Cahiers de Civilisation Espagnole Contemporain_5820

Transcription

Cahiers de Civilisation Espagnole Contemporain_5820
Cahiers de civilisation
espagnole contemporaine
(2015)
printemps 2015
................................................................................................................................................................................................................................................................................................
Marie-Catherine Chanfreau
Censures et manipulations dans les
mondes ibérique et latino-américain
................................................................................................................................................................................................................................................................................................
Avertissement
Le contenu de ce site relève de la législation française sur la propriété intellectuelle et est la propriété exclusive de
l'éditeur.
Les œuvres figurant sur ce site peuvent être consultées et reproduites sur un support papier ou numérique sous
réserve qu'elles soient strictement réservées à un usage soit personnel, soit scientifique ou pédagogique excluant
toute exploitation commerciale. La reproduction devra obligatoirement mentionner l'éditeur, le nom de la revue,
l'auteur et la référence du document.
Toute autre reproduction est interdite sauf accord préalable de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation
en vigueur en France.
Revues.org est un portail de revues en sciences humaines et sociales développé par le Cléo, Centre pour l'édition
électronique ouverte (CNRS, EHESS, UP, UAPV).
................................................................................................................................................................................................................................................................................................
Référence électronique
Marie-Catherine Chanfreau, « Censures et manipulations dans les mondes ibérique et latino-américain », Cahiers de
civilisation espagnole contemporaine [En ligne], | 2015, mis en ligne le 12 juillet 2015, consulté le 14 juillet 2015.
URL : http://ccec.revues.org/5820
Éditeur : 3L.AM, Université d'Angers
http://ccec.revues.org
http://www.revues.org
Document accessible en ligne sur :
http://ccec.revues.org/5820
Document généré automatiquement le 14 juillet 2015.
© CCEC ; auteurs
Censures et manipulations dans les mondes ibérique et latino-américain
Marie-Catherine Chanfreau
Censures et manipulations dans les
mondes ibérique et latino-américain
1
2
3
4
Intégré depuis 2011 dans l’équipe d’accueil de l’université François Rabelais de Tours
ICD (Interactions culturelles et discursives), le Centre interuniversitaire de recherche sur
l’éducation et la culture dans le monde ibérique et ibéro-américain (EA 2112) avait déjà édité
un livre sur la censure1. Il constitua en quelque sorte les prémisses d’une réflexion que le
CIREMIA poursuivit fructueusement lors de son séminaire périodique, ses journées d’étude,
en particulier celles de février et avril 2008 organisées en collaboration avec le Centre de
recherches latino-américaines de l’université de Poitiers sur « Mémoire et censure en Espagne
et en Amérique latine », et son colloque international « Censure et déplacements : stratégies
d’appropriation, d’évitement et de détournement » des 4 et 5-VI-2010. Afin de parvenir à
un aboutissement cohérent de ces travaux, certaines des interventions sur cette thématique
féconde en concepts et notions furent retenues par Jean-Louis Guereña et Mónica Zapata. Ils
les coordonnèrent, autour de la problématique des stratégies d’adaptation ou de contournement
de ceux qui subissent la censure, en un stimulant ouvrage collectif rendant hommage à la
mémoire de notre collègue Marie-Aline Barrachina2.
Ce volume broché à la couverture joliment illustrée s’ouvre sur une introduction présentant
synthétiquement sa genèse et son propos, ainsi que l’organisation des dix-sept articles qui le
composent, dont cinq en espagnol. Pour en faciliter l’accès et en favoriser la compréhension
des non hispanophones, ils sont tous précédés d’un résumé en français et classés selon trois
axes.
Davantage politique, le premier axe, intitulé « Pouvoirs et censures de l’Ancien Régime au XXe
siècle », ne regroupe que quatre contributions, mais embrasse l’étendue chronologique la plus
vaste, puisqu’elle remonte jusqu’au XVe siècle dans « Affirmation du pouvoir royal et censure
dans l’Aragon moderne » de Fausto Garasa (Tours). Généreux en données et informations, cet
article copieusement annoté se subdivise en quatre sections (L’Aragon et la volonté du prince ;
La Diputación General del Reino : contestation et bâillonnement ; Saragosse et la censure
royale ; Victoire de l’absolutisme, censure et autocensure) afin d’analyser les rapports de force
opposant monarchie centralisatrice et particularismes locaux. À travers « Las limitaciones
de la libertad de expresión del anarquismo español a finales del siglo XIX y principios del
XX », Antonio Robles Egea (Grenade) évoque, en quatre parties (Terrorismo anarquista
y represión; Daños colaterales: la censura de las ideas; Un caso de elusión de la censura:
Fernando Tarrida del Mármol; Un caso de cambios ideológicos y autocensuras: José Martínez
Ruiz) et deux graphiques d’une précision éloquente, la révolte et les stratégies des libertaires
vis-à-vis des excès des régimes autoritaires. Solidement documenté, « Censure et stratégies
de contournement. Le cas des publications érotiques clandestines en Espagne (dernier quart
du XIXe - début du XXe siècle )» de Jean-Louis Guereña (Tours) sonde, à travers trois prismes
(Les circuits clandestins de diffusion et les risques encourus ; Les marques de la clandestinité ;
Conclusion. Censeurs et pornographes), l’hypocrisie de l’ordre moral. Par « L’historien et
la censure : La Historia de la Educación en Guatemala de Carlos González Orellana et le
régime d’Estrada Cabrera (1898-1920) », Émilie Mendonça (Tours) s’interroge, en trois points
(Rapide aperçu de l’histoire du Guatemala ; Estrada Cabrera, un censeur censuré ? Le cas de
La Historia de la Educación en Guatemala de González Orellana ; Bilan historiographique :
la période cabrériste dans l’oubli ?), sur l’apparent manque d’objectivité de l’historiographie
libérale guatémaltèque.
Plus culturel, le deuxième axe, « Les dictatures face aux productions littéraires et
cinématographiques : franquisme, salazarisme, dictatures latino-américaines », rassemble six
contributions, dont les deux premières traitant de l’après-guerre civile suscitent d’emblée
l’intérêt du lecteur. Signée par José Reyes de la Rosa (Cordoue), « La revista cordobesa de
poesía Cántico y la censura literaria en la España franquista de la posguerra » détaille, non
Cahiers de civilisation espagnole contemporaine | 2015
2
Censures et manipulations dans les mondes ibérique et latino-américain
5
sans finesse et en cinq chapitres (Represión y censura en los primeros años de la dictadura en
Córdoba; El nacimiento de Cántico y la censura; Una labor de mediación cultural y difusión de
poesía; La poesía francesa en Cántico; Las paradojas y los desafíos de la censura), le rôle d’une
revue créée par un groupe de poètes et traducteurs homosexuels. À travers « Les paradoxes de
la censure, entre le système et l’intime : Hombres (1943), le roman censuré d’Ana Mariscal »,
Laurence Karoubi (Dijon) explore, en trois perspectives convaincantes (Le roman d’une jeune
fille d’après-guerre ; La censure morale d’un nouveau code social ; La censure machiste et
la liberté), les limites imposées à une vedette qui osa transgresser les codes en vigueur. Avec
« Aux limites du dicible et du visible. Notes sur le cinéma, le “ possibilisme ” et la culture de
l’opposition sous le franquisme », Jorge Nieto Ferrando (Lérida) se penche, en quatre phases
(Le discours “ possibiliste ” ; Le “ possibilisme ” institutionnel ; Trois exemples de films
“ possibilistes ” ; “ Possibilisme ” et canon), sur l’influence de l’opinion internationale quant au
relatif recul des entraves infligées au cinéma à la fin des années 1960. Celui-ci resta cependant
victime de manipulations comme le rappelle à bon escient « La censura en el cine español del
franquismo. El caso de Los jueves, milagro (1957) de Berlanga ». Kepa Sojo Gil (Vitoria) y
examine, sous quatre angles (Contexto general del franquismo; El cine español de los años
cincuenta: entre el continuismo y la disidencia; La censura cinematográfica en la España de los
años cuarenta y cincuenta; Los jueves, milagro y el azote de la censura), comment la censure
nationale-catholique adultéra un film de Luis García Berlanga en y greffant une seconde partie
tournée par un réalisateur en rapport avec l’Opus Dei. Au moyen d’ « Issues de secours.
Quand le théâtre portugais s’expatrie pour être vu du public. L’État nouveau de Salazar
(1933-1974) », Graça Dos Santos (Nanterre) retrace, en sept étapes (La forteresse de la peur ;
Un voyage jusqu’au no man’s land ; La menace imaginaire ; L’évasion physique pour seule
issue ; Isolement et anachronisme ; Le rêve inassouvi ; Des destins contrariés), le déphasage
de dramaturges déracinés du terreau de leurs spectateurs. À travers « Censura y movimientos
teatrales de resistencia. La dimensión política del arte en tiempos de dictadura (Uruguay y
Argentina) », Lucía Masci (Saint-Denis) décortique, en huit volets (La dimensión política del
arte; Teatro y Dictadura: “Teatro Abierto” (Buenos Aires) y “Teatro Circular” (Montevideo);
El rol de la censura; Inauguración de un nuevo lenguaje teatral; Función hermenéutica del
público y comunicación teatral en un contexto dictatorial; Un espacio de comunicación contrahegemónica; El arte como asamblea popular: censura negociada, teatro y espacio público; El
Teatro como Comunicación Alternativa), les brèches censoriales ayant permis une communion
vitale entre scènes militantes et auditoires complices.
S’attachant plutôt aux pratiques textuelles, le troisième axe « Langue et littérature :
autocensures, oublis, manipulations », fédère sept contributions. Présentant le mérite de
sortir des sentiers battus, la première, « Norme et censure de la norme dans les grammaires
de l’espagnol », observe, en deux moments (Norme et usage ; Étude de corpus) et
trois subdivisions (Le métadiscours du grammairien ; Traitement de l’archaïsme ; Clarté
pédagogique et réalité des systèmes), des cas de manipulations simplificatrices dans la
didactique française de l’espagnol. Ne redoutant guère l’hypercorrection dans leurs conseils
aux apprenants, selon Amélie Piel (Tours), les grammaires recommanderaient une norme
plutôt que d’énumérer d’éventuels usages divergents ou contradictoires. Avec «Censura,
auto-censura y traducción en los artículos políticos publicados por Miguel de Unamuno
durante su exilio voluntario en Francia (1924-1930)», Stephen G. H. Roberts (Nottingham)
montre, en cinq mouvements (Unamuno y la censura; Unamuno y su lucha contra Primo de
Rivera (1923-1924); Unamuno deportado (Febrero a Julio de 1924); Unamuno en la prensa
francesa: Le Quotidien; Unamuno en las hojas clandestinas: España con honra y Hojas
Libres), qu’opposé à la dictature, Unamuno, bien que capable de manipuler les censeurs,
s’expatria. Insatisfait toutefois outre-Pyrénées par la traduction en français de ses articles, il
en expédia sous le manteau, dans sa langue maternelle, à ses compatriotes restés en Espagne,
afin d’y exprimer, parfois vulgairement, sa colère. Dans « Censures et déplacements dans
l’œuvre de Jorge Semprún. Le Grand Voyage et Autobiographie de Federico Sánchez », Émilie
Rikir (Tours) résume, en sept paragraphes succints (Le grand voyage (1963) ; Autobiografía
de Federico Sánchez (1977) ; L’expérience ministérielle ; L’exil forcé et le “déplacement
Cahiers de civilisation espagnole contemporaine | 2015
3
Censures et manipulations dans les mondes ibérique et latino-américain
6
littéraire” ; Les pseudonymes ; Semprún censeur ; Un engagement permanent), des aspects
biographiques de l’auteur bilingue. En quatre parties (Préambule : le mot represión ; Censure,
sélection, oubli ; Une écriture de l’oubli : les procédés ; Une littérature de témoignage),
Christophe Dubois (Tours) présente à juste titre « L’oubli comme manifestation de la censure
dans les “romans de la mémoire” ». Avec « Parole, silence et subversion dans La casa verde de
Mario Vargas Llosa », Félix Terrones Saldana (Bordeaux) évalue, en trois paliers (Un conflit
flagrant entre présence et prise de parole ; Ces hommes qui censurent ; La (secrète) subversion
du silence), les conséquences du machisme. Celles du demi-siècle d’embargo étasunien contre
le régime castriste sont questionnées par « Censure politique ou économique ? Le cas de
Leonardo Padura Fuentes, écrivain cubain publiant en Espagne », où Paula María Martínez
Michel (Tours) répond en cinq phases (L’auteur et son œuvre ; Histoire d’un désenchantement ;
Écrire à Cuba ; Critique de la société cubaine ; Un portrait cruel et sans concessions). Sous la
plume de Mónica Zapata (Tours), « Censure et mémoire. “La noche de los visones” de Pedro
Lemebel » conclut, en trois étapes (Censure et mémoire selon Freud ; Mémoire et censure dans
la fiction de Pedro Lemebel ; Hypothèses) sur le fonctionnement psychanalytique du rêve. La
théorie freudienne éclaire ainsi l’étude d’une nouvelle chilienne remémorant, trente ans après,
les ravages du sida parmi des homosexuels qui s’étaient réunis pour la dernière Saint-Sylvestre
de l’Unité Populaire.
Avant de se clore opportunément sur un commode index onomastique, ce livre à la
densité appréciable propose une substantielle bibliographie générale. Elle réunit des sources
historiques, journalistiques, épistolaires ou romanesques de première et de seconde main
comme des références essentielles sur l’état de la question. On ne saurait donc lire cet
ouvrage sans profit puisque, par la variété de leurs approches ‒ civilisationnistes, littéraires
ou linguistique ‒ et des sujets qu’elles traitent monographiquement ‒ transportant le lecteur
du XVe au XXIe siècle, depuis la France jusqu’au Chili, en passant par l’Espagne, le Portugal,
Cuba, le Guatemala, le Pérou, l’Uruguay et l’Argentine ‒, les études de cas qui le constituent
témoignent de la richesse de son champ d’investigation, d’ailleurs élargi par l’équipe ICD lors
de son colloque international « Paradigmes de l’autorité » du 30-I au 1-II-2014.
Notes
1 Juan Carlos GARROT ZAMBRANA, Jean-Louis GUEREÑA, Mónica ZAPATA (dir. ), Figures de la censure
dans les mondes hispanique et ibéro-américain, Paris, Indigo & Côté-femmes, 2009, 396 p.
2 Marie-Aline
120 p.
BARRACHINA
(dir. ), Censure(s) et identité(s), Poitiers, Les Cahiers Forrell n°11, 1999,
Référence(s) :
Guereña, Jean-Louis et Zapata, Mónica, Censures et manipulations dans les mondes ibérique
et latino-américain, Tours, Presses universitaires François-Rabelais (coll. « Civilisations
étrangères » dir. par Jean-Louis Guereña et Trevor Harris), 2013, 388 p.
Pour citer cet article
Référence électronique
Marie-Catherine Chanfreau, « Censures et manipulations dans les mondes ibérique et latinoaméricain », Cahiers de civilisation espagnole contemporaine [En ligne], | 2015, mis en ligne le 12
juillet 2015, consulté le 14 juillet 2015. URL : http://ccec.revues.org/5820
À propos de l’auteur
Marie-Catherine Chanfreau
Maître de conférences*, Université de Poitiers/CREC EA * Université Paris-iii
Cahiers de civilisation espagnole contemporaine | 2015
4
Censures et manipulations dans les mondes ibérique et latino-américain
Droits d’auteur
© CCEC ; auteurs
Cahiers de civilisation espagnole contemporaine | 2015
5