucléaire. En ce qui concerne les lois fondamentales, les domaines couverts par les activités d’appui comprennent la comptabilité et le contrôle des matières nucléaires, la protection physique, le contrôle des exportations/importations, la responsabilité, le transport des matières radioactives, la sûreté et la protection radiologique. Dans les États nouvellement indépendants, l’objectif fondamental est d’établir une législation nucléaire complète, qui englobe à la fois la non-prolifération nucléaire et la sûreté nucléaire. Les lois, arrêtés et règlements doivent comprendre des dispositions concernant a) l’autorisation de toutes les activités nucléaires, y compris des sanctions et peines.; b) les responsabilités de la direction et des personnes physiques au sein des organes de l’installation, notamment les conditions à remplir par les systèmes et procédures des exploitants de l’installation pour empêcher les défaillances et la prolifération.; c) les fonctions et responsabilités d’un organisme public indépendant et compétent de réglementation, y compris les systèmes structurels et administratifs qui doivent assurer la sûreté et la non-prolifération. De grands progrès ont été faits dans ces efforts de soutien. Aujourd’hui, des travaux sont en cours au Bélarus, en Lituanie, en Lettonie, au Kazakhstan et en Ukraine, et un premier contact a été établi avec l’Arménie, la Géorgie, le Kirghizistan, la Moldova et l’Ouzbékistan. Protection physique La protection physique contre le vol ou l’enlèvement non autorisé de matières nucléaires et contre le sabotage des installations nucléaires par des individus ou des groupes d’individus est une question dont on se préoccupe beaucoup aux niveaux national et international. Bien que la responsabilité de la mise en place et du fonctionnement d’un système général de protection physique des matières et des installations nucléaires existant sur le territoire d’un État incombe entièrement au gouvernement de cet État, l’Agence apporte depuis longtemps son aide en ce domaine. L’AIEA a pris part à l’élaboration, puis à la révision, de deux instruments concernant la protection physique qui sont pertinents pour le problème du trafic illicite : la Convention sur la protection physique des matières nucléaires (INFCIRC/274/Rev. 1), dénommée ci-après «.la Convention.», et les «.recommandations relatives à la protection physique des matières nucléaires.» de l’Agence (INFCIRC/225/Rev. 3) qui ont été élaborées par un groupe d’experts réunis par le Directeur général et publiées pour la première fois en 1972. La Convention, qui est entrée en vigueur en 1987 et à laquelle 54 États sont aujourd’hui partie, définit les niveaux de protection physique applicables aux transports internationaux de matières nucléaires employées à des fins pacifiques. Les États partie sont tenus : – de considérer certains actes (vol de matières nucléaires, menace d’utiliser les matières nucléaires pour causer un dommage, par exemple) comme une infraction punissable en vertu du droit international.; – d’extrader ou de poursuivre l’auteur présumé d’un tel acte.; La coopération et la communication internationales dans la lutte contre 137 le trafic illicite des matières nucléaires et d’autres sources radioactives – de fournir une assistance aux autres parties à la Convention en cas d’incident. Toutefois les parties à la Convention ne sont pas tenues d’assurer la protection des matières nucléaires employées à des fins pacifiques en cours d’utilisation, de stockage et de transport sur le territoire national. De plus, la Convention ne s’applique pas 1) aux matières nucléaires utilisées à des fins militaires, 2) aux installations nucléaires ou 3) aux autres sources radioactives. Le document INFCIRC/225/Rev. 3 donne des indications et des recommandations concernant la protection physique des matières nucléaires en cours d’utilisation, en magasin et en cours de transport, que ce soit à l’échelon national ou international, et à des fins pacifiques aussi bien que militaires, et contient des dispositions relatives au sabotage des installations. Ce document décrit en détail les éléments d’un système national de protection physique. Il traite des conséquences néfastes que peuvent avoir sur la santé et la sûreté le vol de matières nucléaires et le sabotage des installations (avec dégagement possible de radioactivité). La plupart des pays industrialisés et des pays en développement se sont servis de ces recommandations pour établir et appliquer leurs propres systèmes de protection physique. Pour qu’une protection physique suffisante soit assurée, les systèmes nationaux doivent instaurer des conditions qui 1) réduisent au minimum les possibilités d’enlèvement non autorisé de matières nucléaires ou de sabotage, 2) permettent de prendre rapidement des mesures étendues pour localiser et récupérer les matières nucléaires manquantes, et 3) réduisent au minimum les effets du sabotage. La réglementation en matière de protection physique et les procédures connexes doivent donc être conçues de manière à mettre en échec toute tentative de vol et à détecter rapidement tout vol commis. Pendant un certain temps l’Agence a fourni un appui technique aux États membres en mettant à leur disposition des experts, qui lors de leurs missions, les conseillent en matière de protection physique. Aujourd’hui, l’AIEA est disposée à élargir cet appui technique aux États qui connaissent des problèmes particuliers de protection physique et à leur procurer du matériel spécialisé en cas de nécessité urgente, lorsque les installations ne sont pas comprises dans le programme en cours des donateurs. L’appui technique peut revêtir la forme de service consultatif qui portera le nom de Service consultatif international sur la protection physique. Il mettra, sur demande, à la disposition des États membres une équipe internationale d’experts qui examineront les programmes nationaux de réglementation concernant la protection physique des matières nucléaires et/ou la mise en œuvre de systèmes de protection physique dans des installations nucléaires déterminées. Les conseils techniques comprennent l’élaboration d’un manuel de référence fondamental sur les principes et pratiques en matière de protection physique, qui est en cours. L’AIEA formulera aussi des indications supplémentaires pour la mise en œuvre des dispositions du document INFCIRC/225/Rev. 3 dont l’interprétation serait difficile. L’assistance des donateurs aux États membres dans le domaine de la protection physique revêt une priorité particulièrement élevée lorsque de l’uranium hautement enrichi et du plutonium sont en jeu. Cette assistance est Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 138 offerte pour établir une politique nationale en matière de protection physique et pour répondre à ces besoins dans des installations déterminées. Un rapport, qui sert de modèle pour les améliorations à apporter dans les installations nucléaires en matière de protection physique, est élaboré d’ordinaire par des experts de deux ou trois pays donateurs. La mise en place du matériel de protection physique dans les installations est assurée et appuyée dans une certaine mesure par l’État bénéficiaire. Fin 1995, l’installation de systèmes et de matériels était plus ou moins avancée au Bélarus, en Géorgie, au Kazakhstan, en Lettonie, en Lituanie, en Ukraine et en Ouzbékistan. Comptabilité et contrôle des matières nucléaires Un système national de comptabilité et de contrôle des matières nucléaires (SNCC) solide qui tienne compte de la complémentarité entre la comptabilité et le contrôle des matières, d’une part, et la réglementation relative à leur protection physique et les procédures connexes, d’autre part, est un facteur de dissuasion capital contre le vol de matières nucléaires. La comptabilité et le contrôle des matières sont destinés à assurer que l’emplacement de toutes les matières nucléaires se trouvant dans un État est connu et confirmé par des inventaires périodiques. Les États signataires du TNP ont l’obligation de conclure des accords de garanties avec l’AIEA. L’une des obligations fondamentales prévues par un tel accord est de mettre sur pied un SNCC. En cas de besoin et sur demande, l’Agence aide les États à définir les procédure et les tâches ordinaires du SNCC, tant au niveau de l’État qu’à celui de l’installation. Cela se fait habituellement à l’occasion de l’inspection initiale des bureaux de l’État et des installations nucléaires dans le cadre des garanties. Les États donateurs ont apporté aux États nouvellement indépendants une assistance étendue pour la mise sur pied et le fonctionnement des SNCC dans le cadre de plans d’appui technique coordonné. Cette assistance couvre aussi d’autres éléments des activités menées au niveau de l’État et dans l’installation, notamment ceux qui répondent aux exigences nationales et bilatérales. Les besoins d’assistance des divers États en matière d’infrastructure et de matériel ont été définis. L’assistance des donateurs a permis de fournir des services d’experts et du savoir-faire, de même que du matériel et du logiciel, des équipements spécialisés, du matériel de bureau et des moyens de communication, des procédures pertinentes ainsi que des instruments qui sont utilisés par les inspecteurs de l’État. Des travaux sont en cours ou ont été menés à bien au Bélarus, en Géorgie, au Kazakhstan, en Lettonie, en Lituanie, en Ukraine et en Ouzbékistan. Ils doivent encore démarrer dans les autres États nouvellement indépendants. Grâce à ces efforts, on a pu établir les fondements de la phase initiale de mise en œuvre des garanties de l’AIEA dans les États nouvellement indépendants. La coopération et la communication internationales dans la lutte contre 139 le trafic illicite des matières nucléaires et d’autres sources radioactives Contrôle et sécurité des sources radioactives En ce qui concerne la législation applicable aux sources radioactives autres que les matières nucléaires, il n’existe aucun instrument international juridiquement contraignant par lequel les parties s’engageraient à assurer le contrôle et la sécurité des sources radioactives et, en particulier, à signaler la perte ou le vol de ces sources à l’AIEA et/ou à d’autres organisations internationales. Toutefois, la version révisée la plus récente des Normes fondamentales internationales.1 a été approuvée récemment par le Conseil des gouverneurs de l’Agence et par cinq autres organisations de parrainages.2. Un grand nombre d’États calquent leur système national de réglementation sur les orientations générales données par ces normes. L’adoption de normes par les États membres et par les organisations internationales fait naître l’obligation générale de faire en sorte que les activités impliquant l’utilisation de matières radioactives (y compris les matières nucléaires) soient menées conformément aux prescriptions des normes, à moins que la radiœxposition causée ne soit exclue de l’application des normes ou que la source n’en soit dispensée par l’organisme de réglementation. Les normes prévoient de plus que le transport de sources radioactives soit soumis aux dispositions du Règlement de transport des matières radioactives.3 de l’AIEA. Ces dispositions peuvent être rendues obligatoires par les conventions internationales pertinentes ou par la législation nationale. Les dispositions des normes qui s’appliquent au trafic illicite sont celles de la déclaration et de l’autorisation par voie d’enregistrement ou de licence, ainsi que celles qui concernent la sécurité des sources radioactives. Ces dernières prévoient que les titulaires d’enregistrements et de licences doivent garder les sources en sécurité de façon à empêcher le vol ou l’endommagement ou leur utilisation non autorisée. La vérification indépendante par un organisme national de réglementation est une condition sine qua non du respect des dispositions des normes. Ainsi, bien que ces dispositions concernent essentiellement les titulaires d’enregistrements et de licences, qui sont responsables au premier chef de leur application, les gouvernements ont à les faire respecter, généralement par l’intermédiaire d’une infrastructure nationale qui comprend l’organisme de réglementation nécessaire. En outre, dans le cadre de l’assistance générale apportée aux États pour qu’ils mettent en place et maintiennent des systèmes solides et efficaces d’enregistrement, de délivrance d’autorisations et de contrôle des sources radioactives, un certain nombre d’États Membres reçoivent une aide pour dresser un inventaire complet des sources sur leur territoire et veiller à ce qu’elles soient contrôlées par un organisme compétent. 1. Normes fondamentales internationales de protection contre les rayonnements ionisants et de sûreté des sources de rayonnements, No 115 de la Collection Sécurité, AIEA, Vienne. 2. Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), Organisation internationale du Travail (OIT), Agence pour l’Energie nucléaire de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDES/AEN), Organisation mondiale de la santé (OMS) et Organisation panaméricaine de la santé (OPS). 3. La dernière édition du Règlement de transport des matières radioactives de l’AIEA a été publiée en tant que No 6 de la Collection Sécurité, AIEA, Vienne (1991). Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 140 Contrôle des exportations/importations Le contrôle des exportations et des importations des États vise à empêcher les mouvements transfrontières non autorisés de matières nucléaires et de sources radioactives et est exercé dans chaque pays au moyen d’une législation et de systèmes nationaux pour surveiller la manipulation et l’utilisation de ces matières. Les mesures décrites ci-dessus dans les chapitres portant sur la législation, la protection physique, la comptabilité et le contrôle des matières nucléaires et des sources radioactives sont toutes des maillons d’une chaîne de contrôle efficace des importations et des exportations. Outre les systèmes et procédures qui sont expressément utilisés dans le domaine des activités nucléaires (comme le SNCC), il faut recourir aux éléments classiques de l’infrastructure d’un État, comme la police et les douanes, pour assurer le contrôle des importations et exportations nucléaires. La mesure dans laquelle ces éléments sont utilisés et la façon dont ils sont organisés et coordonnés dépend des conditions propres à chaque pays. Dans le cadre des plans d’appui technique coordonné destinés aux États nouvellement indépendants, les États donateurs s’engagent à aider ces derniers à établir des dispositifs nationaux pour le contrôle des exportations/importations. Intervention Les autorités nationales ou les médias sont les premiers à détecter les cas de trafic et à ouvrir une enquête à leur sujet. En vertu de son système de garanties, l’AIEA reçoit des États des informations au sujet de la quantité et de l’emplacement des matières nucléaires placées sous la juridiction de l’État considéré ou se trouvant sur son territoire. La disparition de matières nucléaires en particulier, par exemple à la suite d’un vol, dans un État ayant conclu un accord de garanties généralisées doit être signalée à l’Agence. De grands progrès ont été faits par l’AIEA, en collaboration avec l’Organisation mondiale des douanes, dans l’élaboration de conseils destinés aux administrations nationales, plus particulièrement aux fonctionnaires en poste aux frontières, quant aux procédures à utiliser pour détecter les mouvements illicites de matières radioactives et aux mesures appropriées d’intervention en pareil cas. Analyse des matières confisquées En cas de trafic illicite de matières nucléaires ou de sources radioactives, ou de présomption d’un tel trafic, l’Agence peut fournir à un État, à sa demande, le service consistant à analyser les matières confisquées. Ces analyses peuvent être utilisées par l’État pour : 1) identifier ou confirmer la nature et les La coopération et la communication internationales dans la lutte contre 141 le trafic illicite des matières nucléaires et d’autres sources radioactives propriétés nucléaires des matières confisquées.; 2) évaluer les risques radiologiques qu’a pu entraîner leur manipulation illicite.; 3) fournir éventuellement des indices sur l’origine des matières confisquées. Les laboratoires de l’AIEA ont les moyens voulus et une longue pratique dans le domaine de l’analyse des matières que l’on rencontre tout au long du cycle de combustion nucléaire. Il est également possible de déterminer la nature chimique des principaux composants, ainsi que la nature et la concentration de constituants mineurs ou d’éléments traces chimiques et radiochimiques. Ces dernières mesures permettent d’obtenir des informations génériques sur le mode et la date de production des matières confisquées. Ces renseignements peuvent être utiles aux États dans leurs enquêtes visant à déterminer l’origine des matières. L’aide apportée par l’Agence aux États en matière d’analyse peut aussi revêtir la forme d’analyses quantitatives et qualitatives effectuées directement sur le terrain, au moyen d’instruments portatifs ou transportables tels que spectromètres gamma, compteurs de neutrons ou analyseurs de fluorescence X. Base de données sur le trafic illicite Avec l’augmentation du nombre de cas de trafic signalés, les États membres de l’AIEA lui ont demandé d’élargir sa base de données existante pour pouvoir donner une vue d’ensemble fiable de la situation en matière de trafic illicite. En août 1995, l’Agence a informé les États membres qu’elle avait amélioré sa base de données intitulée «.Synthèse concernant les cas de trafic.» pour créer la «.base de données sur le trafic illicite.», qu’elle était prête à accepter des informations sur le trafic illicite et qu’elle commencerait à publier périodiquement des rapports succincts. À l’époque, l’Agence a invité chaque gouvernement à lui faire part de son désir de participer à ce programme et à lui indiquer son correspondant pour la base de données. La base de données actuelle de l’AIEA sur le trafic illicite contient les informations relatives aux incidents signalés par les médias et par les autorités nationales. Cette base a principalement pour fonction de fournir en temps voulu des renseignements fiables et précis sur tous les cas de trafic à trois niveaux d’utilisation : l’État, l’AIEA et le public. Elle aide les États à choisir parmi les faits concernant des cas déterminés de trafic illicite ceux qui sont pertinents pour eux. D’autre part, elle aide l’Agence à conserver en mémoire le détail des cas de trafic en vue de dégager des tendances et thèmes communs qui puissent servir à appuyer les programmes de lutte contre le trafic illicite de ses États membres. Enfin, elle contribue à rassurer le public en fournissant en temps voulu des renseignements fiables aux médias sur les cas de trafic illicite. Depuis 1993, l’AIEA a enregistré dans sa base de données 168 cas de trafic illicite de matières nucléaires et d’autres sources radioactives qui lui avaient été signalés par les États ou rapportés par les médias. Les données disponibles ne suffisent pas encore à dégager une tendance dans la fréquence Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 142 de ces faits. Toute diminution apparente pourrait tenir en partie au fait que les trafiquants en puissance considèrent qu’il n’y a que peu de débouchés véritables pour les matières qui ont fait l’objet des incidents passés. Toutefois, aussi longtemps que subsistent des risques de vol parce que la sécurité est mal assurée, il est tout à fait possible que des groupes clandestins cherchent à s’approprier ces matières à des fins illicites. Les faiblesses qui subsistent dans le système de sécurité font du trafic illicite des substances nucléaires une possibilité qui doit continuer de retenir l’attention de la communauté internationale. Le tableau ci-après indique la répartition des 168 cas, en pourcentage et par catégorie : Matières Nucléaires Matières Radioactives U (fortement enrichi) Plutonium U (faiblement enrichi) U (naturel) U (appauvri) Thorium Sources radioactives et autres, par exemple : - Source au 137 Cs pour jauges industrielles - Feuille de 241Am pour détecteurs d’incendie - Sources médicales au 60Co 9% 56 % 35 % En 1996, l’AIEA commencera à fournir aux États des résumés trimestriels d’information sur les cas de trafic. Dans un premier temps, le résumé comprendra tous les incidents enregistrés dans la base de données de l’Agence qui répondent à la description générale ci-dessus du trafic. Par la suite, ces résumés contiendront des renseignements sur les nouveaux incidents importants et une mise à jour des renseignements donnés précédemment. Formation Les activités de l’Agence qui contribuent à améliorer les systèmes nationaux de contrôle et de sécurité des sources comprennent l’organisation de stages de formation, soit assurés par l’Agence en général, soit offerts aux États Membres pour leur permettre de dispenser eux-mêmes la formation. Pour qu’un SNCC soit solide, il faut former son personnel et celui des installations. L’Agence coordonne les programmes internationaux et régionaux de formation des SNCC parrainés par un certain nombre d’États membres, à savoir l’Argentine, l’Australie, le Brésil, les États-Unis, le Japon et la Russie. Deux ou trois programmes sont offerts chaque année au personnel des services de l’État et au personnel des installations, pour les aider à établir de nouveaux SNCC ou à améliorer l’efficacité des systèmes nationaux existants. Plus de 900 personnes au service des États membres ont bénéficié de ces programmes au cours des 20 dernières années. Par le biais de son programme de coopération technique, l’AIEA a administré pendant les 20 dernières années un cours interrégional sur la protection physique qui a été suivi par plus de 300 personnes originaires de La coopération et la communication internationales dans la lutte contre 143 le trafic illicite des matières nucléaires et d’autres sources radioactives divers États membres. ce cours vise à familiariser les spécialistes qui s’occupent de l’établissement de systèmes nationaux intégrés de protection physique des installations nucléaires avec les principes et techniques modernes, aidant ainsi les États membres à établir et appliquer leur système national dans les domaines de l’ingénierie des systèmes, des techniques de pointe et de l’analyse des installations. Avec l’intensification des activités en matière de protection physique, l’AIEA offrira des possibilités de formation supplémentaires aux pays désireux d’améliorer la sécurité des matières nucléaires. Elle a organisé en République tchèque, en novembre 1995, un cours régional sur la protection physique des installations et matières nucléaires pour 30 stagiaires de la Fédération de Russie, des États nouvellement indépendants de l’ex-Union soviétique et des États membres de l’Europe orientale. C’était la première fois que ce cours était donné en Europe et la première fois aussi que des services d’interprétation simultanée et le matériel pédagogique étaient disponibles en anglais et en russe. Ce cours, ainsi que d’autres, sera organisé à nouveau en 1996 et dans les années à venir. Dans le cadre des plans d’appui technique coordonné aux États nouvellement indépendants, une formation étendue du personnel de ces États, dispensée avec l’assistance des donateurs, est inscrite dans tous les domaines des activités d’appui à ces pays, notamment en ce qui concerne les dispositifs, les procédures et l’emploi du matériel. En 1995, l’AIEA a organisé trois réunions de consultants sur divers éléments de son programme relatif au mouvement illicite de sources radioactives auxquelles a assisté un consultant de l’Organisation mondiale des douanes qui souhaitait vivement prendre part à l’élaboration des recommandations. Un groupe a rédigé des recommandations sur le renforcement des Normes fondamentales et l’amélioration des programmes nationaux concernant la sécurité des sources radioactives. Plusieurs programmes de ce genre qui ont déjà été réalisés par les États membres étaient décrits à titre d’exemple dans le rapport. Les conclusions de ce rapport ont été examinées lors d’une réunion de groupe consultatif tenue en janvier 1996. La deuxième réunion de consultants tenue en 1995 a rédigé des recommandations sur la surveillance du mouvement illicite de sources radioactives, spécialement aux frontières et dans les aéroports. La troisième réunion a élaboré des recommandations sur la formation du personnel qui est appelé à s’occuper de la lutte contre le trafic illicite et n’est pas familiarisé avec les caractéristiques des matières d’intérêt national, comme les agents postés aux frontières et le personnel de sécurité des aéroports. Les rapports de ces deux dernières réunions ont été examinés à la réunion du comité technique de juillet 1996. Les résultats de certains de ces travaux seront particulièrement utiles à l’Organisation mondiale des douanes pour la formation des douaniers à la détection du mouvement illicite de matières radioactives et aux mesures d’intervention à prendre. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 144 Échange d’informations L’AIEA procède aux travaux préparatoires à la première conférence internationale sur la protection physique qu’elle organisera à Vienne du 10 au 14 novembre 1997. En outre, et conformément à son rôle important d’organe de centralisation de l’information technique dans un certain nombre de domaines nucléaires, l’Agence coordonne activement ses activités de protection physique avec un certain nombre d’États donateurs et d’organismes internationaux. En juin 1995, l’AIEA a organisé à Vienne une réunion du comité technique sur le transport des matières radioactives. À cette réunion ont pris part les représentants de 20 États membres ainsi que d’Europol et de l’Organisation mondiale des douanes. Les participants ont examiné les mesures qui devraient être prises pour lutter contre le mouvement illicite de ces matières. Plusieurs recommandations ont été formulées à l’intention de l’AIEA au sujet de la mise en commun de l’information, de la coordination des activités, de la détection des matières aux frontières, de l’utilisation de la base de données de l’Agence sur le trafic illicite et de la notification des incidents. Pour étudier plus avant ces questions et d’autres qui concernent les administrations nationales et les douaniers, le Secrétariat a organisé en septembre 1995 une réunion de coordination interorganisations avec la participation des organisations internationales qui s’occupent du mouvement transfrontière de matières radioactives, y compris les matières nucléaires, c’est-à-dire, l’ONU, l’Union Européenne (EU), Euratom, Interpol, l’Organisation mondiale des douanes, Europol, l’Organisation maritime internationale et l’Organisation de l’aviation civile internationale. Cette première réunion devait servir principalement à un échange d’informations sur les activités de chacune des organisations dans ce domaine et à déterminer l’appui déjà apporté et à apporter à l’avenir, aux États dans la lutte contre le mouvement illicite de ces matières. Etant donné l’utilité de cette réunion, une deuxième réunion élargie a eu lieu en août 1996. L’AIEA se tient aussi en relation étroite avec l’Union européenne et EURATOM. La Commission européenne et ses États membres ont collaboré étroitement avec l’Agence et d’autres organisations spécialisées dans les domaines d’intérêt commun de l’Union européenne, des pays d’Europe centrale et orientale et des ex-républiques soviétiques. Au sujet des plans d’appui technique coordonné, l’AIEA a organisé en juin 1995 à Vienne une réunion des donateurs pour examiner l’expérience acquise et définir les domaines dans lesquels il faut apporter une assistance supplémentaire aux États nouvellement indépendants qui en bénéficient. Les participants ont encouragé l’Agence à poursuivre ses activités en assurant le suivi des tâches d’appui par le biais de ses bases de données. La coopération et la communication internationales dans la lutte contre 145 le trafic illicite des matières nucléaires et d’autres sources radioactives Interaction entre l’AIEA et l’Organisation mondiale des douanes La coopération et la communication entre l’AIEA et l’Organisation mondiale des douanes ont déjà pris une ampleur considérable étant donné la complémentarité des fonctions qu’elles assument. Les organisations douanières jouent un rôle prédominant pour ce qui est de la détection des mouvements transfrontières illicites de matières nucléaires et d’autres sources radioactives ainsi que des enquêtes à mener en la matière, car il est clair qu’elles sont en première ligne dans la défense contre le trafic illicite. Elles reçoivent un appui des autorités nationales compétentes, des organismes de réglementation nucléaire, de la police, etc., selon les structures administratives et exécutives des pays concernés. L’Organisation mondiale des douanes représente ceux qui, sur le terrain, sont les principaux responsables de la détection des mouvements non autorisés de matières radioactives et des interventions dans ce domaine. L’AIEA sait par ailleurs que certains États fournissent une aide bilatérale pour renforcer la capacité de certaines organisations douanières par le biais de formations, de la fourniture de matériel de détection et d’un échange de visites entre les services douaniers, et elle étudie les moyens d’élargir ce type d’assistance directe en coopération avec l’Organisation mondiale des douanes. Afin d’améliorer l’efficacité globale du contrôle et du suivi du trafic illicite dans le monde, il importe que l’expérience et le savoir-faire acquis par les services douaniers et par les autorités et les organismes connexes soient diffusés et mis en commun à l’échelon international. Dans ce contexte, l’AIEA joue le rôle qui lui revient dans le cadre des efforts internationaux déployés pour lutter contre le trafic illicite. Par exemple, elle a recours à divers mécanismes pour le dialogue entre les États et les organismes internationaux, comme l’organisation de réunions et de conférences, l’élaboration de bulletins d’information et de principes directeurs ainsi que la gestion de la base de données. Il est important de former toutes les catégories de personnel qui sont susceptibles d’être confrontées à un mouvement illicite de matières nucléaires. Dans ce domaine, l’AIEA peut offrir des compétences techniques importantes en ce qui concerne l’utilisation d’appareils de détection de matières nucléaires et des sources radioactives, ainsi que les pratiques de sûreté. Elle compte de très nombreux scientifiques de talent qui peuvent fournir à l’Organisation mondiale des douanes des avis et une assistance technique concernant tous les aspects de la science nucléaire et de la protection radiologique. Elle a directement accès aux connaissances scientifiques et techniques disponibles dans les laboratoires et les industries de premier plan dans le monde, en particulier dans le domaine des mesures relatives aux matières nucléaires et aux sources radioactives. Les modalités pratiques en vue d’un échange d’informations et l’organisation de programmes de formation peuvent être définies par un accord entre l’AIEA et l’Organisation mondiale des douanes. L’AIEA est consciente de la nécessité d’harmoniser les travaux des nombreuses organisations internationales qui s’occupent du trafic illicite. C’est la raison principale pour laquelle elle a organisé en 1995 la réunion Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 146 de coordination interorganisations mentionnée précédemment sur le mouvement transfrontière illicite de matières nucléaires et de sources radioactives. Le groupe qui, à la première réunion, se composait de dix organisations internationales s’est élargi à 17 participants lors de la deuxième réunion tenue en août 1996. À l’évidence, il existe un réel besoin de renforcer la coopération entre les services douaniers, d’autres organismes gouvernementaux et l’AIEA dans ce domaine. Pour y faire face, l’AIEA collabore avec l’Organisation mondiale des douanes de plusieurs manières. On citera parmi leurs activités conjointes : – la mise au point d’un accord entre les deux organisations pour fixer formellement les domaines d’activité actuels et définir les relations de travail futures.; – l’élaboration d’un document à paraître dans la collection sécurité de l’AIEA intitulé «.Mesures de lutte contre le trafic illicite de sources radioactives.», qui donnera aux autorités nationales des orientations générales sur la manière de renforcer l’application des prescriptions pertinentes des Normes fondamentales internationales et sur l’amélioration des programmes de l’État et des installations concernant la sécurité des sources radioactives. Ce document fait actuellement l’objet d’une révision finale et d’une mise au point rédactionnelle en vue de sa publication. – l’élaboration d’un document dans la collection sécurité de l’AIEA, intitulé «.Mesures concernant le suivi et la détection du trafic illicite des sources radioactives.», qui donnera aux responsables nationaux d’utiles conseils pratiques pour le suivi du mouvement illicite des sources radioactives, spécialement aux frontières et dans les aéroports. Les États membres de l’AIEA ont tenu une réunion d’examen finale en juillet 1996, en vue de la publication de ce document au début de l’an prochain. – la mise au point du matériel pédagogique destiné aux instructeurs nationaux, qui a été approuvé en février 1996 par le Comité de l’Organisation mondiale des douanes chargé des mesures d’application. Ce matériel donne des orientations pour la formation du personnel qui n’est pas familiarisé avec les caractéristiques des matières radioactives, comme les agents postés aux frontières et le personnel de sécurité des aéroports, mais qui pourrait être appelé à participer à des actions de lutte contre le trafic illicite de ces matières. L’Organisation mondiale des douanes cherche actuellement des fonds pour lancer la mise en œuvre de ce module pédagogique. Le parrainage conjoint d’un programme pilote comportant l’installation de matériel ultramoderne de détection des rayonnements dans un ou plusieurs postes frontières d’un pays donné. Pendant la période d’essai, des experts donneront aux fonctionnaires nationaux des instructions précises sur le fonctionnement de ce matériel et sur la manière de l’utiliser dans le cadre d’opérations douanières de routine. Ce premier projet pilote fait actuellement l’objet d’échanges de vues préliminaires. Par ailleurs, il est prévu que l’AIEA fournira à l’Organisation mondiale des douanes, à titre gracieux, 175 exemplaires d’une vidéo qu’elle a produite sur la sûreté du transport des matières nucléaires et elle a accepté de lui fournir un appui technique pour produire ses propres vidéo sur la contrebande de matières nucléaires et de matières dangereuses. On compte que la collaboration entre la communauté nucléaire et les douanes pourra se développer dans de nombreux autres domaines. La coopération et la communication internationales dans la lutte contre 147 le trafic illicite des matières nucléaires et d’autres sources radioactives Regard sur l’avenir En 1995, le Conseil des gouverneurs et le Secrétariat de l’AIEA ont continué de définir le rôle que doit jouer l’Agence pour aider les États à combattre le trafic illicite de matières nucléaires et de sources radioactives. Les activités retenues par les États membres font intervenir plusieurs départements de l’AIEA et sont conformes aux tâches qu’elle accomplit traditionnellement, à savoir la formation, l’appui technique et les conseils, l’échange d’informations et la coordination et l’identification des besoins. En 1996, les activités déjà entreprises grâce aux contributions volontaires d’un certain nombre d’États membres concernent ce qui suit : accroissement du nombre de cours sur la protection physique et lancement du Service consultatif international sur la protection physique.; établissement ou mise à jour de l’inventaire des sources de rayonnements, avec les encouragements et l’assistance de 53 États par le biais de projets de coopération technique.; aider, en cas de besoin, à gérer les sources de rayonnements usées.; aider certains États et certains postes douaniers aux frontières en leur donnant les moyens de détecter les mouvements de matières radioactives.; encourager activement un grand nombre d’États à désigner un correspondant national chargé de coordonner les questions ayant trait à la prévention du trafic illicite et aux mesures d’intervention dans ce domaine. En ce qui concerne la prévention en général, il est à prévoir que l’AIEA, comme d’autres organisations internationales et les États, augmentera l’assistance aux États ou aux organismes nationaux. En matière de législation et de réglementation, il existe en général un régime international qui peut servir de base pour appuyer les États dans leurs efforts de lutte contre le trafic illicite, mais au niveau national il faut améliorer la situation. En l’occurrence, l’AIEA appuiera l’appel lancé au sommet de Moscou sur la sûreté et la sécurité en faveur d’une adhésion universelle à la Convention sur la protection physique des matières nucléaires et de l’application des recommandations sur la protection physique figurant dans le document INFCIRC/225/Rev. 3. En outre, l’Agence aidera les États à réaliser leurs programmes pour s’assurer que toutes les sources radioactives soient réglementées de manière conforme aux normes fondamentales internationales. Pour ce qui est de l’appui aux États nouvellement indépendants, on continue à encourager la fourniture d’une assistance par les États donateurs, en la ciblant par l’intermédiaire du Groupe international d’experts juridiques, et l’on prévoit que des programmes de coopération seront en place dans les États nouvellement indépendants avant la fin de 1996. Ces États eux-mêmes soulignent l’urgente nécessité d’améliorer les structures en matière de législation nucléaire, qui englobe tous les domaines de l’activité nucléaire, et les pays donateurs offrent l’assistance demandée dans le cadre d’une coopération. La nature particulière du travail de législation, dont l’objectif est d’établir les fondements du contrôle par l’État des activités nucléaires, incite à coordonner les moyens de soutien, tant entre États donateurs qu’avec l’AIEA. On cherche aussi à harmoniser les lois et réglementations nucléaires en tenant compte des dernières exigences en matière de sûreté et d’assurance de qualité. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 148 Dans le domaine de l’intervention, tout au moins pour les matières nucléaires sensibles (c’est-à-dire l’uranium fortement enrichi et le plutonium séparé), les autorités nationales devraient informer immédiatement les autres États, les organisations internationales de répression et les services douaniers du vol ou de la disparition de ces matières. En ce qui concerne la base de données sur le trafic illicite, on a déjà commencé à appliquer les mesures visant à améliorer la fiabilité et la rapidité de communication de l’information. Il est demandé aux États membres de modifier ou de corriger les informations recueillies auprès des sources publiques. De même, on examine le mécanisme de communication entre l’AIEA et les États membres afin de pouvoir transmettre plus rapidement les informations. L’AIEA continuera d’encourager une coopération internationale étroite pour l’élaboration et l’application de mesures visant à prévenir et détecter les cas de trafic illicite et à intervenir. Les activités de formation et d’amélioration décrites ci-dessus devraient être menées à bien dès que possible et des «.Pratiques de sûreté.» seront établies aux fins des cours et comme documents de référence par tous les États membres qui souhaitent renforcer leurs programmes de lutte contre le trafic illicite. Le succès du programme de lutte contre le trafic illicite de l’AIEA dépend de la coopération et de la coordination entre les États et les organisations internationales pour éviter les doubles emplois et les chevauchements dans les activités. Le partenariat entre l’AIEA et les autorités nationales et internationales chargées des douanes et de la répression tient une place essentielle dans ce programme. La coopération et la communication internationales dans la lutte contre 149 le trafic illicite des matières nucléaires et d’autres sources radioactives Summary International cooperation in the struggle against traffic of nuclear and other radioactive substances Svein Thorstensen The Nuclear Energy International Agency aims to help states to combat illicit trafficking of nuclear substance and other radioactive substances. States, however, remain directly responsible of security, manipulation, control, and accounting of these substances in a strict legal framework. The Agency develops its own missions, plays a major role in energizing inter-state cooperation, and harmonizes work of many international organizations coping with illicit trafficking. Actions in favor of new independent countries from former Soviet Union are particularly important, and are decided thanks to the opinion of an international council of legal experts. The mandate given in 1995 to the Agency by the Council of governors and by the General Conference in nuclear substance illicit traficking, is structured round four main themes: –as far as prevention is concerned, the Nuclear Energy International Agency helps states to conceive efficient legal norms, and provides advices for physical protection, accounting and control of nuclear substances and their movement, –the Agency intervenes to allow states to detect movements accross the borders, and analyze seized nuclear or radioactive substances. New information is regularly provided to the new database on illicit trafficking, so that states and medias could have an accurate and reliable information at their disposal, in a short delay, –thanks to those numerous contacts with first rate laboratories and industries, thanks to its technical competency and to the support of its many talented scientists, the Agency plays a major role in training. It organizes and conducts numerous training courses for all kinds of personnel that might be concerned with illicit movements of nuclear substance, –it also watches over the exchange of information in international and inter-organization conferences. It must be emphasized that the cooperation between the Agency and world customs organization was set according to the complementarity of their respective functions. The Agency intends to carry on and intensify its programs, and proceeds to the preliminary work of the first international conference on physical protection, that will take place in Vienna in november 1997. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 150 Resumen La cooperacion internacional en la lucha contr el trafico de materias nucleares y otras fuentes radioactivas Svein Thorstensen La Agencia Internacional de Energía Atómica tiene por misión ayudar a los estados a combatir el tráfico ilícito de materias nucleares y de fuentes radioactivas. Los países, en efecto, son directamente responsables de la seguridad, manipulación, control y compatibilidad de estos productos en un marco reglamentario estricto. La Agencia desarrolla misiones propias y ocupa un rol preponderante en la promoción de la cooperación entre organismos y países, y permitiendo la armonización de los trabajos de las numerosas organizaciones internacionales que se ocupan del tráfico ilícito. Las acciones desarrolladas, a su pedido, en favor de los nuevos países independientes surgidos de la ex Unión Soviética son particularmente importantes y están bien orientadas gracias a un grupo internacional de expertos jurídicos. El mandato recibido por la Agencia en 1995 de parte del Consejo de Gobernadores y de la Conferencia General en materia de tráfico ilícito de materias nucleares se articula alrededor de cuatro ejes principales : •En el marco de la prevención, la AIEA ayuda a los estados a establecer normas legislativas eficaces y suministra asesoramiento en el dominio de la protección física, de la contabilidad y del control de materia nucleares y de sus movimientos. •La Agencia interviene para permitir a los estados una mejor detección de los movimientos a través de sus fronteras y el análisis de las materias nucleares y de las fuentes radioactivas confiscadas. La nueva base de datos sobre el tráfico ilícito es regularmente actualizada a fin de poner a disposición de los estados y de los medios de comunicación informaciones precisas y confiables sobre los incidentes de tráfico, lo más rápidamente posible. •Gracias a sus numerosos contactos dentro de los laboratorios y de las industrias de primer nivel, gracias a sus competencias técnicas y apoyándose en sus numerosos científicos talentosos, la AIEA ocupa un rol preponderante en materia de formación. Asegura la organización y la animación de pasantías desatinadas a todas las categorías de personal susceptibles de verse enfrentadas a movimientos ilícitos de materias nucleares. •Se ocupa también del intercambio de información en el marco de reuniones y conferencias internacionales y entre organismos. Al respecto, se debe subrayar la cooperación entre la AIEA y la Organización Mundial de Aduanas que ha sido puesta en funcionamiento teniendo en cuenta la complementaridad de sus funciones. La AIEA proyecta continuar e intensificar sus programas y procede actualmente a los trabajos de preparación de la I Conferencia Internacional sobre la Protección Física, que organizará en Viena en noviembre de 1997. La coopération et la communication internationales dans la lutte contre 151 le trafic illicite des matières nucléaires et d’autres sources radioactives L’action de l’ICOM dans la lutte contre le trafic illicite des biens culturels Elisabeth Des Portes, secrétaire général du Conseil international des musées (ICOM), organisation non gouvernementale rattachée à l’Unesco des biensL’action culturelsde l’ICOM dans la lutte contre le trafic illicite Le Conseil international des musées est une organisation internationale non gouvernementale (ONG) dont le siège est à Paris auprès de l’Unesco avec lequel il entretient des relations formelles d’association. Le Conseil international des musées regroupe plus de 14.000 professionnels sur les cinq continents travaillant dans les musées et les institutions patrimoniales. Son objectif est la promotion des musées et de la profession muséale, dans une définition très large de l’institution, qui englobe patrimoine culturel et naturel. Les membres de l’ICOM travaillent depuis 50 ans à faire du musée l’institution vivante qu’elle est désormais en échangeant de l’information, des expériences, en élaborant des projets conjoints et des normes internationales. Ils sont également attachés à préserver et à défendre le patrimoine de l’humanité et, devant les menaces que le trafic croissant des biens culturels leur fait courir, ils mènent depuis plusieurs années une politique active dans ce domaine. Un phénomène mondialement répandu L’état de la situation démontre que le trafic illicite des biens culturels atteint l’ensemble des pays de la planète. Contrairement aux idées reçues, ce ne sont pas seulement les pays en voie de développement qui en sont les victimes mais aussi l’ensemble des pays développés. En Europe, ce sont les églises ou les châteaux qui sont les proies les plus faciles pour les voleurs. Quelques grands musées (le Louvre à Paris notamment) ont dû renforcer leurs mesures de sécurité après avoir subi plusieurs vols. Les galeries et collections privées sont de plus en plus souvent «.visitées.». La situation instable des pays de l’ex-URSS a amené vers les antiquaires de l’Ouest nombre d’objets sortis de façon illicite. Des manuscrits de grande valeur ont été volés à la Bibliothèque nationale de Saint-Pétersbourg... Mais la situation est plus grave encore dans les pays en voie de développement. Après avoir longtemps été dépouillés de leurs objets ethnographiques par les visiteurs de passage, les missionnaires ou les résidents étrangers, les pays de l’Afrique sub-saharienne sont désormais la proie des pilleurs de sites archéologiques et connaissent la situation des sites égyptiens. La vallée du Niger notamment est particulièrement atteinte, au point que certains archéologues ont pu dresser des cartes des pillages : au Mali par exemple, on estime que plus de 70.% des sites archéologiques dans certaines régions ont été détruits par des fouilles clandestines.1. Il en est de même d’autres sites archéologiques importants comme les sites Sao du Tchad. Des fouilles scientifiques parviennent cependant à se faire mais c’est lorsque les archéologues prennent la précaution de les garder secrètes et de n’en publier les résultats que lorsqu’ils estiment leur travail terminé. C’est le cas des fouilles exemplaires menées au Niger, sur le site du Bura en 1983,.2 qui ont dégagé sur plusieurs centaines de mètres carrés une vaste nécropole datant du 2e au 11e siècle. Dans les pays où le tourisme est développé, le trafic peut toucher d’autres formes de patrimoine : au Kenya et en Tanzanie, le mobilier en bois, les fameuses portes sculptées de la côte est de l’Afrique sont très prisés des acheteurs occidentaux. Il en est de même des portes de greniers collectifs marocaines ou des statues funéraires Sakalava de Madagascar. Les musées eux-mêmes, garants de l’authenticité des objets, sont désormais la proie des voleurs, du fait probablement de la circulation de «.faux.» de meilleure qualité. En l’espace de dix-huit mois, en 1994 et 1995, les trois grands musées du Nigéria, à Ife, à Jos et à Ibadan ont subi des vols majeurs : 34 pièces volées à Ife en novembre 1994, 9 pièces volées à Jos en janvier 1995.3 Le musée d’Ibadan a été entièrement vidé de ses collections – mises en réserve lors du réaménagement du musée – au cours de deux vols successifs. En Amérique latine, les «.professionnels.» des pillages sont baptisés «.vaqueros.» : pilleurs de tombes. Leurs méthodes sont bien connues : pioches et dynamite. Ils recherchent essentiellement les objets en terre cuite, métal précieux ou pierres semi-précieuses et sévissent dans toute l’Amérique Centrale. L’ampleur de ce phénomène peut être illustrée par le cas de l’Equateur qui récupéra, en 1983, 9.236 pièces archéologiques sorties illicitement du pays et en possession d’un seul collectionneur italien.4 1. Prospections de sites archéologiques dans le delmta intérieur du Niger, Mamadi Dembele, Annette M. Schmidt, G. Diderik Van Der Waals, in Vallées du Niger, catalogue de l’exposition présentée à Paris, octobre 1993-janvier 1994, RMN 1993 ISBN 2-7118-2778-X – P. 218-232. 2. Un village des morts à Bura en République du Niger. Un site méthodiquement fouillé fournit d’irremplaçables informations. Boubé Gado. in idem, p. 365-374. 3. «.Cent objets disparus. Pillage en Afrique.», ICOM/1994/SBN 92-9012-017-7 p. 96, 97, 101, 113. 4. «.Le trafic illicite des biens culturels en Afrique.». ICOM 1995. ISBN 92-9012-220-X. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 154 Les vols atteignent aussi les musées, particulièrement les petits musées de sites comme le musée d’Inga Pirca, le seul site inca de l’Equateur, mais aussi les musées situés dans des villes de moyenne ou grande importance : le musée Nicolas Avelladana de Tucuman (Argentine), mais aussi le musée anthropologique de Mexico. Dans toute l’Amérique latine, par ailleurs, les églises sont systématiquement pillées : objets sacerdotaux, sculptures et peintures religieuses alimentent le marché de l’art. On retrouve la même situation en Asie où le pillage des sites archéologiques alimente lui aussi le marché de l’art à Hong Kong, au Japon puis en Europe et aux États-Unis. Au Cambodge, le Roi Norodom Sihanouk a souhaité interpeller la communauté internationale car il considère que les temples d’Angkor ont été davantage abîmés par le pillage au cours de ces dix dernières années que pendant tout le reste de leur histoire. Les objets archéologiques chinois, de leur côté, se retrouvent en si grand nombre chez les antiquaires européens qu’Interpol a décidé d’envoyer une mission sur place. Les motivations scientifiques et déontologiques de l’ICOM Les raisons pour lesquelles l’ICOM s’est toujours engagé dans cette lutte aux côtés de l’Unesco sont de plusieurs ordres. Sur un plan scientifique tout d’abord, les pillages dont sont victimes le sites archéologiques empêchent toute interprétation des objets. Hors de leur contexte, ils sont incapables de livrer l’information qui permettra d’en dégager une signification pour l’histoire.1. Dramatique pour de nombreux pays, ce phénomène l’est plus encore pour l’Afrique qui possède peu d’archives écrites : sans les découvertes issues des fouilles archéologiques, la mémoire du continent va s’éteindre et il sera à tout jamais impossible de reconstituer son histoire. C’est à ce titre que certains ont pu parler de «.génocide culturel.». Sur le plan déontologique par ailleurs, l’ICOM a toujours souhaité avoir une position claire. Son code de déontologie, adopté en 1986, dispose qu’«.un musée ne doit acquérir aucun objet... sans que... le responsable du musée ne soit assuré que le musée peut obtenir un titre de propriété en règle [et]... que cet objet n’a pas été acquis dans, ou exporté de son pays d’origine... en contrevenant aux lois de ce pays.». Les dispositions qui précèdent concernant les acquisitions valent également pour les expositions. Chaque membre de l’ICOM est invité à adopter ce code en devenant membre de l’Organisation. Traduit en 16 langues, il sert désormais de référence internationale. 1. Ecuador, al rescate de su pasado. Hernan Crespo Toral. Cultura n 16, Banco Central del Ecuador, p. 293-339. L’action de l’ICOM dans la lutte contre le trafic illicite des biens culturels 155 Le Code de déontologie rappelle également les règles de respect mutuel qui doivent régir les relations des professionnels de musée entre eux. Elles sont essentielles pour la collaboration internationale nécessaire à la lutte contre le trafic illicite : les appels lancés à la communauté internationale par les professionnels africains pour que cesse l’hémorragie de leur patrimoine hors du continent.1 ou l’appel lancé à la tribune de l’ONU en 1991 par le Prince Norodom Ranarridh.2 en sont les témoins. Le comité de l’ICOM pour la déontologie a ainsi été saisi de plusieurs cas au cours des récentes années et a rappelé à certains musées les principes du code. Ceci explique d’ailleurs la position de l’ICOM vis-à-vis du marché de l’art dont nous souhaiterions qu’il se moralise et adopte, lui aussi, un code de déontologie. Nous considérons en effet que le marché de l’art constitue un complément à l’action culturelle des musées puisque le particulier en devenant acquéreur – et qui sait.? collectionneur – contribue lui aussi à la préservation et à la promotion du patrimoine. Mais pour qu’il continue à se porter acquéreur, il doit pouvoir le faire dans les meilleures conditions de sécurité, alors que le marché de l’art constitue aujourd’hui le seul secteur de la vie économique où l’on a 90.% de chances de devenir receleur. L’action en faveur des législations Depuis l’adoption de la Convention de l’Unesco de 1970, à l’élaboration de laquelle il fut étroitement associé, l’ICOM est intervenu auprès de ses comités nationaux pour qu’ils incitent leurs gouvernements à la ratifier. Les professionnels de musée sont en effet les premiers intéressés à faire adopter par les politiques et les législateurs de leurs pays les conventions internationales : leur action est déterminante dans ce domaine. Une pression particulière s’est exercée plus récemment sur un certain nombre de pays européens dont la majorité n’a pas ratifié la convention : le ministre français de la Culture s’est engagé en 1995 à ce que la convention soit ratifiée dans les mois qui viennent,.3 plusieurs démarches ont été faites par la Suisse, preuve qu’après 25 ans, il n’est toujours pas trop tard pour obtenir gain de cause sur ce sujet. L’ICOM s’est attaché à mieux faire connaître le décret d’application pris par les États-Unis, seul grand pays du marché de l’art à avoir ratifié la Convention de l’Unesco. Ce décret permet aux pays qui ont eux-mêmes ratifié la convention d’interdire sur le sol américain la vente d’objets de leur patrimoine, en particulier issus de fouilles clandestines..4 Ce décret, insuffisamment connu des pays «.exportateurs.» (et dont la gestion est confiée au Cultural Property Advisory Committee qui dispose de trop peu de moyens pour le promouvoir de 1. Communications présentées lors de l’atelier Unesco-ICOM sur le trafic illicite des biens culturels en Amérique latine, septembre 1995, Cuenca (Equateur). 2. Dillettantisme et pillage : trafic illicite d’objets d’art ancien au Mali. Roderick McIntosh. Museum n 149, 1986, p. 49-57. 3. Appels d’Arusha (1993) et de Bamako (1994), in «.Le trafic illicite des biens culturels en Afrique.», ICOM/EFEO 1993, ISBN 92-9012-220X. 4. Appel relayé par le Roi Norodom Sihanouk dans «.Cent objets disparus. Pillage à Angkor.» p. 6-7, ICOM/EFEO 1993, ISBN 92-9012-015-0. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 156 façon satisfaisante) n’a donné lieu à des accords qu’avec quatre pays latinoaméricains, El Salvador, Bolivie, Pérou, Guatemala, et un pays africain, le Mali. Par bonheur, l’évolution des mentalités ainsi que les règles posées par les codes de déontologie ont amené ces dernières années une refonte des législations qui tendent à renverser la charge de la preuve : l’acquéreur d’un bien culturel ne pourra plus désormais être considéré de bonne foi (la notion de bonne foi étant l’une des faiblesses reprochées à la Convention de l’Unesco) s’il ne fait pas preuve de sa «.diligence.». La directive européenne de 1993 et la Convention d’Unidroit de 1995 vont toutes deux dans ce sens : elles représentent une avancée importante. Comme pour la Convention de l’Unesco, l’ICOM s’est engagé à encourager la ratification de la Convention d’Unidroit auprès de ses comités nationaux..1 Le travail des Comités internationaux Les professionnels du patrimoine ont la charge du travail en amont nécessaire à la protection des biens culturels. Au sein de l’ICOM, plusieurs comités internationaux constituent un lieu d’échanges où l’information sur les avancées de chaque discipline peut circuler. Quatre d’entre eux sont plus spécifiquement destinés à assurer la protection des collections. La sécurité des collections repose sur une formation appropriée de l’ensemble des personnels de musée. Depuis sa création en 1946, l’ICOM a œuvré en faveur d’une professionnalisation des personnels qui veillent sur le patrimoine et le protègent. Le comité de l’ICOM pour la formation du personnel dans les musées (ICTOP) a publié un Syllabus détaillant les différentes formations à assurer pour une bonne gestion du musée et de ses collections. Il recense les différentes formations proposées aux niveaux national et international et en assure la diffusion. Les inventaires constituent une étape indispensable à la sécurité des collections. Pour de trop nombreux musées encore, ces inventaires sont inexistants ou lacunaires. Or, seule la fiche d’inventaire pourra à la fois prouver l’appartenance d’un objet au musée et aider à son identification. Le CIDOC (Comité international de l’ICOM pour la documentation) aide les musées à établir leurs inventaires. Grâce à l’activité de ces groupes de travail internationaux qui œuvrent à l’élaboration de normes professionnelles internationales, une première liste de normes d’information minimales ou «.champs.» a été établie en 1978 et publiée dans la revue de l’Unesco Museum afin d’être diffusée à l’ensemble des professionnels. D’autres groupes de travail coordonnent le vocabulaire et la terminologie, créent des listes de catégories spécifiques d’objets et analysent l’information que les musées utilisent pour la gestion, la recherche, l’exposition et la conservation des objets. Cette collabo1. Débat du 26 juillet 1995 à l’Assemblée Nationale, Paris, France. L’action de l’ICOM dans la lutte contre le trafic illicite des biens culturels 157 ration professionnelle est indispensable à l’échange d’information sur un plan international, seule clef pour l’établissement d’un réseau efficace. En plus de ce travail théorique, l’ICOM a entrepris, entre 1992 et 1995, de répondre concrètement aux besoins exprimés par un certain nombre de pays en matière de documentation et d’inventaires. Dans le cadre du programme AFRICOM, programme de l’ICOM pour l’Afrique, un projet pilote de standardisation des inventaires de collections a été mis en place. Six musées se sont portés candidats pour jouer un rôle régional d’incitation et de formation : ils collaborent ensemble au projet commun de standardisation, reçoivent dans ce cadre des équipements et une formation et s’engagent à disséminer le projet dans les autres musées de leur pays et de la sous-région. Le même type de projets devrait intervenir dans les prochains mois en Amérique latine et dans les pays arabes. La mise en place dans les musées de mesures de sécurité – qu’elles fassent ou non appel à des technologies avancées – permet une protection utile contre le vol. Le Comité international de l’ICOM pour la sécurité dans les musées (ICMS) se consacre à la publication de directives internationales de sécurité, à des missions de formation des personnels d’encadrement. Au cours de ses réunions annuelles, les mesures préventives et les systèmes de protection sont analysés et les expériences partagées. Dans de nombreux pays, le patrimoine culturel n’est pas présenté dans un musée : il est encore conservé par les communautés qui l’ont produit. Il en est de même du patrimoine naturel. Il convient donc de sensibiliser les populations à l’importance de ce patrimoine, gardien de leur identité culturelle. La tâche consistera donc pour les professionnels à se rapprocher de ces communautés et à engager une collaboration. C’est un des thèmes de travail du Comité international de l’ICOM pour l’éducation et l’action culturelle (CECA) dont les membres constituent le personnel de musée spécialisé dans l’interprétation et la médiation des œuvres auprès du public. De la même manière, la protection des sites archéologiques déjà – ou pas encore – fouillés par des archéologues professionnels requiert-elle la mobilisation des populations locales, considérées comme les seuls gardiens efficaces de ce type de patrimoine. Les ateliers avec les policiers et les douaniers Depuis quelques années, l’Unesco et INTERPOL, de façon à améliorer l’application de la convention de 1970 sur les moyens d’interdire et d’empêcher l’importation, l’exportation et le transfert de propriété illicites des biens culturels, réunissent les professionnels du patrimoine en ateliers régionaux. Un représentant de l’ICOM fut aussi invité à participer aux ateliers organisés en Thaïlande en février 1992, au Cambodge en juillet 1993, en Hongrie en mars 1993. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 158 En septembre 1993, l’ICOM a décidé de s’associer plus activement à ces initiatives et de lever des fonds pour pouvoir réunir, à l’occasion de ces ateliers, les professionnels de musée, ceux de la police et ceux des douanes. De cette façon, une collaboration nationale peut s’instaurer entre les représentants de ces trois professions puis une collaboration régionale avec leurs homologues des autres pays. Cette collaboration, en mettant en place des équipes directement intéressées à la protection du patrimoine, permet d’améliorer considérablement la situation sur le terrain. Le premier atelier de ce type jamais tenu en Afrique a eu lieu en Tanzanie en septembre 1993. Le second s’est tenu au Mali en 1994, le troisième a eu lieu au Zaïre en juin 1996. Le premier atelier tenu en Amérique latine a eu lieu en septembre 1995. Les publications Un certain nombre d’organismes publient et diffusent des photos d’objets volés : INTERPOL et l’Unesco en premier lieu, l’IFAR aux États-Unis, le magazine Trace au Royaume-Uni, différentes revues scientifiques comme Minerva aux États-Unis ou catalogues de ventes comme la Gazette de Drouot à Paris. Les Nouvelles de l’ICOM, bulletin trimestriel diffusé gratuitement aux 12.000 membres de l’ICOM dans le monde entier, reproduisent des photographies et des notices d’objets disparus ayant été répertoriés par INTERPOL. Récemment, plusieurs objets d’art japonais volés en 1989 au Tikotin Museum d’Haïfa (Israël) et une tête d’homme en bronze volée au Musée national du Nigeria.1 ont été retrouvés grâce à la rubrique «.Patrimoine.» des Nouvelles de l’ICOM. Compte tenu de ces succès, l’ICOM a souhaité renforcer cette politique en publiant une série intitulée «.Cent objets disparus.» qui serait largement diffusée aux professionnels de musée, aux services de police et des douanes, aux professionnels du marché de l’art, salles des ventes et galeries. Le premier numéro, consacré à Angkor, est sorti en septembre 1993. Le second numéro, paru en 1994, est consacré au pillage en Afrique. Quatre autres numéros sont en préparation : pour l’Amérique latine, l’Europe, les pays arabes et l’Asie. L’objectif de ces publications est de constituer à la fois un outil d’information et de sensibilisation, le titre de la série indiquant bien qu’au-delà des objets publiés, c’est l’ensemble du patrimoine dont ils sont les représentants sur lequel nous souhaitons attirer l’attention. Outil d’information pour les professionnels de musée tout d’abord, dont le premier devoir est d’exercer la plus grande vigilance sur les acquisitions ou les donations faites à leur musée. Très vite, nous nous sommes aperçus que ce travail n’était pas inutile puisque dans les musées les plus informés, notre 1. Convention on Cultural Property Implementation Act (P.L. 97-446). L’action de l’ICOM dans la lutte contre le trafic illicite des biens culturels 159 publication avait joué son rôle : ainsi au Métropolitain Muséum of Art de New York – qui nous le fit savoir immédiatement – fut retrouvée une tête khmère publiée dans «.Pillage à Angkor.». La demande de restitution faite par le gouvernement du Cambodge a reçu une réponse favorable de ce musée, conformément aux exigences du code de déontologie de l’ICOM. Outil d’information pour le marché de l’art également. Deux mois après notre première publication, un antiquaire parisien restituait une statue khmère.; plus tard, deux autres objets vendus par Sotheby’s à Londres et à New York étaient formellement identifiés et ont fait depuis l’objet de demandes de restitution de la part du Cambodge. Malgré la collaboration reçue de Sotheby’s, nous regrettons que leurs «.experts.» semblent si peu informés et laissent une maison de renom proposer à la vente des objets qui sont notoirement victimes de pillages systématiques. Des succès semblables aux précédents ont été également enregistrés depuis la publication de «.Pillage en Afrique.», deuxième numéro de la série. Une statue malgache a été restituée par un antiquaire parisien, six autres ont été saisies à Bruxelles. Une statue Bété volée au Musée national d’Abidjan a, elle aussi, retrouvé le chemin de son musée. Une statue Bankoni du Mali a été saisie à Paris. Un masque Nalindele volé au musée de Livingstone a été saisi par la police belge. Même symboliques, les restitutions parfois rapides obtenues des antiquaires montrent qu’un souci plus grand de transparence se fait jour. Il est vrai que notre collaboration étroite avec INTERPOL et les polices nationales contribuent à nous faciliter les contacts. Ces publications nous ont également permis d’atteindre un public plus large. La presse écrite, radio et télévision diffusée s’est fait l’écho de nos préoccupations : elle nous permet de toucher l’opinion publique, seule capable de pouvoir faire sensiblement évoluer certaines pratiques. Nous sommes de plus en plus aidés dans cette démarche par les expositions des musées eux-mêmes qui, lorsqu’elles présentent un patrimoine qu’elles savent menacé, attirent l’attention des visiteurs sur ce phénomène. Ce fut le cas de l’exposition «.Vallées du Niger.» présentée entre 1993 et 1994 à Paris (France), Leyde (Pays-Bas), puis, pour la première fois dans l’histoire d’une exposition d’art africain, dans les six pays africains concernés. La politique de lutte contre le trafic illicite des biens culturels ne peut porter ses fruits qu’à long terme. Ce n’est que par une action patiente auprès des «.acteurs.» – musées, police, douanes, marché de l’art – que des résultats pourront être obtenus. Elle suppose un changement des mentalités qui ne pourra s’opérer que par une sensibilisation de l’opinion publique. La mobilisation réalisée autour de la vente de l’ivoire ou de la conservation de certaines espèces en danger devrait pouvoir être obtenue également pour les biens culturels qui conservent la mémoire et l’identité des nations. C’est en tout cas la profonde conviction de notre Organisation qui s’est résolument engagée dans ce combat dont l’enjeu sera au XXIe siècle la survie du patrimoine. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 160 Summary The action of ICOM in the combat against illicit traffic of cultural possessions Elisabeth Des Portes The International Council of Museums, created in 1946, gathers 14,000 professionals working in museums and patrimonial institutions on the five continents; its objective is the defence of the cultural and natural heritage of humanity, presented as a real issue of the XXIth century. It is a non governmental organisation based in Paris near Unesco. The illicit trafficking of cultural possessions is booming and affects every country on the planet. Still, the most targeted countries are the most fragile, namely the developing countries. Their museums, churches and archaeological sites are the object of systematic pillage. Latin America and Asia show unfortunate examples. This situation which is dramatic for many countries, is exacerbated as far as the African continent is concerned, where it is described as “cultural genocide”. Motivated by scientific and ethical considerations, the range of reprisals proposed by ICOM is very wide. On one hand, to act on legislation trying to make them evoluate and to have them implemented, even in the European countries of the Art Market. On the other hand, to provide an appropriate training to the museums personnel, tending to aim at a professionalisation of those who are in charge of keeping and protecting the patrimony. ICOM is helping more and more museums in the realisation of inventories which are indispensable to the security of collections, and is working towards the elaboration of international professional norms. In parallel to this indispensable theoretic work, ICOM gives concrete answers to the needs expressed by several countries concerning documentation, inventory and the setting of security measures, whether technological or nor. It also follows a policy of raising awareness and mobilisation of local populations, as they are the sole guardians of the archaeological sites and of the natural heritage. ICOM assists and supports the generalisation of the partnership between the museum staff and the Police and Customs, enabling a true collaboration on the terrain. ICOM’s active policy of publication, which is complementary to those of INTERPOL and Unesco, and which addresses the art professionals, the Police and Customs, answers the same concern for awareness and information. As a whole, this active long-term policy has already begun to be fruitful. Efforts still need to be made towards transparency, awareness of public opinion, evolution of mentalities, and leading of partnership policies, in order to limit this trafficking phenomenon. Survival of the world patrimony depends on it. L’action de l’ICOM dans la lutte contre le trafic illicite des biens culturels 161 Resumen Accion del ICOM en la lucha contra el trafico ilicito de bienes culturales Elisabeth Des Portes Reagrupando catorce mil profesionales que trabajan en los museos y en las instituciones patrimoniales de los cinco continentes, el ICOM (Consejo Internacional de Museos), creado en 1946, tiene como objetivo la defensa del patrimonio cultural y natural de la humanidad, presentada como una verdadera clave del siglo XXI. Se trata de una organización no gubernamental con sede en la Unesco (París). El tráfico ilícito de bienes culturales se encuentra en plena expansión y afecta al conjunto de los países del planeta. Son sin embargo los países más frágiles, en vías de desarrollo, los más afectados por este fenómeno. Sus museos, sus iglesias y sus sitios arqueológicos son objeto de saqueos sistemáticos. América Latina y Asia han suministrado tristes ejemplos. Dramática para numerosos países, esta situación es aún más grave en el continente africano, donde se habla incluso de «.genocidio cultural.». Motivado por consideraciones científicas y éticas, el abanico de respuestas puestas en práctica por el ICOM es muy amplio. Por un lado, actuar sobre las legislaciones tratando de hacerlas evolucionar y aplicar, incluso en los grandes países europeos del mercado del arte. Por otro lado, asegurar una formación apropiada al conjunto del personal de los museos, tendiendo hacia la profesionalización de los encargados de vigilar y proteger el patrimonio. El ICOM ayuda además a los museos en la realización de sus inventarios, indispensables para la seguridad de las colecciones, y trabaja en la elaboración de normas profesionales internacionales. Paralelamente a este indispensable trabajo teórico, el ICOM responde concretamente a las necesidades expresadas por numerosos países en materia de documentación, inventario e implementación de reales medidas de seguridad, tecnológicas o no. Una política de sensibilización y de movilización de las poblaciones locales, únicos guardianes de los sitios arqueológicos y de patrimonio natural, también es llevada a cabo. El ICOM apoya la generalización de la cooperación entre profesionales de los museos, policía y aduanas, permitiendo así un verdadero trabajo sobre el terreno. La activa política de publicación del ICOM, complementaria de la de INTERPOL y la Unesco, dirigida a los profesionales del arte, de los servicios de policía y de la aduana, responde a esta misma necesidad de sensibilización y de información. El conjunto de esta política activa comprometida con el largo plazo ha rendido ya sus frutos. Todavía quedan esfuerzos por realizar en favor de la transparencia, de la sensibilización de la opinión pública, de la evolución de las mentalidades y de la conducción de políticas de cooperación, con el fin de limitar el fenómeno de tráfico. De esto depende la supervivencia del patrimonio mundial. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 162 Organized crime in the former USSR Serguei Avdienko, Russian liaison officer at OIPC-InterpolOrganized crime in the former USSR Historical background of organized crime in the ex-ussr To start with, for no special reason at first glance, let me tell you a very old joke (from communist times): Two Soviets are talking: –One of them says– “I think we live in the richest country in the world and you know why? Because over 70 years they pull apart the country but there is still a lot to steal”. Let’s try together to find out who and how and in which proportions took part in the past and is taking part nowadays in this “pulling apart” of this biggest in the world and seems to be really rich country. Further on, also with no special reason, let me remind you of a definition of the organized crime well accepted in the international criminological literature, but to remind it with two small remarks: first, this definition is used in the scientific literature, and second, this definition suits everybody. “An organization or a group of persons involved in lasting outlaw activity and having maximum profit as the primary goal of such activity, regardless of its kind, is an organized criminal group and its activity, is a manifestation of organized crime”. To tell more, the disgraceful task of defining the phenomenon of organized crime has fed for many years numerous tribes of scientists-criminologists, but as it seems has not yet been fulfilled and still will be a source for numerous scientific debates between theoretical criminologists in the years to come. But when it comes to the side of practical law enforcement, and police at first hand, they simply do not have time for long researches in defining this phenomenon because they are confronted by its manifestations in their daily practice and sometimes even find themselves lagging behind the speed and variety of its new developments. Needless to say also that legislative adjustment to its new forms always goes behind the practical law enforcement, which is the case in almost all ex-USSR countries. In quite a few of them there is existing law on organized crime, though in most of them drafts have been done already from 3 to 5 years ago. One of the latest drafts submitted to the Russian Parliament dates of 25th July 1995, has even passed the first hearing in both its chambers, but has not yet become a law. It may have to do something with the above mentioned scientific debates? This is why law enforcement practitioners in that part of the world (in the absence of relevant legislation) have to use a set of principal features defining between common and organized crime and then apply the norms of existing common criminal code and relevant Acts of executive power in the country. The one accepted in Russia, and in the most of other ex-USSR countries, includes the following main features: existing stable group of criminals with: –hierarchical structure with different levels of commandership; –specific membership rules based on secrecy; –management of group’s activities based on fixed rules and customs; –possession of considerable financial means for criminal activity; –sharing of spheres of influence and activity based on territory or a kind of criminal activity; –use of intelligence and counterintelligence methods while conspiring (preparing) and committing crime; –use of violence and/or corruption to reach the goals of crime. Let me now throw another ball, which again at first sight has not much in common with the main topic I am going to cover. I refer to the semantics of the word “Mafia”. The spelling and pronunciation of this word is almost the same both in Russian and English languages. This fact may lead a “westerner” to a meaning of this word common in the Western hemisphere. A positive reply to the question “whether a Soviet or Red or Russian Mafia exists” given by an average ex-Soviet person may confuse a “westerner” even more. But further examination will show that the meaning of the Russian word Mafia considerably differs from the one in English language and in the West in general. If, for a person from the West, Mafia always means criminal entity, where its members have blood or family relations and the entity itself roots from Italy, for any ex-Soviet the meaning of the word Mafia could include: –organized criminal groups; –and clans controlling politics and economy in a particular region or even in the whole Republic; –and corrupted governmental employees (clerks in Ministries, Committees, local administration, control bodies, law enforcement); –and finally, according to the common public opinion in the past, “communist party”, which was always a “leading power”. The word Mafia in the Russian language has become so much commonly used by the citizens of the ex-USSR, that one could hear it applied to anyone and anything: to the state retail trade system with its always half-empty shelves in the shops and queues, to the state health care system with its common lack of place in hospital, to the diplomats profiting from their work abroad, to the prostitutes and butchers and chess players, to the cities and regions and Republics in general, etc. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 164 Such a meaning of the word Mafia did not necessarily have to include in its meaning participation in criminal activities of persons or entities described by the word, and definitely differed entirely from the meaning of this word in the West. All I have said above you know quite well by yourselves. But there is a common and misleading confusion in the above-mentioned term “Russian or Red Mafia”. It might be effective, and to some extent convenient for the mass media representatives, to identify all crooks originating from the ex-USSR territory as Russians. Mostly due to that effect, the “Russian Mafia” has become the popular bugbear, used to inflame public opinion in the Western countries, when sensation seeking journalists could freely interview anybody in the country, which was almost completely sealed for them for over 70 years. But for the law enforcement professionals, such an approach could be crucial. Let me mention that borders are drawn not only to divide territories, but also to create nations. As you well know, after the dissolution of the USSR in December 1991, 15 independent and sovereign states were created within its former territory. This is why citizens of those states cannot be regarded as Russians any more, even if their original nationality is Russian and not of the root nationality of their respective country. This misunderstanding causes problems for fellow policemen dealing with investigation of criminals from such no more common states as Ukraine, Belarus, Estonia, Latvia, Lithuania, Moldova, Azerbaïjan, Georgia, Armenia, Uzbekistan, Turkmenia, Tadjikistan, Kirgizstan, Kazakhstan. People from those countries do speak Russian but they are not anymore citizens of one country. Beyond it, Russian language is spoken or understood from Vladivostok in the East to the Brandenburg Door in the West and from the Arctic Ocean in the North to the borders of Afghanistan in the South, but no one, even the least ignorant journalist, would consider peoples inhabiting these territories as Russians. And now let me get back to the main topic of this presentation. The existence of organized crime in the former USSR has not received much attention until a short time before its dismantling and was officially accepted only in 1989 which was manifested in the setting up of the specialized 6th Main Department within the ministry of Internal affairs. The measures implemented by the communist regime in over 70 years rule before prevented organized crime from arising and spreading. However, was the former Soviet Union an idyllic spot? At about the beginning of the seventies, organized crime tended to be fairly covert in nature, finding expression above all in organized forms of professional criminal actions, the activities of the so called “professional thieves” or “vory v zakone” as they were known long before October 1917 revolution and survived during Stalin’s Gulag system. This underlay of society with its own ideology, its own structure and its own rules, which did not correlate with laws and regulations established by the state managed to reform and consolidate at that time due to already existing signs of weakness of the state power. Approximately at the same time, the Soviet planned economy started already to considerably spin in the sphere of redistribution of its output. This process was often accelerated by extremely incompetent management at all levels by the creatures of Brezhnev’s era of “common deep satisfaction” (a Soviet mass media stamp of that time). This fact gave a rapid rise to the development of Organized crime in the former USSR 165 covert “private businesses” better known as “shadow economy”, which managed, by using diverted state money, raw materials and machinery, to acquire tremendously high “shadow” profits by filling some gaps in the state consumer market, replacing it by self-created “shadow” or “black” market. Those two above-mentioned phenomena, professional or organized crime on one side and “shadow economy” on the other, did not exist for any long time separately, because they both were antagonists to the state and society and activity of both served to the strengthening of an underlay, which was only parallel to the official society until it could not manifest openly against. Convergence of traditional and economic crime have facilitated further development and integration of criminal groups, expansion of their influence and multiple growth of their profits. In the very end of the eighties, this new amalgam of organized crime received incomparable possibility to legalise its huge criminal profits in the structure of official economy through allowed by the state (during Gorbatchev’s rule) new forms of economic activities: co-operative sector, private enterprises, foreign trade, privatisation of state sector. Unexpected and uncontrolled introduction of these new forms of economic activity by Gorbatchev’s team just at the edge of disintegration of the USSR became a strong catalyse for further strengthening organized crime in its former territories. Post-Soviet Organized crime in the ex-USSR As I have just said, official recognition of the phenomenon became possible only several years before the disintegration of the USSR. However, with its demise, the ongoing transition to a market economy and the opening of borders to the West, organized crime in the East, and Russia especially, has acquired increased prominence and influence and a new malevolent face. Several characteristics of post-Soviet organized crime can be noted here. First, criminal organisations now engage in a much wider range of illegal activities. These include drugs and weapons dealing, extortion, kidnapping, bank fraud, counterfeiting, contraband exports, contract murders, trafficking in strategic and dangerous materials and components, etc. It should be added that, according to the experts of the RF MVD, each sixth crime may be considered as aggravated crime, and the average annual rate of growth of this type of crimes is around 30% since 1991. Second, Russian criminal associations are technically proficient and have available an array of trained manpower. In the current unsettled environment, such groups can now acquire sophisticated weaponry, as well as state-of-the-art computers, automobiles and communication equipment. Furthermore, reduced employment opportunities in Russia’s military-industrial complex allow criminal gangs to recruit and exploit extraordinary combinations of talent, including university-trained specialists, former KGB and police operatives, ex-military specialists, behavioural scientists and other professionals. Third, criminal organisations are converting their illicit fortunes by buying up a substantial proportion of the fledgling private economic sector, especially in the real estate, commercial banking and retail trade spheres. Unfortunately, Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 166 the process of privatisation seems to benefit the criminal world disproportionately as well as some former Communist Party and Soviet power management level functionaries, who control ample amounts of start-up capital in contrast to the majority of ordinary citizens. Fourth, organized criminality is trying (and apparently not without success) to convert its economic wealth to political influence at local and even national levels. Intelligence suggests that up to 50% of the profits of organized crime groups are spent for corruption purposes. In some small cities, such groups constitute a mighty alternative to the state power. They capture the control of key positions in the economic life of such cities. De facto, representatives of organized crime prowled the halls of the Russian Parliament disbanded in October 93. Also, recent corruption scandals suggested that the tentacles of organized crime have reached the topmost echelons of the government bureaucracy. Fifth, organized crime is moving westward. This westward march or drift is reflected not only in smuggling of armaments, strategic metals or materials, or in attempts (most of the time exaggerated by Western mass media) to take over the underworlds in the major European countries, but also by Russian criminal organisations under the cover of legitimate businesses, establishing affiliates and franchises in Western Europe. According to the intelligence information of the RF MVD, there are around 4000 organized criminal communities operating in the territory of the Russian Federation with different degrees of organisation and the number of associates varying from several dozens to several hundreds. There are three basic types of organized criminal groups: –some of them are drawn together by local loyalties, defining themselves by their native districts or neighbourhoods (e. g. Liuberetskaya grupa, Dolgoprudnenskaya grupa, Kazanskaya grupa, etc.); –others are small and dominated by strong leaders or families. These groups tend to be short-lived in this form, either they lack the infrastructure and resources to survive, or they grow to the point of establishing themselves as neighbourhood-based groups (e. g. “Globus” – Valeryi Dlugatch group, “PetrikGeneral” group, “Rospis’” group, etc.); –a third type identifies itself by ethnic origin (Azerbaijanies or “Azeris”, Armenians, Georgians, Chechens, Kalmyks, Tatars, etc.). Most of the organized crime groups have their own areas of “expertise” and spheres of activities. The range of “services” varies from traditional criminal trades (racketeering, swindling, robbery, armed assaults, drug dealing, prostitution handling, gambling) to the newly emerged forms of criminality, such as different types of criminal terrorism, illegal export of unlawfully obtained raw and strategic materials, smuggling and illegal hard currency transactions, banking and commercial fraud. Damages to the Russian economy, calculated in terms of capital flight, extortion payments, illegal outflows of valuable and frequently irreplaceable assets and increasingly circumscribed opportunities for legitimate private business (including foreign investments) is, of course, enormous. Hence, organized crime in the Russian Federation is hardly monolithic. It is organized in the sense that it is built around a variety of clans, gangs and Organized crime in the former USSR 167 ethnic groups, each of which has its own territory and its own interests and relations between which are largely played out according to a rough set of rules. As for the evidence of the presence of alien international criminal organisations in the Russian Federation, intelligence suggests that a number of contacts have been made by the representatives of the Russian organized crime underworld with the Eastern European “counterparts” as well as with bosses of criminal communities from the Western countries. An illustrative feature is the large amount of hard currency casinos in Moscow and other major cities in Russia, mostly run by Italians. Also numerous joint ventures and representations of Western enterprises and banks, which often come to the attention of the Organized Crime Control Main Department operatives in the course of investigations. There is also a number of cases in the field of illicit drug trafficking, which show the persistent intention of the international drug dealing organisations to use Russia as a transit point for transfer of drugs in various directions (transhipments of heroin and hashish from south-west Asia to Europe and even to Australia). In some cases, citizens of Russia have been used as contacts for facilitating smooth running f shipments. Analysis of the criminal situation in general and of organized crime in particular performed by the RF MVD suggests that the factors allowing dangerous expansion of criminality and its qualitative evolution in this country will remain in the future. One of the main reasons of poor effectiveness in addressing the phenomenon of organized crime is that the measures implemented by the State to arrange systematic approaches constantly lag behind the real situation. And the efforts of the law enforcement alone to handle the enormous phenomenon of organized crime are doomed to failure so long as they are not supported by legislative instruments, no matter how innovative the efforts could be. RF MVD initiated a number of legal drafts and plays an active part in the working groups charged with elaborating the new laws. But at the same time, it is well known in ant country how thorny in the path of converting a draft into actual law. For a long period of time the following drafts were shelved in the former Russian Parliament: State Service and Anti-Corruption Law, Organized Crime Control Law and Amendments to the Drugs Control to the Penal and Administrative Offences Codes, both including Money Laundering aspects. Presently some of them were finally passed. There are also objective difficulties in the investigation and prosecution of cases involving several territories and hundreds of citizens of the ex-USSR, because borders, sovereignty and political views do not hinder criminality, it only benefits from the forces of disintegration. It was always seen that even in the organized criminal groups dominated by ethnic affiliation, one could find representatives of other ethnic groups and nationalities from the ex-USSR. What are the solutions for handling this situation with organized crime in the former USSR? They are as follows. Law enforcement practices in the first year (1992) after disintegration of USSR posed enormous problems at all levels. The so-called “transparent borders” between newly independent countries presented no difficulties for criminals still to move freely from country to country keeping investigation and prosecution tightly bound by the absence of any interstate legislative base for Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 168 co-operation. At the very initial moment, former republics of the USSR concluded numerous bilateral agreements on various subjects of law enforcement. That way of dealing with the problems led to an accumulation of dozens of documents which made the practical daily work very difficult. On the other hand, later in 1992, the Council of ministers of Internal affairs of the CIS States was created. It works jointly to decide on the policing problems arising in the long run of practical co-operation between countries in the area. Its meetings normally follow the Meetings of the Leaders of States and the Meetings of the Council of Heads of Governments of CIS (i. e. quarterly). Lately, some of the Interior ministers of the three Baltic states started to participate as observers. The Council has a permanent group of experts to examine arising issues and to propose ways of solving them. By the end of 1992, the Council’s experts drafted and submitted to the Council of Leaders of CIS a multilateral document on mutual legal assistance. On 22nd January 1993, the Convention on Legal Assistance and Legal Relations in Civil, Criminal and Family Cases was signed by the leaders of 10 CIS states (Armenia, Belarus, Kazakhstan, Moldova, the Russian Federation, Tadjikistan, Turkmenistan, Uzbekistan, Ukraine). Georgia and Azerbaijan, which joined the Commonwealth of Independent States later, are still not parties to that Convention. Judging from the title, this Convention covers all areas of co-operation in the fields of criminal law enforcement and civil law. Since 1992, the Council of Interior ministers of CIS accepted a number of multilateral agreements as practical implementation of the Convention: –“On co-operation between Interior ministries of CIS in combating criminality”; –“On co-operation between Interior ministries of CIS in the sphere of information exchange”; –“On co-operation between Interior ministries of CIS in the sphere of logistics and specialized police equipment supplies”; –“On co-operation between Interior ministries of CIS in combating economic crime”; –“On rules and procedures regulating presence and investigations carried out by officials of law enforcement bodies on the territory of other CIS member countries”. On 12th march 1993, the Meeting of Council of Heads of CIS Governments adopted the “Programme of joint measures against organized crime and other aggravated forms of criminality”, drafted also by the experts of the CIS Interior ministers Council. The first article of that programme was to create a permanent law enforcement body for co-ordination of activities against organized crime and other most dangerous forms of criminality. The main tasks of such a body were stated: –to form a specialized computerized data bank concerning the afore mentioned kinds of criminality for further analysis and dissemination to the operational services of Interior ministries – CIS members; –to assist in interstate search for wanted members of organized criminal entities and also persons wanted for aggravated crimes; –to provide co-ordination in detective operations involving several states – CIS members. Organized crime in the former USSR 169 On 24th September 1993, a decision to set up a bureau for co-ordination of activities against organized crime and other aggravated forms of criminality within the territory of CIS was taken by the Council of Heads of CIS Governments. On 1st may 1994, the bureau became operational, with its site in Moscow in the premises of the ministry of Internal affairs. It is staffed by representatives of CIS members Interior ministries and technical staff provided by the host country. The bureau’s activity is financed by share-contributions from the participating countries. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 170 Résumé Le crime organisé dans l’ex URSS Serguei Avdienko Bien avant l’effondrement de l’URSS, la terminologie de mafia russe était fort usitée en langage courant. Pour les soviétiques, ce vocable n’était pas limité aux seules activités des groupes criminels organisés. Il visait également l’action des clans contrôlant, via la corruption de fonctionnaires, l’économie ou la politique dans une région ou dans une république de l’Union. Par ailleurs, les médias occidentaux utilisant cette notion de façon générique, en faisant fi de l’appartenance ethnique des criminels. Cependant ce n’est qu’en 1989 que l’existence du crime organisé en URSS fut officiellement acceptée. Depuis la chute de l’URSS (1991), l’activité du crime organisé est apparue dans toute son ampleur. Il est le fait aujourd’hui d’environ 4.000 organisations rayonnant sur l’ensemble de la fédération de Russie et exportant à l’étranger et notamment en Europe de l’Ouest ses activités criminelles. Ses terrains d’action privilégiés sont le secteur économique (immobilier, banque, commerce de détail) et le domaine politique. 50.% de ses produits seraient investis à cette seule fin. La riposte mise en œuvre pour lutter contre les phénomènes mafieux se heurte à la très lente élaboration de textes législatifs en la matière. Le programme d’action arrêté par la CEI en 1990 visait notamment à permettre l’échange d’information et la réalisation d’enquêtes entre États membres. À cette fin, un bureau pour la coordination des activités contre le crime organisé est opérationnel depuis 1994. Pour sa part, OIPC-Interpol gère une banque de données spécifique au crime organisé dans les PECO appelé projet «.go-west.». Organized crime in the former USSR 171 Resumen El crimen organizado en la ex URSS Serguei Avdienko Mucho entes de la caída de la URSS, la terminología de mafia rusa era muy utilizada en lenguaje corriente. Para los soviéticos, este vocablo no era limitado a las solas actividades de los grupos criminales organizados. También, no buscaba más que la acción de clanes que controlaban, por la corrupción de funcionarios, la economía o la política en una región o en una república de la Unión. Por otra parte, los medias occidentales que utilizan esta noción de manera genérica, hacen poco caso de la pertenencia étnica de los criminales. Sin embargo, sólo es en 1989 que la existencia del crimen organizado en la URSS fue aceptada oficialmente. Desde la caída de la URSS (1991), la actividad del crimen organizado se reveló con toda su amplitud. Hoy es cosa de más o menos 4.000 organizaciones que tienen asciendente en toda la federación de Rusia y exportan al extranjero y especialmente a Europa de Oeste sus actividades criminales. Sus terrenos de acción privilegiados son el sector económico (bienes inmuebles, banca, comercio al por menor) y el dominio político. 50.% de sus productos serían invertidos a esta única finalidad. La réplica empleada para luchar contra los fenómenos mafiosos se enfrenta a la muy lenta elaboración de textos legislativos en este dominio. El programa de acción establecido por la CEI en 1990 tendía principalmente a permitir el intercambio de información y la realización de encuestas entre estados miembros. Con este fin, un oficio para la coordinación de las actividades contra el crimen organizado es operativo desde 1994. Por su parte, OIPC-Interpol administra un banco de datos específico al crimen organizado cn los PECO llamado proyecto «.gowest.». Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 172 Boryokudan, Japanese Organised Crime Groups Katsushi Ikeda, Assistant manager of the second division of the japanese police national agency, TokyoBoryokudan, Japanese Organised Crime Groups What is boryokudan? I think Boryokudan is equivalent to what you imagine for Yakusa. The Japanese word “Boryokudan” means Violent Group or Violent Gang. Japanese police define Boryokudan as a group which is likely to encourage its members to perpetrate violent illegal acts collectively or chronically. More plainly I can describe Boryokudan as a violent group which appeared in the socio-economic disorder just after the World War II, which mainly consists of Japanese nationals, based on quasi-blood relationship, and has relatively strong internal control on its members, and which utilises its intimidation and physical force to obtain profit legally or illegally. There can be other organised crime groups which are not Boryokudan in Japan. For example, motor cycle gangs, organised burglars or thieves, Chinese gangs, Russian mafias are of course organised crime groups, but they may not be Boryokudans. However in Japan the word “Boryokudan” has been used as the synonym of an organised crime group and Boryokudans are actually the largest organised crime groups in Japan. By the way Boryokudan members call themselves Yakusa, not Boryokudan members, because they do not regard themselves as violent group members. The word “Boryokudan” is sometimes used to indicate all Boryokudan groups and is sometimes used to call one Boryokudan group. A member of Boryokudan is called Boryokudan-in. Japanese police clarify Boryokudan members more strictly. If we do not have enough evidence that one person belongs to Boryokudan, he is not defined as a Boryokudan member. But he may be related to Boryokudan or he may disguise to be out of Boryokudan. In that case he is regarded as a Boryokudan associated person. We estimate there are as same Boryokudan associated people as Boryokudan members in Japan, which are more than 80000 combined. So there are many cases that a Japanese national is rumoured to be a Boryokudan member in foreign countries since, for example, his hair is strongly permed or he has enormous money without the proper job, but he is not defined as a Boryokudan member. In these cases he may be or may not be related to Boryokudan or he was once a Boryokudan member. It often happens that not until a Boryokudan member is arrested do we find that he has been a Boryokudan member for some years. Boryokudan members are increasing disguising their nature, and it is difficult to see the whole figure of Boryokudans in Japan. Features of boryokudan members You may hear that Boryokudan members lack some of their fingers and have tattoos on their skin. But it does not necessarily apply to all Boryokudan members. Tattoos It is not certain why Boryokudan members have tattoos. More than hundred years ago, construction workers and firemen as well as outlawed people in Japan had tattoos to display the patience and bravery, since it is very painful to be tattooed on the skin, and it takes a long time to finish a large and colourful tattoo. So motives of tattoos were usually lively and animated ones, such as heroes in novels. In the 1870s Japanese government prohibited having tattoos because it was afraid that Japan were regarded as an uncivilised nation by western countries. I think that after the prohibition the person with tattoos might be seen as an outlawed person or a resistant. Boryokudan members have tattoos possibly because they can show their patience, strength and liveliness and possibly because they can gain the air of intimidation as the outlawed. But I have to put emphasis on the fact that not all Boryokudan members have tattoos now. Lack of fingers As for the lack of fingers, it is certainly a peculiarity of Boryokudans, but it does not apply to all Boryokudan members. A Boryokudan member must cut his finger off when he makes a mistake or breaks Boryokudan rules, or when they want to resolve a trouble. Mistakes are, for example, extorting money from prostitutes who are money sources of the group and consuming money of the group. A typical trouble is a rivalry conflict. A responsible Boryokudan member cut off his finger and bring it to the rival group to settle the conflict. He shows his sincerity by cutting his finger off without anaesthesia. So a Boryokudan member may cut his finger off not for his own mistake but for the mistake of his subordinates. There said to be an order of cutting off fingers in each Boryokudan group. For example, the little finger in the left hand must be cut off when a member makes his personal mistake and the little finger in the right hand must Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 174 be cut off when he causes a trouble to his group such as consuming the money of the group. And he must cut off the first joint of the little finger on the first time, and he must cut off the second joint of the same finger on the second time. The order depends on Boryokudan groups and Boryokudan members under the same rule are able to know which kind of mistakes were made by watching fingers of their colleagues. But usually little fingers are cut off. As you may know a little finger works an important role when someone grasps the handle of a sword. A man who lacks his little finger lacks a part of ability of fighting and cutting off a little finger shows the obedience. So a person who lacks a forefinger only is probably not a Boryokudan member. Nowadays Boryokudan members tend not to cut off their fingers, because the lack of fingers shows he is a Boryokudan member and it is a disadvantage for him to do legal business, and he can be rejected to enter foreign countries. Some Boryokudan members have experienced the operation of transplanting the little finger of their foot to the hand. Instead of cutting off their fingers, Boryokudan members may pay certain amount money when they make a mistake. You may also think that Boryokudan members wear gang like cloth and have their hair strongly permed. But it does not apply to all Boryokudan members either. To be honest it is difficult even for a Japanese policeman to distinguish a Boryokudan related person including a Boryokudan member from an ordinary citizen partly because Boryokudan related people disguise their real nature and traditional stereotype of Japanese Yakusa does not apply to present Boryokudan members, partly because the relation to Boryokudan has a wide latitude, from close friends to mere acquaintances. We must monitor not only Boryokudan members but also people who have close relation to Boryokudan. As I describe later, those who are not Boryokudan members or associates but are operating with Boryokudans closely have obtained money by intervening civil affairs and by using Boryokudan influence, and there is not much point in discriminating Boryokudans from other Japanese criminals now. Principles of boryokudan Union by Quasi-Blood Relationship In general, Boryokudans are formed by a quasi-blood relationship which imitated the feudal family system. The boss is called Oyabun, which means a parent, and a man under Oyabun is called Kobun, that means a child. In many cases, the bosses form a quasi-blood relationship with one another, and the bosses of subordinate groups become the men of the boss of the upper groups. They form a large pyramidal organisation. And we regard this whole syndicate as one big Boryokudan. Boryokudan, Japanese Organised Crime Groups 175 Internal Control In the world of Boryokudans, the vertical relationship of boss and subordinates is an absolute one. It is the duty and virtue of the men to follow the order of their boss, whether the order is right or not or whether it is good or bad. If a man disturbs the rule by the boss and the unity of the group by disobeying such duty and violating the rules of the underworld, he will be severely punished within the organisation. The most severe penalties include lynching, finger-cutting, expulsion and severance of relations. expulsion and severance of relations are the banishment of a gang member from the underworld or the group to which he belongs, and are the most severe forms of punishment in the world of gangsters. Those who are arrested or sent to prison because they did not observe the gang’s rules are usually punished by withholding from them such assistance as sending them food and other things while they are in prison, and the celebration are not held when they are released from prison. On the other hand, those who comply with the orders of the boss and other leaders, and contribute to the group will be given promotion and other remuneration. For example, the organisation pays the lawyer’s fee for and living expenses for the family of the member who attacks the office of a rival group or the one who tries to serve another member’s time or the one who denies, in police interview, his group’s involvement in the crime. When such a member is released from prison, the organisation expresses admiration for and gives proper reward to him. Boryokudan forces We estimate that there are about 47000 Boryokudan members and 33000 associates in Japan. The membership of Yamaguchi-gumi, Inagawa-kai and Sumiyoshi-kai combined totalled about 31000 and this number accounts for two thirds of all Boryokudan members in Japan. The headquarters of Yamaguchi-gumi is located in Kobe city and it has more than 100 secondary subordinate groups under its control and it has its influence in almost all prefectures of Japan. It has about 19000 members and is the largest group in Japan. Its origin goes back to 1915 and during the period of 3rd boss from 1955 to 1975, Yamaguchi-gumi had extended its influence to all over Japan and it caused a lot of fight with other local Boryokudans. After third boss died in 1984, Yamaguchi-gumi was divided into two because 4th boss was chosen without consensus of members. And in 1985, the 4th boss was shot dead by a member of a opposing group and it lead to a big conflict between two groups. In 1989, the opposing group disbanded and 5th boss of Yamaguchi-gumi was chosen and they strenghtened then the order in the group and have expanded their power. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 176 Sumiyoshi-kai has about 6700 members and Inagawa-kai has about 5600 members and both syndicates are based in Tokyo. Relation between a parent organisation and subordinate ones During the decade from 1955, some Boryokudans strengthened their influence by absorbing other groups in the process of large scale rivalries and conflicts. From 1965 on, the power of the entire gangs declined as a result of the efforts of the police. But large syndicates continued expansion by diversifying their source of income and establishing the system of collecting money from their affiliated groups and members, and also by absorbing smaller gangs. Today the oligopoly of the underworld by a few Boryokudans advanced further. Bosses and leaders, and parent groups collect money from their subordinates and subordinate groups for the management of the organisation and the life and amusement of themselves. Thanks to this system, the boss and other upper rank leaders do not need to perpetrate offences themselves, running a risk of being arrested, to secure funds. Because of this, it is becoming harder to book, levy taxes on and confiscate illegal profits from these top gangsters. One of the motives of groups for their attempts of expansion is to obtain more tributary money for lower associates and members, and this system increased efficiency in moneymaking and attainment of superiority over their rivals. On the other hand, there are some reasons why smaller groups join larger ones. Since a large group has greater influence, the smaller groups can enjoy stronger power, more stable territories and a higher efficiency in fund-raising and other activities. Organisations in a lower layer of a pyramidal system have to pay money to their parent group and spend more for obligatory events in their world. But most of the smaller groups believe that both saved the cost of preparation for inter-gang rivalries due to increased stability of territories, and that the more efficient moneymaking owing to the increased influence will sufficiently make up for the money which they have to pay to the parent group. The expansion and greater affiliation of Boryokudans are bringing more threat to citizens and a wider influence. This enables Boryokudan members to earn illegal and unjust profits from society more efficiently. However the control of parent group is not strong in legal and illegal business of subordinate groups and members. We estimate that about half of subordinate groups run business on their own without the assistance of parent groups. And upper members are less involved in the individual economic activities of their subordinates, such as drug trafficking, while they intervene in fundamental matters of their group, such as succession of the boss, dissolution of the group, expansion of territories. Boryokudan, Japanese Organised Crime Groups 177 Mutual relations among organisations Friendly relations The bosses and leaders of Boryokudans often conclude a quasi-blood relationship among them, becoming fictitious brothers, in an attempt to protect their mutual territories. Many groups also form friendship associations for settling problems that occur daily among them and for jointly coping with the entry of other large organisations into their territories. Rival relations The greatest objective of Boryokudan is to earn profits in an illegal and unjust way, using their power. To expand or defend their territories, which are the sources of their funds, these groups are often engaged in fierce rivalries. Recently a senior member of Yamaguchi-gumi was shot by some members of the opposing group in a barber shop near his house in Kyoto, and his bodyguard shot 2 attackers dead. And rivalries may often happen for trifling matters. But what Boryokudan members regard important is to save face, and they believe if their honour is stained, they can not leave it alone. Obligatory events Boryokudans often hold a variety of obligatory events. Among them are the ceremony of announcing the succession to the boss’s post, funeral service, ceremony of brotherhood and celebration for members who are released from prison. These obligatory events aim to show off the power of Boryokudans to the public and other groups. The gathering of gangsters on these occasions poses a great threat on citizens. Obligatory events have another important purpose, fund raising. On these occasions the sponsoring organisation collects a large amount of money from their subordinate and friendly groups in the name of gift, money of condolences and so on. These events are anti-social deviations, even if they are ostensibly ceremonies. Nowadays police strongly order Boryokudans not to hold these obligatory events, and they are less and less apparent to public. Fund raising activities of boryokudans The ways Boryokudan gain money are roughly divided into two, traditional activities and newly emerged activities. The latter had appeared as the Japanese economy has evolved. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 178 Traditional fund raising activities Every Boryokudan has control over certain districts to exercise their influence and secure a stable supply of funds. Such districts are known as “territories”. And the size of territories is the most important element affecting the power of the organisation and the authority of its boss. Because of this, Borykudan attempt to expand and protect their territories, often causing rivalry conflicts. Stimulant trafficking Smuggling and illicit sale of methamphetamine in Japan has been controlled by Boryokudans. We estimate that it is still one of the largest funds for their activities. In 1994, about 6300 Boryokudans members and associates were arrested for the trafficking, possession and consuming of methamphetamine, and this figure accounts for more than 40 per cent of those who were arrested for the violation of Stimulant Control Law. Gambling and bookmaking Boryokudans are operating gambling houses even today, and are also involved in the operation of gambling game machines. Gambling is another important revenue source for Boryokudans. Bookmaking at publicly sponsored bicycle races, horse-racing, motorboat races offers Boryokudans a major source of income too. As a result of police efforts to shut out bookmakers and Boryokudans from public race establishments, bookmaking at these establishments is decreasing greatly, but off-track bookmaking is still rampant. Protection money Boryokudans collect money unjustly from the operators of entertainment or amusement businesses under the name of “protection money” or “location fee”, etc. In some cases, they obtain money under the pretext of selling items used by the entertainment and amusement business, such as towels or cosmetics, with unreasonably high prices. While the sum of money collected from one business is not so large, this protection money is a stable fund for them because many people obey their demands in fear of harassment. Newly emerged activities Intervention in civil affairs In recent years, more and more cases are found in which Boryokudan members intervene in the daily life of ordinary citizens and economic transactions and attempt to get illegal or unjust profits by showing the intimidating power of the group, although traditional fund raising activities have been the dominating sources of income of Boryokudans. Boryokudan members try to evade police control on these activities mentioned above involve a particular Boryokudan, Japanese Organised Crime Groups 179 group of citizens only, intervention in civil affairs has the possibility of making any citizens concerned victims. Boryokudan’s intervention in civil affairs is promoted by the fact that some people try to take advantage of Boryokudan’s influence for their own interests, such as collection of loans. Examples of intervention in civil affairs are lending money at high rate, debt collecting, intervention in the dealing of bankrupt corporations, private settlement of traffic accident. JIAGE was one of the lucrative activities of Boryokudans during so called “bubble economy” period. JIAGE is to buy up small plots of land for consolidation and resale, pressuring small landowners into selling their plots. In Japanese law people living in a rented building have the right of leasing the land, and it is not possible to demolish the building and sell it to a third party without the consent f the leaseholder. This is the principle and there are more complicated cases in fact. For example a leaseholder of the land let a building on it to another person and this person opens his shop there. It is extremely difficult to buy small plots of land with entangled rights for consolidation. However Boryokudans persuade or force people who have the leasehold, tenant, and do business in a building to move from the building, and make the land a vacant plot, which is valued at high price. Boryokudans are attempting to sell the plot of land at high rate and to have the commission of trade and consolidation. The commission was said to be about 3 per cent of the selling price. With the recent economic recession in Japan, Boryokudans have become active in intervening bankrupt companies and companies on the verge of bankruptcy. They often attempt to make money by taking over these companies or their assets, collecting credits by unjust means, or disturbing the legal procedures concerning auctions of mortgaged assets. Company racketeering Because the profits generated by businesses are huge, crimes aimed at companies are much more lucrative than those directed against individuals. Recently, the tricks of company racketeers are growing more and more vicious and skilful, and those racketeers who pretend to lead political or social movements are appearing in great numbers. “Sokaiya”, etc. Sokaiyas are those who attempt to earn profits in an unlawful and unjust way, pretending to execute stockholders’rights or taking advantage of corporate scandals. Generally managers of companies wish to keep annual stockholders meeting quiet and safe without being bothered by naughty questions. There is a chance for Sokaiyas to obtain money from companies by giving up making questions on problems and scandals of the companies and making the meeting dragged on for several hours. And Sokaiyas work as trouble-shooters to reject a false charge on a corporation with their intimidation. Traditionally these Sokaiyas have been distinguished from Boryokudan members. But in recent years, as the control of Sokaiyas is strengthened, and Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 180 as Boryokudans are diversifying their sources of income, the relations between the two are growing closer. After the Commercial Law was amended in October 1981 and the clauses for prohibiting companies from providing interests for Sokaiyas were newly established, the power of Sokaiyas declined greatly. But there are still quite a few companies which can not sever the relationship with Sokaiyas. This year a Sokaiya was arrested for receiving about 800000 US dollars from November 1994 to April 1995 from some of the directors of one of the largest department stores in Japan. Of course these directors were arrested by police. Ruffians claiming to lead social movements Ruffians claiming to be engaged in social and political movements, such as anti-communism, restoration of northern territories occupied by Russia or anti social discrimination, demand money from businesses in the name of subscription fees for newsletters or contributions to their activities. In some cases, they use cars with speakers to demonstrate on streets, and they are strengthening their ties with Boryokudans, just as Sokaiyas are. Because company managers abhor scandals or disturbance and they fear being attacked by Boryokudans, some of companies tend to pay money to these ruffians. Legal sources of revenues The ratio of legal sources of revenue to Boryokudans total income is rising, suggesting that Boryokudan members and associates are penetrating into society. Their legitimate income sources are diverse too. They include financing, construction and real estate businesses. But even when these businesses take the form of legal corporations, their activities mostly have the power of Boryokudans behind them. Current problems of boryokudans Oligopoly of Boryokudan world The number of Boryokudan members and associates in Japan is currently over 80000, less than half of the figure in around 1963 when it reached the peak. Among them Yamaguchi-gumi has more than 30000 members and associates, accounting for about 40 per cent of the total. The membership and affiliationship of Yamaguchi-gumi, the second largest group Sumiyoshi-kai and Inagawa-kai combined make up the two thirds of all the Boryokudan members and associates in Japan. Therefore, what is the most important in examining today’s Boryokudan problem is to make analyses on these three syndicates, especially Yamaguchi-gumi, and on their current circumstances and movements including their relations with other organisations. Boryokudan, Japanese Organised Crime Groups 181 At present Yamaguchi-gumi is smoothly managed and operated by some top members. However some powerful leaders are attempting to expand the sphere of influence of their own organisations in order to gain a foothold for the future. This has caused troubles with other groups, although the rivalry conflicts have been decreasing in recent years. Yamaguchi-gumi based on western part of Japan is attempting to make inroads into Tokyo. But they are advancing under the guise of corporate businesses, not making themselves apparent to other Boryokudan syndicates based on Tokyo, to avoid a total confrontation with them. It seems that Yamaguchi-gumi is taking the policy of coexistence with Boryokudan syndicates in Tokyo, and small disputes will be solved by negotiation between senior rank members of both organisations before they develop into serious conflicts. However Boryokudans take to violence by nature and they must hide their vulnerability for the survival. Intervention in civil affairs (Bad debt problems) Boryokudan members and associates have intervened in the daily life of ordinary citizens and economic transactions and attempt to get illegal or unjust profits. They try to evade police control on these activities by pretending to follow legal civil transactions. Because of that, the anti-Boryokudan law was put in force in 1992. When Boryokudan groups and their members are defined as “the designated Boryokudan group and member”, they can be ordered by police not to operate some activities which are not illegal. I will take an example. Boryokudan members are engaged in collecting loans and they are not charged with blackmailing in Penal Code. However this act is considered unjust because the debtor knows he is a Boryokudan member and he shows the intimidation. In a such case police can issue en administrative order to designate Boryokudan members not to make an unjust demand. If they do not obey the order, they will be arrested. But Boryokudans do business with corporations under the guise of other names, such as their family name, companies or political organisations. More and more cases have been found that Boryokudans are connected with Sokaiyas and ruffians. And they worked as subcontractors for construction companies and get the whole work in their hands as “protectors”. The problem that Boryokudans are involved in collecting bad loans and transactions of bankrupt companies is currently focused. In the late 1980s Japanese economy experienced so called “Bubble Economy period”. The bank of Japan took the easy-money policy, reducing the official bank rate from 5 per cent to 2,5 per cent, which is the lowest ever from 1986 to 1987. With this policy stock price had increased and the boom of investment on stocks began with other policies such as tax imposition on the interest from savings in a small amount and the start of stock dealings in futures as well. Corporations and ordinary citizens were absorbed in money games. Land prices all over Japan grew rapidly, effected by this boom, and enormous money of banks was poured into land market. As the land prices rise, Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 182 the value of securities increase. Corporations could borrow more money with valued collateral and then purchased more lands. This circle formed so called “Bubble Economy” in Japan in late 80s. This bubble economy lasted for 5 years and finally burst in early 1990s. The bank of Japan raised the official bank rate five times from 1989 to 1990 and land prices reached the peak or tended to go down. Because of that corporations which had invested too much money on lands could not manage with the shortage of funds. At the same time careless finance by banks on lands and scandals of securities companies were unveiled, which kept individual investors off the stock market. With the burst of the Bubble Economy, there appeared financial corporations which went bankrupt with huge bad debt. The bad debt problem has effected Japanese economy deeply and this was an opportunity to provide money for underground world. Careless financing in bubble economy period gave Boryokudan a chance of operating and huge money, and some financial corporations have been deprived of money after the burst of bubble, because they made use of Boryokudans and still have certain relations. I may show some ways money flowed to Boryokudans. The first is the financing. In bubble economy period financial corporations lent money to companies which had connections with Boryokudans under the pretext of finance for the purchase of lands or investment on stock market. After the burst of bubble, a certain portion of the finance has become bad debt. The second is the reward of JIAGE, buying up small plots of land for consolidation and resale, for Boryokudans. Financial corporations lent money to real estate companies and they gave money to Boryokudans as payment for the purchase of land and reward of the dealings. Boryokudans paid money to landowners, sometimes using the intimidation and physical force to stubborn landowners. The rest of the money was their income. The third is the taking over of real estate companies. After the burst of bubble, a lot of real estate companies have been on the verge of bankruptcy and are not able to pay even the interest of their debt. Then a Boryokudan member approaches the manager of a company of which almost all assets are about to be taken over by creditors, and he tells the manager with all the techniques that he will preserve the assets and help the manager to get the company back on its feet. The manager leaves important documents with a Boryokudan member, trusting that he will make it better. With these documents a Boryokudan member forges a credit on the company and he claims that he set his credit off the asset and stock of a company. He will be a manager of a company or he will sell this company to another person at higher rate. The fourth is the occupation of property, especially real estate, and forgery of the leasehold of the real estate which is being at auction. When corporations go bankrupt and their real estates are about to be auctioned, Boryokudans promptly occupy the real estate or set the board showing Boryokudan’s name, or forge the leasehold on the real estate register. Even when they occupy the land legally, they bought the leasehold right with small money. It is unlikely that the real estate which seems to have relations with Boryokudans Boryokudan, Japanese Organised Crime Groups 183 will be sold even at a bargain rate at auction, because potential buyers will have difficulties to move Boryokudans and do not want to be in trouble. The purpose of occupants is to obtain the money from creditors in exchange of leaving there, and to buy the real estate at low price and sell it at higher rate. Gun crimes and the spread of guns to general public Japanese police seized more than 1000 hand guns every year from Boryokudan members and associates. The number of seized handguns is on the rise. Last year there occurred some shocking murders by handguns in Japan. From these instances we see that guns have reached the hands of general public, getting out of Boryokudan related people. Also the manner in which handguns are used has become bold and brutal. Under these circumstances Japanese people have come to feel anxious over their safety. And the public debate is being focused on guns as a critical issue for maintaining the law and order of Japanese society. Various reasons have been cited to explain the situation. One is the internationalisation which led to the influx of guns into Japan from the countries where gun regulation is not strict. The second reason is that Boryokudan members sell excess handguns as the internal prohibition rule of their organisations of selling guns have loosened. The third one is that Japanese people are getting less abhorrent of handguns than we used to, because there have increased amusements that make Japanese people curious about handguns, such as shooting tours in foreign countries. It is understandable that these factors are affecting the gun situation to some extent. But I have to emphasise that Boryokudan members are always involved in illicit traffic of handguns, directly or indirectly. In order to take effective counter-measures upon handguns, we must carry out an intensive crackdown against Boryokudans. When handguns are smuggled from overseas, even if people involved are not Boryokudan members, they never fail to have contact with Boryokudan members, especially at the stage of illicit trafficking. A Boryokudan member does not need ten pieces of handguns, but Boryokudan members should keep handguns of high capacity for emergencies such as rivalry conflicts. That is to say that handguns with easy handling and efficiency are still in need for Boryokudan. The poorly qualified handguns might be sold off to ordinary citizens. But the sellers are Boryokudan related people anyway. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 184 Overseas activities of boryokudans It is since more than twenty years ago that Boryokudan members have been trying to make money their way abroad, in order to conduct drug trafficking and firearms and women smuggling, and to look for hideouts. But during the “Bubble Economy” in 1980s, they became active also as investors to overseas real estates. Also during the 1980s the shortage of workers caused by economic upturn led to the massive inflow of illegal immigrants from Asian countries. Boryokudan members or associates have begun to act as “brokers” in these illegal immigration attempts. For example, since 1993, Japanese police uncovered the involvement of Boryokudan members in connection with Chinese Snake Head in some cases. The overseas activities of Japanese Boryokudan may be clarified into 3 categories. First, members or associates of Japanese Boryokudan buy guns, methamphetamine and pornography in foreign countries and smuggle them to Japan. And they arrange alien smuggling too. Second, members or associates of Japanese Boryokudan establish legal companies to operate clubs, bars and souvenir shops for Japanese tourists but by using these companies they operate illegal businesses such as prostitute, gambling, selling pornography. It is said that these kind of businesses can be seen in Seoul, Manila, Hong Kong, Taipei and Hawaii. But because they often use the name of a local person as the owner of these shops and because a local person work as the chief of these shops, it is very difficult to see to what extent Boryokudans penetrate in these areas. Third, members or associates of Japanese Boryokudan do not have the base in foreign cities, but with local organised crime groups or racketeers, they arrange such events as gamble tour for Korea, Las Vegas, tour for gun shooting, hunting and golf competition in Hawaii, Guam or Korea. Although we have very little information on overseas activities of Boryokudans, I will tell you some points which are seen in Boryokudans’overseas activities. We suppose that Boryokudan members and associates are active mainly in the region near Japan where certain number of Japanese have already settled in. These are the regions where Japanese companies started business earlier and they have the influence, particularly big cities where a lot of Japanese live, and places where Japanese tourists visit for sightseeing, such as Philippines, Thailand, Korea, Hong Kong, Hawaii, Guam or West Coast of US. We have very little information that Boryokudan are active in European countries or South America. Boryokudan members and associates are generally less educated and have little knowledge on foreign law and economic systems, and very few of them can speak foreign language. They can not do anything in foreign countries Boryokudan, Japanese Organised Crime Groups 185 without the help of Japanese nationals who know much about how things are going, what is profitable or who have already settled in foreign countries. In addition to that their intimidation has less effect on non-Japanese, because foreign people have not heard of Yamaguchi-gumi and they do not fear that they and their family may be harassed by Boryokudans in Japan. We are afraid that the involvement of Boryokudan members and associates in foreign affairs will be increasing as more ordinary citizens go abroad. Boryokudan members and associates act mainly as individuals, and there are not many organisational activities. Even in Japan Boryokudan members operate mainly individually or in a group of some people. A Boryokudan member use the name of his group as the intimidation and powerful brand. It is not usual that the boss orders the whole group to act in the same operation, each member having each role. Some members are rich with their businesses and some members are poor. Bosses do not usually intervene in the individual economic activities of their subordinates. Some Boryokudan associates are active in foreign countries, not because he is ordered by a boss to settle in foreign countries nor they are operating organisational activities, but because they have skills such as knowledge on foreign systems or foreign language or because they escaped from some troubles in Japan. The point attention is to be paid is that in many cases Japanese national who are suspected to operate illegal activities, such as investing money which is obtained from fraudulent ways on real estates or settling a suspicious corporation in foreign countries, are not Boryokudan members and associates. They may be involved in organised crime, but they may not be closely connected with Japanese Boryokudans. What I would like to say is that Japanese police define Boryokudan member or Yakuza strictly, and there are a lot of cases that Japanese nationals who are suspected to be Yakuza by Japanese people and foreign law enforcement agencies are not a Boryokudan member or a Boryokudan associate, but that they may be committing a white-collar crime, money laundering or sending women as prostitutes. Japanese police regard it necessary to keep watch over the people who are not Boryokudan members or associates but who have a certain connection with Boryokudans. And I think that we need not overestimate or underestimate the threat of Boryokudan in foreign countries, because Japanese criminals in overseas countries are usually not Boryokudan members or associates. We need a new approach against Japanese criminals concerning foreign countries, not narrowing our interest into Boryokudans. Measures against boryokudans Japan has the National Police Agency in Tokyo and 47 local polices in each prefectures. Organised Crime Control Department of the National Police Agency and Organised Crime Control Sections of prefecture polices are taking Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 186 measures against Boryokudans. However National Police Agency does not have competence to conduct investigation, and prefecture polices are in charge of investigation, such as interviewing and arresting people. The function of the National Police Agency may be similar to some of that of the US Department of Justice or of the Home Office in the UK. Three pillars Japanese police work out three pillars of measures against Boryokudans. They are thoroughgoing control over crime committed by Boryokudans, effective operation of the Anti-Boryokudan Law and promotion of Boryokudan elimination movements. With the legislation of the Anti-Boryokudan Law and the subsequent surge of the public opinion to demand the elimination of Boryokudans, it is important to arouse the public opinion against Boryokudans, with the co-operation of businesses. A lot of corporations are members of committee aiming to eliminate Boryokudans from society and citizens promote the movement to evict Boryokudan offices from residential areas. Arrests and dissolution In 1995, the police arrested about 12000 Boryokudan members, and a total of members and associates who were arrested numbered about 33000. As for the violations, about 7000 Boryokudan members and associates were arrested for methamphetamine related crime and about 4600 people were arrested for bodily injury, followed by blackmailing (about 2800) and gambling (about 2700). In 1995, 234 Boryokudan organisations dissolved or disintegrated and they had contained about 1400 members. Around 200 organisations have been forced to dissolve every year recently. Legal measures Japanese police have Generally Japanese police fall behind other industrialised countries in combating organised crimes and Japanese police have limited measures on law enforcement. Japanese police investigators are aiming to arrest Boryokudan members and associates, and they are not interested to grasp the money flow. Then a lot of Boryokudan members are arrested every year for blackmailing or bodily injury, but we could not take their money. On the other hand there are victims of these kind of rough crimes and we could not leave them alone. One of the reasons that Japanese police are not interested in money is that we do not have laws which allow us to confiscate illicit proceeds and have comprehensive predicate offences for money laundering. In Japan money Boryokudan, Japanese Organised Crime Groups 187 laundering is the crime only when money comes from drug related crime. Then if we grasp the money flow, we have few measure to take the money of organised crime. As for law enforcement measures Japanese police have less to collect evidence and to investigate Boryokudan crimes, compared with foreign counterparts. We can not operate undercover investigations, and we do not have law which permits electric surveillance or wire tapping. We need to consider taking effective measures against organised crimes, consulting foreign ones. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 188 Résumé Les activités des boryokudan japonais Katsushi Ikeda Le terme de «.boryokudan.» signifie groupe ou gang violent. Il se définit comme un gang de japonais qui opère un contrôle étroit de ses membres et qui emploie la force et l’intimidation pour obtenir des profits légaux ou illégaux. Les membres des boryokudans s’appellent entre eux les Yakusa. Les caractéristiques traditionnelles d’appartenance aux boryokudans (tatouage, ablation de phalanges, coiffure permanentée) tendent à disparaître aux fins de discrétion à l’égard des services de police. Les boryokudans représentent aujourd’hui 47.000 membres et 33.000 membres associés. Le gang le plus important est le Yamaguchi-Gumi (situé à Kobe, il compte 19.000 membres et contrôle une centaine de groupes secondaires). Sumiyoshi-kai (Tokyo) : 6.700 membres. Inagawa-Kai (Tokyo) : 5.600 membres. Il y a aujourd’hui moitié moins de membres qu’en 1963. Les principes de fonctionnement des boryokudans sont ceux d’une organisation très contrôlée à l’intérieur et ayant une politique relationnelle importante à l’égard de l’extérieur. Les boryokudans sont une organisation pyramidale mimant les liens de parenté de sorte que le devoir d’obéissance au chef est absolu et que la désobéissance est gravement punie. Il y a une tendance à la concentration des groupes Boryokudans, ce qui leur permet d’augmenter leur efficacité et d’éviter les conflits entre gangs. Les chefs Boryokudans collectent de l’argent des groupes subordonnés, et évitent ainsi de commettre eux-mêmes des crimes (ce qui rend difficile leur arrestation). Cependant, le contrôle des groupes parents sur les groupes subordonnés n’est pas très strict. Les différentes organisations entretiennent des relations mutuelles d’ordre amical (accord de protection), de rivalité mais également d’ordre cérémonial (en cas de funérailles par exemple). Pour ce qui concerne leurs activités, on voit apparaître, à côté des activités traditionnelles (jeux, trafics d’amphétamines...), de nouveaux vecteurs utilisés par les boryokudans (prise en main de mouvements sociaux). À cet égard, le phénomène préoccupant est que ces organisations tendent à accroître leur influence sur le monde syndical et développent leurs interventions dans la vie économique (secteur financier et immobilier). Depuis une vingtaine d’années, ils ont pris l’habitude d’expatrier leurs activités (drogue, armes, prostitution, jeux, investissements immobiliers) dans d’autres métropoles asiatiques (Hong-Kong, Séoul, et Manille notamment). L’action anti-boryokudan mise en œuvre par les services de police japonais vise à contrôler les crimes commis, faire appliquer la loi anti-boryokudan votée en 1992 et à promouvoir les mouvements de réaction et de résistance de l’opinion publique. Si les résultats obtenus sont spectaculaires (12.000 arrestations et 234 organisations dissoutes en 1995), l’action de la police demeure légalement fragile puisqu’elle n’est pas autorisée à confisquer l’argent sale, à infiltrer les organisations ni même à procéder à des écoutes téléphoniques. Boryokudan, Japanese Organised Crime Groups 189 Resumen Las actividades de los boryokudan japoneses Katsushi Ikeda El término «.boryokudan.» significa grupo o banda violenta. Fue definido como una banda japonesa que tiene un control estricto sobre sus miembros y que emplea la fuerza y la intimidación para obtener beneficios legales o ilegales. Los miembros de los boryokudans se llaman entre sí los «.Yakusa.». Las características tradicionales de pertenencia a los boryokudans (tatuaje, amputación de falanges, peinado con permanente) tienden a desaparecer con el fin de hacerse más discretos frente a los servicios de policía. Los boryokudans cuentan actualmente con cuarenta y siete mil miembros y treinta y tres mil miembros asociados. Las bandas más importantes son «.Yamaguchi-Gumi.» (Kobe), que tiene diecinueve mil miembros y controla un centenar de grupos secundarios.; «.Sumiyoshi-kai.» (Tokio), con seis mil setecientos miembros, y «.Inagawa-Kai.» (Tokio), con cinco mil seiscientos. Hoy estas bandas cuentan con la mitad de los miembros que tenían en 1963. Los principios de funcionamiento de los boryokudans son los de una organización con un fuerte control interior y con una política de relación importante con respecto al exterior. Los boryokudans son una organización piramidal que imita los lazos de parentesco, de manera tal que el deber de obediencia al jefe es absoluto y la desobediencia gravemente castigada. Hay una tendencia a la concentración de los grupos Boryokudans, lo que les permite aumentar su eficacia y evitar los conflictos entre bandas. Los jefes Boryokudans recogen el dinero de los grupos subordinados, y evitan de esta manera cometer ellos mismos los crímenes (lo que dificulta su arresto). Sin embargo, el control de los grupos centrales sobre los grupos subordinados no es muy estricto. Las diferentes organizaciones mantienen relaciones mutuas de orden amistoso (acuerdos de protección), de rivalidad, pero también de orden ceremonial (en caso de funerales, por ejemplo). En lo concerniente a sus actividades, al lado de las actividades tradicionales (juego, tráfico de anfetaminas) aparecen nuevos vectores utilizados por los boryokudans (toma de control de movimientos sociales). A este respecto, el fenómeno más inquietante es que estas organizaciones tienden a aumentar su influencia sobre el mundo sindical y desarrollan su intervención en la vida económica (sector financiero e inmobiliario). Desde hace unos veinte años, han comenzado a expatriar sus actividades (droga, armas, prostitución, juego, inversiones inmobiliarias) hacia otras metrópolis asiáticas (especialmente Hong Kong, Seúl y Manila). La acción anti-boryokudan puesta en marcha por los servicios de policía japoneses apunta a controlar los crímenes cometidos, hacer aplicar la ley anti-boryokudan votada en 1992 y promover los movimientos de reacción y de resistencia de la opinión pública. Si bien los resultados obtenidos son espectaculares (12.000 arrestos y 234 organizaciones disueltas en 1995), la acción de la policía continúa siendo legalmente frágil, ya que no está autorizada a confiscar el dinero sucio, a infiltrar las organizaciones ni a realizar escuchas telefónicas. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 190 Les nouveaux enjeux de la lutte contre la criminalité organisée Terrorism and organised crime Alan Brown, Chief superintendent, Organised crime group, New Scotland Yard Terrorism and organised crime My role within the Metropolitan Police is head of Intelligence Operations within the Specialist Operations section based at New Scotland Yard, London. The primary target of the Specialist Operations Group is organised crime within London and the South East Area of England. My officers also provide technical and traditional covert surveillance in support of operations conducted against terrorist targets. The video you are watching is of the damage caused by the Provisional IRA on the 9th February this year, this explosion marked the end of a period called a ’cease-fire’by the Provisional IRA this had lasted approximately 18 months during which time their had been no overt terrorist activity and their had been talks aimed at resolving the problems in Northern Ireland. You can see by the damage caused that the explosion was immense, 2 people died and in excess of 100 were injured. The commercial damage to the City of London extended to millions of pounds. From the head lines that followed it is quite easy to recognise this as a deliberate act of terrorism, they are typical of what would be expected in any country that had just been the target of a large terrorist act. I would now like to show you a second set of headlines. These headlines refer to other criminal acts that have occurred in the London Area, some of them have resulted in traumatic consequences, yet there is only one of them that could really be linked to Organised Crime, that being the kidnapping of a Chinese national resident in London. All the others were of criminal acts undertaken by individuals normally with a grudge against the intended victim. They may indeed even have masqueraded as Organised Crime but the reality is that they were not. This brings me on to the first point that I would like to make with regard to Organised Crime and that it is very hard to define and recognise. You will have realised from earlier presentations and discussions that “Organised Crime” is nebulous and hard to define. Before moving on to examine the links between the two I will spend some time looking at what Terrorism is and why it is fundamentally different to Organised Crime and also why countries and police forces throughout the world adopt different approaches to terrorism than they do to combating Organised Crime. Terrorism unlike organised crime has a very definite public face, at the time of committing outrageous acts, it seeks publicity and indeed it is this publicity that is part of the whole rationale of Terrorism i. e. kill 1 frighten 1000. So who are terrorists and what are their motives? I would suggest that a terrorist is a disaffected and radicalised politician who seeks an influence much greater than he or she would be allowed or able to achieve if they conformed to normal legal and legitimate means. A working definition of Terrorism would be: Political Terrorism is the use or threat of use of violence by an individual or group, whether acting for or in opposition to established authority, when such action is designed to create extreme anxiety and or fear inducing effects in a target group larger than the immediate victims, with the purpose of coercing that group into acceding to the political demands of the perpetrators. (Wardlaw) It can be seen from this definition that in essence Terrorist Acts are political, they are a deliberate means to an end, Terrorism has objectives, a point which is all to often obscured by the fact that what the public sees are acts that are random and directed towards people whose injury or death can be of no apparent value to the terrorist cause. So if terror is directed at achieving a political goal, why should it be regarded as a crime or a criminal act, without establishing this, it would not be possible to show any links or connection with Organised Crime. But it is precisely because terrorists by definition follow a systematic policy of terror that their acts are analogous to crime. Every legal system is based upon the principal that individuals hold the moral responsibility for their actions and hence for any violation of the legal code. Unless we are prepared to defer to terrorists because his act is ’political’the actions of the terrorist in committing his terrorist act brings him or her into conflict with the law. Thus he is a criminal, perhaps with a different motivation but nevertheless still a criminal and a very dangerous one at that. The terrorist himself will often articulate loudly upon being captured that what they have done should not be regarded as a crime, they claim to act according to a higher ’revolutionary morality’which sits above the law. Consequently prior to trial they will almost invariably make statements refusing to acknowledge the court or judicial process. The terrorist speaks a different language one of justification, they place themselves outside and above the law, a situation that means they are aligned with the professional and habitual criminal. This position has led to intimate, organisational, financial and logistic links between terrorist movements and criminal subcultures. As terrorism brutalises those who are involved and disaffection becomes a reality the terrorist will quite probably resort to crime where he is still able to practice those skills he has acquired during his time as a terrorist. The tools of terror are to be found not only within terrorism but also extensively within organised crime. An example of this can be found most recently in Ireland, when during the period of the ’Cease-fire’a number of the terrorists, particularly those at a Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 194 lower level felt that their position of power within the nationalist community had been devalued, frustrated they sort to achieve the same level of power through moving into Organised Crime and in particular the supply of drugs, using the same tactics they had employed as terrorists. The result has seen a wave of violence sweep through Dublin that has no precedent within that city. If the major objective of terrorism revolves around a drive for political power and it is important to keep that in mind, it would seem to have very little in common with Organised Crime. Organised Crime has been defined by a number of different groups, and although I have not been present at your earlier discussions I am sure that they have been lively, thought provoking and that during the course of them you will have encountered some of the problems in defining exactly what ’Organised Crime’is. The reality is that it can mean a number of things, it can describe a variety of different enterprises which have different organisational models. However I would suggest that there is one common theme that runs through all the definitions, and that is the obtaining of money, pecuniary advantage and financial power. The definition used by the Metropolitan police is deliberately wide specifically to recognise the wide ranging nature of the activities and criminality that make up Organised Crime, it is: “Organised Crime can involve any group of individuals, organised to profit from the community by illegal means on a continuing basis.” You will see immediately that for crime to be regarded as Organised there must be a group/ or conspiracy and that it must be a continuing basis. In effect what we are really looking at is a business enterprise that operates within both illegal and legitimate markets and indeed it is this fact that attracts the terrorist. Organised crime does not have the attainment of political power as its objective, its primary purpose is to create money, it seeks financial power however as I will example later financial power and political power are very close bed fellows, and indeed organised crime may welcome the chance to infiltrate and control governments but not from a basis of achieving ideological ideas but simply as a way of achieving greater financial opportunity. To ensure it is able to go undetected it sets about corrupting law enforcement officials. A classic case in point is the International Commission Against Corruption established within Hong Kong, staffed initially by non Chinese its aim was to investigate Triad corruption, which is still widespread throughout Hong Kong. It has recently been discovered that the deputy head of this organisation was himself a Triad member having been recruited whilst working for the commission, which clearly shows the lengths to which Organised Crime will go to ensure its own safety and prosperity. The core of Organised Crime activity is the supplying of illegal goods and services, gambling, extortion loan sharking, drugs and other forms of vice. From these humble beginnings of street level crime, reinforced by terror, a power base is constructed. Terrorism and organised crime 195 Organised Crime groups realise that there is much to be learnt from the legitimate business world, which when allied to the willingness to undertake criminal acts ensures that they rapidly become formidable organisations. Employing illegal methods such as monopolisation, terror, extortion, and tax evasion to drive out or control lawful competition. Like Terrorism Organised Crime is considered in its approach to crime it does not commit ad hoc acts or undertake frivolous activities, it seeks financial power whilst ensuring its own safety. It is willing to use extreme methods to dominate its chosen market place. One of the areas where the police service is particularly poorly sighted is the extent of Organised Crime and its potential to corrupt economies. By common agreement the twin forces of liberalisation and technological innovation have made the global market dirtier at the same time as making it larger. There are no accurate estimates of the amount of ill gotten gains now finding there way into international capital markets, conservative estimates put the amount of money laundered between $300 bn. – $500bn., other less conservative estimates put the figure at $1,000 bn. which is considerably more than the gross domestic product of many countries. It does not take too much analytical ability to deduce two hypotheses: 1) That whoever has control of such money will weld considerable political power and this can be seen to be the case in countries involved in the production of Cocaine, Opium and Hashish. 2) That given that political power arrives in tandem with financial power those groups intent in achieving political power as a primary objective may well be attracted to organised crime as a way of achieving it. These are of course hypotheses, or are they? How many central American or Asian states are inextricably linked to Organised Crime, with revolutionary or nationalist groups once regarded as terrorist forming governments, sustained by the same methods that enabled them to take power in the first place. One area where Organised Crime has through political power sought to increase there financial power is the former Soviet Union. Political instability and terrorism stalk the very foundation of new sovereign states as they try to establish themselves. In Chechnya the Chechenskya Mafia started by Chechens during the second world war is known for its deep internal loyalty and unbridled brutality. Its numbers are large and spread not only throughout the former Soviet Union but also other parts of Europe and America. It has embraced smaller groups of Uzbeks and Ukrainians, it has started to diversify its activities from black marketeering in Russia to seeking to control vice activities across Europe. Consequently they have moved on, into extortion, loan sharking and money laundering operations. They have committed murders within the UK which is a clear indication of their intention to expand their activities across the English channel. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 196 There are anecdotal reports that many Russian business men are paying protection to this group who are closely linked to the struggle within Russia to establish Chechen as a separate sovereign state. Such struggles funded by the proceeds of organised crime blur the distinction between the Terrorist and the Organised Criminal. Let us consider what many in the past would have believed to have been a pure work of fiction or an overactive imagination, that is the prospect of Organised Crime groups acquiring nuclear material, yet it is already a matter of fact that police operations in Germany and Poland have arrested people in possession of Nuclear material which they have managed to smuggle out of the former Soviet Union. Let your thoughts rest briefly on the prospect of a nuclear device being in the hands of a terrorist group. Those people within Organised Crime groups who attained this material may well just view this as just another commodity, just another market place, the possible consequences are almost to appalling to imagine. It is the need to raise funds that provides a major attraction towards Organised Crime for both Nationalist and Revolutionary terrorist groups, the logistics of carrying out terrorist activities requires a ready supply of money, there are few if any terrorist groups that could survive on the donations of politically sympathetic supporters. It is this need to provide logistical support that is one of the main attractions for terrorist groups to enter the ’enterprise culture’of Organised Crime. It is possible to identify differences in the type of criminal activity undertaken by the two main types of terrorist groups, i. e. Nationalist and Revolutionary. Particularly in the West, Revolutionary groups tend to be very small in number, they do not have the membership to be able to consider truly ’Organised Crime’as an option. A classic example of this were the activities of Bader Meinhoff and Red Brigades which resorted to committing armed robberies to finance their terrorist activities. Far more closely aligned to Organised Crime are the fund raising activities of Nationalist Groups, the PIRA has needed and continues to need to raise funds to sustain its campaign within the UK and mainland Europe. Contrary to a belief that vast sums of money flood out of the USA from Irish American support the amount of money raised in this way is small. The PIRA are great practitioners of extortion, not only in Ireland but also Irish businesses within the UK particularly the construction industry. It is by this taxing of ordinary members of the public that the PIRA have managed to fund their terror campaign, this is reinforced by a willingness to kill, with the result that the public are understandably unwilling to come forward. We have also seen them enter the quasi legitimate world of business and it is known that the PIRA are the moving force behind large-scale copyright violation involving videos and audio tapes. Those who follow the international news will know that this area of criminality receives little police attention but is capable of generating large profit, and undermining legitimate business. A little known middle eastern group called ASALA whose aim was to establish an independent Armenia, showed quite clearly that such a group Terrorism and organised crime 197 made up of dispossessed nationals has to resort to Organised Crime to support their terrorist activities. Using links in Lebanon at the height of the Civil War in that country they established drug trafficking routes into both Europe and North America most notably Canada. By liaising with established crime groups in those countries they were able to generate sufficient funds to carry out an effective International Terrorist Campaign across Europe and the Middle East.. It is of course highly unlikely that the Organised Crime groups in Sweden and Canada whom they aligned themselves with had any interest in obtaining political power in Armenia, nor to facilitate the attaining of power by anyone else. They of course were only interested in generating ’financial power’through the profit made from the sale of drugs. For a final example of the links between Organised Crime and terrorism I would like to take a look at a Kurdish group. The PKK a political group acting to bring about a Kurdish independent state within the South East of Turkey. They have a large widespread community base dispersed throughout Europe, particularly Germany, France and the UK They are politically active, using terrorist methods against established Turkish targets both human and business and there have been a number of incidents within the UK In Turkey they have a considerable following in the South East of the country and are well armed. For those of you who are unfamiliar with the economy of south east Turkey it is an area that struggles economically. It is however a vital leg in the Heroin supply route from Afghanistan and Pakistan, into Europe.. Analysis of the Heroin seized in Britain identifies that with the exception of a small percentage all heroin comes from the Afghanistan, Pakistan region and undoubtedly travels across Turkey. The PKK have not been slow to seize upon this as a fund raising initiative and I have had a number of personal dealings of PKK members who have been arrested for Heroin trafficking on a large scale within the UK all are invariably armed, though so far they have not used their weapons against UK law enforcement officials. It would be no exaggeration to say that they are a prolific Organised Crime Group. The profits however do not stay within the UK They are channelled back to the South East of Turkey to continue their terrorist campaign. However not satisfied with being extremely successful drug importers, they also run extensive extortion activities within the UK directed against the Turkish community. This again raises considerable amounts of money to finance Kurdish insurgency in the South East of Turkey. Why, may you ask do the Turkish business men not come forward, simply because they are terrified, they are aware of how violent and well armed such groups are and as a consequence suffer the loss and sometimes humiliation that paying such extortion brings. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 198 These same activities must be occurring in every country that has a Turkish population, so it can be seen that Organised Crime on occasion makes a very comfortable bed fellow for terrorist groups. So what of the Police response? I will talk in specifics about the UK but what I am about to say I am aware is relevant to many places across the globe. Within the UK there have been specific statutes brought into to deal with Terrorism, most notable of these is the Prevention of Terrorism Act brought in specifically to deal with the Irish terrorism on mainland UK It gives the police powers far in excess of what the normal criminal law allows. Within the UK the police can only detain a person suspected of committing ’normal crime’for a period of 48 hours and even this has to be agreed by a Magistrate. There are no exceptions even for murder cases, yet the Prevention of Terrorism Act allows detention for 1 week. It allows British nationals to be refused entry to mainland UK It prescribes certain organisations making it illegal to belong to them. At other times Britain has had a policy of internment, it has had laws which have prevented terrorist or their aligned political parties being able to speak on television or have their views reported. When looked at against the normal criminal code it can be seen that the country allows far harder and more draconian policing against terrorist groups, than any other criminal conspiracy. Such actions are not limited solely to the UK, they are fairly representative of the reactions of most governments to a terrorist threat, the desire to be seen as being able to do something positive ensures a proliferation of laws directed against the terrorist. What of the actual police response, again there are marked differences between terrorism and organised crime. The UK response is fairly typical. There is a large Special Branch, whose sole aim it is to gather information and intelligence on political groups and personalities, with the aim of identifying any current or perhaps more importantly any future terrorist. 15% of all CID officers in London are members of the Special Branch, a colossal number of officers. Within the UK there are 43 Police Forces all of whom have a ’Special Branch’. To provide the executive arm, is an Anti-Terrorist Squad, who respond reactively to terrorist incidents and undertake proactive operations. The resources committed are enormous. They have over the years developed and honed their skills and are quite rightly regarded as a centre of excellence. They have however realised that to be truly effective they must be intelligence led, intelligence may appear to be a costly product to achieve, but over time it becomes cost effective providing information that produces results and saves lives. The response to Organised Crime by comparison is not co-ordinated and to a large extent is not based upon intelligence, it is a piecemeal approach, there is no strategic response as there is to terrorism. Terrorism and organised crime 199 We know sufficient about ’Organised Crime’to know that it is a phenomenal problem, as large and probably more persistent than any terrorist group. We know the types of activities that it carries out and we know from observing Organised Crime in action i. e. Triads, and Mafia, that its objective is to achieve financial power. To do so we know it must infiltrate and suborn legitimate market places and business. We know also that it has the ability and will to cross International borders to achieve its objective. The Police Service must realise that to combat Organised Crime it has to enrol the help of the communities against which they commit their crime. They must form effective partnerships with large businesses, assisting them to establish their own intelligence systems, to be able to identify the approach of Organised Crime. They must be determined in dealing with those groups that practice extortion against the vulnerable, whether they be street level businessmen or directors of multi-national companies. The Police Service must become as determined in its approach to Organised Crime as it is to Terrorism. I hope that I have been able to illustrate some of the similarities, differences, links and crossovers that exist between Organised Crime and terrorism. They are both complex phenomenon’s presenting liberal democracies with difficult decisions and dilemmas. Neither has an easy solution, but the police response to both should be firm and committed, they are a fundamental attack upon the societies in which we live, and indeed our very liberty. We must therefore urge government and public alike to recognise the problem and work together, by a determined response it is possible to achieve success. No liberal society will ever fully eradicate terrorism or Organised Crime, but their is still much to be achieved. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 200 Résumé Crime organisé et terrorisme Alan Brown À la différence du crime organisé, le terrorisme s’inscrit dans une logique publicitaire. Les terroristes sont des politiques aux positions extrémistes qu’ils manifestent en empruntant les voies illégales plus persuasives que les voies légitimes. Le terrorisme politique est l’utilisation ou la menace d’utilisation de la violence par un individu ou un groupe agissant pour ou contre une autorité établie. Cette action tend à déclencher une extrême anxiété ou peur qui, elle-même, induit des effets dépassant largement le cadre des victimes. De cette définition du terrorisme politique se dégage une analogie avec le crime organisé dans le sens où les terroristes poursuivent une action systématique de terreur. Parallèlement, la «.Metropolitan Police.» considère que le crime organisé implique un groupe structuré d’individus aspirant à réaliser des profits de façon continue par des moyens illégaux. Or, cette entreprise lucrative intervenant concurremment sur des marchés légaux, peut attirer les terroristes. Même si l’objectif politique n’est pas l’élément moteur de son activité, le crime organisé ne dédaigne pas infiltrer et contrôler les secteurs politiques et gouvernementaux en vue d’asseoir son pouvoir financier. À l’instar du terrorisme, le crime organisé recourt à des méthodes extrêmes (violence, terreur, corruption, etc) dans le souci de renforcer sa sécurité et son pouvoir financier. Les innovations technologiques et la libéralisation des échanges ont contribué à l’accroissement de la masse d’argent sale présente dans les circuits financiers. Le trafic de matières nucléaires, jadis pure fiction, est devenue une réalité illustrée par bon nombre d’affaires internationales. De surcroît, l’impérieuse nécessité pour les groupes terroristes à collecter des fonds les attire vers le crime organisé. En ce domaine deux tendances différentes se font jour. Tout d’abord, les mouvements révolutionnaires des pays occidentaux n’impliquent qu’un petit noyau de membres, cette situation excluant le recours au crime organisé. Tel fut le cas notamment de la Fraction Armée Rouge et des Brigades Rouges qui finançaient leurs activités en opérant des vols à main armée. En revanche, les organisations terroristes nationalistes adoptent un mode de collecte de fonds qui les rapproche du crime organisé. Ainsi l’IRA a considérablement infiltré le monde du bâtiment et de la finance et le PKK finance ses activités au travers du trafic de stupéfiants. Pour combattre cette nouvelle forme de crime organisé, il convient de privilégier le renseignement et surtout de développer de véritables partenariats avec le monde des affaires pour le sensibiliser et pour l’amener à mieux identifier les menaces susceptibles de peser sur lui. Terrorism and organised crime 201 Resumen Crimen organizado y terrorismo Alan Brown A diferencia del crimen organizado, el terrorismo se inscribe en una lógica publicitaria. Los terroristas son políticos con posiciones extremistas que manifiestan a través de vías ilegales, más persuasivas que las legítimas. El terrorismo político es la utilización o la amenaza de utilización de la violencia por un individuo o un grupo actuando a favor o en contra de una autoridad establecida. Esta acción tiende a desencadenar un miedo o ansiedad extremos, que, en sí mismos, inducen efectos que sobrepasan ampliamente el marco de las víctimas. De esta definición de terrorismo político se desprende una analogía con el crimen organizado en el sentido de que los terroristas persiguen una acción sistemática de terror. Paralelamente, la «.Metropolitan Police.» considera que el crimen organizado implica un grupo estructurado de individuos que aspiran a realizar beneficios de manera continua por medios ilegales. Así, esta empresa lucrativa interviniendo competitivamente sobre los mercados legales puede atraer a los terroristas. Incluso si el objetivo político no es el elemento motor de su actividad, el crimen organizado no desdeña la infiltración y el control de sectores políticos y gubernamentales con el objeto de consolidar su poder financiero. Del mismo modo que el terrorismo, el crimen organizado recurre a métodos extremos (violencia, terror, corrupción, etc.) para reforzar su seguridad y su poder financiero. Las innovaciones tecnológicas y la liberalización de los intercambios contribuyeron al aumento de la masa de dinero sucio presente en los circuitos financieros. El tráfico de materias nucleares, hasta hace poco pura ficción, se ha convertido en una realidad ilustrada por buen número de casos internacionales. Además, la imperiosa necesidad de fondos de los grupos terroristas los empuja hacia el crimen organizado. En este dominio aparecen dos tendencias diferentes : Por un lado, los movimientos revolucionarios de los países occidentales que sólo implican un pequeño número de miembros, lo que excluye el recurso al crimen organizado. Es el caso de la Fracción Ejército Rojo y de las Brigadas Rojas que financian sus actividades a través del robo a mano armada. Por el otro, las organizaciones nacionalistas terroristas que adoptan un modo de recolección de fondos que las aproxima al crimen organizado. Es el caso del IRA, que ha infiltrado considerablemente el mundo de la construcción y de las finanzas, y del PKK que financia sus actividades a través del tráfico de estupefacientes. Para combatir esta nueva forma de crimen organizado, conviene privilegiar la información y sobre todo desarrollar una verdadera cooperación con el mundo de los negocios para sensibilizarlo y llevarlo a identificar mejor las amenazas que pesan sobre él. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 202 La criminalité organisée et les trafics d’êtres humains Wassyla Tamzali, chef de l’Unité de coordination des activités relatives aux femmes à l’UnescoLa criminalité organisée et les trafics d’êtres humains Monsieur le Préfet, je voudrais tout d’abord vous remercier de m’avoir invitée. Même si j’ai beaucoup hésité à venir m’adresser à votre conférence, je suis heureuse d’être ici ce matin. Pourtant, mes craintes étaient justifiées compte tenu de la qualité des auditeurs comme des intervenants et leurs responsabilités dans la lutte contre le crime organisé dans le monde. J’espère que je saurai, moi aussi, apporter ma contribution pour une meilleure conduite de vos travaux de police contre le crime organisé et tout particulièrement celui qui organise la prostitution des femmes et des enfants : le trafic des êtres humains. Permettez-moi une remarque préalable. La question de la prostitution est la seule avec celle du patrimoine national qui est traitée dans notre Conférence par une personne extérieure aux filières de police et nous pourrions penser que cette question n’a pas encore atteint le degré d’intérêt qu’elle mérite au sein de cette profession. Mais, en écoutant les interventions précédentes nous pouvons aussi dire que la prostitution, la traite des femmes, des enfants, obéissent aux règles générales du crime organisé et qu’elles seront de cette manière au cœur même des différentes expériences qui seront échangées ici.... et je l’espère des différentes stratégies de lutte qui seront identifiées et retenues. Car faut-il le souligner.? Nous savons depuis longtemps que la prostitution est intégrée à la grande criminalité, aujourd’hui plus que jamais. Le conférencier précédent nous a dit que la moitié des cambriolages se faisait pour la drogue, on peut dire que maintenant une bonne partie de la prostitution se fait pour la drogue et par la drogue. Le proxénète des villes, surtout dans les pays développés, dans les grandes capitales européennes, n’est plus le héros «.sympathique.» que nous ont montré les films sous les traits de Jean Gabin et d’autres acteurs chers au cœur des Français. C’est souvent le trafiquant de drogue organisé à un niveau transnational sans visage, sinon celui que lui prête le dealer du quartier. C’est dire l’intérêt de traiter de cet aspect particulier du crime organisé qu’est le trafic des êtres humains, car il participe au renforcement des autres catégories de crimes organisés. Vous m’avez invitée à exposer devant vous les résultats de mon travail à l’Unesco sur la question de la prostitution. Depuis maintenant plus de dix ans, nous avons, dans le cadre de la Division des droits de l’homme, développé un programme de recherche et d’expertise sur les causes et les conséquences de la prostitution des femmes ainsi que des activités en vue d’une meilleure application des instruments juridiques internationaux sur cette question et en particulier, la Convention de 1949 sur la traite des êtres humains et l’exploitation de la prostitution d’autrui. De cette vaste et complexe question de la prostitution, je ne retiendrai que quelques points particuliers en vue d’organiser notre débat. Je commencerai donc par les liens particuliers de la police et de la prostitution. Je le fais en priorité et avec d’autant plus de conviction devant votre auditoire, que compte tenu de la diversité des nationalités présentes dans cette salle, je dirai sans désigner de pays, que pour un grand nombre de pays représentés ici, un aspect de votre problème reste encore entièrement posé, celui du traitement inacceptable des femmes prostituées par la police. Si le traitement par les pouvoirs publics de la prostitution connaît des progrès tout à fait remarquables dans certains pays, dans d’autres pays, la prostitution relève encore d’une analyse et d’un traitement archaïques, intolérables au seuil du troisième millénaire. La question mérite d’être développée ici d’autant plus que sous cet aspect des solutions sont possibles et dépendent d’une bonne volonté politique et de sa mise en forme institutionnelle. La prostitution et la police sont étroitement liées et cela dès l’adoption des premiers réglements concernant le trafic du sexe et l’organisation de la vie des prostituées. Dans les premières législations européennes qui remontent aux guerres napoléoniennes, la prostitution est un problème de police et d’hygiène. Le système réglementaire de la prostitution sera mis en forme en 1802, à l’époque même ou Bonaparte rétablissait l’esclavage aux Colonies. Tout sera mis en œuvre par la société pour faire en sorte, non pas que la prostitution disparaisse, mais pour que la prostitution soit canalisée dans des quartiers bien particuliers et qu’elle soit soumise à des contrôles policiers et médicaux. Les dispositions qui seront adoptées reposent sur le paradoxe que la prostitution est acceptée et les prostituées rejetées. La prostitution est considérée comme une pratique nécessaire, mais une pratique honteuse qu’il faut cacher, comme la folie ou comme d’autres «.maladies.» de la société et qu’il faut tolérer sur les frontières de la «.bonne.» société. Dans certains pays dont les représentants sont dans cette salle, c’est encore la position officielle et il faut dire également que c’est l’opinion généralement répandue dans l’ensemble des pays du monde, même dans les pays où on note des avancées au niveau des lois. La femme prostituée n’est pas considérée comme une victime, mais comme un être de déchéance, inévitable dans notre société, qu’il faut cacher, punir, emprisonner, contrôler médicalement, mettre en carte, et de plus, et cela ne fait pas partie d’un scénario fantaisiste, qui est utilisé par la police pour toutes sortes de tâches comme des tâches de renseignement, d’information etc., contre des crimes considérés comme plus dangereux à la société que la prostitution, tel par exemple, le braquage de banque, l’émigration clandestine, etc. Pendant longtemps la prostitution a été considérée comme cela dans les pays européens, et elle l’est encore dans un certain nombre de pays, où il est aujourd’hui encore, impensable d’avoir à un niveau officiel des informations et des renseignements sur la prostitution des femmes. De cette conspiration du silence, les premières victimes sont les femmes prostituées. La prostitution est alors refoulée dans un ghetto, un microcosme qui dégagera ses lois, ses règles, avec d’autant plus de force que cela se fera avec l’assentiment général Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 204 et au vu et su de la police et de toute la société. Ce sont là les clefs du système mis en place par les sociétés qui permettent de développer un système paradoxal, cruel qui conduit à l’exclusion totale des prostituées sans renoncer aux services que procurent les femmes prostituées à la sexualité masculine prédatrice. Quelle est donc cette morale qui préside au traitement de la prostitution.? Une double morale, pourrait-on dire, dans laquelle la police a joué un rôle déterminant. Double morale qui de plus, enferme à vie, sauf exceptions, les femmes et les enfants dans la prostitution. On peut dire sans se tromper que les premières mesures à prendre sont celles qui visent à modifier l’attitude des pouvoirs publics face à la prostitution et en priorité celle de la police. Il faut non seulement dépénaliser la prostituée mais également la déculpabiliser et cesser de la traiter en objet immoral d’une pratique que l’on trouve tout compte fait moralement acceptable. Après ce premier point sur les liens de la police et la prostitution, je souhaiterais maintenant aborder celui de la séparation que l’on fait de plus en plus entre la prostitution et la traite des êtres humains. Et cela jusque dans cette salle, puisque les documents que vous m’avez remis ne parlent que de traite des êtres humains et non de prostitution. Même si je sais que traditionnellement la coopération entre les polices des différents pays porte sur le trafic des êtres humains et non sur la prostitution, il me semble utile d’aborder ce point car il permet de mieux comprendre les intérêts qui sont en jeu aujourd’hui dans les débats sur cette question dans les enceintes internationales et régionales, et peut-être plus particulièrement au sein des institutions de l’Union européenne où ces dernières années, la question de la prostitution des femmes est inscrite à l’ordre du jour. Je devrais d’ailleurs dire, le trafic de femmes puisque justement, ici plus qu’ailleurs, on sépare volontairement les deux aspects de ce fléau, les considérant comme indépendants l’un de l’autre. Nous enregistrons avec satisfaction une condamnation générale de la traite des êtres humains, mais nous remarquons également, que cette condamnation dans la majorité des cas est silencieuse, sinon ambiguè sur la prostitution elle-même. Cette tendance à séparer le problème de la prostitution de celui de la traite des êtres humains est non seulement un choix de méthode mais une orientation de fond. Vous aurez remarqué que jusqu’à ce point de mon intervention, j’ai surtout parlé de prostitution. Et cela n’est pas un hasard. Car depuis que nous avons inscrit le trafic des êtres humains au programme des droits de l’homme de l’Unesco, nous avons été amenés à poser la question de liens entre le trafic des êtres humains à proprement parler de la prostitution et nous avons sur ce point répondu d’une manière très argumentée. Les experts que l’Unesco a réunis dans le cadre de son programme sur l’élimination de toutes les formes de discriminations à l’égard des femmes ont dit très clairement en conclusion de leurs travaux, à Madrid en 1986, à Penn State en 1991, à Bruxelles en 1992, à Séoul en 1995 et au Forum des ONG de la 4e Conférence mondiale des femmes de Pékin en 1995, qu’il n’y aura pas d’éradication de la traite des êtres humains sans envisager sérieusement la disparition de la prostitution. C’est la prostitution tacitement acceptée et légalisée aujourd’hui dans certains pays d’Europe qui est la cause du développement de la traite des êtres humains. Voir en annexe le rapport de la réunion d’expert de Madrid de mars 1986. La criminalité organisée et les trafics d’êtres humains 205 Cette analyse de la prostitution est d’ailleurs celle qui a été retenue par la Convention pour la répression et l’abolition de la traite des êtres humains et de la prévention de la prostitution d’autrui du 2 décembre 1949, dite Convention de New York, qui condamne toutes formes d’exploitation de la prostitution d’autrui. Cette Convention a été l’aboutissement d’un long cheminement de la communauté internationale. Il est bon de laisser aux minutes de votre conférence, un rappel de l’évolution de cet aspect de la lutte contre la prostitution et le trafic des êtres humains dans les traités et conventions internationaux. Cette évolution met en perspective deux positions antagonistes : pour lutter contre ce fléau, fallait-il lutter contre le trafic des êtres humains et organiser l’exercice libre de la prostitution ou fallait-il lutter contre l’exploitation de la prostitution comme une des sources principales du trafic des êtres humains.? C’est en Angleterre que commence la lutte contre la prostitution à l’initiative des militants réunis par et autour de Joséphine Butler à la fin du XIXe siècle. Leur premier objectif était de faire abolir les lois anglaises qui règlementaient la prostitution. L’abolition des lois et règlements spécifiques qui est le premier objectif de leur organisation donnera son nom à leur Mouvement : Le Mouvement abolitionniste. Ils appelleront leur association «.l’Association abolitionniste.» (Londres 1876) qui deviendra en 1906 «.La Fédération internationale abolitionniste.» Ce Mouvement sera à l’origine de plusieurs traités et conventions qui interdiront la traite des enfants, puis des adultes et enfin des adultes même consentants par la Convention internationale pour la répression du trafic des femmes majeures adoptée en 1933 par la Société des Nations et qui dispose que devait être puni quiconque avait débauché, entraîné ou détourné, même avec son consentement, une femme, une fille majeure en vue de la débauche dans un autre pays. La Convention de 1933 ne traitait que du trafic, cependant la Société des Nations, grâce au rapport établi par la Commission consultative de la traite des femmes et des enfants instituée par la conférence de la Société des Nations de 1922, commençait à établir le lien entre l’exploitation à l’intérieur des frontières et le trafic international. Le rapport de la Commission soulignait que même s’il n’y avait pas de structure institutionnelle, les acteurs des divers pays se connaissaient. C’était l’argent des gros souteneurs, des «.exploitants.» qui aidait à organiser la traite des femmes et que si on voulait arrêter le trafic et la traite des femmes et des enfants, il fallait s’attaquer à la source même de leur puissance, à savoir l’exploitation au niveau national de la prostitution. Dans le même temps que l’adoption de la Convention de 1933 sur la traite des êtres humains, la Société des Nations a mis en chantier un instrument plus complet qui devait également réprimer les formes diverses d’exploitation de la prostitution et, en particulier, punir les souteneurs. La deuxième guerre mondiale empêchera la convocation d’une Conférence internationale chargée de conclure une convention. Les Nations Unies reprendront ce travail et à sa 17e session en 1948, le Conseil économique et social invitait le Secrétaire général des Nations Unies à élaborer le projet d’une Convention nouvelle et de portée générale, en vue de la répression de la traite des femmes et des enfants et la prévention de la prostitution. Cette nouvelle Convention devait unifier les quatre instruments en vigueur : l’Agrément international du 18 mai 1904 pour Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 206 la répression de la traite des blanches, la Convention internationale du 4 mai 1910 pour la répression de la traite des blanches, la Convention internationale du 30 septembre 1921 pour la répression et la traite des femmes et des enfants et la Convention internationale du 4 octobre 1933 pour la répression de la traite des femmes majeures. Cette convention sera la Convention pour la répression et l’abolition de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui adoptée le 2 décembre 1949. De 1906, date de création de la Fédération abolitionniste internationale, à 1949, date de la Convention de New York, les seuls engagements qu’avaient obtenus les militants qui luttaient contre la prostitution étaient ceux portant sur la condamnation de la traite des êtres humains, mineurs et majeurs même avec leur consentement. Jusqu’en 1949 la communauté internationale avait séparé le problème de la traite de celui de la prostitution, sans doute pour arriver à un large consensus. Nous voyons resurgir cette volonté de séparer la traite de la prostitution à la faveur d’une évolution paradoxale de la philosophie des droits de la personne humaine concrétisée par certaines dispositions législatives européennes. Les acquis de la Convention de New York de 1949, la première à faire le lien entre l’exploitation de la prostitution à l’intérieur des États et le trafic sont remis très sérieusement en question, au nom de la liberté de la société, de la liberté des femmes à user de leur corps, ce qui au regard du bon sens est un paradoxe. Comment en est-on revenu à cette distinction entre prostitution et traite des êtres humains après avoir atteint grâce à la Convention de 1949, un consensus sur le point que la traite des êtres humains était la conséquence et la cause de la prostitution d’autrui et qu’elle était consolidée et rendue invulnérable par l’exploitation même de la prostitution par toute une chaîne d’agents, tels que l’aubergiste, le logeur, les éditeurs de pornographie, etc. Autre point sur lequel il y avait un consensus était que la prostitution était incompatible avec la dignité humaine. Cela était clairement énoncé dans le préambule de la Convention. C’est sur ce point que l’évolution des esprits semble la plus dangereuse car elle entraînerait une révision fondamentale de la définition même de la condition humaine, cette définition au regard de laquelle se sont construits les instruments normatifs internationaux à ce jour. Une évolution surprenante et rapide puisque dans un document de travail du 25 mai 1988 du Conseil de Strasbourg, on peut lire encore que «.l’exploitation de la prostitution représente la négation radicale des valeurs spirituelles et morales qui sont le patrimoine commun des pays dont les gouvernements ont constitué le Conseil de l’Europe.». Il est d’autant plus utile de rappeler cette déclaration forte et conforme à l’esprit de la Convention de l949 que c’est du Conseil de Strasbourg lui-même que partiront les premières remises en question du bien fondé de la Convention de 1949. Cette volonté de remettre en question la Convention de 1949 sera très fortement exprimée à la Quatrième Conférence des Nations Unies pour les femmes qui s’est tenue à Pékin en septembre 1995. Le Groupe européen insistera et obtiendra que l’on ne mentionne pas la Convention de 1949 au chapitre des instruments normatifs propres à lutter contre la violence faite aux femmes du Programme d’action de la Quatrième Conférence mondiale pour les femmes. Examinons pourtant cette Convention de 1949 qui est le seul instrument normatif international traitant de cette question. La criminalité organisée et les trafics d’êtres humains 207 La Convention de 1949, outre qu’elle prohibe toutes les formes de trafics à des fins de prostitution, exige donc des États, qu’ils luttent contre toutes les formes d’exploitation de la prostitution d’autrui, ce qui vise tous les actes liés à la vente du sexe et les personnes vivant des revenus de la prostitution d’autrui. Ce dernier point est délicat car il interdit à la femme prostituée de vivre avec un concubin ou un mari, ce qui induit que les femmes prostituées n’ont pas le droit à des liens affectifs. Question difficile. Mais la prostitution est traversée par un grand nombre de questions difficiles, ce qui en partie explique le silence de l’opinion publique et son refus de poser le problème à plat et d’ouvrir un vrai débat. À partir de la Convention de 1949, la lutte est portée à l’intérieur même des pays. Si on s’en tenait à l’esprit du texte, non seulement les maisons closes qui ont été fermées dans les pays qui ont ratifié la Convention.1, mais aussi tous les commerces qui sont à la périphérie de la prostitution auraient dû être interdits. Ceci reste encore bien loin de la réalité puisque prospèrent au cœur de Paris et au cœur de Londres, au cœur de toutes les capitales des pays mêmes qui ont ratifié la Convention, tant de commerces qui vivent de la prostitution. Le laxisme et la tiédeur qui ont caractérisé l’application de la Convention l’ont véritablement affaiblie et dévalorisée, et servent d’arguments à ses détracteurs aujourd’hui. Néanmoins, nous devons retenir que les pays qui l’ont ratifiée se sont engagés à réprimer toutes les formes d’exploitation de la prostitution, et que par là ils reconnaissent que la prostitution ne peut être définie comme l’exercice normal, l’exercice légal d’un métier ou d’une profession. Ceci suffit aujourd’hui à faire de la Convention de 1949 un document important et déterminant, et pour cela, la cible des pro-prostitutionnels. Autre disposition importante : l’abolition de la réglementation. La Convention de 1949 exige la suppression, l’abolition de toutes réglementations de la prostitution. Cette disposition est au cœur de la Convention qui reprend ainsi tout le travail des abolitionnistes et dont nous avons déjà montré l’importance pratique dans notre premier point. Il s’agit de l’obligation pour les États signataires, de supprimer toutes réglementations particulières s’appliquant aux femmes prostituées comme les contrôles médicaux ou l’enregistrement par la police ou par n’importe quel service. L’abolition de toutes règles spécifiques était un argument majeur des abolitionnistes. Libérer la prostituée de toute réglementation policière doit être considérée comme un progrès par rapport aux pays où la prostituée est sous le contrôle non seulement du proxénète mais également de la police qui la réprime et de la justice qui la punit. Elles sont mises en prison et objet de toutes les brimades. Outre ces relations très concrètes avec le vécu des femmes prostituées, l’existence ou la non existence des lois réglementaires de la prostitution nous renvoie à un autre type de réflexion qui sera développé au point suivant mais qu’il est nécessaire d’exprimer ici. À ce propos, il faut rappeler les débats qui ont eu lieu aux Nations Unies lors des travaux de rédaction et d’adoption de la Convention du 2 décembre 1949 et d’un article en particulier. 1. En France la fermeture des maisons closes a été adoptée le 15 avril 1946. Les syndicats des tenanciers ont organisé une manifestation de rue à Paris. . Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 208 Il s’agit de l’Article 6 de la Convention qui stipule : «.Chacune des parties à la présente Convention convient de prendre toutes les mesures nécessaires pour abroger ou abolir toute loi, tout règlement et toute pratique administrative selon lesquels les personnes qui se livrent ou sont soupçonnées de se livrer à la prostitution doivent se faire inscrire sur des registres spéciaux, posséder des papiers spéciaux ou se conformer à des conditions exceptionnelles de surveillance ou de. déclaration.». Les auteurs de la Convention estimaient par là que toute mesure de surveillance ou d’enregistrement des prostituées équivalait à reconnaître de façon tacite l’existence du commerce du sexe. C’est sans doute l’article qui occasionnait les discussions les plus longues et les plus difficiles et cela autour de l’amendement français qui souhaitait voir maintenir les contrôles sanitaires obligatoires des femmes prostituées. La France votera contre la Convention mais l’Article 6 sera maintenu. Il représente l’idéal abolitionniste dont s’inspire la Convention et il marque ainsi la position qui reconnaît que toute reconnaissance de la prostitution de la part des pouvoirs publics équivaut à l’accepter et à l’encourager. L’Article 6 de la Convention a une portée morale très forte. En cherchant à abolir les réglementations de la prostitution, il cherche à abolir la prostitution reconnue par l’État. Par rapport à certaines situations dans le monde, le régime abolitionniste est un régime qui marque une amélioration de la condition et des situations des femmes prostituées, ce qui nous conduit à introduire auprès de votre Conférence, une recommandation concrète et qui se situe dans le droit fil des obligations de la communauté internationale et à laquelle l’Unesco apporte son soutien : Il faut ratifier et appliquer la Convention des Nations Unies de 1949. Elle contient assez d’éléments pour mettre en œuvre des politiques de lutte contre le trafic et la prostitution des êtres humains et elle exprime très clairement les liens entre la prostitution et la défense de la dignité des êtres humains et en particulier des femmes. Ceci sera mon troisième point : y a-t-il un lien entre la prostitution des femmes et les droits de la personne humaine.? Dans la longue et préoccupante liste des crimes organisés que vous aurez à discuter ici – la drogue, le trafic d’armes, le trafic des armes nucléaires, le terrorisme – il faut souligner la priorité du trafic des êtres humains à des fins sexuelles parce qu’il est directement attentatoire à la dignité humaine. Si il y a un crime organisé sur lequel nous devons de toute urgence nous interroger tous, en tant qu’être humain, c’est celui de la prostitution. Que signifie la prostitution sinon la vente d’un être humain, la vente d’une personne qui fait partie de la famille humaine.? Et pour cela, je mettrais la traite des êtres humains au premier rang des crimes organisés qui devrait intéresser la communauté internationale, d’abord parce que sous plusieurs aspects, les méthodes employées dans la prostitution que ce soit l’esclavage, la torture, le viol, les mutilations, les amputations, les séquestrations, rejoignent les grands actes criminels condamnés avec force par celle-ci, et aussi, et surtout, parce que sur le plan éthique s’il y a un crime qui devrait nous mobiliser et nous concerner en premier, c’est celui qui conduit à la vente des êtres humains qu’ils soient adultes ou enfants. Nier cela, serait accepter une vision de l’humain qui nierait que l’intégrité physique et morale de la personne est la base de notre système de références. La criminalité organisée et les trafics d’êtres humains 209 On a l’habitude de distinguer la traite des femmes de la traite des enfants en considérant que la traite des enfants est plus grave que la traite des femmes, mais s’agissant d’un impératif moral catégorique, je ne ferai aucune différence entre les deux puisque dans les deux cas il s’agit d’êtres humains que l’âge ne suffit pas à différencier. Cette acception est largement répandue dans l’opinion publique qui considère que la prostitution des adultes est le résultat d’une décision, d’un choix. Raisonnement qui induit qu’un adulte a le choix de se prostituer au regard d’un droit existant, abstrait le droit de se prostituer. Cette notion de choix/droit est au cœur du débat sur la prostitution. Et déjà, dans certains pays, on légifère pour institutionnaliser le droit de se prostituer. Dans ces pays, la prostitution est légalisée et reconnue comme une activité économique. En Espagne, à travers la réforme du Code pénal qui dépénalise certaines formes d’exploitation de la prostitution, on tend à reconnaître la prostitution comme un métier et à banaliser cette pratique. Porté par des groupes, associations et fondations basés en Europe, déjà s’amplifie un mouvement que beaucoup de femmes et d’hommes considèrent comme une régression sur le plan éthique. Dans cette Europe, porteuse de ce plus d’humanité par rapport au problème affligeant de la prostitution des femmes et des enfants, on remet en question le principe que la prostitution est incompatible avec la dignité des êtres humains, principe rappelé dans le préambule de la Convention de 1949. Ce problème de la légalisation de la prostitution est un problème complexe, qui charrie avec lui des éléments contradictoires qui rendent le jugement difficile et qui conduisent à un amalgame. Pourquoi.? Parce que d’abord le mouvement est porté sur le devant de la scène par des groupes de femmes, des associations de femmes qui le font au nom de la défense des droits des femmes prostituées. Quels sont leurs arguments.? Leur argumentation se base sur le fait que, vivant dans la clandestinité, les femmes prostituées ne peuvent pas s’organiser et qu’il faut donc leur permettre de s’organiser et leur reconnaître un statut légal. Ces groupes distinguent la prostitution forcée de la prostitution «.choisie.» et à partir de cet argument ils développent l’hypothèse qu’il faudrait pouvoir distinguer la prostitution des femmes qui choisissent librement, de celles qui sont contraintes à la prostitution et qui sont les victimes du trafic. Que peut-on répondre à ces arguments puisqu’ils visent exclusivement à la défense des femmes prostituées et qu’il est tout à fait important que les femmes prostituées puissent se défendre. Mais peut-on penser que cette législation va permettre aux femmes prostituées d’exercer libres de toutes contraintes leur «.métier.», qu’elles vont pouvoir mieux «.récupérer leur force de travail.» pour emprunter un vocabulaire désuet. Il est difficile de répondre à ces questions. Pour cela, il nous faudrait une évaluation des effets de l’application de ces nouvelles dispositions qui est particulièrement difficile compte tenu du milieu concerné qui est défini par sa clandestinité. Les participants de cette rencontre qui représentent les différents services de police dans le monde sont peut-être ceux qui connaissent le mieux ce milieu et peuvent nous aider à formuler un point de vue. En vrac, quelques situations et quelques questions que vous aiderez peut-être à démêler. Dès lors que l’on va avoir une catégorie de prostituées légalisées, inscrites au registre du commerce il faudra bien qu’on se pose la question de Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 210 savoir où elles vont travailler, comment et d’où elles vont venir, quand on sait que les femmes prostituées sont jusqu’à 75.% étrangères à la ville où elles se prostituent. Qui va les faire venir.? Des agences de voyages spécialisées.? Le trafiquant devra alors par cohérence être légalisé à son tour puisqu’il participe à une activité légale. Les nouvelles législations proposent de distinguer le bon du mauvais trafiquant. Elles conservent le concept de trafic quand les transactions sont basées sur la violence et la contrainte. Qui aura la charge de la preuve.? Comme dans le Code espagnol, c’est à la prostituée d’apporter la preuve qu’il y a eu violence. Est-ce raisonnablement possible.? Comment va-t-on distinguer maintenant le bon du mauvais trafiquant.? Va-t-on établir des codes de bonne conduite à l’usage des commerçants du sexe.? Est-ce réaliste quand on sait que par nature la prostitution est le lieu de la violence.? Nous savons très bien que la preuve de la violence est difficile à apporter par les victimes de la violence en général. La preuve de la contrainte est encore plus difficile. Avant la légalisation, il y avait traite d’êtres humains quand on apportait la preuve que le voyage d’une femme avait pour but le commerce du sexe qu’elle soit ou non consentante. Il y avait toujours traite des êtres humains même si les femmes étaient consentantes. Or si l’on suit les pays qui ont légalisé la prostitution, il faudra apporter la preuve de l’illégalité du trafic. Cette preuve doit être basée sur des éléments constitutifs du délit portant principalement sur la violence contre la femme et la volonté extorquée de la femme prostituée. C’est un aspect qui s’adresse particulièrement à cet auditoire. Ceux qui exercent les métiers de police, dans le milieu de la prostitution, reconnaissent eux-mêmes que c’est un milieu dominé et contrôlé par la violence et qu’il sera difficile de distinguer le bon du mauvais trafiquant. On connaît déjà les difficultés d’apporter la preuve de la prostitution et de cerner les réseaux du proxénétisme. Le problème de la preuve sera alors au centre des démarches anti-prostitution, anti-trafic, ce qui va alourdir le travail de la police et de la justice et sans doute le rendre impossible. Dans la perspective de l’Europe et de la libre circulation des personnes dans la mesure où certains pays européens légalisent le commerce du sexe et où la prostitution s’exerce comme un métier légal, cela va poser des problèmes au niveau de la répression du trafic entre les pays européens et du traitement judiciaire de ces phénomènes qui sont, rappelons-le, transfrontières. Les prostituées pourront exercer dans des lieux autorisés. Le propriétaire des lieux sera tout à fait autorisé à louer à des prostituées, la loi du profit et de la ghettorisation conduira vite à consacrer des immeubles entiers à la prostitution, ce qui permettra et conduira à la concentration des femmes prostituées et à la généralisation du contrôle. Pour les faire venir en Europe, car il faudra les faire venir, on organisera des voyages, il y aura des agences. Les techniques de «.management.» pourront alors se développer en toute légalité et efficacité. La prostitution étant la source de revenus et de brassage d’argent que l’on connaît, les méthodes artisanales que sous-tend l’image de la prostituée «.libre.» ne résisteront pas au grand marché et alors disparaîtra cette liberté de la prostituée que la légalisation était censée lui conférer. La circulation des «.marchandises.» et des capitaux fera-t-elle exception pour ce business particulier.? La criminalité organisée et les trafics d’êtres humains 211 Voilà une série de questions pratiques et dont les solutions relèvent d’une connaissance du terrain. Ainsi, c’est avec intérêt que j’entamerai une discussion avec vous, hommes et femmes de terrain, afin d’examiner les difficultés nouvelles qui se présentent et se présenteront devant d’une part, les formes nouvelles du trafic et de la prostitution et d’autre part, à l’intérieur de l’Europe de la dysharmonie des textes et lois concernant la prostitution. Vous avez beaucoup de choses à dire sur un problème qui préoccupe la communauté internationale et qui dépend plus que tout autre de son traitement sur le terrain. Il est vrai que le niveau des conventions reste important et déterminant car il indique le point de vue politique et philosophique des États sur cette question. Et en cela, l’action sur le terrain et en particulier celle de la police reste déterminée par ces grandes conventions, traités et déclarations politiques qui ne manquent pas. Chaque année au moins une résolution de l’Assemblée générale des Nations Unies rappelle que ce phénomène est une des priorités de l’action du système onusien. Mais devant le développement constant du trafic des êtres humains à des fins sexuelles, devant les formes toujours renouvelées et accablantes de ce trafic, on ne peut que constater avec regret que ces résolutions restent lettre morte. Avant de terminer mon intervention, je ne saurais oublier de souligner que cette Convention dont je vous ai très longuement présenté la défense, présente elle aussi des difficultés et qu’elle demande à être améliorée et renforcée. Nous avons en la matière un seul instrument normatif international, la Convention de 1949, qui est contraignante mais inopérante dans la mesure où contrairement à tous les autres instruments des droits de l’homme, la Convention n’est pas dotée d’un organe de contrôle. La Convention de 1949 n’a pas de comité de suivi. La communauté internationale en acceptant un texte de cette nature a d’abord exprimé son ambiguïté sur la question. Et le premier signe d’une volonté de la communauté internationale de lutter contre la prostitution des femmes et des enfants serait de renforcer cet instrument et de lui donner des moyens d’application et de suivi. Comme vous le voyez, la tâche est immense et multiple. Elle implique de se battre sur le front des idées parallèlement à celui de l’amélioration de la vie des sociétés et de l’application des lois. Elle implique plus que jamais une coopération internationale entre pays. Réponses aux questions L’Unesco n’a pas de point de vue officiel mais l’obligation de coopérer avec les Nations Unies qui sont les dépositaires de la Convention de 1949. Nous participons, dans le cadre de la coopération interagences aux efforts de l’ensemble du système pour la mise en œuvre des instruments normatifs internationaux. Chaque résolution de l’Assemblée générale des Nations Unies s’adresse à l’Unesco comme à l’OMS et au BIT, à l’Unicef, etc. L’Unesco a posé le problème de la prostitution dans son programme sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Dès 1975, à la Conférence mondiale des Nations Unies pour la femme, la déléguée de notre Organisation a dénoncé la prostitution comme la forme extrême de la discrimination à l’égard des femmes et a appelé la communauté internationale à lutter contre ce fléau. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 212 Les travaux que nous avons faits sont des travaux en amont des lois et de leur amélioration. Nous avons fait des enquêtes de sociologie, des enquêtes juridiques, nous avons organisé des rencontres et des débats. Vous verrez, en particulier, que l’une des réunions les plus importantes a été organisée à Madrid en coopération avec l’Institut des femmes de Madrid. Nous avons mené surtout une action pour favoriser le débat et les échanges de vues sur cette question pour une meilleure compréhension des mécanismes qui conduisent à la prostitution et pour identifier des actions préventives. Et notre propos n’est ni d’introduire des solutions normatives ou policières, mais de sensibiliser, d’informer des différentes violations des droits de la personne humaine. Sur le chemin de notre travail qui est strictement basé sur les textes normatifs internationaux, nous avons rencontré des positions antagonistes sur le fait même de savoir si la prostitution était ou non compatible avec la dignité humaine. De la réponse dépendait l’action de l’Unesco dans les domaines de l’éducation et de la prévention. De plus elle était liée au travail plus global dans lequel nous engageait l’Acte constitutif même de notre Organisation, à savoir, la défense de la dignité et de la liberté de tous les êtres humains, à savoir l’éradication de toutes formes de violence sexuelle et donc de prostitution. Sur ce point il n’y a pas débat car quelle que soit la réponse que l’on donne aujourd’hui à ce problème, légalisation ou non, quel que soit le parti auquel on appartient, le désir de tous et de toutes est de voir disparaître la prostitution. Quand on interroge une prostituée qui défend l’idée du droit de se prostituer sur la possibilité pour son enfant de se prostituer, elle répond non. Le problème qui se pose donc est celui de la meilleure voie pour faire disparaître la prostitution et le trafic des êtres humains. C’est sur ce point qu’il y a convergence réellement. Comment venir à bout de la prostitution voilà la grande question. Voilà une pratique inscrite dans l’histoire des sociétés, dans l’histoire culturelle des sociétés, l’histoire des idées, de l’éthique et de la morale. Aujourd’hui nous remarquons que la défense du droit de se prostituer est formulée au nom de la liberté. N’est-ce pas là justement un abus de droit prévu par la Déclaration universelle des droits de l’homme elle-même dans son Article 30.1 qui limite une liberté au respect de l’ensemble des libertés. Car c’est bien l’ensemble indivisible des libertés qui répond de la condition humaine. Arrivé à cet endroit du débat, ne peut-on pas poser la question de savoir si un être humain a le droit de se prostituer.? La question n’est pas absurde. Dans d’autres domaines, nous avons répondu non à la liberté de mettre en jeu le corps humain. Dans celui de la vente d’organes, celui de la procréation artificielle. Le 9 décembre 1947, le Tribunal de Nuremberg limitait la «.liberté.» de savoir, au nom du respect de la condition humaine en condamnant les médecins nazis pour l’utilisation du corps humain à des fins de recherche. Les progrès de la biologie et ses pouvoirs immenses ont rendu nécessaire la constitution de Comités d’éthique pour contrôler cette liberté des scientifiques. Au nom de quoi.? 1. Art. 30 de la Déclaration universelle des droits de l’homme : «.Aucune disposition de la présente Déclaration ne peut être interprétée comme impliquant par un État, un groupement, un individu, un droit quelconque de se livrer à une activité ou d’accomplir un acte visant à la destruction des droits et libertés qui y sont énoncés..». La criminalité organisée et les trafics d’êtres humains 213 Cette volonté de maintenir la prostitution – du côté de la femme prostituée et du côté du client – dans le champ de la liberté sexuelle des individus pèse lourd sur le débat. La liberté étant l’élément moteur des sociétés occidentales et la référence à toute construction idéologique de la modernité. Pour reprendre l’exemple du nouveau Code pénal espagnol, le lien a été clairement énoncé par les promoteurs de ce nouveau Code. C’est la volonté de modernité qui a présidé à la rédaction des propositions concernant le commerce du sexe. Je reviens sur ce pays parce que mon interlocuteur est espagnol, parce qu’il vient d’être adopté en Espagne, une loi significative au regard de mon argumentation et parce que je connais ce pays, mais pas du tout pour le stigmatiser ou le singulariser. Il existe dans ce pays par ailleurs, de véritables politiques d’égalité en faveur des femmes et qui pour cela même aident à lutter efficacement contre les effets de la prostitution. Quand j’ai abordé la question avec les membres de la Commission juridique du Parti socialiste, rapporteur de la loi devant le Parlement, il est évident qu’il y avait dans leur démarche la volonté d’échapper au vieux code du 19e siècle alourdi par la loi franquiste, la loi dite Peligrosidad social et de proposer à la société espagnole, un code qui tienne compte d’une sexualité libérée et moderne, ce qui est positif en soi. Mais, c’est cette même volonté qui explique la dépénalisation de certaines formes de trafics du sexe. Peut-on affirmer qu’il s’agit là de modernité et de progrès.? Ce que nous savons, c’est que la prostitution n’a rien à voir avec la liberté sexuelle, que prostituer une femme ou un enfant c’est exercer une forme de domination sexuelle, une forme de violence sexuelle. Existerait-il une éthique sui generis à la prostitution. Ce qui touche à la prostitution échapperait-il à l’analyse reconnue par l’ensemble de la communauté internationale, reprise par le Plan d’Action de la 4e Conférence mondiale des femmes des Nations Unies, analyse qui a conduit dans de nombreux pays à une reconnaissance et une condamnation de la violence entre conjoints ou personnes vivant ensemble.? Et qu’il soit rémunéré ou non, un acte de violence est un acte de violence. Peut-on accepter la violence sexuelle parce qu’elle est pratiquée dans le cadre d’un échange commercial.? Vous répondrez peut-être que cela est fait avec le consentement de la femme prostituée elle-même. Peut-on être satisfait par cette réponse.? Et quand bien même elle le faisait librement, cela évacuerait-il le problème de fond, à savoir que ce droit de se prostituer lève un tabou, celui de l’achat et la vente d’une personne humaine. Cette autorisation morale rejaillit sur ceux et celles qui ne veulent pas se prostituer et dont la sexualité propre est prise dans le jeu induit par le rapport sexuel client/prostitué. Et ne pourrait-on pas avancer l’hypothèse que les crimes liés au sexe de plus en plus nombreux dans nos sociétés sont d’une certaine manière liés au fait qu’à travers la prostitution on «.chosifie.» le corps humain. Cette hypothèse qui prend le contre-pied de la position populaire qui dit souvent que la prostitution de certaines femmes protège les autres femmes du viol paraît-elle absurde.? La réponse n’est pas uniquement juridique ou policière mais bien morale et éthique. Et c’est cela que nous devons susciter : une réflexion à long terme qui vise à renouveler le débat sur la prostitution dans ses relations avec la dignité humaine et son rapport avec la sexualité afin de répondre aux questions angoissées que nous pose le monde. Il faut prendre du recul et cesser de considérer que notre tâche est uniquement le redressement moral et l’amélioration des conditions de vie des êtres humains prostitués. Rester sur cette ligne Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 214 c’est reproduire le discours des détracteurs de la Convention de 1949 et tout le débat autour de son Article 6, c’est-à-dire, ceux qui voulaient réduire le problème de la prostitution à un problème de sauvegarde de l’hygiène des sociétés. Il faut savoir que c’est cette opinion qui malgré tout domine aujourd’hui puisque la plus grande parties des aides publiques est affectée à l’aide des femmes prostituées pour lutter contre le Sida. Les militants autour de Joséphine Butler à la fin du XIXe siècle ont appelé le trafic des femmes, la traite des blanches, en référence à l’esclavage et à la traite des noirs. Ce n’est pas seulement un mimétisme linguistique, c’est que la lutte contre la traite des êtres humains en Angleterre est née dans le même terreau intellectuel et philosophique que la lutte contre l’esclavage, et ce sont souvent les mêmes personnes qui ont lutté contre l’esclavage dans le monde qui ont lutté contre la traite des êtres humains. Il faut souligner cette parenté, car je suis convaincue que dans le cas de la prostitution, nous devons avoir comme objectif la prise de conscience qui rejettera la prostitution des êtres humains comme elle a rejeté l’esclavage. Sans cette prise de conscience, il n’y a pas de chance d’espérer la disparition de la vente des êtres humains. Aucune mesure sociale, juridique, policière ne fera disparaître cette pratique. Dans une rencontre à Paris, un participant a fait remarquer fort à propos que «.la réinsertion des femmes prostituées : c’est vouloir vider une baignoire avec une cuillère à café, quand les robinets sont largement ouverts.». Et de plus, disait-il, «.il faut savoir que ceux qui remplissent la baignoire sont généralement considérés comme des honnêtes gens..» Il faut fermer les robinets, vous l’aurez compris. Est-ce une utopie de croire que les mentalités peuvent changer.? Qu’un jour on refusera la prostitution avec la même énergie que l’on refuse l’esclavage.? Une Association française, le NID, a fait une enquête sur la prostitution auprès des jeunes de 15 à 18 ans. Leurs réponses sur ce point sont encourageantes. Pour eux, la prostitution doit disparaître mais ne peut disparaître. C’est sur ce désir des jeunes de voir disparaître la prostitution que nous fondons notre action. Nous voulons par là les sortir de leur pessimisme et les aider à concrétiser l’espoir qu’elle pourrait disparaître un jour. N’est-ce pas là notre tâche pour le présent et notre tâche pour les générations futures.? Mettre dès à présent en chantier l’utopie d’une société libre de toutes les formes de prostitution.? Nous devons ouvrir ce débat, et je crois qu’il est urgent de l’ouvrir et dans certains pays c’est d’autant plus urgent que la prostitution est cachée. Les femmes prostituées ont une vie d’esclave. Esclave du bordel, de la police, de la rue, de la famille. C’est donc là un problème qu’il faut poser au niveau du public. La première action est de rompre la fatalité qui pèse sur la prostitution qui s’exprime dans cette pensée populaire qui dit qu’il y a toujours eu des prostituées et qu’il y en aura toujours. Dans l’action pour la défense des droits de la personne humaine, le principe de base, le moteur, c’est qu’il ne faut pas «.faire avec.». Il ne faut pas accepter des situations inacceptables et déduire leur conformité avec l’humain du fait qu’elles existent. Je comprends très bien l’inquiétude de ceux qui préfèrent rationaliser une situation dominante et donc s’y soumettre plutôt que se lancer dans un combat dont on ne peut évaluer les résultats en termes La criminalité organisée et les trafics d’êtres humains 215 concrets. Il y a une situation de fait, il y a des femmes prostituées. Plutôt que de lutter à perte de temps pour la disparition de la prostitution, donnons le droit et les moyens aux femmes de se défendre, des droits pour s’organiser comme à n’importe quelle minorité. Voilà les arguments et les prises de positions de certains. Voilà ce qui préside à l’adoption de certaines lois sur la prostitution comme sur la drogue d’ailleurs, à la faveur de l’amalgame de droit et de liberté. Dans cette conception de donner des droits particuliers à chacun au lieu d’œuvrer pour que chacun ait accès sans discrimination au droit commun à tous, on peut, soit dit en passant, noter l’emprise de plus en plus grande de cette démarche du politiquement correct qui est de donner des droits différents à tout le monde, c’est-à-dire de donner des droits à toutes les minorités, qui représente bien cette approche post-moderne en jeu dans la réponse des néo-libéraux. Celle qui remet en cause l’universalité de la loi et qui conduit ainsi à un fractionnement des sociétés sans pour autant augmenter le seuil de respect des minorités. Aux États-Unis chaque minorité a des droits, les gros, les homosexuels, les noirs, les féministes, les latino-américains etc. C’est dans cette conception que s’inscrivent les législations qui visent à donner des droits particuliers aux femmes prostituées. Vous m’avez demandé si j’ai une position personnelle. En tant que fonctionnaire internationale je n’ai pas de position personnelle. Comme je l’ai déjà dit, notre action à l’Unesco, s’inscrit dans le cadre de la coopération internationale et nous avons eu à réfléchir à cette question pour une meilleure application de la Convention de 1949. Je vous ai présenté les deux positions sur la question de savoir s’il faut ou non légaliser la prostitution. L’Unesco ne situe pas son action dans le domaine normatif qui n’est pas de sa compétence ici. Notre Organisation par l’éducation et l’information vise à la disparition de la prostitution, et sur ce point, tout le monde est d’accord. Sur cette issue, les deux courants, pour ou contre la légalisation, sont pour la disparition de la prostitution qui est une des situations les plus difficiles et les plus humiliantes pour les êtres humains non seulement pour la femme mais également pour le client aussi, – le grand absent de nos discussions – dont on ne parle jamais sinon pas assez dans les débats sur la prostitution. Avant de terminer, je souhaiterais lever l’équivoque qui aurait pu s’installer par mes références constantes à la morale. Au mot de «.morale.», je préfère d’ailleurs celui d’éthique afin de mieux situer notre action à long terme. Il existe depuis toujours, un courant moraliste qui veut faire interdire la prostitution comme non conforme à une morale soit religieuse, soit sociale. Dan certains pays, peu nombreux il est vrai, on punit de mort la prostituée par lapidation ou pendaison. Ce que nous essayons de dégager n’est pas une position moraliste mais éthique. Nous tentons de montrer que ce n’est pas seulement la morale d’une culture, d’une classe sociale qui est touchée par la prostitution. Il y va de l’intégrité des êtres humains et de notre définition de l’Homme. Aujourd’hui dans la prostitution on sait qu’il existe des pratiques qui sont proches de ce que l’on appelle le barbarisme. Le barbarisme est justement ce qui met en péril les sociétés dans leur ensemble. Le commerce du sexe peut mettre en péril l’espèce humaine parce qu’il est la voie ouverte à des pratiques incompatibles avec notre définition de l’humain. Nous savons que l’on pratique des exécutions sommaires de prostituées qui sont malades du Sida, nous connaissons également l’existence de films pornographiques où sont filmés en Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 216 direct le suicide d’enfants poussés à cette extrémité par les pratiques insoutenables utilisées pour le tournage de ces films. On pourrait multiplier les exemples. Nous ne sommes plus dans des catégories acceptables de pratiques humaines et c’est pour essayer de répondre à ces formes de barbarisme qui naissent au sein des sociétés les plus riches qu’il faut ouvrir un débat sur ce qui est compatible ou non avec la dignité humaine. Nous avons une histoire, un bagage civilisationnel, à nous de le défendre. Que des femmes et des enfants soient prostitués aux yeux et aux vues de tout le monde au cœur des villes les plus développées pose à tous et toutes un problème de conscience – si ce mot signifie encore quelque chose dans le paysage post-moderne qui préside à la naissance de ces nouvelles lois dites modernes –. Enfin, pour conclure ce rapide panorama sur les problèmes posés par la prostitution, je souhaiterais profiter de la composition si spécifique de cet auditoire, pour avancer une hypothèse qui concerne l’organisation et les stratégies d’action dans le trafic des femmes et des enfants dans le monde. Cette stratégie, dont je vais vous parler afin de recueillir vos commentaires, remonterait à une époque que je situerais approximativement aux premières discussions des accords de Schengen. C’est dans la perspective de l’harmonisation des législations européennes sur le trafic et la prostitution que s’est organisé et développé le mouvement pro-prostitutionnel. Il existe en Europe des régimes juridiques départagés par la ratification à la Convention de 1949. Dans le cadre de la libre circulation des personnes qui est aujourd’hui le régime commun européen, ne faudra-t-il pas harmoniser les législations.? Comment concilier les politiques antagonistes sur la drogue d’une part, mais peut-être davantage sur la prostitution puisque, en l’occurrence, les marchandises visées ici sont des personnes. Il fallait donc vite introduire au niveau européen, l’idée de la liberté et de la légalité de la prostitution. Pour cela faire porter l’idée par les «.intéressées.» elles-mêmes, par les femmes prostituées. Cette stratégie consisterait à laisser survivre dans les grandes capitales, quelques femmes prostituées, peu nombreuses, qui exercent «.librement.» la prostitution, librement, c’est-à-dire libres de toutes formes de proxénétisme, et qui sont la vitrine de cette prostitution dite libre. Ce sont des femmes qui sont instruites, d’origine occidentale en général et qui se prostituent «.librement.». Il me semble qu’elles servent d’écran à un trafic très dur dont on trouve parfois les preuves sur les corps des prostituées de plus en plus souvent originaires des pays de l’Europe de l’Est, tuées, abandonnées sur les places, dans les décharges, sans papiers à Rome, Berlin, Budapest... Pourquoi je pense cela.? En 1975 dans ce grand moment de la lutte des femmes, lors de la manifestation à Paris du Mouvement de libération des femmes, le MLF, le cortège était ouvert par un groupe des femmes prostituées. Les femmes prostituées ont défilé à Paris en 1975 pour réclamer la liberté de se prostituer. Elles avaient à leur tête, Ulla qui a été un porte-drapeau de la liberté de se prostituer, 4 ans après, Ulla révélait que c’était les proxénètes qui les avaient envoyées défiler. Ne sommes nous pas, de nouveau, devant une stratégie une stratégie d’autant bien reçue qu’elle va au-devant d’une société où les notions de morale et d’éthique sont mal vues où la notion de liberté a pris le pas sur celles définies par la Déclaration des droits de l’homme, et où l’idée de la prostitution libre conforte formidablement la sexualité masculine La criminalité organisée et les trafics d’êtres humains 217 dans ce qu’elle a de dominateur et de prédateur.? Aujourd’hui on peut penser que nous sommes là devant une nouvelle stratégie du crime organisé qui permet à une minorité de prostituées de s’exprimer, de défendre de bonne foi une forme de vie que les femmes choisiraient. Je ne voudrais pas que vous preniez ces propos pour un songe creux qui repousserait à une société idéale et lointaine le règlement du vécu des femmes prostituées. C’est ici et maintenant que nous devons agir. Il nous faut mener de front une action concrète à court terme contre la prostitution et ouvrir un débat sur le fond. Sur le court terme, maintenant et ici, il y a quelques mesures à prendre, modestes mais utiles et sans doute qui entraîneraient un changement ou du moins qui montreraient la volonté d’agir des États. Tout d’abord, que la prostitution soit considérée, à l’instar de la drogue et du terrorisme international, comme un véritable problème. Je ne suis pas sûre qu’aujourd’hui au niveau des gouvernements, des polices internationales, on considère la prostitution comme un véritable problème. Pourquoi ce laxisme et cette tolérance.? Parce qu’on considère que la prostitution est inévitable. On peut voir ici comme le problème se mord la queue et comme le silence sur les questions de fond a des conséquences sur les questions ponctuelles et pratiques. Relevons néanmoins au niveau de l’Union européenne une mobilisation accrue par les scandales révélés en Belgique, notamment dans les réseaux de pédophilie, et manifestée dans le discours du Commissaire à la Justice de l’Union, au Congrès mondial de Stockholm contre l’exploitation sexuelle des enfants (septembre 1996), son discours énergique, même s’il ne traite que des enfants, est le signe d’une volonté nouvelle. Me Anita Gradin a informé la Conférence que lors d’une réunion informelle à Dublin en septembre 1996, les ministres de la Justice et des Affaires intérieures de l’Union Européenne se sont mis d’accord sur l’élargissement du mandat de l’unité drogue d’Europol qui assiste les forces de police dans les affaires de criminalité transfrontière à la traite des enfants et des femmes. Les ministres ont également décidé de créer un répertoire de tous les experts de l’Union spécialisés dans la lutte contre le crime organisé, la criminalité liée à la drogue et la traite des êtres humains dans tous les États membres. Deuxièmement, savoir et prendre des dispositions sur le fait que le trafic des êtres humains, des enfants et des femmes obéit à un schéma classique d’entreprise et connaît des entreprises de tailles variables qui mettent en jeu avec plus ou moins de force des relations de pouvoirs dans les pays concernés. La taille supérieure met en jeu des partenaires qui souvent sont des partenaires politiques, économiques de très haut niveau et qui touchent de très près les pôles de décision dans le pays. La communauté internationale devrait mettre devant leurs responsabilités et leurs engagements les États concernés. Je dis engagements, et cela sans penser uniquement à la Convention de 1949, car ainsi que je l’ai montré, les pratiques du trafic des êtres humains regroupent des situations et des faits que les pays condamnent du fait même d’être membres de l’Organisation des Nations Unies. Autre proposition qui est une demande ancienne et constante des militants des droits de la personne humaine : nous savons que majoritairement les femmes prostituées étrangères à leur lieu de prostitution viennent de Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 218 l’immigration clandestine. Ne devrait-on pas donner un statut de «.réfugiées.» aux femmes qui sont victimes du trafic des êtres humains.? Nous savons que le fait d’être dans une situation irrégulière vis-à-vis des pays d’accueil maintient et renforce les trafics au sein de l’immigration clandestine. Comment une femme victime du trafic peut-elle s’adresser à la police alors qu’elle est irrégulièrement rentrée dans le pays.? Le Canada vient d’adopter cette mesure. Une femme qui a été l’objet d’un trafic pourra aller à la police et dire qu’elle est l’objet d’un trafic sans prendre le risque d’être ramenée à la frontière. Voilà des actions concrètes, de l’ordre du faisable, à la portée des pouvoirs publics et propres à donner un début d’exécution aux déclarations si rhétoriques contre le trafic des êtres humains. La nécessité d’un débat de fond sur cette question qui aiderait à une prise de conscience de ce problème, n’exclut pas la nécessité de la répression du trafic des femmes et de l’application de la loi telle qu’elle est, même si nous pensons qu’elle n’est pas suffisante. Enfin, et surtout, dans un grand nombre de pays qui sont représentés dans cette salle, il y a, nous l’avons vu, des législations qui pèsent très lourdement sur les femmes prostituées. Il faut dépénaliser la prostitution. Ne savons-nous pas que dans les pays où la prostitution est un délit cela accroît le pouvoir discrétionnaire de la police et des trafiquants, compte tenu très souvent des liens entre la police et le milieu et soumet la prostituée à un arbitraire sans limite. Mais aussi, il faut sortir la prostituée des formes humiliantes dans lesquelles elles se trouvent du fait même des lois et règlements en vigueur. Cela est de l’ordre du faisable et plus aisé à gérer qu’un changement des mentalités comme on le dit souvent devant des problèmes difficiles, ou que la disparition des causes de la prostitution, c’est-à-dire la pauvreté et la marginalité sociale comme on dit encore. Nous ne devons pas attendre l’avènement d’une société idéale pour agir. Il y aura toujours de la pauvreté, de la violence. Faut-il pour cela accepter la prostitution des femmes et des enfants comme une forme économique acceptable de vivre.? Notre action doit être inscrite dans la réalité et en même temps, avec sérieux et conviction ouvrir un débat sur le fond, ce débat fait partie intégrante de l’action que nous devons mener ensemble pour la répression du crime organisé et le changement des mentalités. La répression seule ne permettra pas d’éradiquer la prostitution. Et sa légalisation encore moins. Je vous remercie. La criminalité organisée et les trafics d’êtres humains 219 Summary Organised crime and human slavery Wassyla Tamzali The question of women prostitution remains to date in some countries. Too often, prostitution still remains seen as a sin of society. The difference between prostitution and human slavery is often made. This distinction appeared in the end of the 19th century with the development of an abolitionist movement which was set up in order to fight against the regulation of prostitution by the states. This movement found its outcome with the signature or the United Nations Convention in 1949 concerning the fight against slavery of women and children. All shapes and forms of activities consisting in living off the proceeds of prostitution and of hiring people for the purpose of prostitution are made illegal by this international text. That intention of protection of the prostitutes from legal charges could apparently by seen as an improvement. It however appears that the convention makes a distinction between forced prostitution (which is illegal) and voluntary prostitution (which is tolerated). In practice, this is a distinction which is not so easily made. The distinction may look artificial to some people or it may be seen as the source of probationary problems. Whatever, it is the occasion of some thinking about possible conciliatory measures between two concepts of prostitution. On one side there is the right for women to use her own body as she thinks fit, and on the other side, the idea that prostitution is always a form of torture or violence against the woman. To lean on one or the other side means the adoption of totally different opinions on what should the legislation be, or should prostitution be seen as a legitimate activity (Spain or Holland). This distinction must be seen as food for thought on the right of the woman of freedom of her own body. Putting this social uncertainty about prostitution to use is an easy task for organised crime. It’s only concern being profit, it can have an underground influence on one or the other idea. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 220 Resumen La criminalidad organizada y el trafico de seres humanos Wassyla Tamzali El tema de la prostitución de mujeres continúa absolutamente abierto en algunos países. En efecto, la prostitución es en demasiados casos considerada como un pecado de la sociedad. La distinción entre prostitución y trata de seres humanos es comúnmente aplicada. Su origen remonta a fines del siglo XIX con el desarrollo de un movimiento abolicionista internacional organizado para combatir la reglamentación de la prostitución por el Estado. Esta corriente desembocará en la firma de la Convención de las Naciones Unidas en 1949 relativa a la lucha contra la trata de mujeres y de niños. Este texto internacional prohibe todas las formas de proxenetismo y de contrato con fines de prostitución. A primera vista, esta voluntad de evitar persecuciones penales a las prostitutas podría verse como un progreso. Sin embargo, es forzoso constatar que la Convención realiza una distinción entre la prostitución forzada (ilegal) y la prostitución voluntaria (tolerada), distinción que es sin embargo difícil de establecer. Esta diferenciación puede parecer artificial, capaz de suscitar reales dificultades de orden probatorio. En todo caso, nos enfrenta al cuestionamiento relativo a la difícil conciliación de las dos opiniones que se imponen en la historia de la reflexión sobre la prostitución. Por un lado, estaría el derecho de la mujer a disponer libremente de su cuerpo, y por otro, la consideración de que la prostitución constituye siempre una tortura o una violencia contra la mujer. Adoptar uno u otro de estos puntos de vista conduce a una juicio diametralmente opuesto sobre las legislaciones que asimilan la prostitución libre a una actividad legítima (España, Holanda). Esta distinción, más allá de la dificultad probatoria que contiene, nos interpela sobre el derecho de la mujer a disponer libremente de su cuerpo. En este contexto, el crimen organizado no tiene ninguna dificultad para sacar partido de esta incertitud del posicionamiento social frente a la prostitución. En función de sus intereses, puede llegar a ser un factor de influencia subrepticia sobra la adopción de tal o tal postura. La criminalité organisée et les trafics d’êtres humains 221 Table ronde – débat sur la coopération policière en matière de criminalité organisée Une criminalité fortement institutionnalisée Raymond Kendall, secrétaire général d’OIPC-Interpol Une criminalité fortement institutionnalisée L’évolution du niveau de vie montre un clivage en progression constante entre les régions du centre et les régions périphériques, ce qui fait également progresser le flux des trafics illicites entre ces mêmes régions en quête de marchés : c’est le cas des stupéfiants, des armes interdites ou soumises à embargo, des femmes et des mineurs commercialisés à des fins de prostitution ou de pornographie, des marchandises de marque contrefaites, de l’argent d’origine illicite. En raison de l’ampleur colossale des profits tirés de ces commerces illicites, le crime organisé a de plus en plus tendance à contrôler directement sur place chaque étape de ces activités, jusqu’à s’installer sur les territoires du transit de la «.marchandise.», de la vente au détail, ainsi que de la récolte et du blanchiment du produit de ces commerces. Le caractère international de ces trafics illicites, notamment celui de la drogue, dont le crime organisé tire la grande majorité de ses profits, n’est plus à démontrer : par exemple, le 20 septembre 1992, l’opération de police dénommée «.Green ice.» a démantelé un réseau de trafiquants installés dans plusieurs pays, issu d’une conspiration entre le cartel de Cali et la mafia sicilienne. En outre, dans les régions périphériques de plus en plus exposées aux conséquences d’une récession économique, le chômage fournit de nouvelles ressources humaines aux organisations criminelles et, d’autre part, les troubles sociaux et politiques engendrent des organisations extrémistes dont la stratégie comprend tant des actes de terrorisme souvent perpétrés en territoire étranger que l’acquisition d’armes en liaison avec le commerce de stupéfiants. En même temps, cette époque est marquée par des facteurs colossaux de mobilité incontrôlée : – d’une part, les pays de l’Est qui ont vécu la fin d’un contrôle policier à caractère politique.; – d’autre part, à l’Ouest, le grand marché européen permet la réalisation de la liberté de circulation des personnes, des marchandises, des capitaux et des services. De ces libertés, la criminalité internationale en aura fait très large usage bien avant le 1er janvier 1993. La télévision, les films «.thrillers.» et les médias se sont à tel point emparés du phénomène «.crime organisé.» que le citoyen se trouve en difficulté lorsqu’il s’agit pour lui de tracer une limite entre la fiction et la réalité. Voici quelques faits concrets qui peuvent donner une idée d’une réalité en grande partie submergée et, donc, inconnue : – depuis des années, les cartels de la cocaïne en Colombie offrent publiquement une prime de 1000 $ pour chaque policier tué.; – entre le mois de mai et le mois de juin 1993, la mafia sicilienne a assassiné à Palerme, en deux attentats différents, les deux juges d’instruction responsables des enquêtes les plus importantes contre le crime organisé international. Ces éléments qui ne représentent que des épisodes isolés dans le cadre de la lutte que le crime organisé livre à l’État, permettent au moins de fixer un fait fondamental : celui de la toute-puissance des organisations criminelles dans le monde moderne et sur tous les continents. Les attentats systématiques contre les forces de police ou contre les personnes les plus protégées de l’État, démontrent que les organisations criminelles ont acquis une telle force qu’il leur est désormais consenti de déclarer et de mener une guerre aux institutions. D’où les organisations criminelles tiennent-elles leur pouvoir.? Simplement grâce à leur professionnalisme dans le contrôle des trafics criminels au niveau international, notamment dans le cas du trafic des stupéfiants. Il est évident qu’une organisation criminelle disposant d’une masse d’argent si importante est désormais en mesure de s’emparer du contrôle de territoires entiers, tout comme des secteurs de l’économie illégale et légale ainsi que de secteurs de l’administration publique. Le pouvoir corrupteur d’une telle masse d’argent dans les mains d’une organisation criminelle est incommensurable : il permet à l’ensemble des organisations criminelles de se mettre en guerre contre l’État. Le crime organisé, comme cela a déjà été dit, est de plus en plus concentré sur l’exploitation du trafic international de stupéfiants, ce qui a eu pour effet d’accumuler dans les mains des organisations criminelles une masse colossale de biens patrimoniaux acquis, dans une première phase, en espèces. Ce phénomène constitue à la fois la force et le talon d’Achille de ces organisations, dans la mesure où, cette masse d’argent peut être utilisée afin de réaliser la mise en œuvre d’un pouvoir de coercition facilitant l’infiltration des structures légales de l’économie et de l’administration publique, de même que la corruption des personnes privées et des fonctionnaires publics exercée par le biais du chantage ou de la pure violence. Le talon d’Achille du phénomène cité ci-dessus est en revanche représenté par la nécessité de faire appel à des services logistiques externes à l’organisation pour le déguisement, la gestion et la légalisation de ces masses d’argent. Voilà le terrain où se rencontrent les trois catégories traditionnelles de la criminalité. C’est dans l’économie souterraine que le crime organisé recherche ses connivences et c’est bien là que les autorités judiciaires et de police peuvent endiguer son expansion, à condition de s’assurer de la collaboration ouverte de l’économie privée, notamment pour lutter contre l’anonymat. En Europe, comme sur toute la planète, la criminalité organisée a été à même de s’assurer de l’exercice des quatre libertés fondamentales de circulation : Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 226 – celle des personnes (boss et employés de l’organisation).; – celle des marchandises (stupéfiants, papiers-valeurs falsifiés ou volés, marchandises contrefaites, armes, femmes et enfants prostitués).; – celle des capitaux (le produit des activités criminelles ainsi que les revenus de leur légalisation).; – celle des services (transport, armement, gestion de capitaux, etc.). La mare protectrice dans laquelle se noie l’exercice de ces libertés de circulation est constituée par l’anonymat dont jouissent également de vastes secteurs de l’économie légale afin d’assurer l’impunité suite à la commission d’infractions à caractère fiscal ou liées au droit de change. Criminalité organisée, économie légale et illégale Pour mieux comprendre le phénomène de la «.criminalité organisée.», il ne suffit pas de l’examiner en fonction des milieux politiques, sociaux et culturels dans lesquels il se développe, mais également en l’intégrant dans son contexte économique. L’analyse comparative peut être effectuée en adoptant plusieurs points de vue : d’abord parce que les organisations criminelles essaient de s’infiltrer dans les institutions de l’économie légale, ensuite parce que l’économie illégale constitue un des terrains de manœuvre d’élection de la criminalité organisée, soit pour l’accomplissement de ses infractions, soit pour en cacher les produits. Liens entre la criminalité organisée et la criminalité d’affaires La criminalité organisée nécessite les services de délinquants économiques avant tout pour cacher les produits de ses infractions. En effet, aujourd’hui encore, il est loisible de croire que la criminalité organisée traditionnelle ne dispose pas de connaissances suffisantes en matière économique afin de lui assurer une utilisation optimale des institutions économiques d’un pays, raison pour laquelle, en général, elle a dû faire appel à des personnes agissant en dehors de ses milieux traditionnels, en s’adressant aux milieux de la criminalité d’affaires. Une telle pratique s’est vérifiée notamment afin de cacher les produits des infractions en assurant le blanchiment d’argent. Dans ce but, la criminalité organisée nécessite également de la collaboration afin d’établir de faux documents comptables susceptibles d’entraver l’activité de recherche qui incombe aux services publics, notamment aux services des autorités fiscales et douanières. Une criminalité fortement institutionnalisée 227 Infiltrations dans l’économie légale Les enquêtes judiciaires menées pour éclaircir les activités illicites commises dans la gestion même des groupes bancaires internationaux ont prouvé l’existence de liens entre le délinquant d’affaires et la criminalité organisée traditionnelle. Il suffit de rappeler le résultat des enquêtes judiciaires relatives aux groupes bancaires italo-américains à la tête desquels se trouvait Michele Sindona, ainsi qu’au groupe bancaire international de la Bank of credit and commerce international (BCCI). À côté de ces résultats judiciaires, on ne doit pas oublier le résultat des enquêtes judiciaires conduites par le Ministère public de Milan en 1992/93 qui ont révélé que des groupes d’entreprises de niveau national avaient payé des sommes importantes aux organisations criminelles des régions méridionales de l’Italie, dans le but de s’assurer l’attribution des grands travaux publics, ces mêmes organisations criminelles ayant accaparé le contrôle du système d’offre publique régi par le pouvoir public régional. Les moyens de lutte Le crime organisé agit sur le plan international et en fonction de la situation économique et sociale d’une population bien déterminée.; il faut donc en conclure qu’un phénomène global nécessite une réponse globale et qu’un phénomène international nécessite une réponse d’envergure internationale. Sur le plan policier, 176 pays ont décidé de mener cette lutte contre la criminalité organisée en adhérant à l’organisation internationale de police criminelle connue depuis 1956 sous le nom d’Interpol. Le secrétariat général d’Interpol, conscient de la menace que constitue la criminalité organisée, a pris l’initiative du premier colloque international sur la criminalité organisée en mai 1988. Il n’existait pas alors de définition universellement admise de la «.criminalité organisée.», et il n’en existe toujours pas. Les diverses définitions proposées, à des moments différents et par des auteurs différents, ont toujours soulevé des problèmes. Au cours du premier colloque d’Interpol sur la criminalité organisée, les participants ont finalement décidé d’adopter la définition suivante pour servir de base à leurs travaux : «.Toute association ou tout groupement de personnes se livrant à une activité illicite continue dont le premier but est de réaliser des profits sans souci des frontières nationales.». Au secrétariat général d’Interpol, nous sommes pleinement conscients que ces associations, traditionnelles ou non, représentent l’un des plus graves défis lancés à la police. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 228 Nous avons donc réaffirmé notre capacité à fournir des outils aux 176 États membres et nous nous y sommes préparés en apportant la contribution précieuse de nos ressources humaines et de nos moyens techniques. Aujourd’hui, le pouvoir du crime organisé atteint chaque couche de notre société. C’est une maladie qui contamine tout ce qui entre en contact avec elle. C’est un affront fait à tout citoyen respectueux des lois. Il est temps à présent pour nos gouvernements et nos services judiciaires d’en prendre note et, plus encore, de passer à l’action. Le secrétariat général d’Interpol est prêt à mettre en œuvre tous les moyens dont il dispose pour y parvenir. Tout d’abord, il possède le matériel le plus moderne en termes de télécommunications et d’informatique. Nous sommes fiers de dire que le secrétariat général d’Interpol peut offrir des communications directes, rapides et sûres entre les services de police des pays membres et mettre à leur disposition une base de données internationale informatisée. Les éléments essentiels d’une coopération policière internationale efficace se trouvent dans le dispositif juridique et pratique qui assure la rapidité de la réponse, la confiance (et donc la sécurité) et une bonne compréhension des besoins et des capacités. Le dispositif juridique, dérivant de traités et de conventions, est constamment amélioré par de nombreux États faisant preuve de leur volonté de fournir les instruments législatifs permettant de traiter de façon satisfaisante des affaires internationales. Il est essentiel, cependant, d’établir de bonnes habitudes de travail dans un esprit de coopération mutuelle.; on peut réaliser de grands progrès dans ce domaine par une action au niveau de la police, sans que l’intervention des gouvernements ne soit nécessaire. Interpol est un lieu de dialogue où se rencontrent les chefs de police, les hauts responsables, parfois les ministres, au cours des différentes réunions, et notamment la session annuelle de l’assemblée générale. La criminalité organisée ne se laissera jamais arrêter par les frontières nationales. Les techniques et les moyens de transport modernes nous permettent de communiquer avec d’autres régions du monde et de nous y rendre. Les organisations criminelles bénéficient du même avantage. Tout indique qu’elles coopèrent par-delà les frontières nationales. L’adoption d’une législation plus stricte et plus efficace, dans chaque pays, et l’entraide et la coopération internationale sont les outils essentiels de la lutte contre la criminalité organisée transnationale. Une criminalité fortement institutionnalisée 229 Summary An institutional criminality Raymond Kendall The threat that organised crime imposes on our societies may be assessed from two acknowledgements. First and foremost, the strong institutionalisation of crime. This traffic has a strong tendency to spread internationally, all the more easily since the omnipresent police control no longer exists in the eastern countries and that the perspective of a great European market, based on the free circulation of people, goods and capital, is building up in the West. The criminal organisations mean to make war on the States and their representatives, through violent actions or an intense corruptive strength of persuasion. Secondly, this traffic creates considerable masses of money providing a real underground economy. This financial godsend helps to generate bonds between these criminal organisations and business crime, as it is so tempting for them to infiltrate the legal economy. To try and face this very real threat, a global strategy must be elaborated. By its world-wide foundation (176 countries), the ICPO can help implement such a strategy. Towards this aim, it can provide the members States with direct and performant means of communication, as well as the access to an international computer database. It is willing to be a media for dialogue to the benefit of the chiefs of police and the politicians responsible for security. Still, the improvement of co-operation demands the adhesion of each country, which will have to implement a severe legislation and participate actively to the mutual assistance in criminal matters. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 230 Resumen Una criminalidad muy organizada Raymond Kendall La estimación de la amenaza que el crimen organizado representa para nuestras sociedades provocada por el crimen organizado puede articularse sobre dos constataciones : En primer lugar, la alta institucionalización de la criminalidad. Los tráficos ilegales tienen una gran propensión a internacionalizarse, cada vez con mayor facilidad gracias a la desaparición del omnipresente control policial en el ex bloque del Este, y a la perspectiva en Occidente de la puesta en marcha de un gran mercado europeo basado en la libre circulación de personas, bienes y capitales. Las organizaciones criminales libran una verdadera guerra a los Estados y a sus representantes, tanto a través de acciones violentas como de una intensa fuerza de persuasión corruptora. En segundo lugar, el hecho de que estos tráficos generen sumas de dinero considerables alimenta una verdadera economía subterránea. Este maná financiero propicia las relaciones entre las organizaciones criminales y la criminalidad de negocios, ya que para las primeras es muy tentador infiltrar la economía legal. Para enfrentar esta amenaza real, es necesario elaborar una estrategia global. Al contar con una representación planetaria (176 países), la OIPC puede ayudar a poner en práctica tal estrategia. Con este fin, esta capacitada para suministrar medios de comunicación directos y eficientes, así como para poner a disposición de los estados miembros una base de datos internacional informatizada. Tiene por misión constituirse en un lugar de diálogo para los jefes de policía y los responsables políticos de la seguridad. Sin embargo, el desarrollo de la cooperación necesita la adhesión de cada país, que deberá poner en práctica una legislación severa y bien adaptada, y participar activamente en la ayuda mutua represiva internacional. Une criminalité fortement institutionnalisée 231 La création d’Europol et ses fonctions dans la lutte internationale contre la criminalité organisée Jürgen Storbeck, coordonateur de l’UDE-Europol contre la La criminalité créationorganisée d’Europol et ses fonctions dans la lutte internationale Introduction La création d’Europol a été précédée de travaux dans le cadre du groupe de Trevi. La proposition du chancelier fédéral Helmut Kohl de créer un service européen de police criminelle a accéléré ces travaux préparatoires et s’est concrétisée par la décision, prise dans le cadre du traité de Maastricht, de créer Europol. Europol doit être un office européen de police de l’Union Européenne ayant pour but d’améliorer la coopération au sein de l’Union en matière de répression de la criminalité organisée et internationale. Pour arriver à ce but, nous avons d’abord identifié et évalué les problèmes et les déficits de la lutte internationale contre la criminalité. Ce travail a été effectué lors des études préparatoires susmentionnées desquelles il ressort les points suivants. Dans le cadre d’enquêtes menées par les autorités des différents États, l’échange d’informations entre la police compétente d’un pays et les autorités chargées de l’action répressive à l’étranger est extrêmement lent – y compris entre les États membres de l’Union Européenne – et ne correspond plus aux besoins modernes de la lutte contre la criminalité. En outre, il est presque impossible d’obtenir de la part des autres États l’ensemble des informations pertinentes. Ceci est surtout vrai pour des informations à caractère confidentiel. En outre, cet échange d’information ne fonctionne qu’entre les services de police judiciaire, de gendarmerie ou de douanes des différents États. La coopération internationale en matière de police et de douane et leurs différents systèmes d’information internationaux comme Interpol, le SIS, le CIS, Teledrug ne font pas l’objet d’une harmonisation suffisamment poussée tant techniquement que dans leur contenu. Bien qu’il existe dans tous les États membres de l’Union Européenne de vastes fichiers recensant les crimes et les délits, leurs auteurs ainsi que leur groupes criminels d’appartenance, ces recueils d’informations ne sont pas utilisés de manière suffisamment efficace. En particulier, ils ne sont pas l’objet d’une analyse de niveau international en vue de cerner les organisations criminelles les plus importantes, leurs structures et leurs activités. La police et les autres autorités chargées de la répression de la criminalité disposent de beaucoup moins de moyens, tant sur le plan financier, technique ou des effectifs, en comparaison avec ceux des criminels organisés à l’échelon international. Le crime organisé ne fait pas suffisamment l’objet d’enquêtes menées à l’échelon international. Les enquêtes sur les organisations criminelles internationales sont menées de manière parallèle au niveau national des différents pays et ne sont pas coordonnées. Il n’existe pas encore de base commune pour lutter contre la criminalité, compte tenu des différences parfois importantes que présentent le droit pénal, la procédure pénale ainsi que l’organisation et les pouvoirs de police des 15 États membres de l’Union Européenne. Dans certains cas, il n’existe pas encore de dispositions pénales sanctionnant certaines formes nouvelles et modernes de criminalité. Outre ces problèmes de coopération internationale de police et les besoins et attentes respectifs des services répressifs nationaux, il y a d’autres principes qui doivent être pris en considération avant d’établir un office central européen de police : La souveraineté des pays membres et de leurs services répressifs doit être respectée comme principe supérieur. En outre, toute activité d’Europol est soumise au principe de la subsidiarité, c’est-à-dire que l’intervention d’Europol n’est prévue et autorisée que si les pays membres ne sont pas en mesure d’accomplir les mêmes tâches. Europol ayant pour mission première la collecte, la conservation, l’analyse et la transmission de données à caractère personnel, les systèmes juridiques de presque tous les États membres exigent que soit adoptée la convention Europol qui, après ratification, fera partie intégrante du droit interne. Afin de pouvoir, dans certains domaines, lutter dès avant la ratification de la convention contre la criminalité organisée au niveau international – notamment en matière de drogue – il a été convenu d’adopter, en 1993, une solution provisoire : l’Unité Drogue d’Europol (UDE). L’unité drogue d’Europol (UDE) Hormis la justice, les autorités nationales des États membres compétentes en matière d’action répressive – c’est-à-dire essentiellement, la police, la gendarmerie et les douanes – disposent de bureaux de liaison auprès d’Europol, où des officiers de liaison ont accès aux différents – et nombreux – systèmes nationaux d’information. En interrogeant ces systèmes ainsi que d’autres sources d’information par le biais des unités nationales Europol, ces officiers de liaison peuvent, dans le cadre d’enquêtes concrètes, répondre en Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 234 peu de temps à des démarches émanant des services nationaux des États membres ainsi qu’à des demandes de nature générale. À cet égard, les officiers de liaison doivent examiner dans chaque cas particulier si, et dans quelle mesure, ils peuvent répondre à ces demandes, compte tenu du droit interne de leur pays et des conventions et traités bilatéraux existants. Cet échange d’informations aboutit de plus en plus à une coordination (ou au renforcement de la coordination) d’enquêtes nationales parallèles ou d’interventions opérationnelles au niveau international, par exemple dans le cas de surveillances transfrontalières et de trafics internationaux illicites. Les analyses de l’UDE établissent des analyses stratégiques, tactiques et opérationnelles, en s’appuyant toutefois sur des données non nominatives ou des données dépersonnalisées. Enfin, l’UDE est devenue un centre de conférences internationales des services de police et des douanes. Depuis mars 1995, la compétence de l’UDE comprend non seulement la lutte contre le trafic de drogue et le blanchiment de l’argent qui en est le corollaire, mais également la lutte contre le trafic de matières nucléaires, le trafic de véhicules volés, les filières d’immigration clandestine ainsi que les activités connexes de blanchiment d’argent et les organisation criminelles concernées. Europol après la convention Après la ratification de la convention, Europol aura de nouvelles compétences, aussi bien dans les domaines actuels de la criminalité que dans des domaines nouveaux. Presque tous les aspects importants de la criminalité organisée au niveau international pourraient à l’avenir être couverts par Europol, les compétences nécessaires pour les nouveaux domaines lui étant progressivement dévolues. Dans la lutte contre la criminalité organisée à l’échelon international, Europol aura les fonctions principales suivantes : – centre d’information pour la police, les douanes et les autres autorités chargées de l’action répressive.; – système propre de traitement du renseignement – y compris de l’information sensible – dans le cadre de l’échange d’informations sur les enquêtes en cours et les interventions opérationnelles.; – travail d’enquête/analyse des renseignements.; – coordination.; – assistance technique et au personnel pour les enquêtes internationales et les interventions opérationnelles.; – prévention.; – formation initiale/formation permanente/recherche/criminalistique.; – centre de conférences/échange d’expériences. Conformément aux principes de l’État de droit, les organes de contrôle les plus divers veillent au respect de l’égalité par Europol. Le contrôle politique, qui revient en principe au Conseil des ministres de l’Intérieur et de la Justice, La création d’Europol et ses fonctions dans la lutte internationale contre la criminalité organisée 235 ainsi que la tutelle et la surveillance administrative seront exercés par un conseil d’administration. En ce qui concerne la protection des données, une commission de contrôle particulière, composée de représentants de l’ensemble des États membres, sera prévue. Un comité de vérification des comptes ainsi qu’un contrôleur financier surveilleront la gestion financière d’Europol. Le Parlement Européen n’aura pas de droit de contrôle sur Europol, mais seulement un droit d’information. De ce fait, le contrôle législatif revient aux parlements nationaux, encore qu’aucune procédure n’ait été arrêtée en la matière et qu’aucune décision n’ait été prise sur l’étendue de ce droit parlementaire. Compétences d’Europol en matière d’enquêtes Pour lutter contre la criminalité internationale, il est indispensable de pouvoir mener des enquêtes qui soient, elles aussi, internationales. La convention ne prévoit pas de doter Europol d’une compétence propre en matière d’enquêtes. Toutefois, la création d’Unités opérationnelles multinationales ou de commissions spéciales agissant sur l’initiative d’Europol, sans en faire partie intégrante, pourrait répondre, au moins pour quelques années, au besoin d’une lutte efficace contre la criminalité internationale. Unités nationales d’Europol Conséquences de la création d’Europol pour les États membres de l’Union européenne L’UDE, et plus encore Europol, ont besoin, comme partenaires, d’autorités nationales centrales fortes. En tout état de cause, le besoin existe, d’une manière générale, de concentrer les ressources en vue d’une meilleure lutte contre la criminalité, tant au plan national qu’international. Indirectement, la création de l’UDE a eu dès à présent pour conséquence le fait que, dans de nombreux États, des autorités nationales différentes chargées d’exercer une action répressive, coopèrent pour la première fois et mettent même en place des bureaux et commissions d’enquêtes communs. Du fait également de la création d’Europol, les méthodes et techniques nationales différentes doivent être harmonisées, ou tout au moins être rendues compatibles au niveau européen. Il est de ce fait nécessaire d’arrêter des dispositions juridiques particulières. Europol offre l’opportunité de mettre au point des stratégies communes de lutte contre la criminalité. Dans la mesure où l’on donne à Europol de nouvelles compétences pour lutter contre le crime, il est possible de rapprocher les normes correspondantes du droit pénal ou de créer de nouvelles normes communes. Une telle évolution est dès à présent en cours dans le domaine du droit de la protection des données. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 236 Le stade actuel d’Europol Retour au présent.! Qu’est-ce qu’il se passe à La Haye actuellement.? L’échange d’informations et de renseignements (données personnelles et non personnelles) par les officiers de liaison Europol (OLE) reste au cœur des activités de l’EDU. Le soutien analytique occupe une place de plus en plus grande et l’accent passe d’une approche stratégique à des activités plus axées sur les investigations, en raison d’une augmentation de la fréquence de ce type de requêtes. D’un point de vue quantitatif, la plupart des activités de l’UDE ont trait à la drogue. L’unité, cependant, a été en mesure d’apporter une valeur ajoutée plus spécifique dans le domaine de la criminalité que constituent les filières d’immigration clandestine et le trafic illicite de matières nucléaires et radioactives, en raison de la carence de la coopération multilatérale de l’action des services de répression des pays de l’UE en la matière. Pour ce qui concerne l’échange d’informations – parallèlement au soutien opérationnel – relatives au trafic illicite de véhicules, il a été plus difficile de cerner le rôle et les responsabilités de l’UDE tout en évitant les doubles emplois avec l’OIPC-Interpol et Schengen. Des difficultés similaires concernent les activités de blanchiment d’argent, car différentes instances de la Commission ainsi que diverses organisations et «.task forces.» internationales travaillent déjà dans ce domaine. En outre, les droits nationaux et méthodes de travail diffèrent d’un pays à l’autre, ce qui pose de grands problèmes de coopération. Au total, l’UDE est intervenue dans 1054 affaires soumises par les États membres au cours du premier semestre 1996. 72.% des enquêtes et investigations conduitespar l’UDE concernaient la drogue, 13.% le blanchiment d’argent, 7.% les filières d’immigration clandestine et 8.% le trafic de véhicules volés.; cependant, les statistiques varient d’un État membre à l’autre. Dans 12 cas, l’UDE et les OLE ont apporté un soutien à la coordination de livraisons surveillées de stupéfiants. L’année 1995 et le premier semestre 1996 ont vu un développement spectaculaire de l’activité des analystes, en particulier pour ce qui concerne l’assistance apportée aux unités nationales Europol sur la requête de leurs OLE respectifs, à un point tel qu’il est désormais essentiel de classer les demandes par ordre de priorité. Si l’on compare la charge de travail du premier semestre 1996 et celle du second semestre 1995, on s’aperçoit, pour le volet opérationnel, que les activités portant sur le court terme ont progressé de 597 demandes à 1386, et que l’on est passé de 8 à 10 demandes portant sur le long terme. Il convient de souligner, en outre, que la complexité et la durée du travail ont également augmenté, et que 5 des 8 demandes reçues pour le long terme pendant le second semestre 1995 sont toujours en cours. Voici quelques exemples : Cet été, l’UDE a préparé un deuxième rapport sur la situation de l’UE relativement à la production et au trafic de drogue et, pour ce faire a collecté des informations auprès des États membres et autres sources. Les statistiques nationales des saisies ont été collectées et collationnées et font actuellement La création d’Europol et ses fonctions dans la lutte internationale contre la criminalité organisée 237 l’objet d’une évaluation interactive, de sorte que la distribution du rapport sur l’état général de la situation dans le domaine de la drogue sera prête en septembre 1996. L’UDE a fait une synthèse des prix de la drogue, au niveau de la vente en gros et au détail, dans la monnaie de chaque État membre ainsi qu’en ECU.; elle a actualisé ces données et continue à les publier tous les six mois. Elle devrait également définir un indicateur de pureté. Le programme de caractérisation de l’ecstasy (Projet Logo) a permis la constitution d’un registre standardisé contenant les caractéristiques externes des pilules saisies. Par l’intermédiaire des unités nationales Europol, les services de répression des États membres ont reçu le premier catalogue en avril 1996. En outre, le développement d’une base de données de l’UDE, contenant des précisions sur les saisies, est en cours, et peut-être le projet sera-t-il étendu à d’autres types de drogues synthétiques ainsi qu’à un système de caractérisation chimique. Un projet portant sur les trafics de drogue par des groupes criminels d’origine turque qui sévissent dans l’UE, comprenant un volet opérationnel et stratégique est en cours de réalisation. Depuis 1995, l’UDE élabore, avec les conseils et la coopération des unités nationales, une stratégie concernant les techniques spéciales (surveillance transfrontalière, livraisons surveillées, etc.) et tenant compte des ressources techniques déjà disponibles, y compris la technologie, les techniques et les études d’autres instances, pour éviter les doubles emplois. En outre, l’unité effectue actuellement une étude des problèmes légaux, juridiques, factuels, structurels et financiers à l’origine de difficultés opérationnelles, de manière à améliorer la coordination et la coopération dans le cadre de livraisons surveillées internationales. Cette action est conforme aux principes exprimés dans le document Cordrogue 69, qui souligne la nécessité d’une coopération Européenne en matière de livraisons surveillées. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 238 Summary Europol against organised crime Jürgen Storbeck • The history of Europol When we look at the criminal investigations which are carried out across different member states of the European Union, the exchange of information between the appropriate law enforcement organisation of one member state, and the prosecuting authorities of another member state is extremely slow. In addition, it is impossible to obtain from other countries the totality of the requested information. The international police and customs cooperation with its various information organisations like Interpol, the SIS, the CIS, the teledrug, are not harmonised, neither in their contents, nor in their methods. The police and the authorities have far less financial, technical and human resources than the criminals operating on an international scale. Finally, there are many differences between the 15 members states, whether in the legislation, in the criminal procedures or in the organisation of the police forces. Those are the reasons which contributed to the establishment of Europol, a European police office, which aim is to enhance the police cooperation within the European Union in order to combat organised international criminal activities. Europol has to be respectful of the sovereignty of the member states, its area of competence must therefore be in compliance to the principle of subsidiarity. • The construction of Europol As the Europol convention was not yet ratified, it was decided in 1993 to adopt a transitory solution : the Europol drug unit. Liaison offices linked to Europol are available to the authorities of the member states (police, gendarmerie, customs) except the judiciary. The liaison officers have access to the files of their own countries and can, in case of an actual investigation, pass on information on any prosecuted individual, this, in compliance with their national legislation. Since 1995, the scope of the Europol Drug Unit (that is drug trafficking and money laundering) has been extended to the smuggling of nuclear material, car thefts, illegal immigration and facilitation with its subsequent money laundering. • Performance During the first half of 1996, Europol got involved in 1054 cases following the request of the members states, 72% on drug trafficking, 13% on money laundering, 7% on facilitation of illegal immigration, 8% on car thefts. • Europol after the convention After ratification by the member states of the Europol convention, Europol will be able to deal with nearly all forms of organised crime, under the political control of the council of Home and Justice ministers, and under the authority and supervision of a board of directors. A commission will be responsible for the protection of data, while finance will be looked at by an audit committee. Legislative review will be the sole responsibility of national legislatures. Under the convention, Europol will be a non operational team. However, the establishment of operational units operating at Europol’s request, but not being part of it, can be conceived. La création d’Europol et ses fonctions dans la lutte internationale contre la criminalité organisée 239 Resumen Europol y la lucha contre la criminalidad organizada Jürgen Storbeck • Los fundamentos de Europol : En el marco de las investigaciones llevadas a cabo por las autoridades de diferentes Estados de la Unión Europea, el intercambio de información entre la policía competente de una país y las autoridades responsables de la represión en el extranjero es extremadamente lento. Además, es imposible obtener de otros estados el conjunto de las informaciones necesarias. La cooperación internacional en materia de policía y aduanas y sus diferentes estructuras de información internacionales, como INTERPOL, el SIS, la CIS, la TELEDRUG, no están armonizadas ni en su contenido ni en sus técnicas. La policía y demás autoridades disponen de medios financieros, técnicos y de efectivos mucho menores a los de los criminales organizados a escala internacional. La acción represiva no está coordinada. Para terminar, los quince Estados miembros presentan numerosas disparidades, tanto con respecto a las leyes y procedimientos penales como en materia de la organización de sus fuerzas policiales. Estos motivos llevaron a la creación de Europol, Oficina Europea de Policía, que tiene como objetivo el mejoramiento de la cooperación en el seno de la Unión en materia de represión del crimen organizado e internacional. Europol debe preservar la soberanía de los Estados, por lo que su actividad se mantiene subsidiaria. • La construcción de Europol : Como la Convención Europol aún no está ratificada, se adoptó, en 1993, una solución provisoria : la Unidad Droga Europol (UDE). Excepto la justicia, las autoridades de los Estados miembros (policía, gendarmería, aduanas) disponen de oficinas de enlace con Europol. Los oficiales de enlace tienen acceso a los diferentes registros de sus respectivos países y pueden, en el caso de investigaciones concretas, divulgar informaciones sobre las personas investigadas, bajo reserva de compatibilidad con las legislaciones respectivas. À partir de 1995, el campo de competencias de la UDE (tráfico de estupefacientes y blanqueo de dinero) se extendió al combate del tráfico de materias nucleares, del de vehículos robados, de las redes de inmigración clandestina y del blanqueo de dinero que tenga que ver con estas actividades. • Actividades : En el transcurso del primer semestre de 1996, Europol intervino en 1.054 casos sometidos por los Estados miembros, en el 72.% de los casos por tráfico de drogas, 13.% por blanqueo de dinero, 7.% por redes de inmigración clandestina y 8.% por tráfico de vehículos robados. • Europol luego de la Convención : Después de la ratificación por los Estados miembros de la convención relativa a Europol, casi todos los aspectos de la criminalidad organizada entrarán dentro del campo de competencias de Europol, bajo el control político del Consejo de Ministros del Interior y de Justicia y la tutela y la vigilancia de un Consejo de Administración. Una comisión de control especial será responsable de la protección de los datos, mientras que el control financiero estará a cargo de un comité de verificación de cuentas. El control legislativo será responsabilidad exclusiva de los parlamentos nacionales. La convención no prevé competencia propia para Europol en materia de investigación. Sin embargo, no se excluye la creación de unidades operacionales que actúen a iniciativa de Europol, sin formar parte de ella. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 240 La coopération policière en matière de lutte contre la criminalité organisée Jean-Louis Sabathier, commissaire divisionnaire, conseiller technique, cabinet dupolicière directeur général de la police nationale contre la La criminalité coopération organisée en matière de lutte Longtemps négligée, parfois sous-estimée, la menace du crime organisé international a désormais accédé à la reconnaissance mondiale au point d’être devenue «.l’hydre nouveau encerclant la planète, envahissant les marchés monétaires et boursiers, déformant les économies, corrompant les politiciens, les policiers et les magistrats, mettant enfin en péril l’intégrité ou la survie des régimes démocratiques du monde libre.» (Claire Sterling). Certes, sans céder à une telle vision catastrophiste, la criminalité organisée se présente comme un des grands défis auxquels les démocraties doivent faire face aujourd’hui. Il ne s’agit pas d’une perspective lointaine, mais bien d’une réalité concrète, en forte croissance et dangereuse. Si la notion de criminalité organisée est souvent employée, sa définition manque cependant de rigueur. Comme l’a écrit notre collègue Jean Claude Monet à qui j’emprunte ces propos, «.on comprend intuitivement qu’elle désigne des formes d’activité derrière lesquelles agissent de puissantes organisations criminelles, fortement structurées, sur le modèle de la plus puissante ou la plus célèbre d’entre elles, la Mafia.». En effet, les expressions de «.crime organisé.» ou de «.mafia.» sont souvent utilisées pour désigner de façon indifférenciée toute forme d’association qui tente de contrôler certains secteurs d’activités économiques, légaux ou illégaux, en vue d’en retirer un profit maximum. Dans de nombreuses enceintes, des essais de définition de la «.criminalité transnationale organisée.», expression désormais la plus couramment employée, ont été tentés. Aucune de ces définitions n’a fait l’objet d’un consensus universel. Cela témoigne de la difficulté qu’il y a à regrouper sous un même vocable un ensemble de phénomènes, certes liés, mais de nature différente. L’Union européenne a adopté un concept qui énumère en fait 11 caractéristiques dont 6 (et 3 obligatoirement) doivent être présentes pour qu’un crime ou qu’un groupe de criminels puissent être considérés comme relevant de la criminalité organisée. L’OIPC-Interpol a retenu, depuis 1988, une définition plus simple et, de fait, souvent citée en exemple : «.Toute association ou tout groupement de personnes se livrant à une activité illicite continue, dont le premier but est de réaliser des profits sans souci des frontières nationales.». À la fin de l’année 1995, un groupe de travail a été mis en place en vue de réactualiser cette définition. Plus récemment, ni la conférence mondiale de Naples en 1994, ni le IXe Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants en 1995 n’ont adopté une définition de la criminalité transnationale organisée. Mais laissons ce débat, trop théorique, pour nous limiter aux questions de coopération opérationnelle. De même, nous laisserons de côté toute tentative de description du phénomène.; de nombreux rapports existent déjà qui décrivent et apprécient son ampleur, analysent ses causes, en dessinent les contours. Là encore, nous savons qu’une liste exhaustive des formes de criminalité est difficile à dresser car, a priori, aucune infraction n’est exclue de leur champ d’activité. Rappelons simplement que la notion d’infraction économique est aujourd’hui en pleine expansion, favorisée par la révolution de l’électronique et de l’informatique. Revenant aux moyens d’y faire face, nous dirons également qu’à l’évidence, la lutte contre le crime organisé ne peut plus s’apprécier localement et que la mobilisation policière exige à la fois une spécialisation renforcée et une extension des réseaux de coopération internationale. Plus encore, nous pouvons constater que ce combat est devenu une question politique, voire de politique internationale et que la police n’agit plus seule en ce domaine. Un authentique partenariat associant étroitement les systèmes policiers, judiciaires, douaniers, bancaires et financiers, diplomatiques et politiques se met progressivement en place pour établir au niveau international un véritable «.front uni.» déterminé à lutter contre la menace criminelle. Comment s’organise aujourd’hui la riposte et quels sont les moyens de coordination et de coopération dont disposent les États et leurs services de répression.? C’est ce que nous tenterons de clarifier dans une première partie, tandis que nous énumérerons ensuite les instruments ou les supports juridiques leur permettant d’unir leurs efforts, de surmonter les limites de leurs capacités nationales et de mettre en œuvre une véritable action concertée au niveau international. Les moyens de la coopération Pour prévenir et combattre de manière efficace la criminalité organisée, il est essentiel que les systèmes judiciaires et policiers soient mieux organisés et équipés. Dans ces conditions, l’amélioration et le renforcement des moyens de lutte passent par une meilleure coordination et par une coopération internationale développée. Celle-ci s’organise à différents niveaux : A) Au niveau mondial, l’action des Nations Unies qui, depuis une quinzaine d’années, se préoccupe du phénomène de la criminalité organisée, Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 242 est complétée depuis une date plus récente par celle des dirigeants des 7 pays les plus industrialisés (G7). L’engagement des Nations Unies en faveur de la prévention et du contrôle de la criminalité transnationale organisée date, en effet, de 1975. Le cinquième congrès des Nations Unies sur la prévention du crime et le traitement des criminels, tenu à Genève en 1975, attirait en effet l’attention sur les dangers de la criminalité transnationale. Le septième congrès, tenu à Milan en 1985, mettait l’accent sur le fait que les frontières nationales avaient cessé de constituer des barrières effectives contre la criminalité organisée. Un plan d’action soulignant les dimensions internationales de la criminalité et le besoin d’une réponse concertée de la part de la communauté des nations était adopté, puis ratifié par l’Assemblée Générale. En 1988, une conférence de haut niveau, réunie à Vienne, adoptait la Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants, texte qui représente aujourd’hui l’un des instruments juridiques internationaux les plus importants pour lutter contre le crime organisé. En 1990, le huitième Congrès tenu à La Havane, adoptait un ensemble de recommandations spécifiques et proposait l’organisation d’une conférence de niveau ministériel dont l’objectif serait l’établissement d’un Programme des Nations Unies dans le domaine de la prévention du crime et de la justice pénale. Cette conférence a eu lieu à Versailles en novembre 1991 et a donné naissance à la Commission et au service pour la prévention du crime et la justice pénale, seule instance des Nations Unies à traiter de la criminalité transnationale organisée. Elle sera d’ailleurs désignée comme responsable de la mise en œuvre de la Déclaration politique et du Plan d’action adoptés à Naples, à l’issue de la Conférence mondiale sur la criminalité organisée. C’est dans cette ville, en effet, que se tient du 21 au 23 Novembre 1994, la première Conférence mondiale consacrée à ce phénomène. Cent quarantedeux États y participent, ainsi que les représentants d’organisations non gouvernementales et intergouvernementales. Un certain nombre de suggestions pratiques sont faites par les participants, comme l’harmonisation de la législation, la mise en place de réformes institutionnelles, le renforcement des accords de coopération ou la création de nouveaux instruments internationaux. Au terme de cette conférence, sont adoptés : – Une Déclaration politique qui recommande, entre autres, que priorité soit donnée au renforcement de la coopération internationale contre le crime transnational organisé dans le contexte de la Commission des Nations Unies sur la prévention du crime et sur la justice pénale.; elle recommande également que la capacité des États comme celle des Nations Unies soit accrue en harmonisant les textes législatifs ayant trait au crime organisé, en renforçant la coopération internationale au niveau judiciaire, en établissant des modèles et des principes de base pour la coopération régionale et internationale, en élaborant de nouveaux instruments internationaux. – Un Plan d’action global qui identifie des mesures spécifiques à la charge des États pour mettre en échec, à divers niveaux d’intervention, la criminalité organisée. La coopération policière en matière de lutte contre la criminalité organisée 243 – Sur proposition de l’Italie, une résolution sera également adoptée, prévoyant la mise en place d’un groupe d’étude sur la faisabilité de la création d’un Centre international de formation sur les affaires criminelles. Enfin, le neuvième congrès tenu au Caire en 1995 recense dans l’une de ses recommandations les infractions pouvant entrer sous la rubrique «.criminalité transnationale organisée.». Le système des Nations Unies regroupe un certain nombre d’organes politiques, juridiques et d’assistance technique tels que : – le Programme des Nations Unies pour le contrôle international des drogues (PNUCID).; – l’Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS).; – la Commission des Nations Unies et le Service pour la prévention du crime et la justice pénale (CNUPCJP).; – le Fonds Monétaire International (FMI).; – la Banque mondiale. Ce système est complété par plusieurs organisations internationales à vocation universelle, regroupant et organisant l’action des administrations policières et douanières des États membres, dans les domaines de l’information, des poursuites ou de la coopération technique. Ce sont principalement : – l’Organisation internationale de police criminelle (OIPC-Interpol).; – l’Organisation mondiale des douanes (OMD). Plus récemment, les chefs d’État et de gouvernement des 7 pays les plus industrialisés, lors de leur Sommet d’Halifax (Juillet 1995), ont décidé de constituer un groupe d’experts à haut niveau sur la criminalité transnationale organisée, chargé d’examiner les moyens de faire obstacle au développement rapide de la criminalité organisée et de «.recenser les options possibles pour améliorer la coordination et proposer des mesures pratiques.». C’est ainsi que 40 recommandations, préparées par ce groupe d’experts, ont été adoptées lors du Sommet de Lyon le 29 Juin 1996. De plus, face à l’insistance de certains pays à créer une nouvelle instance du type GAFI, il a été convenu que ce groupe d’experts serait baptisé «.Groupe de Lyon.» et devrait examiner le suivi et l’application de ces recommandations. Il sera rattaché sur un plan matériel à l’OIPC-Interpol, de la même façon que le GAFI a été rattaché et accueilli par l’OCDE. On ne saurait ignorer en effet le rôle du Groupe d’Action Financière Internationale (GAFI), groupe informel sans statut particulier constitué en 1989 par les pays du G7, dont la mission, temporaire puisque son mandat s’achève normalement en 1999, consiste à définir le cadre de la coopération internationale en matière de lutte contre le blanchiment d’argent. Structure légère dont la composition est proche de celle de l’OCDE (moins le Mexique et le république Tchèque, mais plus Hong-Kong et Singapour), le GAFI s’est fixé pour tâche de définir un corps de doctrine et de procéder à l’évaluation mutuelle de l’action entreprise par ses membres. Dès 1990, il a adopté 40 recommandations qui servent de référence à la lutte internationale contre le blanchiment de capitaux. La 7e session, placée sous présidence américaine, qui s’est achevée le 28 juin 1996, a permis de procéder principalement à deux initiatives : Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 244 – L’actualisation du corps de doctrine de la lutte internationale contre le blanchiment (les 40 recommandations), à savoir l’extension de l’incrimination au-delà du trafic des stupéfiants aux infractions graves, l’obligation (et non plus la faculté) de déclaration des transactions suspectes par les institutions financières, l’application aux institutions non bancaires (bureaux de change notamment) des mesures anti-blanchiment, l’institution de mesures de détection des mouvements transfrontaliers d’espèces. – Le lancement du second cycle d’évaluation mutuelle des États-membres, destiné à évaluer l’efficacité opérationnelle des systèmes mis en place. Enfin, il a été à nouveau souligné qu’un renforcement de la coopération entre tous les services opérationnels chargés de la lutte contre le blanchiment était de nature à améliorer l’efficacité du système. B) Au niveau régional, plusieurs organisations interviennent également, le plus souvent pour traiter d’un ou plusieurs aspects de la criminalité internationale. C’est le cas de : – l’Organisation des États américains (OEA).; – la Commission inter-américaine de lutte contre l’abus des drogues (CICAD).; – le Conseil de l’Europe qui peut s’enorgueillir d’un impressionnant travail conventionnel. Seule l’Union européenne, qui fournit un exemple original d’action concertée au niveau régional en matière de lutte contre la criminalité, peut se prévaloir d’une véritable stratégie de lutte contre l’ensemble des aspects de la criminalité transnationale organisée. En effet, soucieux de s’organiser face à l’accroissement rapide et à l’internationalisation de plus en plus marquée des phénomènes criminels, ses États-membres ont initié dès 1975 une coopération policière dans le cadre du groupe TREVI. D’abord centré sur les problèmes de lutte contre le terrorisme, Trevi s’est orienté à partir de 1986 sur les problèmes de drogue et de criminalité tandis que, parallèlement, la coopération politique abordait régulièrement les questions relatives à la drogue et au terrorisme. L’entrée en vigueur du Traité sur l’Union européenne, en novembre 1993, a abouti à l’institutionnalisation de l’action de l’Union en matière d’affaires intérieures et de justice. Un certain nombre de groupes de travail spécialisés ont été ainsi mis en place dans les domaines de la coopération policière, douanière ou judiciaire et la lutte contre la criminalité organisée internationale a, de fait, pris une dimension véritablement européenne au point de devenir l’un des volets majeurs de la coopération européenne. Rappelons qu’à la suite des assassinats des juges Falcone et Borselino, les ministres français et italien de la Justice avaient suscité une réunion à Bruxelles, le 18 septembre 1992, comprenant leurs homologues et les ministres de l’Intérieur des Douze. À l’issue de cette réunion, première du genre en Europe à réunir l’ensemble des ministres disposant d’une compétence nationale en matière de police et de justice sur un sujet intéressant leur sécurité, une déclaration avait été publiée aux termes de laquelle les ministres avaient exprimé leur accord sur la nécessité d’accroître la lutte contre la criminalité organisée internationale par le développement de la coopération et par la prévention et la répression du La coopération policière en matière de lutte contre la criminalité organisée 245 trafic de stupéfiants et du blanchiment de capitaux y afférent. En outre, il avait été convenu de mettre en place un groupe de travail chargé de présenter dans les six mois un rapport sur l’organisation et les structures de la Mafia et d’autres organisations criminelles internationales, et de faire des propositions concrètes pour lutter contre ce type de criminalité. Ce groupe avait notamment conclu à la nécessité de développer l’échange de magistrats de liaison, de déterminer des points de contact nationaux, de favoriser une connaissance mutuelle des législations internes des États-membres. Par la suite, diverses recommandations avaient été faites : – nécessité d’engager une réflexion sur l’élaboration d’une incrimination commune à l’égard de la criminalité organisée, pouvant servir de base à l’application de mesures d’enquêtes particulières.; – opportunité de prévoir des sanctions pénales adéquates à l’encontre des personnes morales.; – ratification rapide de la Convention du Conseil de l’Europe sur le blanchiment, le dépistage, la saisie et la confiscation des produits du crime du 8 novembre 1990.; – opportunité d’instaurer un système de confiscation indépendamment de la condamnation éventuelle de l’auteur d’une infraction.; – possibilité de prévoir des délais de prescription de l’action publique suffisamment longs pour les infractions relevant de la criminalité organisée.; – faciliter les témoignages et garantir la sécurité et la protection des témoins. Mais la structure qui symbolise le mieux cette volonté des pays de l’Union européenne de coopérer en matière de lutte contre la criminalité organisée sera l’Office européen de police (Europol) dont l’échelon précurseur, l’Unité drogue Europol (UDE), a été mise en place à La Haye en janvier 1994. Institué par le Traité de Maastricht, cet Office est chargé de favoriser et d’organiser l’échange d’informations entre les institutions policières et douanières des 15 États-membres et de procéder à l’analyse des renseignements sur la criminalité afin de soutenir les opérations policières dans chaque État-membre. Cette Unité Drogue avait à l’origine compétence pour les seules questions de drogue et de blanchiment d’argent y afférent.; mais depuis le Conseil d’Essen en décembre 1994, son mandat a été élargi au trafic illégal de matières radioactives, aux filières d’immigration clandestine, au trafic illicite de véhicules et au blanchiment de capitaux issus de ces activités. La convention portant création d’Europol a été signée le 26 juillet 1995 et complétée récemment par un protocole relatif à la compétence de la Cour de Justice. Elle est désormais soumise à la ratification des États-membres. Sa mise en œuvre constituera la réponse opérationnelle de l’Union dans la lutte contre les différentes formes de criminalité. Elle sera, à n’en pas douter, un pas important et un instrument novateur dans la lutte et la prévention du crime. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 246 Les supports de la coopération Depuis de nombreuses décennies, la communauté internationale a tenté d’organiser la lutte contre les différentes formes de criminalité. L’accélération, le développement, les ramifications croissantes de diverses formes de criminalité, notamment dans leur dimension internationale, ont amené la communauté internationale, à savoir l’ONU et les organisations régionales comme l’Union européenne, le Conseil de l’Europe ou l’Organisation des États Américains, à élaborer une série de conventions. La première constatation est qu’il n’existe pas de convention générale ayant pour objet la lutte contre la criminalité transnationale organisée en tant que telle. Les raisons en ont été maintes fois exposées : – le phénomène criminel revêt des formes trop radicalement différentes et changeantes.; – les méthodes de lutte sont trop spécifiques à chaque forme de criminalité.; – les fondements juridiques et les points de vue sont trop différenciés pour que la criminalité transnationale organisée puisse faire l’objet d’une définition communément admise (cf l’introduction) et pour qu’il soit possible d’englober en un seul texte l’ensemble des dispositions correspondant aux diverses ramifications de la criminalité transnationale organisée. Devant l’impossibilité matérielle de dresser un inventaire exhaustif des accords bilatéraux d’entraide judiciaire en matière pénale ou d’extradition, le récapitulatif présenté ci-après concerne uniquement les instruments multilatéraux, en distinguant : Les conventions concernant des formes spécifiques de criminalité Ces conventions ont généralement une portée universelle et portent sur le faux monnayage, l’esclavage, le trafic des êtres humains, le travail forcé, les stupéfiants, le transfert illicite de biens culturels : 1) Convention relative à l’esclavage adoptée à Genève le 25 septembre 1926, plus le protocole de 1953 et les convention supplémentaire de 1956.; 2) Convention internationale pour la répression du faux monnayage adoptée à Genève le 20 avril 1929.; 3) Convention internationale concernant le travail forcé adoptée à Genève le 28 juin 1930.; 4) Convention pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui, adoptée à New York le 2 décembre 1949.; 5) Convention concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l’importation, l’exportation et le transfert de propriété illicites de biens culturels adoptée à Paris le 14 novembre 1970.; 6) Convention unique sur les stupéfiants adoptée à New York le 30 mars 1961 et le protocole du 25 mars 1972.; 7) Convention sur les substances psychotropes adoptée à Vienne le 21 février 1971.; La coopération policière en matière de lutte contre la criminalité organisée 247 8) Convention internationale d’entraide administrative et de répression des infractions en matière de douanes adoptée à Nairobi le 9 juin 1977.; 9) Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes adoptée à Vienne le 19 décembre 1988. Les conventions d’entraide judiciaire en matière pénale Ces textes, qui traitent plus spécialement de la lutte contre la criminalité ont la particularité d’avoir, pour la plupart, été conçus dans un cadre régional et sont ouverts à la signature de pays tiers. Ce sont : 1) La convention européenne d’extradition adoptée à Paris le 13 décembre 1957 et deux protocoles additionnels de 1974 et 1979.; 2) La convention européenne d’entraide judiciaire en matière pénale adoptée à Strasbourg le 20 avril 1959 et son protocole additionnel du 17 mars 1978.; 3) La convention sur la valeur internationale des jugements répressifs adoptée à Strasbourg le 28 mai 1970.; 4) La convention sur la transmission des procédures répressives adoptée à Strasbourg le 15 mai 1972.; 5) La convention interaméricaine d’extradition adoptée au Venezuela en février 1981.; 6) La convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime adoptée à Strasbourg le 8 novembre 1990.; 7) La convention interaméricaine d’entraide en matière pénale adoptée par l’OEA en mai 1992. Les autres textes Des textes moins formels (recommandations, résolutions, déclarations, plans d’action), adoptés dans différentes instances (ONU ou ses organes subsidiaires, organisations spécialisées, OCDE, conférences spécifiques...), au caractère moins contraignant que des instruments juridiques classiques, témoignent aussi de la sensibilisation et de l’implication croissantes des États dans la lutte contre toutes les formes de criminalité internationale. Citons : 1) Les 40 recommandations du GAFI adoptées en 1990.; 2) L’arrangement pour la remise des délinquants recherchés par la justice au sein du Commonwealth adopté à Londres en 1966.; 3) Le programme d’entraide judiciaire en matière pénale au sein du Commonwealth adopté à Harare en 1986.; 4) La Déclaration et le Plan d’action de Naples. Il convient de rappeler également que de nombreuses autres conventions, dont l’objet n’est pas en rapport direct avec la lutte contre la criminalité transnationale organisée, comportent aussi des dispositions allant jusqu’à la définition d’infractions que les États s’engagent à transposer dans leur droit national, et peuvent donc être utilisées contre certaines formes de criminalité.; on peut ainsi citer : Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 248 – les conventions de l’Organisation Internationale du Travail.; – les conventions concernant la propriété intellectuelle et industrielle.; – la convention relative aux droits de l’enfant (ONU, 1989).; – les conventions sur la protection de l’environnement.; – la convention sur la protection physique des matières nucléaires (AEIA, 1980).; – la convention des Nations Unies sur les espèces menacées d’extinction..; – de ce catalogue, on retiendra principalement qu’il existe un nombre réduit de conventions à vocation universelle visant des formes spécifiques de criminalité organisée. À l’exception des conventions sur la drogue (1961,1971,1988), ces textes sont anciens et souvent peu adaptés aux formes plus récentes de criminalité. De nombreuses formes majeures de criminalité ne font l’objet d’aucun texte, ou seulement de mentions très partielles dans des accords internationaux ayant un objet différent ou une application régionale limitée. De nombreux instruments originaux sont conçus pour répondre à trois objectifs principaux : – empêcher les criminels d’échapper à la justice.; – assécher les profits des criminels et des organisations criminelles.; – simplifier les procédures de coopération. Ils ont, pour les plus marquants d’entre eux, été adoptés sous une égide régionale (Conseil de l’Europe, OCDE) mais peuvent avoir une vocation plus large puisqu’ouverts à la signature de pays tiers. Au terme de cet exposé, deux constatations s’imposent avec force : – La légitimité du combat contre le crime organisé n’est nullement remise en cause. La communauté internationale multiplie les occasions de manifester et d’affirmer ses préoccupations vis-à-vis de la criminalité transnationale organisée. – La mondialisation du crime joue en faveur d’une concentration des efforts, d’une coordination accrue des politiques de lutte et d’un renforcement de la coopération internationale que nul ne saurait aujourd’hui contester. Quel jugement porter alors sur le dispositif ainsi présenté.? Sur le plan institutionnel, de nombreuses organisations internationales traitent de près ou de loin des déviances criminelles, chacune dans son domaine d’activité. La communauté internationale dispose cependant d’organisations à vocation universelle que sont, au plan politique, les institutions des Nations Unies et, sur un plan opérationnel, l’Organisation Internationale de Police Criminelle-Interpol et l’Organisation Mondiale des Douanes. Leur efficacité ne saurait être remise en cause, même si d’aucuns s’interrogent parfois sur leur légitimité et prônent la mise en place d’une nouvelle institution. Le dernier Sommet du G7 à Lyon a d’ailleurs «.salué le travail réalisé par ces deux organes.» et les a appelés à «.intensifier leur soutien aux activités opérationnelles.» des services de répression des États-membres (Recommandation No 18) La coopération policière en matière de lutte contre la criminalité organisée 249 Il apparaît peu réaliste et peu sage de proposer la création de nouvelles institutions, mais plus utile et efficace de développer et d’amplifier l’action des organisations existantes. Au niveau conventionnel, il n’apparaît pas non plus nécessaire de s’engager dans un exercice long et périlleux de négociation d’une convention générale contre la criminalité organisée. Certes, dans son discours introductif de la Conférence mondiale de Naples, le Secrétaire général des Nations Unies avait invité la communauté internationale à prendre en ce sens une initiative, rappelant l’inexistence d’un instrument international de portée générale pour lutter contre la criminalité transnationale et citant la Convention de 1988 sur les drogues comme un modèle possible. Cette suggestion n’avait pas été retenue et le dernier Sommet du G7, sur la base des réflexions de ses experts, ne l’a pas non plus envisagée, préférant utiliser pleinement les conventions multilatérales existantes et étudier la possibilité de les compléter éventuellement en fonction des besoins croissants de la lutte contre la criminalité transnationale (Recommandations No 35 et 36). Outre les difficultés de négociation prévisibles à l’échelle universelle, il est admis que l’arsenal conventionnel et juridique en matière de criminalité et d’association de malfaiteurs, d’appartenance à des organisations criminelles ou de la «.conspirancy.» de la Common Law est vaste et que ce ne sont pas tant les dispositifs conventionnels qui manquent que des interfaces harmonisées et efficaces entre les différents systèmes juridiques. Enfin, s’il est vrai qu’en ce domaine, la coopération internationale doit se développer dans un cadre multilatéral, il ne faut pas oublier qu’il existe aussi entre de nombreux pays un niveau remarquable de coopération et d’échange sur une base bilatérale. Des progrès extraordinaires ont été accomplis ces dernières années dans la coordination entre les services (échanges d’informations et de fonctionnaires de liaison) et dans le développement de la coopération technique. On ne saurait oublier que, souvent, l’essentiel se réalise dans le cadre d’accords ou d’échanges bilatéraux et qu’une meilleure efficience de la lutte contre la criminalité transnationale organisée doit privilégier des mesures concrètes de coopération opérationnelle visant à favoriser le recueil du renseignement et à faciliter sa bonne exploitation par les services compétents. Ne perdons pas de vue que le cœur de la police est à l’intérieur même des pays et que l’essentiel se joue d’abord dans la proximité. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 250 Summary Police co-operation in organised crime Jean Louis Sabathier Combating organised crime can non longer be locally perceived. The response by the law enforcement requires both reinforced specialisation and an extension of the international co-operation networks. • at the international level: The action undertaken by the United Nations against transborder crimes have emerged during the last fifteen years : the Geneva 5th congress 1975, the Milan 7th congress 1985, the Vienna conference 1988, the Havana 8th congress 1990, the Versailles conference 1991, the Naples 21st and 23rd November 1994 world conference, the 9th Cairo congress 1995. During these conferences, a number of pragmatic suggestions have been put forward by the 142 participating countries, like the harmonisation of legislation’s, the setting up of structural reforms, the reinforcement of co-operation agreements or the creation of new international device. The United Nations comprise a number of political, legal, and technically supporting organisations like the “United Nations program for the International Control of Drugs”, the “International Organisation for the Control of Drugs”, the United Nations Commission and the Crime Prevention and Criminal Justice department, the “International Monetary Fund”, the World Bank. In addition to these, are several police or customs international organisations like “the International Criminal Police Organisation – Interpol” and the “World Customs Organisation”. More recently, the Heads of States of the 7 most industrialised countries (G7) have, during the Halifax (July 1995) and Lyon (June 1996) summits, reinforced the co-operation between the member countries of the International Financial Action Group. • at a regional level: Several organisations are involved, like the Organization of American States, the interAmerican commission against Drug abuses. A significant strategy to combat every form of organised crime has been set up by the European Union, among which a police assistance system initiated by the “Trevi Group” in 1975 with all the subsequent working groups that have been created since. The organisation that most symbolises the willingness to co-operate is the European Police Office (Europol) whose precursor is the Europol Drug Unit created in The Hague in January 1994. There are three means of support to police co-operation. First, the conventions on specific forms of crime (counterfeit of currency, trade of human beings, drug trafficking, slavery, forced labour, and illicit transfer of cultural assets). You then have the conventions on mutual assistance on criminal matters. Finally you have a set of other less formal papers (resolutions, recommendations, statements,...). With the notable exception of the conventions on drugs (1961, 1971, 1988), a lot of major forms of crime are not covered by any international agreement. The most creative instruments have been designed and adopted at a regional level: The Council of Europe, OECD. Their three main objectives are: to bring the criminals before justice, to drain out the profits made by criminals and criminal organisations, to simplify the proceedings in police co-operation. La coopération policière en matière de lutte contre la criminalité organisée 251 Resumen La cooperacion policial en materia de lucha contra la criminalidad organizada Jean-Louis Sabathier La lucha contra el crimen organizado ya no puede ser apreciada localmente. La movilización policial exige a la vez un aumento de la especialización y una extensión de las redes de cooperación internacional. • A nivel mundial : La acción de las Naciones Unidas contra la criminalidad inter-fronteras se manifiesta desde hace unos quince años : V Congreso de Ginebra en 1975, VII Congreso de Milán en 1985, Conferencia de Viena en 1988, VIII Congreso de la Habana en 1990, Conferencia de Versailles en 1991, Conferencia Mundial de Nápoles el 21 y 23 de noviembre de 1994, IX Congreso del Cairo en 1995. En el transcurso de estas conferencias, un cierto número de sugerencias prácticas fueron hechas por los 142 países participantes, como la armonización de la legislación, la puesta en práctica de reformas institucionales, el refuerzo de los acuerdos de cooperación o la creación de nuevos instrumentos internacionales. Las Naciones Unidas reagrupan un cierto número de órganos políticos, jurídicos y de asistencia técnica como el «.Programa de las Naciones Unidas para el Control Internacional de las Drogas.» (PNUCID), el «.Organo Internacional de Control de Estupefacientes.» (OICS), la «.Comisión de las Naciones Unidas y el Servicio para la Prevención del Crimen y de la Justicia Penal.» (CNUPCJP), el «.Fondo Monetario Internacional.» (FMI), el Banco Mundial. Este sistema se completa con varios organismos internacionales policiales o aduaneros, como la «.Organización Internacional de Policía Criminal.» (OIPCInterpol) y la «.Organización Mundial de Aduanas.» (OMD). Más recientemente, los jefes de Estado y de Gobierno de los 7 países industrializados (G7), en ocasión de las cumbres de Halifax (julio 1995) y de Lyon (junio 1996), reforzaron el esfuerzo de cooperación entre los países miembros del Grupo de Acción Financiera internacional (GAFI). • A nivel regional : Intervienen varias organizaciones, como la «.Organización de Estados Americanos.» (OEA) o la «.Comisión Interamericana de Lucha contra el Abuso de Drogas.» (CICAD). La Unión Europea ha puesto en marcha una verdadera estrategia de lucha contra el conjunto de los aspectos de la criminalidad organizada, especialmente a través de la cooperación policial iniciada por el «.Grupo Trevi.» en 1975 y continuada por todos los grupos de trabajo puestos en práctica consiguientemente. Pero la estructura que mejor simboliza esta voluntad de cooperación será la Oficina Europea de Policía (Europol) cuyo escalón precursor es la Unidad Droga Europol (UDE) puesta en marcha en La Haya en enero de 1994. La cooperación se apoya sobre tres puntos : por un lado, las convenciones que conciernen las formas específicas de criminalidad (moneda falsa, tráfico de seres humanos, estupefacientes, esclavitud, trabajo forzado y transferencia ilícita de bienes culturales). Luego están las convenciones de ayuda judicial en materia penal. Para terminar, un conjunto de textos menos formales (resoluciones, recomendaciones, declaraciones, etc.). Con la notable excepción de las convenciones sobre la droga (1961,1971,1988), las formas de criminalidad que no son objeto de acuerdos internacionales son numerosas. Los instrumentos más originales fueron concebidos y adoptados bajo una égida regional : Consejo de Europa, OCDE. Persiguen tres objetivos principales : impedir que los criminales escapen a la justicia, neutralizar los beneficios de los criminales y de las organizaciones criminales y simplificar los procedimientos de cooperación. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 252 La cooperazione di polizia nei confronti della criminalità organizzata Maurizio Ludovici, Dirigeante superiore della Polizia di stato, direttore della 2a sezione dell’instituto superiore di polizia, Roma La cooperazione di polizia nei confronti della criminalità organizzata L’organizzazione dell’immigrazione clandestina, il traffico di stupefacenti, di armi, di materiali radioattivi, di tabacco, di alcool, ecc.. Per la criminalità originariamente attiva nei paesi occidentali il facilitato ingresso nei paesi dell’Europa Centrale ed Orientale significa possibilità di investirvi i proventi di attività criminose commesse in Occidente, profittando della transizione da un’economia socialista al mercato libero, di fatto un «.campo aperto.» poichè i Paesi ex socialisti sono completamente privi di un sistema bancario di tipo capitalistico. La situazione descritta è aggravata dalla scarsa preparazione delle polizie di tali Paesi a contrastare la criminalità organizzata di tipo occidentale. In quelle polizie infatti sono presenti sia elementi assunti in servizio dopo il rovesciamento politico (e quindi con scarsa esperienza professionale) che operatori già appartenenti alle polizie dei passati regimi (ma non troppo compromessi con essi), abituati perci a reprimere i «.reati politici.» nei confronti dei dissidenti piuttosto che a contrastare la criminalità organizzata internazionale. Ecco quindi la necessità che le polizie si adattino, per quanto possibile, al mutato scenario operativo della delinquenza organizzata che riesce sempre a stare al passo con i tempi, sfruttando tempestivamente eventi e situazioni politiche ed adeguando ad essi structture organizzative e modus operandi. *** L’iter operativo della criminalità organizzata si svolge in tre fasi. Prima, l’accumulazione dei capitali mediante delitti quali estorsione, sequestro di persona, rapina, struttamento della prostituzione, gioco d’azzardo, immigrazione clandestina, ecc... Seconda, l’impiego dei capitali per lo svolgimento di attività criminali altamente remunerative, in prevalenza acquisto di partite di stupefacenti, investimento privilegiato dalla criminalità organizzata. Terza, il riciclaggio dei proventi di attività criminose ed il reinvestimento in attività lecite (acquisto di immobili, apertura di attività commerciali ed alberghiere, di villaggi turistici, ecc... Quest’ultima fase mira a spezzare il filo rosso o (se si preferisce) il cordone ombelicale che lega il denaro all’attività illecita svolta in precedenza, avvalendosi anche del trasferimento telematico dei capitali nei cosiddetti paradisi fiscali e bancari (Paesi off shore), caratterizzati dall’assoluta mancanza di trasparenza delle operazioni bancarie. Al riguardo è interessante ricordare che, utilizzando operazioni telematiche ed approfittando della diversità dei fusi orari, è possibile effettuare ben 72 movimenti di capitali nell’arco delle ventiquattro ore, rendendo di fatto impossibile il rintraccio dei proventi di attività criminose. Le risposte delle polizie alla internazionalizzazione del crimine organizzato si realizzano a tre livelli : normativo, informativo-operativo, formativo degli operatori di polizia. La legislazione di ciascun Paese, in particolare i codici penale e di procedura penale, prevede istituti e principi tendenti ad agevolare la collaborazione giudiziaria e di polizia in caso di reati commessi all’estero o da cittadini stranieri. Si tratta dell’estradizione, della commissione rogatoria, dell’esecuzione di sentenza straniera, del riconoscimento di sentenza straniera e del principio dell’«.aut dedere aut judicare.». Questo nucleo di norme è integrato da Convenzioni internazionali a diversi livelli (universali, regionali e sopranazionali) e da accordi multilaterali e bilaterali, generalmente in matéria di traffico di droga e di criminalità organizzata, ma talvolta anche per il contrasto del terrorismo. Essi prevedono, in linea di massima, scambi informativi sui gruppi criminali, sul modus operandi, sull’addestramento degli operatori di polizia e meccanismi di agevolazione nella collaborazione penale. Da un punto di vista informativo-operativo, si privilegiano l’attività di «.intelligence.» o, ancor meglio, di scambio di «.intelligence.» su fenomeni criminali o su singoli reati che non possono prescindere da essa che si avvale di principi già ampiamente collaudati nel campo aziendale : la ripartizione del lavoro e l’individuazione di sfere di competenza. I reati in questione sono, ad esempio : traffico di stupefacenti, di armi, di opere d’arte, sequestro di persona, gioco d’azzardo, sfruttamento della prostituzione. La collaborazione operativa si verifica mediante l’intervento contestuale di operatori di polizie di più paesi in operazioni finalizzate alla disarticolazione di bande di criminali operanti in più paesi e dedite alle attivà dianzi ricordate. Altro tipo di collaborazione operativa si opera mediante le consegne controllate in materia di lotta al traffico di stupefacenti. Le strategie fondamentali della cooperazione internationale di polizia nella lotta alla criminalità organizzata sono costituite da : – scambio di «.intelligence.» sulla criminalità organizzata.; – costituzione di una efficente cooperazione di polizia a livello operativo.; – assistenza giudiziaria reciproca al fine di congelare e confiscare i capitali di provenienza criminale.; Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 254 – contribuzione alla formazione ed all’assistenza delle forze di polizia dei paesi in cui la droga transita o è prodotta.; – identificazione e neutralizzazione delle aziende multinazionali del crimine. L’azione di contrasto internazionale si svolge a diversi livelli (mondiale, regionale, sovrannazionale). Cercheró ora di passare rapidamente in rassegna la collaborazione ai diversi livelli, escludendo deliberatamente di trattare le attività svolte a livello OIPC – Interpol ed Europol, sulle quali ci hanno già intrattenuti, con estrema competenza, rispettivamente il Sig. Kendall, Segretario Generale dell’OIPC – Interpol ed il Sig. Storbeck, Direttore dell’UDE Europol. A livello mondiale la collaborazione si articola su una serie di strumenti internazionali (Convenzioni, dichiarazioni) e di fori di discussione. Tra gli strumenti internazionali è opportuno ricordare : – la Convenzione unica sugli stupefacenti (New York, 30 marzo 1961) e relativo protocollo di emendamento (Ginevra, 25 marzo 1972).; – la Convenzione sulle sostanze psicotrope (Ginevra, 21 febbraio 1971).; – la Dichiarazione della Conferenza internazionale sull’abuso ed il traffico illecito di droga (17-26 giugno 1987).; – la Convenzione contro il traffico illecito di sostanze stupefacenti e psicotrope (Vienna, 19-20 dicembre 1998).; – la Dichiarazione politica e Programma di Azione adottati dall’Assemblea Generale nel corso della 66° Sessione straordinaria sul problema della cooperazione internazionale contro la produzione, l’offerta, la domanda, il traffico e la distribuzione illecita di droghe e di sostanze psicotrope (19 marzo 1990). Tra le riunioni periodiche organizzate dalle Nazioni Unite particolare rilievo assumono : – il Congresso Annuale sulla prevenzione del crimine.; – la Sessione Annuale della Commissione Stupefacenti.; – la Commissione per la prevenzione del crimine e la giustizia penale. *** Nella lotta al crimine organizzato si inserisce anche la Dichiarazione di principio del Comitato per le regolamentazioni Bancarie e le pratiche di vigilanza di Basilea sulla prevenzione dell’utilizzo del sistema bancario ai fini del riciclaggio di fondi derivanti da attività illegali (12 dicembre 1988). *** A livello regionale il Consiglio d’Europa è stato particolarmente attivo nei confronti del riciclaggio promuovendo : – la Raccomandazione relativa alle misure contro il trasferimento e l’impiego di capitali d’origine criminale (27 giugno 1980).; – la Convenzione relativa al riciclaggio, alla identificazione, al sequestro ed alla confisca dei prodotti del crimine (8 novembre 1990). *** La cooperazione di polizia nei confronti della criminalità organizzata 255 Iniziative di cooperazione a livello CEE – Unione Europea. Gruppo Trevi : organismo intergovernativo istituito a Roma nel 1970 per realizzare una cooperazione politica ed operativa nella lotta al terrorismo, al traffico di droga, al crimine organizzato e ad altre forme criminali di particolare gravità. Nell’ambito del Gruppo di Lavoro III, costituito a Roma nel giugno 1985 per l’analisi dei gravi atti di violenza e del crimine organizzato in genere, nel 1991 è stato istituito il sottogruppo EDU/Europol per la creazione di un organismo di polizia europea. L’attività del Gruppo Trevi è terminata con l’entrata in vigore del Trattato di Maastricht. Direttiva del Consiglio delle Comunità Europee sulla prevenzione dell’uso del sistema finanziario a scopo di riciclaggio dei proventi di attività illegali (10 giugno 1991) *** Nel Trattato di Maastricht la cooperazione di polizia è prevista nel Terzo Pilastro (cooperazione nei settori della giustizia e degli affari interni, articoli da K1 a K9). In particolare nell’ambito del Gruppo Direttore 2 opera il Gruppo Droga e Criminalità Organizzata. Tra le attività di tale Gruppo assumono particolare rilievo : – la lotta alla criminalità nel settore degli stupefacenti da attuare mediante un un piano Europeo di lotta alla droga, in stretto coordinamento con il parallelo Gruppo Cooperazione Doganale. Tra le priorità di intervento figurano quelle relative a : – scambio telematico di informazioni sul traffico di droga.; – misure di contrasto dei traffici di stupefacenti gestiti da organizzazioni criminali turche. E’stato anche elaborato un Manuale comune sulla droga che è sottoposto a periodico aggiornamento : – il Rapporto annuale sulla criminalità organizzata che focalizza l’attenzione sull’attività dei gruppi criminali (e non sui singoli reati), nel quale è inserita, tra le caratteristiche essenziali della criminalità organizzata, «.la continuità temporale dell’azione.». I dati riferentisi ai Paesi dell «.Unione Europea sono integrati con quelli forniti dai Paesi dell’Europa Centrale ed Orientale e Baltici e dai Partners Euromediterranei.; – modifica dei profili strutturali degli ufficiali di collegamento, originariamente con competenza limitata al contrasto del traffico internazionale di sostanze stupefacenti, che tendono a divenire la figura centrale della lotta alla criminalità organizzata internazionale. Tale circostanza comporta la necessità di iniziative comuni in materia di formazione degli ufficiali : – scambio di «.intelligence.» informatizzato sia nell’ambito dell’Unione che nei confronti dei Paesi Terzi.; Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 256 – sviluppo di relazioni con i Paesi Terzi, non solo con i più prossimi all’Unione (PECO, Paesi Baltici e Bacino del Mediterraneo), ma anche con quelli che presentano particolari aspetti di intreccio macro-criminale per i grandi traffici illeciti (Dialogo Transatlantico e Paesi del Patto Andino).; – lotta al riciclaggio mediante l’organizzazione (a cura del parallelo Gruppo Cooperazione di Polizia, anch’esso operante nell’ambito del Gruppo Direttore 2) di seminari riservati agli operatori di polizia dei Paesi membri dell’Unione Europea, dei PECO e Baltici. Da un punto di vista operativo si intensifica il sequestro dei beni e si rileva il modus operandi delle organizzazioni criminali.; – lotta al traffico illecito di opere d’arte ed alle contraffazioni anche attraverso unità nazionali specializzate in grado di consentire diretti contatti tra i diversi Paesi dell’Unione e con l’ausilio di sistemi informatizzati tra loro compatibili. *** L’accordo di Schengen del 18 giugno 1985, integrato dalla Convenzione di Applicazione del 19 giugno 1990, prevede agli artt. Da 39 a 47 la cooperazione tra le forze di polizia dei diversi Paesi che si realizza mediante : – scambi di informazioni (art. 39 e 46).; – scambio di funzionari di collegamento (art. 47).; – sorveglianza oltre frontiera (art. 40).; – inseguimento oltre frontiera (art. 41).; Esso contiene inoltre norme sull’assistenza giudiziaria in materia penale (art. 48 -53), sull’estradizione (art. 59 -66), sul trasferimento dell’esecuzione delle sentenze penali (art. 67 -69), sugli stupefacenti (art. 70 -76). *** Nella mia qualità di rappresentante dell’Istituto Superiore di Polizia italiano vorrei sottolineare che la formazione costituisce un adeguamento culturale e professionale degli operatori di polizia ai nuovi scenari internazionali nei quali opera la criminalità organizzata. I risultati positivi dell’attività operativa sono in funzione della formazione che costituisce, ogni giorno di più, un’interfaccia con l’attività operativa. Già nell’ambito della collaborazione Trevi si era previsto, sin dal 1976, tra le competenze del Gruppo di Lavaro 2 lo sviluppo della formazione degli operatori di polizia. Dall’entrata in vigore del Trattato istitutivo dell’Unione Europea (30.11.1993) la formazione costituisce una delle attività del Gruppo Cooperazione di polizia, che opera in seno al Gruppo Direttore 2. Vi è poi una serie di iniziative, pubbliche e private, che si occupano di formazione ed aggiornamento degli operatori di polizia con l’obiettivo del contrasto alla criminalità organizzata. • Europa 2000, associazione internazionale non governativa e apolitica, fondata in Belgio nel 1989 e finalizzata «.alla tutela della società costituzionale e democratica nei paesi membri del Consiglio d’Europa contro le minacce del terrorismo e della criminalità organizzata a livello internazionale.», ha promosso conferenze internazionali sulla lotta a vari tipi di criminalità organizzata. La cooperazione di polizia nei confronti della criminalità organizzata 257 • MEPA (Mitteleuropäische Polizeiakademie). Accademia di Polizia dell’Europa Centrale, costituita nel 1991, per la formazione congiunta di operatori di polizia austriaci ed ungheresi, e dal 1994 anche per operatori della Repubblica Federale di Germania, della Repubblica Ceca, della Republica di Polonia, della Repubblica Slovacca e della Repubblica di Slovenia. Il programma dei corsi privilegia il contrasto e la prevenzione della criminalità organizzata, i metodi e le forme di cooperazione internazionale di polizia. • ELEC ’European Law Enforcement College), organizzazione non governativa fondata nella primavera 1995 con il sostegno del Consiglio d’Europa e con sede a Bruxelles. Ha lo scopo di sviluppare e sostenere la cooperazione di giustizia criminale nella grande Europa, soprattutto nell’ambito di polizia. Il suo programma Joint Action Crime Prevention (JACP) mira a stabilire stretti legami con forze di polizia, identificando aree nelle quali intervenire con tattiche operative, strategie di prevenzione del crimine, progetti pilota, corsi di formazione mirati per appartenenti a forze di polizia e magistrati, seminari e ricerche. • ILEA (International Law Enforcement Academy) è stata costituita a Budapest nell’aprile 1995 con un accordo tra i governi della Rèpubblica di Ungheria e degli Stati Uniti d’America per la formazione di funzionari a livello medio delle forze di polizia dei paesi dell’ex blocco comunista. Nell’ambito dell’Unione Europea si è a lungo discusso, senza peraltro giungere ad una decisione unanime, sull’opportunità che l’Unione partecipi all’attività dell’Accademia, mediante una europeizzazione dei programmi anche in vista della prossima adesione dell’Ungheria all’Unione Europea. • Accademia di polizia dei paesi nordici per i paesi baltici. Si tratta di un programma di formazione per operatori di polizia dei paesi baltici, organizzato da un gruppo di lavoro dei paesi nordici (Svezia, Norvegia, Danimarca e Finlandia) ed articolato in seminari. L’Accademia non dispone attualmente nè di una sede nè di formatori a tempo pieno. • Centro Internazionale di formazione per personale addetto ai settori delle investigazioni e della giustizia. Con una risoluzione, adottata in occasione della Conferenza Mondiale Ministeriale delle Nazioni Unite sul Crimine Organizzato, tenutasi a Napoli il 21-23 novembre 1994, è stata costituita una «.task force.» incaricata di esaminare la possibilità di istituire il Centro in Italia. Esso avrà sede a Roma ed organizzerà corsi, seminari e gruppi di studio per funzionari di polizia e magistrati in tema di criminalità organizzata transnazionale. Il governo italiano sta predisponendo gli strumenti legislativi ed amministrativi per la costituzione del Centro. • Corsi vari organizzati da paesi dell’Unione Europea per la formazione di operatori di Polizia dei PECO.; programmi di formazione organizzati dal Consiglio d’Europa di concerto con la CEE/Unione Europea per la formazione di operatori di polizia di paesi europei che vivono la transizione da regimi totalitari a società democratiche (Task Force Albania, Themis Plan per la Crozia, ecc.), programmi nei quali la formazione sulle stratégie e le tecniche di contrasto del crimine organizzato è affiancata dall’insegnamento dei diritti umani nell’attivà di polizia. *** Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 258 Quali sono le strategie vincenti per il futuro.? A mio parere, esistono alcune priorità assolute : • armonizzazione delle legislazioni e processuali penali. Occorre evitare la mancanza di uniformità legislativa. Ad esempio, oggi un’adeguata misura di contrasto della criminalità organizzata è costituita da un reato associativo, l’associazione a delinquere di stampo mafioso, prevista soltanto dal codice penale italiano.; • evitare che la collaborazione sia frammentata in diversi fori, privilegiando gli accordi bilaterali. Si tratta di una soluzione più spedita che non la ricerca di un’unanimità di consenti, spesso di difficile realizzazione.; • intensificare e razionalizzare la rete dei funzionari di collegamento sia tra i Paesi dell’Unione Europea che presso i Paesi Terzi. • Intensificare gli scambi di funzionari di polizia nella fase di formazione. Essi rendono possibile l’acquisizione delle metodologie investigative di altri Paesi e la conoscenza personale di funzionari stranieri da considerare sicuri elementi di riferimento per la futura attività operativa. Ritengo che, una volta realizzate tali priorità, l’internazionalizzazione della criminalità organizzata potrà trovare un più efficiente contrasto in un’effettiva e razionale internazionalizzazione dell’attività di polizia. La cooperazione di polizia nei confronti della criminalità organizzata 259 Summary Police co-operation versus organised crime Maurizio Ludovici Among others, there has been two factors aggravating transborder organised crime in the 90s, that is free circulation within the European Union and the fall of the Berlin wall. The modus operandi of organised crime is played on three successive steps: the accumulation of funds, the investment of these funds into more profitable activities, the laundering of these funds and their investment into legal activities. International co-operation is articulated around a series of international legal instruments like the Vienna convention on spychotropic products and drugs trafficking (1988). At a regional level, one must remember the useful operations conducted in Europe, for example those run by three structures: –the council of Europe which had a very active normative drive including the 1990 Convention on research, identification, seizure and forfeiture of assets of crime..; –the European Union with the Maastricht treaty that drove traditional intergoverment Trevi co-operation forward in the direction of an institutional co-operation and the creation of the working group on “drugs and organised crime” within managerial group no 2; –the Schengen agreement which includes the project of stronger police powers at the borders. In order to continue in that direction, in the next few year it will be necessary to work toward a better harmonisation of criminal law and police procedure or criminal codes of practice as well as on the exchange of police officers, in particular for training purposes. Résumé La coopération de la police confrontée à la criminalité organisée Maurizio Ludovici Le principe de la libre circulation à l’intérieur de l’Union européenne cumulé à la chute du mur de Berlin ont été autant de facteurs d’aggravation favorisant la criminalité organisée transfrontière dans les années 90. Le modus operandi du crime organisé se décompose en 3 étapes successives : l’accumulation de capitaux.; leur investissement dans les activités les plus rentables.; leur blanchiment et leur introduction dans les activités légales. Au plan mondial, la collaboration s’articule autour d’une série d’instruments juridiques internationaux (ex : Convention contre le trafic de stupéfiants et de produits psychotropes, Vienne 1988). Au plan régional, il convient de souligner les actions dynamiques conduites sur le continent européen. On peut citer à cet égard l’activité déployée par trois instances : – le Conseil de l’Europe qui a connu une forte activité normative (ex : Convention 1990 sur la recherche, l’identification, la saisie et la confiscation des produits du crime).; Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 260 – l’Union européenne ensuite. Le traité de Maastricht a symboliquement fait évoluer cette coopération de tradition intergouvernementale (Trevi) vers une coopération institutionnalisée par la mise en place du groupe de travail «.drogue et crime organisé.» au sein du groupe directeur no 2.; – l’accord de Schengen qui prévoit un renforcement des prérogatives transfrontières mises à la disposition des services de police. Afin de parfaire l’œuvre entreprise, il conviendra de mettre l’accent dans les années futures sur l’harmonisation des législations pénales et de procédure pénale ainsi que sur l’échange de fonctionnaires de police, notamment à des fins de formation. Resumen La cooperacion policial confrontada a la criminalidad organizada Maurizio Ludovici El principio de la libre circulación dentro de la Unión Europea sumado a la caída del Muro de Berlín han sido factores agravantes que favorecieron la criminalidad organizada inter-fronteras en los años 90. El modus operandi del crimen organizado se divide en tres etapas sucesivas : acumulación de capitales, inversión de los mismos en las actividades más lucrativas, blanqueo e introducción en actividades legales. En el plano mundial, la colaboración policial se articula alrededor de una serie de instrumentos jurídicos internacionales (por ejemplo, la Convención contra el Tráfico de Estupefacientes y de Productos Psicotrópicos, Viena 1988). A nivel regional, es importante subrayar las dinámicas acciones llevadas a cabo dentro del continente europeo. En este sentido se puede citar la actividad desarrollada por tres instancias : • El Consejo de Europa, que tuvo una fuerte actividad normativa (por ejemplo, la Convención 1990 sobre investigación, identificación, incautación y confiscación de los productos del crimen). • La Unión Europea, a través del tratado de Maastricht que hizo evolucionar simbólicamente esta cooperación de tradición intergubernamental (Trevi) hacia una cooperación institucionalizada por la puesta en marcha del grupo de trabajo «.Droga y Crimen organizado.» dentro del Grupo Director No 2. • El acuerdo de Schengen que prevé un refuerzo de las prerrogativas inter-fronteras puestas a disposición de los servicios de policía. Con el fin de perfeccionar la obra emprendida, en los próximos años será conveniente hacer hincapié en la armonización de las legislaciones penales y de procedimiento penal y en el intercambio de funcionarios policiales, especialmente con fines de formación. La cooperazione di polizia nei confronti della criminalità organizzata 261 Les instances de coopération policière internationale en matière de crime organisé Le Traité de Maastricht – Les accords de Schengen Gérard Seroussi, commissaire divisionnaire, chef de la division des relations internationales à la direction centrale de la police judiciaire en matière Les deinstances crime organisé de coopération policière internationale La nécessité de s’adapter continuellement aux formes nouvelles de criminalité organisée transfrontalière liées au développement des moyens de communication modernes, à l’assouplissement des règles régissant les contrôles aux frontières, a conduit les États à organiser des rencontres entre policiers. Informelles et conviviales à l’origine, ces rencontres se sont peu à peu structurées, le cadre national dans lequel s’exerçait la lutte contre la criminalité n’étant plus adapté à la réalité. L’idée de la coopération policière internationale est née en Europe. En 1888, l’Autriche, la Belgique et les Pays-Bas conviennent de l’échange de renseignements sur les criminels opérant dans plusieurs pays. En 1898, la conférence de Rome réunit les pays européens autour du thème de la lutte contre la mouvance anarchique. La Commission Internationale de Police Criminelle, instituée en 1924, est restructurée en 1956 et devient l’Organisation Internationale de Police Criminelle-Interpol. Plus récemment, certaines dispositions du Traité du Bénélux prévoient un droitde poursuite transfrontalière pour les policiers des États signataires et portent ainsi en germe un certain abandon d’une parcelle de souveraineté nationale. En 1975, les ministres de la Justice et de l’Intérieur des pays de la Communauté Européenne instituent le groupe Trevi informel, non fondé sur une convention, pour renforcer la coopération intergouvernementale dans les domaines de la Justice et de la Police. L’objectif premier de Trevi était de lutter plus efficacement contre les actes de terrorisme, le canal d’Interpol qui exclut de son champ de compétence les questions politiques, religieuses ou raciales n’étant pas compatible avec la coopération policière dans ce domaine. Les travaux Trevi ont été par la suite étendus à d’autres domaines dela criminalité organisée et notamment au trafic de stupéfiants. Le bilan des 16 ans d’expérience Trevi, présenté dans le programme d’action relatif au renforcement de la coopération en matière de terrorisme et autres formes de criminalité organisée, a abouti à la mise en place : – d’un réseau protégé de communication.; – d’officiers de liaison dans les États partenaires.; – d’unités centrales de renseignements en matière de stupéfiants.; – d’échanges fréquents de fonctionnaires de police dans le cadre d’actions de formation.; – de dispositifs de renforcement de la coopération dans les régions frontalières.; – de moyens de prévention. Force est de constater que l’acquis Trevi est loin d’être négligeable au moment où il passe le relais aux nouvelles structures et dispositions instituées par le Traitéde Maastricht. Parallèlement aux travaux Trevi, une autre enceinte allait traiter également de coopération policière. Il s’agit des accords Schengen. Outre les relations bilatérales, l’Europe Occidentale, et tout particulièrement les pays membres de l’Union Européenne disposent donc de trois canaux institutionnels de coopération policière internationale : Interpol – le Traité de Maastricht – Schengen. Le présent exposé se propose d’évoquer les dispositions de coopération policière internationale prévues par le Traité de l’Union Européenne (à l’exclusion d’Europol) et par les accords de Schengen. Le Traité de l’Union européenne Une coopération trop informelle ayant montré ses limites, le Traité de l’Union Européenne (TUE) dans son titre VI (Art. K1 à K9) a expressément inclus la coopération policière et judiciaire. Signé le 7 février 1992 à Maastricht, le TUE est entré en vigueurle 1er novembre 1993. Connues plus communément sous (l’appellation) IIIe pilier, ces dispositions définissent un cadre formel de coopération intergouvernementale bénéficiant du support logistique de l’Union Européenne mais excluant tout droit d’initiative au bénéfice de la Commission. Le principe de la compétence exclusive des États-membres a pour conséquence essentielle que les engagements, fruits de cette coopération, doivent prendre la forme de conventions internationales soumises à ratification. L’article K1.9 du TUE définit le cadre dans lequel s’exerce la coopération policière : «.La prévention et la lutte contre le terrorisme, le trafic illicite de drogue et d’autres formes graves de criminalité internationale, y compris si Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 264 nécessaire, certains aspects de coopération douanière, en liaison avec l’organisation à l’échelle de l’Union d’un Système d’Information au sein d’un office européen de police, Europol.». Les travaux en matière de lutte contre le terrorisme La coopération internationale superpose des échanges bilatéraux traditionnelset au niveau européen un dispositif plus complet. Ainsi, au niveau de l’Union, le groupe de travail terrorisme a été chargé de l’inventaire permanent et de l’actualisation de l’état de la menace dans ce domaine particulièrement sensible. Dans ce contexte, l’échange permanent d’informations s’exerce par l’intermédiaire du réseau de communication institué sous Trevi, entre les bureaux de liaison des quinze États membres. Toutefois, au sein de l’Union, c’est dans un cadre bilatéral, par l’intermédiaire d’officiers spécialisés, que la coopération européenne s’avère plus efficace. Les travaux en matière de lutte contre le trafic illicite de stupéfiants et les autres formes graves de criminalité internationale Toutes les présidences successives et l’actuelle présidence irlandaise, ont essentiellement axé leurs travaux sur la lutte contre le trafic de drogue. Dans ce domaine, les études initiales ont débouché sur l’élaboration d’un plan d’action de l’Union Européenne (1994-1999), approuvé par le Conseil européen de Cannes (Juin 1995). Celui de Madrid (décembre 1995) a pris acte des mesures concrètes décidées, sur la base des recommandations de ce plan d’action, relatives à la réduction de la demande, à l’action internationale et aux dispositifs de la lutte contre le trafic. En concertation avec les groupes «.Coopération Policière.», «.Coopération Douanière.» et «.Europol.», le groupe de travail «.Drogue et Criminalité organisée «.a élaboré un échéancier de 66 mesures. La liste par trop exhaustive des actions proposées n’a pour l’instant pas permis de dégager un consensus sur les priorités. La France, pour sa part, considère comme essentiels les domaines suivants : – réduction du tourisme de la drogue.; – coopération en matière de livraisons surveillées.; – amélioration des contrôles aux frontières extérieures.; – étude de la nécessité d’un système de caractéristiques chimiques et d’un réseau européen de laboratoires médico-légaux.; Les instances de coopération policière internationale en matière de crime organisé 265 – définition des critères de sélection pour la collecte des informations policières et douanières. Outre l’organisation de séminaires sur la drogue, des concertations ou des actions concrètes ont été réalisées au bénéfice de pays tiers. Ainsi, les changements intervenus dans les pays d’Europe centrale et orientale (PECO) ont permis la mise en œuvre d’un dialogue structuré et continu avec les pays associés de la région et les États baltes, conformément à la «.Déclaration de Berlin.» de septembre 1994. Les rencontres organisées par les dernières présidences avaient pour objet de recenser les besoins exprimés par ces pays et de jeter les bases d’une coopération renforcée, en évitant les doubles emplois avec les travaux conduits dans d’autres enceintes. Certaines avancées ont été enregistrées en matière de formation, de rationalisation du réseau d’officiers de liaison et de renforcement d’échanges d’informations. Pour faire suite à une initiative franco-britannique (décembre 1995), le Comité Exécutif de Madrid a décidé une action de l’Union dans la zone «.Amérique Latine-Caraïbe.», pour unir les moyens mis en place pour lutter efficacement contre le trafic de stupéfiants et principalement le trafic de cocaïne. Une première réunion d’experts a procédé à une analyse du phénomène dans la Caraïbe et a tiré un premier bilan des mécanismes de coopération existants avec des propositions d’actions concrètes. L’Union Européenne a également noué des contacts étroits avec les Pays Andins (Bolivie – Colombie – Equateur – Venezuela – Pérou). Les travaux portent principalement sur la situation de chacun de ces pays, ainsi que la coopération policière en matière de stupéfiants et de blanchiment d’argent. – – – – Des actions prioritaires ont été définies autour des thèmes suivants : l’échange d’informations.; les contacts directs, notamment via les officiers de liaisons.; la formation.; le développement de la coopération interrégionale. Enfin, la lutte contre le blanchiment d’argent, la traite des êtres humains, les différents trafics importants (biens culturels – véhicules volés) et la criminalité écologique constituent une part non négligeable des travaux au travers de questionnaires, de synthèses actualisées et de propositions de résolutions. *** Dans le cadre du groupe «.coopération policière.» chargé des dossiers relatifs aux domaines de la formation, de l’ordre public, des violences urbaines et des violences racistes et xénophobes, d’importants travaux sont menés en matière de police techniqueet scientifique, outil primordial de nos jours dans la lutte contre la criminalité organisée. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 266 Les champs de coopération explorés sont multiples et concernent notamment : – les techniques en matière d’ADN.; – l’inspection technique des lieux et l’analyse des scènes de crime.; – l’identification des voix et analyses acoustiques.; – les systèmes d’identification automatisés des empreintes digitales. La coopération policière dans l’espace Schengen Le 14 juin 1985, les gouvernements des États de l’Union économique (Bénélux, la République Fédérale d’Allemagne et la République française) signent à Schengen, village viticole de la Moselle luxembourgeoise, l’accord de Schengen relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes. Cet accord officialise l’engagement des États signataires à adopter des mesures aptes à réaliser la libre circulation des personnes au sein de l’espace Schengen. Cinq ans plus tard, soit le 19 juin 1990, la Convention d’application de l’accord est signée. L’Italie, en novembre 1990, l’Espagne et le Portugal en juin 1991, la Grèce en novembre 1992et l’Autriche en avril 1995 rejoignent les cinq pays d’origine. Entrée en vigueur le 1er septembre 1993, la Convention d’application est mise en œuvre le 26 mars 1995 entre sept pays – Allemagne, Belgique, Espagne, France, Luxembourg, Pays-Bas et Portugal. *** La Convention d’application de l’accord de Schengen a organisé la coopération policière entre les parties contractantes autour de trois axes principaux : – la confirmation de la nécessité de développer les échanges d’informations et le réseau de fonctionnaires de liaison.; – la création d’un droit d’observation et d’un droit de poursuite reconnus aux fonctionnaires de police au-delà de leur frontières nationales sous certaines conditions juridiques et techniques.; – la réalisation d’un système automatisé d’information permettant un échange de données opérationnelles en temps réel concernant des personnes ou des objets signalés. L’aspect traditionnel de la coopération Les échanges d’information entre services de police sont expressément prévus et formalisés par deux articles de la Convention de Schengen. Ainsi, l’article 39 autorise les services de police des États Schengen à s’accorder une assistance aux fins de la prévention et de la recherche des infractions. Les instances de coopération policière internationale en matière de crime organisé 267 Toutefois, cette assistance doit répondre aux conditions suivantes : – être autorisé par le droit national.; – rester dans les limites de compétences des services concernés.; – ne pas relever de la compétence des autorités judiciaires.; – ne pas entraîner des mesures de contraintes.; – transiter par un organe central (la Direction centrale de la police judiciaire pour la France), sauf urgence.; – être autorisé par les autorités judiciaires dans le cas où des informations écrites transmises doivent apporter la preuve des faits incriminés. Aux termes de l’article 46, les services de police peuvent d’initiative échanger des informations dans le but de réprimer ou de prévenir des infractions futures, ainsi que pour prévenir des menaces pour la sécurité et l’ordre public. Les fonctionnaires de liaison participent activement à cet échange d’informations et leur mission générale d’assistance policière s’inscrit également dans l’exécution de demandes d’entraide policière et judiciaire. Le terrorisme, les stupéfiants, le crime organisé et les problèmes d’immigration illicite constituent leurs principaux domaines de compétence. Véritable phénomène de société, la consommation et le trafic de stupéfiants qui n’ont cessé de croître ces dernières décennies ont été pris en compte par les rédacteurs de la Convention et font l’objet d’un chapitre particulier. Le groupe de travail permanent prévu à l’article 70 a pour mission de concrétiser et faciliter la mise en œuvre des engagements liant les parties contractantes. Un certain nombre de tâches assignées à ce groupe ont été réalisées. Elles concernent notamment : – l’élaboration d’un manuel complet sur les dispositions légales et pratiques existant dans chaque État en matière de livraisons surveillées.; – une liste de mesures visant à empêcher l’exportation illégale de stupéfiants à partir des territoires Schengen.; – la liste des produits psycho-actifs. À l’initiative de la France, une nouvelle impulsion devrait être donnée aux travaux de ce groupe. Ainsi, elle a proposé à ces partenaires de procéder, à l’intérieur de l’espace Schengen, à une évaluation de la situation des drogues dans chaque État (production des drogues licites et contrôle – cultures illicites et contrôle – provenance des drogues et destinations – profil des trafiquants ou des groupes criminels – profil des toxicomanes...). Cette évaluation élaborée pour l’année 1995 à partir de paramètres communs doit déboucher sur une synthèse globale comparative afin de déterminer les mesures éventuelles à prendre. L’aspect novateur de la coopération «.La libre circulation des policiers.» et la mise en place d’un système d’information commun et opérationnel constituent les deux outils réellement nouveaux pour les policiers des pays Schengen habitués jusque-là à n’évoluer que dans les limites territoriales de leur État d’origine. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 268 En créant deux droits nouveaux, le droit d’observation et le droit de poursuite, la Convention a élargi le champ de l’action de police sur le plan international. Le droit d’observation, défini à l’article 40, donne la possibilité à des agents de la force publique de poursuivre la surveillance d’une personne sur le territoire d’un autre État Schengen si certaines conditions de fond et de forme sont réunies : Conditions de fond : – une enquête judiciaire préexiste.; – la personne surveillée est présumée avoir participé à un fait punissable susceptible d’extradition. Conditions de forme : – l’observation en urgence sans autorisation préalable ne peut avoir lieu que dans les cas d’infractions graves, limitativement énumérées par l’article 40 et relatives aux atteintes graves aux personnes ou aux biens et au trafic de stupéfiants. Elle cesse sur demande du pays requis en cas d’absence d’autorisation dans un délai de cinq heures après le franchissement de la frontière. – l’autorisation préalable de la partie sur le territoire de laquelle se poursuit l’observation est, sauf urgence, nécessaire. Conditions générales d’exercice : – – – – Les agents poursuivants sont tenus de : se conformer au droit du pays dans lequel l’observation se poursuit.; obtempérer aux injonctions des autorités localement compétentes.; disposer d’un document attestant de l’existence de l’autorisation.; justifier de leur qualité officielle. Ils peuvent porter leur armes de service, sauf décision expresse contraire du pays où se déroule l’observation. L’utilisation des armes n’est possible que dans le cadre de la légitime défense. Ils ne peuvent ni procéder à l’interpellation de la personne surveillée ni pénétrer dans les domiciles et lieux non accessibles au public. À la fin de l’observation, les agents poursuivants peuvent être requis personnellement pour apporter leur concours aux enquêtes et procédures liées à la surveillance. Enfin, un rapport complet doit être transmis aux autorités du pays où s’est déroulée l’observation. Si le droit d’observation s’exerce au travers de toutes les frontières des États Schengen (terrestres, aériennes, maritimes), sans limitation d’espace ou de durée, le droit de poursuite s’inscrit dans un cadre plus restreint. Il donne la possibilité aux agents de la force publique qui sont à la poursuite d’un ou plusieurs individus, de continuer cette poursuite sur le territoire d’un autre État Schengen avec lequel il existe une frontière commune. Les conditions suivantes doivent être respectées : – la personne poursuivie en état d’arrestation provisoire ou purgeant une peine privative de liberté, s’est évadée.; Les instances de coopération policière internationale en matière de crime organisé 269 – les agents poursuivants agissent en flagrant délit, dans le cas d’infractions pouvant donner lieu à extradition ou énumérées par l’article 41 de la Convention (les mêmes que celles prévues par l’article 40, plus le délit de fuite dans le cas d’un accident ayant entraîné la mort ou des blessures graves). Les modalités de l’exécution de la poursuite sont identiques à celles de l’observation avec les spécificités suivantes : – les autorités du pays dans lequel s’exerce la poursuite n’ont pu être avisées ou si elles l’ont été n’ont pas pu prendre le relais de la poursuite.; – elle s’exerce exclusivement par les frontières terrestres.; – après chaque opération, les agents poursuivants doivent se présenter aux autorités localement compétentes.; – la personne poursuivie peut être menottée et faire l’objet d’une fouille de sécurité.; – la poursuite est limitée dans le temps et dans l’espace selon des modalités définies par des accords bilatéraux. Ainsi les agents français peuvent exercer leur droit de poursuite comme suit : – en Allemagne : pas de limitation kilométrique et droit d’interpellation accordé, – en Belgique : pas de limitation dans l’espace, mais pas de droit d’interpellation. – au Luxembourg, droit de poursuite limité à dix kilomètres et pas de droit d’interpellation. – en Italie, d° – en Espagne, d° : Selon le principe retenu par la France, aucun agent étranger ne bénéficie du droit d’interpellation. Les policiers allemands et belges peuvent étendre leur poursuite sur l’ensemble du territoire national, alors que leurs collègues luxembourgeois, italiens et espagnols sont limités à dix kilomètres au-delà de la frontière. Pour pallier l’éventuel déficit de sécurité entraîné par la suppression des contrôles systématiques aux frontières intérieures, les États signataires ont convenu de réaliser en commun un système permettant l’échange de données informatisées. Ainsi, grâce à une procédure d’interrogation automatisée, les autorités désignées par les parties contractantes disposent de signalements de personnes et d’objets à l’occasion : – des contrôles aux frontières.; – des vérifications et autres contrôles de police et de douanes exercés à l’intérieur du pays.; – des procédures de délivrance des visas, de la délivrance des titres de séjour et de l’administration des étrangers. Les règles de la coopération policière et judiciaire conçues dans le cadre de Schengen ont imposé la mise en place d’un tel système dont la finalité va au-delà d’un simple fichier de renseignements. Le système d’information Schengen (SIS) est avant tout un fichier opérationnel et de recherche. Basé sur le principe de la réponse «.positive ou négative.», le SIS permet à l’utilisateur d’agir immédiatement sur le terrain selon la conduite à tenir qui lui est indiquée. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 270 Aux côtés de la «.machine.» proprement dite et de façon quasi concomitante, une structure humaine, les bureaux Sirene soutiennent l’action de l’utilisateur du SIS pour l’exécution de sa mission. Composé d’un système central situé à Strasbourg (C. SIS) et d’un système national (N. SIS) dans chaque pays, le fonctionnement du SIS repose sur le principe d’un réseau en étoile rendant impossible l’interconnexion des systèmes nationaux. Les informations sont obligatoirement échangées par l’intermédiaire du système central chargé d’assurer la gestion, la mise à jour, la conformité des données et leur acheminement vers les systèmes nationaux. Ce rôle de «.notaire.» dévolu au C. SIS garantit que tous les États Schengen disposent d’une base de données identique en rendant les échanges transparents et en facilitant les contrôles en matière de protection des données (ces contrôles s’effectuent à la fois sur le plan national et au niveau central). Les contraintes pesant sur le SIS sont très rigides. Outre la sécurité des données (intégrité, disponibilité, confidentialité) le système doit fournir une réponse aux utilisateurs qui disposent ainsi en temps réel, entre autres éléments, du motif de la recherche et d’une première conduite à tenir. La Convention d’application a défini les catégories de données, personnes ou objets, susceptibles d’être intégrées dans le SIS. Les recherches concernant les personnes peuvent se faire dans les cadres suivants : – individus recherchés aux fins d’arrestation en vue de leur extradition.; – étrangers non admissibles sur le territoire Schengen.; – personnes disparues ou à placer en sécurité.; – personnes recherchées dans le cadre de l’entraide judiciaire (témoins, personnes citées à comparaître...).; – individus placés sous surveillance discrète ou devant faire l’objet de contrôle spécifiques. Les véhicules et certains objets (documents d’identité, armes à feu, billets de banque) sont recherchés aux fins de saisie ou de preuve dans une procédure pénale. Il convient en outre de préciser que les véhicules peuvent être signalés pour surveillance discrète ou contrôle spécifique. Les éléments intégrés dans le système étant limités, toutes les informations complémentaires nécessaires au policier du terrain pour le traitement de son dossier passeront par les bureaux Sirene (Supplément d’Information Requis à l’Entrée Nationale). Structure opérationnelle, elle sert d’intermédiaire obligatoire entre les services opérationnels et leurs homologues dans les autres États Schengen. Ce bureau qui fonctionne 24h/24 tout au long de l’année apporte un soutien juridique, technique et logistique aux utilisateurs finaux pour l’exécution des conduites à tenir liées aux signalements et pour la mise en route dans les délais impartis par la Convention des procédures judiciaires et administratives. Dépendant en France du ministère de l’Intérieur, il est implanté à la DCPJ. Il est composé de représentants des services de police, de gendarmerie et du ministère de la Justice. Il est en rapport très étroit avec les autorités chargées de l’administration des étrangers et doit recevoir prochainement un représentant des douanes. Les instances de coopération policière internationale en matière de crime organisé 271 Depuis le 26 mars 1995, date de son entrée en service, le SIS a progressivement montré son efficacité. L’intérêt que porte les États européens non adhérents à la Convention de Schengen à cet outil est certain. Le SIS doit à terme devenir le Système d’Information Européen (SIE) dans le cadre de l’Union Européenne. *** Les canaux institutionnels de coopération policière internationale sont complétés par des accords bilatéraux notamment entre les pays de l’Union Européenne. Les accords bilatéraux de coopération opérationnelle couvrent ainsi les domaines du terrorisme, du crime organisé, du trafic de stupéfiant et de l’immigration, en prévoyant notamment des échanges d’information réguliers entre des points de contact désignés dans chaque pays et par l’intermédiaire des officiers de liaison. Ils organisent également la coopération aux frontières et dans les zones limitrophes. Sur le plan technique, des accords en matière de formation, de police scientifique et d’application professionnelle lient les États de l’Union. Une des réalisations novatrices en matière de coopération internationale est celle de la coordination, de la coopération technique au profit d’États tiers. Ainsi, trois séminaires conjoints franco-allemands au profit de la Hongrie, de la Pologne et de la République Tchèque ont été organisé en 1995 sur la criminalité organisée et ses dimensions économiques et financières. Ce type d’action contribue directement à la sécurité des États organisateurs et des pays bénéficaires. *** La définition de la criminalité organisée internationale, qu’elle soit à dominante criminelle ou financière, quoique difficile à établir, peut s’entendre comme toute activité illicite continue de plusieurs personnes sans souci des frontières nationales. Les travaux menés en Europe occidentale pour déterminer les caractéristiques du crime organisé sur la base de références communes ont permis d’aboutir à une première approche. Onze critères ont été retenus. Toute activité illicite réunissant six de ces onze critères dont trois sont obligatoires entrent dans le cadre de la criminalité organisée. Critères obligatoires : – collaboration de plus de 2 personnes.; – suspectées d’infractions graves.; – motivées par la recherche du profit et/ou du pouvoir. – – – – – Complémentaires : chacun a un rôle dans l’organisation.; pour une durée prolongée ou indéfine.; utilisant une quelconque forme de discipline ou de contrôle.; opérant sur un plan international.; usant de violence ou d’autres moyens adéquats à des fins d’intimidation.; Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 272 – utilisant des structures à vocation commerciale et d’affaires.; – impliqués dans le blanchiment d’argent.; – exerçant une influence dans les domaines de la politique, des médias, de l’administration publique, de la Justice ou de l’économie. *** La multiplication des canaux de coopération internationale, plus particulièrement européens, conduit à une réflexion indispensable, sur la nécessité d’une interface entre les différents systèmes qu’elle crée. Il est en effet important d’aboutir à une complémentarité et non à une superposition des structures. En France, la Direction Centrale de la Police Judiciaire a la charge de cette question. Ainsi, la Division des Relations Internationales, au sein de la DCPJ, intègre les trois systèmes, Interpol, Europol et Schengen. Elle a donc pour mission d’optimaliser la coopération policière dans ces trois enceintes de façon cohérente. Cette intégration prend également en compte le caractère interministériel de cette tâche. La douane, la gendarmerie et la justice participent activement au sein de ce service à ses missions. Les mutations récentes de la criminalité organisée et les changements des normes juridiques européennes ont généré une évolution de la coopération internationale, s’exprimant notamment par un accroissement du nombre des structures. Il semble nécessaire, afin de permettre aux services enquêteurs d’aujourd’hui et de demain d’utiliser des outils fiables et reconnus, de progresser dans l’harmonisation des éléments nationaux dela coopération policière internationale. Les instances de coopération policière internationale en matière de crime organisé 273 Summary The international authorities of police cooperation on organised crime, the maastricht treaty, the Schengen agreement Gérard Seroussi 1) The treaty of European Union In its title VI, the Treaty of European Union formally introduces police and justice cooperation. Signed on the 7th February 1992 in Maastricht, it came into force on 1st November, 1993. Article K1.9 of the treaty set out the scope of police cooperation: “the prevention of and combat against terrorism, drug trafficking and other forms of serious transborder crimes, including if necessary some forms of customs cooperation, in relation with the organisation, on a Union scale, of an information system within a European police office, Europol.” • Work against terrorism is done through specialised officers, on a bilateral basis. • Work against controlled drug trafficking and other forms of serious transborder crimes. Together with the “police cooperation” group, the “customs cooperation” group and Europol, the “drug and organised crime” working group has worked out an agenda of 66 measures. Among these, France regards as essential: the reduction of drug excursions, the cooperation on controlled delivery, the improvement of external border checks, the research on the need for a system of chemical standards and a European network of forensic laboratories, the definition of standard formats for the collect of police and customs information. 2 – The police cooperation in the Schengen territory On the 14th June 1985, the governments of the European Union member states from Benelux, Germany and France signed an agreement in Schengen (Luxembourg) on the gradual removal of controls at the common borders. The convention of execution was signed by seven countries (those of 1985 +Spain and Portugal) and came into force on the 26th March 1995. This convention makes provisions for police cooperation in three directions : the development of exchange of information through liaison officers, a possibility to conduct surveillance and pursuit beyond national borders at some conditions, the setting up of a computerised information system, providing for the exchange of operational data in real time about marked individuals or property. • the traditional aspect of cooperation : article 39 of the convention makes it possible for the police organisations of the Schengen States to assist one another in order to prevent and to detect crime. Under the terms of article 46, the police forces can, on their own initiative, exchange information in order to prevent or to detect crime, or to prevent public disorder. • what is new in the field of cooperation: “Schengen consists in the free movement of police officers” and the establishment of a shared operational information system. The policing and judicial rules of cooperation under Schengen have led to the creation of a central computerised information system (SIS) based in Strasbourg. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 274 Resumen Las instancias de cooperacion policial internacional en materia de crimen organizado, el tratado de maastricht, los acuerdos de Schengen Gérard Seroussi • El Tratado de la Unión Europea : El Tratado de la Unión Europea (TUE), en su título VI, incluyó expresamente la cooperación policial y judicial. Firmado el 7 de febrero de 1992 en Maastricht, entró en vigor el 1 de noviembre de 1993. El artículo K 1.9 del TUE describe el marco dentro del cual se ejerce la cooperación policial : «.La prevención y la lucha contra el terrorismo, el tráfico ilícito de drogas y otras formas graves de criminalidad internacional, incluyendo, si fuera necesario, ciertos aspectos de cooperación aduanera, en relación con la organización a escala de la Unión Europea de un sistema de información dentro de una oficina de policía europea, Europol.». Los trabajos en materia de lucha contra el terrorismo son practicados en un marco bilateral, a través de agentes especializados. En materia de lucha contra el tráfico ilícito de estupefacientes y otras formas graves de criminalidad internacional el grupo de trabajo «.Droga y Criminalidad Organizada.», en concertación con los grupos «.Cooperación Policial.», «.Cooperación Aduanera.» y «.Europol.», elaboró un tablero conteniendo sesenta y seis medidas. Dentro de las mismas, Francia considera esenciales la reducción del turismo de la droga, la cooperación en materia de entregas vigiladas, la mejora de los controles de las fronteras exteriores, el estudio de la necesidad de un sistema de características químicas y de una red europea de laboratorios médico-legales y la definición de los criterios de selección para la recolección de información policial y aduanera. • La cooperación policial dentro del espacio Schengen : El 14 de junio de 1985, los gobiernos de los Estados de la Unión Europea de Bénélux, de la RFA y de Francia firmaron en Schengen (Luxemburgo) el acuerdo del mismo nombre, relativo a la supresión gradual de los controles en las fronteras comunes. La Convención de aplicación, firmada por siete países (los de 1985 más España y Portugal) entró en vigor el 26 de marzo de 1995. Esta convención organiza la cooperación policial alrededor de tres ejes : el desarrollo de los intercambios de información a través de los funcionarios de enlace, la creación de un derecho de observación y de un derecho de seguimiento reconocidos más allá de las fronteras nacionales bajo ciertas condiciones, y la realización de un sistema informatizado de información permitiendo un intercambio de datos operacionales en tiempo real concerniendo personas u objetos buscados. En el aspecto tradicional de la cooperación, el artículo 39 de la Convención autoriza a los servicio de policía de los Estados Schengen a prestar asistencia con fines de prevención y de investigación de infracciones. Según los términos del artículo 46, los servicios de policía pueden, por iniciativa propia, intercambiar información con el objetivo de reprimir o prevenir infracciones y amenazas al orden público. El aspecto más innovador de la cooperación Schengen consiste «.en la libre circulación de policías.» y en la puesta en práctica de un sistema de información común y operacional. Las reglas de cooperación policial y judicial, concebidas en el marco de Schengen, impusieron la puesta den marcha de un Registro Central Informatizado (SIS) instalado en Estrasburgo. Les instances de coopération policière internationale en matière de crime organisé 275 L’evoluzione della criminalita organizzata : la cooperazione di polizia Arnaldo Grilli, Generale dei Carabinieri italiani L’evoluzione della criminalita organizzata : la cooperazione di polizia Premessa La definizione delle modalità per realizzare la cooperazione di polizia a livello sovrannazionale (Union Europea) e internazionale, impone di precisare, prima di tutto, le «.diversità.» che caratterizzano e distinguono le polizie nazionali, le «.legislazioni.» di riferimento dei singoli Stati, nonché i «.fattori.» dei sistemi criminali e delle società nelle quali operano. Le coordinate di riferimento e i «.contenuti.» di maggiore rilevanza per definire le difficolta per la cooperazione tra polizie I caratteri della criminalita organizzata alle soglie del terzo millennio I legislatori dei vari Paesi non sembrano avere preso coscienza del fatto che la criminalità organizzata ha sviluppato un processo di modernizzazione e di sviluppo, peraltro in continua evoluzione, che ne ha mutato sostanzialmente le caratteristiche : a. Da una criminalità d’assalto (dedita a rapine, furti, aggressioni fisiche, incursioni truffaldine nei sistemi economici e finanziari) si è trasformata in criminalità che offre servizi richiesti dal mercato sociale (droga, prostituzione, pornografia, armi, immigrati clandestini, gioco d’azzardo, opere d’arte, sofisticazioni alimentari, gestione illegale rifiuti, evasione fiscale, investimenti «.sicuri.» all’ombra del terrore mafioso, usura, etc.). Considerazione : si è cosi realizzata una vera e propria saldatura culturale tra criminali che forniscono servizi e ampie aree sociali che li richiedono. In tale la polizia non puo risolvere il problema «.culturale.», cioè impedire la richiesta di merce proibita. E’necessario togliere l’acqua, cioè annullare o ridurre le richieste. La polizia si trova sempre più a cozzare contro un muro di omertà, di compiacenze, di affari finanziari sempre più protetti. b. Previsioni : in Italia «.non tutta la mafia militare dei corleonesi è stata battuta. Sono liberi Provenzano e Aglieri e non si sa di preciso in quali rapporti organizzativi fossero con Riina. Sono liberi Massimo Denaro, Salvatore Grigioni e altri mafiosi di relievo. E poi c’è la mafia di sempre praticamente intatta ad Agrigento, Trapani, Marsala, Termini Imerese... la mafia ci sarà dopo Riina e i corleonesi, una mafia preesistente e permanente che non ha perso il controllo del territorio e che dispone di enormi quantità di denaro. Questa mafia sta certamente preparando delle nuove politiche... L’ipotesi più credibile è quella dell’insabbiamento. Non è la prima volta che la mafia si è nascosta nel suo territorio, nella sua cultura, inabissata e indivisible. Non più presenzialista e visible ma nascosta nel reticolo delle piccole cosche, degli aloni amici... «. (intervista a G. Caselli, Procuratore della Repubblica di Palermo, del 24.6.1996). Considerazione in conseguenza dell’azione di «.pentiti.», le mafie saranno sempre più invisibili e con una organizzazione a compartimenti stagni. In tale contesto, contro le organizzazioni mafiose dovranno operare organismi istituzionali parimenti invisibili e ad hoc privilegiando la tecnica di contattare pentiti che pero continuino ad operare nell’interno dell’organizzazione criminale. c. l’insicurezza generalizzata tra le popolazioni si stà accentuando. Cio è la conseguenza di certe scelte di politica criminale che hanno privilegiato la lotta alla grossa criminalità, cioè alle organizzazioni criminali, dedicandovi la quasi totalità delle Forze di polizia e della magistratura. In tale ottica sono state trascurate altre forme di devianza come : la violenza diffusa, il teppismo e soprattutto quelle azioni delittuose erroneamente definite come microcriminalità o criminalità di quartiere. Cio rappresenta un grave errore : poiché più si diffonde il senso di insicurezza più aumentano le reclute per la criminalità organizzata. Non solo, ma il terrorismo diffuso dalle organizzazioni criminali minori, agevola le attività delle mafie nei loro movimenti, nel trovare i sostegni di cui hanno bisogno per il controllo assoluto del territorio. L’insicurezza generalizzata allontana il cittadino dallo Stato e, in particolare, da ogni forma di collaborazione con le Forze di polizia. Considerazione Perché una polizia possa operare deve fare affidamento sulla collaborazione delle popolazioni. Se questa viene a mancare la polizia si troverà sempre più isolata dal contesto sociale. Pertanto IL Legislatore deve ripristinare il Principio Di Autorita attraverso La Sanzione di ogni forma di Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 278 asocialità e di delitto, attaccando contemporaneamente Tutte Le Parti che costituiscono un sistema criminale (vedasi, schema ALL. 1). Insomma, non è conceptibile né accettabile che in uno Stato civile ben l’81 per cento dei delitti commessi in un anno resti A Opera Di Ignoti. Sempre ad opera di ignoti : – il 97,3 per cento dei Furti.; – il 60,4 degli Omicidi Consumati e Tentati.; – l’85 delle Rapine.; – il 72,3 dei Sequestri Di Persona. Senza contare che migliaia di delitti non vengono denunziati per manifesta sfiducia nelle istituzioni dello Stato preposte alla sicurezza dei cittadini. A tale situazione si aggiungono Certe Legislazioni che sembrano create per favorire il criminale anziché tutelare le Forze di polizia e i cittadini. Al riguardo vengono citali : gli eccessi di garantismo, la tendenza al perdonismo e alle riduzioni di pena.; alle forme di libertà, di permessi e altro per soggetti di efferati delitti, nonché alle limitazioni delle possibilità di azione investigativa. Considerazione Gli aspetti indicati demotivano le Forze di polizia a tutto svantaggio delle organizzazioni criminali, sia grandi che piccole. Altre considerazioni si aggiungono allorché si tratterà dei Quadri legislativi ed operativi riguardanti la cooperazione tra polizie. Caratteri delle forze di polizia che rendono difficoltosa la cooperazione – – – – – a/ La cultura dei Quadri, a seconda che si tratti di.; polizie nazionali-centralizzate e locali.; a struttura civile e a struttura militaire.; con dipendenza da organi centrali e dai sindaci.; con o senza organi per la direzione unitaria e per il coordinamento.; con diversa competenza sul territorio : per materia o per territorio. In sintesi : ogni Stato ha strutture di sicurezza diverse, con differenti ordinamenti e funzioni.; b/ la frantumazione di polizie diverse nello stesso Stato. In tale contesto si possono immaginare le difficoltà per il funzionamento operativo di Europol L’evoluzione della criminalita organizzata : la cooperazione di polizia 279 I caratteri delle legislazioni che rendono difficoltosa la cooperazione tra polizie a livello unione europea e internazionale a/ogni Stato ha una propria legislazione penale e differenti forme di procedura. Vedasi, per quanto attiene le diversità legislative, le normative non concordi in materia di stupefacenti (diversi livelli di punibilità), di reati con forme «.organizzative.» (come il 416 bis, dell’antimafia del Codice penale Italiano), l’obbligatorietà o meno della azione penale, il segreto bancario, la sicurezza dei dati personali, l’estradizione, le norme in materie ambientali e dello smaltimento dei rifiuti, le sofisticazioni alimentari e tanti altri settori nel campo della Polizia Giudiziaria e delle Procedure Penali. Per quanto riguarda La Lotta Al Riciclaggio le normative nazionali e internazionali non risolvono il problema. Al riguardo, peraltro, si considera quanto segue : – i flussi finanziari internazionali crescono al ritmo del 20-25 per cento l’anno. Già nel ’92 i movimenti di capitali finanziari toccarono gli 800 miliardi di dollari/giorno e le transazioni commerciali erano a 3.600 miliardi di dollari.; – in un solo giorno possono essere fatte ben 72 operazioni bancarie, in tutto il mondo, sullo stesso denaro.; – le ispezioni da parte della banca centrale agli sportelli bancari sono a livelli minimi e, in genere, provocano poche procedure sanzionatorie.; – infine, la libera circolazione dei capitali è ammessa dagli Accordi CEE.; – le communicazioni attraverso Internet renderà sempre più facile il trasferimento finanziario e le transazioni economiche illegali. Considerazione Gli interventi investigativi della polizia giudiziaria, nel settore dell’antiriciclaggio, si faranno sempre più difficili se non addirittura impossibili grazie anche al favoreggiamento legale da parte dei paradisi bancari e fiscali. Viene inoltre evidenziato che le holding della criminalità Resistono Alle Attivita Di Indagine Della Legislazione Italiana (che è tra le più severe). Infatti, supponendo un fatturato annuo del crimine organizzato di 70 mila miliardi, dal 1982 al 1993 si sono registrati i dati seguenti : – 0,5 per cento Sequestrati.; – di questi soltanto lo 0 09 per cento è stato Confiscato. Considerazioni : – i sequestri colpiscono in misura troppo ridotta rispetto agli sforzi legislativi e con effetti conseguenti sul territorio molto minimi e trascurabili (tutte le società sequestrate sono state chiuse senza problemi di disoccupazione : erano «.scatole vuote.»).; – forme e strumenti con cui le varie mafie del mondo partecipano all’economia legale, sono più sofisticate e meno visibili del passato.; – i sistemi bancari legali non esprimono la necessaria collaborazione (ogni Stato ha una propria legislazione finanziaria di cui sono particolarmente «.gelosi.»).! Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 280 – in sostanza :il riciclaggio del denaro del crimine viene «.mosso.» e «.investito.» da persone (tante.!) ad elevato livello di specializzazione che, inoltre, si muovono in ogni settore economico-finanziario del mondo come «.pesci nell’acqua.» Professionalità e libertà di movimento che non sempre trovano adeguata corrispondenza nelle varie polizie e magistrature. Ia cooperazione di polizia Dopo le considerazioni espresse sulle principali Difficolta che la polizia giudiziaria incontra nella lotta contro i Sistemi Criminali, esprimo soltanto Due Linee per la soluzione del problema : 1) la prima linea (che possiamo definire «.Ideale.» con chiaro riferimento a Platone) è quella di realizzare, almeno in ambito Unione Europea, uno Spazio Giuridico Europeo Il concetto di un «.espace judiciaire européen.» venne lanciato per la prima volta nel 1978 dal Presidente francese Giscard d’Estaing, che avrebbe comportato, secondo le interpretazioni di alcune personalità, un Sistema Comune comprendente : istituzione di una giurisdizione commune, di codici comuni, di un comune processo legale, la creazione di un Tribunale europeo e di una Polizia Europea e di Penitenziari europei. Insomma, un sistema unitario compatto e articolato sul modello dell’FBI statunitense. Non sembra che il modello Europol, previsto dai Trattati di Maastricht, avrà i caratteri indicati e, rischia di diventare un polo di incontro di desideri a cui mancano pero le gambe e le braccia necessarie per una concreta azione operativa, libera di estrinsecarsi nel tempo e nello spazio. A fronte delle resistenze a un siffatto sistema, si poteva almeno crearne uno con gli stessi criteri, con esclusive funzioni per determinate materie, come ad esempio : droga, terrorismo, armi immigrazione clandestina, ecologia-ambiente e sofisticazioni alimentari che, almeno al momento attuale, costituiscono i Principali Delitti Contro l’Umanita.! 2) la seconda ipotesi è molto più modesta ma forse è il massimo che si possa ottenere dalle forze che non vogliono una incisiva cooperazione di polizia. La possiamo definire Sistema Della Nuova Cultura Delle Polizie, che si fonda sugli Accordi Bilaterali i quali favoriscono le conoscenze personali da cui nascono le amicizie tra camerati che sanno di combattere per la libertà e la giustizia contro il terrorismo delle mafie. I Rapporti Diretti tra investigatori dei vari Paesi, sono gli unici momenti di umanità e di una Nuova Cultura, capaci di superare gli ostacoli della burocrazia.; capaci di elimare le gelosie tra istituzioni e tra persone.; capaci di trovare nei tempi brevi le soluzioni ai problemi più difficili da superare e realizzando, un domani, quel Sistema Di Sicurezza Europeo e forse Mondiale, fondato su uno Spirito Comune Come quello che univano, in una ferrea cœsione, i Monaci-Soldati, i Soldati «.Ideali.» come sicuramente li avrebbe definiti Platone. L’evoluzione della criminalita organizzata : la cooperazione di polizia 281 Se anche questo modesto modello operativo dovesse fallire, significa che nel mondo di domani, i nostri figli vivranno l’Età Oscura del dominio dei sistemi criminali. Loro si, veramente uniti, compatti e decisi a realizzare gli obiettivi del male ad ogni costo.! Ma fintanto che uomini e donne come voi presenti, rifiuterete di arrendervi, l’umanità civile puo ancora sperare di prevalere. Con questa speranza auguro buon lavoro nel nome della nuova cultura per la cooperazione tra forze di polizia.! Sintesi e conclusioni La cooperazione non costituirebbe un problema se si realizzasse l’utopia di Napoleone Bonaparte, naturalmente riferita al mondo intero. Cioè : «.l’Europa deve avere un solo codice di leggi, una sola corte d’appello, una sola moneta.». Quindi, un solo organismo di polizia. La questione «.cooperazione tra polizie.» nell’attuale momento storico, ed in quello futuro deve considerare molte realtà normative nazionali e internazionali, che, purtroppo, favoriscono oggettivamente i sistemi criminali, il cui mondo operativo, a confronto di quello «.legale.» e «.garantista.», non conosce nessuna forma di frontiera. Ricordiamo : diversità di legislazioni.; differenti sistemi giudiziari, articolazioni non unitarie delle polizie nazionali e accentuate limitazioni delle iniziative nel campo investigativo e quasi nulle le loro possibilità nel settore della azione informativa preventiva. In sintesi, i principali ostacoli ad una cooperazione che consenta.; – rapporti diretti tra investigatori sia nel contesto nazionale che di altri Stati.; – risposte immediate.; – e la massima riservatezza, Sono : 1 la sempre più vincolante dipendenza della polizia giudiziaria dalla Magistratura inquirente, che ha sostanzialmente annullato la fase dell’attivita’conoscitiva da parte della stessa polizia giudiziaria. Tale fase è, invece, fondamentale per la elaborazione di un quadro di riferimento o di situazione dal quale si puo sviluppare una razionale e concreta investigazione giudiziaria.; 2 altro ostacolo è la sempre più complessa e articolata rete delle garanzie individuali che, pur se necessarie per la salvaguardia dei diritti dell’uomo, nella sostanza vincolano e limitano sia la fase degli accertamenti informativi per l’individuazione del crimine sia la fase dell’azione penale vera e propria. Cio premesso : rimando alla lettura della mia relazione per il riferimento agli altri fattori che non soltanto impediscono una cooperazione diretta-immediata nelle risposte e riservata tra polizie dei vari stati, ma la frantumano Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 282 nel labirinto dei diversi gradi ordinativi, interni e internazionali, e la rallentano a fronte della ricezione di autorizzazioni o nulla-osta di varia natura, anche non necessariamente di organi della magistratura (si pensi, al riguardo, ad accertamenti preventivi e, poi, giudiziari, nel caso di indagini nel settore bancario-economico-finanziario.!). Pertanto, in relazione a quanto esposto, Indico una linea di modalità pratica per una efficace cooperazione a livello internazionale contro i sistemi della criminalità organizzata, peraltro caratterizzati dalla massima segretezza sia a livello modalita’operative sia nei vari livelli di comando e in quelli della gestione finanziaria. La linea indicata non presuppone l’istituzione di nuovi istituti, bensì una certa forma di coordinamento di quelli già esistenti. Inoltre, la stessa linea propone di riconsiderare la validità e i vantaggi di una certa separatezza tra la fase informativa preliminare e la fase delle indagini giudiziarie. In tale contesto : 1) La polizia giudiziaria nazionale richiede informazioni di carattere generale (se riferite a determinati fenomeni criminali) o di carattere specifico (se riguarda uno o più soggetti oppure certe situazioni economoco-finanziarie) ai servizi di sicurezza (si consideri che le forme di criminalità internazionale, sono vere e proprie attività di eversione dei sistemi democratici.; 2) i servizi di sicurezza, ritrasmettono la richiesta ai servizi di intelligence collegati.; elabora poi le risposte con una prima analisi di intelligence, che invia alla polizia giudiziaria nazionale.; 3) La polizia giudiziaria nazionale può così disporre di un quadro di situazione complesso e articolato nonchè supportato da una serie di dati raccolti a vasto raggio. Tali dati, integrati da quanto recepito attraverso i normali canali interpol ed europol, consentono l’élaborazione del quadro informativo da sottoporre al magistrato inquirente che, dopo ulteriori azioni «.mirate.» integrative, puo così procedere all’azione investigativa avendo a disposizione una vasta gamma di dati di riferimento. Concludendo : con la linea concreta indicata, purchè non mortificata da pregiudizi di varia natura, è possibile realizzare un sistema unitario di cooperazione, quindi più efficace, per lottare contro i sistemi criminali sempre più «.segreti.» e per scoprire le loro casseforti internazionali (sino ad oggi poco o per nulla toccate) nonchè il riciclaggio nell’economia legale dei vari Paesi. La linea puo essere cosi sintetizzata : 1) Polizia Giudiziaria rivolge richiesta, con ogni possibile dato di riferimento, ai : 2) Servizi di Sicurezza Nazionali che attivano, con proprie reti-comunicazioni i : 3) Servizi di Sicurezza di altri Paesi, che raccolgono i dati, li elaborano e rispondono. 4) Analisi di intelligence da parte dei Servizi di Sicurezza Nazionali, sulla cui base : 5) la Polizia Giudiziaria puo inviare alla Magistratura inquirente un quadro informativo per l’avvio della ricerca dei dati di prova. L’evoluzione della criminalita organizzata : la cooperazione di polizia 283 Summary Police co-operation in relation to organised crime Arnaldo Grilli At the brink of the 21st century we must be aware that organised crime has radically changed and has now turned into a sort of holding of services with the means to propose to the people what the community is not always in a the same position to give. National members of parliament have not appreciated this new deal early enough and has not voted the laws which would have helped law enforcement agencies to win that battle against organised crime. Each country should implement a methodology of common efforts of: –the legislative branch whose job it is to propose a conception of the world as it should be and to write the laws that make it possible to enforce it. –the criminal police and the security forces. –the judiciary and the prosecution system. The fact that in Europe each country has its own different police structure (centralised national police force – local or county police forces – civilian organisations – military organisations) that are limited to the enforcement of their own laws (sections of the criminal code and codes of practice related to the treatment criminal evidenc) makes it difficult to reach an effective level of police co-operation. So, in order to reach a better level of co-operation, it is necessary to follow one of two possible tracks: –the ideal direction to follow within the European Union is to build up a judicial European territory with common structures and common judicial districts as well as common rules of criminal legal practice. In this framework, it becomes possible to conceive the existence of an operational European police force structured around unified operational European command. –the more modest alternative would be based on a system build around the new police culture of bilateral agreements. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 284 Résumé La coopération de la police en matière de criminalité organisée Général Arnaldo Grilli À l’aube du IIIe millénaire, il doit être pris conscience que la criminalité organisée s’est profondément transformée, pour devenir aujourd’hui une sorte de holding de services en mesure de satisfaire les demandes des citoyens que la société traditionnelle n’est pas en mesure de pourvoir. Faute d’avoir pris acte suffisamment tôt de cette révolution culturelle, le législateur national n’a pas mis les forces de sécurité en mesure de lutter efficacement contre les mafias. Au plan national, il convient d’adopter une démarche méthodique conjuguant les efforts : – du législateur à qui il appartient de proposer une vision du monde et d’être prêt à la défendre, y compris par la force en redonnant un sens au concept de sanction.; – la police judiciaire et les forces de sécurité.; – la magistrature et le ministère public. Les difficultés entravant le bon fonctionnement de la coopération policière au niveau européen et international sont que chaque État dispose de sa propre structure de police (police nationale centralisée – police locale.; structure civile – structure militaire), agissant en fonction d’une législation (droit pénal et procédure pénale) elle-même spécifique. Aussi pour améliorer cette coopération, est-il possible d’emprunter une des deux voies suivantes. La voie idéale consiste à réaliser au sein de l’Union européenne un espace juridique européen comprenant des institutions et des juridictions communes, un code et un processus légal communs. Dans ce cadre, il est concevable de consacrer l’existence d’une police européenne opérationnelle organisée via un commandement opérationnel européen unifié. L’alternative plus modeste tend à définir le système de la nouvelle culture policière fondée sur des accords bilatéraux. L’evoluzione della criminalita organizzata : la cooperazione di polizia 285 Resumen La cooperacion policial en materia de criminalidad organizada Arnaldo Grilli En las puertas del III milenio, debe tomarse conciencia de la profunda transformación de la criminalidad organizada, que se ha convertido en la actualidad en una especie de holding de servicios capaz de satisfacer las demandas de los ciudadanos a las que la sociedad tradicional no puede dar una respuesta. Por no haber tomado en cuenta esta revolución con la suficiente anterioridad, el legislador nacional no puso a disposición de las fuerzas de seguridad las herramientas necesarias para luchar eficazmente contra las mafias. En el plano nacional, es necesario adoptar una metodología sistemática conjugando los esfuerzos : – del legislador, a quien corresponde proponer una visión del mundo y de estar dispuesto a defenderla, incluso por la fuerza, dando nueva importancia al concepto de sanción. – la policía judicial y las fuerzas de seguridad.; – la Magistratura y la Fiscalía. Las mayor dificultad para el buen funcionamiento de la cooperación policial a nivel europeo e internacional es que cada Estado dispone de su propia estructura de policía (policía nacional centralizada – policía local, estructura civil – estructura militar), que actúa en función de un legislación (derecho y procedimiento penal) también específica. Para mejorar esta cooperación, es necesario tomar uno de los dos caminos siguientes : La vía ideal consiste en crear dentro de la Unión Europea un espacio jurídico europeo que comprenda instituciones y jurisdicciones comunes, un código y un procedimiento legal comunes. En este marco, se podría consagrar la existencia de una policía europea operacional organizada a través de una dirección operacional europea unificada. La alternativa más modesta tiende a definir el sistema de la nueva cultura policial fundada en acuerdos bilaterales. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 286 L’enjeu économique de la lutte contre la criminalité organisée Nouvelles stratégies économiques de la criminalité organisée : guérillas et mafias Jean-Christophe Rufin, universitaire français, directeur de recherches à l’Institut de relations internationales et stratégies (IRIS), ancien conseiller auprès du ministre de la Défense guérillas et Nouvelles mafias stratégies économiques de la criminalité organisée : Précisons tout d’abord le sujet : il s’agira pour nous dans cette communication de cerner (schématiquement) la stratégie économique des nouveaux acteurs apparus sur la scène de la criminalité organisée ces dernières années, particulièrement depuis la fin de la guerre froide, avec l’éclatement et l’affaiblissement de nombreuses entités étatiques et la multiplication des conflits civils. Notre ambition ne sera ni de démonter les circuits financiers de la criminalité organisée (sujet qui demanderait d’autres compétences : douanières, bancaires, financières), ni de chiffrer les différentes masses de profits criminels. Ce qui nous intéresse est ailleurs et nous pourrions le résumer brièvement : c’est l’entrée récente sur la scène du crime organisé d’acteurs nouveaux qui appartenaient jusqu’ici à un domaine différent, celui de la lutte politique. Ces acteurs étaient en général étudiés par les spécialistes de politique étrangère qui se penchaient sur des conflits lointains, parfois très exotiques. Or du fait des bouleversements stratégiques récents, ces acteurs lointains, tamouls, kurdes, chinois ou péruviens font irruption au sein des pays développés et concernent désormais tout autant le policier chargé des questions de sécurité intérieure que les spécialistes de défense et de politique étrangère. Depuis la fin de la première guerre mondiale, nous étions habitués à une dichotomie entre groupes mafieux dont la logique était le profit et mouvements politiques dont la logique était politique. On savait qu’il pouvait exister des liens (cf. par exemple : A. Mc Coy.; la politique de l’héroïne). On connaissait des exemples d’empiétement d’un domaine sur l’autre : tel chef de cartel qui se présentait aux élections ou telle milice libanaise naissant d’une caste d’entrepreneurs expatriés (chiites Amal). Mais le phénomène était relativement clair : la finalité des mafias restait le profit et elles ne cherchaient pas à acheter une influence politique que pour servir leurs intérêts économiques. Les mouvements armés, quant à eux, se fixaient des objectifs «.nobles.» (libération nationale, décolonisation, révolution politique) et leur activité économique relevait de l’intendance (ou de la corruption). Qu’est-ce qui a changé et quand : certains prétendent que les mouvements armés auraient désormais «.dégénéré.» dans le crime et perdu, avec la chute des idéologies, toute ambition politique. Nous assisterions à une évolution vers le «.tout-mafia.», l’activité de profit englobant et annulant toute autre préoccupation. Nous ne le pensons pas. Le distinguo entre mouvements politiques armés et mafias reste encore pertinent, et même essentiel. Ce qui a changé ces dernières années, c’est le mode de relations des deux entités qui, pour des raisons que nous allons examiner, sont amenées à collaborer, à échanger des méthodes, de l’argent, des hommes. La raison principale de ce changement est la transformation des économies de guerre des mouvements politiques armés. Par ce terme d’économie de guerre, on désigne l’ensemble des opérations économiques par lesquelles un mouvement politique armé pourvoit aux besoins matériels de ses combattants (pour leur nourriture, leur transport et leur armement) et des populations qu’il contrôle. Les économies de guerre peuvent être très frustres dans le cas de rébellions éphémères plus ou moins spontanées. Dans le cas de mouvements menant des luttes armées depuis plusieurs années, et étendant leur pouvoir à de vastes territoires et à des populations entières, les économies de guerre sont d’une grande complexité. Leur étendue est récente. Nous avons coordonné récemment pour le compte du ministère français de la Défense, une recherche d’ensemble dont vous trouverez l’essentiel dans un ouvrage paru ce mois-ci. Au cours des années de l’après guerre, les forces pratiquant la violence politique n’ont cessé de se multiplier dans le monde et en particulier dans le tiers monde. Dans un premier temps, les mouvements armés se fixaient principalement pour ambition la décolonisation et trouvaient des sympathies tant aux États-Unis que dans le monde soviétique. Au tournant des années soixante, après l’édification du mur de Berlin et de la crise des fusées, le statu quo en Europe sera à peu près assuré et les deux grands vont éviter toute confrontation directe. Leur affrontement se déplace vers le tiers monde, où la Chine joue, de plus, son propre rôle. Ceci va entraîner la politisation et la multiplication des mouvements de guérilla pendant cette période. Après 1975, une vague de révolutions marxistes va déstabiliser de nombreux États et les occidentaux auront recours, pendant les années 80, au soutien (indirect) des mouvements armés en lutte contre les nouveaux régimes radicaux. Pour toutes ces raisons, les guerres civiles du tiers-monde ont été pendant trente ans l’une des scènes d’affrontement de la guerre froide et il n’était guère difficile pour ceux qui pratiquaient la violence politique de rencontrer des bailleurs de fonds disposés à encourager leur action en vertu de l’adage «.l’ennemi de mon ennemi est mon ami.». Retenons donc ceci : pendant les trente dernières années, les mouvements armés dans le monde ont bénéficié largement de soutiens extérieurs, accordés pour des raisons politiques, en vertu d’un jeu d’intérêt diplomatique et stratégique relié à la guerre froide. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 290 Ces soutiens se manifestaient principalement par le biais de relations de proximité. L’instrument essentiel en était les sanctuaires militaires et humanitaires dont les pays armés pouvaient disposer sur le territoire d’un pays voisin et ami. Le type du sanctuaire militaire est par exemple celui dont disposait le Viêt-minh en Chine à partir de 1949 pendant la première guerre d’Indochine. Le type de sanctuaire humanitaire était par exemple celui dont les mujahiddins afghans disposaient au Pakistan le long de la frontière. Or aujourd’hui, pour de nombreuses raisons, les économies de guerre fondées sur des soutiens politiques et des relations de proximité sont en voie de rapide disparition. L’ordre bipolaire s’est effondré, les stratégies de déstabilisation indirectes n’ont plus guère de pertinence et les mouvements armés, comme d’ailleurs nombre de gouvernements légaux auxquels ils s’opposaient, ont perdu leurs soutiens politiques extérieurs. De même, la tendance n’est plus guère aujourd’hui à tolérer les vastes exodes de réfugiés qui constituent l’une des bases du système des sanctuaires frontaliers (même si l’exemple du Rwanda l’a prouvé, il n’est pas toujours possible de l’éviter). Les optimistes ont cru, au début des années 90, que le tarissement de ces financements extérieurs entraînerait mécaniquement un retour à la paix et une démobilisation des belligérants dans les conflits locaux. Toutes les observations récentes montrent le contraire : les conflits prolifèrent, les mouvements armés se multiplient, accroissant le nombre de leurs combattants et ne sont en rien calmés par l’absence des incitations extérieures. C’est donc que leurs économies de guerre reposent sur d’autres bases. En effet, dans la période actuelle, il faut mettre l’accent sur de nouveaux modes de financement des conflits. Pour rester schématique, nous dirons que les ressources des belligérants ne sont plus l’expression de soutiens politiques mais de plus en plus le fruit d’une activité économique et d’une inscription dans une logique de marché. L’instrument n’en est plus seulement l’échange transfrontalier régional comme au temps des sanctuaires mais le réseau international. L’activité criminelle des belligérants et leur intérêt pour les activités lucratives ne sont pas nouveaux mais ils prennent une importance croissante, notamment du fait du recul des capacités de contrôle des États, notamment en Afrique. De vastes ensembles de territoires, peu ou pas contrôlés par le pouvoir central, s’offrent à l’activité économique des mouvements de rébellion. Au Cambodge, on estime à un million de $ par mois le revenu que les Khmers rouges tirent de l’abattage des bois tropicaux dans les régions qu’ils contrôlent. En Afghanistan, la substitution de l’économie de production à l’économie d’assistance étrangère est perceptible et chiffrable. Les revenus de l’opium représentaient 20 millions de $ par an dans les années 80, soit 10.% de l’aide perçue par les Mujahiddins. au cours de ces dernières années, l’opium a pris une place bien plus importante.; l’Afghanistan est devenu le premier producteur mondial avec plus de 3000 tonnes par an et les profits de la drogue sont venus compenser le tarissement des autres formes d’aide internationale. Nouvelles stratégies économiques de la criminalité organisée : guérillas et mafias 291 L’activité économique des mouvements armés n’est pas toujours fondée sur la production.; ils s’insèrent plus souvent au niveau du contrôle ou de la taxation des ressources locales exploitées par d’autres agents. Dans ce domaine, l’instrument privilégié des mouvements armés, qui leur confère un avantage comparatif, est la force. L’inscription économique des guérillas est donc très particulière : elle implique quasiment toujours une prééminence de la force sur le droit, qu’il s’agisse d’exploiter illégalement des produits licites (caoutchouc, pierres précieuses, diamant) ou d’exploiter des produits illicites (drogues, ivoire, antiquités protégées). Les mouvements armés tirent profit de l’insécurité des zones où ils opèrent et de leur capacité à manier la force. On peut distinguer deux types extrêmes dans ces formes d’activité économique : la prédation, qui répond à une logique de pillage, et la criminalisation ou exploitation criminelle qui préserve l’outil et le gère en ponctionnant une part destinée à alimenter l’effort de guerre. En Afghanistan de nouveau, deux impôts prélevés par la guérilla, le zakât et l’ushr portent l’un sur les marchandises, l’autre sur les récoltes. Aux Philippines, les combattants communistes du MNLF (Midanao) touchent environ 20.% des produits de la vente de marijuana. Cette proportion atteint 40.% dans le cas de Khun Sa, dans le triangle d’or. C’est par le biais de ces activités économiques que les mouvements politiques armés entrent en contact avec les groupes mafieux plus classiques. Ce contact peut avoir lieu à différents niveaux : sur place, tout d’abord, lorsque les groupes armés taxent et «.protègent.» l’activité de groupes criminels (ceci est particulièrement vrai en ce qui concerne le trafic de drogue).; régionalement dans le cas où un mouvement armé exploite directement des ressources et les commercialise par le biais d’un débouché régional (cas des Kmers rouges en Thaïlande, par exemple).; à grande distance, dans les pays développés, pour la commercialisation finale. Beaucoup de groupes armés (les FARC colombiens, le Sentier Lumineux, les factions afghanes, les guérillas philippines, indiennes ou casamançaises par exemple) ne sont pas en mesure d’intervenir en dehors de leur zone d’influence locale. Les relations entre mouvements armés et organisations mafieuses peuvent prendre plusieurs formes : taxation, joint-ventures commerciales, revente de produits, troc (drogue contre armes par exemple). Beaucoup de choses, en la matière, dépendent de la capacité ou non des mouvements armés à disposer dans les pays développés de relais autonomes. Ceci pose le problème des diasporas actives. Ces diasporas peuvent dans certains cas avoir été développées à l’instigation des mouvements armés eux-mêmes (cas des Tamouls en Europe occidentale). Dans le cas des Tamouls du LTTE, comme du PKK, on estime que l’intégration économique est totale : ces mouvements armés politiques, à travers leurs diasporas, contrôlent toute la chaîne des intermédiaires et donc des profits, de la production jusqu’à la revente de rue. Celle-ci s’effectue dans des pays, en particulier en Europe occidentale qui ne souhaitent nullement encourager ces mouvements. Nous ne sommes plus dans une logique de soutien diplomatique mais dans une logique d’accès au libre marché. Une éventualité particulière : le cas de l’ex-Yougoslavie où on a vu confluer au sein d’une diaspora ancienne les activités criminelles d’une pègre traditionnelle et les enjeux politiques et ethniques nouveaux-nés du conflit. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 292 Dans les relations souples et particulières à chaque terrain entre organisations criminelles et organisations politiques armées, la proximité peut donner une fausse impression de confusion, voire de communauté d’enjeux. L’analyse peut être d’autant plus délicate dans certains cas que certains délinquants, une fois appréhendés, peuvent faire valoir, à tort, des motivations politiques. C’est ainsi que plusieurs Kossovars albanais interpellés en Suisse pour trafic d’héroïne ont prétendu être des combattants nationalistes.; cependant le gouvernement kossovar en exil affirme qu’il n’en est rien et que ce sont de simples trafiquants mafieux. Qui croire.? En vérité, même s’il est exact que certains chefs politico-militaires ont pu, dans certains cas, évoluer vers la corruption et le banditisme, et si, inversement, des délinquants ont pu être saisis par la grâce d’un engagement politique, force est de constater que derrière ces cas d’espèce, une règle demeure : la logique politique continue d’être différente de la logique du profit. Il est important de démêler, dans l’activité de ces différents groupes, ce qui ressortit à l’une et à l’autre de ces finalités. Le déploiement et la diversification des deux groupes se feront dans un sens différent selon qu’ils se rattacheront ou non à un conflit local et à un enjeu politique. Pour les groupes à finalité politique, on assistera souvent à une diversification d’activité, centrée sur le même objectif politique. C’est ainsi qu’un réseau de soutien et d’encadrement d’une diaspora (cas des kurdes de Turquie) peut être utilisé pour des activités économiques (collecte des fonds destinés au PKK), pour une activité de lobbying auprès des instances internationales en faveur de la cause kurde, et pour des actions violentes, au besoin, aller jusqu’aux assassinats politiques et au terrorisme. Les groupes mafieux à finalité économique auront, eux, une diversification plus large et indépendante d’un cadre géographique. Une même organisation criminelle peut vendre ou trafiquer drogues ou armements avec des mouvements armés issus de régions du monde très différentes. La police italienne a ainsi démantelé ces dernières années des réseaux criminels mixtes : échange drogues-armes concernant le couple Colombie-ex-Yougoslavie dans un cas (affaire de Vérone, juin 1994) et le couple Camorra napolitaine-Algérie dans un autre cas (affaire Djamel Loucini, militant du FIS arrêté à Milan en novembre 1994 et engagé dans des tractations avec des groupes criminels). L’essentiel, dans ce bref résumé, est de retenir que les nouvelles conditions de survie des mouvements armés dans le monde, y compris ceux qui sont originaires de régions lointaines et sans interface avec nous, les conduisent à faire irruption sur la scène de nos sociétés. Ils viennent y chercher par la seule loi du marché les ressources qu’ils n’obtiennent plus par solidarité idéologique. Leurs interlocuteurs naturels, dans ces domaines illégaux, sont évidemment les organisations criminelles qui complètent et leur fournissent des produits illicites (armes) dont ils ont besoin. À la faveur des nouveaux conflits, l’économie informelle en général et l’économie criminelle en particulier donnent naissance à de nouveaux entrepreneurs politico-économiques dont la puissance est décuplée par les occasions d’enrichissement rapide que leur fournit la situation de guerre. Nouvelles stratégies économiques de la criminalité organisée : guérillas et mafias 293 Summary Organised crime new economic strategies Jean-Christophe Rufin The world wide trends lean toward the appearance on the international stage of organised crime executives who up to now were concerned with political fighting. Up to now there has been no linking between criminal financial networks and political activist financial networks. It must nevertheless be kept in mind that the nature of their relations has changed. in depth. As external support tends to dry up, the guerrilla group are getting into a logic of criminalisation in order to gather the financial resources which are necessary to maintain their combat activities and they progressively tend to get away from policies of local mediation which do not prove sufficiently effective in the long term. This criminalisation of the guerrillas is growing through a systematic military exploitation of local resources (levying of local taxes), or through the involvement in the trafficking of illegal goods. When this happens, they necessarily make financial links with organised crime which provides them with adapted and corresponding trade networks. Resumen Las nuevas estrategias economicas de la criminalidad organizada Jean-Christophe Rufin La situación planetaria actual conduce a la emergencia, en la escena internacional del crimen organizado, de nuevos actores que pertenecían hasta hoy al dominio de la lucha política. Si no hay todavía fusión entre las redes económicas ilegales bajo obediencia criminal y las redes de activismo político, es conveniente notar que sus relaciones han profundamente cambiado. Como los apoyos exteriores están desapareciendo, las guerrillas entran en una lógica de criminalisación para encontrar los recursos para su combate y tienden a abandonar un poco la lógica de mediación local que se revela ser poco eficaz a su fin. Esta criminalisación de las guerrillas se electúa sea par la explotación manu militari de las riquezas locales (tasación), sea por el compromiso en el tráfico de bienes ilícitos. Con este motivo, no dejan de trabar lazos a fnalidad económica con la criminalidad organizada que es capaz proporcionarles redes de comercialisación adaptados y experimentados. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 294 L’enjeu économique de la lutte contre la criminalité organisée Félix Baënziger, substitut du procureur général de la Confédération helvétique à Berne L’enjeu économique de la lutte contre la criminalité organisée Introduction L’Institut des Hautes Etudes de la Sécurité Intérieure a jugé opportun d’inviter également un rapporteur suisse pour parler de «.L’enjeu économique de la lutte contre la criminalité organisée.». Je remercie l’Institut de l’honneur qu’il me fait par son invitation, laquelle – je tiens à le relever – ne va pas de soi dans la mesure où la Suisse est encore absente de nombreuses organisations internationales. La direction du Cours est apparemment partie de l’idée que la Suisse avait quelque expérience en matière de criminalité organisée vue sous l’angle économique. Peut-être pense-t-elle aussi que c’est là l’unique secteur du crime organisé auquel la Suisse est confrontée et que celle-ci n’a pas été touchée directement, jusqu’ici, par le phénomène proprement dit de la criminalité organisée. Ces deux points de vue renferment une part de vérité. Il n’y a en fait aucun élément pertinent donnant à penser qu’en Suisse la criminalité organisée exercerait une influence systématique sur l’État et l’économie, comme – vous ne l’ignorez pas – c’est déjà le cas dans d’autres pays. Cela ne signifie toutefois pas que la criminalité de base organisée ne soit pas présente en Suisse. Chez nous aussi, des réseaux criminels pratiquent systématiquement le trafic illégal de stupéfiants. Mais il est exact aussi que la Suisse joue un rôle important dans le secteur économique de la criminalité organisée, notamment en ce qui concerne le blanchissage d’argent. On se gardera toutefois de croire que seule la Suisse, ou elle principalement, lave de l’argent sale. Il est vrai que des organisations criminelles abusent des ressources typiques qu’offre mon pays en tirant profit, en particulier, de sa forte position économique, des connexions internationales de son système bancaire et économique, de sa situation centrale en Europe et de son secteur des services performant. À cela s’ajoute la caractéristique que la Suisse abrite une société ouverte, libérale et pluraliste.; elle connaît peu de contrôles étatiques et accorde une grande liberté de mouvement à ses citoyens et aux étrangers qui y vivent. Relevons cependant que d’autres places financières offrent également ces avantages, qui peuvent parfois même être meilleurs. Nous avons aussi des raisons de penser que la part suisse aux transactions globales de blanchissage d’argent a plutôt diminué ces dernières années, ce qui demeure une maigre consolation en regard des sommes énormes qui sont blanchies. Les experts estiment le chiffre d’affaires annuel du crime organisé à quelques 500 milliards de dollars. L’organisation criminelle en tant qu’entreprise économique Permettez-moi maintenant, dans une première partie de mon exposé, d’esquisser l’exemple d’une entreprise économique se livrant à la production et à la diffusion d’un bien illégal. Cette entreprise entend exploiter le potentiel d’un produit dit d’agrément qui pousse dans certaines régions du monde où les autochtones le consomment sous sa forme naturelle. Les conditions internationales du marché pour ce produit agricole se révèlent plutôt défavorables du fait que l’alcaloïde contenu dans la plante constitue l’une des principales drogues en circulation sur le marché mondial. Tant la production que la diffusion représentent des activités à risques : une fois découverts, les champs de production sont détruits et, en matière de diffusion dans les pays de consommation, on risque constamment la confiscation par les services douaniers ou par les organes de sécurité. Or, les importantes marges bénéficiaires en perspective incitent à prendre ces risques. Reconstituons, à ce stade, le cheminement de pensée de l’entrepreneur : Une fois prise la décision de principe de s’engager dans l’affaire, il va se pencher, comme tout producteur normal d’un bien légal, sur les questions concernant l’approvisionnement en matières de base et sur celles regardant les débouchés. La fabrication d’un bien consommable est une entreprise onéreuse car elle nécessite une infrastructure à l’exemple de celle requise habituellement pour une industrie chimique. Les matières de base entrant dans la fabrication doivent pouvoir être préparées en grandes quantités, ce qui réclame la mise sur pied d’une division spéciale que l’on pourrait appeler «.Logistique d’approvisionnement.». La commercialisation du produit fini s’avère encore plus difficile. La logistique des ventes implique la création d’un réseau de transport et de distribution capable de résister à des interventions étatiques. Les problèmes d’approvisionnement et d’écoulement réglés, la production peut démarrer et, grâce aux marges bénéficiaires élevées, l’affaire se développe très bien. Rapidement pourtant, de grosses difficultés apparaissent dans le domaine de la logistique financière, difficultés auxquelles l’entrepreneur qui agit dans la légalité est moins confronté. La vente du produit provoque l’accumulation d’importantes sommes d’argent en petites coupures. Cette situation crée des complications à l’entreprise car l’argent ne peut être que difficilement utilisé sous cette forme. L’entreprise doit pourtant continuer de financer la production et la commercialisation de son produit et, pour ce faire, a régulièrement besoin de disposer sous une forme adéquate d’une partie des profits réalisés. En outre, l’entrepreneur veut naturellement aussi rentabiliser le solde de ses bénéfices étant donné que sa motivation, tout comme pour celui Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 296 qui fait commerce de produits légaux, est de nature financière. Si l’argent est le nerf de la guerre, il est aussi celui des activités d’une entreprise. L’interruption du flux d’argent représente donc aux yeux d’une entreprise illégale l’un des plus grands dangers pour son existence. Une entreprise de la nature de celle que nous venons de décrire, laquelle se livre bien sûr au commerce de la cocaïne, doit donc résoudre quelques «.petits.» problèmes qui ne se posent pas tous de la même manière ou avec la même acuité : En logistique d’approvisionnement, la difficulté réside dans le fait que l’achat de matières de base éveille les soupçons des instances étatiques qui n’ignorent pas les propriétés particulières de ces substances à servir à des fins illégales et qui ne sont pas sans savoir que de grosses quantités doivent être mises en réserve. Le problème est important mais pas insoluble. Quand bien même la logistique de commercialisation est onéreuse, les profits élevés réalisés autorisent le financement de moyens de transport élaborés qui permettent largement de contourner les contrôles. Reste la logistique financière qui est pour moi le véritable talon d’Achille de notre entrepreneur trafiquant de drogue. S’il n’est pas en mesure de réinvestir ses gains, c’est que l’affaire a échoué. Je ne prétends pas que chaque structure du crime organisé soit comparable dans cette mesure avec une entreprise légale. Toujours est-il que beaucoup d’argent est régulièrement en jeu, ce qui implique dans notre travail de criminalistes une approche financière. Si je vais dès maintenant délaisser les problèmes de l’acquisition d’argent pour des projets d’organisations criminelles pour aborder davantage la question de la destination des produits du crime, cela tient, vous vous en doutez, à mes origines suisses. Les formes du blanchissage de l’argent J’en arrive ainsi au véritable sujet de mon exposé, à savoir le blanchissage de l’argent qui, ainsi que je l’ai déjà relevé, occupe, en Suisse, la première place dans le domaine de la lutte contre la criminalité organisée. Permettez-moi de vous exposer brièvement comment ce blanchissage peut s’effectuer. Vous voudrez bien aussi faire preuve de quelque indulgence si mes propos vous paraissent incomplets et ne vous semblent pas toujours correspondre à vos expériences. Ces dissimilitudes proviennent du fait que les formes du blanchissage d’argent dépendent fortement du régime juridique en vigueur dans les différents pays. C’est par exemple le cas de l’exportation et de l’importation de fonds qui peuvent être soumises ou non à déclaration. Il existe plusieurs possibilités d’agencer et de définir les subdivisions du sujet sur le blanchiment d’argent. Les hommes de terrain et les auteurs d’ouvrage qui écrivent sur le thème proposent chaque fois des éléments de réflexion différents. Personnellement, je m’en tiens à la systématique adoptée dans l’ouvrage suisse de référence intitulé «.Geldwäscherei : Motive – Formen – Abwehr / Eine betriebswirtschaftliche Analyse.» (ouvrage non traduit en français, mais dont le titre pourrait être «.Blanchissage : Motifs – Formes – Répression / Une analyse de gestion d’entreprise.») de Christof Müller, professeur à l’Université de St-Gall, institution réputée pour ses travaux précisément L’enjeu économique de la lutte contre la criminalité organisée 297 sur la gestion d’entreprise. Je trouve plausible la systématique qu’il utilise, quand bien même on lui trouvera le désavantage de recourir souvent à des expressions anglaises, comme on le fait couramment dans les ouvrages d’économie publiés en allemand, précisément ma langue maternelle. Comme on le sait, les objets du blanchissage d’argent sont l’argent en espèces, la monnaie scripturale ou les autres valeurs patrimoniales qui proviennent directement ou indirectement d’un délit. Le but du blanchissage est de donner à ces valeurs une forme d’utilisation légale. Les capitaux doivent, dans la mesure évidemment où ils ne servent pas au financement d’activités illégales, être reconnus comme des revenus légaux imposables dans le pays de destination. Composés de petites coupures qui remplissent souvent des valises entières, les profits extraordinaires provenant des délits doivent devenir des comptes d’affaires de bon ton munis d’une légende propre. Quelle est la manière de procéder en la circonstance.? Dans une première phase, les pistes susceptibles de révéler l’origine illégale des fonds sont brouillées et effacées par la transformation en d’autres formes de valeurs et par des transferts dans d’autres pays.; ces opérations s’effectuent tout au long d’un processus de plusieurs étapes qui, au besoin, peut être répété. Suit une deuxième phase au cours de laquelle sont développées des affaires légales qui serviront de justificatifs pour l’autorité fiscale. Le but est atteint lorsque l’origine des valeurs patrimoniales créées paraît plausible à tout expert fiduciaire ou réviseur fiscal. Le degré de blanchissage d’argent dépend en premier lieu de l’affectation ultérieure des capitaux. Ainsi, le financement d’autres activités illégales n’exige pas un degré élevé, pourrait-on dire, de «.propreté.».; la méthode de blanchiment est moins onéreuse que pour d’autres buts d’utilisation, comme celle d’investir les fonds dans des entreprises légales. Quoi qu’il en soit, il n’existe pas de déroulement obligatoirement uniforme des différents procédés. En fait, il y a dans chaque cas une foule d’éléments à prendre en considération, lesquels influent sur les choix tactiques du blanchisseur : le régime juridique du pays où a été commis le délit et celui en place dans le pays de destination.; la forme des bénéfices dégagés du délit.; l’utilisation finale prévue de ces fonds. L’ouvrage de référence que j’ai cité distingue quatre catégories de formes de blanchiment d’argent qui sont les suivantes : – le franchissement des frontières nationales.; – le placement.; – le brouillage (en anglais «.layering.»).; – l’intégration. Il existe dans chaque catégorie ce que j’appellerais des variantes de jeu qui sont appliquées seules ou combinées en fonction de la situation et des besoins. Tout délinquant et tout criminaliste sait que le franchissement des frontières nationales est source d’avantages comme d’inconvénients. Cette remarque est valable non seulement pour le délinquant qui fuit à l’étranger, mais aussi pour les bénéfices provenant d’activités délictueuses. C’est pourquoi le franchissement des frontières nationales est aussi utilisé dans le processus du blanchissage de capitaux, avant tout des billets de banque. L’argent liquide peut, sous certaines conditions, circuler tout à fait légalement Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 298 d’un pays dans un autre, en particulier lorsqu’aucune restriction n’est mise à l’exportation ou à l’importation de capitaux. Tout le monde connaît l’image du courrier qui apporte des valises de numéraires dans des banques à l’étranger. S’il est un problème à ne pas sous-estimer en matière de transport d’argent, c’est celui du volume des billets de banque qui, par exemple, est beaucoup plus important que celui de la valeur équivalente en drogue. Ce volume devient plus encombrant encore lorsque le blanchisseur doit passer l’argent en contrebande pour contourner les prescriptions légales. De ce point de vue, le transfert électronique est moins coûteux, mais il nécessite un «.placement.» préalable dans le pays où les profits sont réalisés. Les opérations de compensation et les transactions d’«.underground banking.»sont d’autres formes de franchissement des frontières nationales. Les modes de blanchissage dits de «.placement.» servent à contourner l’obligation de déclaration et d’identification lors du versement d’argent comptant sur des comptes bancaires. L’entrée dans le système financier légal par le «.placement.» est considérée comme une des phases délicates du recyclage d’argent sale. La méthode la plus simple consiste à utiliser un homme de paille crédule. Relevons comme autres possibilités : la corruption active ou le chantage exercé plus précisément contre l’employé qui, dans un établissement financier, est chargé de vérifier l’identité des ayants droit économiques. Autre méthode encore, les fonds à laver peuvent être répartis sur une multitude de petites transactions non touchées par l’obligation de déclaration et de vérification de l’identité, ce qui permet d’échapper aux mesures de contrôle. Il va de soi que cette rapide énumération de formes de placement ne prétend nullement à l’exhaustivité. Selon l’utilisation visée, les capitaux acquis de manière délictueuse doivent subir un processus de blanchiment au terme duquel l’argent apparaît comme acquis légalement. Le «.layering.» permet de brouiller les pistes dans l’éventualité d’une tentative de déterminer l’origine des fonds. Toute la palette des prestations offertes par une place financière moderne peuvent être utilisées en l’occurrence. Il est possible de semer une totale confusion en édifiant un réseau de comptes complexe, régulièrement ouverts sous des noms différents. Le blanchisseur obtient une sécurité accrue s’il parvient à dissimuler les capitaux derrière le paravent du secret bancaire, d’autres secrets commerciaux ou professionnels, mais surtout du secret auquel est tenu l’avocat. Une astuce fort prisée consiste à élever en quelque sorte un mur de brouillard en transférant le pouvoir de disposition à des sociétés, et en particulier, à des sociétés de domicile. Une fois les traces de l’origine de l’argent sale effacées par l’opération de brouillage, il s’agit de trouver une nouvelle origine pour les capitaux, légale celle-ci. C’est alors le travail de «.l’intégration.». Toute une panoplie de méthodes et procédés sont disponibles dans ce domaine également, avec une prédilection toutefois pour le montage d’affaires fictives qui, soit n’ont absolument pas lieu, soit n’ont pas l’importance qu’on leur prête. Ce n’est que dans la phase finale du blanchiment d’argent qu’il est possible de procéder à des investissements directs dans des entreprises légales. Une proportion importante des affaires de blanchissage découvertes jusqu’ici, et dans lesquelles on a relevé une implication suisse, touchent à l’importation physique de billets de banque. Il serait par trop simple d’en déduire que c’est avant tout de l’argent liquide qui est lavé en Suisse. Tous les signes L’enjeu économique de la lutte contre la criminalité organisée 299 portent à croire que les syndicats du crime transfèrent leurs capitaux déjà sous la forme de monnaie scripturale et qu’ils recourent aux services du secteur financier : la place financière suisse revêt une importance particulière dans les phases du brouillage («.layering.») et de l’intégration. La position géographique centrale de la Suisse, l’efficacité de son secteur financier, la présence d’étatsmajors spécialisés de financiers et d’autres conseillers, et notamment les usages traditionnels de la discrétion constituent des avantages appréciés non seulement par la clientèle opérant légalement mais aussi par les blanchisseurs. Mesures contre le blanchissage d’argent (à la lumière de l’exemple suisse) Quels sont les enjeux économiques de la lutte contre la criminalité organisée et contre le blanchissage.? Quelle est la parade que l’État peut trouver.? Les possibilités peuvent être d’ordres très divers. Je me propose, pour ma part, de vous présenter ce que la Suisse a entrepris à ce jour et ce qu’elle envisage encore de faire. En réalité, il faut reconnaître que la panacée n’existe pas en ce domaine. Les mesures déployées en Suisse ne sauraient être appliquées telles quelles dans un autre pays. Au cours des six dernières années, la Suisse a édicté de nombreuses prescriptions pour lutter contre le blanchissage de capitaux. Le premier train de mesures, datant du 1er août 1990, porte sur le droit pénal. La Suisse dispose en effet depuis cette date d’une norme pénale visant le blanchissage d’argent et d’une disposition sur le défaut de vigilance en matière d’opérations financières. La disposition sur le blanchissage d’argent (art. 305bis CPS) sanctionne tout acte propre à entraver l’identification de l’origine, la découverte ou la confiscation de valeurs patrimoniales d’origine criminelle. La dissimulation du butin constitue déjà une infraction. Le blanchiment d’argent implique nécessairement l’existence d’un acte antérieur constituant un délit réprimé par la réclusion. En droit suisse, sont notamment considérés comme des actes antérieurs les cas graves de trafic de stupéfiants ou de commerce illicite d’armes, les affaires d’escroquerie, de brigandage, les prises d’otages, les cas d’extorsion et chantage. Seul le blanchissage intentionnel est poursuivi pénalement. La disposition de base prévoit une peine d’emprisonnement de trois ans au plus. Dans les cas graves, par exemple lorsque le délinquant agit en tant que membre d’une organisation criminelle ou qu’il réalise un chiffre d’affaires ou un gain importants en faisant métier de blanchir de l’argent, la peine est alors la réclusion pour cinq ans au plus. La norme relative au défaut de vigilance en matière d’opérations financières (art. 305ter CPS) est conçue différemment. L’infraction ne peut être imputée qu’à des personnes travaillant dans le secteur financier telles que les banquiers, les agents fiduciaires, les conseillers en placement ou les avocats d’affaires. Ces catégories professionnelles encourent des sanctions pénales si elles négligent de vérifier l’identité des ayants droit économiques conformément à la vigilance que requièrent les circonstances. La pénalisation d’un tel compor- Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 300 tement constitue une mesure qui complète la punissabilité du blanchiment en soi. Un second train de mesures est entré en vigueur le 1er août 1994. Il contient principalement le droit de communication du financier qui est maintenant expressément habilité à communiquer aux autorités de poursuite pénale les indices lui permettant de conclure que des valeurs patrimoniales proviennent d’un crime, sans pour cela devoir s’attendre à des suites pénales pour violation de secrets. Ce paquet de mesures comprend également l’introduction d’une norme pénale sur l’organisation criminelle (art. 260ter CPS) et l’amélioration du droit de la confiscation. Les nouvelles dispositions concernant la confiscation permettent aux autorités de poursuite pénale de confisquer toutes les valeurs patrimoniales sur lesquelles une organisation criminelle exerce un pouvoir de disposition. Dans ce domaine, la loi prévoit un renversement du fardeau de la preuve : en effet, un membre d’une organisation criminelle dont les biens ont été bloqués doit désormais prouver au juge que les valeurs patrimoniales séquestrées ne sont pas issues du pouvoir de disposition de l’organisation. Ce pouvoir est supposé exister jusqu’au moment où la preuve du contraire aura pu être fournie. En Suisse, les mesures de droit pénal que je viens de vous exposer ont été renforcées de manière très efficace par des efforts déployés dans d’autres domaines. Relevons en premier lieu les directives de la Commission fédérale des banques relatives à la prévention et à la lutte contre le blanchiment de capitaux, qui ont été arrêtées en 1991. Ces instructions émises par l’autorité de surveillance des banques fournissent notamment des éléments aux personnes soumises à la loi qui régit le secteur bancaire suisse pour interpréter les dispositions légales sur le blanchissage. Elles énumèrent également une série d’indices de blanchissage d’argent et proposent des mesures à prendre en cas de soupçons. Les directives de la Commission fédérale des banques n’ont pas force obligatoire, c’est-à-dire que leur violation n’entraîne pas de suites pénales. Mais elles peuvent cependant être utilisées par le juge pour interprétation en cas d’application de la norme pénale sur le blanchissage. Par ailleurs, les banques dans leur quasi-totalité se sont obligées, à l’égard de l’Association suisse des banquiers, à observer des règles de diligence. La Convention relative à l’obligation de diligence des banques fixe en effet, d’une part, les règles en vue de la vérification de l’identité du cocontractant et de l’identification de l’ayant droit économique et prévoit, d’autre part, dans le cadre de l’Association suisse des banquiers, des sanctions en cas de violation de ces règles. En 1993, la Chambre fiduciaire suisse a également déclaré ces dispositions applicables par analogie à ses membres. Cela dit, le concept actuel de lutte contre le recyclage d’argent sale recèle encore une faille majeure qui se situe dans le domaine parabancaire. Cette lacune devrait être comblée par l’adoption d’une loi fédérale relative à la lutte contre le blanchissage qui prévoit d’étendre les mêmes mesures de lutte appliquées aujourd’hui par les banques au secteur non bancaire. Le projet de loi comporte des dispositions concernant : la vérification de l’identité du client.; L’enjeu économique de la lutte contre la criminalité organisée 301 la conservation des documents permettant de suivre le cheminement des valeurs, ce que les banquiers appellent le «.paper trail.».; les devoirs particuliers de vérification de l’intermédiaire financier qui est en présence d’indices de blanchissage ou d’éléments similaires. De nombreux points contenus dans cette proposition de loi sont l’objet de controverse. L’une des divergences majeures réside dans la question de la nécessité ou non d’introduire une obligation de communiquer en cas de soupçons concrets de blanchissage, telle qu’elle existe déjà, sous des formes différentes, dans plusieurs pays européens. Aujourd’hui, la Suisse connaît en effet uniquement un droit de communication. Il existerait bien sûr d’autres mesures susceptibles d’entraver les mouvements internationaux de capitaux, celle par exemple qui consisterait à introduire déjà à la frontière une obligation de déclaration stricte. Mais il n’est toutefois guère possible d’envisager de telles mesures pour la place financière suisse qui, à ce titre, fait en premier lieu office de plaque tournante pour les capitaux d’origine légale. Ce serait entraver les activités légales du secteur des services dans une mesure trop importante du point de vue helvétique. Conclusions Vous le voyez bien, Mesdames et Messieurs, il existe des ébauches de moyens pour lutter contre le crime organisé, qui consistent à interrompre ou à ralentir les mouvements de capitaux. Les organes de l’État ne doivent pas rester là les bras ballants, comme contraints et forcés d’assister au spectacle de l’accumulation des profits par les acteurs du trafic de drogue, du commerce illégal d’armes ou de la criminalité transnationale. Certes, les États ne sont pas en mesure d’éradiquer le crime organisé en tant que tel en prenant des mesures contre le blanchissage.; mais ils peuvent, en revanche, contribuer à ce que ce phénomène ne prenne pas une ampleur démesurée. Ces diverses possibilités de lutte doivent être introduites sur le plan légal et complétées par des mesures de procédure pénale. Je pense notamment, en l’occurrence, aux agents infiltrés ou à une future réglementation concernant certaines catégories de témoins, comme les «.pentiti.», en Italie. Dans tous les pays, les autorités policières et judiciaires doivent donc appliquer ces mesures sans consentir à des compromissions. Cette attitude implique, à tous les échelons, une coopération internationale renforcée qui soit moins complexe et plus efficace. Les cours tels que celui d’aujourd’hui, organisés au niveau international pour les forces de police, peuvent dans une certaine mesure aider à la réalisation d’une telle ambition, que ce soit par la transmission des connaissances ou par la formation de réseaux de relations qui s’étendent au-delà des frontières nationales. Je vous remercie, Mesdames et Messieurs, chers Collègues, de votre attention. Enfin, je réitère mes remerciements à l’Institut des Hautes Etudes de la Sécurité Intérieure pour son invitation et la qualité de son accueil. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 302 Summary The financial implications of organised crime Félix Baënziger By its central geographic situation, its liberal policy, the strength of its Stock Exchange, and of its banking and financial systems, Switzerland appears as having an important role in the economic sector of organised crime. Organised criminals are appearing to be increasingly respectful of the rules specific to any businesses. In order to develop, a such venture needs supply, trade and financial logistics. The real Achilles’heel of our drug trafficking businessman is financial logistics. There are many money laundering methods, one reason being just the different legal systems of each country. However, to a certain extent, they all go through the four following steps : –the “crossing of national borders” either in a very simple way (suitcase of banknotes) or in a more sophisticated one (electronic transfer). –the “invest” of funds in legal activities through a third credited party or a third party of convenience in order to bypass the possible requirements of notification or identification of the genuine holder. –the “layering” which is the setting up of a complex financial network that makes use of various professional secrecy in order to reinforce the concealment of the funds’origin. –the “integration”, that is to provide the funds a legal position. The response to this by the authorities is to undermine the course of this financial process, to “stop or delay the flow of funds”. To do so, the Swiss authorities have taken, since 1990, a number of measures to penalise money laundering acts and to make the official financial organisations more responsible. For the moment, the financial organisations are free to give or not to give information about money laundering. The question now is: should this freedom be turned into an obligation. A proposed law in this direction is currently discussed. The financial organisations have taken into account the aspiration to have money laundering restrained. For that purpose, rules of more expeditious practice have been adopted. L’enjeu économique de la lutte contre la criminalité organisée 303 Resumen El sector economico de la lucha contra la criminalidad organizada Felix Baënziger Por su posición geográfica central, el liberalismo de su sistema político y la potencia de su sistema bursátil, bancario y económico, Suiza juega un importante rol dentro del sector económico de la criminalidad organizada. Esta última obedece cada vez en mayor medida a las reglas de funcionamiento propias a cualquier empresa económica. Esta empresa necesita para su desarrollo una logística de abastecimiento, una logística de ventas y una logística financiera. La logística financiera es el verdadero talón de Aquiles del empresario traficante de drogas. Existe una gran diversidad en los métodos de blanqueo de dinero, aunque más no sea por el diferente régimen jurídico en vigor en los distintos países. Sin embargo, todos incluyen las cuatro etapas siguientes : – El «.cruce de las fronteras nacionales.» que puede tener lugar de manera básica (valijas con billetes) o bajo formas más sofisticadas (transferencia electrónica).; – El «.depósito.» de los fondos en actividades legales por utilización de terceros reales o ficticios con el fin de esquivar las eventuales obligaciones de declaración o de identificación de los interesados económicos.; – El «.loyering.» o borrado de rastros que consiste en la puesta en práctica de una compleja red financiera que recurre a múltiples secretos profesionales para reforzar el secreto del origen de los fondos.; – La «.integración.», operación que consiste en conferir un origen legal a los fondos. Frente a este panorama, la acción del poder público consiste en dificultar el buen desarrollo del proceso financiero, «.interrumpiendo o retardando los movimientos de capitales.». Con este objetivo, las autoridades suizas, a partir de 1990, tomaron una serie de medidas que apuntan a penalizar las acciones de blanqueo de dinero sucio y a responsabilizar a los actores financieros internacionales. Estos últimos benefician actualmente de un libre derecho de comunicación de las informaciones relacionadas con el blanqueo. Está en discusión si este derecho debe ser transformado en obligación. Una propuesta de ley en este sentido es examinada en la actualidad. Las instituciones financieras han tomado en cuenta el deseo de ver limitado el blanqueo, por lo que han sido dictadas reglas de diligencia profesional. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 304 Crime organisé et délinquance informatique Philippe Rosé, journaliste au journal Le Monde informatique, ancien président de l’Institut de recherche international sur le crime informatique Crime organisé et délinquance informatique En 1992, dans le cadre d’une étude réalisée pour le compte de l’IHESI concernant l’évolution de la criminalité informatique à l’horizon 2005, nous écrivions : «.de nouveaux acteurs apparaîtront, en particulier le crime organisé, pour des raisons d’opportunité et de nécessité de diversifier ses activités.».1. À l’époque, une telle analyse pouvait paraître pour le moins incongrue. En particulier parce que l’on ne disposait guère d’éléments tangibles prouvant l’implication du crime organisé en matière de délinquance informatique. Mais, aujourd’hui, force est de reconnaître que certaines tendances se dessinent. Le crime organisé (notion qui n’englobe pas seulement les mafias mais aussi les gangs et autres groupes de plusieurs personnes associées pour commettre des délits en commun) s’intéressent de près aux hautes technologies. Celles-ci ne se résument pas à l’informatique mais incluent également les télécommunications, les composants électroniques et les cartes de crédit. On peut identifier quatre catégories de raisons pour lesquelles le crime organisé et la technologie vont converger : – l’évolution «.naturelle.» des délits informatiques, qui augmentent fortement, – des raisons économiques, liées à la baisse des profits générés par les activités traditionnelles du crime organisé (trafic de drogue, racket, prostitution....), – des raisons politiques, à la fois sur le plan national (par exemple en Italie) et au niveau international (CF les initiatives du sommet du G7 contre le terrorisme et le crime organisé), – des raisons sociologiques, liées à l’émergence de nouvelles générations de criminels et de mafias, de plus en plus implantées dans les entreprises. Les tendances du crime informatique Actuellement, deux tendances sont significatives. Et si l’on se place dans la perspective des autorou-tes de l’information et du réseau Internet, elles apparaissent même fondamentales. La première concerne la structure des menaces internes et externes à l’entreprise. On considère depuis longtemps 1. Rosé (Ph.) : La criminalité informatique à l’horizon 2005, analyse prospective, L’Harmattan, 1992. que, en moyenne, 70 à 80.% des fraudes informatiques sont d’origine interne. Mais aujourd’hui, on observe un certain rééquilibrage au profit d’une menace externe de plus en plus visible. En particulier, l’ordinateur apparaît de moins en moins comme l’objet même de la délinquance informatique et, de plus en plus, comme son instrument. Autrement dit, on vole moins un PC pour sa technologie que pour les informations qu’il contient ou celles auxquelles il permet d’accéder. On ne compte plus les managers américains dont les micros «.disparaissent.» lorsqu’ils viennent en visite en Europe. Outre la valeur intrinsèque de l’information contenue dans les machines, les voleurs de micro-ordinateurs portables peuvent utiliser des accès réseaux dont les mots de passe sont souvent pré-programmés. En matière de délinquance informatique, quatre postulats s’appliquent : 1 – toute entreprise détient des informations stratégiques stoc-kées sur des ordinateurs et qui intéressent ne serait-ce que ses concurrents.; 2 – tout système informatique et de télécommunications comporte au moins une faille, de même que l’on trouvera tou-jours des bogues dans les logiciels et l’on trouvera toujours un moyen de contourner un système de sécurité.; 3 – quiconque a accès à un système d’information est susceptible de découvrir ces failles. C’est ce qui explique la forte proportion de fraudes internes. Selon une enquête réalisée en Grande-Bretagne en octobre 1994 auprès de 1.000 entreprises, 75.% des frau-des étaient d’origine interne, dont 15.% commises par des cadres.; 4 – plus les risques de se faire prendre sont faibles et plus la probabilité d’utilisation malveillante est élevée. Il s’agit d’un postulat classique que l’on retrouve dans toutes les formes de délinquance. Les années 1980 : l’informatique se banalise La seconde tendance de fond de l’évolution des risques concerne le poids de plus en plus important des détournements d’information et de fonds. Cet aspect constitue la «.troisième vague.» de la délinquance informatique (voir tableau ci-après). La première est liée à l’apparition des micro-ordinateurs et à leur banalisation dans les entreprises. Le problème essentiel, dont on a abondamment parlé au milieu des années 1980, était le pira-tage de logiciels. Ceux-ci étaient en effet encore très coûteux et l’offre beaucoup moins étoffée qu’aujourd’hui. Les entreprises ou plus exactement les éditeurs de logiciels, puisque ce sont eux qui supportent les préjudices, avaient avant tout affaire à une menace interne à l’entreprise, de la part d’amateurs dont la motivation essentielle consistait à voler un bien, fut-il immatériel, pour son usage propre ou pour l’échanger contre un autre. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 306 Les années 1990 : le hacker-roi La seconde vague, qui démarre au milieu des années 1980, correspond à l’émergence des réseaux locaux et étendus, ainsi que des ponts qui les relient. C’est l’époque des grandes affaires de détournements de fonds et des «.exploits.» des hackers qui pira-tent la NASA, le Pentagone et toute cible qui représente un symbole «.politico-technologique.». Dans ce cas, les menaces ne sont plus simplement internes, mais deviennent également externes, le hacker étant le plus souvent étranger à l’entreprise dont il pénètre de façon illicite les systèmes d’information. Les motivations sont à la fois d’ordre économique (par exemple : détourner de l’argent) et ludique (montrer sa supériorité sur la machine). Les victimes ont affaire à des spécialistes dont le mot d’ordre est «.voler ou pirater sans être vu.». Les années 2000 : les professionnels du cyber-crime À l’heure de la prolifération des systèmes d’information, de l’informatique distribuée et des réseaux, bref des futures autoroutes de l’information, apparaissent de véritables «.professionnels.». Le problème est que de moins en moins d’entreprises se trouvent réellement à l’abri. On peut resituer cette tendance à l’accroissement de la malveillance dans une perspective historique. Selon les chiffres du Clusif (Club de la Sécurité Informatique Français), la malveillance représentait 40.% des pertes totales dues à l’informatique en 1984. Dix ans plus tard, ce poids atteignait 60.% et devrait dépasser largement les 70.% en l’an 2000.1. Le problème de l’insécurité des systèmes d’information s’aggrave avec le développement d’Internet. Internet, c’est l’anonymat, et l’anonymat profite aux criminels. Lors de la conférence sur la guerre de l’information («.Information Warfare.»), qui s’est tenue en septembre 1995 à Washington, il fut révélé que 60.% des plus grandes entreprises sont connectées à Internet sans protection particulière. Et seulement une entreprise américaine sur cinq a défini une politique vis-à-vis d’Internet, y compris pour protéger leurs informations confidentielles. Le CERT (Computer Emergency Response Team) a répertorié une augmentation de 500.% dans le nombre d’intrusions informatiques et une progression de 710.% dans le nombre de sites piratés, entre 1991 et 1995. Pour la seule année 1994, 40.000 ordinateurs reliés à Internet ont été attaqués lors de 2.460 incidents.2. En Grande-Bretagne, les ordinateurs de la mairie de Londres (City of London) connaissent 1.500 attaques chaque semaine.3. Selon le FBI, 90.% des affaires de délinquance informatique qui sont traitées concernent directement ou indirectement Internet.4. En février 1994, le CERT avertit 1. Rosé (Ph) : La criminalité informatique l’horizon 2005, op. cit. 2. Sikorovsky (E) : «.New Hacking Penalties to Protect Federal Sites.», Federal Computer Week, 5 juillet 1995. 3. Boyle (B) : «.From Russia with bugs.», Computer Weekly, 26 octobre 1995. 4. Rendleman (J) : «.It’s a Crime, And it Happens On-Line.», Communications Week, 28 mars 1994. Crime organisé et délinquance informatique 307 les utilisateurs d’Internet d’un vol de plusieurs dizaines de milliers de mots de passe, dont 6.000 pour l’université de Berkeley.1. Sur l’ensemble de l’année 1994, le CERT a dénombré pas moins de 2.341 fraudes sur Internet, contre seulement six en 1988.2. En outre, des réseaux comme Internet favorisent le piratage de logiciels. Avec un modem rapide, il suffit de quelques minutes pour télécharger des logiciels stockés sur des serveurs.3. On estime qu’en 1994, sur les trois mille accès illicites perpétrés via Internet, seulement 3 à 15.% sont reportés.4. Avec la tendance à «.l’externalisation.» du crime infor-mati-que, il est logique de voir surgir des nouveaux acteurs. Le crime organisé ne peut que s’intéresser au crime informatique. Comme le souligne Louis Freeh, directeur du FBI, «.nos ennemis sont loin d’être stupides. Ils comprennent comment atteindre leurs objectifs en acquérant des parts de marché.».5. La vulnérabilité des entreprises demeure préoccupante Le problème est que le niveau de sécurité des entreprises n’a guère évolué. Les entreprises doivent donc se battre sur plusieurs fronts car il leur faut à la fois éviter : – de perdre de l’argent (par exemple avec un détournement de fonds par ordinateur).; – de perdre leur image.; – de perdre leur savoir-faire (cas d’accès à des fichiers des centres de recherche-développement).; – enfin, de perdre leur patrimoine. Selon les assureurs américains, les vols de matériels ont occasionné, en 1993, un préjudice d’un milliard de dollars aux entreprises. Et seulement 7.% des maté-riels sont retrouvés, selon les statistiques du FBI. Plusieurs affaires récentes montrent que les failles sont toujours là. Par exemple, en novembre 1994, le piratage des bases de données de l’opérateur britannique British Telecom eut pour effet de mettre sur la place publique les numéros de télé-phone privés de la famille royale, ainsi que la localisa-tion de certaines antennes des services secrets.6. En novembre 1994 également, des escrocs ont profité du chan-gement de version de logiciel d’une banque pour voler 340.000 dollars dans des distri-buteurs automatiques de billets, avec une seule carte de crédit.7. 1. Kehœ (L) : «.Internet.» break-ins «.add to fears on computer security.», Financial Times, 5 février 1994. 2. Cheswick (W) : «.Internet bad Guys Ruin Your Competitive Edge.», Computerworld, 31 mai 1995. 3. Mizio (F) : «.Copies non conformes.», Libération, 19 mai 1995. 4. Rendleman (J) : «.The New Internet Intruders.», Communications Week, 30 janvier 1995. 5. Discours de Louis Freeh à l’International Association Of Chiefs of Police, Albuquerque, 18 octobre 1994. 6. Cf. Fleming (S) : «.The BT Hacker Scandal : How I hacked into security files.», The Independent, 24 novembre 1994, Kelsey (T) : «.Unvetted BT staff can still access database secrets.», The Independent, 25 novem-bre 1994, Evans (D) : «.Crime and Punishement.», Computer Weekly, 1er décembre 1994. 7. Sur cette affaire, voir Anderson (D) : «.Wild Ride with Hot Card.», The Oregonian, 8 février 1995. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 308 Plusieurs études montrent également que le niveau de sécurité n’a guère évolué. Une étude publiée en juin 1995 par Olsten Corp.1 a montré que les problèmes de sécurité sont les plus criants lorsque les entreprises étendent et/ou modernisent leurs systèmes d’information. En un an, la proportion d’entreprises qui placent la sécurité comme priorité numéro un est passée de 50.% à 75.%. En 1994, la priorité était l’intégration de systèmes, avant la sécurité. Aux États-Unis, une analyse portant sur 35.000 utili-sateurs publiée en août 1994.2 révèle que 11.% des mots de passe n’étaient jamais changés pour les accès aux réseaux locaux, que 22.% des utilisateurs disposaient de privilèges équivalents à ceux de l’administrateur de réseaux, que 90.% des mots de passe n’étaient pas modi-fiés périodiquement et, enfin, qu’un quart des mots de passe étaient triviaux, c’est-à-dire relativement faciles à deviner, d’autant qu’il existe des outils de recherche de mots de passe utilisés par les hackers du monde entier.3. Une autre étude, publiée par le cabinet Ernst & Young en décembre 1994 portant sur 1.271 entreprises montre que 60.% de celles-ci ont déjà été attaquées par des virus informatiques, que, pour 82.% des directeurs informatiques, les risques ont crû au moins autant que l’informatisation. La moitié des entreprises interrogées ont subi des pertes, dont certaines à plus de un million de dollars. Il est intéressant de noter qu’un tiers des entreprises qui ont subi des préjudices n’ont pas été capables d’en évaluer le montant. Une enquête, menée par l’université du Michigan auprès de 500 entreprises américaines et révélée en octobre 1995, a montré que, sur 150 entreprises ayant répondu, 98,6.% (soit 148 sur 150), ont avoué avoir été victimes d’actes de malveillance informatique. Pire, 43.% ont reconnu avoir été attaquées plus de 25 fois. Parmi les actes identifiés figurent les fraudes sur les cartes de crédit, sur les télécommunications, des accès non autorisés aux fichiers informatiques et le piratage de logiciels. L’étude conclut également que 75 à 80.% des cas proviennent de l’inté-rieur de l’entreprise.4. En 1996, un tiers des 428 responsables informatiques interrogés par l’Institut pour la Sécurité Informatique (CSI) et le FBI ont avoué : leurs ordinateurs ont été piratés au moins une fois au cours des douze derniers mois. Et dans la moitié des cas, les auteurs étaient salariés de l’entreprise. Vingt-deux entreprises et organisations ayant répondu à l’enquête ont même été attaquées plus de dix fois. Les responsables informatiques interrogés ont eu ainsi affaire à des attaques aussi diverses que des altérations de données, notamment financières et médicales, de l’espionnage de la part de concurrents et du piratage de hackers. Mais les entreprises restent très discrètes : seulement 17.% ont informé la police des actes dont elles ont été victimes. En Grande-Bretagne, le rapport de l’Audit Commission, rendu public en octobre 1994.5 révèle que, sur mille entreprises, 36.% ont été victimes de 1. Managing Today’s Automated Workplace, Olsten Forum Information Management, 1995. 2. Citée dans Infoworld, août 1994 et dans Computer Weekly : «.Users Lax on Lan Security.», 28 avril 1994. 3. Voir Secrets of a super hacker, Loompanics Unlimited, Port Townsend, Washington, 1994, 205 pages. Cet ouvrage divulgue plusieurs listes des mots de passe les plus courants utilisés dans le monde anglo-saxon. 4. Anthes (G) : «.Security plans lag computer crime rate.», Computerworld, 6 novembre 1995. 5. HMSO : Opportunity makes a thief, 1994. Cane (A) : «.Computer fraud shows sharp increase.», Financial Times, 13 octobre 1994. Crime organisé et délinquance informatique 309 fraudes informati-ques en 1993 (la pro-portion n’était «.que.» de 12.% deux ans plus tôt), pour un coût moyen de 300.000 francs. L’étude montre également qu’un quart des entreprises ne disposent d’aucune procédure d’audit, que 60.% n’ont jamais formé leurs salariés à la sécurité et que 80.% n’ont jamais procédé à une étude de risques. Dans le secteur gouvernemental, l’Audit Office a calculé, en mars 1995, que les systèmes d’information publics ont fait l’objet de 655 cas de pénétration illicite, dont 17.% ont réussi. De même, les vols de matériels et de logiciels ont été estimés à cinquante millions de francs.1. L’association britannique des banques estime que la fraude informatique, au niveau mondial, s’élève à au moins 8 milliards de dollars par an. Une enquête menée par PA Consul-ting Group en août 1995 a montré que les fraudes informatiques coûtaient au moins 300 millions de francs (40 millions de livres) par jour. Une autre étude, menée par le cabinet Coopers & Lybrand en Grande-Bretagne et publiée en septembre 1995.2, a conclu que 60.% des grandes entreprises britanniques ont connu des problèmes liés à l’interruption de leurs systèmes informati-ques. Ainsi, 67.% ont enregistré des attaques par virus, 32.% des problèmes de sécurité interne, 32.% ont constaté des erreurs dans les informations générées par les ordinateurs.; dans 31.% des cas, l’informatique s’est complètement arrêtée, 12.% ont connu des fraudes informatiques et 8.% des tentatives de péné-tration externes de leurs systèmes. Parmi les causes de cette situation, les entreprises interrogées ont mentionné l’inadéquation des procédures de sécurité (56.%) et le manque de tests (47.%). En France, on ne dispose malheureusement pas de chiffres aussi précis, mais il y a fort à parier que la situation des entrepri-ses n’est guère différente par rapport au monde anglo-saxon. On pourrait même craindre qu’elle soit pire, dans la mesure où les américains et les anglais ont une culture sécurité et audit beau-coup plus prononcée que dans les pays latins, phénomène que l’on a déjà mis en évidence.3. On discerne donc des possibilités accrues pour des menaces terroristes, qui auraient des effets dévastateurs. Lorsque que, en septembre 1991, un simple central téléphonique d’ATT tombe en panne, 5,5 millions de communications téléphoniques furent perdues et plus de 500 vols annulés, du fait de la paralysie du contrôle aérien. De même, en février 1995, le système de télécommunications en fibre optique de l’aéroport de Francfort fut saboté, entraînant l’arrêt d’un système de réservation de Lufthansa (et accessoirement le système de communication d’un hôpital voisin). La menace d’une catastrophe informatique est loin d’être hypothétique. En juin 1995, un groupe de pirates informatiques projetait, en France, une opération d’envergure contre des objectifs précis, tels que Dassault, l’Aérospatiale et le système informatique de la RATP.4. On le voit par exemple lors d’attentats physiques. Quand, le 23 février 1993, le World Trade Center, 1. Notons à cet égard une recrudescence très forte du vol de puces, notam-ment en Europe du Nord, à cause de l’inversion de cycle offre/demande que l’on connaît depuis un an (en liaison avec le sinistre de Kobe, la sortie de Pentium et de Windows 95). Nombre de micro-ordinateurs sont volés en vue de récupérer les microprocesseurs et les mémoires. 2. Riley (J) : «.Majority of top users suffer system failure.», Computer Weekly, 21 septembre 1995. 3. Rosé (Ph) : La criminalité informatique, PUF, Que Sais-Je, 1988, 128 pages, chapitre II. 4. Astor (Ph), Tavoillot (P-A) : «.Piratage : la menace d’un.» Tchnernobyl «.informatique.», La Tribune Desfossés, 11 octobre 1995, p. 34. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 310 immense building du sud de Manhattan, à New York, est la cible de terroristes islamistes, ce n’est pas tant la facture concernant la reconstruction de l’immeuble qui est importante, que les pertes immatérielles : les ordinateurs détruits, les liaisons de télécommunications compromises, les données perdues, qui ont coûté, au total, plus de 700 millions de dollars.1. En mai 1996, le GAO (General Accounting Office) américain a publié un rapport.2montrant l’extrême vulnérabilité des ordinateurs du Pentagone à des attaques externes. Le GAO a dressé un bilan guère reluisant de la sécurité des ordinateurs du Département de la Défense des États-Unis. Le rapport, remis aux sénateurs dans le cadre d’une audition sur «.l’Information Warfare.» (la guerre de l’information) évalue ainsi à 250.000 le nombre de pénétrations des systèmes informatiques par des pirates au cours des douze derniers mois. Un chiffre qui paraît important, mais le Département de la Défense ne contrôle pas moins de 2,1 millions d’ordinateurs, 10.000 réseaux locaux, 100 réseaux longue distance. Les deux tiers de ces attaques ont réussi et seulement 1.% a été détecté à temps, estime le GAO. Selon son rapport «.les pirates ont pu prendre le contrôle de systèmes entiers de défense, dont beaucoup concernent des fonctions critiques telles que la recherche et développement sur les systèmes d’armement. Ils ont également modifié des données, détruit des informations et volé des logiciels.». Parmi les exemples cités par le GAO : deux hackers ont pénétré les ordinateurs d’un laboratoire de l’Armée de l’air, dans l’État de New York, et ont mis la main sur les ordres de missions en temps de guerre destinés aux pilotes, ainsi que sur les messages électroniques sur des projets de recherche en intelligence artificielle. En outre, les ordinateurs du laboratoire ont été utilisés pour télécharger des données stockées dans un centre de recherches atomiques situé en Corée du Sud. Une affaire qui a coûté au moins un demi-million de dollars aux militaires américains. «.Au mieux, ces attaques coûtent plusieurs millions de dollars au département de la Défense. Au pire, elles constituent une menace sérieuse pour la sécurité nationale.», précise le rapport du GAO. Les raisons économiques La criminalité organisée doit faire face à une érosion de la rentabilité de ses activités traditionnelles. Comme les gouvernements, le crime organisé est confronté à un déficit de son budget. Certes, les gains réalisés par les activités occultes est encore énorme. Le chiffre d’affaires de la mafia italienne est estimé entre 75 et 90 milliards de francs chaque année, avec de confortables bénéfices avoisinant les trente milliards de francs. Mais aujourd’hui, les profits s’effondrent. Selon le quotidien milanais Il Mondo, ils ont fondu de 17.% au cours des quatre premiers mois de 1995.3. Notamment parce que le marché des travaux publics s’effon1. Astor (Ph), Tavoillot (P-A), ibid. 2. United States General Accounting Office : Information Security : Computer Attacks at Department of Defense Pose Increasing Risks, may 1996, 44 pages. 3. D’Antona (E) : «.Cosa Nostra and Co ne font plus recette.», Il Mondo, in Courrier International, 29 septembre 1995. Crime organisé et délinquance informatique 311 dre, le trafic de drogue est moins facile et les saisies de biens par la police se multiplient. Sans compter l’opération «.Mains Propres.», qui a fragilisé les organisations mafieuses. Comment se recon-vertir.? Nul doute que, les criminels de la mafia étant générale-ment intelligents et astucieux, ils verront tôt ou tard les énormes potentialités offertes par l’informatique, les réseaux et Internet. Par exemple pour faciliter le blanchiment de l’argent de la drogue. La mafia ne renoncera pas à un formidable outil de criminalité immatérielle. Que rêver de mieux pour blanchir de l’argent, sous des façades respectables.? Lorsque les polices française et américaine ont engagé au cours de l’été 1994 l’opération «.Margarita.» contre les cartels colombiens, parmi la centaine de suspects interpellés figurait un ingé-nieur informaticien. Mais on a jamais su son rôle exact. Les organisations mafieuses sont plus puissantes que jamais et prêtes à explorer les nouvelles possibili-tés offertes par la finance internationale.1. Et, de ce point de vue, la mafia italienne ne sera pas plus redoutable que la mafia russe, d’autant qu’un récent rapport de l’OCDE a dénoncé les rapports étroits qui unissent les organisations criminelles et les entreprises.2. Selon les statistiques du FBI pour 1995, le gain moyen d’un criminel qui perpétue un vol a été de 1248 dollars, de 4940 dollars pour un vol de voiture. Pour le trafic de drogues, ce gain est évidemment encore très élevé, en fonction du prix du gramme, mais, à long terme, le risque de dépénalisation n’est pas exclu dans la plupart des pays industrialisés, les plus gros consommateurs de ces substances. En comparaison, un détournement de fonds assisté par ordinateur peut rapporter plusieurs dizaines ou centaines de millions de dollars. Les raisons politiques Les organisations criminelles organisées sont de plus en plus sous le feu des polices. Non seulement au niveau des discours (par exemple ceux de Louis Freeh, le directeur du FBI, qui fustige régulièrement les activités des mafias), mais également sur le plan des actes. Le Président Clinton vient ainsi de créer une unité spéciale chargé du contre-terrorisme, dont les compétences couvrent les actes de terrorisme informatique, dont on verra par la suite que c’est l’un des objectifs possibles du crime organisé. En Italie, les mafias sont de plus en plus mises à rude épreuve. Citons les quelques dernières affaires : – en janvier 1996, à Palerme, des biens immobiliers, d’une valeur de 1,2 milliard de francs, apppartenant à des mafieux ont été confisqués.; – en janvier 1996, l’opération «.terre brûlée.» aboutit à l’arrestation, à Naples, de 88 personnes appartenant à la mafia.; – en février 1996, 23 mafieux sont arrêtés à Messine.; – en mai 1996, des biens immobiliers d’une valeur de trois milliards de francs ont été confisqués.; – en juin 1996, à New york, dix-neuf membres du clan Genovese sont arrêtés.; – en juillet 1996, vingt mafieux sont arrêtés à Rome. 1. Voir, Waller (L) : Mafia Wars, Ed. Mandarin Paperbacks, 1992, 502 pages. 2. «.L’OCDE critique les liens mafia-entreprises russes.», Les Echos, 4 octobre 1995. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 312 Les raisons sociologiques : de la «.low-tech.» vers la «.high-tech.» De nouvelles générations de criminels sont apparues. Plus jeunes, il sont également plus «.modernes.» que la traditionnelle mafia italienne. On connaît par exemple le problème croissant des gangs asiatiques qui sévissent sur la côte ouest des États-Unis, ou celui de la mafia russe. Celle-ci contrôle près de 4000 banques, dont dix des vingt-cinq plus importantes. Les actifs contrôlés par les organisations criminelles sont estimés à 60-70 milliards de dollars. La mafia russe contrôle également environ 40000 entreprises... la plupart équipées d’ordinateurs. En janvier 1995, Louis Freeh, le directeur du FBI, a fait le voyage de Washinton jusqu’à Londres pour rencontrer les responsables du contre-espionnage britannique. À l’ordre du jour de la réunion : comment lutter contre les pirates informatiques russes qui menacent l’économie des ÉtatsUnis. Le détournement de 11 millions de dollars des comptes de la Citibank par un pirate russe, probablement lié à la mafia de Saint Petersbourg et utilisant un simple ordinateur portable et un modem constitue une illustration de ce problème. Ce hacker a réussi à pénétrer dans le système informatique de la banque américaine, à voler 400000 dollars et à effectuer un virement électronique de près de douze millions de dollars avant d’être appréhendé par la police britannique au début de cette année. La Citicorp a réussi, avec l’aide de la police et de l’opérateur de télécommunications russe, à remonter la filière jusqu’à un jeune programmeur de 28 ans, Vladimir Levin, qui travaillait dans une société commerciale à Saint-Pétersbourg. Il a simplement utilisé un ordinateur portable pour commettre son acte. Le hacker russe avait au moins un complice aux États-Unis, qui contrôlait deux sociétés en Californie et sur les comptes desquelles ont été transférés une partie des fonds, le reste ayant été versé sur des divers comptes bancaires dans six autres pays, dont la Suisse et Israël. Deux tendances caractérisent le crime organisé. D’une, on assiste à une reconversion vers une meilleure maîtrise des potentialités criminelles de la technologie. On passe ainsi d’activités plutôt traditionnelles, la Low-Tech, vers la High-Tech. La Low-Tech regroupe, du point de vue criminel, des activités technologiques à base matérielle (ou faiblement logicielle), par exemple les vols de puces ou la fraude sur les cartes. C’est un domaine où, déjà, les gangs organisés sont à l’œuvre : en 1995, quatre cents entreprises de la Silicon Valley, la région du sud de San Francisco qui concentre la plupart des entreprises de hautes-technologies, ont été victimes de voleurs de puces informatiques, dont la valeur, au poids, est supérieur à celle de l’or et, dans certains cas, de leur équivalent en drogue. Le record a été battu en 1995, avec un vol de 10 millions de dollars dans les locaux de la société Centon Electronics, à Irvine, en Californie. Entre janvier et mai 1996, 45 entreprises de la Silicon Valley ont été victimes de vols de puces. La High-Tech (fraude informatique, espionnage et terrorisme). L’étape intermédiaire étant le transfert de fonds utilisé pour le blanchiment de l’argent de la drogue. Selon les banques suisses, la mafia des pays de l’Est y a transféré Crime organisé et délinquance informatique 313 quatre milliards de dollars en 1994, contre 2,2 en 1992. Mais on discerne déjà les premiers jalons de l’implication criminelle des mafias dans l’informatique : selon le FBI, il existe 25 gangs russes aux États-Unis qui sont spécialisés dans la fraude informatique, implantés dans 17 villes et comptant près de 2000 membres. Autre exemple : le quotidien britannique Sunday Times a révélé en juin 1996 que les ordinateurs de sociétés financières de la City de Londres étaient sous la coupe d’organisations mafieuses. Au total, 400 millions de livres ont été extorqués, en trois ans, à des institutions financières. Par exemple, en 1993, une société de banque a versé 10 millions de livres sur un compte en Suisse, une banque a payé 12,5 millions de livres. La technique est toujours la même : les gangs se procurent de l’information sur les ordinateurs de leurs victimes puis démontrent leurs capacités à saboter ces systèmes. L’autre caractéristique est la globalisation/transnationalisation des mafias. On passe ainsi d’une implantation locale à une implantation planétaire. «.Les organisations criminelles étendent leurs territoires. Elles concluent des partenariats à une échelle sans précédent, des cartels, des accords qui les aident a gagner toujours plus d’argent, tuent leurs opposants, neutralisent la police et commencent à détruire les gouvernements.».1, souligne Louis Freeh, directeur du FBI. La mafia russe (5700 gangs regroupant 250000 criminels.2), de même que les triades asiatiques sont très actives aux États-Unis. «.Nous savons que les gangs asiatiques constituent un problème dans seize États.», indique le directeur du FBI.3. Au total, les mafias se globalisent (vers la sphère économique) et deviennent transnationales (exportation du savoir-faire). On passe de l’influence essentiellement locale (jusqu’aux années 70) à une influence économique (maintenant) et on s’oriente vers la recherche d’une influence politique (d’où des risques de terrorisme). L’étape suivante sera vraisemblablement le cyber-terrorisme : «.les attaques terroristes du futur ne seront pas limitées aux bombes et autres armes conventionnelles. C’est un fait que les entreprises, les gouvernements et les individus utilisent de plus en plus des ordinateurs.; les terroristes utiliseront eux aussi les cyber-attaques pour viser les infrastructures critiques du pays.», soulignait le 14 juillet 1996 Janet Reno, l’Attorney General de Bill Clinton, lorsque ce dernier annonça la création d’une unité spéciale anti-terroriste, entres autres pour lutter contre ce type de menaces. Le cyber-terrorisme est d’ailleurs l’un des scénarios étudiés par la Rand Corporation dans son étude prospective sur «.l’Information Warfare.».4 : «.la Russie est confrontée à un accroissement de ses problèmes internes, notam1. Louis Freeh, directeur du FBI, discours de Berlin, 28 juin 1994. 2. «.Russian computer hacker alarm FBI.», Sunday Times, 12 février 1995. 3. Discours de Louis Freeh, Annual International Asian Organized Crime Conference, Boston, 6 mars 1995. Voir également : Russian Organized Crime, California’s Newest Threat, Office of the Attorney General, mars 1996. «.Asian gangs growing influence.», San Jose Mercury News, 4 janvier 1994. 4. Molander R., Riddile A., Wilson P. : Strategic Information Warfare, a New face of War, National Defense Research Institute, Rand, 1996, 90 pages. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 314 ment le banditisme du cyberspace, techniques employées par les mafias russes. Ces groupes obtiennent certains succès en attaquant les banques européennes et américaines, dont les pertes ont atteint deux milliards de dollars en 1999. Les occidentaux soupçonnent le crime organisé russe d’avoir recruté des pirates informatiques, dont certains sont passés sous le contrôle des services secrets russes..» Face à de telles menaces, actuelles et futures, l’enjeu auquel sont confrontées les forces de police est triple : – Instaurer de nouvelles lois, par exemple pour contrôler Internet ou l’usage de technologies complexes (par exemple les systèmes de chiffrement des données informatiques) par le crime organisé. «.Nous devons lutter contre des organisations qui, comme le cartel de Cali, utilisent un système de positionnement par satellite et qui recrutent des programmeurs informatiques pour écrire des programmes codés de sorte que les forces de police ne peuvent intercepter leurs conversations.».1. – Utiliser de nouvelles compétences : «.les nouveaux agents formés à Quantico, à l’Académie du FBI, sont désormais dotés d’un ordinateur portable, en plus de leur badge et de leur arme.».2. Louis Freeh, directeur du FBI estime que «.si les forces de police perdaient leur capacités techniques à intercepter les conversations des criminels avec les nouveaux systèmes numériques, les conséquences seraient tragiques et, peut-être, irréparables.».3. – développer la coopération internationale. 1. Discours de Louis Freeh, American Bar Association, Washington D.C., 6 mars 1996. 2. Ibid. 3. Discours de Louis Feeh, Conference of Mayors, Washington D.C., 26 janvier 1996. Crime organisé et délinquance informatique 315 Références – Barret (D), Bandits on the information superhighway, O’Reilly & Associates, 1996. – Bischoff (D), Hackers, Harper Paperbacks, 1995 – Blanchard (Ph), Pirates de l’informatique, enquête sur les hackers français, Addison-Wesley, 1995. – Branscomb (A-W), Who owns Information.?, Harper & Collins, 1994. – Clough (B), Mungo (P), La délinquance assistée par ordinateur, Dunod 1993. – Cohen (F), Protection and Security on the Information Superhighway, Wiley & sons, 1995. – Guisnel (J), Guerres dans le cyberespace, services secrets et Internet, La découverte, 1995. – Lamère (J-M), Rosé (Ph), Menaces sur les autoroutes de l’information, L’Harmattan, 1996. – Le Doran (S), Rosé (Ph), Cyber-thrillers, 35 histoires vraies de délinquance informatique, Albin Michel, 1996. – National Research Council : Computer at Risks, Safe Computing in the Information Age, National Academy Press, 1991. – Rosé (Ph), La criminalité informatique, PUF, 1988, 1996. – Rosé (Ph), La criminalité informatique à l’horizon 2005, analyse prospective, L’Harmattan, 1992. – Secrets of a Super hacker, Loompanics Unlimited, 1994. – Slatalla (M), Quittner (J), Masters of Doom, the Gang that ruled Cyberspace, Harper & Collins, 1994. – Schwartau (W), Information Warfare, Chaos on the Electronic Superhighway, First Trade Paperback, 1994. – Sterling (B), The Hacker Crackdown, Law and Disorder on The Electronic Frontier, Bantam Books, 1992. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 316 Summary The trends of computer crime Philippe Rosé One hundred per cent computer security is non existent. No system is perfectly secure and the risk for the hacker is minimal. The history of computer crime doesn’t reach far back in time. It can however be split into three eras. In the 80s the trend was dishonest appropriation of funds or of items of intelligence (it was the period of the theft of software). The 90s is the hackers’era (illegal entry into computer systems). We came out of the low technology era (thefts of chips) into the high technology era (computer crime). The computer had become the vehicle of computer crime instead of being its mere target. In the 2,000s the dangers to come are going to be cyber crime professionals, insecurity of computer systems and misuse of the internet. The FBI estimates are that 90% of computer crime cases are related to the web. Risks of cyber terrorism and computer pirating are not excluded. The interest that organised crime finds in computerised high technology is based on at least four reasons: –One is the corporations low level of protection. Private corporations or companies are poorly protected and once they’ve been victimised, they tend not to report the crime. –Another is the progressively reduced profit that organised crime gets from its traditional activities. (building companies for instance). This makes it necessary to develop a substitution economy. Misappropriation of funds through computer crime can be part of it. –Another is political. The awareness of computer risks is only very new among political executives. –Finally, sociological reasons. The executives of organised crime have gown up from a new generation. They are younger and with a better knowledge of the computer tool. Moreover, the global transnationalisation of organised crime organisations make it necessary to adopt operational systems adapted to planetary action. In order to fight against it, we must insist on a normative activity : the vote of sections of the law which should make it possible to have an overview of what happens on the internet, the use of new operative skills (training of specialists) and the development of international co-operation. Crime organisé et délinquance informatique 317 Resumen Las tendencias del crimen informatico Philippe Rosé La informática segura en un 100.% no existe. Todo sistema tiene sus fallas y los riesgos de ser descubierto son mínimos. La historia del crimen informático es reciente, pudiendo ser dividida en tres etapas : – En los años 80, malversación de fondos o de información (período de piratería de programas). – Los años 90 marcan la etapa de los «.hackers.» o piratas informáticos (penetración ilícita). La computadora tiende a convertirse en el instrumento más que en el objetivo de la delincuencia informática. Pasamos de la era de la «.low technology.» (robo de chips) a la high technology (fraude informático). – Para el año 2.000 se prevén los siguientes peligros : profesionales del cyber-crimen, inseguridad de los sistemas de información, utilización delictiva de la red Internet. En efecto, el FBI estima que el 90.% de los casos de delincuencia informática conciernen esta red. No deben excluirse tampoco los riesgos de cyber-terrorismo y de piratería informática. El interés del crimen organizado en la alta tecnología está fundado en al menos cuatro razones : – La inquietante vulnerabilidad de las empresas. Poco protegidas, estas últimas hacen rara vez una denuncia una vez descubiertos los hechos. – La erosión de la rentabilidad de las actividades tradicionales del crimen organizado (la construcción, por ejemplo) hace necesario el desarrollo de una economía de sustitución. La malversación de fondos por computadora puede formar parte. – Las razones políticas, ya que la toma de conciencia del peligro informático por parte de las autoridades públicas es muy reciente. – Las razones sociológicas, por la renovación de los dirigentes del crimen organizado. Estos nuevos dirigentes, más jóvenes, se ven atraídos por la informática. Además, la globalización y la internacionalización de las mafias hacen necesaria la adopción de un procedimiento de acción de dimensión planetaria. Para enfrentar el crimen informático, debe ponerse el acento sobre la actividad normativa (votando leyes que den un marco jurídico a Internet), la utilización de nuevas competencias (formación de especialistas) y el desarrollo de la cooperación internacional. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 318 La criminalité informatique le rôle de la police judiciaire Daniel Padoin, commissaire principal de police, chef du service d’enquêtes sur les fraudes aux technologies de l’information (SEFTI) àla la préfecture de police de Paris le rôle deLa police criminalité judiciaire informatique Le développement considérable des systèmes de traitement automatisé d’informations place les utilisateurs dans un état de dépendance à l’égard de leur système et s’est accompagné, ces dernières années, d’une nouvelle forme de délinquance visant à s’introduire, à des fins frauduleuses dans les systèmes en vue de détruire, de modifier ou de s’emparer des informations qu’ils contiennent. Cette menace nouvelle ne doit pas être occultée ou minimisée. Centre vital, outil stratégique, le système informatique d’une entreprise est en même temps son point le plus sensible, son talon d’Achille. Moins de dix ans auront suffi pour que la malveillance informatique soit en passe de devenir le risque industriel et économique numéro 1. Selon les estimations communiquées par le Centre de Documentation et d’Information de l’Assurance (CDIA), les pertes provoquées par des accidents ou des malveillances intervenus dans l’exploitation des moyens informatiques par rapport aux pertes globales sont passées de 37.% en 1985 à 58.% en 1995 et ceci pour un montant évalué à environ 6,4 milliards de francs. Un chiffre noir très important Le nombre de fraudes informatiques signalées aux services de police judiciaires est très inférieur à celui connu des sociétés d’assurance et représente environ 10.% des cas rapportés chaque année par le CDIA Cette répugnance des victimes à dévoiler les défaillances de leurs systèmes informatiques, s’explique par des raisons d’image commerciale et par une rétention de l’information à chaque niveau dans l’entreprise victime d’une malveillance. Cet aspect se retrouve dans tous les pays touchés par ces nouvelles infractions. Le premier délit informatique signalé aurait eu lieu aux États-Unis en 1958 mais la première infraction liée à l’informatique identifiée comme telle et poursuivie au niveau fédéral, une altération d’états bancaires à Minneapolis, n’est intervenue qu’en 1966. dans les pays nordiques, le premier délit informatique poursuivi, un cas de contrefaçon de logiciel caractérisé, a été commis en février 1968 en Finlande. L’Assemblée Plénière des Sociétés d’Assurances Dommages (APSAD), puis le Club de Sécurité Informatique Français (CLUSIF) ont mis en place depuis 1983 un observatoire de la sinistralité des risques informatiques, permettant d’évaluer l’impact économique et plus encore son évolution dans le temps (à méthode d’évaluation constante). La présentation de ces chiffres démontre l’accroissement considérable des malveillances au cours des six dernières années. ces atteintes volontaires sont à l’origine de 59.% des sinistres informatiques en 1995, pour un total de près de 7 milliards de francs de pertes pour les entreprises françaises. Sur ce volume total de malveillances, ce sont les fraudes qui ont coûté le plus cher (1,67 milliards). La France, avec la loi du 5 janvier 1988 qui incrimine les comportements délictueux contre les traitements automatisés d’informations dont la répression s’était révélée aléatoire dans le passé, s’est dotée d’un arsenal juridique complet et cohérent. Ce texte s’ajoute à la loi du 6 janvier 1978, «.Informatique, Fichiers et Libertés.» et à celle du 3 juillet 1985 relative à la protection des logiciels. Le rôle de la police judiciaire La police judiciaire n’a pas attendu la construction européenne pour prendre conscience de la nécessité d’une coopération internationale. Créé dès avant la dernière guerre mondiale, plus connu sous le nom D’interpol mais plus justement dénommée «.Organisation Internationale de Police Criminelle.», un organisme réunissant des représentants des polices de la plupart des pays du monde, échange des informations générales et particulières sur toutes les nouvelles formes de délinquance parmi lesquelles figure la délinquance informatique qui ne connaît pas les frontières étatiques. De même, a été créé Europol en vue de gérer les bases de données communes indispensables à toute action policière coordonnée dans une structure qui tend chaque jour davantage vers le fédéralisme. Pour mettre en application ces différents textes et lutter contre cette nouvelle forme de délinquance, la Police Nationale a réalisé un effort d’adaptation nécessaire pour mener, avec un niveau technique suffisant, les enquêtes dont elle est saisie en ce domaine. Deux nouveaux services de police judiciaire ont ainsi été créés. Au plan national et rattaché à la Direction Centrale de la Police Judiciaire, la Brigade Centrale de Répression de la Criminalité Informatique (BCRCI) est chargée de mener des enquêtes ayant des aspects nationaux ou internationaux, d’assister les Services Régionaux de Police Judiciaire Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 320 et d’assurer l’interface avec les services internationaux (Interpol et Groupe de Travail européen sur la Fraude Informatique). Le Préfet de Police de Paris, M. Philippe Massoni, a créé au sein de la Sous-Direction des Affaires Economiques et Financières de la Direction de la Police Judiciaire parisienne, le Service d’Enquêtes sur les Fraudes aux Technologies de l’Information (SEFTI) qui mène lui aussi ses enquêtes avec une compétence territoriale étendue à la capitale et aux trois départements de la petite couronne. Le SEFTI assure également un soutien technique aux autres services ainsi que des actions d’information sur ces nouvelles formes de délinquance. Répartition des pertes dues à des malveillances informatiques en France en 1995 Attaque logique 18 % Autres 42 % Divulgation 13 % Vol 3% Fraude (non physique) 24 % Source : CLUSIF Les enquêtes judiciaires Le droit pénal ne peut constituer la seule réaction face à la fraude informatique. En revanche, son usage devrait être beaucoup mieux intégré par les responsables de systèmes de traitement automatisé d’informations. Il ne doit venir, en effet, qu’en appui des indispensables mesures de sécurité mises en place de façon préventive et dont la violation éventuelle établira la trace et la preuve nécessaires à la caractérisation des délits. Contrairement aux habitudes actuelles consistant, la plupart du temps, à régler de façon interne et sans faire appel à la justice, les victimes devraient, dès la fraude décelée, se tourner vers les services de police spécialisés pour effectuer, sous forme contradictoire, les constatations et surveillances indispensables à un bon établissement de la preuve. La criminalité informatique le rôle de la police judiciaire 321 Le nombre d’affaires de fraudes informatiques traitées en France entre 1981 et 1995 reste limité. Après une brutale augmentation entre 1983 et 1986, où a été constaté un doublement annuel des saisines, le phénomène s’est quelque peu stabilisé, puis a de nouveau crû de 1989 à 1994. L’augmentation la plus importante s’est produite au cours de l’année 1995, puisque les procédures pénales qui étaient au nombre de 72 en 1994 sont passées à 149 en 1995. Il est cependant difficile de dire s’il s’agit d’une augmentation réelle du phénomène ou d’une diminution du chiffre noir. Il convient de remarquer également que dans de nombreux cas, l’informatique est utilisée comme moyen de commission d’une infraction dont la qualification est d’ordre général et, en particulier, dans les affaires de faux et d’escroqueries. De plus, une étude analytique des secteurs victimes montre que le secteur tertiaire est largement dominant, les secteurs primaire et secondaire semblant moins concernés. Si l’on examine à présent les modes opératoires, la tendance actuelle est à une forte augmentation des accès frauduleux sur des systèmes d’information ainsi qu’aux vols de matériels ou de composants informatiques. Cet aspect nouveau, apparu en France depuis deux ans environ, est de plus en plus préoccupant. De véritables vols à main armée sont organisés dans des sociétés pour emporter des microprocesseurs ou des barrettes de mémoire vive et ceci avec des préjudices considérables de plusieurs millions de francs. De tels agissements peuvent avoir des conséquences graves et mettre en péril l’équilibre des entreprises victimes et parfois même leur survie. Si l’on s’intéresse aux seules fraudes financières, on constate que l’intervention d’un traitement automatisé d’informations en aggrave le coût qui s’établit, en moyenne, à environ un million sept cent mille francs. De même, la plupart des infractions ont une origine interne : dans 84.% des cas, en effet, l’auteur ou le complice a ou a eu une relation contractuelle avec la victime. En matière de fraude sur le ssystèmes d’information, on distingue les affaires dans lesquelles l’informatique est le moyen de la fraude de celles où elle est l’objet même du délit. Les premières ont trait à ce qu’on peut appeler la «.délinquance assistée par ordinateur.» et leur qualification pénale se rattache à des infractions classiques : escroqueries, abus de confiance, faux, atteintes aux libertés individuelles par la tenue illégale de fichiers nominatifs comme le prévoit la loi du 6 janvier 1978. Les secondes portent essentiellement aujourd’hui sur une atteinte à la confidentialité et (ou) à l’intégrité des données après accès frauduleux sur les systèmes selon les articles 323-1 à 323-7 du Code Pénal. Il convient de citer également, pour ce second aspect, l’article 335-2 du Code de la Propriété Intellectuelle qui pose en principe que toute contrefaçon est un délit. Ce texte trouve bien évidemment son application en matière de reproduction de logiciels en violation des droits de son auteur. L’intention coupable du contrefacteur étant présumée, il appartiendra à ce dernier de faire la preuve de sa bonne foi pour ne pas risquer de se voir condamné. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 322 Le déroulement d’une enquête Pour qu’une enquête judiciaire puisse être effectuée après la constatation d’une fraude ou d’actes de malveillance, il est nécessaire que la victime dépose plainte, soit directement auprès d’un service de police ou de gendarmerie, soit en saisissant le Procureur de la République. Les faits rapportés par le plaignant ne recevront peut-être pas toujours une qualification pénale, la première démarche réalisée par les enquêteurs à qui on les expose étant bien sûr de déterminer le modus operandi et d’évaluer l’affaire d’un point de vue juridique. La poursuite de l’enquête s’effectue dans le cadre d’actes classiques de la procédure pénale policière : constatations, auditions, perquisitions, etc., puis, si les circonstances le justifient et afin de disposer de pouvoirs plus étendus, sous le contrôle d’un magistrat instructeur et par le biais de commissions rogatoires. L’assistance d’experts désignés par ce magistrat se révèle souvent indispensable dans les affaires techniques plus complexes. Citons quelques exemples d’enquêtes judiciaires relatives à des fraudes sur des systèmes d’information. • En 1981, une des premières enquêtes policières réalisées dans ce domaine par la Brigade Financière permet d’interpeller un homme ayant tenter de détourner une somme de 20 millions de francs au préjudice d’une grande banque française, par modification des numéros de comptes mentionnés sur une bande informatique. • En 1989, une employée d’un centre de gestion de prestations sociales constitue de faux dossiers d’allocataires et détourne ainsi 200.000 francs à son profit. • En 1991, à la suite de son licenciement, un responsable informatique d’une grande société place dans l’un des programmes informatiques de gestion une bombe logique qui, en se déclenchant trois mois après son départ, bloque l’activité de la société qui l’employait pendant une semaine et cause un préjudice financier considérable. • En 1994, la mise en place d’une fonctionnalité sur un autocommutateur (central téléphonique) de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie et à son insu permet à plusieurs centaines d’individus d’utiliser cet appareil pour passer de très nombreuses communications téléphoniques longue distance en faisant supporter le prix de ces communications à la Caisse et en occasionnant des dysfonctionnement internes. Le préjudice subi par cet organisme a été évalué à 2.500.000 francs. Ces cas montrent que l’appât du gain et les risques relativement faibles d’être identifiés sont le smotivations principales des fraudeurs. Néanmoins la démarche des délinquants de l’informatique procède également d’autres mobiles : – le passionné d’informatique : animé d’un esprit ludique, il agit essentiellement par curiosité intellectuelle.; La criminalité informatique le rôle de la police judiciaire 323 – le frustré agit par vengeance à la suite d’une déception personnelle ou professionnelle, ou afin d’obtenir une reconnaissance sociale ou un moyen de pression.; – l’espion opère pour le compte d’un concurrent économique ou d’une puissance étrangère.; – l’extrémiste ou l’idéaliste : son seul but est souvent le sabotage. Les enquêtes montrent cependant que très souvent ces diverses menaces peuvent s’interpénétrer. Les réseaux et Internet La multiplication des réseaux informatiques a bien évidemment accru les risques d’accès frauduleux sur les systèmes d’information. Cet aspect avait été illustré, il y a quelques années par l’affaire du Chaos Computer Club (CCC) Parmi les membres du club informatique de Hambourg en Allemagne, certains hackers avaient réussi à «.visiter.» plus de cent trente-cinq réseaux de neuf pays industrialisés, récupérant ainsi certaines informations confidentielles afin de les revendre. Le développement considérable du réseau Internet va sans aucun doute poser de nombreux problèmes de sécurité dans les années à venir. Il faut cependant préciser que l’ensemble des textes répressifs cités précédemment s’applique parfaitement dans notre pays à l’usage de ce nouveau moyen de communication. Il est toutefois indispensable que l’insouciance manifestée par trop de sociétés ou d’entreprises fasse place à une véritable prise de conscience des risques engendrés par l’usage de ces technologies. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 324 Summary Service d’enquêtes sur les fraudes aux technologies de l’information (SEFTI) (Information Technology Fraud Investigation Department) Daniel Padoin The SEFTI has been created by the Paris Police Prefect in 1994, with as for duties: to carry out investigations on offences against computer systems or for which computer systems are being used, to provide technical assistance to other police departments, to deliver training and information. It counts at the moment 14 police officers from the Fraud Sub-Headquarters, and is the regional counterpart of the “Brigade centrale de répression de la criminalité informatique – BCRCI” (National Computer Crime Squad) of the DCPJ (Serious Crime Investigation National Headquarters). The essential characteristics of computer misuse are: –low detection risk; –an important raise in 1995 with a loss of 6.4 million Francs; –84% of detected offences have an internal origin (employees or ex-employees) France has a complete and coherent Law and two specialised detecting police departments (SEFTI and BCRCI). Despite the fairly small numbers of cases dealt with (195 in 1995), two distinctive situations have been encountered in practise: ither computing is used to commit the offence, and then the offence is regarded as a traditional offence; –or computing is the object of the commission of the offence, therefore the offence is dealt with by the specific provision of Law (Art. 323-1 to 323-7 of the New Penal Code). It is possible to classify the computer misusers whom the police departments are facing, according to their motivation for their wrongdoings (the frustrated, the spy, the computer fanatic, the fundamentalist, the idealist). If at the moment, organised crime does not seem to have been detected as operating computer crime, the criminal potential related to this technology encourages us to be vigilant. La criminalité informatique le rôle de la police judiciaire 325 Resumen El servicio de investigaciones sobre los fraudes a las tecnologias de informacion (SEFTI) Daniel Padoin El SEFTI fue creado por el Prefecto de Policía de París en 1994 con el objetivo de acelerar las investigaciones relativas a las infracciones que apunten o utilicen sistemas informáticos, suministrar apoyo técnico a los otros servicios y llevar a cabo acciones de formación y de información. Reúne actualmente catorce funcionarios pertenecientes a la subdirección de asuntos económicos y financieros y constituye la contrapartida regional de la Brigada Central de Represión de la Criminalidad Informática (BCRCI) de la DCPJ. Las principales características de la delincuencia informática son : – el bajo riesgo de ser descubierto.; – un fuerte progreso en 1995 representando un costo de 6,4 MF.; – que el 84.% de los casos son de origen interno (empleados o ex empleados). Por su parte, Francia dispone de un arsenal jurídico completo y coherente y de dos estructuras policiales de represión especializadas (SEFTI y BCRCI). Si bien el número de procedimientos llevados a cabo es relativamente modesto (195 en 1995), en la práctica se distinguen dos situaciones diferentes : – La informática es utilizada como medio de realización de la infracción, en este caso se retiene la calificación de derecho común.; – La informática es utilizada como objetivo de la realización del delito. En este caso se pone en marcha la calificación específica (Art. 323-7 a 323-7 NCP). En todos los casos, es posible realizar una cierta clasificación de los diferentes delincuentes informáticos a los cuales se ven enfrentados los servicios, en función de los motivos de sus acciones (el frustrado, el espía, el fanático, el extremista o el idealista). Si bien por el momento el crimen organizado no aparece como un actor confirmado del fraude informático, el potencial criminológico de esta tecnología nos empuja a la vigilancia. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 326 Sciences et technologies mises au service de l’enquête The analyst’s note book Mario De Cocq, Chief of the Criminal analyst’s Unit into the OIPC-Interpol The analyst’s note book Ladies and gentlemen, I will try to keep my presentation, although a little bit theoretical, to a short insight of a technique, and although I am aware that some of you definitely know this technique very well, I am also convinced that other people are not that aware of my presentation. Quickly I want to first show you an insight of this technique that we call crime analysis, after that I want to show you how the Interpol organisation, especially the General Secretariat has implemented this technique into a unit, the ACIU which I am heading. Finally, I want to give you a short insight on how automation and how computers play a role and how we have used them at the General Secretariat. But first, in the unit we use the technique of crime analysis. We like to define it as the identification of and the insight into the relations between crime data and other potentially relevant data, always with a view to police or judicial practice. I know that sounds may be a little bit theoretical so that’s why, may be more simply, we can just say: it is relating a wide range of data, connected with a specific offence or crime in general. When you look at this definition and also at the aim of this conference on organised crime, I think this technique could help us all fighting this type of crime. When you are talking about crime analysis, I think it is also good to mention four simple key words. First of all, what I think is important is uniformed technique. That is something when on one part of the world, when we talk about crime analysis, that they know what it is and that there are no differences. Furthermore we use a standard package of definitions, so it is also a standard methodology. Very important, it should be seen as a support of tool, so not as a tool that can replace police work. And furthermore and finally the computers really play an important role. I could also mention that this technique is definitely not new and that’s why I already started my small introduction by mentioning that some of you are highly aware of this technique. We could see here that it originated from North America and Canada, was more or less invented in the seventies and approximately ten years later you see that it gœs also to the continent where it is well implemented in the UK. At present I think it’s not overdone to say that in America, Canada and the UK, any huge large investigation doesn’t do without this technique. A few years later new development went further in other European countries like Belgium and the Netherlands, where I was confronted with in 1986. And also, one of the reasons is that Dutch officers working at the Interpol General Secretariat who knew this technique thought it would have been an interest for the Interpol organisation. So that’s why I was transferred, detached to the Interpol General Secretariat where I also try to promote this technique. You see that it is spreading further on to countries such as Norway, you see that it is used now in the EDU at Europol and also many new countries show their interest: and I just want to mention Sweden, Switzerland, Poland and also France. After this theoretical bit, I’m sure you want to know when this technique can be used. Basically, I use these three categories when in my opinion it is good to; of course when you are dealing with a major or complicated case. And when dealing with organised crime, I’m sure that many of you know enormous piles of files, telephone records, observation reports... I think then, crime analyses can assist you. Further more, a good example: when an investigation has reached a dead end, you can think of a murder case which has been investigated for many months, there is no solution, no further clues, I think that’s also a very good thing to let the analyst work with this methodology on such a case and try to investigate really all ins and outs. And finally, I think the last point in order to obtain insights into several cases which may be linked in or connected is very much important for my work at the General Secretariat. You know we hold a lot of criminal data, I’ll try to give you an insight later and I think an analyst can look into this data, compare it and try to find similarities in those cases and try to link or connect cases. My last part is to give you a very short insight on how we work. Crime analysts normally work on a fixed process of steps to be taken that what we call intelligence process. He or she always starts with collecting all the data available concerning a certain topic, then the evaluation of the data has to be looked in, what is the source of the information and also the information itself. After that step, the information has to be processed, and for this we use computers. You can think of processing like forming tables, making charts, using diagrams. After that processing step, we come to our actual analysis which is also the integration of the information into other forms that can mean more, also to interpret the information. And the last step is always the dissemination. The findings are made known to the people who are interested in it. I am aware that it is a very brief insight of this technique, however I think it is still good to have an idea of what it is. I want to come back to the analytical unit at Interpol, created in March 1993 and it was established following a decision of one of our important body:: the Interpol European Committee which has taken in a way the lead and said that this technique is good for Interpol and we should have you too like that. We got a system from the source countries that I mentioned already on my former chart when you saw all the flags; like we got a system from the Netherlands, from America, from the UK and from Canada. Furthermore, we apply in the unit this uniformed crime analysis methodology and we like to use special techniques. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 330 Finally, I could mention that we are a very small section, we are only working with three crime analysts and myself, that makes only four, but we are willing to expand the unit in the coming years. What is new is that we work with different nationalities, two French analysts, I’m from the Netherlands and we have an American analyst, and importantly, we are dealing with all sorts of crime. So that means that we can work on a drug case, we can also work on money laundering investigations. And like every other unit, I think it’s important to have a mission statement which is for us to develop free operational crime analysis unit, using the standard techniques again. It will support all the police staff working at the General Secretariat and also the 176 member countries. You can imagine that is quite a task because with only a group of four it is quite difficult. The unit is also the first of its kind operating with this technique in a multi-national environment. From this little mission statement, you can derive two goals: we want to provide professional systems to those 176 countries, but we also want to further spread this technique and you could see my participation here is an example of this. To add something more, this assistance is always based on the priorities that are given by our management. And it’s always dealt with in close co-operation with the specialised groups of officers. We have at the General Secretariat a police division which holds specialists coming from 17 countries, so you can imagine that it is always very good to have the specialists, let’s say one floor above you. So when we want to work on a specific topic and you had from the former presenters that crime is getting sometimes very complicated, with new techniques, new phenomena, I think it’s very good to see that we have everything in one house and that we can ask your colleagues for advice. And last but not least, our results are always disseminated in a reported form, which is also again a structured form, which we call ACIU project. May be you know the kinds of projects we are dealing. I’ll just mention four of the ones that we have dealt with in the past, in the last few years. On top of the list you see the project circular file which deals with the actual phenomena of child pornography, it provided an overview of the level of organisations that were active in Europe at that time. The second one is project Nuclear. We try to give a kind of strategic overview on assessment of the trafficking and dealing in radio active substances. We did also a project on cannabis smuggling that we call project Romeo: to give you another example, this project was chosen because it appeared that in many places in the world, large shipments of cannabis were seized and they were all stamped with the word Romeo. So I think it is also a good task for an international organisation to look into cases and that’s exactly what we did world-wide. We had those seizures which were all stamped with Romeo and we tried to find any links or connections. And the last project which was just recently finished was the project Noa and we looked into the trade of endangered reptiles. You might ask why reptiles. Because we first wanted to focus on animals like parrots and monkeys, but it was a too huge project and we had to shrink it into reptiles. But I just mentioned these projects to also show you that we are not working into one specific type of crime, but we are more a general unit. The analyst’s note book 331 I come back to our second part of our mission statement, the spreading of the technique. Of course, the first point is the ACIU project which we normally spread towards our member countries. I think that’s already a good thing that the countries could recognise this technique could be also in use by us. Furthermore, we organise Interpol Crime conferences, crime analysis conferences. The first was held in 1985, the second could be next year. A very important body is the Crime Analysis Working Group which also is an initiative from our organisation, to have a small working group with experts coming from the countries that have an interest in crime analysis. The delegates are partly coming from the source country and on the other side the participants are coming from the countries that are developing it. So you already get the idea, you have a very good body to discuss how we should approach the crime analysis development. The last thing I would like to mention is the crime analysis booklet. Together with this working group, we made a comprehensive booklet which is now available in three of the Interpol languages and which includes all the techniques, all the insights with examples and so on. For the last part of my presentation I want to show you how we use our big data base. We have a relational data base which we call the CIS Criminal Information System, which holds all the data sent to us by our member states. Basically we have six huge data bases which hold details concerning the persons, details concerning cases or when the case is more specifically a drug case, a counterfeit case or a stolen work of art case. The last thing I would like to mention is the property data base. Somebody is arrested in a car which has a license plate. The information concerning license plate are stored here, and so are telephone numbers and so on. To give you an idea on how big this data base is, we have approximately 170.000 nominal files, they are linked with 90,000 names, 50,000 case files, 80,000 property files, 40,000 drug cases and 20,000 other files. A file can contain a hundred or more pages, so it is a huge database. And because it is so big, it brings me back to the chart I had before. Those data bases are really linked, so when we want to start a study on drug trafficking coming from a country X, we have to take into account all the data which is stored in all the different data bases. And our ideal situation when we have this, and at the moment this is working, when I or someone from the team switch the computer on, you have an actual picture of this relational database. We can then write our report based on the data or we can also use a new analysis to draw a nice chart. I hope it won’t be too technical but I want to show you how we import data from our database. So you have a computer screen. Let’s say we want to make a chart concerning a person X. You see on the screen all the possibilities where I can search on. You see certain batons. These are in a way different representations of the six databases. But let’s say we want to search if we hold data concerning person X. I just go to the coin person, I click it and automatically, a new form opens. This form is what we call the person’s form. You see details concerning a file number when we import the data, details concerning the name, first name and so on, and some additional data that could be of some interest for us. Here of course I can search. I can say give me only the people of nationality X or I want only the persons who are higher that 1.70 meter, and who are born in Amsterdam. When I have found the person I want to visualise, Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 332 to represent on my chart, I just click this small button here and then it opens another form which looks like this. Normally, the name of the person I have selected is shown here on top and automatically, it is mentioned to which other categories of the database this person has links. Let’s say I want to know in what case he is involved or what car he drives or where he was born, I select them to the right and push again the expand button and a second later I have a nice comprehensive chart with all the details that we have concerning the person. So you see in the middle the person himself, where he was born, in what case he was involved and so on. This tool works nicely. It’s not completely operational, we are still working on it but the results are there, we can really use this for our actual work. I want to conclude by mentioning this chart once more. We are using more science and technique in a uniformed way which is intended to support and not replace police work. Thank you. The analyst’s note book 333 Résumé L’analyse du crime et les enquêtes assistées par ordinateur Mario De Cocq L’unité d’Analyse Criminelle (ACIU) a été créée en mars 1993, à l’initiative du Comité Européen d’Interpol. Il s’agit d’une petite structure (4 fonctionnaires détachés de différentes nationalités) chargée de deux missions essentielles. Elle a tout d’abord en charge l’analyse criminelle pour le compte d’OIPC-Interpol. Dans ce cadre, elle traite de tous types de crimes et d’affaires criminelles analysés à l’aide d’une technique déjà expérimentée dans différents pays (USA, Grande-Bretagne, Canada, Pays-Bas) mais menée pour la première fois à l’échelle multinationale. Cette technique a recours à l’informatique afin de mettre au point des fichiers d’analyse pouvant étayer des recoupements entre diverses affaires criminelles. Elle fonctionne à l’aide de six grosses bases de données (fichiers nominatifs, fichiers affaires, fichiers biens, fichiers stupéfiants, autres fichiers). Dans ce cadre, l’AICU fonctionne comme un outil d’assistance professionnelle au service des polices des pays membres de l’OIPC-Interpol. Elle a ensuite pour rôle de diffuser et d’étendre cette technique. L’AICU diffuse en effet ses projets aux États membres. Elle constitue et anime les réunions de groupes de travail en matière d’analyse criminelle. Elle a réalisé une brochure multilingue sur l’analyse criminelle. Cette technique de science moderne s’avère être d’ores et déjà un excellent outil opérationnel, outil qu’il convient sans cesse de faire évoluer et d’adapter aux situations criminelles rencontrées. Resumen El analisis del crimen y las investigaciones asistidas por computadora Mario De Cocq La Unidad de Análisis Criminal (ACIU) fue creada en marzo de 1993, por iniciativa del Comité Europeo de Interpol. Se trata de una pequeña estructura (cuatro funcionarios de diferentes nacionalidades) responsable de dos actividades principales. En primer lugar, está encargada del análisis criminal para la OIPC-Interpol. En este marco, se ocupa de todo tipo de crímenes y asuntos criminales analizados con la ayuda de una técnica ya experimentada en diferentes países (USA, Gran Bretaña, Canadá, Holanda) pero llevada por primera vez a escala multinacional. Esta técnica recurre a la informática con el fin de poner a punto ficheros de análisis que puedan apuntalar las verificaciones de diversos casos criminales. Funciona con seis grandes bases de datos (registros nominativos, registros de casos, registros de bienes, registros de estupefacientes, otros registros). En este marco, la AICU funciona como una herramienta de asistencia profesional al servicio de las policías de los países miembros de la OIPC-Interpol. También tiene por misión difundir y promover esta técnica. La AICU, en efecto, difunde sus proyectos a los Estados miembros. Constituye y promueve las reuniones de trabajo en materia de análisis criminal y ha editado una publicación multilingüe sobre análisis criminal. Esta técnica de ciencia moderna demuestra ser una excelente herramienta operativa, herramienta que debe hacerse evolucionar permanentemente para adaptarla a las situaciones criminales encontradas. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 334 Le fichier automatisé des empreintes digitales (FAED) Eric Brendel, Commissaire principal de police, adjoint au chef du service central de l’identité judiciaire de la direction centrale de police judiciaire française Le fichier automatisé des empreintes digitales (FAED) Lorsque j’ai été informé qu’il me revenait de vous présenter le fichier automatisé des empreintes digitales, que nous appelons FAED pour simplifier, je me suis interrogé sur la place exacte que pouvait prendre le FAED dans ce cours consacré à la lutte contre la criminalité organisée. Il est vrai, en effet, que la réponse à la question de prime abord, n’est pas très favorable au FAED, dans la mesure où vous allez le voir, il s’agit d’un fichier très généraliste qui n’a pas été conçu pour prendre en compte les spécificités de la criminalité organisée. Néanmoins, il a des résultats, c’est incontestable et je pense pour ma part que bien servi par un contexte aujourd’hui très favorable à la modernisation de la police technique et scientifique, la part qu’il prendra dans la lutte contre la criminalité sera de plus en plus importante dans les prochaines années. Tout d’abord, le fichier automatisé des empreintes digitales n’a pas été conçu pour viser une délinquance spécifique. Bien au contraire, c’est un outil généraliste qui avait pour objectif de moderniser les fichiers tenus manuellement. Le FAED : instrument de la modernisation des fichiers dactyloscopiques Le FAED a été conçu par et pour les services de l’identité judiciaire avec le support technique de la direction des transmissions et de l’informatique (DTI), afin d’améliorer la gestion des grands fichiers décadactylaires et monodactylaires. Ce sont des fichiers qui étaient très anciens. Nous avions, en France, trois répertoires décadactylaires dont deux à vocation nationale. Le premier tenu par la Police Nationale, à l’époque c’était la Sûreté Nationale, était confié au service central d’identité judiciaire. Le second était tenu par la Gendarmerie Nationale et le troisième enfin qui avait une compétence géographique plus limitée puisqu’il était tenu par la Préfecture de Police était néanmoins d’une très grande richesse et donc très utile pour les enquêteurs. Lorsqu’en 1984-85, les premières études techniques du FAED ont commencé, il était clair qu’il s’agissait de concevoir un système qui, pour la première fois, permette d’unifier, de rassembler l’ensemble du matériel signalétique collecté par les services de police française quelle que soit leur appartenance, qu’il s’agisse de la Gendarmerie ou de la Police nationale. C’était pour nous un projet très ambitieux. Les trois répertoires que je viens d’évoquer connaissaient chacun les difficultés de gestion propres aux fichiers manuels ce qui ne les rendaient guère performants. Unifier ces répertoires, cela signifiait unifier l’ensemble des documents dactyloscopiques avec comme objectif l’identification des individus mis en cause dans les affaires judiciaires, évidemment les récidivistes à partir d’un relevé décadactylaire ou d’une trace papillaire découverte sur les lieux d’un crime ou d’un délit. Quatre principes directeurs ont présidé à l’élaboration du FAED. Le premier, création d’un fonds documentaire unique et cohérent sur l’ensemble du territoire national. Second principe, assurer la meilleure accessibilité possible à ce fichier centralisé pour que, au niveau des services locaux de l’identité judiciaire de la Police Nationale ou de la Gendarmerie, on puisse accéder à l’ensemble des informations contenues dans la base de données. Troisième principe, une direction d’application à laquelle serait confiée la charge d’administrer ce fichier et d’en assurer la pérennité technique en liaison avec la direction des transmissions et de l’informatique (DTI). Quatrième principe, mettre en place les conditions nécessaires pour assurer un strict respect à la légalité en édictant des règles claires en matière de gestion et l’archivage de l’information sous le contrôle de la Commission Nationale Informatique et Libertés (CNIL). À aucun moment il n’a été prévu de privilégier une forme de délinquance plutôt qu’une autre. Tout, au contraire, revient à privilégier le caractère généraliste de l’application ce que montrent l’architecture du FAED, la nature et les modalités techniques du traitement des informations tout comme le cadre réglementaire du FAED. Une architecture pyramidale à vocation nationale L’architecture du FAED comportera quatre niveaux : Le premier niveau : Niveau technique appelé site central et dont la responsabilité incombe à la DTI, c’est là qu’est localisé l’ensemble du matériel informatique qui assure les comparaisons et archive les informations gérées par le système. Le deuxième niveau : Ce sont les sites de saisies où sont opérées les mises à jour de la base de données. Il y a trois sites de saisies : le service central d’identité judiciaire pour la direction centrale de la police judiciaire, la préfecture de police (PP/IJ) et enfin la Gendarmerie Nationale. Pourquoi trois sites.? Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 336 Comme je vous l’ai indiqué précédemment, la tradition étant forte, aucune de ces trois entités n’a souhaité déléguer au service central d’identité judiciaire qui est responsable du projet, le soin de traiter la documentation dactyloscopique établie par les unités opérationnelles relevant de ces grands services, et d’alimenter le fonds documentaire de ce fichier. Par conséquent, nous avons une saisie sur ces trois sites. La Gendarmerie, sur son site à Rosny-sous-Bois, insère l’ensemble des fiches relevées par les brigades de gendarmerie.; la Préfecture de Police fait de même pour celles relevées sur Paris et la petite couronne et enfin, le Service Central d’Identité Judiciaire assure la saisie des fiches établies par tous les services de la police nationale hors Paris. Troisième niveau : Les sites de consultation implantés dans les SRPJ dont huit sont déjà opérationnels : Lille, Lyon, Marseille, Rennes, Rouen, Strasbourg, Toulouse et Versailles. L’ambition est d’avoir un site par service régional de police judiciaire, soit 19 sites régionaux de consultation. Enfin, un dernier niveau qui est en cours de développement, le niveau local qui permettra à des postes, non pas d’avoir la totalité des fonctionnalités permises par l’application mais une partie seulement, celle permettant d’identifier les individus. Le traitement des traces papillaires relevées sur les lieux de crimes et délits restera confié vraisemblablement au niveau régional. Un traitement indifférencié du materiel dactyloscopique Quelles sont maintenant les informations qui sont gérées par ce fichier.? Vous avez tout d’abord celles qui vont constituer le fonds documentaire, essentielles pour l’efficacité du fichier et qui portent sur les empreintes décadactylaires relevées sur les individus mis en cause dans le cadre des enquêtes judiciaires. Ces fiches comportent l’identité, la date et le motif pour lequel la personne a été mise en cause. Cette notion de mise en cause est importante, nous le verrons un peu plus loin, parce qu’elle est directement rattachée à la notion d’enquête judiciaire et la réglementation du FAED telle qu’elle existe aujourd’hui ne permet de prendre en compte que les informations qui sont obtenues dans le cadre d’une procédure judiciaire. Ces fiches décadactylaires sont acheminées par voie postale sur chacun des sites de saisie et viennent alimenter le fonds documentaire qui aujourd’hui, compte à peu près 750.000 individus. Nous estimons qu’en France, le chiffre optimum permettant de couvrir la délinquance récidivante telle qu’elle existe actuellement est d’environ un million et demi à deux millions d’individus (1,5 million -2 millions). Nous sommes donc en bonne voie mais nous avons encore une route assez longue à parcourir. Il est évident que le FAED ne peut pas encore avoir des résultats optimisés dans la mesure où il lui échappe à peu près la moitié des individus ayant un potentiel important de récidive. Le fichier automatisé des empreintes digitales (FAED) 337 Deuxième catégorie d’information, celle qui a trait aux traces papillaires relevées sur les lieux des crimes et des délits. Elle prend la forme de fiches traces. Ces dernières sont établies par les services locaux de l’identité judiciaire qui sont amenés à intervenir à la demande des services d’enquêtes. Elles comportent des informations d’ordre alphanumérique permettant leur gestion administrative et la photographie au rapport un de la ou des traces papillaires qu’il conviendra d’identifier. Lorsque la recherche initiale s’avère négative, l’opérateur a la possibilité de placer ces fiches traces dans ce qu’il est appelé «.la base des traces non résolues.» (TNR), base à laquelle sera confrontée chaque nouvelle fiche décadactylaire avant son archivage dans le fonds documentaire. Cette fonctionnalité permet d’identifier des personnes qui, interpellées et signalisées pour une affaire bénigne, éventuellement ce peut être pour un vol de voiture, seront finalement mises en cause pour des faits beaucoup plus graves qui avaient donné lieu à un relevé de traces papillaires archivé en «.TNR.». Tout dernièrement, la signalisation d’un très banal voleur à l’étalage a permis de résoudre un meurtre commis trois ans auparavant par cet individu dont la trace du pouce droit avait été relevée sur les lieux du crime. Non identifié à l’époque, puisque l’auteur n’avait jamais été signalisé par un service de police ou de gendarmerie, cette trace avait été placée en TNR. Le FAED a traité environ 33.000 fiches-trace en 1995 (contre ~ 20.000 en 1994), avec des identifications qui régulièrement, d’année en année, augmentent d’environ 50.% pour atteindre en 95 plus de 2.000 personnes. Cette progression sera vraisemblablement maintenue jusqu’à ce que le fonds documentaire ait atteint le seuil d’au moins un million d’individus. Ces résultats sont à plus de 80.% en relation avec ce que nous appelons la petite et moyenne délinquance. La part prise par la criminalité organisée reste assez faible, entre 10 et 15.% à peu près, ce qui montre bien que quantitativement, le FAED n’est pas dédié à ce type de répression. Nous allons également retrouver, dans le mode de fonctionnement et de gestion des informations, cette approche «.généraliste.» qui écarte toute possibilité d’axer une recherche sur tel ou tel type d’infractions. Il était concevable de répartir la base de données en fonction des types d’infractions. Nous aurions pu ainsi la réserver, la spécialiser pour certaines infractions, telles que les attentats, ou les vols à main armée, ou d’autres encore. Dès l’origine, cette solution a été écartée au bénéfice de critères purement techniques. Ainsi la base de donnée a été partitionnée en main gauche/main droite, chacune de ces catégories étant elle-même subdivisée en autant de doigts, l’opérateur a donc la possibilité d’orienter une recherche vers l’une de ces parties de la base améliorant ainsi les performances globales du système. Deuxième critère important, la localisation géographique. La France, territoire national, a été répartie en onze régions.; chaque fiche décadactylaire est archivée dans celle de ces onze régions correspondant à l’endroit où la fiche décadactylaire aura été établie. À partir de ce critère, les opérateurs ont la possibilité de faire trois types de recherches. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 338 Le premier type porte sur une région déterminée. C’est par exemple, une trace relevée en région parisienne qui va faire l’objet d’une recherche sur la partie de la base donnée rassemblant les personnes qui ont été signalisées dans la région parisienne. Deuxième type de recherches : une région déterminée ainsi que les régions qui lui sont adjacentes. Enfin, l’opérateur peut opter pour une recherche couvrant l’ensemble du territoire national. Ceci est particulièrement intéressant pour lutter contre les types de délinquance très mobile et pour les infractions extrêmement graves qui peuvent être le fait de bandes organisées dont la mobilité constitue un des moyens de défense. Dans la mesure où la plupart des recherches au FAED concernent des affaires de petite et de moyenne délinquance, la plupart des résultats sont obtenus avec une recherche purement locale. Mais chaque fois que cela est nécessaire, les consultations sont étendues à l’ensemble de la base de données. Enfin, dernier élément technique, il faut souligner que la puissance informatique mise à la disposition de l’opérateur, est rigoureusement la même, quel que soit le type d’infraction. Ainsi, qu’il s’agisse d’une trace relevée à la suite d’un vol de voiture ou d’un attentat meurtrier, les ressources informatiques qui seront mobilisées pour l’identification de ces traces seront identiques à qualité de trace équivalente. Là encore, pas de «.plus.» pour la criminalité organisée, la vocation généraliste du FAED en imprègne intimement tout le fonctionnement. Autre point de vue, et non des moindres, le cadre réglementaire du FAED. Un cadre réglementaire rigide Il est régi par un décret de 1987 qui a pris soin de réserver l’utilisation du FAED aux services de police judiciaire à l’exclusion de tout autre. Qu’il s’agisse des informations alimentant la base de données ou de simples consultations, toutes doivent nécessairement avoir pour origine une enquête judiciaire diligentée, sous le contrôle d’un magistrat français. Ainsi par exemple, le décret de 87 proscrit l’insertion en base de données de la fiche décadactylaire d’un citoyen français interpellé pour crime en Allemagne, jugé et condamné en Allemagne quand bien même cette fiche aurait été officiellement transmise en France dans le cadre de relations bilatérales. Cette contrainte est extrêmement lourde dans le cas de la lutte contre la criminalité organisée, et il est vrai qu’elle limite beaucoup les possibilités d’alimentation du fonds documentaire du FAED. De même, seront proscrites toutes les informations de nature administrative très fréquentes en matière de terrorisme où de nombreux renseignements ne sont pas recueillis dans le cadre d’une enquête judiciaire classique. Le fichier automatisé des empreintes digitales (FAED) 339 Deuxième sorte de restrictions, elles concernent cette fois les possibilités de connexion du FAED avec d’autres systèmes informatiques. Le décret de 1987, là aussi, l’interdit formellement. Toutes possibilités de connexion avec des fichiers français, tels que le STIC par exemple (qui est un fichier de traitement de l’information criminelle) ou avec des fichiers transfrontaliers qui permettraient d’enrichir, dans des conditions intéressantes, la base documentaire du FAED, sont exclues. Enfin : vocation généraliste du FAED qui va se concrétiser dans les résultats obtenus par l’application. Des résultats significatifs Alimenté essentiellement à partir de la criminalité moyenne (petite et moyenne délinquance), il est évident que l’essentiel des identifications va se rapporter à cette forme de délinquance. C’est, heureusement pour notre pays, l’essentiel de la délinquance, mais il est sûr que par rapport au thème de ce cours, le FAED ne peut pas présenter statistiquement des arguments déterminants quant à son efficacité en matière de lutte contre la criminalité organisée. Prenons par exemple la ville de Lyon. Le service d’identité judiciaire identifie à peu près 550 traces papillaires par an, ce qui aboutit à la mise en cause de 600 personnes environ. Sur ces 550 traces élucidées, 217 le sont directement par le fichier automatisé des empreintes digitales et 270 le sont, suite à l’examen dans les fichiers manuels qui sont toujours tenus localement et aux recoupements qui peuvent être effectués à cette occasion. La plupart de ces affaires se rapportent évidemment à des vols de voitures, cambriolages, vols à la roulotte. Les 10.% restants ont trait à des affaires plus importantes telles que, crimes, meurtres, vols à main armée, viols, etc.. Cela correspond néanmoins à une vingtaine d’affaires véritablement sensibles, se rapportant directement à la criminalité organisée. On ne peut pas dire, par conséquent, que, sans être déterminant, l’apport du FAED soit moindre ou secondaire. Le FAED, outil généraliste par excellence, appréhende l’ensemble de la criminalité, y compris bien sûr ses formes les plus sophistiquées. J’en veux pour preuve ce qui s’est passé en fin d’année 1995 lors de la vague d’attentats à Paris. À partir d’une trace identifiée sur une bombe non explosée, placée sur la ligne ferroviaire Paris/Lyon, un des auteurs a été identifié par le SCIJ grâce au FAED, cela a permis à la police judiciaire d’initier des enquêtes dans des axes qui se sont révélés extrêmement porteurs, et qui ont été à l’origine des interpellations qui ont eu lieu à partir de la fin de l’année 1995. La fiche décadactylaire de l’individu ainsi identifié avait été placée en base permanente en 1990 suite à un vol de voitures commis par l’intéressé. Nous sommes donc dans le cadre d’un fonctionnement très typique du FAED. On part d’un petit fait de délinquance, de petite criminalité : vol de voiture, pour aboutir à l’identification d’un individu dont l’évolution et le parcours criminel le rattachent directement à la criminalité organisée. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 340 Ce type de procédé assez exceptionnel en matière de terrorisme, encore qu’il y ait plusieurs affaires du même genre se rapportant au terrorisme basque, se rencontre plus fréquemment en matière de vol à mains armées ou lors de séquestrations de personnes. Ce qui limite évidemment statistiquement les résultats pour ce type d’affaires, c’est la difficulté qu’auront les spécialistes de l’identité judiciaire à identifier des traces papillaires exploitables. À l’inverse, la petite et moyenne délinquance est le plus souvent le fait d’individus peu expérimentés qui, en commettant de nombreuses erreurs techniques, vont laisser les traces que la police pourra éventuellement relever et exploiter. Former des spécialistes de la scène de crime et les répartir sur le territoire national de manière à ce que chaque lieu de crime et de délit fasse l’objet d’une recherche de traces papillaires avec des moyens et des techniques en rapport avec la gravité de l’infraction. C’est là tout l’enjeu de la police technique de proximité que le ministre de l’Intérieur met en place depuis 1995. Le maillage actuel de la police technique et scientifique à travers ses spécialistes en matière de scène de crime, n’est pas encore suffisant pour couvrir parfaitement tous les délits qui sont commis sur l’ensemble du territoire. Par conséquent, nous constatons une perte d’informations qui n’est pas négligeable et qui pour partie, avec l’insuffisance actuelle du fonds documentaire, explique les résultats du FAED qui statistiquement ne sont pas encore à la hauteur de ce qu’ils pourraient être. L’évolution de la police technique et scientifique et les efforts qui sont actuellement déployés pour améliorer les matériels et les formations des techniciens de scène de crime devraient permettre, dans les prochaines années, d’augmenter considérablement cette collecte de traces. De même l’évolution du fonds documentaire, 750.000 aujourd’hui, bientôt je l’espère un million, amènera des résultats plus significatifs. Voilà, ce que je voulais vous indiquer pour l’essentiel. Je vais vous montrer, pour conclure, une trace qui a été relevée sur l’un des lieux d’attentat en 1995. C’est une trace qui a été trouvée sur un ruban adhésif. Vous voyez une photo qui montre la totalité du ruban adhésif. Le hasard, qui parfois sert les policiers, a voulu que sur ce fragment soit localisée une très belle empreinte papillaire. Cette trace a été identifiée sur le FAED en quelques heures, ce qui était impensable à l’époque des fichiers manuels. Voilà ce que peut permettre le FAED dès lors que les conditions de sa mise en œuvre, tant en ce qui concerne l’alimentation du fonds documentaire que la collecte des traces papillaires, sont parfaitement réalisées. Le fichier automatisé des empreintes digitales (FAED) 341 Summary The FAED, Automatic fingerprint retrieving system Eric Brendel The FAED is a national computer data system operated by the Central Criminal Police Department on behalf of the Ministry of the Interior. It was created by the Morpho-system company, and it started being operational in 1992. It now contains the fingerprints of 700,000 people. The FAED has double functions : It’s purpose is first to identify the persons who are fingerprinted as suspects in a criminal case or as sentenced prisoners. The other purpose is to identify latent prints lifted on crime scenes. The use of computers allows for the build up of reference data files as complete and well organised as possible. Above all, this allows for considerable gain of time while researching and comparing prints and in this sense it helps comparisons. To sum it all, it makes identification of prints easier and more effective while the work is more open and accessible to control (in conformity with the regulations of the computer control mission, CNIL). Its use tends to get decentralised even if data entry is still being done at central level. There are in fact three data entry centres (the scene of crime central office, the Paris Police scene of crime unit and the gendarmerie central fingerprint office) as well as eight regional data access centres. In the short term, all 19 regional criminal investigation department and a few units of the central criminal investigation department will obtain reading access. Resumen El FAED, registro automatizado de huellas digitales Eric Brendel El FAED es un registro nacional puesto en marcha y operado por la Dirección Central de la Policía Judicial por cuenta del Ministerio del Interior. Creado por la sociedad «.MorphoSystème.», es operacional desde 1992. Actualmente, contiene 700.000 individuos. El FAED cumple un doble rol : por un lado, identificar a las personas involucradas en un caso judicial o detenidas. Por otro, identificar las huellas dejadas en el lugar del crimen o delito. La informática permite constituir fondos de referencia voluminosos pero exhaustivos y bien organizados. Permite sobre todo ganar un tiempo precioso en la búsqueda y comparación de las huellas. En resumen, facilita la coherencia y la eficiencia en la identificación de huellas digitales asegurando su transparencia (conforme a las exigencias de la CNIL). Su utilización tiende a diversificarse, aún cuando el tratamiento de la información sigue siendo centralizado. En efecto, existen tres centros de acopio (SCIJ, IJ/PP y STRID de la Gendarmería) y ocho centros regionales de consulta. A corto plazo, todos los servicios regionales y algunos servicios centrales de la Policía Judicial se convertirán en nuevos centros de consulta. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 342 Le Groupe d’action financière (GAFI) et la lutte contre le blanchiment de capitaux Jean Spreutels, magistrat, président de la CTIF belge représentant dedelacapitaux Belgique au GAFI et la lutte Le contre Groupe le blanchiment d’action financière (GAFI) Historique Après l’adoption de la Déclaration de principe du Comité des règles et pratiques de contrôle des opérations bancaires, dite Déclaration de Bâle du 12 décembre 1988, qui vise la prévention de l’utilisation du secteur bancaire aux fins du blanchiment de capitaux, et celle de la Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes (Vienne, 20 décembre 1988), qui incrimine le blanchiment provenant du trafic de stupéfiants, les sept pays les plus industrialisés du monde.1 décidèrent de mettre en place un groupe d’action dont la préoccupation première serait le phénomène du blanchiment de l’argent sale. C’est à l’occasion du sommet des sept pays les plus industrialisés, qui s’est tenu à Paris en juillet 1989, désormais connu sous le nom de «.Sommet de l’Arche.», qu’a été constitué le Groupe d’action financière (GAFI) ou Financial Action Task Force (FATF). Cette initiative répondait aux inquiétudes des chefs d’État ou de gouvernement nées de la rapidité avec laquelle se développaient le trafic de stupéfiants et les opérations de blanchiment qui en découlent. Le GAFI se vit assigner une triple tâche : analyser le phénomène du recyclage de l’argent sale, faire une évaluation des instruments internationaux et des programmes nationaux mis en œuvre dans ce domaine et présenter des recommandations d’intervention. Dans les mois qui suivirent sa constitution, huit États se joignirent au sept pays fondateurs.2. La Commission des Communautés européennes participa également aux travaux. Le groupe de travail, comprenant pas moins de 130 experts, déposa son premier rapport en avril 1990. Celui-ci énonçait 40 recommandations. 1. Les États-Unis, le Japon, l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, l’Italie et le Canada. 2. L’Australie, l’Autriche, la Belgique, l’Espagne, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Suède et la Suisse. Alors que la mission du GAFI aurait dû normalement prendre fin, les chefs d’État et de gouvernement décidèrent de la prolonger pour une durée d’un an. Dix membres supplémentaires vinrent élargir le groupe.1. À l’issue de la deuxième année, la continuation des travaux fut décidée pour un terme supplémentaire de cinq ans. Ce délai a encore été prolongé jusqu’en 1998-99. Le GAFI comprend aujourd’hui vingt-huit membres (26 gouvernements et deux organisations régionales internationales).2 qui représentent les centres financiers les plus importants de l’Europe, de l’Asie et de l’Amérique du Nord. En outre, les réunions du GAFI accueillent une très grande variété d’experts : des représentants des ministères des Finances et des banques centrales ou d’autres autorités de surveillance du secteur financier, des experts juridiques et des magistrats ainsi que des membres des services opérationnels (police, douanes, unités spécialisées,...). Cette approche multidisciplinaire est essentielle pour les travaux du GAFI et constitue une garantie indispensable à l’efficacité de la lutte contre le blanchiment de capitaux. L’action du GAFI a été confortée par d’autres initiatives internationales importantes, notamment la Directive no 91/308 du Conseil des Communautés européennes du 10 juin 1991 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et la Convention du Conseil de l’Europe relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime, faite à Strasbourg, le 8 novembre 1990. Les quarante recommandations La première action d’envergure du GAFI fut d’adopter quarante recommandations couvrant tous les aspects de la lutte contre le blanchiment, à savoir le système juridique et répressif, la réglementation du système financier et la coopération internationale. L’objectif est de pouvoir reconstituer la trace de l’argent sale dans le système financier, de saisir ces fonds et de les confisquer de façon à, d’une part, assainir le système financier et, d’autre part, priver les criminels du produit de leurs activités illicites. Chacun des membres du GAFI a pris l’engagement politique ferme, au moins au niveau ministériel, de transposer les quarante recommandations dans son droit interne. Toutefois, les recommandations constituent des principes d’action que les pays mettent en œuvre en fonction de leurs spécificités et de leurs cadres constitutionnels, en leur laissant une certaine marge de souplesse. Ces quarante recommandations, rédigées à l’origine en 1990, ont été révisées en 1996 pour prendre en compte l’expérience des six dernières années et refléter l’évolution du phénomène. 1. Le Danemark, la Finlande, la Grèce, l’Irlande, la Nouvelle-Zélande, la Norvège, le Portugal, la Turquie, Hong-Kong et le Conseil de coopération du Golfe. 2. Les gouvernements déjà cités auxquels il faut ajouter ceux de l’Islande et de Singapour et les deux organisations régionales internationales déjà mentionnées, à savoir la Commission européenne et le Conseil de coopération du Golfe. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 344 Sur le plan répressif, les recommandations invitent les membres à incriminer le blanchiment des fonds provenant du trafic de stupéfiants et à étendre cette incrimination au blanchiment de capitaux de toute infraction grave. Dans leur nouvelle formulation, les recommandations insistent sur l’extension de l’incrimination au blanchiment de capitaux issus d’infractions graves, chaque État devant déterminer quelles infractions graves doivent être considérées comme des infractions sous-jacentes du blanchiment de capitaux. Elles leur demandent également de prendre des mesures effectives pour identifier, saisir et confisquer les biens blanchis. La responsabilité pénale des sociétés devrait pouvoir être mise en cause. Sur le plan préventif, les recommandations préconisent que les institutions financières : – identifient leurs clients. Les recommandations ont été modifiées de façon à y faire figurer des dispositions plus concrètes concernant l’identification des personnes morales.; – déclarent les transactions suspectes aux autorités compétentes. Le système de déclaration des transactions suspectes, autrefois volontaire, est désormais obligatoire.; – instaurent des programmes internes de lutte contre le blanchiment de capitaux. Dans leur nouvelle version, les recommandations insistent sur l’application identique de ces mesures aux institutions financières non bancaires (notamment les bureaux de change), ainsi que sur une application adaptée de ces mesures aux professions et aux entreprises non financières exerçant certaines activités financières. Trois autres recommandations, la première sur le développement de technologies nouvelles qui risquent de favoriser l’anonymat des opérations, la deuxième sur les transports physiques transfrontaliers d’espèces et la troisième sur l’utilisation de sociétés-écrans, ont été insérées dans le corpus des quarante recommandations invitant les États à porter leur attention sur ces pratiques et à envisager éventuellement l’adoption de mesures supplémentaires à cet égard. Enfin, sur le plan de la coopération internationale, le GAFI incite à l’échange des informations, notamment celles concernant les transactions suspectes, et à l’adoption de conventions multilatérales ou bilatérales pour faciliter l’entraide judiciaire, l’extradition et la confiscation. Il faut signaler que la recommandation invitant les autorités compétentes des différents pays à coopérer dans le cadre d’enquêtes a été complétée pour encourager les pays à recourir à la technique de la livraison surveillée des actifs connus ou présumés être le produit du crime. Le GAFI ne s’est pas contenté d’élaborer les quarante recommandations et de les adapter aux nouvelles tendances. Il a prolongé son existence pour vérifier l’adoption et l’application des mesures nécessaires par ses membres. Pour ce faire, le GAFI recourt à trois procédés : – un exercice annuel d’auto-évaluation au moyen de questionnaires relatifs aux aspects financiers et juridiques.; – un exercice plus détaillé d’évaluation mutuelle dans le cadre duquel chaque membre fait l’objet d’un examen sur place. Le GAFI a entamé en 1995-96 la Le Groupe d’action financière (GAFI) et la lutte contre le blanchiment de capitaux 345 seconde série d’évaluation mutuelle. La deuxième évaluation mutuelle de la France a déjà été réalisée.; – des évaluations horizontales des mesures prises par les membres en vue de l’application de recommandations spécifiques. En 1995-96, le GAFI a commencé une étude sur les recommandations relatives à la confiscation des biens et aux mesures provisoires. Tous les membres sauf un ont désormais promulgué des lois incriminant le blanchiment de capitaux issus du trafic de stupéfiants, tandis que dix-neuf pays ont adopté une définition du délit pénal qui couvre le blanchiment du produit, outre du trafic de stupéfiants, d’un large éventail d’activités criminelles. Tous les membres sauf un ont pris des dispositions juridiques permettant des enquêtes en coopération avec d’autres États. Le GAFI constate des avancées significatives dans la mise en place des instruments juridiques concernant l’entraide judiciaire en matière pénale, y compris en matière de saisie et de confiscation. La très grande majorité des membres est en totale conformité avec les obligations concernant l’identification de la clientèle. Des progrès majeurs ont également été accomplis au niveau des mesures de vigilance et de prévention. Le GAFI observe encore une certaine résistance en ce qui concerne l’application des mesures anti-blanchiment au secteur financier non bancaire. Les relations extérieures L’objectif ultime du GAFI consiste à faire prendre conscience à tous les pays possédant des centres financiers importants de la nécessité de lutter contre le blanchiment de capitaux et de les persuader d’adopter et de mettre en œuvre ses recommandations. A cette fin, le GAFI, d’une part, coopère et coordonne son action, dans toute la mesure du possible, avec l’ensemble des organisations internationales et régionales concernées par la lutte contre le blanchiment de capitaux. D’autre part, il développe des relations avec les pays non membres pour éviter notamment le déplacement du blanchiment de capitaux vers d’autres zones géographiques. La coopération avec des organisations internationales et régionales Au cours de la première année d’existence du GAFI, seules trois organisations internationales ont assisté à ses réunions : le Fonds monétaire international (FMI), le Banques des règlements internationaux (BRI) et l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE). En 199091, le GAFI a décidé que des organisations internationales compétentes pourraient être invitées à participer aux réunions du Groupe en tant qu’observateurs. Jusqu’à la réunion plénière de janvier-février 1996, la participation des organisations internationales en qualité d’observateurs était limitée à des points spécifiques de l’ordre du jour comme les relations extérieures. Désormais, il a Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 346 été convenu que les organisations internationales participent en qualité d’observateurs au plus grand nombre possible de discussions en sessions plénières. C’est ainsi qu’en 1995-96, ont participé aux réunions du GAFI des représentants du Groupe d’action financière des Caraïbes (GAFIC), du Conseil de l’Europe, du Secrétariat du Commonwealth, du Fonds monétaire international, de la Commission interaméricaine de lutte contre l’abus des drogues (CICAD), d’Interpol, de l’Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV), du Groupe des autorités de contrôle bancaire des centres extra-territoriaux, de la Division de la prévention du crime et de la justice pénale des Nations Unies, du Programme des Nations Unies pour le contrôle international des drogues (PNUCID), de la Banque mondiale et de l’Organisation mondiale des douanes. Par ailleurs, pour coordonner les activités des organismes régionaux et internationaux préoccupés par le blanchiment de capitaux, le GAFI organise des réunions régulières des diverses organisations. Enfin, le GAFI participe également à différentes réunions à l’initiative de ces organismes. C’est ainsi que des représentants du Groupe ont assisté, en 1995-96, à des réunions du Groupe des autorités de contrôle bancaire des centres extra-territoriaux, du groupe «.Fonds provenant d’activités criminelles.» (FOPAC) d’Interpol et de l’Organisation mondiale des douanes. Les relations avec les pays non membres De nombreux pays et organisations non membres ont accepté les recommandations du GAFI et consentent des efforts pour les mettre en œuvre. Le GAFI a mis au point une méthodologie des évaluations mutuelles qui pourrait s’appliquer à des pays non membres. Le Groupe devrait être prêt à valider les processus d’évaluation par d’autres organismes internationaux pour autant qu’ils répondent à certains critères convenus. L’une des conditions est notamment que les membres du GAFI participent à tous les organismes internationaux ou régionaux qui sont susceptibles de réaliser une évaluation sur la lutte contre le blanchiment. Si cela s’avère nécessaire, le GAFI peut également apporter une formation et fournir une assistance technique régulière dans le but de promouvoir les recommandations. Ainsi dans la région des Caraïbes, le GAFI continue de fournir au GAFIC tout l’appui nécessaire plutôt que de lancer de nouvelles initiatives. En tout état de cause, la démarche doit être souple et s’adapter à la situation de la région ou des pays concernés. Le GAFI ne peut pas couvrir en même temps tous les pays qui représentent un intérêt.; il a dû fixer des priorités dans la mise en œuvre de ses initiatives en matière de relations extérieures. Il a décidé d’accorder la priorité à sa stratégie de contact avec les pays d’Asie, d’Europe orientale et des Caraïbes. Outre l’organisation de symposiums passant en revue les progrès réalisés dans l’adoption de législations anti-blanchiment, l’étape la plus significative consiste dans la réalisation d’un consensus en faveur de la création d’un Groupe de direction Asie/Pacifique sur le blanchiment de capitaux. Le Groupe d’action financière (GAFI) et la lutte contre le blanchiment de capitaux 347 À l’intention des pays de la zone de Coopération économique de la mer Noire.1, le GAFI a organisé un séminaire sur le blanchiment de capitaux. Les pays de cette zone qui ne sont pas membres du GAFI ont convenu d’envisager l’adoption et l’application des recommandations du GAFI. Enfin, on ne peut manquer de signaler la condamnation des Seychelles par le GAFI. Le 27 novembre 1995, les Seychelles ont adopté la loi de développement économique. Certaines dispositions de ce texte en matière d’immunité risquaient de toute évidence d’attirer l’attention des entreprises criminelles internationales qui viendraient chercher refuge aux Seychelles et y mettre à l’abri leurs richesses acquises de façon illicite contre les poursuites des autorités judiciaires. En conséquence, le 1er février 1996, conformément à la recommandation 21 et à la suite d’initiatives diplomatiques, le GAFI a décidé de publier un communiqué de presse condamnant l’adoption de cette loi et appelant ses membres, comme les autres gouvernements, à exercer toutes les pressions possibles sur le gouvernement des Seychelles, afin qu’il abroge les dispositions susmentionnées de la loi de développement économique. À la suite de ce communiqué de presse, le GAFI et le gouvernement des Seychelles ont entamé un dialogue afin de trouver des moyens de mettre en œuvre une loi significative sur la lutte contre le blanchiment de capitaux de nature à éliminer les effets pratiques des dispositions de la loi de développement économique en matière d’immunité. Cet exemple montre le pouvoir de pression et de dissuasion dont dispose, dans une certaine mesure, le GAFI. Les typologies des techniques de blanchiment Le GAFI tente également de suivre les évolutions des techniques de blanchiment pour cibler les nouvelles menaces et élaborer des contre-mesures efficaces. Les experts du GAFI ont mis en commun les informations dont ils disposent sur les procédés de blanchiment les plus courants dans les pays ou régions tant membres que non membres. À cet égard, les opérations auxquelles donnent lieu les fonds illicites provenant de l’ex-Union soviétique et de l’ex-bloc de l’Est ont fait l’objet d’une attention particulière. La dernière réunion du groupe d’experts sur les typologies a eu lieu, sous ma présidence, en novembre 1995. Premièrement, il faut reconnaître qu’il est quasi impossible de déterminer l’importance du phénomène du blanchiment des capitaux. La grande majorité des États membres ne disposent pas de données suffisantes pour étayer des estimations crédibles. Néanmoins, le GAFI invite les États membres à poursuivre des tentatives dans ce sens.2. Pour ce qui est des principales sources de revenus illicites, le trafic de stupéfiants reste la source la plus fréquemment mentionnée. Vient ensuite la 1. Albanie, Arménie, Azerbaïdjan, Bulgarie, Géorgie, Grèce, Moldova, Fédération de Russie, Roumanie, Turquie et Ukraine. 2. M. Quirk, dans un document de travail du FMI, cite intuitivement le chiffre de 500 milliards de dollars, soit 2.% du PIB mondial. Cfr P.J. Quirk, Macrœconomic Implications of Money Laundering, FMI, avril 1996. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 348 criminalité financière. La criminalité organisée continue d’être à l’origine d’une importante proportion d’argent sale circulant dans les circuits financiers. En ce qui concerne l’utilisation du système financier, les banques demeurent un mécanisme important pour l’écoulement des revenus de la criminalité, notamment grâce à l’utilisation de comptes au nom de personnes opérant pour d’autres bénéficiaires ou encore au nom de sociétés-écrans. Les transferts électroniques restent un instrument essentiel à toutes les étapes du processus de blanchiment. Les «.cyberpaiements.» constituent une menace potentielle de taille, dans la mesure où ils permettent de réaliser d’importantes transactions de façon anonyme et parfois entièrement en dehors du système bancaire. Les institutions financières non bancaires et les entreprises non financières sont encore des moyens commodes d’introduire des revenus obtenus de façon illégale dans les circuits financiers normaux. À cet égard, les bureaux de change représentent un risque toujours plus important dans le domaine du blanchiment. On constate aussi une augmentation du nombre de membres des professions juridiques, de comptables, de conseillers financiers et d’administrateurs de biens, dont les services sont utilisés pour faciliter l’écoulement des fonds provenant d’activités criminelles. Un important volume des gains provenant d’activités illicites sont également investis dans l’immobilier. Plus étonnant, la contrebande, l’une des techniques les plus anciennes de blanchiment des capitaux, semble connaître un regain d’intérêt. La contrebande peut se faire en transportant matériellement les espèces ou les instruments monétaires, ou en cachant les espèces dans des expéditions de marchandises destinées à l’étranger. Par ailleurs, on a constaté que le secteur des casinos restait particulièrement propice au blanchiment de capitaux. Les casinos conciliants ne peuvent qu’attirer les blanchisseurs de capitaux car ils offrent souvent les mêmes services que les banques, y compris des possibilités de crédit, des facilités de change et des services de transfert de fonds. Le secteur de l’assurance ou de la réassurance est aussi touché, notamment en raison de l’utilisation de contrats d’assurances à prime unique. Les marchés de valeurs mobilières peuvent également être très propices à l’infiltration par les blanchisseurs. Ces marchés sont très liquides. Les achats et les ventes peuvent être réalisés en un temps très bref. Les courtiers en valeurs mobilières pourraient être incités, en raison de la forte compétitivité, à ne pas trop se préoccuper de l’origine des fonds de leurs clients. Il a déjà été souligné plus haut que ces constats avaient amené le GAFI à procéder à la révision de certaines recommandations pour les adapter aux évolutions des techniques de blanchiment. Désormais, les recommandations applicables au secteur financier doivent aussi couvrir des entreprises ou des professions non financières proposant des services financiers. Les États membres ont aussi réagi en adoptant un certain nombre de contre-mesures. La plupart ont étendu le délit de blanchiment à des infractions Le Groupe d’action financière (GAFI) et la lutte contre le blanchiment de capitaux 349 autres que celles liées à la drogue. Un certain nombre a étendu la portée des mesures à de nouvelles institutions financières, voire à des professions non financières susceptibles néanmoins d’être utilisées à des fins de blanchiment. En ce qui concerne les pays non membres du GAFI, les informations typologiques disponibles sont très rares sauf en ce qui concerne l’ex-Union soviétique et l’ex-bloc de l’Est. Ainsi les experts ont pu rassembler des éléments d’information convaincants montrant que le crime organisé dans ces régions était impliqué dans plus ou moins tous les types d’activités criminelles. Les groupes criminels russes se montrent extrêmement organisés avec un réseau de contacts internationaux s’étendant dans les organisations criminelles internationales. Les techniques de blanchiment détectées sont l’ouverture de comptes dans des institutions financières où d’importantes sommes sont déposées pour être ensuite transférées à l’étranger et l’établissement de sociétés-écrans dans les pays membres du GAFI. Le plus souvent, les fonds sont ensuite rapatriés en Russie. Conclusion Si des progrès considérables ont déjà été accomplis, l’action du GAFI dans la lutte contre le blanchiment de capitaux doit se poursuivre. L’analyse typologique met en lumière le risque engendré par les failles, tant en ce qui concerne le type d’opération ou le type d’institution utilisé qu’en ce qui concerne la faiblesse réglementaire de certains États, d’un système de lutte contre le blanchiment de capitaux et la nécessité de parvenir à une mise en œuvre complète des quarante recommandations, non seulement au sein des pays membres du GAFI mais aussi auprès des pays non membres. D’autre part, le caractère transnational de ce type de criminalité exige une approche internationale du phénomène qui suppose une coopération de tous les États et une collaboration entre toutes les organisations internationales et régionales concernées. C’est pourquoi le GAFI s’est donné les priorités suivantes pour la session qui a commencé le 1er juillet 1996 sous la présidence de l’Italie : renforcer sa coopération avec le secteur des services financiers, faire face aux éventuelles menaces de blanchiment de capitaux que font peser les nouvelles technologies de paiement et développer la dynamique des efforts anti-blanchiment de capitaux à l’échelle mondiale en coopération avec d’autres organismes internationaux. Le blanchiment des capitaux d’origine criminelle demeure un phénomène particulièrement inquiétant qui risque, à terme, de déstabiliser l’économie mondiale. La vigilance de tous ceux que concerne le système de lutte mis en place est donc plus que jamais nécessaire. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 350 Summary The achievements of the Financial working group Jean Spreutels The GAFI (Groupe d’Action Financière, or Financial Working group) was created in 1995 at the occasion of the Paris Arch summit, following the Bale declaration and the United Nations Convention against drugs trafficking. This group counts now 28 members including 26 countries, the European Commission and the Gulf co-operation council. It has three main duties: – to analyse instances of money laundering – to assess the tools and the national programmes related to money laundering – to make operational recommendations. In order to do so, it has adopted 40 recommendations including all the aspects of the fight against laundering activities. The member countries agreed to import those recommendations into their national legislation. These recommendations go toward more adequate repressive measures (they insist on money laundering being listed within the criminal offences) and better preventive measures to be used by financial or banking institutions (identification of customers, declaration of suspect financial transactions, etc.) The GAFI maintains co-operation relations with other international structures (for instance PNUCID) and regional structures. It also has links with non-member countries as it provides them with assessment methods and precious technical assistance. Resumen Los trabajos del grupo de accion financiera Jean Spreutels El GAFI (Grupo de Acción Financiera) fue creado en 1995 en ocasión de la cumbre del Arco, en la prolongación de la Declaración de Bâle y de la Convención de las Naciones Unidas contra el tráfico de estupefacientes. Actualmente reúne veintiocho miembros : veintiséis Estados, la Comisión Europea y el Consejo de Cooperación del Golfo. Tiene tres misiones esenciales : analizar el fenómeno de reciclaje de dinero sucio, evaluar los instrumentos y los programas nacionales en la materia, y proponer recomendaciones de intervención. En este marco, ha adoptado cuarenta recomendaciones que engloban todos los aspectos de la lucha contra el blanqueo. Los Estados miembros se comprometieron a volcarlas al Derecho Interno. Estas recomendaciones apuntan a la vez a una mejor represión (pedido de que el blanqueo sea objeto de una incriminación) y a mejorar la prevención en relación con las instituciones financieras (identificación de los clientes, declaración de transacciones sospechosas...). El GAFI mantiene relaciones de cooperación con organismos internacionales (por ejemplo, el PNUCID) y regionales. También desarrolla lazos con los Estados no miembros a los cuales suministra métodos de evaluación y una preciosa asistencia técnica. Le Groupe d’action financière (GAFI) et la lutte contre le blanchiment de capitaux 351 Operational police cooperation in the area of money laundering: United States Customs Service Paul Beaulieu, US Customs assistant in Paris United States Operational Customs police Service cooperation in the area of money laundering: Good afternoon ladies and gentlemen To begin, I want to thank the director and staff of the institute for their gracious invitation to the US customs service to speak to this distinguished group. It is always a pleasure and an honor to be involved in conferences such as these, which are essential for effective police work. For the past three years, I have been the attaché of the United States customs service at the American embassy here in Paris. My career has spanned 27 years, including 18 years with customs and 9 years with the drug enforcement administration (DEA) Most of the time, I was stationed in Los Angeles, California, and before coming to Paris I was stationed at our headquarters in Washington, D. C. The institute has asked that I discuss the role of the US customs service in combating organized crime, in particular in the area of money laundering. Before doing that, I would like to give you a brief explanation of the structure and powers of US customs and how we interact with other police services. The United States does not have a national police service as most countries do. Instead, because the founders of the US were opposed to a concentration of power in a central authority, it was decided that the original colonies in America would be autonomous. Even in such matters as defense, each colony had its own militia. Obviously, times have changed, with our central government in Washington now having much more power than the individual 50 states. However, instead of a national police, we have, by some estimations, some 20.000 different police services: each town, each county, and each state has a police agency. Then, there are other quasi-police agencies for many airports, railroads, parks, and even school districts. Finally, at the national level, there are some 50 different agencies such as customs, the FBI, the drug enforcement administration (DEA), and the bureau of alcohol, tobacco, and firearms that are charged with enforcing criminal laws. So, as you can see, we are far from centralized. That is probably our biggest obstacle to efficiency. I will further discuss that later. US customs has about 18.000 employees. Of that total, we have about 6.000 uniformed officers along the land borders and at the air and sea ports and we deploy an extensive fleet of aircraft for patrolling and surveillance. In addition, we have about 2.500 investigators such as myself. As for our powers, we have the authority to enforce any national criminal law, and in many states we have been given the authority to enforce state laws, which are often quite different. Add to that our unique authorities as customs officers and it can be said that we have the widest authority of any police service in America. The investigative branch of customs has offices in every major city and many smaller cities in the US Naturally, our offices are concentrated along the borders. In addition, we have 22 offices in 18 foreign countries, as well as a permanent representative at Interpol in Lyon. We were the first US law enforcement agency to be represented in China, and we recently opened an office in Moscow. We began stationing agents overseas over 30 years ago. At first, our function was primarily focused on traditional customs matters such as fraud. Today, we are still concerned with fraud, but we are equally involved in the areas of arms trafficking, illegal transfer of technology, money laundering, stolen patrimony, stolen cars, and illegal movement of hazardous waste. I mentioned that one of our biggest problems of efficiency is that there are so many different police services, each with its own director and autonomous powers. It is human nature, I suppose, that if someone has power, he is reluctant to share that power. Perhaps in another area, this was not as counterproductive as it is today. Nearly every country in the world has experienced an explosion in rate of crime. The United States has the questionable distinction of having the highest percentage of its population in prison. However, the point is that many of us in the police services have concluded that no single service, or town, or even the national government, acting alone, can have more than a superficial impact on the problem of criminality. That is why there are hundred of so-called police “task forces” in the US, which are comprised of officers from different services, whether they be at local, regional or national levels. The reasons are many: sharing of information and resources; to avoid duplication of effort; officer safety; pooling of evidence for more successful prosecution; to mention just a few. This has not necessarily eliminated the inter-agency distrusts or rivalries, but overall it has made us much more effective. For example, along our border with Mexico, we have a task force called “operation alliance”, which is comprised of some 30 different agencies, from small local police departments to the military. We have seriously tried to overcome our differences, toward the common goal of stopping drug smuggling. We try to exploit individual strengths so that the whole is greater than the sum of the parts. The main advantage to the task force concept is the sharing of information. We used to find that the same criminals were being investigated by several agencies, none of which was able to make an arrest or seizure, and none of which knew that the others were also interested. Sometimes the results were even tragic, when one service stumbled into an operation being conducted by another service. Once the resources were combined, however, it was a totality different story. Today, this sharing of information is done not only from person to person, but electronically. For example, from my desk here in Paris, I can send to and receive data from many computer data bases in the US and in other countries. Thus, if my office in Bangkok, for example, receives information on a drug Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 354 courier en route to the US via France, they can send me the information and a photograph, by computer, in a matter of seconds. This I can then share with French authorities, and at the same time the information and photograph are accessible to any US customs officer in the world. Instantly, I can check for the suspects previous travel to the US, if is known to other agencies, has a criminal record anywhere in the US, etc. I am reminded of a cartoon I once saw in a magazine in which two criminals were talking. One said to the other, “what’s all this talk about organized crime? Law enforcement is organized isn’t it? Why shouldn’t we be organized?” In fact, we have talked about “organized crime” for years, while at the same time we were often rather disorganized ourselves. I see that changing everywhere now: not only are there task forces, there is Interpol; Europol; the Schengen accord provides for shared computer data; passports are being made with encoded magnetic strips; the world customs organization has regional liaison offices; the French and Spanish police cooperate against the Basque terrorists, and so on. I’m sure each of you could name many other similar cooperative efforts in your own areas. When we in the US used to talk about organized crime, we thought of the Mafia, the Italian crime families. They were sometimes immortalized in films, sometimes admired, and frequently were prominent, if not “legitimate”, members of the community. Today, the Italian mob while still existent, is being replaced by other groups, usually ethnic in nature, that are frighteningly more powerful, vicious, and organized. “Russian organized crime” has become a kind of “mot à la mode”. I recently attended a lecture by a noted expert in this field, who said that organized crime in Russia is not controlled by a few families or groups, but is in fact thousands of groups that are not necessarily interconnected. For the police, this presents a much more difficult situation, a situation which is compounded, by the Russian government’s own admission, by the weakened governmental infra-structure. I do not mean to diminish the threat posed by “Russian organized crime”, but we are also confronted by the Chinese triads, the Nigerian/west African groups, and of course by the Colombian drug cartels. So, what are we doing in the US against organized crime? To give you a few examples, I must go back to my main points, sharing of information and resources, and mutual support. For some years now, we have had laws that allow us to seize profits derived from crime, whether money, cars, houses, stocks, in fact, any tangible good. It does not matter that the profit may have changed form, for example, from cash to a car, as long as the source of the profit can be established. We can also seize profits from crimes committed outside the United States, that are located inside the United States. This has had the effect of rendering the US a much less desirable financial haven, and enabling other governments to repatriate stolen goods or profits of crime. One case that we were involved in recently was that of a bank fraud in France that netted several million dollars. Some of that money found its way to California, where it was used to buy a house. We seized the house, which cost the criminals several hundred thousand dollars. The irony is that, even if we had not seized the house, if they had tried to sell it, they would have been victim of the falling real estate values in California.! Well, let the buyer beware.! Operational police cooperation in the area of money laundering: United States Customs Service 355 In addition to our authority to seize and forfeit assets, we can also share those assets with other agencies that participate in case with us. As a result, we have shared millions of dollars with many, many services in the United States and some foreign governments. Those monies are then used to improve equipment, salaries, or training. In the well-known BCCI case, we shared about $ 2 million with France, based on the participation of French customs. We can be very good neighbors.! We continue to upgrade and expand our data collection and sharing programs. This is not always criminal information, but is often public information. Going back to the assent sharing authority for a moment, locating different kinds of assets is made much more efficient by electronic access to property records, for example. Instead of having to personally go to each state or county records office, I can now access the same information from my personal computer. These computer systems can be expensive to buy and set out, but over the years prove to be well worth the investment. I don’t think we can afford the alternative. Since the 1980’s, we have had laws requiring the reporting of the import or export of more than $ 10.000 in cash and any cash transaction in a financial institution of the same amount. These reporting requirements include cash transactions between individuals and businesses, such as automobile dealers, real estate companies, stock brokerages, and casinos. Financial institutions are required to report unusual transactions, regardless of the amount. We have established a financial information center to analyze these reports for targeting purposes. Most importantly, this information is available to any police service. In the foreign arena, one of the most frustrating problems concerns the exchange of judicial information and the extradition of fugitives. With the speed and ease with criminals can travel, better ways to address these problems are essential. The United States has signed mutual legal assistance treaties and extradition treaties with many countries, and we are in negotiation with several others. US customs has over 20 customs-to-customs agreements. These greatly reduce the government formalities and particularly the length of the time associated with such things as sharing if information, collection of evidence, and rendering of fugitives. Well, much of what I have said has undoubtedly been said before and will be said again. To demonstrate that we can do more than philosophize, I’d like to give you an example of the kind of investigation that we conduct and the result that are achievable through the cooperation that I was discussing. I could call this: the role of the US customs service in money laundering and against money laundering, because as you will see, we do both. Police services in America use many techniques which are familiar to all of you: surveillance, interviews, document and forensic evidence collection, wire taps, and so forth. One technique that we use extensively is the undercover agent approach, where our agents assume the role of criminals. In many other countries, this approach, is prohibited by legal codes, or is considered as too provocative. Several year ago, a prosecutor told me she thought that it wasn’t “fair play”, as though this was some kind of a game.! Whereas criminals do not have to abide by laws, we do. That means that we have to compensate by being inventive. Its not enough to be reactive, we have to be proactive, to try to Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 356 anticipate. And, we must be more organized than organized crime. Otherwise, we will too often finish second in a two horse race. In the area of money laundering investigations, then, our agents will play an undercover role, representing themselves as money launderers. In other words, as individuals who can successful deposit cash into the banking system and then transfer it without any scrutiny by authorities. As you know, it is becoming increasingly difficult for criminals of all kinds to convert their cash profits into bank balances, houses, businesses, cars, etc., because of money laundering laws being passed and because of more pressure being applied by the police and customs authorities. In one such case that began in 1991, we had an undercover operation in the US where our undercover agents were picking up cash from drug traffickers, depositing in into our undercover bank account, and then transferring the funds for the traffickers. The case had begun as a routine interview of a suspected drug trafficker, who later decided to become an informant. He did this because he wanted to avenge something that one of the Colombian cartels had done. I think that revenge may be the best motivation of informants. The informant had been for years an accountant for the cartel, so he knew how they laundered their money, where it went, and how it was handled, from collections on the street to off-shore bank accounts. This information was extremely valuable in that it gave us insight into how the cartel worked. But, as a friend of mine used to say, “it would make a good story. Interesting to read, but it would never put anyone in jail”. What we needed was evidence, something to show a judge and jury. Thus, the undercover approach. The informant introduced our undercover agent to cartel members whose responsibility was to collect cash and deposit it into the banking system for later transfer to Colombia or elsewhere. Since this “placement” stage is the most difficult and risky in the laundering process, the cartels are constantly looking for persons with, shall we say, “friendly” bankers, or businesses that handle cash. In this case, the undercover agent said he could filter the cash through his business with no questions asked. Now, the cartel members are certainly not stupid. They demand assurance and have to be convinced. For a start, they agreed to give our agent a relatively small amount of cash, which he of course was able to transfer rapidly according to the cartel’s instructions. As the cartel became more comfortable with the agent, the amounts and frequencies increased, until the agent was given amounts of up to one million dollars. One irony is that we were the most reliable and honest criminals the cartel ever met.! We never stole their money, we always kept appointments, we never used violence, and we were always available. This undercover approach has been criticized as helping the cartel to carry on its trafficking business, which is why we begin with a clear plan and a target. The object is to gather evidence against as many criminals as possible, and this sometimes requires a long term operation. We have tried many other approaches, and have found that, within our legal and operational limits, this approach has been very effective. As this particular case progressed, our undercover agent learned that the cartel was in need of contacts in Europe to pickup and deposit drug receipts. Operational police cooperation in the area of money laundering: United States Customs Service 357 In late 1993, I was called by our office in Atlanta, Georgia, with a simple, yet complicated question. Simple, because I was asked if the French authorities would like to introduce their own undercover agent and start a similar operation in France. Complicated, because this kind of operation has never before been done here, for legal and other reasons. This then would be a radical departure from their traditional methods. I met with commissaire divisionnaire Rene Wack, then in charge of the office of the police judiciaire charged with the investigation of major financial crimes (office central de répression de la grande délinquance financière) and explained the background of our investigation in the United-States. Mr. Wack was already familiar with the police methods in the US He readily agreed to break new ground. He and I both clearly wanted the case in France to be a French case, not an extension of the American case, but with the obvious need to continually coordinate. In retrospect, commissaire Wack and I both joked that had he known how exhausting the case would be, he might not have so quick to say “yes”.! In my service there is the expression “big cases, big problems; little cases, little problems; no cases, no problems.” In order to succeed in this business, I sometimes think we must be partly fanatical, partly masochistic, and perhaps a little crazy. I think I found the perfect partner in Rene Wack. It was he who named the French case “operation margarita” after the popular Latin American cocktail. After preliminary arrangements were made between our undercover agent in Georgia and his cartel contacts, Mr. Wack’s “spy” was successfully introduced to a cartel representative in France, and a meeting was held. Watching the meeting, I was reminded of two poker players, whose slightest mistake, the wrong word, a hesitation, could have set off alarms and finished the deal before it had even started. I thought about the first few times I worked undercover. I was convinced that I had “police” written on my forehead for the whole world to see. Fortunately, the first meeting went very well. After additional meetings and negotiations, the cartel man agreed to bring the undercover agent some money to be transferred. But it was far from simple: beepers, public telephones, counter-surveillance, meetings in remote places, changing metros at every stop, all designed to ensure that the undercover agent was “for real”. The cartel has learned never to trust anyone... and with good reason. However, Rene Wack’s team was up to the challenge. With some luck, but mostly good police work, they were able to find out where the cartel man lived. Then, the spider’s web began to take shape. There were telephone taps, surveillance, background checks, airline passenger lists, vehicle records, and so on. For our part, based on the French investigation, we were able to identify telephone subscribers in Colombia and Mexico that led us to an American living in the Caribbean, a convicted drug smuggler whose specialty was transporting drugs on yachts. Mr. Wack’s team grew quickly, from 4 to 10, then to 20. Every day brought more information, and more questions. Where was the money coming from? Who were the other cartels members? As the days, weeks, and months went by, the French police were able to identify separate and district cells that had Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 358 been set up by their adversaries. One cell for handling the cash generated by the sales of cocaine. Another for arranging the logistics involved in the smuggling, such as renting apartments, buying vehicles, boats, and telephones. Another for arranging the actual handling of the cocaine from the time it arrived until it was sold. The members of one cell did not know the identifies of those of the other cells, often not even those of their own cell. Limit the exposure. Know and repeat only what you have to. A war mentality. Eventually, several dozen suspects were identified and located. Cases such as these can be nearly endless. Suspects join the operation, others leave; drug markets are expanded; many groups are interconnected. But eventually, after enough evidence is collected, it is time to make arrests and seizures. In this case, that time came in June 1994. By then, police services in the US, France, Italy, Spain, and Great Britain were involved. In order to spring the trap and capture as many suspects as possible, everything was closely coordinated. The majority of the suspects being in France, it was Mr. Wack who had the most coordinating to do. Well over 100 officers throughout France and the Caribbean were assembled and, one morning at dawn, searches and arrests were carried out. Some 60 persons were arrested, 45 kilograms of cocaine, several cars, trucks, and boats seized, two money exchange houses closed. In the US, three major money laundered were arrested. In all, US customs seized $ 11 million. It seems that you never get it all, though. We knew at the time that a yacht loaded with one half ton of cocaine was enroute to Europe, but it was never found. However, during the summer of 1994, several bales of cocaine washed up on shores from England to Spain. We can only speculate if it was “our” cocaine. Recently, 28 persons from operation margaria in France were convicted and sentenced to up to 10 years in prison, mostly for money laundering. One of them was the yacht sailing American smuggler from the Caribbean. Yet, even if you don’t get it all, had it not been for the willingness of the services to work together, the cartel operations in France may have never been exposed, and our case in the US would not have been as complete. If I can indulge in a bit of commercial promotion, French author Philippe Madelin wrote a book on operation Margarita, entitled “La filière cocaïne en France”, published earlier this year. I know there are those who say that we should not discuss how we operate, especially undercover. I agree with that up to a point, but I also think that we have to keep adding elements of the unknown. That is, until recently, the cartel was reasonably sure that they did not have to worry about operations such as this one. Now, they have to worry. Their next “money launderer” could be a police officer. Ladies and gentlemen, everything I have said here today is to stress one point: that cooperation, whether between individuals, between services, or between countries, is the only choice we have if we hope to have an impact on global criminality. We are on the right track. Let us keep the momentum going. I thank you very much for your attention and again I would like to thank the institute for allowing me this time. I would at this time be happy to answer any questions you may have. Operational police cooperation in the area of money laundering: United States Customs Service 359 Résumé La coopération opérationnelle en matière de blanchiment : le service des douanes des États-Unis d’Amérique Paul Beaulieu Le service des douanes des États-Unis a davantage de compétences que n’importe quel autre service de police. Il compte 18.000 employés, dont 6.000 officiers en uniforme aux frontières terrestres, aéroports et ports, et dont 2.500 enquêteurs. Les membres du service des douanes ont la possibilité de faire respecter toutes les lois pénales fédérales ainsi que certaines lois propres aux États. On trouve des bureaux d’enquête des douanes dans toutes les grandes villes américaines, 22 bureaux dans 18 pays étrangers (dont la Chine et la Russie) et un représentant à Interpol à Lyon. L’action de ce service concerne les fraudes, le trafic d’armes, les transferts illégaux de technologie, le blanchiment d’argent, le vol de patrimoine, les vols de voitures, et les déplacements illégaux de déchets toxiques. Le crime organisé a évolué aux États-Unis. La Mafia d’origine italienne tend aujourd’hui à être remplacée par d’autres groupes, généralement à base ethnique, qui sont encore plus puissants, plus violents, et mieux organisés : les mafias russes (très difficiles à contrôler car elles sont très nombreuses et bénéficient de la faiblesse de l’État russe), les triades chinoises, les groupes nigérians, les cartels de la drogue colombiens. Or pour y faire face, les services de police américains sont très fortement décentralisés. Chaque service a son propre directeur et des pouvoirs autonomes. Pour combattre efficacement la criminalité, il s’est donc avéré nécessaire d’opérer en «.task forces.», avec des membres de différents services à divers niveaux (local, régional, fédéral). Ceci permet de partager les informations, de ne pas dupliquer inutilement les efforts, de mettre en commun les preuves qui vont servir lors du procès. L’organisation en «.task force.» n’est qu’un aspect du mouvement d’organisation plus général qui s’opère par exemple entre les services de police de différents pays (Interpol, Europol, Schengen, etc.). Plusieurs actions contre le crime organisé ont été conduites aux États-Unis. La police a le droit de saisir les profits obtenus de façon criminelle, ce qui a rendu les États-Unis beaucoup moins attractifs pour le crime organisé.; les sommes confisquées (millions de dollars) restent à la disposition de la police, qui peut les partager entre les services ou avec les pays qui ont participé à l’action. Des programmes informatisés de données criminelles et économiques ont été mis au point. De nombreux traités de coopération judiciaire et d’extradition ont été signés. La police ne peut se contenter d’être réactive, elle doit être proactive, d’où l’utilisation d’agents infiltrés dans les groupes criminels.; cette méthode d’infiltration, bien qu’elle soit contestée, s’avère à l’usage très efficace. Elle est usitée en matière de lutte contre le blanchiment. Des agents infiltrés reçoivent de l’argent de trafiquants de drogue, le déposent dans des comptes en banque (opération devenue délicate pour les trafiquants du fait des lois contre le blanchiment), puis le reversent aux trafiquants. Ceci permet en quelques mois de repérer, puis d’arrêter, une grande partie du réseau criminel. La coopération internationale. La méthode des agents infiltrés – employée à l’occasion de l’opération Margarita par la police française – a rendu possible le succès de cette vaste opération qui s’est déroulée en 1994, grâce à la collaboration des polices américaine, française, italienne, espagnole et britannique. La coopération, entre individus, entre services et entre pays, est en effet la condition indispensable pour faire diminuer la criminalité globale. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 360 Resumen La cooperación operacional en materia de blanqueo : el servicio de las adouanas de los Estados Unidos Paul Beaulieu El servicio de aduanas de los Estados Unidos tiene mayores competencias que cualquier otro servicio de policía. Cuenta con 18.000 empleados, de los cuales 6.000 son oficiales uniformados de las fronteras terrestres, aeropuertos y puertos y 2.500 investigadores. Los miembros del servicio de aduanas tienen la facultad de hacer respetar todas las leyes penales federales así como ciertas leyes propias a cada Estado. Todas las grandes ciudades americanas cuentan con oficinas de investigación de la aduana, y existen veintidós oficinas en dieciocho países extranjeros (incluyendo China y Rusia), y un representante de Interpol en Lyon. La acción de este servicio concierne el fraude, el tráfico de armas, la transferencia ilegal de tecnología, el blanqueo de dinero, el robo de patrimonio, el robo de autos y los desplazamientos ilegales de residuos tóxicos. El crimen organizado ha evolucionado en los Estados Unidos. La Mafia de origen italiano tiende a ser reemplazada por otros grupos, generalmente de base étnica, que son todavía más poderosos, más violentos y están mejor organizados : las mafias rusas (muy difíciles de controlar porque son muy numerosas y se ven beneficiadas por la debilidad del Estado ruso), las tríadas chinas, los grupos nigerianos y los carteles de la droga colombianos. Para enfrentarlos, los servicios de policía americanos están altamente descentralizados. Cada servicio tiene su propio director y poderes autónomos. Para combatir eficazmente la criminalidad, es necesario operar a través de «.task forces.», con miembros de diferentes servicios a diversos niveles (local, regional, federal). Esto permite compartir la información y no duplicar inútilmente los esfuerzos, así como la puesta en común de las pruebas que van a ser presentadas durante el juicio. La organización en «.task forces.» es sólo un aspecto del movimiento de organización más general que se está operando, por ejemplo, entre los servicios de policía de diferentes países (Interpol, Europol, Schengen, etc.). En Estados Unidos se llevaron a cabo varias acciones contra el crimen organizado. La policía tiene derecho a incautar los beneficios obtenidos de manera criminal, lo que a convertido a los Estados Unidos en un país mucho menos atractivo para el crimen organizado. Las sumas confiscadas (millones de dólares) quedan a disposición de la policía, que puede compartirlas con los servicios o países que participaron en la acción. Se han puesto en marcha programas informatizados de datos criminales y económicos, y fueron firmados numerosos tratados de cooperación judicial o de extradición. La policía no puede permanecer en al campo de la reacción, debe ser proactiva, de allí la utilización de agentes infiltrados en los grupos criminales. Este método de infiltración, aunque muy discutido, ha demostrado ser altamente eficaz, siendo utilizado en la lucha contra el blanqueo. Los agentes infiltrados reciben dinero de los traficantes de droga y lo depositan en cuentas bancarias (operación que se ha vuelto difícil para los traficantes en virtud de las leyes contra el blanqueo) y luego vuelven a transferirlo a los traficantes. Esto permite en algunos meses identificar y luego detener una gran parte de la red criminal. La cooperación internacional : El método de los agentes infiltrados (utilizado en ocasión de la operación Margarita por la policía francesa) hizo posible el éxito de la vasta operación que se desarrolló en 1994, gracias a la colaboración de las policías americana, francesa, italiana, española y británica. La cooperación entre individuos, entre servicios y entre países es en efecto la condición indispensable para hacer disminuir la criminalidad global. Operational police cooperation in the area of money laundering: United States Customs Service 361 Les réponses judiciaires La direction nationale anti-mafia : son rôle et ses expériences dans la réalité judiciaire italienne Bruno Siclari, procureur national anti-mafia de laexpériences direction nationale anti-mafia à Rome son rôle et Lases direction nationale dans anti-mafia la réalité: judiciaire italienne Une période d’environ quatre ans n’est pas assez longue pour établir un bilan complet d’une innovation aussi considérable dans l’organisation judiciaire italienne que peut l’être la direction nationale Antimafia.; mais elle est de toute façon suffisante pour dresser un premier bilan significatif d’expériences, de résultats, de perspectives. Au début de la décennie en cours, l’Italie a dû se mesurer à une criminalité organisée toujours plus virulente, plus ramifiée, plus farouche : une criminalité organisée originellement constituée par la «.mafia.» sicilienne, la «.camorra.» napolitaine, la «.n’drangheta.» calabraise, la «.sacrée couronne unie.» née dans la région d’Apulia. Evidemment ces organisations criminelles ont leurs bases dans leurs régions d’origine, mais elles sont actives sur tout le territoire national et aussi à l’étranger. D’ailleurs, la criminalité organisée moderne est inévitablement dans tous les pays un phénomène transnational, caractéristique sur laquelle on n’insistera jamais assez. Et les synergies internationales entre les différentes formes de criminalité organisée des divers États ne sont pas des exceptions isolées. Ainsi, les criminels organisés de l’ensemble du monde sont susceptibles d’agir de concert : Turcs, Calabrais, Napolitains, Marseillais, Colombiens, Russes, Siciliens, Chinois, etc. Face à l’urgence constituée par la criminalité organisée, le législateur italien, dans les premières années de la décennie 90, a profondément rénové l’appareil investigateur et judiciaire destiné à combattre les organisations criminelles. Dans toutes les villes où siège une cour d’appel (vingt-six), près des parquets de la République ont été créées les directions de circonscription Antimafia, constituées par des équipes de magistrats instructeurs spécialisés dans les enquêtes relatives à la criminalité organisée. Au niveau central, une direction nationale Antimafia, dirigée par le procureur national et composée de vingt substituts, a été instaurée pour coordonner l’action judiciaire contre la criminalité organisée sur tout le territoire national. L’article 371 bis du Code de procédure pénale définit les fonctions principales du procureur national Antimafia comme étant des fonctions de coordination et d’impulsion dans les enquêtes de criminalité organisée. En particulier, le deuxième alinéa de l’article cité établit que, pour l’exercice de ses fonctions, le procureur national Antimafia : – en accord avec les procureurs de circonscription Antimafia, garantit la liaison des enquêtes, notamment par l’entremise des magistrats de la direction nationale Antimafia.; – permet la nomination temporaire des magistrats de la direction nationale ou des directions de circonscription Antimafia pour garantir la flexibilité et la mobilité nécessaires à la satisfaction des exigences spécifiques de l’enquête et du procès.; – s’occupe de l’acquisition et du traitement des notices, des informations, des données relatives à la criminalité organisée aux fins de coordination des investigations et de répression des crimes. Le même alinéa ajoute encore que le procureur national Antimafia : – donne aux procureurs de circonscription Antimafia les instructions particulières visant à prévenir ou à résoudre les difficultés liées à la coordination des enquêtes.; – réunit les procureurs de circonscription Antimafia afin de résoudre les divergences qui, malgré les directions données, peuvent apparaître.; – dispose, sur la base d’un décret motivé du procureur général de la Cour de cassation, de la prérogative des investigations préliminaires en matière de criminalité organisée, dans le cas où les réunions de coordination n’ont donné aucun résultat, ou si cette coordination n’a pas abouti du fait de la persistance injustifiée d’une inertie dans l’activité d’investigation. Aux termes du premier alinéa de l’article 371 bis du Code de procédure pénale, le procureur national Antimafia, pour l’exercice de ses fonctions, dispose de la direction investigatrice Antimafia, corps de police spécialisé, et des services centraux et interprovinciaux des forces de police. Et il donne les instructions quant à leur relative implication dans l’activité d’investigation. La fonction de coordination du procureur national ne se borne pas à la prévention, ni à la résolution des divergences entre les procureurs de circonscription Antimafia dans le cadre des investigations en cours. Une telle fonction ne se limite pas non plus à l’élimination des situations d’inertie de l’activité d’investigation d’un procureur ou de plusieurs procureurs de circonscription. La fonction de coordination comporte, en effet, aussi une activité constante d’encadrement et de suivi général du phénomène de la criminalité organisée : activité de compréhension réelle du phénomène à laquelle contribuent la connaissance des actes de poursuites pénales des directions de circonscription Antimafia, l’acquisition et le traitement des notices, informations, données concernant la criminalité organisée. En ce qui concerne la fonction d’impulsion de la direction nationale Antimafia, on doit préciser que cette fonction a pour finalité de garantir le caractère exhaustif et la célérité des investigations, mais aussi une utilisation de la police judiciaire la plus rationnelle et la plus productive possible. Il faut ajouter qu’à la fonction d’impulsion se rattache la faculté du procureur national de déplacer sur tout le territoire national les magistrats de la direction nationale Antimafia et des directions de circonscription, afin de satisfaire les exigences particulières d’enquête et de procès. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 366 À l’exercice des fonctions de coordination et d’impulsion du procureur national, on doit ajouter le pouvoir dont dispose le procureur (et ses substituts bien sûr) d’interroger des détenus ou des internés. Ainsi le procureur peut effectuer ces entretiens personnels à chaque fois qu’il est nécessaire de prévenir ou de résoudre une divergence d’appréciation entre deux ou plusieurs directions de circonscription. Ceci entre dans le cadre de sa fonction de coordination. Le procureur national peut également procéder à des auditions dans tous les cas où cet acte s’avère utile à la répression de la criminalité organisée ou à l’approfondissement d’enquêtes déjà ouvertes. Le rôle du procureur national Antimafia, et de la direction qu’il anime, dans le cadre de la stratégie de lutte contre la criminalité organisée, suppose évidemment une attention particulière face à la nécessité pour les enquêteurs de disposer d’une banque de données exhaustive : une banque de données, cela va sans dire, complètement informatisée et surtout mise à jour en temps réel. En effet, dès l’instauration de la direction nationale, mes substituts et moi-même avons compris la nécessité de réaliser un système informatique apte à assurer non seulement le développement d’un réseau local de la direction nationale, mais aussi des réseaux des directions de circonscription, et d’assurer évidemment une parfaite liaison entre la banque centrale et les banques périphériques : un système informatique capable aussi de se connecter avec les banques de données externes (par exemple, de l’Administration pénitentiaire, de l’Administration financière, du ministère de l’Intérieur, du bureau de l’état-civil, etc.). La création d’une banque de données informatique comme celle-ci n’a pas été simple. Elle a d’abord demandé un choix de caractère général, relatif à l’architecture même du système. Le choix s’est porté sur un système constitué par plusieurs unités autonomes liées entre elles (une banque de données centrale, une banque de données pour chaque direction de circonscription et une liaison continue). Dans chaque direction de circonscription, a été en définitive prévue la création, laquelle avait déjà été réalisée dans des cas semblables, d’une banque de données pensée comme une unité autonome se suffisant à elle-même, liée avec la banque de la direction nationale et les banques des autres directions de circonscription dans un réseau organiquement intégré. Puisqu’il m’est difficile de donner ici une illustration technique et pratique des caractéristiques spécifiques de nos banques de données informatiques, la direction nationale que j’anime est, bien entendu, disposée à délivrer toute information utile à ce propos. Je n’ai pas l’intention d’ennuyer mon auditoire avec un exposé trop détaillé des problèmes d’organisation et d’interprétation juridique que la restructuration, visible surtout au travers de la création de la direction nationale, de l’appareil antimafia italien a engendrés et auxquels elle a dû faire face. Elle a dû aborder des problèmes complexes et souvent de vraies difficultés d’ordre culturel liées à la prise en compte de la nouveauté. «.Cela n’a pas été une partie de plaisir.» pourrait-on dire si la matière n’était pas aussi sérieuse. Par bonheur l’important travail que nous avons réalisé a d’ores et déjà donné des résultats, lesquels, j’en suis fermement convaincu, nous récompensent amplement et surtout nous permettent d’envisager l’avenir sereinement. Je consacrerai donc la deuxième partie de mon discours à l’indication de ces résultats et aux nouveaux instruments qui, à mon avis, les ont rendus possibles. D’abord, il faut dire, sans triomphalisme mais aussi sans aucun excès de précaution, qu’ac- La direction nationale anti-mafia : son rôle et ses expériences dans la réalité judiciaire italienne 367 tuellement la lutte contre la criminalité organisée en Italie est indéniablement positive. Elle est même, j’ajouterai sans hésitation, la plus positive dans l’histoire de cette lutte. Bien sûr nous avons devant nous encore un long chemin à parcourir, mais nous pouvons tirer quelques satisfactions des résultats dèjà obtenus. Aujourd’hui, il est possible de dire, sans aucune figure de rhétorique, que le sang des magistrats, souvenez-vous de Giovanni Falcone et de Paolo Borsellino, des hommes de la police et des institutions n’a pas coulé en vain. Ce sang a consolidé les résolutions de l’État de droit, il a fortifié les hommes engagés dans l’activité antimafia, il a donné une nouvelle conscience et une nouvelle détermination aux acteurs. Quels sont alors les principaux éléments qui ont permis concrètement cette évolution positive de la lutte contre la criminalité organisée.? La nouvelle organisation, que je viens d’expliquer, des bureaux des enquêteurs et, en particulier, la spécialisation de magistrats du Ministère public, répartis sur l’ensemble du territoire national et systématiquement reliés et coordonnés entre eux par la direction nationale Antimafia qui opère au niveau central, doués d’un grand professionnalisme et d’une large expérience en matière de criminalité organisée, est sans doute l’une des premières causes de l’évolution positive de la lutte contre le crime organisé. En particulier, un bénéfice très important dans cette direction est dû au fait qu’un bon nombre des magistrats instructeurs se consacrent systématiquement et exclusivement aux investigations relatives à la criminalité organisée. Et l’activité de la direction nationale consacrée, comme on l’a dit, à la coordination et à l’impulsion, permet la rationalisation dans l’utilisation des ressources et, surtout, garantit une approche unique et unificatrice, laquelle a bien souvent fait défaut par le passé. Un exemple concret, très significatif, de l’importance de cette approche est constitué par l’évolution des enquêtes concernant les attentats aux explosifs visant des monuments historiques, perpétrés en 1993 par les criminels maffieux dans plusieurs villes d’Italie (Milan, Rome, Florence), et aussi par l’évolution des enquêtes concernant les massacres barbares en 1992 du procureur Giovanni Falcone et de son escorte, de Paolo Borsellino et de ses officiers de sécurité. La liaison constante entre les directions de circonscription engagées dans les enquêtes et la coordination de ces directions, telle qu’elle est effectuée par la direction nationale Antimafia, ont permis d’obtenir des résultats très importants, que ce soit dans la compréhension approfondie de l’origine de ces crimes ou dans la localisation précise des coupables. Les investigations ne sont pas encore terminées, mais les résultats obtenus jusqu’à présent sont dèjà très satisfaisants : des résultats qui sont incontestablement meilleurs que ceux enregistrés il y a cinq ou six ans. L’une des causes les plus importantes de l’actuelle évolution positive observée en Italie en matière de lutte contre le crime organisé est, comme il faut le souligner, l’introduction, dans les règles pénales, de dispositions de loi qu’on appelle chez nous «.récompensantes.». Ces dispositions portent sur l’échelle des sanctions applicables à ceux qui décident de collaborer activement avec la justice pénale. En particulier, le criminel qui, après un militantisme dans les organisations de type maffieux, décide de collaborer activement avec les enquêteurs en révélant les crimes commis et en fournissant des indications concrètes et vérifiables établissant la preuve de la culpabilité des auteurs de Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 368 crimes ou orientant la recherche de ceux qui ont pris la fuite, peut obtenir des avantages considérables. Par exemple, il a la possibilité de jouir d’importantes réductions de peine à l’occasion de son procès et de purger sa peine dans le cadre d’un régime alternatif, indépendamment des limites imposées par la loi dans ce domaine. De plus, il est possible de prendre des mesures appropriées dont le changement d’identité, la protection de l’informateur et de ses parents. Il peut en outre bénéficier d’une aide économique permanente si les conditions l’exigent. Grâce à cette législation qu’on appelle «.récompensante.», les enquêteurs italiens disposent à présent de plus de 1200 «.collaborateurs de justice.». Les aveux et les révélations de ces «.collaborateurs.» ont permis d’infliger des coups très durs aux organisations criminelles. À ce propos, il faut rappeler que la justice pénale italienne, à l’époque de la longue et sanglante période du terrorisme, a reçu une contribution déterminante des «.collaborateurs de justice.». Ce terrorisme, qui a été complètement vaincu après de nombreux événements douloureux et funestes, était sans doute un phénomène bien différent, sous plusieurs aspects, de la criminalité organisée d’aujourd’hui. Néanmoins, les très précieuses expériences positives, acquises dans ce cadre, présentent le plus grand intérêt pour la lutte contre la criminalité organisée. En effet, la législation relative au terrorisme, la spécialisation des magistrats instructeurs, la législation que l’on appelle «.récompensante.», la contribution des «.collaborateurs de justice.» ont été des éléments très importants de l’action qui conduisit à la défaite du terrorisme en Italie. Elles vont se révéler comme étant des instruments d’égale importance dans le cadre de la lutte contre la criminalité organisée, cadre qui est aujourd’hui, comme je l’ai déjà souligné, très prometteur et riche d’initiatives et de résultats. À propos du phénomène des «.collaborateurs de justice.», il faut avoir à l’esprit la complexité de cet instrument et la nécessité du professionnalisme le plus grand dans la gestion et l’évaluation de ces «.collaborateurs.» car cet élément humain est très composite et souvent bien compliqué et tortueux. Personne ne doit jamais oublier cela. Cependant, personne ne pourra nier l’importance absolue de cette arme de lutte contre le crime organisé de type maffieux. Au plan juridique, dans le cadre du procès pénal, le législateur italien a introduit, ces dernières années, une série de dispositions visant à adapter la conduite du procès en fonction des particularités de la criminalité organisée. Ainsi, il est intervenu en matière de détention préventive. Il a rendu obligatoire l’incarcération dans les cas de crimes typiques de la criminalité organisée lorsqu’on dispose, bien entendu, de graves indices de culpabilité. Dans la même optique, ont été introduites des modifications à la réglementation concernant les délais maximaux de durée des investigations préliminaires et leurs prorogations. On a potentialisé l’activité d’investigation et on a prévu pour la police judiciaire et pour le Ministère public des attributions élargies en matière d’enquête. On a établi pour le procès des dispositions visant à introduire durant les débats des informations issues d’autres procès. On a modifié le régime des notifications. On est intervenu plusieurs fois en matière de mesures conservatoires «.in re.» pour permettre la saisie des ressources économiques liées à l’activité maffieuse. La direction nationale anti-mafia : son rôle et ses expériences dans la réalité judiciaire italienne 369 En matière donc de criminalité organisée, le législateur italien a opté pour une plus grande rigueur du procès pénal. Et cette orientation a trouvé une réalisation significative dans l’introduction de la norme 41 bis des règles pénitentiaires : cette disposition établit un régime de détention à la fois spécifique et organisé pour les mis en cause dans des affaires de criminalité organisée. La motivation du législateur a résidé non seulement dans le choix d’imposer une plus grande sévérité, mais aussi dans l’exigence d’interdire les relations entre les organisations criminelles à l’intérieur des prisons. Cette disposition de loi va se révéler comme étant un instrument d’extraordinaire vigueur dans la lutte contre la criminalité organisée. La manifeste réticence des détenus qui sont soumis à ce régime confirme entièrement cette évaluation. Je ne voudrais pas prendre congé de mon auditoire en lui laissant la sensation que tout va parfaitement en matière de lutte contre la criminalité organisée et qu’il faut simplement attendre la fin victorieuse de cette lutte. Je veux tout d’abord déclarer que j’ai l’entière conviction que nous pouvons remporter cette guerre. Je suis en même temps convaincu que nous avons fait ces dernières années en Italie des progrès de la plus grande importance. Cependant, la partie la plus longue du chemin, comme je l’ai déjà dit, reste encore à parcourir. Nous sommes enfin dans la bonne voie, mais il faut encore beaucoup marcher et surtout, il faut absolument éviter de changer de route. Pour conclure sur ce sujet, les expériences italiennes en matière de criminalité organisée peuvent être ainsi schématisées : – projets de loi relatifs aux crimes organisés. Ceux-ci doivent être constamment affinés en fonction de notre meilleure connaissance acquise en matière de crime organisé.; – adaptation du procès pénal à la particularité de ce type de criminalité.; – redéfinition des crimes de société, des crimes bancaires ou financiers. Définition d’instruments de loi aptes à contrecarrer l’activité des organisations de type maffieux dans le secteur.; – introduction d’une législation appropriée destinée aux «.collaborateurs de justice.» afin d’encourager cette contribution.; – repérage des nouveaux secteurs d’activité de la criminalité organisée (par exemple, le trafic de matériaux stratégiques et de substances nucléaires, l’organisation de puissants flux d’immigration clandestine, etc.) et des nouvelles formes de cette criminalité dans les pays caractérisés par d’importants changements politiques, économiques et sociaux (Europe de l’Est, zone Caraïbe, Afrique, Amérique du Sud).; – création de structures judiciaires d’instruction (surtout de bureaux du ministère public) hautement spécialisées, coordonnées de façon adéquate et destinées, systématiquement et en exclusivité, aux enquêtes en matière de criminalité organisée.; – promotion d’un système stable, basé sur un bureau central du type de la direction nationale Antimafia italienne, permettant l’échange international en temps réel des informations à caractère judiciaire ayant une valeur transnationale. De propos délibéré, j’ai laissé pour la fin de mon discours un problème que j’estime très important dans le cadre de la lutte contre la criminalité organisée. Je l’ai laissé à la fin parce que je désire en souligner l’importance particulière. En même temps, je désire ainsi souligner qu’il s’agit du problème le plus difficile à résoudre et pour lequel le chemin parcouru est encore trop Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 370 court. Je me réfère au problème du blanchiment d’argent sale. La matière est évidemment tellement complexe qu’elle exigerait, pour une approche sérieuse, qu’on y consacre un exposé entier. Donc je ne devrais pas me pencher sur cette question à cette occasion parce que l’objet de mon discours est autre. Mais il n’est pas possible de clôturer un exposé sur les expériences italiennes en matière de criminalité organisée sans souligner que le blanchiment d’argent sale constitue le problème le plus ardu à résoudre : celui pour lequel la contribution des «.collaborateurs de justice.» n’a pas été jusqu’à présent efficace, celui pour lequel le niveau de collaboration entre les États reste encore bien insuffisant. Bien sûr la convention de Strasbourg, adoptée voici quelques années, a représenté un important progrès, mais beaucoup d’États ne l’ont pas encore ratifiée. Bien sûr, aujourd’hui il y a une appréhension du phénomène inconnue il y a peu de temps. Toutefois, les conditions nécessaires pour une lutte efficace contre le blanchiment d’argent ne sont malheureusement pas encore réunies. Il y a encore peu de professionnalisme, mais il manque surtout une synergie suffisante entre les États, «.conditio sine qua non.» pour affronter sérieusement le phénomène. Est-ce que les exigences de la lutte contre la criminalité organisée associée à la conscience que cette lutte pour être définitivement gagnée doit vaincre le blanchiment d’argent sale, pourront enfin créer les conditions d’une volonté internationale effective commune à tous les États pour combattre sur le champ ce phénomène.? Voilà une question bien difficile. Je suis personnellement convaincu que la finance criminelle est toxique non seulement parce qu’elle est intoxiquée, mais aussi parce qu’elle est intoxicante, vérité terriblement difficile à reconnaître pour les communautés financières. Mais c’est une vérité et c’est pour cela que mes services et moi-même allons favoriser, dans cette phase de notre activité, la lutte contre le blanchiment d’argent. Si j’en ai l’occasion dans un proche avenir, bien volontiers je vous parlerai aussi (peut-être en Italie) de ce thème spécifique. La direction nationale anti-mafia : son rôle et ses expériences dans la réalité judiciaire italienne 371 Summary The Italian answer to the Mafia Phenomenon: the role and experience of the national anti-Mafia prosecution service Bruno Siclari In order to combat organised crime, which is extremely virulent and has international connections (Mafia, Camorra, Ndrangheta, etc.), the Italian legislature deeply remodelled the criminal investigation apparatus at the beginning of the 1990’s. 1) It set up new institutions to combat the Mafia In each of the 26 Courts of Appeal, Anti-Mafia District Headquarters have been created. They are constituted of teams of investigating-prosecutors specialised in organised crime cases. The Anti-Mafia National Headquarters was also formed, headed by the National Prosecutor, and composed of 20 Deputy Prosecutors. It co-ordinates the judicial action lead against organised crime nation-wide. According to the Penal Procedures Code, the Anti-Mafia National Prosecutor’s main duties are : –to co-ordinate regional investigations (avoiding contradictions during the course of inquiries); –to charge Prosecutors of the National Headquarters or of the District Headquarters with this or that inquiry, according to the necessity at the time; –to gather and analyse intelligence on organised crime. The National Prosecutor is assisted by a specialised police body (the Anti-Mafia Investigations Headquarters), as well as by the national and inter-provincial departments of the police forces. He directs the deployment of these forces according to the needs of the investigations. 2) The results obtained thanks to these new institutions are already very satisfactory. The main reasons of this success are numerous. The creation of specialised Prosecutors, who are very professional, very experienced, and who dedicate all their time to the combat against organised crime. The rationalisation of investigations by the National Headquarters. The introduction of legal “compensatory” provisions, which reduce the sentences for former Mafiosi who decide to collaborate with Justice. These provisions are combined with protection measures for these witnesses and their families (change of identity, financial assistance, etc.). There are at the moment over 1,200 such “Justice collaborators”. Other provisions which adapt the trial organisation to organised crime: compulsory custody remands, increase of the legal maximum length of time given for preliminary investigations, etc. Finally, specific penitentiary provisions for inmates accused of organised crime, to prevent them from associating in prison. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 372 Resumen La respuesta italiana al fenómeno mafioso : el papel y la experiencia del Ministerio fiscal nacional anti-mafia Bruno Siclari Para luchar contra una criminalidad organizada muy virulenta y que tiene ramificaciones internacionales (Mafia, Camorra, Ndrangheta...) el legislador italiano ha renovado en profundidad el aparato de investigación judicial de los años 90. 1) Ha creado nuevas instituciones para luchar contra la Mafia. En cada una de las 26 Cortes de Apelación, se han creado Direcciones de Circunscripción Anti-mafia constituidas por équipos de magistrados-investigadores especializados en las investigaciones de criminalidad organizada. Al nivel central se ha creado una Dirección National Anti-mafia. Está dirigida por el Fiscal nacional y se compone de 20 substitutos. Coordina la acción judicial contra la criminalidad organizada en todo el territorio. Las principales funciones del Fiscal nacional anti-mafia previstas en la Ley de enjuiciamiento criminal son : – coordinar las investigaciones regionales (evitar las contradicciones en las investigaciones).; – decidir desigrar magistrados de la Dirección National o de las Direcciones de Circunscripcion o tal o tal investigación segun las necesidades del momento.; – recabar y tratar informaciones relativas a la criminalidad organizada. El Fiscal nacional dispone de un cuerpo de policia especializado (la Direction Investigadora Anti-mafia) así como servicios centrales e interprovinciales de fuerzas de policía. Da directrices sobre la utilización relativa de esas diferentes fuerzas en las investigaciones. Los investigadores nacionales y regionales disponen de un banco de datos exaustivo, informatizado y puesto al día en tiempo real a los niveles regionales y nacional. 2) Los resultados obtenidos gracias a esas nuevas instituciones son ya muy satisfactorios Las principales razones de este éxito son multiples. La creación de équipos de magistrados especializados, muy profesionalizados, muy experimentados, que se dedican a todo tiempo a la lucha contra el crimen organizado. La racionalización de las investigaciones por la Dirección Nacional. La introducción de disposiciones de ley «.que compensan.» y reducen las sanciones penales para los antiguos mafiosos que deciden colaborar con la justicia. Estas disposiciones se combinan con medidas de protección para estos testigos (protección de sus familias, cambio de identidad, ayuda financiera, etc...) Hay actualmente mas de 1200 de esos «.colaboradores de justicia.». Disposiciones que adaptan la organización de los procesos a la criminalidad organizada : detención preventiva obligatoria, aumento de la duración máxima de las investigaciones previas, etc. Enfin, disposiciones penitenciarias particulares para los detenidos acusados de crimen organizado, para impedirles que puedan asociarse en prisión. La direction nationale anti-mafia : son rôle et ses expériences dans la réalité judiciaire italienne 373 American witness protection programs against organized crime Eugène L. Coon, Jr, Assistant Director for judicial security, US Marshall Service, Wasshington American witness protection programs against organized crime I am both pleased and honored to have the opportunity to address such a distinguished group of international legal and law enforcement professionals at the 18th International Conference of Security for Police. I want to thank the French Minister of the Interior, and the Institute of Higher Studies of Interior Security for inviting me to join you in what I hope will be the ground work for our mutual future endeavors. I have been asked to speak to you about the United States’Witness Security Program. In addition, I also want to draw your attention to the need for exchanging critical information and important ideas regarding international criminal elements. During the past decade, we have seen many changes in governments, and in world politics. We have also seen international organized crime groups take advantage of the political changes to expand their spheres of influence and to continue to attempt to corrupt the lawful order of society. Such groups have no regard for jurisdiction or borders... they have but one goal, to enhance their personal gain. However, we have an opportunity to join together, to strengthen communication between us, and thereby reduce the constraints of our individual systems that allow organized thugs and gangsters to conduct their illegal international activities. I believe that it is clear from this forum’s willingness to discuss this topic, that there is no dispute that a witness protection program is necessary for effective law enforcement and the successful prosecution of organized crime. There simply is no other investigative technique as effective as first-hand information, which only an insider can provide, about the inner-most workings of a criminal conspiracy or act. Electronic surveillance, while valuable, provides limited information. And, oftentimes the receipt of the information is thwarted by the criminal groups own use of sophisticated electronics or by other means. The best way to combat these groups – and it has proven to be the best way – is to have a witness, preferably one involved in the crime, take the stand in a court of law and point the accusing finger and testify against his confederates. Disclosing this secret information about a successful criminal enterprise carries a penalty of death for the informer. He is understandably reluctant to take the witness stand without some assurance that he and his family will be protected from retribution. This is not a phenomenon unique to the United States. The Witness Security Program administered by the United States Marshals Service. (USMS) is a multi-faceted program. Not only do we remove the witness and his family from the immediate danger area, but we also resettle him permanently in a new, safe area, where he knows no one, and perhaps more important, no one knows him. We provide the witness and his family with authentic documentation papers for a new identity, housing assistance, employment placement or job training, counseling, medical treatment, and a sufficient stipend until the witness is financially self-sufficient. When, it is necessary to return to the danger area to testify, he is provided 24 hour protection. One thing that I wish to make very clear to his distinguished body, is that although we consider the Witness Security Program to be one of the most effective tools in the United States in combating organized crime, we had a very slow and tumultuous beginning. Our efforts go back to 1929 when President Hoover established a National Commission of Law Observance and Enforcement to conduct an inquiry into organized crime. Those efforts where not successful and gangsters in the United States, except for the efforts of local law enforcement, went about their illegal activities with impunity. In 1950, a special United States Senate Committee began making inquiries into reports of organized crime and racketeering. As was the case with federal prosecutions, this initiative was unsuccessful due to the simple fact that witnesses would not come forward to testify and when they did, they didn’t live long. Another decade passed before then Attorney General Robert Kennedy began monitoring organized crime activities and in September 1963 his efforts were rewarded when organized crime member Joseph Valachi came forward and testified before Congress. As a result of Valachi’s cooperation, Attorney General Kennedy told Congress that the Department of Justice was taking steps to protect witnesses by moving them out of the country, providing them with work, and changing their names. Although these efforts weren’t very successful, it marked the recognition of the need for a formal program and most significant to this assemblage, the need for international cooperation. Again, we found that for varying reasons, actions to fight organized crime were slow and arduous. President Johnson took up the banner, and, in 1966, commissioned yet another committee to investigate organized crime. Among other things the President’s Crime Commission recommended that the federal government establish residential facilities for the protection of witnesses. Bases on the Commission’s findings, Congress passed legislation entitled the Omnibus Crime Control Act of 1970, which formally established the Witness Security Program. In 1971, the United States, Marshals Service was designated to operate and administer the Program. As you can see, even with Presidential and Congressional recognition of a monumental problem, it took more than four decades to implement laws and develop policies to bring about a change which has proven to be an effective tool in our modern arsenal to fight the war against crime. I say modern, because when the United States’first experienced organized crime, it wasn’t a stranger to European countries. We did, however, find the pirates who attemp- Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 376 ted to control our coastal waterways an omnipotent fœ at the time. During the late 19th and early 20th centuries, we saw a number of criminal organized groups from a wide variety of ethnic backgrounds emerge. All indications are that the end of the 20th and the beginning of the 21st centuries will be no different, except that criminals, who will continue to expand where possible, will cultivate multi-ethnic and cross organizational ties. Recognizing these trends, Attorney General Janet Reno urged Congress to support legislation that, for the first time in the history of the Witness Security Program, will grant permanent resident status to foreign national witnesses. Congress supported these goals and passed legislation as part of a crime bill. This international recognition of crime is, however, not a new phenomenon. Louis Freeh, the Director of the Federal Bureau of Investigation, during a visit to Italy in December 1993, discussed mutual cooperation and the sharing of information and witnesses for the purpose of breaking down law enforcement barriers that seem to be such a stimulant or organized crime. And in April 1994, the European Committee on Crime Problems, met in Strasbourg, and discussed witness intimidation and the state’s responsibility to provide protection before and after trial. At the foundation of all of these concepts and discussions, we find common threads; Because the criminals we seek know no borders, neither should our efforts in bringing them to justice be limited in such a manner. Witness Security Programs based on mutual cooperation will benefit each of us. Allow me now, to share with you, information that will provide with a better understanding of the United States Witness Security Program. Development of the Program In 1971, the Marshals Service established the Witness Security Program, a program committed to keeping witnesses for the prosecution alive. I currently hold the position of Assistant Director for Judicial Security, overseeing both the Witness security and Court Security Programs. The Program is centrally managed by a headquarters’staff located in Arlington, Virginia. This staff consists of a traditional organizational structure – a program Chief, Section Chiefs, Case Managers, Resource Analysts, and administrative, fiscal and ADP support personnel. The total full time complement is 192 positions -158 are operational Inspectors and 34 are non operational, or administrative support personnel. The field presence is geographically divided between 12 Regional Offices, each headed by a Chief Inspector, who reports to headquarters. These 12 Regional Offices provide the field management for 47 sub-offices located from Maine to Florida to Hawaii and in nearly every federal judicial district in between. The total field staffing consists of 146 Inspectors and 17 administrative support personnel. To enhance protective services to Program participants, we have built 9 safe sites, and currently have 3 safe sites under construction. In 1987, we opened our Witness Security Safe Site and Orientation Center, which provides a safe and secure place to interview protected witnesses and their families and initiate American witness protection programs against organized crime 377 them into the Program. The Center has full-service apartments and holding cells, medical and dental facilities, indoor exercise areas, and interview rooms. As you have heard, the predominant personnel (approximately 80%) of the staff involved in running this program for the USMS are Witness Security Specialists. These men and women... and there are women.... must be prepared to risk their lives to protect each witness. Specialists are highly trained in personal security and use a wide range of sophisticated equipment and specialized weaponry to ensure the safety of the witnesses and their families. Specialists must also be well versed in all aspects of social services. They are highly trained in assisting people with serious emotional, family, and personal problems. They must be skilled at providing guidance to the children of protected witnesses who face a new life with a new name and a new identity and no past that they are allowed to talk about. They must also be skilled job counselors to help place the witness in a new job. Frequently, the witness’s new career is far less lucrative than his previous criminal activities. Design of the Program In the early years, most Program participants were organized crime members or associates, connected in some manner with La Cosa Nostra (LCN). Today, many Program participants are affiliated with new forms of organized crime, such as motorcycle, street, or prison gangs; international and narco-terrorists, as well as other emerging groups. There are a host of difficulties inherent in providing a structured program of protection for gang members and terrorists. In many respects, these individuals are more brutal, violent, and ruthless than traditional organized crime members. Many of them do not possess even rudimentary values or ethics. There are ethnic and cultural barriers and many have minimal education, limited job skills, and little, if any, desire for legitimate employment. They typically have no family structure, and are accustomed to “living on the streets”. By contrast, the traditional organized crime member has a family, some education, some job skills, and some respect for the criminal justice system. Their more traditional lifestyle enables the Marshals Service to relocate them to another city, and place them in some type of employment under an assumed name with significantly less difficulty. Gaining Admission into the Program Remember, this is a program of last resort and requires prospective participants to sever all ties with past friends, family, and associates. This is a difficult sacrifice initially and can lead to even further disenchantment in the long term. Ordinarily, a federal investigative agency such as the Drug Enforcement Administration, the Bureau of Alcohol, Tobacco, and Firearms, or the Federal Bureau of Investigation will recommend a witness for participation to the United States Attorney for the district in which that case is pending. The underlying Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 378 threat to the prospective witness must be verified by the investigative agency since they have first-hand knowledge of the case. Prior to approval by the Department of Justice’s Office of Enforcement Operations (OEO) the USMS conducts a preliminary interview to determine the witness’s suitability. Additionally, during this process, Program guidelines and services offered are explained in detail by a Witness Security Specialist. The Witness Security Specialist by training and experience determines if the witness will be suitable, that is, capable of following Program Guidelines. The common reasons for rejection from the program are violent proclivities, adverse psychological evaluation, uncooperative attitude, unreasonable demands extensive medical problems or unemployability. If OEO authorizes a witness’s participation, the nest step is the execution of a Memorandum of Understanding (MOU). This is not designed to be a binding contract, but an instrument to ensure that all participants have been familiarized with the governing guidelines of the program. A witness Security Specialist reviews this document with the witness and all adult family members. Each adult family member must initial every page and sign the document. The USMS encourages witnesses to seek legal counsel before signing the MOU, and at a minimum must have counsel appointed to accept service of process on their behalf. Services Offered by the Program Security Assistance -24 hour protective details are established for the witness or a family member when they are required and authorized to enter a danger area. New Identity Assistance – all program participants, with the exception of prisoner witnesses, are required to undergo a court-ordered name change. A system has been established to ensure the confidentiality of the petitioner, and the sealing of the records. Following the name change, the following types of authentic documentation are secured by the Marshals Service for the participant: proof of birth (birth certificate, US passport, Certificate of Citizenship or Naturalization); social security card; drivers license; school registration and immunization records for school-age children and adults, as required; medical records, professional licenses; and religious certificates. If a witness elects to terminate participation in the program, the Marshals Service will assist him or her in reverting back to their original identity. Special Agreement with the Social Security Administration In cooperation with the Social Security Administration, the Marshals Service Establishes a new account, and obtains a new card and number for each adult family member. American witness protection programs against organized crime 379 Relocation Assistance Witnesses and family members are relocated as soon as possible to a safe area. Interim quarters are provided on an emergency basis. Relocation areas are selected based upon proximity to danger areas, job skills, occupational marketability, ethnic background, medical needs, special schooling requirements, and availability of USMS manpower to provide protection. Participants receive a monthly allowance to cover living expenses. Funds are also available for medical treatment, employment training, moving expenses, and the purchase of an automobile. Witnesses cannot move their personal vehicle to the relocation area because it can be traced through the identification number. Movement of Household Goods The Marshals Service can, on a limited basis arrange for relocation of household goods through a carefully established and secure procedure with a commercial carrier. Movement of household goods is probably the weakest link in the program network: often requiring the witness and/or their spouse to return to the danger area for several days. USMS has because of that, implemented guidelines providing for the monetary replacement of household goods in lieu of movement to the new location. Temporary Financial Assistance Until a witness becomes financially self-sufficient, the program provides a monthly living stipend. This allowance is based on family size and relocation area. Employment Assistance The MOU specifies the USM will attempt to locate one reasonable job opportunity for a witness. In practice, we ordinarily attempt to locate at least two. The MOU clearly states that the Marshals Service cannot guarantee that these opportunities will be equal to the witness’s last job, in either type, prestige or pay. If an able-bodied witness refuses to work he or she can be terminated from further financial assistance. The Witness Security Program has a professional vocational guidance program to assist with individual cases. The vocational and psychological evaluations program is run by a team of vocational psychologists. All witnesses entering the program are given a battery of vocational and attitudinal inventories designed to assist in identifying the types of employment for which they are best suited. Bases upon the results of these tests, the psychologists prepare a vocational report which suggests specific jobs as well as general areas of employment which is provided to the witness. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 380 The Marshals Service requires that all recently released prisoners, and any individual with a history of violence or suicide be personally interviewed by one of our psychologists prior to participation in the Program. Each field inspector is required to develop and maintain local employment contacts for ready placement. Prospective employers may, if necessary, be advised of an applicant’s criminal history; this is particularly true if a witness obtains employment in an unsuitable or sensitive field, such as a prison guard or security officer if a witness establishes stable employment, his funding is normally continued for three (3) additional month. If a witness loses a position through no fault of his own, the Service will resume financial assistance and assist him in locating another job. Medical Assistance During the period that a witness and his family are receiving financial assistance, all of their medical and dental expenses are defrayed by the program. When financial assistance is terminated if the witness’s employer does not offer medical coverage, the Marshals Service will provide funds for medical insurance for a one year period. Mail Assistance and Forwarding Participants may not correspond directly with anyone in the danger area. Correspondence with non-program family members is accomplished through the use of cover mail boxes and mail drops throughout the country. The Service also assists witnesses in communicating with family members securely over the telephone. Prisoner Witnesses With respect to prisoner witnesses, the Marshals Service provides only secure transportation between institutions and physical protection during court appearances, and assists prisoner witnesses in communicating with relocated members while incarcerated. The Bureau of Prisons (BOP) is responsible for all other aspects of a prisoner witness’s security. When prisoner witnesses are released from custody and if authorized into the full program, the Marshals Service the assumes responsibility. Former prisoner witnesses present an entirely new host of challenges for field inspectors. Probationers and parolees Persons on federal probation or parole participating in the Program remain in that status and are supervised under ordinary terms and conditions. A specially trained probation officer in the relocation area is aware of all aspects American witness protection programs against organized crime 381 of the participant’s background and is authorized to assist the inspector in locating suitable employment and social services. Government agents and attorneys are not authorized to make representations concerning assistance which will be provided by the Witness Security Program. Fingerprints The witness and all adults over 16 years of age must voluntarily provide their fingerprint records to the Federal Bureau of Investigation (FBI). A specific designation is placed on their names in the system so that if they are arrested, or if an inquiry is made concerning them, the Marshals Service is notified. Debts and Civil Judgments The Witness Security Program will not shield witnesses from legitimate creditors. Witnesses are required to make appropriate arrangements for the immediate settlement of all debts. If a judgment in a civil action is entered against a protected witness or their authorized dependent, the Attorney General will determine if reasonable efforts have been made by the witness to comply with the judgment. If it is determined that reasonable efforts have not been made the Attorney General may disclose the new identity and location of the witness to the persons entitles to recover the judgment, or may remove the participant from the Program. Statement of Outstanding Debts, Liens, Encumbrances, Source of Income and Court Orders Program guidelines require that witnesses and their authorized dependents disclose to representatives of the Marshals Service any and all outstanding debts, liens, encumbrances, and court orders upon entering the program. Child Custody Arrangement The Marshals Service must ensure that no minor children are relocated contrary to a court order and that proper parentage is established before entry into the Witness Security Program. The Service provides a secure, relaxed environment for visits between children and parents when one of them is not o Program participant. In certain cases where the child is a non-Program participant, arrangements must be made to have the child accompanied to a neutral area by the non-Program parent, who then turns over temporary custody of the child to the Program parent. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 382 The Marshals Service works with child support enforcement authorities when a Program participant fails to respond to a valid court order, and also provides secure means when they do. The program provides funds for payment of child support requirements until such time as the witness is self-sustaining. Termination Program participation may continue as long as the witness and their family complies with Program guidelines. The decision to cease funding is dependent upon the individual’s ability to provide for himself and his family and is unrelated to the fulfillment of his testimonial obligations. When a witness becomes self-sufficient, the Service notifies the witness in writing 45 days prior to termination of subsistence funding. In this communication, the witness is also advised of any other services to be provided to him, such as further documentation, vocational training. etc. The witness has an opportunity, at that point, to apply for an extension of funding. Even though funding is terminated, an active participant may avail himself or herself of other available services. This is a voluntary program – termination may also be at the witness’s discretion. In cases of termination for breach or cause, if a witness willfully violates the security guidelines of the Program, he and his family are subject to termination of all services. Typical grounds for termination would be: disclosing new identity or location disclosing their status as a protected witness, visiting a danger area without permission from the service, engaging in further criminal activities: or refusing to accept reasonable employment. When a witness is terminated for not abiding by the MOU, they are generally provided with one month’s funding. Immigration legislation The United States Marshals Service on behalf of the Attorney General drafted legislation which Congress has passed which permits the Attorney General to grant permanent resident status to foreign nationals who are participants in the Witness Security Program. Other participants are granted parole status. Statistics During its 25 year existence, the Witness Security Program has processed over 14,600 people including over 6,600 witnesses. There are currently 1,075 active witnesses in the program. The average witness is funded for 18 months before they become self-sustaining. There are currently 661 prisoners in the program 640 men and 21 women. In FY 1995 we received 141 new participants. Budgetary history FY 1979 $ 7,603,000; FY 1989 $ 18,723,000; FY 1995 $ 36,337,000. American witness protection programs against organized crime 383 The Marshals Service has shared its experience with the Witness Security Program, both good and bad, with law enforcement officials throughout the world. We have had officers from six countries attend our Witness Security Specialist basic training. I would like to extend and invitation to any representative to participate in more through briefings or in our next training session. In closing I want to once again thank this distinguished body for your openness and willingness to face a challenge that must be met collectively. I look forward to working with you in the near future. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 384 Résumé Les programmes américains de protection de témoins contre la criminalité organisée Eugene L. Coon La meilleure façon de combattre la criminalité organisée est de disposer de témoins qui ont participé de l’intérieur à ces activités criminelles, et qui révèlent à la justice les noms de leurs complices et leur façon de procéder. Mais en témoignant, ces individus risquent leur vie (et celle de leur famille). Il est donc nécessaire de veiller à leur protection. Le programme américain de protection des témoins remonte à 1971. Il présente de multiples facettes : placer le témoin et sa famille dans un lieu nouveau et sûr où il ne connaît personne et où personne ne le connaît, lui fournir (ainsi qu’à sa famille) des papiers authentiques qui lui forgent une nouvelle identité, l’aider à se loger, lui trouver un emploi ou une formation, le conseiller, l’aider financièrement jusqu’à ce qu’il soit autonome, le protéger quand il revient témoigner. L’organisation du programme repose sur un état-major (en Virginie) qui compte 192 personnes. Il y a également 12 Bureaux régionaux, et 47 Sous-bureaux, qui représentent en tout 146 inspecteurs et 17 administratifs. Il y a également 9 sites de sécurité (plus 3 en construction) où les témoins et leur famille peuvent commencer à participer au programme. Les membres opérationnels sont des spécialistes de la protection, très bien équipés, et formés pour aider et guider les témoins et leur famille dans leur nouvelle vie. Le programme concerne la mafia, mais aussi les nouvelles formes du crime organisé (gangs de motards, gangs de rue, gangs de prisonniers, terroristes, narco-trafiquants). Les membres de ces nouvelles formes de criminalité sont très difficiles à replacer lorsqu’ils témoignent, car ils n’ont ni éducation, ni valeurs, ni formation professionnelle. Le feu vert du ministère de la Justice est la première condition pour se faire admettre dans le programme. La personne doit être très coopérative, sans problèmes médicaux ou psychologiques, et employable. Le sacrifice qu’on lui demande est très lourd (couper tous les liens avec ses anciennes relations). On l’informe très précisément sur le programme et on lui fait signer un mémorandum. Services offerts par le programme. Protection particulière de 24 heures sur 24 quand le témoin va dans une zone risquée pour lui (procès, etc.). Assistance pour créer sa nouvelle identité, avec mise en œuvre de tout un système de confidentialité. Assistance pour un retour éventuel à l’ancienne identité. Accord avec l’administration de la sécurité sociale. Assistance au déménagement et au relogement. Assistance financière temporaire (jusqu’à trois mois après que le témoin ait retrouvé un emploi). Aide pour retrouver un emploi. Assistance médicale temporaire. Le témoin reste responsable du remboursement de ses dettes. Des témoins de nationalité étrangère qui participent au programme se voient attribuer une carte de résident. Le programme de protection est volontaire. Il peut se poursuivre aussi longtemps que le témoin le souhaite, à condition qu’il se plie aux règles édictées. S’il enfreint les règles du programme, tous les services lui sont retirés, ainsi qu’à sa famille. Statistiques. En 25 ans d’existence, le programme de protection des témoins a traité plus de 14.600 personnes, dont plus de 6.600 témoins. Il y a actuellement 1.075 témoins actifs dans le programme. En moyenne, l’aide financière dure 18 mois. 661 prisonniers font partie du programme (dont 640 hommes). En 1995, il y eu 141 nouveaux participants. Le budget évolue de façon exponentielle (7 millions $.; 1989 : 18 millions $.; 1995 : 36 millions $). American witness protection programs against organized crime 385 Resumen Los programas americanos de protección de los testigos contra la criminalidad organizada Eugene L. Coon La mejor manera de luchar contra la criminalidad organizada es tener testigos que han participado del interior a esas actividades criminales, y que revelan a la justicia los apellidos de sus cómp] ices y sus modos de operar. Pero, testimoniando, estes indivíduos arriesgan sus vidas (y la de sus familias). Pues es necesario protegerlos. E1 programa americano de protección de testigos remonta a 197l. Presenta multiples facetas : instalar el testigo y a su familia en un lugar nuevo y seguro en donde no conoce a nadie y en donde nadie le conoce, darle (así coma a su familia) documentos auténticos con una nueva identidad, ayudarle a alojarse, encontrarle un empleo o una formación, aconsejarle, ayudarle financiariamente hasta que sea autónomo, protegerle cuando vuelve a testimoniar. La organización del programa rebasa en una plana mayor (en Virginia) de 192 personas. Hay tambien 12 oficinas regionales, y 47 negociados, que representan en todo 146 inspectores y 17 administrativos. Hay tambien 9 sitios de seguridad (más 3 que se estan construyendo) en donde los testigos y sus familias pueden empezar a participar al programa. Los miembros operativos son especialistas de la protección, muy bien dotados, y formados para ayudar y guiar a los testigos y a sus familias en sus nuevas vidas. El programa concierne la mafia, pero tambien las nuevas formas del crimen organizado (bandas de motoristas, de calle, de prisioneros, terroristas, narcotraficantes). Los miembros de estas nuevas formas de criminalidad son muy difíciles de colocar cuando testimonian porque no tienen ninguna educación, valores, ni formación profesional. La autorización del Ministerio de la Justicia es la primera condición para ser admitido en el programa. La persona debe ser muy cooperativa, sin problemas medicales o psicológicos, y que pueda trabajar. El sacrificio que se le pide es muy importante (romper todos los lazos con sus antiguas relaciones.) Se le informa muy detalladamente sobre el programa y tiene que firmar un memorandum. Servicios ofertados par el programa. Protección particular de 24 horas par 24 cuando el testigo va en una zona con riesgos para el (proceso, etc...). Asistencia para crear su nueva identidad, con puesta en obra de todo un sistema de confidencialidad. Asistencia para un retorno eventual a su primera identidad. Acuerdo con la administración de la seguridad social. Asistencia para la mudanza y para alojarse de nuevo. Asistencia financiera temporaria, (hasta 3 meses despues que el testigo haya encontrado un empleo). Ayuda para encontrar un nuevo empleo. Asistencia médica temporaria. El testigo queda responsable del page de sus deudas. Testigos de nacionalidad extranjera que participan al programa obtienen una tarjeta de residente. El programa de protección es voluntario. Puede durar el tiempo deseado por el testigo a condición que cumpla con las reglas dictadas. Si no las respeta pierde todos los servicios y su familia tambien. Estadísticas. En 25 años de existencia, el programa de protección de los testigos ha tratado mas de 14600 personas, de las cuales 6600 testigos. Hay actualmente 1075 testigos activos en el programa. En la media, la ayuda financiera dura 18 meses. 661 prisioneros hacen parte del programa (de los cuales 640 hombres). En 1995, ha habido 141 nuevos participantes. El presupuesto evoluciona de manera exponencial. (7 millones de dolares : 1989.; 18 millones de dolares : 1995 : 36 millonnes de dolares). Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 386 Gestione penitenziaria della criminalita’organizzata Salvatore Cianci, Procuratore Generale della Corte di Cassazione italiana, ex direttore generale dell’Admministrazione penitenziaria italiana Gestione penitenziaria della criminalita’organizzata Definizione della criminalità organizzata La trattazione del tema che mi è stato assegnato richiede una preliminare definizione della criminalità organizzata alla quale si farà riferimento. E’noto, infatti, che i modelli di criminalità organizzata variano a seconda delle aree geografiche, delle condizioni sociali ed economiche, dei momenti e avvenimenti storici e di altri fattori. Indubbiamente le connotazioni della criminalità organizzata si riscontrano tanto nelle associazoni delinquenziali di tipo mafioso, quanto nelle associazioni con finalità di terrorismo o di eversione, nelle associazioni finalizzate al traffico di stupefacenti, al traffico di sostanze nucleari, al traffico di esseri umani, al gangsterismo urbano e in molte altre organizzazioni delittuose. In Italia, esauritasi la stagione del terrorismo, il fenomeno di criminalità organizzata più grave e più pericoloso è stato ed è tuttora quello mafioso. E di esso si occupa specificamente questa relazione, la quale ha prevalentemente un taglio espositivo e uno scopo informativo dell’esperienza penitenziaria italiana nell’azione di contrasto a tale tipo di criminalità. L’ipotesi delittuosa dell’associazione per delinquere di tipo mafioso è stata legislativamente creata e descritta dall’art. 416 bis del codice penale, introdotto nell’ordinamento giuridico con la legge n. 646 del 13 settembre 1982. Essa si realizza quando coloro che fanno parte dell’associazione «.si avvalgono della forza di intimidazione del vincolo associativo e della condizione di assoggettamento e di omertà che ne deriva per commettere delitti, per acquisire in modo diretto o indiretto la gestione o comunque il controllo di attività economiche, di concessioni, di autorizzazioni, appalti e servizi pubblici o per realizzare profitti o vantaggi ingiusti per sé o per altri.» (comme 3° dell’art. 416 bis). Gli elementi caratterizzanti del reato sono costituiti dalla utilizzazione della coartazione psicologica derivante dal vincolo associativo e dalle condizioni di assoggettamento e di omertà, mentre lo scopo è costituito dal conseguimento di un profitto mediante un’attività criminosa. L’ultimo comma dell’art. 416 bis considera di tipo mafioso le altre associazioni, comunque localmente denominate, che valendosi della forza intimidatrice del vincolo associativo perseguono scopi corrispondenti a quelli delle associazioni di tipo mafioso. Ne fanno, quindi, parte la «.camorra.», la «.ndrangheta.» e altre associazioni meno note. Ne consegue che attualmente in Italia per criminalità organizzata deve intendersi l’attività delittuosa rivolta a perseguire le finalità dell’associazione di cui all’art. 416 bis del codice penale con gli stessi metodi previsti dalla suddetta norma. Sviluppo e trasformazione della criminalità mafiosa Con la citata legge n. 646 del 1982, che innovava incisivamente anche in tema di misure di prevenzione di carattere patrimoniale nei confronti della mafia, e con l’altra legge n. 726 dello stesso anno 1982, la quale istituì l’Alto Commissario, con i poteri attribuiti all’autorità di pubblica sicurezza, al fine del coordinamento della lotta contro la delinquenza mafiosa sul piano locale e sul piano nazionale, si hanno i segni inequivocabili di una maggiore attenzione da parte degli Organi dello Stato al fenomeno mafioso e un più decisivo impegno dei medesimi Organi per l’adozione di stategie di contrasto sia sotto il profilo normativo che operativo. In verità, negli anni precedenti, per un lungo periodo, l’attenzione delle Istituzioni sugli sviluppi della mafia era stata sviata dal gravissimo fenomeno criminale del terrorismo, che aveva dal 1967 al 1982 particolarmente e strenuamente impegnato le forze di polizia e la magistratura. Di ciò avevano approfittato le associazioni mafiose per espandersi e per operare una profonda trasformazione. Mantenendo i tradizionali collegamenti politici, compivano il primo salto di qualità inserendosi nella speculazione edilizia. Operavano la radicale trasformazione inserendosi nella lavorazione e commercializzazione della droga, di cui riuscivano ad acquisire il monopolio, trovandosi così a gestire enormi quantità di denaro. Da qui la necessità di riciclare il denaro sporco, di investirlo in attività apparentemente lecite, di trasferirlo all’estero. La mafia artigianale si era, pertanto, trasformata in mafia imprenditrice, in una multinazionale del crimine, la quale assumeva moduli operativi e organizzativi della criminalità degli affari. Altra novità delle varie organizzazioni criminali è stata costituita dalla adozione di cruenti metodi di lotta nei confronti delle autorità dello Stato.; metodi mutuati dai terroristi, con i quali – sembra ormai accertato – la criminalità mafiosa ha avuto episodiche collaborazioni contro comuni obiettivi. Numerose sono state le vittime di questi nuovi metodi tra magistrati, forze dell’ordine, personalità politiche, operatori penitenziari, funzionari dello Stato e persone senza incarichi pubblici casualmente trovatesi nei luoghi degli agguati e delle stragi. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 388 Il pentimento e la normativa premiale E’bene premettere che nei testi legislativi italiani non è mai usato il sostantivo «.pentimento.» per indicare una condotta antagonista all’offesa del reato o di collaborazione processuale con l’autorità. Ma tale termine si è imposto nel linguaggio giornalistico, in quello comune e nello stesso gergo giudiziario, venendo riferito ad atteggiamenti soggetivi eterogenei e soprattutto non riconducibili a sentimenti di dolore o rimorso. L’uso della parola «.pentimento.» è cominciato con le prime collaborazioni dei terroristi e il contemporaneo profilarsi della legislazione premiale. Le motivazioni soggettive della collaborazione sono indifferenti nè, tanto meno, si richiede che esse siano di carattere morale ovvero il frutto di una reale resipiscenza. Impropriamente, pertanto, viene definito «.pentito.» l’imputato già appartenente ad una organizzazione criminale che collabora con la giustizia. Ad indurre il legislatore ad accordare benefici penali e penitenziari sono esclusivamente ragioni di politica criminale, ravvisabili nell’interesse a propiziare una condotta antagonista all’offesa del reato o di collaborazione processuale, mentre le ragioni della collaborazione del c. d. «.pentito.» sono normalmente di natura utilitaristica. Considerati i risultati largamente positivi della legislazione premiale nella lotta al terrorismo, si apriva e proseguiva per diversi anni un acceso dibattito sulla opportunità di emanare, in una prospettiva pratica e utilitaristica, una normativa premiale per la collaborazione processuale di appartenenti alla criminalità organizzata di tipo mafioso. Sulla emanazione della legislazione premiale si registrarono due posizioni opposte ed estreme : l’una contraria, l’altra favorevole. Gli oppositori riproponevano anzitutto le medesime obiezioni con le quali era stata osteggiata la legislazione nei confronti dei terroristi. Le principali erano : 1) L’impunità e la mitezza della pena nei confronti di autori di gravi ed efferati delitti sono, sul piano etico, riprovevoli, mentre, sul piano giuridico, violano il principio retributivo. 2) La collaborazione del coimputato non disinteressato, anzichè contribuire all’accertamento della verità, può comportare un inquinamento del materiale probatorio. 3) Un disvalore, qual’è la delazione, non può assurgere a istituto giuridico. Con speficico riferimento alla criminalità mafiosa si obiettava inoltre : 4) Le delazioni dei mafiosi genererebbero incertezze ed equivocità probatorie perchè, mentre per i terroristi, dato il loro impianto culturale e ideologico, il pericolo di uno straripamento dall’alveo della verità era ipotetico e quantitativamente limitato, tale pericolo sarebbe reale ed esteso nella colla- Gestione penitenziaria della criminalita’organizzata 389 borazione mafiosa, considerate la subcultura degli appartenenti e le motivazioni prevalentemente egoistiche e utilitaristiche della collaborazione. Dagli assertori della legislazione premiale si evidenziavano soprattutto ragioni pratiche, nelle quali si trovavano anche alcune risposte confutatorie alle considerazioni dei fautori dell’opposta tendenza. Si rilevava che : a) il punto debole della nuova mafia risiede in quegli adepti provenienti dalla criminalità comune e minorile, che non hanno ancora assimilato la subcultura mafiosa, sui quali la legislazione premiale potrebbe fare breccia.; b) poichè il vasto aggregazionismo ha generato cruenti guerre tra cosche rivali, deve ragionevolmente presumersi, anche sulla base di alcune esperienze collaborazioniste, che la legislazione premiale propizierebbe la collaborazione degli appartenenti alla cosca perdente, se non altro, per un personale interesse alla sopravvivenza. Il legislatore, forse perchè consapevole che alcune delle considerazioni prospettate dai fautori delle opposte posizioni non fossero prive di un fondamento di verità, è stato per lungo tempo titubante. Solo con il decreto-legge 13 maggio 1991, n. 152 (convertito in legge 12 luglio 1991, n. 203) sceglie decisamente la strategia premiale per contrastare la criminalità mafiosa. Cœvamente, con la legge n. 82 del 1991, vengono emesse nuove norme per la protezione dei collaboratori della giustizia. La disciplina premiale tiene conto sia del collaboratore imputato sia di quello condannato ed incide nel momento sanzionatorio, in quello processuale e in quello penitenziario, tra i quali c’è una stretta interdipendenza. Assicura inoltre la più ampia protezione alle persone esposte a pericolo per effeto della loro collaborazione. Sul piano sanzionatorio la legge n. 203 del 1991 stabilisce che la pena dell’ergastolo è sostituita da quella della reclusione da 12 a 20 anni e che le altre pene sono diminuite da un terzo alla metà nei confronti dell’imputato del delitto di associazione di tipo mafioso o di altro commesso avvalendosi delle condizioni previste dall’art. 416 bis del codice penale ovvero al fine di agevolare l’attività delle associazioni di tipo mafioso, che, dissociandosi dagli altri, si adopera per evitare che l’attività delittuosa sia portata a conseguenze ulteriori anche aiutando concretamente l’autorità di polizia o l’autorità giudiziaria nella raccolta di elementi decisivi per la ricostruzione dei fatti e per l’individuazione o la cattura degli autori dei reati. Il legislatore, inaugurando un trattamento decisamente differenziato tra il mafioso collaboratore e quello irremovibile, prevede per quest’ultimo, con la stessa legge n. 203 del 1991, inasprimenti di pena. Sul versante processuale, il legislatore ha, da un lato, compiuto, con la citata legge n. 203/1991, interventi in materia di custodia cautelare, rendendola più rigorosa (sostanzialmente obbligatoria in carcere) nei confronti degli imputati di mafia, e, dall’altro, con l’art. 13 della legge n. 82 del 1991, prevedendo la possibilità per i collaboratori, su autorizzazione dell’Autorità giudiziaria, di fruire di custodia extracarceraria. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 390 Regime penitenziario Particolarmente sul trattamento penitenziario il legislatore ha voluto fare leva per incentivare la collaborazione non solo degli imputati di reati di mafia, ma anche dei condannati. Contrapponendo anche in questo versante benefici penitenziari per i collaboratori a rigorosi divieti di concessione di misure diverse dalla custodia in carcere per chi non intende collaborare con la giustizia. L’art. 4 bis dell’ordinamento penitenziario, introdotto dalla legge n. 203/1991 e modificato dalla legge n. 356 del 1992, stabilisce che per i detenuti per reati di mafia (e di altri gravissimi reati) possono essere concessi l’assegnazione al lavoro all’esterno, i permessi premio e le misure alternative alla detenzione (affidamento in prova al servizio sociale, semilibertà, detenzione domiciliare) solo in caso di collaborazione con la giustizia. L’art. 58 ter dell’ordinamento penitenziario, anch’esso introdotto dalla legge n. 203/91, consente l’ulteriore beneficio di potere fruire dell’assegnazione al lavoro all’esterno, dei permessi premio e delle già indicate misure alternative, con esclusione dei limiti di pena stabiliti dall’ordinamento penitenziario, alle persone condannate per taluno dei delitti indicati nell’art. 4 bis che, anche dopo la condanna, si siano adoperati per evitare che l’attività delittuosa sia portata a conseguenze ulteriori ovvero abbiano aiutato concretamente l’autorità di polizia o l’autorità giudiziaria nella raccolta di elementi decisivi per la ricostruzione dei fatti e per l’individuazione o la cattura degli autori dei reati (si ripete il contenuto dell’attenuante dell’art. 8 della legge n. 203/91). Tra le misure premiali di natura penitenziaria non si possono non includere quelle derivanti dalla legge n. 82/1991 per la protezione dei collaboratori di giustizia. La possibilità di disporre, per gravi ed urgenti motivi di sicurezza, da parte dell’Autorità giudiziaria che le persone arrestate, fermate o imputate siano custodite in locali diversi dal carcere è prevista dall’art. 13 della predetta legge. A questa forma di custodia extracarceraria si è già sommariamente accennato in riferimento agli interventi legislativi sul versante processuale. Ma, sempre per gravi ed urgenti motivi di sicurezza, l’Autorità giudiziaria, in base all’art. 13 bis della citata legge (introdotto dalla legge n. 356/1992), può autorizzare che le persone detenute per espiazione di pena, e anche prima dell’inizio dell’esecuzione, siano custodite in luoghi diversi dagli istituti penitenziari, per il tempo strettamente necessario alla definizione dello speciale programma di protezione. Anche in questo modo si introduce una nuova forma di detenzione extracarceraria in deroga alle norme del codice di procedura penale e dell’ordinamento penitenziario. Sulla base di una esatta interpretazione degli art. 13, 13 bis e 13 ter della legge n. 82/1991 la detenzione extracarceraria dovrebbe perdere efficacia non appena il collaboratore venga ammesso allo speciale programma di protezione e da quel momento dovrebbe subentrare la competenza della magistratura di sorveglianza per la concessione delle misure alternative con le procedure e i benefici previsti dal citato art. 13 ter. Gestione penitenziaria della criminalita’organizzata 391 Deve essere pertanto constatata la tendenza a fare proseguire la detenzione extracarceraria anche in pendenza di un programma di protezione. D’altra parte solo in un circuito carcerario appositamente destinato ai collaboratori di giustizia e adeguatamente strutturato si possono coniugare le esigenze della massima sicurezza e quelle del recupero sociale attraverso un trattamento rieducativo. Il regime speciale dell’art. 41 bis dell’ordinamento penitenziario L’escalation degli attachi della criminalità organizzata agli apparati dello Stato toccò il suo punto più drammatico con la strage di Capaci, nel maggio 1992, in cui trovarono la morte il magistrato Giovanni Falcone, sua moglie, e gli uomini della scorta e con la strage di Via d’Amelio in Palermo, nel successivo mese di luglio, nella quale furono uccisi il magistrato Paolo Borsellino ed altre persone, tra cui gli uomini della scorta. Falcone e Borsallino erano stati particolarmente impegnati nell’istruire il primo maxiprocesso contro la mafia, ottenendo la preziosa collaborazione dei primi boss di grosso calibro, quali Buscetta e Contorno, ed avevano preparato la ponderosa ordinanza di rinvio a giudizio di ben 707 imputati di associazione per delinquere di tipo mafioso, di omicidio e di altri gravi reati. L’impegno di Falcone era continuato nelle funzioni di Direttore generale degli affari penali al Ministero di Giustizia : egli era stato l’ispiratore di una serie di provvedimenti legislativi antimafia del 1991 e il materiale estensore del decreto legge 20 novembre 1991, n. 367 (convertito nella legge 20 gennaio 1992, n. 8) istitutivo della Direzione nazionale e delle Direzioni distrettuali antimafia. Borsellino aveva continuato l’attività giudiziaria e, per la sua esperienza specifica, era in predicato per la nomina a Direttore nazionale antimafia. Se le stragi di Capaci e di Via D’Amelio e la concomitante espansione di gravi delitti fecero comprendere, con estrema chiarezza, che il fenomeno mafioso poteva essere contrastato efficacemente anche attraverso un’azione mirata ad impedire che gli appartenenti alla criminalità organizzata mantenessero, durante lo stato di detenzione, rapporti organici con gli altri associati esterni, diramando direttive, ricevendo notizie di contenuto illecito e magari ordinando o commissionando delitti (Pietro Marchese e Vincenzo Puccio erano stati ammazzati dentro il carcere e l’omicidio di Carmelo lanni era stato eseguito all’esterno, ma ordinato dal carcere). Per conseguire le predette finalità a partire dal 20 luglio 1992 veniva attuato il regime speciale previsto dal 2° comma dell’art. 41 bis dell’ordinamento penitenziario, introdotto dal decreto legge 8 giugno 1992, n. 306 (convertito nella legge 7 agosto 1992, n. 356). Tale regime consiste nella sospensione, in tutto o in parte, dell’applicazione delle normali regole di trattamento o degli istituti previsti dall’ordinamento penitenziario. Actes du XVIIIe cours international de haute spécialisation pour les forces de police 392 Le regole di trattamento si riferiscono alla vita carceraria interna e ai contatti dei detenuti con l’esterno. Per «.istituti.» si intendono : l’assegnazione al lavoro esterno, i permessi premio e le misure alternat