La codépendance - Croix

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La codépendance - Croix
N°7 - mars 2012
La codépendance
›Invité : Alain Charpilloz
Formateur à «Ecoute et co»
› La CB fête ses 135 ans
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› Sommaire
4-7 › Dossier
12-13 › La parole à ...
8-9 › Témoignage
14 › Nouvelles d’ici et d’ailleurs
10 › Questionnaire
15 › Agenda et camps
Qu’est-ce que la codépendance
et qui en sont les victimes ?
«J’aimais toujours Mathilde mais je n’acceptais
pas sa dépendance»
Etes-vous codépendant(e)?
11 › L’invité
La codépendance entraîne l’oubli de soi
› Publicité
Femmes codépendantes : la Croix-Bleue peut vous aider !
La Croix-Bleue 135 ans d’expérience en 2012
Printemps 2012
› Editorial
Chère lectrice, Cher lecteur,
La Croix-Bleue romande (CBR) se préoccupe des codépendants, c’est–à-dire de celles et ceux qui se sentent responsables du monde entier mais qui refusent d’assumer la charge et la bonne marche de leur propre existence.
Nous avons donc choisi de vous parler de la souffrance de ces personnes côtoyant des malades de l’alcool ou
victimes d’autres troubles compulsifs.
Nos «Espace Rencontres» leur sont largement ouverts. Ils leur permettent de partager leur détresse, de recevoir
l’aide et les encouragements de professionnels. Ils sont écoutés, orientés sur des pistes qui leur permettront
de survivre et d’échapper à ce sentiment d’abandon, de solitude et d’impuissance qu’ils éprouvent face à un
malade alcoolique enclin à exercer son emprise sur son entourage. Car l’emprise est une véritable prison mentale pour celui qui la subit.
La croyance populaire peine à comprendre l’attitude de ces codépendants prêts à donner sans compter, jusqu’à
l’épuisement et à la déplétion totale. En vérité, ils souffrent autant, sinon plus que les malades alcooliques. A la
différence près qu’ils supportent leur souffrance sans l’anesthésie que procure l’alcool ou toute autre drogue.
Alors que les personnes dépendantes sont sur le devant de la scène, les codépendants cachent leur détresse en
coulisses. C’est pourquoi nous avons choisi de les mettre en lumière dans cette première édition 2012 d’Exister.
Au fil des pages vous découvrirez les différentes facettes de la codépendance, la manière de venir en aide à
celles et ceux qui en sont affligés ainsi que plusieurs témoignages poignants qui ne vous laisseront pas indifférents. Un petit test vous permettra de vous confronter à ce mal encore peu connu. Il vous permettra d’esquisser
une réponse à la question « Et vous, êtes-vous codépendant ? ».
Bonne lecture.
› Otto Borruat › président de la CBR section Jura bernois et Bienne romande
› Impressum
3e année › n° 7 › mars 2012
Comité de rédaction et d’informations › Myriam Amiet, Thierry Blanc, Otto Borruat, Rosina Gulizia, Daniel Müller
Rédaction et administration › Croix-Bleue romande, Secrétariat général: Av. de la Gare 31, 1022 Chavannes-Renens | Tél. 021 633 44 33
Photographies › fotolia | Le Charme du Bois
Conception & graphisme › agence dialog, Sierre | graphem, Martigny | Morgan Thurre
Impression › Centre d’impression Montfort-Schœchli SA, Martigny - Roberto Fracasso
Prix du journal › Pour 1 an : 30 Frs | Pour un soutien au journal : plus de 30 Frs | Pour l’étranger : 35 Frs | CCP 10-586-2
Parution › Trimestrielle
ISSN ›1664-4239
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› Dossier › La codépendance
Qu’est-ce que la codépendance
et qui en sont les victimes ?
La personne codépendante est celle qui s’est laissée affecter par le comportement d’une personne
addicte (alcool, drogue, jeu, maladie somatique ou mentale) et qui est obsédée par l’idée d’aider
et de contrôler le comportement de cette même personne. Au même titre qu’une personne dépendante, les codépendants ont besoin d’être soutenus pour qu’ils puissent se réapproprier leur vie.
Le concept de codépendance, dans le domaine alcoologique, est né dans les années soixante au sein des
groupes des Alcooliques Anonymes et d’Al-Anon. Il s’agit d’un syndrome psychologique ayant les caractéristiques suivantes :
manque d’objectivité
immaturité émotionnelle
besoin absolu d’amour et de contrôle
manque d’estime de soi (dévalorisation).
•
•
•
•
Cette condition engendre une dépendance affective, c’est-à-dire le besoin de l’autre, car cet autre est responsable de mon bonheur.
La personne codépendante sacrifie tout pour son amour envers une personne addicte. On parle habituellement de relations affectives ou amoureuses excessives, qui font que la personne codépendante n’existe que
par l’autre.
Six comportements sont symptomatiques de la codépendance :
Avoir du mal à prendre des décisions dans la vie courante
Dépendre des autres pour assumer ses responsabilités
Avoir du mal à exprimer ses désaccords vis-à-vis des autres
Accepter de faire des choses contraires à ses valeurs par crainte d’être rejeté
Craindre de ne pas pouvoir faire face seul aux situations quotidiennes banales
Etre si paniqué à l’idée d’une séparation que l’on recherche immédiatement un « remplaçant ».
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En lisant les caractéristiques de la personne codépendante (voir encadré), nous en déduisons que toute personne est un dépendant affectif ou un codépendant. En effet, nous sommes tous des êtres relationnels et il est
naturel de vouloir aider la personne que nous aimons, de subir le contrecoup des problèmes de son entourage
et de réagir en conséquence.
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Autres caractéristiques de la personne codépendante :
• sens exagéré des responsabilités pour les actions des autres
• tendance à faire plus que ce qu’elle devrait faire
• tendance à être peinée et déçue si l’on ne reconnaît pas ses efforts
• sentiment de culpabilité lorsqu’elle s’affirme
• grand besoin de contrôler les autres
• peu de confiance en elle-même et dans les autres
• peur de se sentir isolée
• difficulté à identifier ses émotions
• colère chronique
• rigidité et difficulté à envisager le changement, à décider
Mais quand est-ce que la relation émotionnelle devient problématique ?
Lorsque la personne réagit uniquement face à l’attitude de l’autre, elle n’agit plus par elle-même. Sa vie n’a
plus de sens sans l’autre, celui ou celle à travers qui il ou elle existe, quitte à complètement s’oublier. Souvent
les codépendants se croient et se sentent responsables des autres, de leurs sentiments, pensées, actes, choix,
désirs, besoins, bien-être ou mal-être et finalement de leur destin. Ils s’efforcent de plaire à autrui au lieu de se
plaire à eux-mêmes.
La personne codépendante peut assumer trois rôles différents : sauveur – victime – persécuteur.
Cette schématisation est appelée triangle dramatique, dit aussi triangle de Karpmann.
Illustration du triangle de Karpmann
s
s
Victime
s
s
Persécuteur
s
s
Sauveur
« Le détachement, ce n’est pas se détacher de la personne qu’on aime, mais de la torture de l’investissement en autrui. » Un membre des AL-Anon
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› Dossier › La codépendance
Lorsque la personne addicte a un problème, le codépendant ressent de l’anxiété, de la pitié et de la culpabilité.
Il se sent donc obligé, voire contraint d’aider l’autre à résoudre son problème. Il peut proposer des solutions ou
émettre des suggestions. Il est convaincu que la personne addicte a besoin de lui. Dans ce cas, le codépendant
a un rôle de sauveur.
En retour de l’aide offerte, la personne codépendante attend de la reconnaissance de la personne addicte.
Cependant elle ne reçoit rien en retour et elle se demande pourquoi l’autre n’en fait pas autant pour elle. Elle
se fâche car son attention reste sans effet, elle se sent mal considérée et exploitée. La personne codépendante
assume le rôle de victime.
Le codépendant reproche à la personne addicte de se trouver dans le même « pétrin » qu’elle. Il accuse l’autre
de tout, notamment du fait qu’il ressente des émotions identiques ou qu’il adopte les mêmes comportements
que la personne addicte. Il est alors le persécuteur.
La codépendance est un comportement à multiples visages. En effet, c’est une dépendance non seulement
à l’égard de la personne addicte, mais aussi de ses humeurs, de ses comportements, de sa maladie ou de son
bien-être et de son amour.
Le codépendant a très souvent une mauvaise opinion de lui-même, un manque de confiance en soi et une tendance à la dénégation (faire comme si le problème n’existe pas). Il refoule ses pensées et ne prend pas le temps
de s’écouter. Il craint sa colère ainsi que celle des autres.
La codépendance doit être abordée parallèlement à la dépendance
Comme la personne addicte a besoin d’une aide professionnelle pour soigner son addiction, la personne codépendante a besoin d’un soutien psychothérapeutique pour apprendre à mieux délimiter ses responsabilités.
En effet, ce besoin de vouloir aider la personne addicte engendre des conséquences psychiques : détresse,
meurtrissures, souffrance.
La Croix-Bleue romande (CBR) propose un accompagnement psychosocial aux personnes dépendantes ainsi
qu’aux proches (conjoint, parent, enfant, ami ou collègue). Ces accompagnements permettent aux codépendants d’apprendre à abandonner leurs comportements compulsifs et destructeurs afin d’accéder à un mieuxêtre et d’acquérir une autonomie affective. La CBR offre un encadrement sécurisant qui va permettre de franchir
les étapes du rétablissement.
Se libérer de sa dépendance ou codépendance – les 5 étapes
Reconnaître que le problème existe
Le codépendant doit faire face à ses émotions et sortir du déni. Il doit apprendre à les ressentir, à les identifier
et à les exprimer.
•
• Se poser des questions à soi-même
- Avec qui suis-je en codépendance ?
- Suis-je heureux ?
- Pourquoi est-ce que je me sens coupable face à la personne avec qui je suis en codépendance ?
- Pourquoi est-ce que je me sens obligé de faire plus que l’autre dans cette relation ?
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Cette étape demande du temps et des efforts de la part du codépendant. Ce dernier doit diminuer ses
émotions désagréables et augmenter son objectivité et son autonomie. L’encouragement, l’encadrement et
l’incitation à passer à l’action sont des moyens très utiles pour le codépendant.
• Apprendre à poser des limites claires dans la relation, à dire non fermement et à défendre sa zone
d’autonomie
Le codépendant doit apprendre à s’affirmer, à communiquer, à régler les conflits et à résoudre les problèmes.
• Prendre soin de soi
Le codépendant doit apprendre à se reposer, à prendre le temps de se détendre, se faire des cadeaux, se
donner le droit d’exister pour lui-même. Au début, ces actions sont difficiles. Le codépendant peut se sentir
envahi par un sentiment de culpabilité, mais il est important qu’il persévère.
• Etre patient
Le codépendant doit prendre le temps de méditer, de lire, de participer à des groupes de développement
personnel et spirituel, d’entamer une démarche psychologique avec un psychothérapeute ou un praticien
en relation d’aide.
La CBR est disponible:
Espace es
Rencontr
› Françoise Kündig › responsable du secteur social de la CBR section vaudoise
Références :
› Rosette Poletti › «le matin dimanche» 7 sept 2008, 2 juillet 2006
› Melody Beattie › « Vaincre la codépendance »,Edition Pocket
› FORDD › Formation des Organismes Romands Dans les Dépendances
› Poujol Jacques et Claire › «Manuel de relation d’aide», Edition Empreinte temps présent 1998
› www.acsm-ca.qc.ca/mieux
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› Dossier › La codépendance
«J’aimais toujours Mathilde mais je
n’acceptais pas sa dépendance»
Paulo, marié et père de trois filles, culpabilisait face à l’alcoolisme de sa femme Mathilde. Cette souffrance a duré deux ans. Aujourd’hui le couple se reconstruit. Témoignage croisé d’un mari codépendant et d’une femme dépendante.
Témoignage de Paulo
Comment vous êtes-vous aperçu que votre femme
avait un problème avec l’alcool ?
Quand je rentrais du travail, elle était allongée sur le
canapé, en train de dormir. Parfois je retrouvais plusieurs bouteilles de bière à la cuisine. Et lorsqu’elle prenait la voiture j’étais en souci car je voyais bien qu’elle
conduisait un peu bizarrement.
commune (dépressions fréquentes). Mais par chance
l’alcool est arrivé comme un extra-terrestre qui m’a
complètement désarmé. De ce fait, j’ai eu immédiatement une bonne distance car ce n’était pas moi
qui buvais! J’étais comme le Saint-Bernard qui ne
savait plus que faire de son tonneau de rhum. J’ai
pris conscience de la dépendance affective dans
laquelle nous avions vécu, Mathilde et moi, et que le
Quel était votre comportement à son égard ?
tonneau de rhum ne m’était plus d’aucune utilité. SiProtecteur et engagé ou plutôt désintéressé ?
multanément, j’ai pris conscience de ma propre soufJ’étais très inquiet pour mes filles, d’une part pour france et j’ai décidé de prendre du temps pour m’en
leur sécurité et d’autre part je me disais : « Mais quelle occuper.
image de leur mère vont-elles avoir ? ». Une étape importante a été d’exprimer mon désaccord par rapport Imaginiez-vous qu’un jour tout redeviendrait comme
à l’alcool et à ses effets, sans rejeter la personne. J’ai- avant, que Mathilde réussirait à sortir de sa dépenmais toujours Mathilde mais je n’acceptais pas sa dé- dance ?
pendance. Pour moi l’alcool a été la dernière couche Je voulais protéger nos enfants des idées suicidaires
d’une succession de difficultés conjugales, celle qui a de leur maman. C’était une période de grandes souffait déborder le vase. Aussi étrange que ça puisse pa- frances pour tous les membres de la famille. J’étais telraître, cette crise m’a permis d’affirmer clairement et lement épuisé nerveusement que je ne pouvais que
avec force ce que je pouvais accepter de vivre ou non vivre au jour le jour. Quand j’ai vu ma femme prendre
dans notre couple. A partir de là, j’ai le sentiment que les choses en main et décider d’aller se soigner, j’ai
mon épouse a pu, elle-aussi, prendre des décisions recommencé à croire à une vie plus paisible.
importantes qui lui ont permis d’avancer.
Grâce à cette distance que j’ai prise en reconnaissant Quel message aimeriez-vous transmettre à une peret en posant mes limites, je me suis libéré de la culpa- sonne codépendante ?
bilité par rapport à la souffrance de ma femme.
Je pense que l’on est tous un peu codépendant car aider l’autre nous apporte de la reconnaissance. Quand
Vous sentiez-vous responsable ou coupable de la notre équilibre repose sur cette reconnaissance, cela
consommation de Mathilde ?
devient problématique. La première étape est de réaliJ’ai beaucoup culpabilisé face à la souffrance ser que l’on est codépendant. S’occuper de son propre
de mon épouse durant nos quinze années de vie équilibre, être attentif à ses besoins est important.
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Témoignage de Mathilde
Mathilde, étiez-vous consciente de la codépendance
de Paulo ?
Oui, mon mari faisait les choses à ma place. Cela m’arrangeait mais je ne pouvais pas exister. Je me sentais
étouffée, engluée. Et puis l’alcool me brouillait la vue,
il mettait de la distance entre mon mari et moi et je
m’enfermais dans mon monde.
Ressentiez-vous de la culpabilité ?
Je culpabilisais vis-à-vis de mes filles. Je n’étais plus suffisamment présente pour elles. J’avais peur que cela
les marque définitivement. Ce sentiment de culpabilité m’a permis de rebondir !
Comment avez-vous fait pour retrouver un équilibre
dans votre couple ?
Cela n’a pas été facile ! J’ai passé 1 mois dans une institution puis j’ai été suivie par une collaboratrice de
la Croix-Bleue romande (CBR). Ce soutien mensuel a
été très important. J’ai participé à des ateliers créatifs, aux camps, au groupe Espace femmes de la CBR.
J’ai développé mon potentiel, je me suis construite.
De son côté, mon mari faisait du théâtre et ces deux
dernières années il a fait de l’art-thérapie. Aujourd’hui,
nous sommes sortis de la fusion dans laquelle nous
baignions et nous vivons de manière paisible. Nous
nous sommes engagés dans une association pour la
Bolivie et nous pensons que ce projet va nous aider à
vivre ensemble.
Quel message aimeriez-vous transmettre à une personne codépendante ?
J’ai envie de lui dire de prendre soin d’elle, de s’exercer à écouter ses besoins, d’apprendre à se connaître,
ce qui n’est pas chose aisée. Demander de l’aide à
un professionnel peut s’avérer utile. La personne
se sentira ainsi soutenue, elle pourra peu à peu se
rapprocher d’elle-même et elle aura de moins
en moins la nécessité d’aller au-devant des besoins de
l’autre.
Propos recueillis par › Myriam Amiet › bénévole à la commission
Exister
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› Questionnaire › Suis-je codépendant(e)?
Suis-je
codépendant(e)
?
Vous arrive-t-il de venir en aide à des personnes qui ne vous ont pas clairement exprimé qu’elles avaient besoin
de vous ?
Vous sentez-vous coupable ou fautif lorsque quelqu’un de votre entourage éprouve des difficultés à se prendre
en charge ?
Vous sentez-vous quelquefois en colère parce que vous êtes convaincu que cette personne irait beaucoup
mieux si elle suivait vos directives ?
Vous arrive-t-il de vous sentir exploité dans votre travail et d’avoir l’impression que vous n’êtes pas apprécié
malgré tout ce que vous faites pour aider les autres ?
Si vous avez répondu : OUI, à une de ces questions, il est possible que vous adoptiez à l’occasion des
comportements de sauveur à l’égard de votre entourage. Ces comportements vous placent dans une situation
inconfortable et risquent de vous mener à l’épuisement. Ils peuvent vous empêcher d’aider les personnes qui
ont légitimement besoin d’aide et le demandent. › L’invité › Alain Charpilloz
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La codépendance
entraîne l’oubli de soi
Un conjoint, un proche, un collègue qui a tendance à s’oublier, à ne plus se respecter pour laisser
l’autre vivre son mal-être, est en situation de codépendance. Retrouver l’estime de soi et reprendre
le contrôle de sa vie est un processus difficile dont nous parle Alain Charpilloz, conseiller en relation d’aide au bénéfice d’une longue expérience, notamment auprès des personnes alcoolodépendantes. Interview.
Avoir de l’empathie est naturel. A partir de quand
est-ce un dysfonctionnement ?
Le dysfonctionnement est évident dès que l’on ne
respecte plus ses limites, que l’on abandonne une
activité plaisante et valorisante parce qu’on se fait trop
de souci pour une personne, que l’on s’oublie face à
l’autre. Le fait de donner son aide sans y avoir été invité
est déjà une attitude de codépendance. Le danger est
avéré lorsque cette attitude devient une habitude.
Comment peut-on prévenir la codépendance ?
En exprimant ses émotions. Si je suis sensible à la situation de l’autre, si je le vois foncer dans le mur, je le lui
dis, je le verbalise. Je lui tends la perche mais j’attends
son feu vert pour agir, sauf bien sûr si la personne
concernée représente un danger pour elle-même ou
les autres.
Quelles ressources peut-on proposer à la personne codépendante ?
Elle doit parvenir à être vraie avec elle-même, à
prendre conscience de ce qu’elle vit dans son for intérieur, au niveau de ses émotions. Cela l’aidera à se
construire un cadre de vie qui lui convient, à exprimer
les attitudes qui sont inacceptables pour elles et à les
refuser. L’exercice est difficile car ce n’est pas quelque
chose d’inné ! Mais en changeant de comportement,
une personne codépendante donnera la possibilité à
l’autre de changer aussi, tout en sachant que cela est
de son seul ressort. La finalité c’est d’arriver à penser à
soi, d’être bien même si l’autre est mal parce qu’on lui
laisse la responsabilité de ses actes.
Cela ne risque-t-il pas d’être pris pour de l’indifférence ?
C’est pour cela que nous devons être attentifs à ce que
vit l’autre tout en légitimant le fait que sa situation est
difficile. Il est important de l’écouter, de lui dire qu’il
compte pour nous, qu’il est acceptable en tant que
personne mais que son attitude ne l’est pas.
Finalement cela s’applique à toutes les petites
choses de la vie quotidienne ?
Bien sûr, c’est même le point de départ pour adopter
ensuite cette attitude dans des situations plus complexes. Et c’est impressionnant de voir ce que cela
apporte de positif !
Propos recueillis par
› Thierry Blanc › collaborateur social CBR section genevoise.
ECOUTE ET CO...
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La parole à un professionnel de la Croix-Bleue romande
› Déborah Grisel
Femmes codépendantes :
la Croix-Bleue peut vous aider !
La Croix-Bleue accompagne de nombreuses femmes en détresse du fait de leur codépendance envers leur conjoint alcoolique. A leur côté, nous cheminons pour les aider à reprendre le contrôle de
leur vie, à s’occuper d’elles, à sortir… Tout en sachant que l’on ne peut changer que soi-même et que,
dans tous les cas, cette reprise en main aura une influence sur tout l’entourage.
Les femmes codépendantes sont nettement plus
nombreuses que les hommes à demander notre
soutien. Elles souffrent, sont désespérées, épuisées
d’avoir tout essayé pour stopper la consommation
d’alcool de leur conjoint. D’une manière inconsciente,
ces femmes se sont enfermées dans des schémas appris souvent dans l’enfance, dont elles n’arrivent pas
à sortir. Dans cette relation de codépendance, elles
endossent tantôt le rôle de la victime, de la sauveuse
et de la persécutrice (triangle de Karpmann).
On ne peut changer que soi-même
Lorsqu’une femme codépendante prend conscience
de sa situation, elle va chercher à sortir de ces rôles, à
redevenir elle-même. Dès lors elle doit d’emblée comprendre et admettre qu’on ne peut changer l’autre, on
ne peut que changer soi-même. J’encourage donc ces
femmes à ne pas atténuer les conséquences néga-
tives de l’alcoolisation de leur mari. Si, par exemple, il
n’arrive pas à se lever le matin pour aller au travail, elles
ne devraient pas téléphoner au patron pour prétexter
une excuse.
Une personne va apporter un changement à sa
vie s’il y a plus de conséquences négatives que
positives à son attitude !
Nous abordons la question des limites. Certaines
femmes ont totalement oublié qu’elles ont des droits
et qu’elles peuvent dire « non » ! Pour elles, se faire insulter ou taper n’est pas si grave. Faire les courses, le
ménage, préparer le repas, travailler à 80 % à l’extérieur
et ne pas avoir d’aide ni de reconnaissance leur paraît
acceptable.
Par ailleurs, certaines femmes se sont tellement occupées et préoccupées de leur conjoint qu’elles se sont
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oubliées. Elles ont alors tout un travail à faire pour
(ré)apprendre à prendre soin d’elles, sans attendre
que l’autre change pour vivre leur propre vie et être
heureuses (voir des amis, aller chez le coiffeur, se détendre,…).
Parfois, lorsqu’un mari voit sa femme s’épanouir et ne
plus vivre qu’autour et à travers lui, il se rend compte
que c’est à lui de faire quelque chose pour lui-même.
Il prend conscience de son problème de dépendance
et commence à se soigner. Il arrive pourtant que le
conjoint ne change pas… et soit le couple continue à
fonctionner, soit cela crée une cassure.
Dans tous les cas, lorsque quelqu’un change dans une
famille ou un couple, cela fait bouger tous les proches
concernés !
› Déborah Grisel › collaboratrice sociale
17 femmes courageuses se confient
Françoise Kündig › responsable du secteur social et animatrice
du groupe « Espace-Femmes », publie les témoignages de plusieurs
femmes qui ont été confrontées au problème de l’alcool.
›
Le livre « Alcool, amour, haine… Récits de femmes » s’adresse à toutes
les femmes qui s’interrogent sur leur consommation d’alcool, mais
aussi aux hommes par rapport à la consommation de leur épouse ou
aux parents pour celle de leur enfant. Ce livre est un outil de prévention, il donne quelques pistes pour éviter le piège de la dépendance.
Après chaque témoignage, une personne professionnelle intervient
en apportant des explications, précisions et approfondissements sur
les différentes thématiques liées à la dépendance à l’alcool.
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› Nouvelles d’ici et d’ailleurs› La Croix-Bleue135 ans d’expérience en 2012
Depuis 135 ans la Croix-Bleue (CB) offre son soutien aux personnes dépendantes ainsi qu’à leur famille. Au fil du temps, elle a su s’adapter à l’évolution des besoins de la société. Elle a « ajusté » ses
prestations, réussissant dans la foulée le virage de la professionnalisation. Aujourd’hui, la CroixBleue jouit d’une expérience unique en Suisse pour soutenir les hommes et les femmes en difficulté.
Rétrospective.
1877 : Le pasteur Louis-Lucien Rochat fonde la Croix-Bleue pour aider les victimes de l’alcool. Son combat s’inspire de celui de la Croix-Rouge qui aide les victimes de la guerre.
1882 : Les « cafés de tempérance » naissent et fleurissent dans toute la Suisse. Une maison de cure pour hommes
s’ouvre à Trélex.
1898 : Une maison de cure pour femmes s’ouvre à Lausanne.
1902 : La CB fête ses 25 ans. L-L Rochat reçoit un livre d’or signé par 10’000 épouses de personnes dépendantes,
en remerciement de l’œuvre lancée et de son dévouement. Cette année-là la Croix-Bleue, contrairement à certains de ses membres, ne militera pas pour l’abolition de l’absinthe.
1906 : Les Zurichois voudraient que la CB devienne prohibitionniste ; L-L Rochat s’y oppose farouchement.
1911 : Naissance des « Petites Familles », les enfants de parents alcooliques y sont placés.
1914 : Les Unions Chrétiennes de Jeunes Gens (UCJG) et la CB s’inquiètent de la santé morale et spirituelle des
soldats. Ils créent les premiers « foyers du soldat ».
1927 : La CB a 50 ans. Elle est presque à son apogée. Les personnes dépendantes de la première génération
sont vieillissantes, leurs enfants ne sont plus aussi motivés à s’approcher des alcooliques.
1930 – 1950 : La prévention marche très fort. Des films sont utilisés dans des campagnes de prévention.
Lorsque la CB se présente dans un village, tous les habitants sont là.
1955 : C’est le début des groupes d’hommes et des Amicales féminines. Des groupes « genres » dans lesquels
on joue aux cartes ou à d’autres jeux de société sous le vocable des « 3 R » pour les femmes « repas, recueillement, récréation ».
1977 : 100e anniversaire. De grandes manifestations sont organisées comme à Cossonay où des personnes
sont venues à pied de toute la Suisse romande. A Berne, une grande rencontre internationale réunit 10’000
personnes. A Genève, la fête se déroule sur le Léman.
1978 : Lancement par la CB de la chaîne SOS alcoolisme. Le premier camp familles est organisé.
2002 : 125e anniversaire. Lancement de l’action RaidBlue et de la canette prévention.
2009 - 2010 : La CB est sur les réseaux sociaux et lance une application pour les smartphones, qui permet de
calculer son taux d’alcool et tester ses réflexes.
2012 : 135e anniversaire.
Lancement et mise en place des « Espaces Rencontres », lieux de partage, de relations et d’activités. D’ailleurs,
ces « Espaces Rencontre » ne ressembleraient-ils pas aux « cafés de tempérance », nés 130 ans plus tôt… ? La
CB n’a pas inventé un nouveau concept, elle s’est uniquement adaptée avec pertinence aux besoins de son
époque.
› Agendas - camps
CBR section genevoise
Ch. de la Gravière 4 › 1227 Les Acacias › T +41 22 320 41 00 › [email protected]
Lundi 19 mars 2012 > Genève
Forum de la CBR section genevoise
Infos : T 022 320 41 00
Samedi 21 avril 2012 à 20h > Temple protestant d’Onex
Concert de la Musique de la Croix-Bleue
Ouverture Espace Rencontres Genève
Du lundi au jeudi de 14h à 18h30
4 et18 février et 3,17 et 31 mars 2012 de 16h00 à 23h00 avec repas à 19h30
CBR section du Littoral neuchâtelois
Ch. de Notre-Dame 21b › 2013 Colombier › T +41 32 841 36 59 › [email protected]
Jeudi 15 mars 2012 > Cortaillod
Forum de la CBR section Littoral neuchâtelois
Infos : T 032 841 36 59
CBR section vaudoise
Av de la Gare 31 › 1022 Chavannes-Renens › T +41 21 633 44 32 › [email protected]
Samedi 31 mars 2012 > Chavannes-Renens
Forum de la CBR section vaudoise
Infos : T 021 633 44 32
Du 6 au 9 avril 2012 > Leysin
Camp de Pâques
Bulletin d’inscription disponible au secrétariat de la CBR – VD > T 021 633 44 32
Samedi 5 mai 2012 à 9h00 > Espace Rencontres Chavannes
Assemblée des délégués de la CBR
Jeudi 10 mai 2012
Journée nationale sur les problèmes liés à l’alcool.
Le thème de la journée est « Où est le problème ? »
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Aider ?
• un don, un legs, une donation
• une mise à disposition de temps pour du bénévolat
• un dialogue avec des dépendants
• un partenariat, si vous êtes une entreprise
Avec vos dons (temps ou argent) vous permettez
à la Croix-Bleue romande de poursuivre sa mission.
CCP 10-586-2
JAB CH-1022
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