Le Petit Lord / Shôkôshi Ceddy / 小公子セディ
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Le Petit Lord / Shôkôshi Ceddy / 小公子セディ
Le Petit Lord / Shôkôshi Ceddy / 小公子セディ Nippon Animation - 1988 © Nippon Animation Parmi les grands classiques de la littérature jeunesse occidentale, le studio japonais Nippon Animation adapta en une magnifique collection plusieurs chefs-d’œuvre du genre sous la forme de séries télévisées d'animation. Parmi ceux-ci, il y eu Le Petit Lord Fauntleroy / Little Lord Fauntleroy. Ce roman écrit en 1886 par Frances Hodgson Burnett (1849-1934), le premier de l'auteure – 19 ans avant qu'elle ne signe La Petite Princesse / A Little Princess adapté également par le studio Nippon Animation en Princesse Sarah / Shôkôjo Sêra –, se situe autour de cette date, voir quelque peu avant, alors que les scénaristes japonais transposèrent son récit précisémment en 1890, la pierre tombale du père de Cédric l’attestant, et le décors le soulignant notamment avec les paysages où apparaît la Statue de la Liberté, celle-ci ayant été inaugurée quatre ans plus tôt en 1886. Le monument n'est pas évoqué dans le roman, mais tout comme dans la série d'animation du studio Nippon Animation qui s'en inspira peut-être, il est la première chose que l'on voit dans le téléfilm de Jack Gold mettant en vedette Ricky Schroder dans le rôle du petit lord, en 1980, métrage télévisé adaptant fidèlement l'ouvrage (à ne pas confondre avec la série de la BBC de Paul Annett diffusée en France en 1977 dans Les Visiteurs de Noël). De même, tout comme le récit, les illustrations de Reginald Bathurst Birch dans la première édition du roman ne dévoilent rien de l'architecture de New York, au contraire de cette série d'animation qui souligne quelques autres aspects encore de la ville, notamment le pont de Brooklyn, et là encore comme dans le téléfilm de Jack Gold dont le générique fait de dessins s'attarde sur les rues et les bâtiments de cette grande cité. Parmi les quelques libertés d'adaptations agréables à découvrir en cette série, on notera lors des premiers épisodes, la présence du père de Cédric auprès de sa femme et de leur enfant, alors qu'il est mort dès le début dans le roman, quand son fils avait 5 ans. La création de ce personnage encore vivant – de même que celui de son lieu de travail et de ce qui en découle – apporte une atmosphère de vie familiale touchante qui, même si elle est évoquée dans le roman de par quelques souvenirs que conserve Cédric de son père, permet pour la série une entrée plus en douceur dans cette histoire et d'autant plus poignante lors du fatidique événement. A la différence, le roman présente la réelle condition du petit lord et la perspective de sa nouvelle vie seulement après quelques pages, dès le deuxième chapitre et ce, sans une première excursion en Angleterre. Le jeune garçon est ainsi légèrement mieux préparé dans la série d'animation à l'intrusion de son grand-père et de son univers dans sa vie, alors que cela arrive plus abruptement dans l'oeuvre originale. Cela permet également au téléspectateur d'avoir vécu un temps comme Cédric, avec ses amis qui sont plus que très légèrement évoqués sous la plume de l'écrivain, excepté Mr Hobbes, l'épicier, dont le caractère est conservé, ainsi que Dick, le cireur de chaussures (évidemment, de par leur importance, on retrouve ces deux personnages dans toutes les adaptations). Parmi quelques autres différences, dans la série, la mère de Cédric oppose une certaine réticence quant à devoir quitter l'Amérique pour l'Angleterre et ce que cela comporte, alors que dans le roman, elle décide très rapidement de se plier à la demande. Les scénaristes appuient de fait un peu plus sur les sentiments qui traversent le personnage en sa légère indécision, cela pour encore colorer l'aspect dramatique de l'histoire. Toutes ces modifications n'altèrent en rien la nature du récit original, tout au contraire, il lui octroie une plus profonde sensibilité, non pas que le roman en soit dépourvu, mais ce dernier joue quelque peu sur une légère rigidité dans sa narration, là où la série offre une souplesse d'écriture mise en application sur nombre d'autres séries de ce genre, et particulièrement de cette collection propre à la programmation des chefs-d’œuvre de la littérature produits par le studio Nippon Animation. Comme pour de nombreuses adaptations de romans relativement courts comme celui-ci, la création de personnages apportant de nouvelles lignes au scénario permet de donner un rythme de narration que l'on retrouve en chaque épisode, ce qui ne serait pas nécessairement le cas si l’adaptation restait très fidèle au texte d'origine. Une adaptation est de fait un autre support qui se doit d'adapter à celuici une histoire conçue dans une toute autre forme, et il est donc naturel selon la manière que fut écrit le roman et ce dont la manière que l'on le porte à l'écran, qu'il faille soit suivre à la lettre le texte ou lui ajouter quelques nouveaux éléments. Ainsi encore dans la série, si l'on voit très souvent la mère de Cédric apporter son aide aux personnes vivant sur le domaine du comte, dans le roman cela ne tient qu'en quelques évocations dont celles concernant les maisons de l'Impasse, cet aspect du scénario permettant encore de broder de nombreux fils narratifs tout en les rattachant à d'autres. De même, si dans la série Cédric se fait plusieurs jeunes amis dès son arrivée au domaine du comte, dans le roman il n'en est rien : pas de Colline, ni de Brigitte, ces deux jeunes enfants et quelques autres personnages inédits apportant un plus dans l'élaboration du scénario quant aux divers liens affectifs que tissent Cédric dans sa nouvelle vie. Ces personnages amènent encore quelques nouvelles actions enrichissant l'histoire, comme la fête qui s'en suit après les rénovations des maisons de l'Impasse, fête absente donc du roman, tout comme les méfaits de Newick introduisant dans la série une petite intrigue rocambolesque. Quant à la personnalité du comte, bien qu'elle soit traitée de manière égale dans la série comme dans le roman, en ce dernier celui-ci est un peu moins noble de pensée et les scénaristes japonais, au contraire de l'original sachant plus ou moins, ou ne s'en souciant pas, dans quelle situation se trouvent les maisons délabrées sur son domaine, lui donneront l'occasion d'être quelque peu innocent sur ce point en mettant toute la responsabilité de cela sur Newick. © Nippon Animation Le thème musical omniprésent au début de la série, quand l'action se déroule à New York, est Annie Laurie, une chanson traditionnelle écossaise qui est absente du roman (le jeune Cédric ne joue pas de la flûte, ni d'aucun autre instrument). Les scénaristes ont mêlé cette chanson à la série au travers de la rencontre entre les parents de Cédric, James et Annie (on ne connaît pas le prénom de cette dernière dans le roman si ce n'est que Cédric la nomme Chérie comme son père, ce que l'adaptation cinématographique de 1936 conservera). Ce choix de mêler cette composition au récit du petit lord, sous la forme en quelque sorte d'un hymne familial, renforce la dramaturgie de l'ensemble et appuie les diverses émotions ressenties par le jeune enfant. Celui-ci l'a joue ainsi à la flûte traversière au fil des premiers épisodes, ses parents l'aimant à l'entendre l'interpréter, et la composition est également insérée dans la bande son dans une version à plusieurs cordes faisant de celle-ci le thème principal du premier arc de la série. Il en fut notamment de même pour la série Cathy la petite fermière / Makiba no Shôjo Katri (1984) faisant partie de la même collection d'adaptations du studio Nippon Animation, et dont le récit était tout le long de sa narration brodé sur la composition Finlandia de Sibelius, oeuvre marquant l'indépendance de la Finlande comme les quelques événements et références historiques et culturelles qui sont parsemées au fil des aventures de la petite fermière et qui, là également, est le fait des scénaristes japonais. Cette autre magnifique série était une adaptation du roman Paimen, piika ja emäntä de Auni Nuolivaara, premier volume d'une histoire qui allait voir ensuite son héroine devenir adulte, un peu à la manière de Anne... la maison aux pignons verts / Anne of Green Gables de Lucy Maud Montgomery, dont la jeunesse de ladite Anne, Shirley de son nom, fut également adaptée par Nippon Animation en 1979 sous le titre Anne aux cheveux roux / Akage no Anne, avec à sa réalisation l'un des maitres de l'animation, Takahata Isao. On remarquera encore que la chanson d'Annie Laurie est présente dans le film Le Lys de Brooklyn / A Tree Grows in Brooklyn (1945), première réalisation cinématographique du metteur en scène Elia Kazan adaptant le roman éponyme de Betty Smith, cette oeuvre se situant dans le même arrondissement où vit Cédric. Annie Laurie y est chantée par un père de famille quelque peu perdu dans ses illusions et parfois l'alcool et qui, tant bien que mal, de par sa fluctuante activité semiartistique – il est serveur-chanteur –, tente de subvenir aux besoins de sa femme et de ses enfants, s'en y parvenir... Il viendra a décéder alors que son épouse est enceinte... La chanson, dans un tel contexte et dans celui du Petit Lord, marque par sa mélancolie l'atmosphère qui sera liée à la perte d'un être aimé et ce qui survivra de cela. On remarquera encore que le générique du Lys de Brooklyn est composé de dessins représentant Brooklyn comme celui de l'adaptation du Petit Lord de Jack Gold et que ces deux métrages débutent par une scène de rue relativement similaire... On notera également que l'adaptation cinématographique de 1936, celle produite par David O Selznick avec le jeune Freddie Bartholomew dans le rôle de Cédric, empruntait également à la culture musicale écossaise puisque l'on pouvait y entendre, lors de l'au revoir à Mr Hobbes, la célèbre composition traditionnelle Ce n'est qu'un au revoir / Auld Lang Syne. Les scénaristes japonais semblent – du moins pouvons-nous le supposer – avoir repris un petit élément de cette adaptation ne se trouvant pas dans le roman, à savoir que la maman de Cédric, pour le rassurer alors qu'il va vivre près de son grand-père, lui dit qu'elle laissera une bougie près de la fenêtre de la Loge visible du château, lumière attestant de sa présence près de son enfant. Parmi encore les premières adaptations, celle de 1921 voyait la célèbre Mary Pickford interpréter à la fois Cédric en un jeune garçon plus nerveux quant à son homologue sur papier, mais aussi la mère de celui-ci (le film est techniquement irréprochable en matière de trucage de l'image), cela dans une adaptation relativement fidèle, mais prenant quelques libertés quant à certaines situations et l’absence de quelques autres. On notera également que « la petite fiancée de l'Amérique », comme elle fut surnommée, joua le rôle de trois autres personnages dont la Nippon Animation – dans cette collection des grands classiques de la littérature jeunesse occidentale dont faisait partie Le Petit Lord – adapta les romans où ils figuraient, ceux-ci étant Pollyanna (Pollyanna de Eleanor H. Porter), Sarah Crew (Princesse Sarah / A Little Princess de Frances Hodgson Burnett), et Judy Abbot (Papa Longues Jambes / Daddy-Long-Legs de Jean Webster). Jacques Romero, décembre 2012