Discours de Manuel Valls aux 10e Assises de l`économie de la mer

Transcription

Discours de Manuel Valls aux 10e Assises de l`économie de la mer
Discours de Manuel Valls aux 10e Assises de l’économie de la mer
à Nantes le 2 décembre 2014
… Monsieur le Ministre, Messieurs les Ministres, Monsieur le Préfet, Monsieur le Secrétaire
général à la Mer, Madame, la Maire, Monsieur le président du Conseil régional. Monsieur
le Président du Conseil régional. Mesdames et Messieurs les parlementaires et les élus.
Monsieur le Président. Mesdames et Messieurs. La mer, c’est une grande histoire faite de
conquêtes, de découvertes, de défis face aux éléments, et c’est en effet un univers
fascinant, qui renvoie souvent l’homme à sa condition d’homme, à sa finitude, ce sont
des océans d’inspirations, on en parlait d’ailleurs juste avant, pour les aventuriers, les
poètes, qui ont toujours su parler de la mer, déchaînée ou apaisée, les romanciers, et si
vous nous avions le temps, mais hélas, je ne suis pas venu pour cela, en tout cas, vous
ne m’attendez pas sur ce sujet-là, nous pourrions parler pendant des heures de ce qu’a
été pour beaucoup d’entre nous « 20.000 lieux sous la mer », ou la découverte des films
de COUSTEAU, et d’ailleurs, j’ai fait la rencontre tout à l’heure de Jacques ROUGERIE et
de la passion qui l’habite pour son projet SeaOrbiter, et il faut que nous soyons
évidemment attentifs à compléter les financements, parce que nous avons besoin, j’en
dirais un mot bien sûr, de la recherche, où nous pourrions pu évoquer, parce que c’est
dans ces moments-là que la France s’aperçoit qu’elle est une Nation maritime grâce aux
exploits de nos grands navigateurs qui sont peut-être les héros de nos temps modernes.
Et nous pensons bien sûr au dernier exploit de Loïck PEYRON.
La mer, c’est un domaine sur lequel la France a longtemps régné, mais je veux le
dire devant vous, même s’il n’y a pas la mer à Evry, mais je suis né, moi, auprès de la
mer, mais pas en France, à Barcelone, dans cette Méditerranée qui nous a nourris, sa
civilisation, l’ambition maritime de la France n’appartient pas au passé. Vous avez
évoqué il y un instant ces générations, l’histoire, mais vous avez aussi – et à juste titre –
évoqué la force économique que cela représente, en termes d’emplois, 300.000 directs,
mais également le poids dans le domaine des exportations. Donc oui, l’ambition maritime
de la France est notre avenir. La France est toujours une grande Nation de la mer, et une
grande puissance maritime, une grande Nation, car présente sur tous les océans,
responsable d’immenses espaces marins, avec ses Outremers, c’est le deuxième
territoire maritime mondial. Et nous rayonnons ainsi dans le monde sur tous les
continents, et je n’oublie pas bien sûr la place qui est celle de notre marine nationale,
grande puissance également par sa place dans les transports maritimes, dans la
construction navale, civile et militaire, dans la pêche hauturière, dans le secteur des
énergies offshores, ou encore dans l’industrie touristique, et nous l’avons aussi évoqué,
et je veux penser aux fleurons de l’industrie nautique.
La mer, c’est aussi un monde qui a ses usages, où on ne se ment pas et on se
parle franchement et directement, et nous le savons, les marins sont souvent des gens
de peu de mots, alors droit au but, avoir un langage de vérité, cela me va bien.
Je serai donc direct, en matière maritime, la France doit savoir non seulement
conserver son rang, mais mieux encore, affirmer ses positions, établir une politique
maritime, c’est notamment le but de ces Assises, qui, depuis dix ans, mettent en
présence tous les acteurs économiques et politiques, merci à vous donc, cher Francis
VALLAT, pour la tenue de ces Assises, que le Cluster Maritime organise avec Le Marin.
Vous pouvez être fier du travail accompli depuis tant d’années, et je sais la
reconnaissance qui s’exprime à l’égard du travail qui a été le vôtre, et je souhaite bon
vent à votre successeur, Frédéric MONCANY de SAINT-AIGNAN. Je veux d’ailleurs
remercier tous ceux qui ont permis l’organisation, une nouvelle fois, de ce rendez-vous
Ouest France, Le Marin, je l’ai dit, Les Echos, mais aussi les collectivités territoriales qui
vous accueillent.
1
Ma présence aujourd’hui, parmi vous, a pour objectif de réaffirmer l’ambition de la
France, l’ambition pour la mer, pour ses activités et son industrie maritime, pour la
recherche, et pour être présent aux grands rendez-vous de la croissance bleue, on
l’évoquait, on a beaucoup parlé ces derniers jours de la croissance verte, mais la
croissance bleue est tout aussi prioritaire.
Je veux commencer par une première conviction, il n’y a pas de grande Nation
maritime sans marine marchande, et la France peut être fière de sa position au niveau
mondial. Les 900 navires, opérés par des entreprises françaises, depuis les PME
spécialisées, jusqu’à CMA, CGM, font vivre plus de 20.000 navigants et autant de
sédentaires. Ils transportent le savoir-faire français sur les cinq océans et toutes les mers
du globe. Conforter notre marine marchande requière de lever les blocages qui entravent
le développement des entreprises de ce secteur. Ces derniers mois en effet, de
nombreuses mesures ont été adoptées pour cela. Je veux les rappeler rapidement, la loi
sur les activités privées de protection des navires, dont je viens de signer les décrets
d’application, offre désormais un cadre sécurisé. Je sais que les armateurs et les
chargeurs l’appelaient de leurs vœux, ils peuvent dès lors mieux protéger leurs navires
contre les actes de piraterie. Accompagner notre marine marchande, c’est aussi créer les
conditions d’une concurrence juste, et lutter contre le dumping social. Le décret du 1er
août 2014 harmonise ainsi les règles du travail à bord des navires opérant dans les eaux
territoriales ou intérieures françaises. Nous aidons également les armateurs à moderniser
leur flotte et à l’adapter aux nouvelles normes, je pense notamment à celles concernant
l’environnement, et particulièrement la directive sur les émissions de souffre et ses
conséquences pour le Nord de notre littoral. L’ADEME a donc lancé un appel à projets sur
les ferries propres, doté de 80 millions d’euros. Nous accompagnons ainsi très
concrètement les armateurs qui nous présentent des projets performants sur le plan
écologique. Cela a notamment été le cas avec BRITTANY FERRIES que nous aidons dans
son programme de mise à niveau de ses bateaux, c’est très concret, et nous avons pu
ainsi dernièrement répondre positivement pour le navire dénommé le Normandie.
Toujours à propos de ce secteur difficile des ferries, les adaptations nécessaires
ont été différées depuis trop longtemps, le soutien public a pu conduire à la surcapacité
de certaines liaisons, à une compétitivité insuffisante des armements. Certaines
entreprises sont aujourd’hui – nous le savons – dans des situations critiques, c’est le cas
de la SNCM, placée en redressement judiciaire vendredi dernier.
Et c’est là un aboutissement malheureux, mais inéluctable après une décennie de
déficits lourds. Comme vous le savez, l’Etat suit de près ce dossier. Et avec les ministres
concernés et notamment avec Alain VIDALIES, nous veillerons scrupuleusement à la
continuité territoriale avec la Corse et à ce qu’un maximum d’emplois soit préservé dans
le bassin, j’ai dit que je parlerai directement, et le langage de vérité sur ce dossier
s’impose. En matière de marine marchande, les premières mesures ont donc été prises,
mais j’ai souhaité que nous allions encore plus loin, le gouvernement a examiné avec
attention les propositions du député Arnaud LEROY, qui est avec vous et qui connaît bien
ces questions.
Nous avons décidé de mettre en œuvre plusieurs propositions importantes, le
secrétaire d’Etat chargé des Transports, de la mer et de la pêche, les détaillera tout à
l’heure. Je veux ici uniquement les énoncer, tout d’abord l’extension de l’obligation de
pavillon français au transport de pétrole raffiné, elle a été intégrée au projet de loi sur la
transition énergétique, et entrera en vigueur à l’été 2015. Ensuite, un mouvement de
simplification, afin d’alléger les démarches, je sais qu’il y a beaucoup d’attente dans ce
domaine-là, et pas seulement dans votre secteur. Il concerne, ce mouvement,
principalement la modernisation du rôle d’équipage, mais pas uniquement. Enfin, des
mesures fiscales avant la fin de l’année, qui confirment et amplifient l’effort de l’Etat.
Elles permettront de sécuriser vis-à-vis de la Commission européenne le dispositif de la
taxe au tonnage, elles permettront également d’étendre aux achats en crédit bail
l’exonération des plus-values de cession des navires.
2
Et je sais combien cette mesure est attendue par les professionnels. Mesdames,
Messieurs, la compétitivité de notre marine marchande, c’est aussi la qualité de nos
infrastructures portuaires. C’est pourquoi l’Etat accompagnera le développement des
grands ports maritimes. Les contrats de plan entre l’Etat et les régions pour la période
2015-2020, je viens de signer hier celui de la région Pays de la Loire, prévoient d’investir
plus d’un milliard d’euros dans les grands ports, près d’un tiers sera apporté par l’Etat.
Ces investissements porteront sur l’amélioration et l’extension des infrastructures
portuaires, mais aussi sur l’hinterland, c’est-à-dire l’accès routier et ferroviaire. Notre
ambition doit être de rattraper la qualité de services et la compétitivité des grands ports
d’Europe du Nord.
Et c’est à cette condition que les navires les plus gros, ceux venant d’Asie
notamment, feront escale dans nos ports créant ainsi des emplois et de l’activité. Pour
cela, il faut également stabiliser le cadre fiscal des activités portuaires. Le Conseil d’Etat
a jugé que le vieux régime d’exonération de l’impôt foncier des grands ports maritimes
ne pouvait être maintenu. On ne peut en faire abstraction, le gouvernement fera donc
des propositions, mais là, nous devons être attentifs à ne pas pénaliser l’activité
économique des ports. Les ports d’Outre-mer font également l’objet d’une attention
particulière, leur situation stratégique, la réunion entre l’Europe, l’Afrique et l’Asie, les
Antilles au débouché du Canal de Panama, leur offrent un potentiel de développement
remarquable, une stratégie portuaire pour l’Outre-mer sera finalisée en début d’année. Et
la ministre des Outre-mer, George PAU-LANGEVIN, vous en parlera demain. Le transport
maritime, d’une manière générale, peut être aussi une alternative au transport routier,
c’est l’objet des autoroutes de la mer. Et le gouvernement est mobilisé aux côtés des
autorités locales pour pérenniser ces services, et en lancer de nouveaux.
La récente décision de la Commission européenne de soutenir la liaison entre
Saint-Nazaire et Vigo, à partir de 2015, est un signal très important, nous l’avons évoqué
hier avec le gouvernement espagnol.
Les grands ports, c’est aussi le lieu de la construction navale civile et militaire. Ce
secteur dynamique, représente 8,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires, 45.000 emplois,
et exporte près de la moitié de sa production. STX France, les chantiers de l’Atlantique
disent encore certains, avec ses 2.000 emplois à Saint-Nazaire, est l’exemple d’une
industrie qui a su se moderniser et rester compétitive. Alors qu’en 2012, le plan de
charges inquiétait, nous constatons tous, avec satisfaction, que les carnets de
commandes se sont remplis avec quatre paquebots géants, produits d’ici à 2019. La
construction navale repose aussi sur sa capacité à réaliser les navires du futur, économes
en énergie et à faible impact environnemental. Pour cela, il faut bien sûr investir, et l’Etat
soutient les industriels à hauteur de trente millions d’euros avec le programme
d’investissements d’avenir. La mer et l’environnement, ce sont des enjeux intimement
liés, et c’est la deuxième conviction que je veux partager avec vous ce matin, vendredi,
en effet, j’ai clos la troisième conférence environnementale. Et ces travaux ont montré
une fois de plus combien l’humanité, sans se payer de mots, était au pied du mur et
combien il y avait urgence, et le mot est faible, à agir. Vous tous, acteurs de la mer, êtes
les premiers conscients des conséquences du dérèglement climatique : fonte de la
banquise et modification de la salinité de l’eau, hausse du niveau de la mer, événements
extrêmes, plus fréquents, perte de biodiversité, mais vous tous, acteurs de la mer, vous
savez combien celle-ci est porteuse d’opportunités.
La France fait de la transition énergétique une priorité, et en 2015, nous devrons
définir notre stratégie bas carbone et fixer notre programme pluriannuel de l’énergie.
C’est essentiel pour le développement des énergies renouvelables, et notamment
marines, et pour accompagner la structuration des filières. Il y a près de cinquante ans,
la France avait été précurseur avec l’usine marémotrice de la Rance, et elle doit retrouver
vite cette ambition et cette audace.
3
Les pistes sont nombreuses, vous les connaissez, énergie thermique des mers,
hydrolienne marine ou fluviale, éolienne ancrée ou flottante, et bien d’autres encore. Ce
sont autant de nouvelles frontières concrètes à explorer. Ce matin, nous avons inauguré
l’usine ALSTOM qui s’inscrit dans un plan industriel remarquable, reliant Saint-Nazaire,
Nantes et Cherbourg. Deux appels d’offres sur les parcs éoliens offshores ont déjà été
réalisés. Ils développeront à terme une puissance de trois gigawatts, c’est-à-dire – vous
le savez – l’équivalent de deux EPR. Et la ministre de l’Ecologie, du développement
durable et de l’énergie travaille activement dans la concertation à l’identification de
nouvelles zones propices en 2015. Par ailleurs, le projet Nemo d’énergie thermique des
mers, porté par AKUO et DCNS, est, lui, soutenu par la Commission européenne. De
même le projet GDF SUEZ de climatisation à partir d’eau de la mer à La Réunion est
soutenu par les fonds européens, il l’est aussi par le programme d’investissements
d’avenir. Concernant les hydroliennes, j’ai désigné deux lauréats pour l’appel à
manifestations d’intérêt sur les fermes hydroliennes dans le Raz Blanchard, vous le
savez, à l’extrémité du Cotentin, ce sont les projets Nephtyd, d’ALSTOM et GDF SUEZ et
le projet Normandie Hydro d’EDF et DCNS.
A ce stade, il n’a pas été possible de retenir tous les projets. J’ai donc demandé au
commissariat général à l’investissement d’identifier les technologies les plus
intéressantes pour les soutenir autrement. Enfin, concernant les éoliennes flottantes, un
appel à manifestations d’intérêt sera lancé en juin 2015 pour un montant de 150 millions
d’euros, je sais que, il est particulièrement attendu par les acteurs de la filière.
La transition écologique, c’est bien sûr l’énergie, mais c’est aussi la préservation
de la biodiversité marine, pas seulement parce qu’il s’agit, là, du patrimoine de
l’humanité, mais aussi parce qu’elle représente un intérêt économique majeur.
Malheureusement, l’homme a martyrisé la mer : déchets, sacs plastique, marées noires,
il a aussi pillé ses ressources sans penser à l’avenir. Alors, il faut changer et faire de la
mer notre projet. La conférence environnementale de 2013 a permis des avancées,
notamment la future agence française pour la biodiversité dans laquelle la mer aura –
rassurez-vous – toute sa place. La mise en œuvre de la stratégie des aires marines
protégées s’est poursuivie avec par exemple la création du parc marin d’Arcachon en juin
2014, l’installation du sanctuaire d’Agoa, de protection des mammifères marins dans les
Antilles, ou la mise à l’étude du parc naturel marin du Cap Corse. Je n’oublie pas la
création, nous parlions des Outre-mer, en avril 2014 par le gouvernement de NouvelleCalédonie, du parc naturel de la mer de corail avec 1,3 million de kilomètres carrés, c’est
l’une des plus grandes aires marines protégées du monde. Et le projet de loi sur la
biodiversité, qui passera au Parlement au printemps, prévoit par ailleurs de nouvelles
protections des espaces et les espèces, ainsi que les conditions de mise en œuvre des
projets économiques en milieu marin, les mesures emblématiques de lutte contre les
pollutions marines ont ainsi été prises, comme l’interdiction des sacs plastique au 1er
janvier 2016, ou l’interdiction du rejet des eaux de ballast par les bateaux.
Ma troisième conviction, c’est que la mer, c’est un formidable potentiel – vous
l’avez dit, il y a un instant – de croissance économique. Nous devons donc être ensemble
au rendez-vous – j’y insiste – de la croissance bleue. Il nous faut pour cela miser sur la
recherche, la France dispose d’un potentiel scientifique et industriel de premier plan, ce
sont 3.000 personnes engagées dans la recherche marine et maritime au sein de
l’IFREMER, du CNRS, mais également dans nos nombreuses universités. Le dynamisme
et la qualité des travaux sur la mer sont également encouragés avec le financement de
quatre laboratoires et équipements d’excellence dans le cadre toujours des
investissements d’avenir. Réunis au sein de l’alliance ALLENVI, tous ces acteurs ont
élaboré un programme mer qui met en commun les compétences, c’est comme cela qu’ils
joueront un rôle moteur, non seulement en France, mais également, au niveau européen
et international. Je me réjouis, à ce titre, de la signature, il y a quelques semaines, en
août 2014, du contrat d’objectifs entre l’IFREMER et les ministères chargés
respectivement de la recherche et de la mer.
4
Ce contrat fixe une nouvelle feuille de route jusqu’en 2017, je tiens également à
souligner la place réservée à ces thématiques au sein du programme européen de
recherche et développement Horizon 2020.
Penser cette croissance bleue, c’est devenir un acteur majeur dans le domaine de
l’exploration et de l’exploitation des grands fonds marins, c’est l’une des sept ambitions
définies par la Commission Innovation 2030. Le 18 novembre, l’Autorité internationale
des grands fonds marins et l’IFREMER ont signé un contrat pour explorer les gisements
de sulfure polymétallique en Atlantique Nord, et il ouvre ainsi à la France de nouvelles
perspectives. L’Etat prépare aussi pour la première fois, je veux le rappeler, une
exploitation de notre plateau continental au large de Walis et Futuna, une expertise
scientifique a été conduite pour que cette exploitation soit respectueuse de
l’environnement, un permis minier devrait pouvoir être attribué rapidement. Et puis l’Etat
apporte un soutien majeur aux industriels de cette filière grâce au financement du
concours mondial de l’innovation, du programme d’investissements d’avenir. Et à ce jour,
huit projets sur l’exploitation des gisements miniers sous-marins ont été retenus. Pour
nos ambitions dans le domaine de la recherche, nous disposons d’un formidable atout,
l’Ecole nationale supérieure maritime, d’ici dix ans, le nombre d’élèves va passer de
1.000 à 1.500, et de nouvelles filières permettront de former des talents pour répondre
aux nouveaux enjeux du milieu maritime. Et parmi ces enjeux, il y a bien évidemment le
défi, la question de la pêche.
La pêche et l’aquaculture sont des filières économiques d’importance pour notre
pays. Et le gouvernement souhaite les encourager, comme il l’a toujours fait. Les
travailleurs de la mer ou – c’était une expression dans notre réunion, il y a un instant –
les ingénieurs de demain de la mer, nos marins pêcheurs, ceux qui font vivre nos ports,
nos littoraux, ceux qui contribuent à créer des emplois dans le mariage et la
transformation sont des piliers de notre économie. La force de la pêche française en
métropole comme dans nos Outremers, c’est sa diversité, sa polyvalence, sa présence
dans toutes les mers du monde. Cette pêche doit donc être durable, et responsable. Et je
salue ici, très sincèrement, les efforts des professionnels pour progresser. Nous devons
dépasser toute forme d’opposition stérile entre les défenseurs des poissons et les
défenseurs des pêcheurs, les pêcheurs sont les acteurs de la mer, ils y risquent leur vie,
ils la perdent parfois. Ils sont donc conscients des enjeux, plus que quiconque, de la
préservation de l’environnement. C’est leur outil de travail, et ont un rôle de premier plan
à jouer dans la gestion des aires marines protégées. Toute pêche durable passe par une
gestion sérieuse et fondée sur des avis scientifiques solides, l’exemple du thon rouge
montre les bienfaits d’une ressource bien gérée. Les efforts importants, consentis par les
professionnels, pour parvenir à une pêcherie bien encadrée, contrôlée, permettent de
fixer des niveaux de quotas satisfaisants.
Cet exemple doit guider notre position dans des débats toujours complexes, dans
les débats communautaires. Et cela notamment sur un sujet aussi sensible que la pêche
profonde. Entre l’interdiction et le laisser-faire, il faut trouver un chemin avec l’appui des
scientifiques. Les quotas de pêche, c’est un sujet important pour l’économie française. Et
c’est un sujet essentiel, vital pour nos pêcheurs. Ils seront prochainement discutés à
Bruxelles pour 2015. Et vous pouvez compter sur l’engagement de mon gouvernement à
défendre des niveaux tenant compte à la fois des expertises scientifiques, mais aussi de
l’impact économique sur la filière.
5
Je tiens d’ailleurs à rappeler que pour la période 2014-2020, les crédits
européens pour la pêche et l’aquaculture vont être en augmentation de plus de 70%,
avec nos partenaires, nous allons mettre en œuvre une nouvelle politique commune de la
pêche. Elle comporte certaines dispositions nouvelles, comme l’interdiction des rejets.
Sur ce sujet, nous devons nous appuyer sur les expériences des pêcheurs, pour
construire un dispositif équilibré. Le gouvernement souhaite enfin renforcer l’ambition
aquacole de la France afin d’en faire un secteur stratégique dans les prochaines années.
J’y vois aussi une manière de réduire notre dépendance aux importations qui
restent nettement majoritaires dans notre assiette aujourd’hui. C’est un domaine
extrêmement prometteur, si nous savons valoriser le travail de nos chercheurs et de nos
entrepreneurs, si nous poursuivons nos démarches de simplification, et encourageons
ainsi l’éclosion de nouveaux projets. Mesdames, Messieurs, la France est donc une
grande puissance maritime. Sa marine nationale, là aussi, j’y insiste, est présente sur
toutes les mers du globe. Le développement des flux maritimes, la vulnérabilité de nos
espaces et de nos approvisionnements, l’internationalisation de nombreuses activités
illicites sont pour notre pays des enjeux majeurs, des enjeux de souveraineté. C’est
également vrai pour la liberté de navigation, il convient donc d’assurer la protection de
nos activités maritimes, et la sûreté de nos espaces. L’Union européenne a récemment
adopté une stratégie de sûreté maritime, et compte tenu du rôle et de l’expertise de la
France dans ce domaine, je veux que nous préparions en complément, sous l’égide du
secrétaire général de la Mer, une stratégie française. Dans cette stratégie, la question
des Outremers occupe nécessairement une place importante. La question de
souveraineté, c’est surtout là qu’elle se pose.
Il faut donc avoir, oui, Amiral, vous m’interpelliez tout à l’heure, les moyens
d’action nécessaires, comme ce premier bâtiment multi-missions de la marine nationale
qui sera livré en 2015. Avant la fin de l’année, deux patrouilleurs seront aussi
commandés, ils seront affectés en Guyane, pour la lutte contre la pêche illégale.
Mesdames, Messieurs, la mer est un espace de rigueur et de liberté, et je parlais des
poètes, si je reprends les mots de Victor Hugo, c’est un milieu d’opportunités, mais aussi
de dangers, toutes celles et ceux dont les métiers sont liés à la mer ne peuvent oublier
ce risque, il est permanent. Et je voudrais donc saluer l’action des 4.400 bénévoles de la
SNSM, ils assurent plus de 3.300 opérations de sauvetage par an, dans des conditions
difficiles en mettant leur vie en danger. Ce sont autant de vies sauvées, de drames, de
catastrophes évités. Et ceux qui les ont vus agir ne peuvent oublier leur courage et leur
savoir-faire. Et la mer, c’est aussi un magnifique lieu de solidarité, et nous devons veiller
à ce que sa capacité d’action soit préservée, et je sais que ce sujet compte pour le
président de la GORCE, j’irai très prochainement à la rencontre de tous ces bénévoles.
Espace de rigueur et de liberté, la mer est partagée par de multiples acteurs, le rôle de la
puissance publique, c’est de dialogue avec l’ensemble de ces acteurs pour construire une
politique de la mer.
Le Conseil national de la mer et du littoral, qui vient de se réunir, constitue un lieu
privilégié d’échanges, et je salue le travail de Maxime BONO, qui l’a présidé, ainsi que la
nouvelle présidente, Karine CLAIREAUX, car le Conseil national de la mer et du littoral
joue un rôle important de propositions et d’avis auprès du gouvernement. Nous avons
fixé plusieurs échéances, un débat à l’Assemblée nationale sur la politique maritime de la
France, en 2015, qui sera suivi d’un comité interministériel de la mer. Tous les sujets,
que j’ai souhaités aborder devant vous aujourd’hui, devront, bien sûr, y trouver leur
place. Mettre la mer au cœur de notre agenda politique, faire suivre les intentions d’actes
concrets, toujours s’engager pour défendre nos intérêts, c’est vouloir le meilleur pour la
France, vouloir renforcer sa place dans le monde. C’est cette ambition qui est celle de
mon gouvernement, et parce que cette ambition, vous la portez, je veux aussi saluer le
travail qui a été celui de Frédéric CUVILLIER, dans la montée en puissance de cette
ambition, et que, Alain VIDALIES poursuivra.
6
C’est penser notre avenir et construire notre puissance, François-Régis HUTIN
écrit dans son éditorial ce matin, que la mer est notre ancêtre, et qu’elle est aussi notre
avenir. Et pour dire les choses autrement, il n’y a pas plus belle ambition que la mer,
pour un pays comme la France, qui a toujours voulu regarder plus loin. Nous nous
interrogions il y a un instant pourquoi ce pays, qui compte cette façade maritime
extraordinaire, ne se tourne pas davantage vers la mer, ne convainc pas plus ses
citoyens et les responsables des pouvoirs publics de ce gisement, de cette force que
représente la mer, au-delà de nos côtes, partout dans le monde. Alors, à travers cette
intervention, je veux faire la démonstration de l’ambition qui est celle du gouvernement
de vous accompagner pour construire une politique maritime à la hauteur précisément
des enjeux que cela représente pour notre pays. Alors, oui, construisons, Mesdames et
Messieurs, cet avenir, mettons les voiles, parce que c’est une aventure extraordinaire qui
nous attend.
(seul le prononcé fait foi)
7