Emma, une petite fille pétillante… Marie Picard
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Emma, une petite fille pétillante… Marie Picard
Du 4ème au 10ème prix. Emma, une petite fille pétillante… Marie Picard - 74380 ARTHAZ Je suis l’heureuse Maman d’une petite fille de presque 6 ans, Emma, asthmatique, et d’un petit garçon de presque 3 ans, Benjamin, qui a souffert d’asthme du nourrisson. J’aimerais vous faire partager trois anecdotes qui nous sont arrivées. Avant cela, je voudrais vous raconter un peu plus de notre histoire. Mon mari et moi avons un terrain allergique tous les deux (rhume des foins, eczéma). J’ai fait moimême de l’asthme lorsque j’étais petite et il m’est arrivé de refaire des crises d’asthme au printemps ces deux dernières années, facilement contrôlables avec traitement. Notre petite-fille Emma a eu des problèmes respiratoires quelques mois après sa naissance et le diagnostic d’asthme a été posé vers ses 2 ans et demi, après plusieurs crises sévères et plusieurs consultations aux urgences. L’asthme d’Emma se manifeste par une toux très intense et persistante la nuit et durant la sieste, qui se prolonge la journée lorsqu’elle va très mal. Cette toux finit par empêcher Emma de respirer correctement et la fait suffoquer, lui fait vomir des glaires et la fatigue énormément. Emma a beaucoup manqué l’école durant ses deux premières années de maternelle. Emma va plutôt bien l’été mais de septembre à mai-juin elle fait 1 à 2 crises par mois, qui durent 1 semaine à 10 jours à chaque fois. Depuis plusieurs mois, nous parvenons enfin à contrôler plus facilement l’asthme d’Emma, pour plusieurs raisons. Nous habitons en Haute-Savoie et nous sommes allés consulter le Dr Isabelle P.*, au CHU de Grenoble, à 2 heures de chez nous, depuis Novembre 2007. Emma a depuis un traitement de fond par aérosols tous les soirs par P.* et nous augmentons les doses de P.* dès que des les premiers signes avant coureurs d’une crise apparaissent (rhume, éternuements). Nous lui faisons également des aérosols de V.* quand la crise est installée. Nous sommes adhérents à l’association Asthme et Allergies depuis Mai 2007 et cela nous a permis d’apprendre à mieux connaître la maladie d’Emma et à nous sentir moins seuls. Emma et moi avons assisté à Etats Généraux de l’association Asthme et Allergie en Octobre 2007 et cette journée nous avait beaucoup aidées. D’après la pneumo-pédiatre qui suit Emma, tout devrait s’arranger en grandissant, car Emma ne présente pas d’allergies (tous les tests sont négatifs) ni de reflux gastroœsophagiens (PHmétrie normale). Son petit frère Benjamin a fait de l’asthme du nourrisson et a été hospitalisé trois fois avant l’âge de 9 mois. A un mois et demi il a fait une bronchiolite et une pneumopathie très sévères qui avaient nécessité qu’il soit transféré au CHU de Genève depuis l’hôpital d’Annemasse. A un an, Benjamin avait fait une laryngite très sévère qui avait nécessité l’intervention du SMUR à notre domicile. Depuis Benjamin n’a plus eu de problème et à presque 3 ans il va très bien et n’a même plus de traitement de fond. * Pour des raisons règlementaires, les noms de marque, de médicament ou de personne ont été tronqués 1 Notre famille a vécu des périodes très difficiles et éprouvantes ces dernières années, lors des différentes crises d’asthme et hospitalisations répétées de nos deux enfants. Cependant nous sommes conscients de la chance que nous avons eue que nos enfants se remettent de leurs épreuves. Par ailleurs toutes ces difficultés ont soudé notre famille et ont permis à Emma d’avoir une force intérieure et une maturité incroyables. Emma est une petite fille pétillante et extraordinaire. Bien sûr la plupart des Mamans disent cela de leurs enfants. Mais son Papa et moi ne sommes pas les seuls à le dire. Notre famille et nos amis proches sont eux aussi épatés et admiratifs de la joie de vivre et du courage qui animent Emma. Voici les trois anecdotes qui l’illustrent. La première anecdote remonte à mars 2007. Emma avait 4 ans et demi. C’était un samedi matin et Emma allait très bien en cette période. Il était prévu que je l’emmène à l’école mais j’allais très mal ce matin là. J’avais toussé presque toute la nuit à cause d’une crise d’asthme. Je commençais à reprendre mon traitement de fond. Un quart d’heure avant de partir pour l’école j’ai été prise d’une quinte de toux assez forte. J’ai expliqué à Emma que je ne pourrais pas l’emmener car je faisais une crise d’asthme et que ce serait son Papa qui s’en chargerait. Emma a alors une réaction incroyable. Elle s’est occupée de moi comme je m’occupais d’elle lors de ses crises d’asthme. Elle m’a fait asseoir sur le canapé. Elle m’a pris la main, m’a caressé les cheveux et m’a parlé calmement et elle m’a dit exactement : « Maman, fais comme tu me dis. Respire fort comme je te montre, voilà, ça va aller mieux, ne t’en fais pas. Je vais prendre cette maladie et je vais la mettre au feu dans la cheminée pour qu’elle nous laisse tranquilles !!! » Lorsque la crise a été passée j’ai repensé à l’attitude d’Emma, une petite-fille de 4 ans et demi qui montrait une telle maturité, un tel recul sur sa propre situation et une faculté à offrir ce qu’on lui avait donné qui me bouleversaient. Surtout que ce que je venais de vivre était absolument infime et isolé à côté crises quasiquotidiennes et fortes d’Emma. Quand la crise fut passée j’en avais les larmes aux yeux et encore une fois je trouvais ma petite fille absolument épatante. Une fierté immense m’emplit encore quand je repense à ce jour et à toutes les épreuves difficiles qu’Emma a surmontées avec courage et dignité. La deuxième anecdote date de décembre 2007. Emma avait un peu plus de 5 ans. Ce mois d’hiver a sans doute été le plus difficile pour Emma. Elle a été en crises d’asthme durant quasiment tout le mois de décembre. Un soir que je donnais un bain à Emma, elle toussait sans s’arrêter et avait du mal à reprendre son souffle. Lorsqu’elle est sortie du bain je l’ai prise dans mes bras et lui ai demandé ce qu’il ferait plaisir que le Père Noël lui apporte. Nous avions cette discussion passionnante tous les soirs depuis quelques semaines et Emma était toujours intarissable sur le sujet. Ce soir-là, ma petite princesse, avec son teint pâle et ses yeux cerclés de noirs, me répondit très calmement ce que jamais je n’aurais crû pouvoir entendre d’une petite-fille de 5 ans : « Maman, je ne veux pas de cadeaux, tout ce que je veux, c’est que tout ça, ça s’arrête ! ». Je lui ai demandé : « Quoi, tout ça ? » Elle m’a dit : « J’en peux plus de tousser, d’avoir cette maladie. Tout ce que je veux comme cadeau c’est de plus l’avoir ». J’ai puisé en moi tout le sang-froid et toute la force afin de pouvoir réagir au mieux face à cette situation difficile. J’ai consolé ma petite Emma avec tout mon amour, en lui expliquant que son papa et moi et les docteurs faisions tout notre possible pour qu’elle guérisse, que bientôt elle irait mieux et qu’il fallait continuer à être courageuse. Je lui ai aussi expliqué qu’elle aurait certainement de très beaux cadeaux car le Père Noël savait que c’était vraiment une petite-fille bien sage. Après avoir couché Emma ce soir-là, j’ai craqué et j’ai pu verser les larmes que j’avais contenues depuis que j’avais entendu sa colère. Je n’oublierai jamais ce moment car c’est sans doute la seule fois où Emma a baissé les bras et a vraiment craqué, ce qui a été très rare en cinq ans. En général elle se montre toujours joyeuse, débordante de vie et se comporte comme si son asthme faisait partie d’elle et que toute ce qu’elle vit était absolument normal. Son papa et moi nous consolions toujours en nous disant que sa maladie ne l’affectait pas autant que nous, qui nous faisions beaucoup plus de soucis. Ce soir-là j’ai réalisé qu’Emma pouvait souffrir psychologiquement bien plus que je ne l’avais supposé. D’ailleurs nous avons fini à l’hôpital 2 cette nuit-là car Emma n’allait vraiment pas bien et elle a été très coopérative et polie avec le personnel soignant, comme d’habitude. La troisième anecdote date de janvier 2008. Cela faisait plusieurs semaines que la classe de grande section-CP d’Emma se préparait activement à une sortie en raquettes avec la maîtresse et un spécialiste de la faune de la montagne. Emma se réjouissait de participer à cette balade en raquettes à la découverte des traces des animaux de montagne. Nous habitons à 30 minutes en voiture de la station de ski où Emma et sa classe devaient se rendre. Nous nous battions depuis l’entrée en maternelle d’Emma pour obtenir un PAI (Plan d’Accueil Individualisé) afin qu’on puisse lui donner de la V.* à l’école en cas de crises. Par manque de disponibilité du médecin scolaire, ce PAI n’avait pu être établi et le seul recours était d’appeler son assistance maternelle qui habite sur la commune afin qu’elle puisse lui donner de la V.* et la garder chez elle si Emma n’allait pas mieux. Ce jour-là, Emma n’était pas en grande forme car elle était en fin de crise mais son peak flow était presque redevenu normal. J’ai hésité à la mettre à l’école en sachant qu’elle irait en altitude et que personne ne pourrait lui donner de la V.*. Quand j’ai fait part à ma puce de mes doutes, j’ai vu son rêve de vivre cette grande aventure tant espérée s’écrouler. Emma ne toussait plus elle était juste encore un peu fatiguée. J’ai donc emmené Emma à l ‘école et ai prévenu la maîtresse de la situation. Malheureusement Emma a fait une crise d’asthme très peu de temps après être arrivée à la station. Apparemment elle avait eu chaud dans le car et elle était très excitée d’arriver à destination et cela suffit à raviver sa toux qui s’était améliorée depuis peu. Cela a paniqué l’équipe enseignante et les enfants de sa classe de voir Emma dans cet état. Emma a parfaitement géré la situation toute seule en expliquant clairement à sa maîtresse ce qu’il fallait faire, comme son Papa et sa Maman lui avaient expliqué : s’asseoir en avant, se calmer, respirer profondément. Tout s’est arrangé assez rapidement et Emma et tous les enfants ont ensuite pu profiter de cette superbe journée. Quand la maîtresse m’a raconté ce qu’il s’était passé, je n’ai pu m’empêcher de m’en vouloir pour la décision que j’avais prise, le risque et la panique que ce mauvais choix avait provoqués. Ensuite j’ai demandé à Emma comment s’était passée cette journée et elle m’a répondu : « C’était GE-NIAL ! On a fait une belle promenade et des jeux. On a même vu des traces d’hermine. On a bien rigolé ». Comme Emma ne me parlait pas de sa crise d’asthme, je lui demandai ce qui s’était passé et elle m’a dit : « Ah oui, j’ai beaucoup toussé, j’ai craché des glaires, j’ai bien soufflé et ensuite c’est allé mieux. Mais alors le jeu du cerf, qu’est-ce que c’était bien et on a même eu un diplôme des amis de la montagne. ». Et là je me suis sentie très heureuse car j’ai réalisé qu’Emma avait adoré sa journée, qu’elle avait déjà oublié sa crise d’asthme. Egoïstement, je l’avoue, j’ai finalement conclu que j’avais pris la bonne décision. Emma avait sans doute eu une toute petite crise qui avait certainement impressionné tous ceux qui étaient présents, à part ellemême, très habituée a à vivre ce genre de situations. Si je l’avais empêchée de vivre ce moment si important pour elle, elle aurait réalisé combien l’asthme pouvait parfois la rendre différente des autres et la priver d’instants précieux. Cette journée restera sans doute un très beau souvenir pour Emma. Je suis consciente que nous avons beaucoup de chance car notre petite-fille est malgré tout en bonne santé et a une soif de vivre incroyable. Emma va de mieux en mieux. Je sais combien d’autres enfants et parents vivent des épreuves bien plus graves et plus douloureuses que nous avons vécues. J’admire énormément toutes les personnes et encore plus particulièrement tous les enfants qui se battent contre une maladie chronique et sévère, que ce soit l’asthme ou d’autres affections et je suis de tout cœur avec eux. C’est pour cette raison que je travaille dans la recherche clinique depuis maintenant dix ans. J’adore mon métier qui est difficile mais porteur d’espoir. Je ne pensais pas que je vivrais des moments aussi angoissants en tant que mère mais je pensais pas qu’une petite-fille si jeune comme Emma pouvait m’enseigner autant de leçons de courage, d’espoir et de joie de vivre, coûte que coûte. Je voulais vous faire partager le rayon de soleil que représente l’énergie d’Emma. Je dédie notre histoire à tous ceux qui ont besoin d’espoir, de soutien et de sourires. * Pour des raisons règlementaires, les noms de marque, de médicament ou de personne ont été tronqués 3 Il faut toujours croire en des jours meilleurs et essayer de regarder la vie avec un cœur d’enfant. Marie, une maman comblée. 4