Le néo-paganisme - Editions de La Hutte

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Le néo-paganisme - Editions de La Hutte
Stéphane FRANÇOIS
Le néo-paganisme :
une vision du monde
en plein essor
Éditions de La Hutte
BP 8 - 81340 Valence d’Albigeois
Site Web : www.editionsdelahutte.com
Adresse e-mail : [email protected]
Préface
Le temps du paganisme mondialisé
« Une explosion païenne » : c’est le constat dressé par James
Lewis, lors d’une session sur le néo-paganisme au congrès
annuel de l’American Academy of Religion, à Washington, en
novembre 2006. Dans le monde anglophone, des colloques
scientifiques accueillent aujourd’hui des ateliers sur le sujet.
Les universitaires qui y participent s’affichent fréquemment
eux-mêmes comme néo-païens. Il existe non seulement des
magazines païens en vente dans les grandes librairies américaines, mais aussi des revues académiques spécialisées. Autant
d’indices de l’installation et de l’affirmation d’une nouvelle
composante dans notre environnement religieux, même si elle
reste numériquement modeste, quoique pas insignifiante en
Amérique du Nord1.
1. Ce ne sont pas les chiffres absolus qui frappent, mais la multiplication très
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Le néo-paganisme : une vision du monde en plein essor
À vrai dire, quand nous avions lu, il y a près de vingt-cinq
ans, la première édition de ce classique sur le néo-paganisme
américain qu’est le livre de Margot Adler2 , nous pouvions
nous demander si ce phénomène encore émergent – mais déjà
chatoyant – ne connaîtrait pas l’usure et réussirait à traverser
durablement l’Atlantique. Quelques-unes des « sorcières »3
américaines, propageant un message à la fois écologiste et
féministe (le paganisme comme culte de la Déesse), venaient
certes prononcer des conférences et animer des séminaires,
notamment dans les régions germanophones de l’Europe.
Mais sur le paganisme allemand pesait l’hypothèque de l’utilisation de certains de ses thèmes sous le IIIe Reich, même si
l’on assista à des reconstitutions de groupes néo-germaniques
dès les années suivant la guerre et à une réémergence plus large
dès les années 19704. Quant au paganisme en France, à côté de
ses manifestations intellectuelles et politiques (dans la mourapide du nombre de ceux qui se déclarent païens (multiplication par quatre en
une dizaine d’années dans les pays anglo-saxons, beaucoup plus forte encore
aux États-Unis).
2. Margot Adler, Drawing Down the Moon: Witches, Druids, Goddess-Worshippers,
and Other Pagans in America Today, Boston, Beacon Press, 1979 ; éd. revue et
augmentée, 1986.
3. Comme nous le verrons, ce terme est réhabilité dans un sens positif : la sorcière
aurait en fait été l’héritière de la « vieille religion » préchrétienne, réprimée et
vilipendée par un christianisme « patriarcal ». Même si cette relecture ne convainc
guère les historiens...
4. Pour un panorama concis : Stefanie von Schnurbein, Göttertrost in Wendezeiten.
Neugermanisches Heidentum zwischen New Age und Rechtsradikalismus,
Munich, Claudius Verlag, 1993.
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Préface
vance de la « Nouvelle Droite »), l’on pouvait surtout voir ici
et là quelques groupes druidiques.
Or, nous observons l’apparition d’un paganisme diversifié. Même en France, ce ne sont plus seulement des associations druidiques qui composent le paysage païen : tous les
courants se trouvent aujourd’hui présents, au moins de façon
embryonnaire, de la Wicca et de l’Asatru aux néo-grecs et néoégyptiens. Des groupes naîtront dans les années à venir. Il est
peu vraisemblable qu’ils attirent des foules, il faut se garder
d’en exagérer l’importance, mais quelques-uns s’établiront
sans doute durablement, si l’individualisme des démarches
païennes5 peut être surmonté pour déboucher sur la création
de communautés stables et sans émiettement continuel. Les
chercheurs qui voudraient y prêter attention pourraient, en
ce moment même, observer ces petites structures naissantes,
qui se cherchent lors de rencontres ou dans des forums sur
Internet. En outre, comme le fait Stéphane François dans ce
livre, il importe de discerner des signes d’une nouvelle présence païenne dans la culture contemporaine : à côté des
mouvements, il y a des images et des idées, dont l’impact se
révèle à la fois plus vaste et diffus, et créant d’ailleurs pour des
groupes organisés un environnement propice.
5. Cf. Oliver Ohanecian, Wer Hexe ist, bestimme ich. Zur Konstruktion von
Wirklichkeit im Wicca-Kult, Hamburg-Schenefeld, EB Verlag, 2005.
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Le néo-paganisme : une vision du monde en plein essor
La floraison païenne s’alimente à plusieurs sources. Nous
rencontrons une fascination occidentale pour les peuples
indigènes et les cultures « primitives ». L’exotisme et le rêve
qu’il offre peuvent prendre pour objet aussi bien une civilisation étrangère qu’un passé lointain : l’engouement pour
des « fêtes médiévales » en témoigne. Devenir druide, sorcière ou prêtresse d’un culte antique ouvre les portes d’un
monde différent, où la créativité et la fantaisie ont libre cours,
puisque pratiques et rituels ne peuvent s’appuyer sur le modèle
d’une tradition ininterrompue. La majorité des néo-païens ne
cherchent pas à reconstituer minutieusement des rites disparus. Mais plus d’un d’entre eux lit avec intérêt les ouvrages
d’historiens sur les religions anciennes, pour en tirer (sélectivement) des éléments dans un processus d’« invention de
la tradition », conjuguant innovations et remplois de bribes
issues de différentes périodes historiques. Des œuvres littéraires ont exercé aussi une influence.
Si l’attitude occidentale retient ici notre attention, remarquons que les remises à l’honneur de l’héritage préchrétien se
manifestent aussi ailleurs : le nouveau gouvernement bolivien
ne se contente pas de promouvoir les langues indigènes, mais
le ministre de l’Éducation voudrait remplacer dans les écoles
l’enseignement religieux par des cours d’histoire des religions
mettant plus l’accent sur les croyances traditionnelles6. Des
6. Monte Reel, « In Bolivia, Speaking Up for Native Languages », Washington
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Préface
paganismes modernes sont apparus au sein de groupes indigènes sous différentes latitudes, ne serait-ce qu’en tant que
réactions de traditions peu organisées pour répondre aux défis
du christianisme tout en se modernisant. Mais c’est un autre
sujet, quoique pas sans liens avec celui qui nous intéresse.
Les paganismes sont présentés comme des « religions de la
nature ». La sensibilité écologique et l’attrait pour la nature
ne signifient pas que tout païen sera un militant pour les
causes chères aux défenseurs de l’environnement, mais des
sympathies existent, et un segment de la communauté peut se
reconnaître dans l’étiquette écopaïenne. Les païens auront en
tout cas le sentiment de suivre une voie religieuse en harmonie
avec la nature et refusant les violences faites à celle-ci. Si la
majorité des païens vivent dans des villes, comme la plupart
d’entre nous, un pourcentage non négligeable résiderait dans
des zones rurales, contrairement à une idée reçue. L’attrait
pour la nature n’est donc pas simplement un fantasme d’habitants des villes.
Le développement du néo-paganisme est aussi un produit
de la modernité et des techniques de communication : le facteur le plus important pour expliquer la floraison païenne est
Internet7. Hier isolés, des païens dispersés peuvent trouver
Post, 30 janvier 2007, p. A10.
7. Cf. Douglas E. Cowan, Cyberhenge: Modern Pagans on the Internet, New YorkLondres, Routledge, 2005.
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Le néo-paganisme : une vision du monde en plein essor
en ligne des coreligionnaires : le portail américain Witches’
Voice (www.witchvox.com) tient à jour un répertoire de près
de 9 500 sites païens actifs ! Ils sont encouragés par les échos
d’activités dans des régions où existent des groupes structurés et sont confortés par les contacts qu’ils entretiennent avec
d’autres internautes. Ils reçoivent et échangent des informations qui leur permettent de s’équiper dans leur pratique et
dans leurs convictions : des jeunes (et parfois moins jeunes)
qui ressentaient une attirance vague se découvrent païens sur
la Toile. Et les nouvelles circulent sur Internet, traversant les
références à une tradition : un site dédié aux dieux de l’Égypte
antique est annoncé sur un forum odiniste8, dans une page de
liens d’un groupe de la Wicca et par d’œcuméniques druides.
La mondialisation du paganisme ne représente pas simplement sa présence dans plusieurs pays ou son foisonnement
transnational sur Internet : elle se traduit aussi par le développement d’attitudes syncrétiques et par les interactions entre
traditions. Sur un site odiniste, un adolescent normand dit
sa passion simultanée pour les dieux du Nord de ses ancêtres
8. Nous utilisons ici le terme dans un sens générique en référence au paganisme
nordique, mais certains chercheurs suggèrent de distinguer entre odinisme
et Ásatrú (référence aux Ases, l’un des deux ordres de dieux de la tradition
nordique) comme deux types différents de groupes (avec des frontières cependant
poreuses) : dans le contexte américain, cf. Jeffrey Kaplan, « The Reconstruction of
the Ásatrú and Odinist Traditions », in James R. Lewis (dir.), Magical Religion and
Modern Witchcraft, Albany, State University of New York Press, 1996, pp. 193-236.
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Préface
et pour les percussions africaines. Sur un forum kémite9 aux
États-Unis, un Afro-Américain revendique son héritage
égyptien, c’est-à-dire africain, mais se plaint de ne trouver
comme représentants de la tradition kémite que des enseignants de race blanche. Un universitaire païen britannique
nous a raconté sa rencontre à Tokyo avec un Japonais adepte
de la Wicca, auquel il tenta de suggérer que le shintoïsme correspondait peut-être plus à son patrimoine païen nippon...
De précédentes générations païennes tendaient à lier
leur engagement religieux et un héritage culturel ou racial.
Aujourd’hui, en dehors de courants qui tiennent à marquer
cette différence (ce livre évoque certains d’entre eux), l’appartenance à une tradition ou à une autre devient de plus en plus
une affaire de choix personnel, d’inclination, de feeling. Cela
n’étonnera personne dans un contexte d’orientations religieuses individualisées. Il y a eu des précédents historiques :
l’introduction des cultes orientaux dans l’Empire romain
présente à cet égard quelques analogies10. Cela ne signifie pas
que le paganisme « ethnique » abordé par Stéphane François
9. Le kémitisme est aujourd’hui associé à deux types de groupes, qui partagent
certains éléments d’une généalogie intellectuelle, mais aboutissent à des réalités
très différentes : d’une part, le radicalisme politique noir de la Tribu Ka (une étude
sur le radicalisme de la Tribu Ka sera bientôt publié : Stéphane François, Damien
Guillaume et Emmanuel Kreis, « La Tribu Ka. Une version africaine de la pensée
völkisch ? ») ; d’autre part, une référence spirituelle à l’héritage égyptien et à ses
dieux pour des gens de toutes races.
10. Cf. Robert Turcan, Les Cultes orientaux dans le monde romain, Paris, Les
Belles Lettres, 1989.
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Le néo-paganisme : une vision du monde en plein essor
disparaîtra : mondialisation et rencontres entre cultures produisent tant des métissages que des réactions de défense. Le
paganisme « ethnique » se déclinera probablement selon des
modalités de plus en plus variées et côtoiera des paganismes
bigarrés, dans lesquels la dimension ethnique ne jouera aucun
rôle. Il continuera aussi d’y avoir des débats et tensions entre
partisans d’un paganisme ethnique et d’autres formes de
paganisme11.
Malgré la variété des références culturelles et historiques,
une identité païenne commune tend à se créer : l’on se reconnaît à la fois comme membre d’un groupe au sein d’une tradition spécifique et comme païen dans un sens générique,
théoriquement solidaire de l’ensemble des païens. Les facilités de communication et de voyage qui existent aujourd’hui
permettent en outre à des païens occidentaux d’entrer en
contact avec des représentants d’autres cultures. Les racines
de ces groupes non occidentaux sont différentes, mais les
uns et les autres peuvent se retrouver, mus à la fois par une
défiance partagée envers les religions missionnaires et par le
besoin ressenti d’affirmer une universalité à travers la création
d’un réseau. Les résultats en sont parfois étonnants, comme le
World Council of Elders of Ancient Traditions and Cultures,
dont l’impulsion provient de milieux nationalistes hindous,
11. Des sites païens de plusieurs pays européens arborent un bandeau « Païens
contre la haine » et marquent un refus net de l’identitarisme.
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Préface
et qui – sous le signe de la résistance au prosélytisme et de la
défense des héritages culturels – a rassemblé pour un premier
congrès à Mumbai, puis lors de réunions subséquentes, des
représentants de religions « indigènes » de tous les continents, y compris des néo-païens occidentaux. Les païens quittent ainsi la marginalité : leurs porte-parole les plus activistes,
notamment américains, ne manquent pas de saisir toute
occasion d’affirmer une présence païenne dans des rassemblements interreligieux. Nous n’en sommes pas encore là en
Europe, mais des aspirations pointent pour sortir de l’ombre :
témoin en est le « Projet Gungnir », à l’initiative de la Libre
Assemblée Païenne Francophone (www.lapf.fr), pour réhabiliter « l’image des paganismes en francophonie par un travail
constructif, concernant toutes les traditions païennes ».
Se réclamant d’anciennes traditions, et dans quelques cas
de généalogies imaginaires, le paganisme moderne est en fait
un nouveau mouvement religieux12 . Il n’appelle pas la dérision, mais l’intérêt des chercheurs qui observent la créativité
et le foisonnement religieux contemporain, et qui – sans partager le plus souvent les croyances de ceux qu’ils étudient –
sont attentifs à ces développements et à ce qu’ils peuvent nous
apprendre.
12. Graham Harvey, Listening People, Speaking Earth: Contemporary Paganism,
Londres, Hurst, 1997, p. 52.
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Le néo-paganisme : une vision du monde en plein essor
Il est heureux que des recherches et analyses sur ce phénomène soient également publiées en français. Stéphane François
nous convie à une première exploration du néo-paganisme,
s’efforçant d’en mettre en lumière les racines historiques, ce
qui est indispensable afin de les insérer dans leur contexte
culturel et religieux : le néo-paganisme n’existerait pas sans
l’interaction avec d’autres courants de la religiosité parallèle.
Stéphane François explique et raconte. En même temps, il ne
nous cache pas ses réserves et les questions qu’il se pose : les
païens modernes qui liront ce livre le prendront sans doute
comme une invite à une réflexion critique, dans un milieu qui
n’est généralement certes pas fermé aux débats.
Quant aux chercheurs, notamment ceux de la génération
montante, ils y verront une incitation à s’intéresser sans préjugés et avec rigueur scientifique à ces groupes et à ce phénomène culturel. En Europe continentale, à commencer par les
pays francophones, presque tout reste à faire : études de cas et
enquêtes de terrain sont nécessaires pour en apprendre plus.
Or la période actuelle offre des possibilités riches d’enseignements. Remercions Stéphane François d’ouvrir ici la porte.
Jean-François Mayer
Chargé de cours à l’Université de Fribourg (Suisse)
Rédacteur en chef de Religioscope – www.religion.info
Fribourg, le 25 février 2007
Avant-propos
Depuis le début des années quatre-vingt, de plus en plus de
personnes se réclament, tant au plan religieux que philosophique, du paganisme. C’est devenu un phénomène culturel et
sociétal de grande ampleur. Des États lui reconnaissent même
le statut de religion. Ainsi, l’Asatru, la religion des Vikings,
est devenue en 1973 l’une des religions officielles islandaises.
Depuis le 6 novembre 2003, ce culte a été reconnu officiellement au Danemark. Dans les pays anglo-saxons, la Wicca
est devenue un phénomène de société où ses pratiquants se
comptent par centaines de milliers. Il existe même en GrandeBretagne et aux États-Unis des aumôniers wiccans dans les
universités. Tandis qu’en Grande-Bretagne, le prince de Galles
est traditionnellement Grand Druide. Corrélativement à cet
essor, un certain nombre de questions sont posées par ses
observateurs sur le contenu de son discours, notamment sur
sa nature et sur son positionnement idéologique.
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Le néo-paganisme : une vision du monde en plein essor
L’écriture de ce court essai a été motivée par une simple
constatation : il n’existe que très peu d’études dans notre
pays sur ce sujet pourtant indispensable à la compréhension
des évolutions des sociétés occidentales, en particulier des
subcultures « jeunes ». Mais il est vrai que ce sujet a été très
peu défriché en France, contrairement aux pays anglo-saxons.
De fait, le peu d’études francophones reste maintenu dans le
champ des sciences sociales, surtout dans celui des sciences
des religions. Il est d’ailleurs symptomatique que les textes de
référence sur cette question d’universitaires anglais, américains ou néerlandais ne soient même pas traduits en français.
Ainsi, nous avons remarqué qu’un large éventail de textes
« néo-païens » occidentaux contemporains montre à la fois
la diversité des discours politiques et une unité doctrinale profonde. Cette unité se caractérise par les traits suivants : éloge
du différentialisme radical, faisant du communautarisme
une solution au multiculturalisme et refusant l’ethnocide ;
critique de la pensée occidentale, individualiste et uniformisatrice, considérée comme manifestation de la modernité, de
l’américanisation des mœurs et de l’idéologie du progrès ;
conception pagano-panthéiste de l’écologie. Malgré les divergences politiques, les néo-païens tentent de se réunir afin
d’obtenir, à travers la création de confédérations, une visibilité politico-sociale voire une reconnaissance religieuse.
Afin de mettre en évidence cette vision du monde, nous
avons pris comme paradigme la cohérence profonde de
la pensée néo-païenne. Bien entendu, comme toutes les
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Avant-propos
constructions, ce modèle de compréhension est perfectible,
d’autant plus qu’il y a peu d’études sur ce sujet, y compris
dans le champ des sciences humaines, pouvant servir de base à
cette réflexion. En outre, ce discours est déconcertant pour les
universitaires par son éclectisme et par son aspect bigarré. Il
ne faut pas oublier que nous évoluons dans des milieux « subculturels », « underground », pour reprendre une expression anglo-saxonne, qui ont leurs propres références et non
celles des milieux intellectuels « classiques ». Cela explique
d’ailleurs le peu d’étude sur ce sujet. Cela nous force aussi à
dépasser une approche trop réductrice. En effet, dans cette
subculture, des textes d’activistes païens, d’universitaires et
d’occultistes sont mis sur le même plan. De même, les considérations religieuses côtoient le militantisme politique, les
réflexions ethnologiques ou écologiques.
En France, l’un des lieux communs d’une certaine politologie est l’amalgame fait entre droite radicale et paganisme. En effet, il existe un nombre important de textes et
d’articles divers sur le paganisme « d’extrême droite », qui,
certes, existe mais qui reste très minoritaire par rapport à
l’immense majorité des structures néo-païennes. Il est aussi
vrai que certains païens allemands ou autrichiens furent des
membres de la SS1, donnant ainsi naissance à la légende de
« l’ésotérisme nazi »2 . Toujours en France, le néo-paganisme
1. Cf. Nicholas Goodrick-Clarke, Les Origines occultistes du nazisme. Les
aryosophistes en Autriche et en Allemagne 1890-1935, Pardès, Puiseaux, 1992.
2. L’« ésotérisme nazi » est aussi largement tributaire du Best-seller de Jacques
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Le néo-paganisme : une vision du monde en plein essor
est souvent considéré comme la principale caractéristique
de la Nouvelle Droite. Cela a été surtout vrai entre le milieu
des années soixante-dix et le milieu des années quatre-vingt.
Mais surtout, ces textes pêchent par leur aspect partial, par
des démonstrations confuses et/ou superficielles quand il ne
s’agit pas de raccourcis abusifs. En effet, le néo-paganisme,
étant une religion sans dogmes, sans Églises et sans clergé,
fascine ceux qui se réclament de l’anti-autoritarisme et qui
cherchent alors une voie spirituelle adaptée à leurs convictions. Cette forme libertaire du néo-paganisme se développe
considérablement en Europe et aux États-Unis à compter de
la fin des années soixante-dix où il attire des alternatifs ou des
écologistes. Ces formes de néo-paganisme sont les héritières
de la contre-culture américaine des années soixante-dix.
Contrairement à nos autres travaux, nous ne nous attarderons pas dans celui-ci sur les liens entre le néo-paganisme et la
politique, sauf dans le cinquième chapitre, pour nous concentrer exclusivement sur l’étude du phénomène néo-païen. En
outre, nous n’avons pas la prétention d’être, dans ce petit
texte, exhaustif. Nous voulons simplement essayer d’aider le
lecteur à se retrouver dans les méandres de ce monde foisonnant, complexe et bigarré.
Bergier et Louis Pauwels, Le matin des magiciens, Paris, Gallimard, 1960 luimême tributaire, comme l’a montré Hans Thomas Hakl, de la littérature occultiste
des années trente et quarante. Cf. Hans Thomas Hakl, Unknown Sources. National
Socialism and the Occult, Holmes Publishing, 2005.
Table des matières
Préface de Jean-François Mayer ..............................................
Avant-propos .............................................................................
Chapitre I – Qu’est-ce que le néo-paganisme .......................
Chapitre II – Les paganismes à contenu religieux ..............
Chapitre III – Deux exemples de paganismes ethniques ...
Chapitre IV – La persistance d’un paganisme culturel .....
Chapitre V – Le discours païen : un refus de la modernité
En guise de conclusion – Vers une Internationale païenne ?
Pour aller plus loin ....................................................................
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