Le Cid, Pierre Corneille, 2007 Acte I, scène 4, Monologue de Don

Transcription

Le Cid, Pierre Corneille, 2007 Acte I, scène 4, Monologue de Don
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Le Cid, Pierre Corneille, 2007
Acte I, scène 4,
Monologue de Don Diègue après l'insulte du Comte
Situation du passage : Scène avant : Don Diègue a été désigné au poste de
gouverneur du Prince. Le Comte Gomès, déçu de ne pas avoir été préféré au
vieil homme, invective Don Diègue. Un duel est prêt à être engagé quand Don
Diègue, trop âgé pour se battre, abandonne la confrontation.
Scène IV
Le vieillard défait se lamente de sa décadence, et regrette amèrement sa
jeunesse et ses victoires passées.
Ô rage ! Ô désespoir ! Ô vieillesse ennemie !
N'ai-je donc tant vécu que pour cette infamie ?
Et ne suis-je blanchi dans les travaux guerriers
Que pour voir en un jour flétrir tant de lauriers ?
Mon bras, qu'avec respect toute l'Espagne admire,
Mon bras, qui tant de fois a sauvé cet empire,
Tant de fois affermi le trône de son roi,
Trahit donc ma querelle, et ne fait rien pour moi ?
Ô cruel souvenir de ma gloire passée !
Œuvre de tant de jours en un jour effacée !
Nouvelle dignité, fatale à mon bonheur !
Précipice élevé d'où tombe mon honneur !
Faut-il de votre éclat voir triompher le Comte,
Et mourir sans vengeance, ou vivre dans la honte ?
Le Cid, Pierre Corneille, 2007
Acte 4, Scène 3
Don Rodrigue
Situation du passage : Rodrigue vient de se couvrir de gloire : envoyé par son
père au combat, il a arrêté les
Maures qui menaçaient la ville. Il a été nommé « Cid » et il est reçu en triomphe
à la cour. Auprès du roi, il fait le récit de la bataille.
Sous moi donc cette troupe s'avance,
Et porte sur le front une mâle assurance.
Nous partîmes cinq cents ; mais par un prompt renfort
Nous nous vîmes trois mille en arrivant au port,
Tant, à nous voir marcher avec un tel visage,
Les plus épouvantés reprenaient de courage !
J'en cache les deux tiers, aussitôt qu'arrivés,
Dans le fond des vaisseaux qui lors furent trouvés ;
Le reste, dont le nombre augmentait à toute heure,
Brûlant d'impatience, autour de moi demeure,
Se couche contre terre, et sans faire aucun bruit
Passe une bonne part d'une si belle nuit.
Par mon commandement la garde en fait de même,
Et se tenant cachée, aide à mon stratagème ;
Et je feins hardiment d'avoir reçu de vous
L'ordre qu'on me voit suivre et que je donne à tous.
L'Avare, Molière, 1668,
Acte IV, scène 7- Le monologue d'Harpagon
Apprendre à deux le texte.
Situation du passage :
Harpagon vient de s’apercevoir que sa cassette d’argent a
été volée. Il entre sur scène et se lance dans un monologue désespéré. (Dans la
scène qui précède, La Flèche montre à son maitre Cléante ( le fils d’Harpagon) la
précieuse cassette qui contient le trésor d’Harpagon, qu’il vient de lui voler.)
- Au voleur ! au voleur ! à l'assassin ! au meurtrier ! Justice, juste Ciel !
je suis perdu, je suis assassiné, on m'a coupé la gorge, on m'a dérobé
mon argent. Qui peut-ce être ? Qu'est-il devenu ? Où est-il ? Où se
cache-t-il ? Que ferai-je pour le trouver ? Où courir ? Où ne pas courir
? N'est-il point là ? N'est-il point ici ? Qui est-ce ? Arrête. Rends-moi
mon argent, coquin... (Il se prend lui-même par le bras.) Ah ! c'est moi.
Mon esprit est troublé, et j'ignore où je suis, qui je suis, et ce que je
fais. Hélas ! mon pauvre argent, mon pauvre argent, mon cher ami ! on
m'a privé de toi ; et puisque tu m'es enlevé, j'ai perdu mon support, ma
consolation, ma joie ; tout est fini pour moi, et je n'ai plus que faire au
monde : sans toi, il m'est impossible de vivre. C'en est fait, je n'en puis
plus ; je me meurs, je suis mort, je suis enterré.
N'y a-t-il personne qui veuille me ressusciter, en me rendant mon cher
argent, ou en m'apprenant qui l'a pris ? Euh ? que dites-vous ? Ce n'est
personne. Il faut, qui que ce soit qui ait fait le coup, qu'avec beaucoup
de soin on ait épié l'heure ; et l'on a choisi justement le temps que je
parlais à mon traître de fils. Sortons. Je veux aller quérir la justice, et
faire donner la question à toute la maison : à servantes, à valets, à fils,
à fille, et à moi aussi. Que de gens assemblés ! Je ne jette mes regards
sur personne qui ne me donne des soupçons, et tout me semble mon
voleur. Eh ! de quoi est-ce qu'on parle là ? De celui qui m'a dérobé ?
Quel bruit fait-on là-haut ? Est-ce mon voleur qui y est ? De grâce, si
l'on sait des nouvelles de mon voleur, je supplie que l'on m'en dise.
N'est-il point caché là parmi vous ? Ils me regardent tous, et se
mettent à rire. Vous verrez qu'ils ont part sans doute au vol que l'on
m'a fait. Allons vite, des commissaires, des archers, des prévôts, des
juges, des gênes, des potences et des bourreaux. je veux faire pendre
tout le monde ; et si je ne retrouve mon argent, je me pendrai moimême après.
Cyrano de Bergerac d'Edmond Rostand
monologue de Cyrano (apprendre à 3)
Situation du passage : Provoqué par le vicomte de Valvert qui se moque de son nez proéminent, Cyrano se lance d'abord dans cette tirade : il montre à Valvert par 20
exemples successifs que l'affront qui lui a été fait manquait d'esprit et qu'on aurait pu le formuler de bien d'autres manières, et avec davantage de talent :À l'issue de la
tirade, Valvert ne parvient à répondre que par de piètres insultes, le traitant de « Maraud, faquin, butor de pied plat ridicule » puis de « bouffon » et enfin de « poète ». Un
duel à l'épée s'ensuit, au cours duquel Cyrano improvise une ballade qu'il conclut par un envoi tout en blessant son adversaire avec son épée, mettant ainsi fin au duel et
achevant de ridiculiser son provocateur.
Ah ! non ! c'est un peu court, jeune homme !
Appelle Hippocampelephantocamelos
On pouvait dire... Oh! Dieu!... bien des choses en somme.
Dut avoir sous le front tant de chair sur tant d'os !
En variant le ton,-par exemple, tenez:
Emphatique: Aucun vent ne peut, nez magistral,
Agressif: Moi, Monsieur, si j'avais un tel nez,
T'enrhumer tout entier, excepté le mistral !
Il faudrait sur-le-champ que je me l'amputasse !
Dramatique :C'est la Mer Rouge quand il saigne !
Amical: Mais il doit tremper dans votre tasse !
Admiratif: Pour un parfumeur, quelle enseigne !
Pour boire, faites-vous fabriquer un hanap!
Lyrique:Est-ce une conque,êtes-vous un triton ?
Descriptif: C'est un roc ! . .. c'est un pic ! . . . c'est un cap !
Naïf: Ce monument, quand le visite-t-on ?
Que dis-je, c'est un cap ?. .. C'est une péninsule !
Pratique: Voulez-vous le mettre en loterie ?
Curieux: De quoi sert cette oblongue capsule ?
Assurément, Monsieur, ce sera le gros lot !
D'écritoire, Monsieur, ou de boite à ciseaux ?
Gracieux: Aimez-vous à ce point les oiseaux
- Voilà ce qu'à peu près, mon cher, vous m'auriez dit
Que paternellement vous vous préoccupâtes
Si vous aviez un peu de lettres et d'esprit :
De tendre ce perchoir à leurs petites pattes ?
Mais d'esprit, ô le plus lamentable des êtres,
Truculent: Ça, Monsieur, lorsque vous pétunez,
Vous n'en eûtes jamais un atome, et de lettres
La vapeur du tabac vous sort-elle du nez
Vous n'avez que les trois qui forment le mot:sot
Sans qu'un voisin ne crie au feu de cheminée ?
Eussiez-vous eu, d'ailleurs, l'invention qu'il faut
Prévenant: Gardez-vous, votre tête entrainée
Pour pouvoir là, devant ces nobles galeries,
Par ce poids, de tomber en avant sur le sol !
Me servir toutes ces folles plaisanteries,
Que vous n'en eussiez pas articulé le quart
De la moitié du commencement d'une, car
Tendre: Faites-lui faire un petit parasol
De peur que sa couleur au soleil ne se fane !
Pédant: L'animal seul, Monsieur, qu'Aristophane
Je me les sers moi-même, avec assez de verve
Mais je ne permets pas qu'un autre me les serve.
Hamlet (La Tragique Histoire d'Hamlet, prince de Danemark ) 1601
William Shakespeare
(Acte III, scène 1)
Situation du passage : Le spectre de son père est apparu à Hamlet, lui révélant qu'il fut
non pas victime d'un accident mais assassiné par son frère, le nouveau roi, afin
d'épouser la reine. Cette révélation bouleverse Hamlet, et au chagrin succède la haine
du genre humain. Ruminant son désespoir, Hamlet songe au suicide mais il sait que la peur
de la mort pousse chacun à endurer les vicissitudes de l'existence. Reste pourtant la
vengeance…
Être ou bien n'être pas, voilà la question.
Est-il plus noble en notre for de supporter
Les traits dont nous meurtrit l'outrageuse Fortune,
Ou bien de s'insurger contre une mer d'ennuis
De lutter et d'en triompher ? Mourir, dormir,
Pas davantage, et, par un sommeil mettre fin
Aux maux du cœur, aux mille atteintes naturelles,
Le lot de toute chair, c'est là un dénouement
À souhaiter de tout son cœur. Mourir, dormir,
Dormir ; rêver peut-être: oui, c'est là qu'est le hic ;
En ce dernier sommeil quels rêves l'on peut faire,
Lorsqu'on s'est échappé de l'humaine bagarre,
Voilà qui doit nous faire hésiter: c'est le doute
Qui fait que l'infortune a si longue la vie.