« Plus belle que les larmes… » Aragon 1) Mon nom est Pierre Les
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« Plus belle que les larmes… » Aragon 1) Mon nom est Pierre Les
« Plus belle que les larmes… » Aragon 1) Mon nom est Pierre A cette mission, j’ai échoué Les gens, les hommes ne m’aiment pas Lentement, je perds mon nom Peut-être parce que je suis de fer Je perds ma vue Ou que je n’obéis pas aux lois. Je perds ma vie. Mon rôle sur Terre ? Supprimer… Lentement, mon nom revient Ma vue revient Aucun remords, mes oreilles sont en cuivre. Ma vie revient Les échos, les cris. Une seconde vie revient Les cris de l’orage. Les lois… L’orage de l’orgue L’orgue de la mort. Ma mission ? Aucun remords, mes oreilles sont en cuivre. Rendre Je n’ai rien à faire de l’amour, les prés, Rendre au ciel les oiseaux La douce brise ou les marguerites. Rendre à la nuit ses étoiles Je réduis tout ça au silence, Rendre à la France sa beauté Je réduis tout ça en miettes. Rendre à cette fille son sourire Ma vie se résume à une mission Elliot Campbell 2) Leurs voix d’ange ne pourront pousser des cris, Seul l’écho des chars fera du bruit. La France, détruite, ne sera faite que de galériens Et de mauvais carabins. Les cœurs qu’ils ouvrent Condamneront le Pont-Neuf et le Louvre. Le ciel reflètera les flammes de l’enfer, Troublera les étoiles qui diffèrent. Ils ne souhaiteront qu’une nuit sans émoi ni remords, Ni orage, ni mort. Des prés de marguerites aux maisons de paille, Un rien de silence serait décerné d’une médaille. Ils empêcheront ces Messieurs de se réveiller aux dieux Et feront grincer les essieux. Les poètes écriront leurs morts en vers et contre tout, Refusant d’aimer une nation sans figure de proue. Maeva Guigou 3) L’avenir sera un ciel bleu, Gardé d’oiseaux et d’anges. L’avenir sera fait d’amour et de marguerites. L’avenir sera rempli d’anges Qui parleront, diront, réveilleront l’amour. L’avenir sera beau. L’avenir sera fait de poètes L’avenir cherchera à détruire Les anges de l’enfer qui sculpteront Les cœurs des galériens. L’avenir refusera l’enfer comme fin. L’avenir pourra détruire l’irritation Des cœurs des carabins. L’avenir aimera. Augustin Boutin 4) Le ciel sera-t-il bleu ? Le cœur des poètes criera-t-il toujours d’aussi beaux vers ? Ou alors, seronsnous réveillés par le bruit des chars, des orages dans la nuit troublant notre sommeil ? Notre monde aura-t-il plus de galériens, ne garderons-nous pas les prés et les marguerites ? Les gens n’auront-ils pas tous les mêmes droits ? Ils se souviendront du goût de l’amour, du son de l’orgue et des cuivres, et non du goût des flammes. La France sera-t-elle la même ou aura-t-on condamné le Louvre et le Pont-Neuf ? Non, il n’y aura plus de mauvais (ceux qui irritent, ceux qui dérangent et ceux qui détruisent) qu’il faudra condamner. Non, le cri des morts n’empêchera pas de respirer, mais notre écho conviendra-t-il pour refuser la vengeance et le remords ? L’étrange oiseau qu’est le temps saura-t-il arrêter de scruter les enfers et dire les mots pour que les cieux s’ouvrent, et qu’il pleuve une dernière fois sur son reflet, la Terre. Raphaël Mozzo 5) Nous vivons dans d’étranges cieux Où les oiseaux bleus détruisent les orgues, Où les orages réveillent les anges. L’écho des morts vit dans leur reflet, Leur cœur grince encore lorsqu’on leur parle, Les étoiles irritent, Les flammes pleuvent sur les prés de marguerites Et le goût du cuivre détruit les mots. Les nuits saoulent les carabins et vengent Les poètes. Ils écrivent de leur silence De mauvais vers. Les galériens condamnent le sommeil De leurs émois troublants. L’amour n’est plus que paille qui sert D’essieu pour les chars du remords. Clara Albert 6) Mon avenir, je l’écris avec droit ! Là-bas l’orage dérangera le silence, Ces messieurs crieront leur amour Sur le Pont-Neuf, comme des rois Et Dunkerque vengera la France. Mon avenir parlera des cieux, Les gens respireront l’air du ciel bleu. La nuit les mots pleuvent sur les poètes. Ils réveilleront l’écho des cieux. Dans mon avenir, nous troubleront l’enfer, Et nous vivront de mes vers. Dans mon avenir les marguerites pourront s’ouvrir Et j’empêcherai les galériens de les détruire ! Gaëlla Palamy 7) J’écris ce texte sur l’avenir étrange du monde. Où le ciel se voile de la nuit scintillante Un avenir où les gens vivent, respirent et sourient D’étoiles sans pleuvoir Sans un sommeil empêché par l’écho des morts de nos guerres. L’avenir est beau, dîtes-vous, grâce au travail des temps passés. Sans le bruit des chars, des cuivres et des cris. Un avenir faisant rimer les vers et chanter les voix. J’écris dans l’avenir du monde d’autrefois Où l’on cherchait encore les résistants J’écris sur un avenir où l’on ne réveille pas l’orage. Où l’on condamnait les innocents et emprisonnait les mots Où l’on se souvient du mauvais des tyrannies Dans l’avenir où rien de pourrait se reproduire. Où l’on ne dérange pas les anges par nos prières désespérées Un avenir qui ne craint par le dur reflet des flammes de l’enfer J’écris l’avenir dont je rêve Un avenir où les livres sont en couleurs et les timides parlent. Où l’on sait ce qu’est la paix Où l’on s’embrasse sur le Pont-Neuf Où l’on connaît l’importance des poètes J’écris sur l’avenir où le monde ne fait plus qu’un pays. Où l’on écrit des mots d’amour avec des cœurs Où l’on cueille ensemble les marguerites des prés Où le silence des matins n’est bris Que par le chant des oiseaux. Romain Seailles « Des lilas et des roses » Aragon Nous les verrons courir par-ci, par-là Avec des bouquets de roses et de lilas Alors, ils s’épanouiront sous le soleil Et suivront les bourdons et les abeilles. Ils marcheront en France et en Belgique Parmi ces paysages fantastiques, Dans ces campagnes, pendant le printemps, Ils continueront par tous les temps. Loin de la foule, de tous les cris, Ils n’auront aucun ennemi ? Ils camperont dans les vallées Et joueront comme des chevaliers. Ils vivront des siècles au moins Et termineront leur vie dans un jardin. Ils mourront après la retraite En mangeant de petites galettes. Ces gens seront nos petits-enfants, Qui nous ressembleront finalement. Nous les verrons courir par-ci, par-là Avec des bouquets de roses et de lilas. Julien Lauzeille « Je chante pour passer le temps » Aragon Le temps passe, la nature reste. Les mots, les forêts, les mers dessinent l’univers Les palais, les merveilles tombent dans la nuit Les ricochets des cailloux lancés sur l’étang se font entendre L’homme n’est qu’une petite ombre dans ce jeu. Une petite voix qui chante dans mes oreilles Elle me dit que c’est une grande aventure qui Se dénoue devant mes yeux Les doigts font jouer l’archet sur le violon Cette musique fait trembler mes genoux. Le temps passe, les joueurs s’enchaînent, les secrets tombent L’amour n’est plus qu’une statue, il est mort. Il n’y a plus de gloire, seulement des étoiles qui brillent Il n’y a plus de Chine, plus de muraille, seulement des nuages Il n’y a plus de murs, plus de pierres, seulement du givre Il n’y a plus de moi, de vous, de nous, seulement des miracles. Margot Dreanot « Nous dormions ensemble » Aragon C’était il y a bien longtemps, peut-être en 2020… J’étais enfermé au fond du magasin Avec tous mes semblables, des robots domestiques Destinés à servir en mode automatique. Eléonore entra, cherchant dans la boutique Un robot de ménage utile et sympathique Si possible un beau gosse habile et performant. Elle me choisit : j’étais, de loin, le plus brillant ! Du lundi au dimanche et du matin au soir Je lavais, je rangeais, je faisais la cuisine Je vivais un enfer, je n’avais plus d’espoir Je n’étais qu’un robot, une simple machine. N’étant pas programmé pour tomber amoureux Je tremblais cependant quand je voyais ses yeux. Mon cœur en métal battait toujours plus fort A force de croiser la belle Eléonore. Chaque jour, vers midi, avant d’aller dormir, Pour me charger, elle attrapait mon bras ; Elle ne savait pas que je voulais lui dire Mon amour… et partait sous ses draps. Puis enfin, un beau jour, à peu près vers midi Je trouvai le chemin du ciel, du paradis. Pour me dire je t’aime, elle me prit la main Et mieux que ressemblant, je me sentis humain. Maxime Chambert-Loir « Il n’y a pas d’amour heureux » Aragon L’avenir est fait de hasards ; Les sentiments étranges qui naissent. Va-t-on vivre dans le bonheur, Ou pleurer nos malheurs ? On ne pourra pas tout anticiper Rien de cela ne peut se prévoir. L’avenir est fait de surprises Heureuses ou pleines de frissons. Si on y pense un peu, l’avenir Est inattendu. Des sanglots, Retenez vos larmes, il est temps De la douleur ou des regrets De croire en l’amour, ouvrez votre cœur Nous laissent désœuvrés, blessés. Et laissez ce cher destin faire avec ardeur De vos petits instants de grands moments. Il nous faudra la force De porter toutes nos peurs L’avenir ressemble à une ombre, Et d’apprendre de nos erreurs, On a beau tendre les bras, Nous relever face aux douleurs. Ouvrir grand nos yeux, Il nous échappe. La vie se passe rarement Comme on l’avait prévue Les espoirs qui meurent, Héloïse Maubert « Les larmes se ressemblent » Aragon Les sanglots passés Pendant que les anges rejoindront le bleu ciel Les coups encaissés Je découvrirai la vie C’est malheureusement le prix à payer Mais pendant que durera l’espoir immortel Pour vaincre le silence des regrets Je défendrai mes rêves. Pour un bel avenir Ma mémoire est la voix étouffée J’écrirai à la craie sur les murs de mon palais Qui me fait comprendre les erreurs passées Les serments, les chansons, le nom des ruelles Et me rappelle qu’un nouveau jour arrive Qui me feront souvenir Et que je ne dois plus vivre dans le passé, mais dans e futur. Des énormes pas Que j’aurai faits jusque-là. Les défaites sont transparentes, insignifiantes Les regards échangés des jeunes enfants Par rapport aux matins des temps d’amour et de paix prochains. Je les dessinerai sur du papier jauni Pour oublier les signes qui me rappellent Que la vie est parfois cruelle. Sophie De Barros « La rose et le réséda » Aragon Détrompez-vous infidèles Celui qui la verra tel Pourtant des enfants ont froid Celui qui l'ignorera Et cherchent une éventuelle Tandis que l'un se rebelle Aide Peut-être un vieux drap L'autre devient soldat Pour protéger de la grêle L'un argue qu'elle sera belle Mais cet avare ne veut pas Pleine de bonheur et joie Celui qui la verra tel Belle comme rien de tel Celui qui l'ignorera Mais misères - il nie celles-là. Les sous ne manqueront pas Celui qui Ia verra tel Détrompez-vous infidèles Celui qui I' ignorera Oui ouvrez vos yeux judas L'autre pauvre rappelle L'argent n'est pas essentiel Dans son infime grabat Mais ce qui disparaîtra Que demain viennent de réels C'est bel et bien les chapelles Futurs chagrins et combats Et bien sûr l'égalité hélas Pour lui c'est la rituelle Celui qui la verra tel Guère ne le comprendra Celui qui l'ignorera Celui qui la verra tel Viendra la Terre Nouvelle Celui qui l'ignorera Pleine d'injures d'ingrats Tous deux adorent le ciel Triste : notre avenir est tel Le soleil et son éclat Le choix nous ne I' avons pas Un seul y est bien fidèle Ou du moins c'est officiel L'autre sans aucun tracas Nous ne l'avons plus : le choix Trouve l'argent essentiel Alors faisons comme les demoiselles Et ne s'en séparera Et mentons jusqu'à notre trépas Jamais Dans des ruelles Sarah Pham « Liberté », Paul Eluard Je le tiens entre mes petites mains Tu le cries de tes douces lèvres Il et elle le lisent dans leurs scintillantes prunelles Vous le sentez du bout de votre nez Nous l’entendons de nos fines oreilles Ils, elles le goûteront avec leur palais. Il sera à demain ce qu’il est aujourd’hui. A toi, A moi, A vous, A lui, A elle, Il est à nous, Bien qu’imprécis et souvent flou, Invisible et intouchable. Il n’est pas écrit dans les cahiers Il n’est pas gravé dans les pierres Il n’est pas non plus encré dans les images, L’avenir. Joséphine Chartier « Madrid 1936 », Pablo Neruda Ils seront glorieux, sifflants, resplendissants de lumière claire et d’étoiles, transformés par la joie, un sourire au visage. Mais ils seront surpris par la trahison des généraux et des soutanes et se mettront à courir comme dans une ruche. Ils seront là, les visages rageurs et noirs. Les yeux vengeurs, leurs voix solennelles appelant la garnison à se réunir. Ils seront là sans voix avec leur drapeau honorable pénétrant dans la sacristie. Ils seront là tout seuls pour se défendre, leurs genoux en sang à force de courir après leurs rêves. Ils seront là à l’aube avec des pierres, des couteaux, des épées, peut-être des fusils. Cette vague se déversera alors en hoquet dans un océan de rues bourbeuses, tel un fleuve se déversant goutte à goutte dans de pauvres sillons dans eau. Ce sera une montagne de visages sans joie, blessés, les visages transformés en graillon, à jamais dans u silence ténébreux. Gemma Bekki « Ce cœur qui haïssait la guerre » Robert Desnos Il m’arrive parfois de rêver à l’avenir, où toute cervelle serait libre de mener sa vie comme elle l’entend, sans avoir peur des dictateurs et de leurs partisans qui préparent dans l’ombre de bien sombres besognes. J’imagine la ville du futur débarrassée des batailles qui font siffler les oreilles des hommes et réveillent la colère de tous. La mer serait vidée de son sang et on pourrait écouter dans les campagnes les échos des cloches portant de nouveaux jours… Le cœur de chacun serait gonflé de bonheurs et les mors de révolte ne seraient qu’un lointain souvenir. Puis je me réveille et reviens au présent, ce présent plongé dans les guerres, la haine et la colère, où les cœurs sont brûlants à cause des ordres des tyrans. Alors je décide de ne plus écouter, de fermer mes oreilles et bloquer mon cœur, j’imagine l’avenir plein de roses et d’amour. Louis Vernay « Afrique » David Diop Par les champs usés, aux saveurs fanées et amères Par les voix des esclaves couchés sous le poids des regards humiliants Par le chan des familles affaiblies par l’horreur J’écrirai ton nom… Avec les enfants noirs réduits à l’esclavage Avec les guerriers impétueux des savanes Avec les grands-mères qui se courbent le long du fleuve J’écrirai ton nom… Par les rares et seules routes du midi Par la sueur des travailleurs ancestraux Par les zébrures des dos rougis par le fouet J’écrirai ton nom… Sur le lointain fleuve changé en sans rouge Sur le dos du jeune fils robuste Sur les fleurs et fruits repoussant le long des beaux arbres blancs J’écrirai ton nom… AVENIR Mathilde Basseville « Je dirai leurs noms », Pablo Neruda Adieu planète bleue. Quand je serai grand, les gouttes de rosée du petit matin Nous seront-elles encore familières ? Voyagerons-nous pour fuir notre planète saccagée par nos mains ? Certes, nous sommes nés dessus mais nous périrons ailleurs Elle a connu la gloire et les ténèbres Adieu planète bleue Mais qui sommes-nous ? De vulgaires bouts de chairs et de sang livides qui finiront par tomber Juste un petit éclat de lumière dans ce monde de géants Supérieurs ni aux chevaux ni aux araignées Nous avons eu le privilège de naître mais aussi de mourir La boule au ventre. Adieu planète bleue Robin Lucas « Dick », Yannis Ristos Les misères du passé Les maisons comme les pierres, emportées dans le vent La douleur et la colère pesant lourdement. Oubliez les usines futuristes bâties dans le passé. Cette ville passera bientôt du chaos au néant, Plus dévastateur qu'une révolution, plus dangereux qu'un tyran, Ce vent réduira cette ville pleine de vie à la mort et au silence ... Maintenant il faut reconstruire, retravailler et oublier Ceux qu’on aimait. Ceux, emportés par le·vent sans qu'on Puisse faire le moindre Adieu, qui sont partis au paradis Nous laissant seuls travailler tels des chiens dans L'Enfer. Camarades, oubliez les douces paroles d’amour que vous chuchotiez jadis à l’oreille de votre amour. Abandonnez le passé, enterrez le présent, Soyez forts et accueillez le futur à bras ouvert. N’attendez plus les choses qui sont venues Mais les choses A VENIR Camarades, essuyez vos larmes de dévouement Car vous fûtes autrefois des héros mais maintenant Vous êtes serviteurs de votre malheureux destin. La douleur et la colère pèsent lourdement, Ne pensez surtout plus au passé ni au présent, Pensez à l’avenir qui sera pour toujours votre Meilleur ami restant. Charles Brown