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J Gynecol Obstet Biol Reprod 1998; 27 : 135-143. FMC : revue générale Maladie hémolytique périnatale 1re partie : Physiopathologie D. Wirthner *, P. Hohlfeld *, J.-D. Tissot ** * Département de Gynécologie et Obstétrique, Centre Hospitalier Universitaire Vaudois (CHUV), 1011 Lausanne, Suisse. ** Fondation Centre de Transfusion Sanguine, Croix-Rouge Suisse, 27, rue du Bugnon, 1005 Lausanne, Suisse. RÉSUMÉ La maladie hémolytique périnatale se caractérise par la destruction des hématies fœtales par des anticorps d’origine maternelle dirigés contre des antigènes de membrane. Elle peut se compliquer d’hydrops immun.Pus de 250 antigènes de groupes sanguins ont été décrits. Cet article de revue traite du cas particulier de l’incompatibilité ABOet décrit la classification des différents antigènes érythrocytaires en s’attachant particulièrement au système Rhésus. D’autres systèmes antigéniques, tels que Kell, Kidd, Duffy, MNSs, P et Lutheran sont également décrits. Mots-clés : Maladie hémolytique périnatale • Maladie Rhésus. SUMMARY : Perinatal hemolytic disease. Part 1 : Pathophysiology. Perinatal hemolytic disease is characterized by the destruction of fetal red blood cells by maternal antibodies directed against membrane antigens and can lead to immune fetal hydrops. More than 250 blood group antigens have been described. After considering the particular situation of ABO incompatibility, this article describes the classification of red blood cells antigens, with particular reference to the Rhesus system. Other antigens such as Kell, Kidd, Duffy, MNSs, P and Lutheran are also considered. Key words : Fetal hemolytic disease • Rhesus disease. La maladie hémolytique périnatale (MHP) est caractérisée par la destruction des hématies du fœtus et du nouveau-né par des anticorps dirigés contre des antigènes de membrane. Ces anticorps traversent la barrière placentaire et peuvent entraîner une hémolyse chez le fœtus et le nouveau-né. La situation la plus fréquente est celle où la mère est de Rhésus négatif (Rh–) et le père de Rhésus positif (Rh+). Bien qu’une incompatibilité fœto-maternelle dans le système ABO soit beaucoup plus fréquente, ses conséquences sont le plus souvent bénignes. Le pourcentage de la population Rh– varie suivant l’origine. Elle s’élève à 0,1 % chez les Orientaux, à 8 % dans la population noire et à 35 % chez les Basques [1, 2]. Quinze pour-cent de la population caucasienne est Rh–. Il y a donc 85 % de probabilité qu’un fœtus de mère Rh– ait un père Rh+ [3]. Parmi les pères Rh+, 56 % sont hétérozygotes et 44 % sont homozygotes pour le locus D [4]. La moitié des fœtus de père hétérozygote seront Rh–, ce qui fait que 72 % des enfants issu d’une mère Rh– et d’un père Rh+ sont de Rh+. Une femme Rh– a donc, si on ne connaît pas le groupe du géniteur, une probabilité de 61 % de porter un enfant Rh+ (0,85 × 0,72). Pour qu’une MHP se développe, la mère doit produire des anticorps capables de traverser la barrière placentaire (IgG). De plus, les antigènes concernés doivent se trouver sur la membrane érythrocytaire et être essentiellement distribués sur les globules rouges. HISTORIQUE La première description de MHP date de 1609. Une sage-femme relate la naissance de jumeaux dont l’un, mort à la naissance, présentait un hydrops marqué. Le second, apparemment sain à la naissance, présenta ensuite un ictère et décéda quelques jours plus tard [5]. En 1932, Diamond décrit pour la première fois l’association hydrops fœtal, ictère et anémie [6]. Cette entité est caractérisée par une Tirés à part : P. Hohlfeld, Département de Gynécologie-Obstétrique, CHUV, CH 1011 Lausanne, Suisse. Reçu le 1er juillet 1997. Avis du Comité de lecture le 17 août 1997. Définitivement accepté le 17 août 1997. © MASSON, Paris, 1998. D. Wirthner et collaborateurs hémolyse et par la présence d’érythroblastes dans la circulation périphérique, d’où le nom d’érythroblastose [7]. En 1939, Levine et Stetson observent chez une patiente un anticorps agglutinant les érythrocytes du nouveau-né et du père, mais non ceux de la mère [8]. Ils suggèrent que des antigènes fœtaux hérités du père ont déclenché une allo-immunisation lors d’un passage dans la circulation maternelle. En 1940, Landsteiner et Wiener démontrent que l’hétéro-immunisation de lapins par des érythrocytes de Maccaccus Rhesus induit la formation d’un anticorps [3, 9]. Cet anticorps semble reconnaître l’antigène mis en évidence par Levine en 1939 et entraîne une agglutination du sang chez 85 % des Caucasiens. Les sujets dont le sang s’agglutinait ont été définis comme Rh+ et les autres Rh–. Par la suite, Levine a démontré que l’antigène en question était différent de l’antigène Rhésus. En l’honneur de Landsteiner et Wiener, Levine a appelé cet antigène LW. La confusion est survenue du fait que ces antigènes se trouvent sur presque toutes les hématies humaines, mais sont plus abondants sur les érythrocytes Rh+. L’antigène D a été défini par l’anticorps présent dans le sérum de femmes ayant présenté dans leurs antécédents une MHP. En 1941, Levine démontre que les anticorps antiD des femmes Rh– sont à l’origine de la MHP. En 1943, Levine relève que lors d’incompatibilité fœtomaternelle ABO, l’incidence de l’allo-immunisation Rh est diminuée. En 1944, Halbrecht décrit la présence d’un ictère néonatal en rapport avec une immunisation ABO. Depuis lors, de nombreux autres antigènes immunogènes responsables de MHP ont été décrits. PHYSIOPATHOLOGIE DE LA MALADIE HÉMOLYTIQUE Lorsque des hématies fœtales passent dans la circulation maternelle, elles peuvent induire la production d’anticorps dirigés contre des antigènes de surface que la mère ne possède pas. La réponse immunitaire varie selon les individus. Trente à 50 % des femmes ne développent pas d’anticorps quelle que soit la quantité de sang fœtal transmise [10-12]. Ces dernières sont qualifiées de « non répondeuses ». L’évolution naturelle de la maladie Rhésus est la suivante : 45 à 50 % des enfants n’ont pas d’anémie significative à la naissance. Vingt-cinq à 30 % ont une anémie modérée avec un risque important de développer un ictère nucléaire. Dans ce groupe, la mortalité sans traitement est de 90 % 136 et chez les survivants, le handicap sévère est la règle. Vingt à 25 % développent un hydrops avec mort in utero, survenant une fois sur deux avant la 30e semaine de grossesse [13]. L’antigène D est présent à la surface des globules rouges de l’embryon dès le 38 e jour suivant la conception [1]. La probabilité de trouver des érythrocytes fœtaux dans la circulation maternelle augmente avec la durée de gestation. Une incidence de 28,9 % a été observée durant le 3e trimestre [14]. Le passage de 0,1 ml de sang est une situation fréquente et ce volume peut induire une allo-immunisation chez les femmes les plus sensibles [15]. Un volume plus important peut passer dans la circulation maternelle, en particulier lors de manœuvres obstétricales [8]. L’incidence des transfusions de sang de plus de 10 ml a été évaluée à 0,83 % et celles de plus de 30 ml à 0,23 % [16] durant la grossesse, l’accouchement et les manœuvres obstétricales. Plus le volume transfusé est grand, plus le risque d’alloimmunisation est important [10, 11]. Les premiers anticorps maternels produits sont des IgM, progressivement remplacés par des IgG (réponse immune primaire). La réponse primaire se développe lors d’une grossesse ou d’une transfusion de sang. Cette réponse primaire est un processus qui se développe lentement. Les anticorps apparaissent exceptionnellement avant 4 semaines, habituellement à 8-9 semaines et parfois ne sont décelables que 6 mois après le premier contact avec les antigènes étrangers [5]. Il est rare qu’une femme produise une quantité suffisante d’IgG pour entraîner une hémolyse significative lors de sa première grossesse. La réponse secondaire a lieu lors d’une nouvelle exposition antigénique. Cette réponse est rapide et de type IgG. Des expositions itératives augmentent encore la rapidité et la production d’anticorps. Le passage des IgG maternelles à travers le placenta associe des mécanismes de diffusion passifs et actifs. Une fois dans la circulation fœtale, ces anticorps se fixent sur les antigènes de membrane correspondants. La destruction des érythrocytes se fait principalement dans le système réticulo-endothélial, en particulier dans la rate [17]. Plusieurs hypothèses ont été proposées pour expliquer le mécanisme de destruction des globules rouges [18, 19]. Actuellement, le rôle déterminant des macrophages et des monocytes a été établi [11]. Les macrophages et les monocytes possèdent à leur surface des récepteurs pour le fragment Fc des IgG [20]. Un érythrocyte recouvert d’anti-D est immédiatement phagocyté par les macrophages et détruit. © MASSON, Paris, 1998. FMC : revue générale • Maladie hémolytique périnatale Si l’atteinte est sévère, la rate ne peut faire face à ce nombre élevé d’érythrocytes sensibilisés, dont une partie sera détruite dans la circulation. De l’hémoglobine libre apparaît alors dans le sang fœtal signant l’hémolyse intravasculaire. Les macrophages possèdent les enzymes nécessaires à la destruction des globules rouges et de leurs produits de dégradation. L’élévation de la bilirubine n’est pas un facteur dangereux pour le fœtus, car elle est éliminée par le placenta [21] et se retrouve dans la circulation maternelle et le liquide amniotique [2]. In utero, le danger principal provient de l’anémie. Le fœtus répond par une production accrue d’érythropoïétine et une stimulation de l’hématopoïèse. Si l’anémie est sévère (≤70 g/l), des érythroblastes apparaissent dans la circulation, signant l’origine extramédullaire de la synthèse érythrocytaire (surtout dans le foie et la rate). HYDROPS FŒTAL L’hydrops fœtal est caractérisé par un œdème massif et une anasarque associés à une maladie hémolytique. Ce syndrome apparaît lors d’anémie sévère. Il a été suggéré que l’hydrops était causé par l’insuffisance cardiaque résultant de l’anémie. En fait, des fœtus développent un hydrops avec des taux d’hémoglobine de 100 g/l alors que d’autres ne développent pas ce syndrome avec des valeurs d’hémoglobine à 30 g/l [22]. L’insuffisance cardiaque ne semble pas être le facteur principal dans la genèse de l’hydrops. Il a été démontré qu’une hypervolémie n’est habituellement pas présente à la naissance d’un enfant avec anasarque [23]. Une autre hypothèse est que la décompensation cardiaque soit d’origine hépatique. En effet, le foie joue un rôle important dans l’érythropoïèse lors d’allo-immunisation sévère. Or, en cas d’hématopoïèse extramédullaire importante, une hépatosplénomégalie apparaît. Une hypertension portale se développe entraînant l’apparition d’un œdème placentaire et trophoblastique. Cet œdème perturbe les échanges fœto-placentaires. La réduction du flux sanguin et la distension des sinusoïdes hépatiques induisent une réduction de la synthèse protéique par le foie. L’hypoalbuminémie et l’hypertension portale induisent la formation d’ascite. Avec l’aggravation de l’hypoprotéinémie, les épanchements se généralisent, ainsi que les œdèmes. J Gynecol Obstet Biol Reprod / Volume 27, n° 2, 1998 LE CAS PARTICULIER DE L’INCOMPATIBILITÉ ABO Sur l’ensemble des grossesses, 20 % sont ABO « incompatibles ». Dans ces circonstances, le sang maternel contient des anticorps anti-A, anti-B ou anti-AB alors que les hématies fœtales portent le ou les antigènes correspondants. En réalité, cette maladie est pratiquement limitée aux enfants dont la mère est du groupe O. Dans ce cas, les anticorps appartiennent, en majorité, à la classe des IgG. Par contre chez les individus de groupes A ou B, les anticorps sont essentiellement des IgM [2, 10]. L’association mère O, fœtus A ou B ne se retrouve que dans 15 % des grossesses. L’exsanguino-transfusion n’est nécessaire que dans 1/1 000 à 1/4 000 nouveau-nés [7, 11]. L’incidence de l’affection dans la population noire est significativement plus élevée que dans la population caucasienne [24]. Contrairement à la maladie Rhésus, cette immunisation se retrouve dans 40-50 % des cas chez les primipares et ne s’aggrave pas lors des grossesses suivantes [7]. Les antigènes A et B se développent très tôt dans la vie embryonnaire. Ils ne sont pas présents uniquement à la surface des globules rouges, mais aussi sur de nombreuses autres cellules. De plus, ces antigènes sont sécrétés sous forme soluble dans plusieurs liquides biologiques. Le système ABO est considéré principalement comme un groupe tissulaire. Son rôle dans les transplantations est bien démontré. Des antigènes similaires aux antigènes A et B sont présents également sur plusieurs bactéries Gram négatif qui colonisent l’intestin de l’homme et stimulent la production d’anticorps au cours des 6 premiers mois de vie [7]. L’immunisation ABO est une maladie bénigne (tableau I). Il ne se produit ni anasarque ni mort fœtale. L’anémie à la naissance est modérée. Cette bénignité s’explique par le petit nombre de sites antigéniques A et B présents sur les globules rouges fœtaux et la localisation des antigènes sur d’autres tissus (compétition entre les antigènes tissulaires et érythrocytaires). Exceptionnellement, une incompatibilité ABO peut être à l’origine d’une anémie fœtale sévère. Quatre cas d’hydrops immuns consécutifs à une allo-immunisation ABO ont été décrits dans la littérature récente [25, 26]. Certains auteurs pensent que l’incompatibilité ABO diminue le risque de survenue d’une alloimmunisation Rhésus [8, 27]. L’hypothèse est que les anticorps anti-A ou anti-B détruiraient les globules rouges incompatibles avant que ces derniers 137 D. Wirthner et collaborateurs Tableau I Comparaison entre l’allo-immunisation anti-D et ABO. Comparison of anti-D and ABO alloimmunizations. Rhésus ABO Localisation des antigènes Erythrocytaire Erythrocytaire, tissulaire, sécrétions Si présence d’anticorps Tous atteints 90% d’atteintes infracliniques Évaluation prénatale Evolution du titre et anamnèse obstétricale Nihil Évolution obstétricale naturelle Premier enfant rarement atteint. Mort in utero fréquente. Maladie s’ aggravant avec chaque grossesse Premier enfant peut être atteint. Pas de mort in utero. Développement de la maladie non prévisible Anémie Modérée à sévère Absente ou modérée Bilirubinémie post-natale Montée rapide Nadir en 1-3 jours Prévention Anti-D Aucune puissent stimuler la production d’anti-D [28]. Cependant, une fois que la mère est immunisée, le status ABO de son enfant ne joue aucun rôle sur l’évolution de l’affection. Pour Bowman [29], il n’y a pas de modification de la réponse immunitaire secondaire et par conséquent, aucun effet sur la sévérité de la MHP. Du fait de la bénignité de l’affection, aucune précaution particulière n’est nécessaire dans le cadre de la grossesse. A la naissance, il faut surveiller chez l’enfant l’apparition d’un ictère qui sera traité selon les méthodes habituelles (photothérapie, exsanguino-transfusion dans les cas extrêmes). CLASSIFICATION DES ANTIGÈNES ÉRYTHROCYTAIRES (SYSTÈME ABO EXCLU) Les anticorps réguliers sont des anticorps observés constamment dans le sérum d’un sujet dépourvu de l’antigène correspondant. Les anticorps irréguliers sont des anticorps observés de manière inconstante chez les sujets dépourvus de l’antigène correspondant. Quatre sous-classes d’IgG ont été décrites: IgG1, IgG2, IgG3, et IgG4. Les immunoglobulines IgG1 et IgG 3 jouent un rôle prépondérant dans la destruction des globules rouges [30-32]. La détermination de la concentration de ces sous-classes permettrait de prédire la gravité de l’hémolyse [31, 32]. 138 Il existe trois modes d’immunisation [15] : — Le mode naturel concerne les antigènes présents non seulement sur les cellules sanguines humaines mais également sur d’autres cellules ou micro-organismes. La voie d’entrée des antigènes est surtout entérale. Les antigènes A, B, Lewis, et P1 correspondent à ce mode. — Le mode transfusionnel implique les antigènes exclusivement présents sur les globules rouges. Les plus immunogènes sont les antigènes D, c, E, C, e, K, Jka, Fya. — Le mode gravidique résulte d’échanges sanguins fœto-maternels survenant lors de la grossesse ou de l’accouchement. Les MHP non liées à des anticorps anti-D sont dans l’ensemble moins graves. Elles constituent un ensemble très hétérogène du fait du grand nombre d’antigènes en cause (tableau II). Plus de 250 antigènes de groupes sanguins ont été décrits. Cent quatre-vingt-quatorze ont été regroupés en 23 systèmes selon la nomenclature de la Société Internationale de Transfusion Sanguine. Les autres antigènes sont regroupés dans des séries et des collections. Les caractéristiques biochimiques et moléculaires de la plupart de ces antigènes ont été mises en évidence ou sont en passe de l’être. LE SYSTÈME RHÉSUS Le système Rhésus est à l’origine de la grande majorité des allo-immunisations fœto-maternelles. Ce système est encore mystérieux, malgré 40 ans de recherches intensives. Les antigènes du système Rhésus sont portés par des protéines de 30-32 kDa non glycolysées [33]. Deux de ces protéines possèdent des isoformes immunologiquement dissociables, nommées C, c et E, e. La protéine principale D ne possède pas d’isoforme correspondante. Le locus Rhésus, porté par le chromosome 1p34p36 [34], est formé par deux structures génétiques adjacentes désignées RhCcEe et RhD [35]. La majeure partie (96 %) de la portion codante des deux gènes est identique. Cette similarité semble indiquer une origine ancestrale commune. Le premier gène, RhCcEe, code les deux protéines antigéniques C/c et E/e. Le second gène RhD code le principal antigène RhD. Si ce dernier est absent sur les deux chromosomes, l’individu est Rh–. C’est donc l’absence ou la présence du gène RhD dans le génome qui détermine l’antigénicité D à la surface des hématies. © MASSON, Paris, 1998. FMC : revue générale • Maladie hémolytique périnatale Tableau II Système Rhésus Sévérité de la maladie hémolytique en fonction des antigènes concernés. Severity of the hemolytic disease according to the different antigens. Antigène Fréquence (race blanche) (%) Implication Sévérité de dans la la maladie maladie hémolytique hémolytique du nouveau-né D c E e C Ew Cw Cx Ce(f) Ce Ce s 85 80 30 98 70 <<1 <<1 <<1 <<1 <<1 <<1 oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui grave grave grave grave grave grave grave grave grave grave grave Kell K k Kpa Kpb Jsa Jsb Ku 9 99,8 2 99 <<1 >>99 99 oui oui oui oui oui oui oui grave grave bénigne bénigne modérée bénigne bénigne Duffy Fya Fyb Fy3 67 80 >>99 oui non oui grave modérée Kidd Jka Jkb Jk3 76 24 >>99 oui oui oui grave moyenne grave MNSs M N S s U 80 70 55 88 >>99 oui oui ? oui oui oui grave modérée grave grave grave P P1 P Tja 75 >>99 <<1 non non oui grave oui oui bénigne bénigne <<1 >>99 oui oui grave grave Luthéran Lua Lub Diego Dia Dib Colton Coa Cob Co aCo b 99,8 9 >>99 oui non oui bénigne ? Mia <<1 <<1 <<1 <<1 <<1 oui oui oui oui oui oui oui grave grave grave moyenne moyenne grave grave Autres antigènes Vw Mur Hil Hut Mta Mv 7 99,8 0,6 <<1 bénigne Cinq antisérums permettent de séparer cinq déterminants antigéniques; C, c, D, E, e. Certaines associations apparaissent plus fréquentes (tableau III). Les anticorps Rhésus le plus souvent impliqués dans une MHP, sont, dans l’ordre décroissant : les anti-D, J Gynecol Obstet Biol Reprod / Volume 27, n° 2, 1998 Tableau III Fréquence en pourcentage des phénotypes dans le système Rhésus (nomenclature selon FischerRace) [10]. Frequency of the different Rhesus phenotypes (after Fischer-Race) [10]. Combinaison DCe dce DcE Dce dCe dce DCE dCE* Caucasiens Noirs Orientaux 42 37 14 4 2 1 0 0 17 26 11 44 2 0 0 0 70 3 21 3 2 0 1 0 * Fréquence <<1%, mais phénotype décrit [3, 8, 10]. anti-E, anti-c, anti-C, anti-e. L’immunogénicité des antigènes varie suivant leur spécificité. L’anti-c est la cause la plus fréquente des maladies hémolytiques non A, B ou D. Une étude datant de 1977 décrit 63 femmes porteuses d’un anti-c dès leur premier contrôle de grossesse. Quarante-deux (77 %) nouveau-nés avaient l’antigène correspondant. Parmi eux, 32 présentaient un test de Coombs direct positif et 9 (12 %) une anémie sévère ayant nécessité une exsanguino-transfusion. Deux enfants sont décédés et 2 avaient des lésions cérébrales irréversibles [36]. L’atteinte est moins grave lors d’allo-immunisation avec anti-E, anti-C ou anti-e. Ces derniers sont souvent associés à d’autres anticorps appartenant préférentiellement au système Rhésus. Quelques cas d’hémolyse majeure sur allo-immunisation anti-C ont été décrits dans la littérature [37]. Les décès sur allo-immunisation anti-C, ou Ce sont extrêmement rares (4 à 5 cas décrits en 50 ans [37]). En résumé, les anticorps Rhésus anti-D, anti-c, présentent un risque d’hémolyse majeur [38, 39], les anticorps Rhésus anti-E, anti-C, anti-e, anti-Ew, antiCw, anti-Cx, un risque d’hémolyse limité [15]. Les variations dues au polymorphisme — Le phénotype Du. Différentes expressions de l’antigène D sont rassemblées sous le terme de « Du ». Les hématies ne sont pas agglutinées par les anti-D en test de routine. Elles sont beaucoup mieux détectées par des techniques plus sensibles telles que le test de Coombs indirect. La fréquence de l’antigène Du chez les Caucasiens s’élève à 1 % et il est plus fréquemment associé avec les antigènes C ou E. Les sujets possédant l’antigène Du doivent être considérés comme Rh+. Les antigènes Du sont peu immunogènes, mais il faut les rechercher afin 139 D. Wirthner et collaborateurs de ne pas prescrire une prophylaxie anti-D chez les patientes Du positives. — Les variants de C. L’antigène Cw est reconnu par un anticorps spécifique et est présent chez 0,5 % de la population caucasienne. L’antigène Cx, comparable à l’antigène Cw, est retrouvé chez 0,05 % de la population caucasienne. — Les variants de E et de e. Les plus connus sont Ew, ET, et un antigène Eu similaire au Du. Les variants de e sont nombreux et surtout présents dans la population noire. Tableau IV Fréquence de la répartition des antigènes K et k. Frequency of antigens. Phénotype K k Caucasiens Noirs + – + – + + 0,2 91 8,8 <0,1 96,5 3,5 Tableau V Devenir des nouveau-nés lors d’alloimmunisation anti-Kell dans 4 études [46]. Outcome of newborns in case of anti-Kell alloim munization in four studies. Études LE SYSTÈME KELL L’importance du système Kell est due à l’antigène K qui possède un fort pouvoir immunogène. Il figure parmi les antigènes les plus immunogènes après l’antigène D [40, 41]. La découverte du premier antigène date de 1946. Il a été mis en évidence par un anticorps trouvé dans le sérum de Mme Kellacher et qui réagissait avec les globules rouges de son nouveau-né, de sa fille aînée, de son mari et d’environ 7 à 9 % de la population (90 % de la population caucasienne est Kell négatif) (tableau IV). Son antigène antithétique, appelé k, a lui été découvert par Levine en 1949. Le système Kell n’est pas seulement limité à ces deux antigènes; en fait c’est un système complexe dont la structure moléculaire a été décrite récemment [42]. Les antigènes Kell se trouvent exclusivement sur la membrane des globules rouges. Les antigènes K sont présents sur les hématies fœtales dès la 10e semaine d’aménorrhée (SA), les antigènes k dès la 7e [10]. La majorité des femmes ayant développé un anti-K ont été immunisées par transfusion [43, 44]. La prévention consiste à transfuser exclusivement du sang K négatif chez la jeune femme. Les anticorps appartiennent pour la plupart à la classe des IgG. Le suivi des grossesses avec allo-immunisation anti-K est sujet à discussion. En effet certains auteurs ont décrit des atteintes gravissimes de l’enfant alors que le résultat de l’amniocentèse était rassurant peu de temps avant la naissance [40, 45-47] (tableau V). Il semble que l’altération de l’érythropoïèse est le mécanisme principal lors de ces allo-immunisations [48]. La courbe de Liley [49] doit donc être utilisée avec réserve dans ces situations [47, 50] et le prélèvement de sang fœtal est la méthode de choix pour contrôler le bien-être fœtal. 140 Fréquence en % Pepprell et al. (1977) Caine et MüllerHeubach (1986) Farr et Gray (1988) Leggat et Gibson (1991) Enfants atteints Morts in utero Morts Survivants néo-natales 6 1 2 3 13 3 1 9 9 8 1 0 16 0 0 16 LE SYSTÈME KIDD Le système Kidd est un modèle simple représenté par deux antigènes antithétiques: Jka et Jkb. L’antigène Jka a été défini pour la première fois par un anticorps découvert à la suite d’une MHP dans le sérum de Mme Kidd. L’antigène Jkb a été mis en évidence deux ans plus tard. Le phénotype Jk(a–b–) est très rare et ces sujets peuvent produire un anti-Jk3 qui réagit avec les hématies Jk(a+) ou/et Jk(b+). L’anti-Jka est un anticorps dangereux, souvent impliqué dans des hémolyses post-transfusionnelles retardées [51]. De plus, il est souvent difficile à identifier. Il est labile in vivo : un titre élevé d’anticorps peut rapidement décroître pour ne plus être décelable quelques semaines plus tard. Il est souvent « faible » et se trouve en combinaison avec d’autres anticorps. L’anti-Jka est plus fréquent que l’anti-Jkb. Les deux anticorps sont de classe IgG (IgG3), bien que des IgM aient été décrites. Ces deux anticorps peuvent apparaître dans le cadre d’une incompatibilité fœto-maternelle ou à la suite de transfusions sanguines. Les anticorps anti-Jka et Jkb sont responsables de MHP sévères [52]. L’antiJk3 est, exceptionnellement, responsable d’une MHP modérée (3 cas décrits) [45]. © MASSON, Paris, 1998. FMC : revue générale • Maladie hémolytique périnatale LE SYSTÈME DUFFY Le système Duffy doit son nom à un hémophile polytransfusé nommé Duffy, chez qui en 1950, a été mis en évidence un anti-Fya. L’antigène antithétique Fyb a été découvert une année plus tard. D’autres antigènes ont été numérotés selon leur ordre chronologique de découverte : Fy3, Fy4, Fy5, et Fy6. Le phénotype silencieux Fy(a–b–) est observé avec une très grande fréquence dans la population noire alors qu’il est exceptionnel chez les Caucasiens. Plasmo dium knowlesi et Plasmodium vivax ne peuvent pénétrer les globules rouges Fy(a–b–). Les antigènes Fya sont immunogènes. L’anti-Fya est responsable à la fois de MHP et de réactions hémolytiques post-transfusionnelles. L’anti-Fyb est plus rare et est souvent associé à d’autres anticorps. Il n’y a aucun cas décrit d’allo-immunisation anti-Fyb à ce jour [45]. Deux cas d’anti-Fy3 ont été identifiés lors de maladies modérées du nouveau-né. LE SYSTÈME LUTHÉRAN Le système Luthéran a été mis en évidence pour la première fois en 1945 à l’occasion de la découverte d’un anti-Lu a chez un homme présentant un lupus érythémateux disséminé et ayant bénéficié d’une transfusion de sang possédant l’antigène correspondant. Le système Luthéran est composé de plusieurs antigènes, les plus importants étant les Lua et Lub. Il existe également un phénotype silencieux qui est rare. Il peut être soit de type récessif, soit de type dominant, soit lié au sexe. L’antigène Lua est présent chez 7% des individus. L’antigène Lub, plus fréquent est présent chez 99,5 % des individus [8]. Les deux antigènes ne sont pas totalement développés à la naissance. Les anticorps sont rares. On les trouve souvent à des titres faibles [8]. Cependant, on peut observer une diminution de la durée de vie des globules rouges incompatibles et une MHP. Même si l’anticorps est présent, le titre est généralement bas, ce qui indique que les antigènes ne sont pas fortement immunogènes. L’anti-Lua est le plus courant. L’anti-Lub est rarement observé, puisque la majorité de la population est Lub+. Ces anticorps peuvent appartenir aux trois classes d’IgG (souvent IgG4) [10], aux IgA ou aux IgM et peuvent occasionner des MHP modérées [53]. J Gynecol Obstet Biol Reprod / Volume 27, n° 2, 1998 LE SYSTÈME MNSs A la suite de la découverte du système ABO, Levine et Landsteiner ont immunisé des lapins avec du sang humain à la recherche de nouveaux antigènes. Les anticorps mis en évidence lors de ces expériences ont été appelés anti-M et anti-N et furent décrits en 1927. En 1947, Walsh et Montgomery découvrent l’antigène S étroitement lié à MN sur une même paire de chromosomes. Son antigène antithétique a été trouvé en 1951. Le système est nommé MNSs. En 1953, un antigène de haute fréquence U a été inclus dans ce système car il est toujours présent en l’absence des antigènes S et s. Ces antigènes sont présents sur les globules rouges fœtaux dès la 9e semaine pour MN et la 12e pour Ss [10]. Ils sont immunogènes [54, 55] et 50 à 80 % des anti-M sont des IgG; une allo-immunisation sévère peut survenir et des cas de mort in utero ont été rapportés [45]. Un seul cas de MHP de gravité moyenne liée à un anti-N a été décrit [45]. Les anti-S peuvent être responsables d’une hémolyse faible et les anti-s peuvent entraîner des anémies de degrés variables. L’antigène U est un antigène public mais peut faire défaut chez 1 % des noirs. Ceux-ci peuvent alors développer des anticorps spécifiques entraînant une MHP. LE SYSTÈME P Le système P a été découvert en 1927 par Landsteiner et Levine après immunisation de lapins par des globules rouges humains. Les anticorps découverts ont été appelés anti-P. Depuis, d’autres phénotypes ont été découverts, ce qui porte à 5 leur nombre total. P1 et P2 représentent la quasi-totalité de la population. Les 3 autres antigènes sont exceptionnels. Ces antigènes sont incomplètement développés à la naissance. Les anticorps anti-P1 des patientes P2 sont naturels (IgM) et ne sont pas à l’origine de MHP. Les sujets pk possèdent des anticorps réguliers anti-P, qui eux non plus, n’entraînent pas d’hémolyse. Le phénotype p est présent chez 0,0005 % des Caucasiens et correspond à l’absence d’antigène P1, P, Pk. En 1951, Levine décrivait chez madame Jay la présence d’un anticorps qui agglutinait plus de 3 000 échantillons de sang, à l’exception de celui de sa sœur. Il appela cet anticorps anti-Tja [56]. En 1955, Sanger relie cet anticorps au système P et démontre l’absence des antigènes précédemment cités. Ces anticorps (anti-PP1pk ou anti-Tja), de 141 D. Wirthner et collaborateurs type IgG ou IgM, sont à l’origine de redoutables accidents transfusionnels, d’abortus à répétition [45], et de MHP. Seuls 5 cas ont été décrits avec précision dans la littérature à ce jour [56, 57]. RÉFÉRENCES 1. Grannum PA, Copel J. Prevention of isoimmunization and treatment of the compromised fetus. Semin Perinatol 1988;12:324-35. 2. Daffos F, Forestier F. Maladies immunologiques. In : Médecine et biologie du fœtus humain.Paris, Maloine, 1993:24152. 3. Branch DW, Scott JR. Isoimmunization in pregnancy. In : Gabbe S, Niebyl J, Simpson J, eds.Obstetrics. Normal and Problem Pregnancies. New York, Churchill Livingston, 1986:793-817. 4. Bennett PR, Le Van Kim C, Colin Y, Warwick RM, Path FR, Chérif-Zahar B et al. Prenatal determination of fetal Rh type by DNA amplification. N Engl J Med 1993;329:607-10. 5. Bowman JM. Haemolytic disease of the newborn. In : Bowman JM, ed. Baillère’s clinical Immunology and allergy. London, Baillère Tindall, 1987:391-425. 6. 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