Les cahiers n°2 - Gestionnaire de régimes de Retraite et de fonds

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Les cahiers n°2 - Gestionnaire de régimes de Retraite et de fonds
Janvier 2015 – 02
Les carrières des non titulaires du secteur
public : analyse rétrospective et projections
Jérémy Boccanfuso, Antoine Bozio, Thomas Bréda et Clément Imbert
Institut des Politiques Publiques
Les carrières des non titulaires du secteur public
Les carrières des non titulaires du secteur public :
analyse rétrospective et projections
Jérémy Boccanfuso, Antoine Bozio, Thomas Bréda et Clément Imbert
Institut des Politiques Publiques
Janvier 2015
Questions Retraite & Solidarité – Les cahiers reflète les idées de leurs auteurs et n'expriment pas
nécessairement la position de la Caisse des Dépôts ni celle des régimes qu’elle gère. Ce document
est disponible sur le site internet de la Direction des retraites et de la solidarité de la Caisse des
Dépôts https://www.cdc.retraites.fr.
Questions Retraite & Solidarité – Les cahiers reflects the opinions of the authors and do not
necessarily express the views of the Caisse des Dépôts or the schemes managed. This document is
available on the Direction des retraites et de la solidarité de la Caisse des Dépôts website
https://www.cdc.retraites.fr.
Questions Retraite & Solidarité – Les cahiers
janvier 2015 – 02
Les carrières des non titulaires du secteur public
Avant-propos
L’Ircantec est le régime de retraite complémentaire des agents non titulaires du secteur
public. Ce régime qui fonctionne en points, est financé par la répartition. Sa solvabilité
dépend notamment du dynamisme de l’emploi non titulaire. Les paramètres du régime que
sont les valeurs d’achat et de service du point de retraite, font le lien entre d’une part la
masse salariale de l’emploi non titulaire, et d’autre part, le niveau des pensions servies par le
régime. Actuellement fixés par les pouvoirs publics, ils seront déterminés par le Conseil
d’administration du régime à compter de 2017.
Pour répondre à cet enjeu, la convention d’objectif et de gestion, signée par l’Ircantec, l’Etat
et la Caisse des Dépôts, prévoit le développement d’outils de pilotage adaptés aux
spécificités des populations affiliées au régime. Pour fonctionner, ces outils doivent pouvoir
s’appuyer sur des projections fines de la masse salariale des non titulaires du secteur public.
Or l’emploi non titulaire est très fluctuant, avec un turn-over important, et est très hétérogène
d’une fonction publique à l’autre. Il est par ailleurs très sensible aux évolutions des politiques
d’emploi public. Afin d’en préciser la dynamique, l’Ircantec a passé fin 2012 un partenariat de
recherche avec l’Institut des Politiques Publiques (IPP), un organisme porté par PSE – Ecole
d’Economie de Paris, créé pour promouvoir l’analyse et l’évaluation quantitatives des
politiques publiques.
La finalité de cette recherche financée par l’Ircantec est de produire des séries de l’emploi
non titulaire selon plusieurs scénarios, pour mettre notamment en évidence l’impact de
modifications économiques et politiques sur les effectifs des affiliés et la masse salariale,
plafonnée et déplafonnée.
En 2013, l’IPP a procédé à une analyse rétrospective de l’emploi non titulaire sur les
quarante dernières années, en s’appuyant à la fois sur les données de gestion du régime, de
l’enquête Emploi de l’INSEE et sur les échantillons inter-régimes de la DREES. Les grandes
caractéristiques en sont présentées dans ce rapport, de même que le lien entre le cycle
économique et le recours par les employeurs publics à l’emploi non titulaire, ou encore
l’effet des politiques de titularisation et de décentralisation.
Sur la base de ces résultats, l’IPP a construit en 2014 un modèle de projection des effectifs et
de la masse salariale de l’emploi non titulaire par grande famille de fonction publique.
L’exploitation de ce modèle a donné lieu à six variantes macro-économiques reprenant pour
partie les scénarios du Conseil d’orientation des retraites, et neuf variantes institutionnelles,
allant de la poursuite de la décentralisation aux politiques de titularisation, en passant par les
conséquences de la loi de réforme des retraites de 2014 sur le champ d’application du régime.
Les résultats de la recherche contenus dans ce rapport ont été approuvés par délibération
du Conseil d’administration de l’Ircantec le 16 décembre 2014. Ils constituent un éclairage
précieux pour les administrateurs qui devront dès 2015 réfléchir au cadre de projection dans
lequel ils évalueront l’équilibre de long terme du régime et les modifications paramétriques
éventuellement nécessaires pour le garantir.
Ce travail de recherche est diffusé conjointement par la Direction des retraites et de la solidarité
de la Caisse des Dépôts dans Questions Retraite & Solidarité – Les cahiers n°2
(http://retraitesolidarite.caissedesdepots.fr/liste-publications), par l’Institut des Politiques Publique
dans le Rapport n°5 (http://www.ipp.eu/fr/publications/rapports-ipp/) et par l’Ircantec
(http://www.ircantec.fr).
Questions Retraite & Solidarité – Les cahiers
janvier 2015 – 02
L’Institut des politiques publiques (IPP) est développé dans le cadre d’un
partenariat scientifique entre PSE-Ecole d’économie de Paris (PSE) et le
Centre de Recherche en Economie et Statistique (CREST). L’IPP vise à
promouvoir l’analyse et l’évaluation quantitatives des politiques publiques en
s’appuyant sur les méthodes les plus récentes de la recherche en économie.
www.ipp.eu
L ES
AUTEURS DU RAPPOR T
Jérémy Boccanfuso est élève à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) et
à l’École nationale de la statistique et de l’administration économique (ENSAE). Il prépare
actuellement le master « Analyse et politique économiques » de l’École d’économie de Paris.
Antoine Bozio est directeur de l’Institut des politiques publiques (IPP), professeur associé à
l’École d’économie de Paris et maître de conférences à l’École des hautes études en sciences
sociales (EHESS). Il a consacré ses travaux de recherche à l’étude des retraites, de la fiscalité
et de la protection sociale.
Page personnelle : http ://www.ipp.eu/fr/annuaire/antoine-bozio/
Thomas Bréda est professeur associé à l’École d’économie de Paris, chercheur au CNRS et
chercheur associé au Center for Economic Performance de la London School of Economics. Spécialiste de l’économie du travail, ses travaux portent également sur l’économie de l’éducation.
Page personnelle : http ://www.parisschoolofeconomics.eu/en/breda-thomas/
Clément Imbert est chercheur postdoctoral au département d’économie de l’université d’Oxford. Ses travaux de recherche portent principalement sur des questions liées à l’économie du
développement, l’emploi public et l’économie politique.
Page personnelle : https ://sites.google.com/site/clemimbert/home
R EMERCIEMENTS
Nous tenons à remercier l’Institution de retraite complémentaire des agents non
titulaires de l’État et des collectivités publiques (IRCANTEC) pour le soutien financier qu’elle a apporté à cette étude.
Ce rapport de recherche doit beaucoup à Philippe Treilhou et l’équipe Actuariat
et études statistiques du Service pilotage des fonds de la Direction des retraites et
de la solidarité de la Caisse des Dépôts qui, par leurs commentaires pertinents et
conseils judicieux, nous ont accompagné et aidé tout au long de ce projet. Nous
remercions en particulier Isabelle Bridenne et Laurent Soulat pour leur relecture
attentive.
Nous remercions également la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) du ministère des Affaires sociales et de la santé
pour nous avoir donné accès aux informations de l’Échantillon inter-régimes des
cotisants (EIC), ainsi que le réseau Quetelet pour l’accès aux données de l’enquête
Emploi de l’Insee.
Bien évidemment, toutes les erreurs, omissions ou approximations contenues dans
ce rapport sont de la seule responsabilité des auteurs.
1
Les carrières des non-titulaires du secteur public
2
S YNTHÈSE
● Les non-titulaires représentent une part non négligeable de la main d’œuvre
du secteur public (environ 20 % en 2011), part qui s’est accrue au cours des
deux dernières décennies. Ces emplois offrent une plus grande flexibilité de la
gestion des ressources humaines du secteur public par l’adaptation aux variations de l’activité et le recrutement de personnels aux compétences nouvelles.
Ils représentent néanmoins un risque de précarisation d’une partie des agents
du secteur public qui explique des efforts répétés pour limiter le recours à l’emploi non-titulaire par un cadre réglementaire contraignant, voire le réduire par
des politiques de titularisation. Au-delà de l’opposition entre ces deux logiques,
cette étude vise à apporter des éléments quantifiés permettant de mieux comprendre le recours aux non-titulaires dans le secteur public et son évolution
récente afin d’élaborer les projections de son évolution future.
● Trois bases de données ont été utilisées afin d’analyser l’emploi des non-titulaires.
La première, au centre de ce projet, est la base administrative du régime des
non-titulaires de la fonction publique, l’Ircantec. Elle contient des informations
sur les caractéristiques des emplois et des employeurs pour l’ensemble des périodes de cotisation à l’Ircantec pour les individus nés au mois d’octobre de
1971 à 2011, fournissant une source d’information complète sur l’emploi nontitulaire qui n’avait encore jamais été exploitée à des fins de recherche universitaire. Nous avons également utilisé les données de l’échantillon inter-régimes
3
Les carrières des non-titulaires du secteur public
des cotisants (EIC) de 2009, que nous avons pu apparier statistiquement aux
données de l’Ircantec pour obtenir une vision d’ensemble de la carrière des cotisants. Nous avons enfin exploité les données des enquêtes Emploi de l’Insee,
de 1980 à 2011, qui offrent une analyse plus fine des caractéristiques des nontitulaires et des emplois qu’ils occupent.
Analyse rétrospective des carrières des non-titulaires
● En accord avec la vocation de l’emploi non-titulaire qui est de répondre à des
besoins temporaires de main d’œuvre, les emplois des non-titulaires sont la plupart du temps à durée déterminée (58 % des contrats en 2011) et souvent pour
des périodes très courtes (moins de deux ans en moyenne). Les non-titulaires
travaillent moins souvent à temps complet (environ 77 % entre 1971 et 2011)
que la moyenne de la population active (85 %). Cette précarité relative conduit
11 % d’entre-eux à travailler pour plusieurs employeurs en même temps. Inévitablement, la courte durée des emplois des non-titulaires implique des rémunérations annuelles faibles en comparaison de celles du secteur privé.
● Au-delà de ces caractéristiques générales, l’analyse détaillée des cotisants à l’Ircantec révèle leur profonde hétérogénéité. Une typologie, obtenue par la méthode d’appariement optimal, permet de distinguer quatre groupes de cotisants
en fonction de la place qu’occupe l’emploi non-titulaire au cours de leur carrière. Le premier rassemble les cotisants qui passent une grande part de leur
carrière à cotiser exclusivement à l’Ircantec. Le second groupe est composé de
ceux qui cotisent eux aussi à l’Ircantec tout au long de leur carrière, mais travaillent dans le secteur privé en parallèle. Le troisième groupe comprend les
cotisants qui travaillent dans le secteur privé et effectuent de courtes périodes à
l’Ircantec en tant que non-titulaires. Finalement, le dernier groupe est celui des
cotisants qui sont titularisés après quelques années de cotisation à l’Ircantec.
4
Synthèse
● L’analyse agrégée de l’effectif des cotisants de l’Ircantec permet d’identifier
quelques facteurs qui ont affecté l’évolution et la structure de l’emploi nontitulaire au cours des dernières décennies. Le premier fait marquant est le
contraste entre la baisse de la part des non-titulaires dans la fonction publique
dans les années 1970 et 1980 et la hausse dans les années 1990 et 2000 qui soulignent respectivement le rôle des politiques de titularisation et le phénomène
de décentralisation observé en France.
● Un second pan de l’analyse des déterminants du recours aux non-titulaires au
niveau agrégé s’est porté sur les déterminants macroéconomiques. L’analyse
des séries temporelles montre qu’il existe une relation positive entre chômage et
recours aux non-titulaires. Cette relation se retrouve à la fois au niveau national
pour l’ensemble de l’emploi Ircantec et au niveau départemental pour l’emploi
de la fonction publique territoriale. Elle traduit à la fois l’usage de l’emploi
public comme politique contracyclique (via les emplois aidés par exemple), la
préférence des travailleurs pour le secteur public lors des périodes de récession,
et l’augmentation des besoins de services sociaux et médicaux.
Projections de l’évolution du régime de l’Ircantec
● L’analyse détaillée de la carrière des cotisants à l’Ircantec, de leurs emplois
et des liens entre l’environnement économique et institutionnel et le recours
à l’emploi non-titulaire a fondé les bases du modèle de projection spécifique
aux cotisants de l’Ircantec. Celui-ci a pour ambition de guider les gestionnaires
et administrateurs dans la gestion des finances du régime complémentaire en
proposant des projections de l’effectif et de la masse salariale des cotisants de
l’Ircantec selon différents scénarios économiques et institutionnels.
● Les projections macroéconomiques effectuées à partir des scénarios du Conseil
d’orientation des retraites soulignent une fois de plus le rôle contracyclique de
5
Les carrières des non-titulaires du secteur public
l’emploi non-titulaire puisque l’effectif des cotisants à l’Ircantec sera d’autant
plus important que le taux de chômage sera élevé à l’avenir. Cela n’affectera
toutefois que marginalement la masse salariale totale qui dépend essentiellement de la croissance de la productivité réelle du travail. Selon le scénario macroéconomique médian, l’effectif des cotisants (hors élus locaux) devrait ainsi
augmenter de 2,65 millions en 2011 à 2,91 millions en 2060 et la masse salariale hors inflation de 33 milliards à 93 milliards d’euros.
● Cette dynamique sera toutefois fortement affectée par l’évolution de l’environnement institutionnel et plus particulièrement par le processus de décentralisation dont le troisième acte devrait être prochainement finalisé. Ainsi, en supposant qu’il affectera la composition de l’emploi public de façon similaire à ce que
nous avons observé durant la dernière décennie, la hausse de l’effectif des cotisants et de leur masse salariale sera beaucoup plus importante. En reprenant
les hypothèses macroéconomiques du scénario médian du Conseil d’orientation
des retraites, l’Ircantec devrait compter 3,33 millions de cotisants en 2060 pour
une masse salariale hors inflation de 104 milliards d’euros.
● Finalement, le modèle de projection permet également d’évaluer l’effet des réformes portant sur les règles d’affiliation des cotisants. Ainsi, la promulgation
de la loi du 20 janvier 2014 dont l’article 51 est consacré à la réaffirmation
du champ d’intervention de l’Ircantec devrait conduire, selon nos estimations,
à une baisse importante de l’effectif des cotisants. Toujours selon le scénario
macroéconomique médian, on observerait le transfert de 267 000 cotisants vers
les régimes de l’Arrco et de l’Agirc en 2060. La perte pour la masse salariale des
cotisants serait ainsi de 12 milliards d’euros (hors inflation) cette même année.
6
S OMMAIRE
Synthèse
3
Introduction
9
I
Analyse rétrospective de l’emploi non-titulaire
1 Présentation des données
13
15
1.1 Données de l’Ircantec . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
15
1.2 Données de l’échantillon inter-régimes de cotisants . . . . . . . . . .
23
1.3 Données de l’enquête Emploi : mieux connaître les cotisants . . . .
31
2 Caractéristiques des emplois Ircantec
41
2.1 Des emplois temporaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
41
2.2 Des emplois multiples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
48
2.3 Des périodes de cotisation courtes mais répétées . . . . . . . . . . . .
53
2.4 Des rémunérations faibles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
59
3 Typologie des carrières des cotisants
69
3.1 Méthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
70
3.2 Type 1 : les non-titulaires permanents . . . . . . . . . . . . . . . . . .
76
3.3 Type 2 : les spécialistes intervenant dans le public . . . . . . . . . . .
78
3.4 Type 3 : les intermittents du secteur privé . . . . . . . . . . . . . . . .
80
3.5 Type 4 : les futurs titulaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
81
4 Déterminants politiques, institutionnels et macroéconomiques de l’emploi Ircantec
85
4.1 Emploi public et recours aux non-titulaires . . . . . . . . . . . . . . .
86
4.2 Déterminants macroéconomiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
90
7
Les carrières des non-titulaires du secteur public
II
Projection de l’évolution du régime de l’Ircantec
5 Le modèle de projection
101
103
5.1 Le choix de modélisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103
5.2 Effectif des cotisants par exercice . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111
5.3 Masse salariale et tranche de cotisation . . . . . . . . . . . . . . . . . 116
6 Performance et validation du modèle
121
6.1 Dynamique interne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121
6.2 Premier exercice de projection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 125
6.3 Modèles concurrents . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 128
7 Projections à l’horizon 2060
133
7.1 Scénarios économiques et démographiques . . . . . . . . . . . . . . . 133
7.2 Effectif des cotisants à l’horizon 2060 . . . . . . . . . . . . . . . . . . 139
7.3 Masse salariale et tranche de cotisation à l’horizon 2060 . . . . . . . 140
8 Variantes institutionnelles des projections
143
8.1 Modification du champ d’intervention de l’Ircantec . . . . . . . . . . 144
8.2 La décentralisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 147
8.3 Les titularisations et CDIsations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 150
Conclusion générale
159
Annexes
162
A. Traitements complémentaires des données . . . . . . . . . . . . . . . . . 163
B. Politiques de titularisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 177
C. Estimation du modèle de projection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 193
D. Compléments pour les projections à l’horizon 2060 . . . . . . . . . . . . 207
Bibliographie
216
Glossaire
217
Liste des tableaux
223
Liste des figures
227
8
I NTRODUCTION
Du point de vue des politiques publiques, les non-titulaires sont une partie importante du mode de gestion de la main d’œuvre du secteur public, dont l’augmentation dans les fonctions publiques hospitalière et territoriale est manifeste.
La flexibilité offerte par ce type d’emploi s’oppose au risque d’une précarisation
d’une partie des agents du secteur public, en opposition avec les fortes garanties
offertes par le statut de fonctionnaire titulaire. Cela induit régulièrement une tension entre la volonté de réduire l’usage de ce type d’emploi – par exemple par
des politiques de titularisation – et l’usage parfois croissant de dispositifs d’emploi
public hors fonction publique.
L’intérêt principal de ce projet est d’entamer des travaux précis sur l’emploi, la
rémunération et la carrière d’une partie importante de l’emploi public qui n’a fait,
jusqu’alors, l’objet que de peu de recherche universitaire. Si les agents titulaires
de la fonction publique ont fait l’objet de moins d’études que les salariés du privé
– en raison largement des différences d’accès aux sources statistiques –, les agents
non titulaires sont le plus souvent totalement ignorés. Le faible intérêt pour cette
partie de l’emploi public tranche avec son importance dans la mise en place des
politiques publiques, à la fois pour la production de services publics dépendant
fortement de personnels non-titulaires et pour la gestion de long-terme des engagements de retraite.
Du point de vue des gestionnaires du régime de l’Ircantec, le pilotage de long
terme de la masse des cotisants et des futurs retraités n’en est que plus complexe.
D’une certaine façon, la définition historique du champ d’application du régime
s’est faite par défaut pour des populations ne rentrant ni dans le cadre de la fonc9
Les carrières des non-titulaires du secteur public
tion publique ni dans celui du secteur privé. De ce fait, le régime s’est vu confier
une population très hétérogène où les profils de carrière peuvent être très différents.
Cette construction singulière fait des cotisants à l’Ircantec une population particulière de salariés qu’il est difficile d’analyser comme un ensemble homogène.
C’est pourquoi, un des objectifs premiers de ce travail a été d’identifier les oppositions principales entre les non-titulaires et leurs emplois (chapitre 2). Il en
ressort une dichotomie importante entre, d’une part, une majorité d’individus ne
cotisant que peu de temps à l’Ircantec dans des emplois temporaires, voire saisonniers et, d’autre part, une poignée de cotisants qui, à l’image des praticiens
hospitaliers, passeront l’essentiel de leur carrière à l’Ircantec. Nous avons ainsi
veillé à effectuer une typologie permettant d’identifier ces profils de carrière foncièrement différents dans le troisième chapitre.
Par ailleurs, la délégation au conseil d’administration du régime complémentaire
de l’Ircantec de la gestion des paramètres techniques (taux de cotisation, valeur
d’achat du point, etc.) prévue par la réforme de 2008, impliquait une révision profonde de leurs outils statistiques. Conscients des spécificités de leurs cotisants et
de la nécessité de disposer d’un outil de projection fiable afin d’aider les gestionnaires du régime complémentaire, nous avons développé un outil de simulation
pour l’effectif et la masse salariale des cotisants reposant sur les enseignements de
l’analyse de la carrière des cotisants. En outre, il s’est également avéré indispensable d’identifier les principaux facteurs économiques et institutionnels qui ont
affecté l’évolution du régime par le passé. Dans ce but, le quatrième chapitre analyse l’effet des politiques de titularisation et du phénomène de décentralisation
qui ont été responsables respectivement de la baisse du recours à l’emploi nontitulaire dans les années 1970 et 1980 et de la hausse observée depuis. L’analyse
des facteurs économiques a quant à elle permis de souligner le rôle contracyclique
de l’emploi non-titulaire.
En se fondant sur l’hétérogénéité des carrières des cotisants et les conséquences
10
Introduction
des variations de l’environnement économique et institutionnel sur ces dernières,
le modèle de projection présenté dans le cinquième chapitre permet de reproduire
l’évolution passée de façon satisfaisante. De plus, sa flexibilité permet de capturer
les répercussions de ces variations sur la composition du stock de cotisants lors de
chaque exercice et fournit ainsi une analyse fine de l’évolution de la masse salariale par tranche de cotisation des travailleurs à l’Ircantec. Pour la présentation de
l’évolution future du régime, il a été choisi de distinguer l’évolution qui serait due
aux facteurs économiques de celle due à l’environnement institutionnel. Ainsi, les
projections de l’évolution à l’horizon 2060 reposant sur les scénarios macroéconomiques du Conseil d’orientation des retraites sont présentées dans le septième
chapitre. Des variantes institutionnelles portant sur le champ d’intervention de
l’Ircantec, la décentralisation et les politiques de titularisation et CDIsation sont
ensuite discutées dans le huitième chapitre.
11
Les carrières des non-titulaires du secteur public
12
Première partie
Analyse rétrospective de l’emploi
non-titulaire
13
Les carrières des non-titulaires du secteur public
14
C HAPITRE 1
P RÉSENTATION
DES DONNÉES
Dans ce premier chapitre, nous présentons tour à tour les sources statistiques
utilisées dans cette étude : les données du régime Ircantec, l’Échantillon interrégimes de cotisants (EIC) et les données de l’enquête Emploi. Ces trois sources
ont chacune leurs avantages et leurs limites pour notre objet d’étude : les combiner nous permet de décrire à la fois les emplois, la carrière et les caractéristiques
des cotisants de l’Ircantec. En présentant chaque base, nous illustrons leur apport
par quelques statistiques descriptives sur l’emploi Ircantec. Nous expliquons également par quelles procédures statistiques nous identifions les cotisants Ircantec
dans l’enquête Emploi et apparions les données Ircantec avec celles de l’EIC.
1.1
Données de l’Ircantec
Dans cette première section, nous présentons les données du régime de l’Ircantec
et donnons quelques statistiques d’ensemble sur les cotisants, leurs employeurs et
les changements intervenus entre 1971 et 2011. Nous discutons également de la
représentativité d’un sous-échantillon que nous utilisons à plusieurs reprises pour
l’analyse, celui des salariés qui ont cotisé pour la première fois à l’Ircantec après
1971.
15
Les carrières des non-titulaires du secteur public
1.1.1
Présentation des données de l’Ircantec
Pour les besoins de cette étude, nous avons eu accès aux données concernant l’ensemble des périodes cotisées et validées ayant conduit à l’ouverture de droits à
l’Ircantec. Cela inclut notamment les non-titulaires de la fonction publique, les
titulaires sans droit à pension ou à temps non complet, les praticiens hospitaliers
et certains travailleurs dans les organismes publiques et parapubliques 1 . Bien que
l’Ircantec ait été créé en 1970, les informations portant sur des périodes de cotisation antérieures, fournies par l’Ipacte et l’Igrante, sont également disponibles. Les
périodes de cotisation les plus anciennes datent ainsi de 1939, les plus récentes de
2012. Afin de faciliter l’analyse des données, un échantillonnage des cotisants de
l’Ircantec a été réalisé en ne gardant que les cotisants nés au mois d’octobre. Outre
la réduction de la taille de la base par un facteur de 1/12e , cet échantillonnage
nous a donné la possibilité de croiser les informations fournies par l’Ircantec avec
celles de l’échantillon inter-régimes de cotisants (EIC), qui est également constitué
d’individus nés au mois d’octobre.
Les données de l’Ircantec comportent des informations sur les emplois (temps
partiel, nombre d’heures effectuées dans l’année, CSP, type de contrat, rémunérations), les employeurs (localisation, domaine d’emploi, employeurs multiples),
les individus (date de naissance, sexe, département de résidence, état matrimonial, taux d’invalidité) et les cotisations (montants des cotisations employés et
employeurs par tranche, nombre de points). L’utilisation de certaines variables a
toutefois été limitée par les taux de non-réponse élevés et par la présence répétée
de déclarations aberrantes 2 . D’autres n’ont pu être utilisées qu’après un redressement, en faisant des hypothèses sur les valeurs manquantes. Cela est notamment
le cas des rémunérations par tranche, dont la méthode de redressement est disponible en annexe à la page 163.
1. Les données ont été extraites des bases de l’Ircantec au mois de juillet 2013. L’actualisation de ces données
étant continue, certaines modifications et corrections ont pu être effectuées depuis par les services de l’Ircantec.
Seules les périodes cotisées par les élus locaux ont été exclues du champ de cette étude et ne nous ont donc pas
été transmises.
2. Par exemple, le taux d’activité est non renseigné pour environ 10 % des contrats et presque toujours nul
pour les autres et le type de contrat de travail (CDI, CDD, etc.) a 64,7 % de valeurs manquantes. Pour compléter
ces informations, l’utilisation de l’enquête Emploi s’est révélée essentielle.
16
Présentation des données
Chaque observation dans la base Ircantec est un contrat d’assurance s’adressant à
un unique cotisant, qui peut durer plusieurs années. Afin de rendre le traitement
statistique plus cohérent, nous avons préféré opter pour une analyse au niveau
des cotisants et des années de cotisation, permettant ainsi d’utiliser au mieux la
dimension de panel des données. Il a pour cela été nécessaire d’annualiser les déclarations, en découpant les contrats dont la durée était supérieure à un an. Pour
l’analyse des emplois nous avons donc redéfini un emploi comme la combinaison
d’un employeur et d’un employé.
1.1.2
Les cotisants de l’Ircantec
Après avoir présenté les données du régime Ircantec, nous les utilisons pour produire quelques statistiques de base sur le volume et les caractéristiques des cotisants de l’Ircantec. Le premier enseignement tiré de l’étude de la base de données
de l’Ircantec est que l’effectif des cotisants est en pleine croissance. Le nombre
de cotisants a été multiplié par près de trois depuis 1971. Les effectifs sont ainsi
passés de 1,1 millions en 1971 à environ 2,8 millions en 2011.
Les cotisants de l’Ircantec sont en majorité des femmes. Leur part parmi les cotisants de l’Ircantec a même légèrement augmenté passant de 58 % des effectifs en
1971, à 65 % en 2011. Cette hausse a eu lieu durant les années 2000 et correspond à l’expansion de l’emploi des fonctions publiques hospitalière et territoriale.
L’emploi Ircantec connaît donc un degré de féminisation bien plus élevé que la
population active française, et une évolution bien différente, puisque la part des
femmes dans la population active française entre 1971 et 1991 a augmenté de
35 % à 45 % et est restée stable par la suite 3 .
Par ailleurs, les cotisants de l’Ircantec sont relativement jeunes. Ils avaient en effet
35,6 ans en moyenne en 2011, contre 41 ans pour la population active occuppée 4 .
Lors de leur première affiliation à l’Ircantec, ils étaient âgés en moyenne de 28
ans. Il existe de plus une grande hétérogénéité parmi les cotisants, dont certains
3. Calculs des auteurs à partir de l’enquête Emploi.
4. Calculs des auteurs à partir de l’enquête Emploi.
17
Les carrières des non-titulaires du secteur public
rentrent encore plus tôt, comme le montre l’écart entre la moyenne et la médiane
(28 ans et 23 ans respectivement en 2011).
1.1.3
Les employeurs Ircantec
Nous nous tournons à présent vers les employeurs pour lesquels travaillent les cotisants de l’Ircantec. Étant donné que nous utilisons un échantillon de cotisants au
1/12e , il est possible que nous n’observions pas tous les employeurs Ircantec. Nous
donnons cependant ici quelques ordres de grandeur. La figure 1.1 retrace l’évolution du nombre d’employeurs par année. Il est remarquable de constater que
l’augmentation du nombre de cotisants à l’Ircantec entre 1971 et 2004 s’est accompagnée d’une hausse simultanée du nombre d’employeurs. La baisse du nombre
d’employeurs observée depuis 2005 est, quant à elle, le résultat d’un effort de mutualisation des déclarations entre employeurs. Si l’on rapporte notre estimation du
nombre de cotisants Ircantec en 2011 (2,8 millions) au nombre d’employeurs dans
notre échantillon (approximativement 28 000), le nombre moyen de cotisants par
employeur est de 100 5 .
Il importe, dans le cadre de cette étude, de déterminer les domaines d’activité des
différents employeurs. Dans ce but, nous disposons d’informations sur les familles
d’employeurs, dont les modalités sont : fonction publique d’État, fonction publique
territoriale, fonction publique hospitalière et Autres. Nous disposons également
d’une classification plus fine des employeurs en sous-familles, dont les modalités
sont présentées dans le tableau 1.1 reportant la part des emplois Ircantec pour
chacune des sous-familles d’employeurs.
L’augmentation du nombre de cotisants s’explique par une hausse simultanée des
employés affiliés à l’Ircantec au sein des trois fonctions publiques. Des disparités
sont toutefois notables. Le développement des fonctions publiques territoriale et
hospitalière est responsable de l’essentiel de cette hausse. Leur part dans l’emploi
Ircantec a très largement augmenté, passant de 26 % à 40 % pour les collectivités
locales et de 11 % à 20 % pour la fonction publique hospitalière entre 1971 et
5. Ce chiffre est probablement sur-estimé, dans la mesure où certains employeurs n’emploient pas de cotisants nés en octobre, et ne sont donc pas présents dans notre échantillon.
18
Présentation des données
TABLEAU 1.1 – Principaux employeurs des cotisants de l’Ircantec.
Familles
État
Hospitalière
Territorial
Autres
Employeurs
Caisse des Dépôts
CNRS
Autorités indépendantes
INRA
Établissements publics relevant des ministères
Ministères et directions d’État
APHP
Hôpitaux
Syndicats inter hospitaliers
Établissements médicaux sociaux
Centres de gestion
Outre mer
Départements
Régions
Services d’une collectivité locale
Communes
Établissements publics spécialisés et non spécialisés
Sociétés audiovisuelles
Banque de France
EDF
Gaz de France
GIP et groupements
Organismes sociaux ou professionnels et sociétés anonymes
Régies et EPIC
Pôle Emploi (+ ex ANPE)
Anciens PTT, La Poste et France Telecom
Associations
Non renseignés
1971
0,1 %
1,3 %
0,0 %
0,5 % 47 %
4,9 %
40,2 %
1,8 %
8,7 %
11 %
0,0 %
0,6 %
0,0 %
0,0 %
4,2 %
0,0 % 26 %
0,1 %
18,7 %
2,7 %
0,2 %
0,1 %
0,4 %
0,0 %
0,0 %
16 %
1,1 %
1,1 %
0,3 %
12,4 %
0,3 %
0,0 %
1991
0,1 %
0,5 %
0,0 %
0,2 % 33 %
7,8 %
24,4 %
2,3 %
13,8 %
17 %
0,1 %
1,3 %
0,4 %
0,1 %
3,6 %
0,2 % 36 %
0,2 %
25,2 %
6,5 %
1,0 %
0,3 %
0,8 %
0,0 %
0,0 %
13 %
0,7 %
1,9 %
0,9 %
6,4 %
1,4 %
0,2 %
2011
0,1 %
0,5 %
0,2 %
0,1 % 29 %
9,7 %
18,9 %
1,5 %
15,3 %
20 %
0,1 %
2,6 %
0,9 %
0,0 %
3,5 %
0,7 % 40 %
0,2 %
24,6 %
10,4 %
0,6 %
0,1 %
0,4 %
0,1 %
0,4 %
11 %
0,1 %
2,6 %
1,3 %
3,7 %
1,2 %
0,0 %
L ECTURE : 1,3 % des emplois Ircantec en 1971 ont pour employeur le CNRS.
N OTE : Pour rappel, un emploi est défini comme la combinaison d’un employeur et d’un cotisant. Les calculs sont effectués sur la base des
cotisants nés au mois d’octobre.
S OURCE : Ircantec, calcul des auteurs.
19
Les carrières des non-titulaires du secteur public
F IGURE 1.1 – Évolution du nombre d’employeurs.
N OTE : Les valeurs renseignées concernent uniquement les cotisants nés au mois d’octobre. Dans la
mesure où certains employeurs n’ont pas de salarié né au mois d’octobre, le nombre d’employeurs
est sous-estimé.
S OURCE : Ircantec, calcul des auteurs.
2011. En faible croissance, la fonction publique d’État a quant à elle vu sa part
diminuer de 47 à 29 %.
Quelques grandes sous-familles dominent l’emploi Ircantec en 1971 comme en
2011. Les ministères et directions d’État, les communes, les hôpitaux et les anciens PTT, La Poste et France Telecom représentaient 80 % des emplois Ircantec
en 1971. Leurs parts relatives ont cependant évolué. Les ministères et directions
d’État et les anciens PTT ont vu leur part baisser fortement, alors que dans le
même temps, celle des communes et des hôpitaux augmentait. Autre évolution
notable, la part des établissements publics dans l’emploi Ircantec est en forte augmentation.
Notons enfin que la famille des « Autres » emplois connaît un déclin progressif, dû
au départ de ses principaux employeurs. Cela est notamment le cas de la sousfamille des anciens PTT, La Poste et France Telecom, qui représentait 78 % des
emplois de la famille « Autres » en 1971 et a vu la plupart de ses emplois sortir du
cadre du régime de l’Ircantec.
20
Présentation des données
1.1.4
Sélection de l’échantillon des cotisants
Dans cette dernière section consacrée aux données Ircantec, nous présentons un
sous-échantillon que nous utilisons à plusieurs reprises dans l’analyse, celui des
cotisants entrés à l’Ircantec à partir de 1971. Afin de procéder à l’analyse des carrières et des caractéristiques des cotisants lors de l’entrée à l’Ircantec, il nous a en
effet parfois fallu réduire l’échantillon aux seuls individus pour lesquels le début
de carrière à l’Ircantec est observé, c’est-à-dire ceux qui ont cotisé pour la première
fois à l’Ircantec à partir de 1971. L’Ircantec ayant été créé le 23 décembre 1970,
cela revient à exclure tous les cotisants ayant préalablement cotisé à l’Ipacte ou
l’Igrante. Cette troncature crée un effet de sélection en faveur des cotisants plus
jeunes, en particulier lors des premières années de notre période d’observation.
Nous procédons ainsi à une comparaison des principales caractéristiques des cotisants dans les deux échantillons 6 .
F IGURE 1.2 – Évolution du nombre de cotisants.
N OTES : Les données disponibles ne portent que sur les cotisants nés au mois d’octobre. Les niveaux
annuels ont été déduits avec un taux de sondage d’un douzième.
S OURCE : Ircantec, calcul des auteurs.
Comme l’indique la figure 1.2, l’effet lié à la sélection des cotisants s’estompe
6. On dispose ainsi de deux échantillons à partir des données de l’Ircantec : (i) l’échantillon principal composé de l’ensemble des cotisants nés au mois d’octobre et (ii) le sous-échantillon des cotisants nés au mois
d’octobre et ayant cotisé pour la première fois à partir de 1971.
21
Les carrières des non-titulaires du secteur public
rapidement puisque dans les années 1990, la part d’individus entrés à partir de
1971 représentait plus de 90 % de l’ensemble des cotisants chaque année. Alors
que ce taux devient supérieur à 96 % après 2000. La disparition rapide de l’effet
de sélection est une conséquence directe de la forte rotation des emplois Ircantec,
que nous documenterons dans le chapitre suivant.
Les cotisants du sous-échantillon sont en moyenne plus jeunes lorsqu’on les compare à l’ensemble des cotisants. L’écart, bien qu’important en 1971, n’est plus que
d’un an et sept mois en 1991. Il connaît une baisse constante à travers le temps le
ramenant à deux mois en 2011. En ce qui concerne la proportion de femmes dans
les deux échantillons, la différence est encore moins marquée puisqu’en 1971,
elles représentaient 58 % de l’ensemble des cotisants et 60 % des cotisants entrés
après 1971. Une fois de plus, cette différence tend à se réduire au fur et à mesure
que la composition des deux échantillons converge.
F IGURE 1.3 – Évolution du nombre d’employeurs.
N OTE : Les valeurs renseignées concernent uniquement les cotisants nés au mois d’octobre. De
manière similaire à ce que l’on observe pour le nombre de cotisants, l’effet de la sélection s’estompe
rapidement.
S OURCE : Ircantec, calcul des auteurs.
La réduction de la base des cotisants conduit également à ignorer un certain
nombre d’employeurs chaque année. Une fois de plus, seules les premières an22
Présentation des données
nées semblent réellement affectées par cette selection car, comme l’indique la figure 1.3, les deux échantillons convergent rapidement.
Des différences quant à la répartition des emplois au sein des sous-familles d’employeurs subsistent néanmoins. L’étude du tableau 1.2 indique que les établissements publics relevant des ministères, les anciens PTT, La Poste et France Telecom,
les hôpitaux, les communes et les établissements spécialisés et non spécialisés sont
sur-représentés dans l’échantillon des cotisants entrés après 1971. Ceci implique
une plus grande concentration des cotisants chez ces quelques employeurs dans
le sous-échantillon que dans l’échantillon total. À l’inverse, le CNRS, les ministères et directions d’État et les départements y sont sous-représentés. Ce constat
ne concerne cependant que les toutes premières années. La convergence entre les
deux échantillons, du point de vue des employeurs, semble en effet s’effectuer extrêmement rapidement. Ainsi, en 1991 la distribution des cotisants par employeur
est quasiment identique dans le sous-échantillon des cotisants entrés après 1971
et dans l’échantillon total.
En définitif, les coûts liés à la sélection uniquement des cotisants entrés après 1971
s’avèrent faibles comparés aux avantages que peut offrir l’analyse de la carrière
des cotisants depuis leur première affiliation. C’est pourquoi, ce sous échantillon
va jouer un rôle central dans le reste de l’analyse.
1.2
Données de l’échantillon inter-régimes de co-
tisants
Après avoir présenté les données Ircantec, cette partie décrit les données de l’échantillon inter-régimes de cotisants (EIC), qui permettent de situer l’emploi Ircantec
dans l’ensemble de la carrière des individus et d’étudier les transitions entre Ircantec, emploi public et emploi privé. Nous décrivons également la méthode d’appariement statistique entre l’EIC et les données de l’Ircantec, appariement qui nous
permet de disposer à la fois du détail des périodes de cotisation à l’Ircantec et
23
Les carrières des non-titulaires du secteur public
TABLEAU 1.2 – Comparaison de la distribution des emplois par sous famille d’employeurs.
Familles
État
Hospitalière
Territorial
Autres
Employeurs
Caisse des dépôts
CNRS
Autorités indépendantes
INRA
Services du 1er ministre
Établissements publics relevant des ministères
Ministères et directions d’État
APHP
Hôpitaux
Syndicats inter hospitaliers
Établissements médicaux sociaux
Centres de gestion
Outre mer
Départements
Régions
Services d’une collectivité locale
Communes
Établissements publics spécialisés et non spécialisés
Sociétés audiovisuelles
Banque de France
EDF
Gaz de France
GIP et groupements
Organismes sociaux ou professionnels et sociétés anonymes
Régies et EPIC
Pôle Emploi (+ ex ANPE)
Anciens PTT, La Poste et France Telecom
Associations
Non renseignés
1971
Entrés après
Ensemble
1971 des cotisants
0,1 %
0,1 %
0,6 %
1,3 %
0,0 %
0,0 %
0,3 %
0,5 %
0,1 %
0,3 %
6,0 %
4,9 %
37,7 %
40,2 %
1,4 %
1,8 %
9,7 %
8,7 %
0,0 %
0,0 %
0,6 %
0,6 %
0,0 %
0,0 %
0,0 %
0,0 %
3,4 %
4,2 %
0,0 %
0,0 %
0,0 %
0,1 %
20,0 %
18,7 %
3,3 %
2,7 %
0,4 %
0,2 %
0,1 %
0,1 %
0,2 %
0,4 %
0,0 %
0,0 %
0,0 %
0,0 %
0,6 %
1,1 %
1,2 %
1,1 %
0,3 %
0,3 %
13,9 %
12,4 %
0,2 %
0,3 %
0,0 %
0,0 %
1991
Entrés après
Ensemble
1971 des cotisants
0,1 %
0,1 %
0,5 %
0,5 %
0,0 %
0,0 %
0,2 %
0,2 %
0,0 %
0,0 %
7,6 %
7,8 %
24,6 %
24,4 %
2,3 %
2,3 %
13,9 %
13,8 %
0,1 %
0,1 %
1,3 %
1,3 %
0,4 %
0,4 %
0,1 %
0,1 %
3,5 %
3,6 %
0,2 %
0,2 %
0,2 %
0,2 %
25,3 %
25,2 %
6,6 %
6,5 %
0,7 %
1,0 %
0,3 %
0,3 %
0,9 %
0,8 %
0,0 %
0,0 %
0,0 %
0,0 %
0,7 %
0,7 %
1,8 %
1,9 %
0,8 %
0,9 %
6,4 %
6,4 %
1,4 %
1,4 %
0,2 %
0,2 %
2011
Entrés après
Ensemble
1971 des cotisants
0,1 %
0,1 %
0,5 %
0,5 %
0,2 %
0,2 %
0,1 %
0,1 %
0,0 %
0,0 %
9,7 %
9,7 %
18,8 %
18,9 %
1,5 %
1,5 %
15,3 %
15,3 %
0,1 %
0,1 %
2,6 %
2,6 %
0,9 %
0,9 %
0,0 %
0,0 %
3,5 %
3,5 %
0,7 %
0,7 %
0,2 %
0,2 %
24,7 %
24,6 %
10,4 %
10,4 %
0,6 %
0,6 %
0,1 %
0,1 %
0,4 %
0,4 %
0,1 %
0,1 %
0,4 %
0,4 %
0,1 %
0,1 %
2,6 %
2,6 %
1,3 %
1,3 %
3,7 %
3,7 %
1,2 %
1,2 %
0,0 %
0,0 %
N OTE : En pourcentage des emplois Ircantec observés dans l’année. Pour rappel, un emploi est défini comme la combinaison d’un employeur
et d’un cotisant. Les calculs sont effectués sur la base des cotisants nés au mois d’octobre.
S OURCE : Ircantec, calcul des auteurs.
24
Présentation des données
d’une vision globale des carrières individuelles. Enfin, nous donnons un aperçu
de la diversité des profils de carrière des cotisants Ircantec, en analysant les régimes de base et complémentaires auxquels ils sont amenés à cotiser, ainsi que les
séquences types de carrière.
L’échantillon inter-régimes de cotisants (EIC) de 2009, mis en place par la DREES 7 ,
vise à collecter les droits à retraite de tous les régimes obligatoires d’assurance
vieillesse. Il est ainsi une source unique sur l’ensemble des cotisations aux principaux régimes de base et complémentaires par individu. Les données sont fournies
au niveau agrégé par année pour chacun des régimes. Elles portent sur un échantillon d’individus vivants, nés durant les dix premiers jours d’octobre entre 1934
et 1986 8 . Le taux de sondage est d’une génération sur quatre. En complément des
données portant sur les régimes de retraite, des informations issues des DADS, du
panel État 9 , de Pôle Emploi et de l’échantillon démographique permanent (EDP)
sont également disponibles. L’EIC a donc l’avantage d’offrir une vision complète
des carrières de chaque individu, y compris les périodes de chômage. Les élus
ayant été exclus de l’analyse des cotisants de l’Ircantec, les informations portant
sur cette catégorie de cotisants n’ont pas été retenues dans l’analyse des données
de l’EIC.
1.2.1
Traitement des données de l’EIC
Afin de considérer l’ensemble des activités des cotisants chaque année, nous avons
d’abord combiné les déclarations des régimes de retraite de base et complémentaires, de l’Unedic et du Panel État. Dans un premier temps, les informations
contenues dans le Panel État ont complété les déclarations du Service des retraites de l’État (SRE) lorsque ces dernières se sont avérées incomplètes. Puis,
l’ensemble des données portant sur les régimes de retraite des individus ayant cotisé au moins une année à l’Ircantec ont été récupérées. Enfin, nous y avons ajouté
les données de Pôle Emploi sur les périodes de chômage indemnisées et non in7. L’échantillon inter-régimes des cotisants, composé de données administratives, a été mis en place par la
DREES avec la participation des caisses de retraite, de Pôle Emploi, de l’Insee et du Ministère de la Défense.
8. Pour les individus nés en 1934, les 12 premiers jours du mois d’octobre sont retenus.
9. Fichier de paie des agents de la fonction publique d’État.
25
Les carrières des non-titulaires du secteur public
demnisées après 1993. À l’aide d’une classification des régimes de retraite entre
secteur public et privé, dont les détails sont développés dans l’annexe 8.3.5 (page
164), nous avons codé l’activité des cotisants chaque année comme une combinaison de quatre catégories : emploi Ircantec, emploi public, emploi privé 10 et
chômage/inactivité. Nous avons inclus dans la quatrième catégorie toutes les années d’inactivité, c’est-à-dire les années pendant lesquelles aucune cotisation n’a
été déclarée dans l’EIC. Les informations étant fournies par année, l’interprétation en terme de cumul d’emplois peut parfois s’avérer floue. Cela est notamment
le cas lorsque l’on observe un emploi privé et un emploi Ircantec la même année. Il n’est alors pas possible de distinguer une succession d’emplois d’un cumul
d’emplois. Cette incertitude ne concerne toutefois pas les cas où la classification
indique un emploi Ircantec et un emploi public. Une telle situation ne peut alors
refléter qu’une succession d’emplois dans l’année 11 .
Pour simplifier l’analyse, nous avons ensuite établit des règles de priorité pour
classer chaque année en une seule catégorie : 1/ emploi Ircantec 2/ emploi Ircantec et privé 3/ emploi public 4/ emploi privé 5/ chômage et inactivité.
1.2.2
L’appariement avec les données Ircantec
Afin de disposer à la fois d’une vue d’ensemble de la carrière des cotisants Ircantec et d’informations détaillées sur les emplois et les employeurs qui ne sont
disponibles que dans la base Ircantec, nous avons ensuite procédé à l’appariement
statistique de ces deux bases. Dans la mesure où les données administratives de
l’Ircantec dont nous disposons et celles de l’EIC sont anonymisées, il n’est pas possible de relier directement les informations contenues dans les deux bases pour un
même individu. Ainsi, l’appariement a été rendu possible par la comparaison systématique des informations présentes dans l’EIC sur les périodes de cotisation et
des informations envoyées sur ces mêmes périodes de cotisation à l’EIC par l’Ircantec. Cette approche statistique a permis d’apparier les informations des deux bases
par individus–années dont l’ensemble des variables disponibles à la fois dans l’EIC
10. La catégorie de l’emploi privé comprend les emplois appartenant ni au secteur public, ni aux emplois
Ircantec.
11. Il n’est en effet pas légal de cotiser en même temps à l’Ircantec et dans un régime public.
26
Présentation des données
et l’Ircantec étaient similaires. Malgré l’harmonisation nécessaire de certaines variables, le résultat reste satisfaisant : 66 534 cotisants de l’Ircantec sur les 92 234
présents dans l’EIC 2009 ont été appariés.
La part des femmes dans l’échantillon apparié est quasiment identique à celle de
l’échantillon des cotisants de l’Ircantec. L’âge des cotisants et son évolution sont
cependant très différents entre les deux échantillons. En effet, alors qu’il est relativement constant dans les données de l’Ircantec, la sélection des cotisants dans
l’échantillon apparié conduit à un vieillissement des cotisants puisque toutes les
générations ne sont pas intégrées. Ainsi, les générations les plus âgées en 1971
ayant été exclues de l’EIC, les cotisants présents dans l’appariement sont plus
jeunes de 6 ans. À l’inverse, les générations les plus jeunes en 2009 n’appartenant
plus aux cotisants sélectionnés dans l’EIC, ils étaient plus âgés de 12 ans. Néanmoins, la distribution des cotisants entre employeurs est relativement similaire,
malgré une sur-représentation des hôpitaux, des établissements publics relevant
des ministères et directions d’État en 1971 au détriment des communes.
TABLEAU 1.3 – Sexe et âge des cotisants dans l’échantillon apparié.
Années
1971
1991
2009
Part de femmes
Appariement
Ircantec
58 %
57 %
64 %
63 %
66 %
66 %
Age moyen
Appariement
Ircantec
26
32
35
33
47
35
N OTE : Les calculs sont effectués pour l’ensemble des cotisants, sans tenir compte de l’année d’entrée à l’Ircantec.
S OURCE : Ircantec et EIC, calcul des auteurs.
Dans la suite de l’étude nous utilisons soit l’échantillon apparié dans son entier,
soit un sous-échantillon de cotisants entrés à l’Ircantec après 1971. Dans le chapitre 3, où nous faisons une typologie des cotisants Ircantec en fonction de la
place de l’emploi Ircantec dans leur carrière professionnelle, nous utilisons le
sous-échantillon des cotisants entrés après 1971 pour s’assurer que nous observons l’intégralité des carrières. Dans le chapitre 4 en revanche, où nous étudions
l’impact des politiques de titularisation sur la probabilité de transition vers l’emploi titulaire public, nous utilisons l’ensemble de l’échantillon apparié.
27
Les carrières des non-titulaires du secteur public
1.2.3
Les régimes de retraite des cotisants Ircantec
Le principal intérêt de l’EIC dans le cadre de cette étude est de permettre une
analyse des carrières des cotisants en dehors de l’Ircantec. Le temps de cotisation
à l’Ircantec étant en général court au regard de la carrière des cotisants, il est
primordial de connaître les autres types d’emploi.
Dans ce but, il est possible d’utiliser les informations sur les régimes de retraite
auxquels ils ont pu cotiser durant l’ensemble de leur carrière afin de déterminer
le taux de polycotisants, c’est-à-dire la part d’individus ayant cotisé dans plus d’un
régime de retraite au cours de leur carrière. Ce comportement traduit la mobilité
des carrières des cotisants qui ont connu pour la plupart au moins une reconversion professionnelle majeure ayant pris la forme d’un changement de secteur
d’emploi (par exemple, lorsqu’un individu passe d’un emploi Ircantec à un emploi
privé au cours de sa carrière).
TABLEAU 1.4 – Régimes de base des cotisants Ircantec au cours de leur
carrière.
Secteur d’emploi
Public/privé
Privé
Public
Public
Privé
Privé
Public
Privé
Privé
Privé
Public
Public
Privé
Public
Public
Régimes obligatoires
Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV)
Mutualité sociale agricole des salariés (MSA salariés)
Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales
(CNRACL)
Service des retraites de l’État pour les civils (SRE civil)
Régime sociale des indépendants (RSI)
Mutualité sociale agricole des non salariés (MSA non salariés)
Service des retraites de l’État pour les militaires (SRE militaire)
Caisse interprofessionnelle de la prévoyance et d’assurance
vieillesse (CIPAV)
Caisse autonome de retraite des médecins de France (CARMF)
Caisse autonome de retraite et de prévoyance des infirmiers, masseurs kinésithérapeutes, pédicures-podologues, orthophonistes et
orthoptistes (CARPIMKO)
Pensions industries électriques et gazières (IEG)
Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la Société
nationale des chemins de fer français (CPR SNCF)
Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires (CRPCEN)
Fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels d’État (FSPOEIE)
Établissement national des invalides de la marine (ENIM)
Pourcentage
99,6 %
21,4 %
16,2 %
13,4 %
6,9 %
2,3 %
1,7 %
1,2 %
1,1 %
0,9 %
0,5 %
0,5 %
0,4 %
0,4 %
0,3 %
N OTE : Les cotisants ayant pour la plupart plusieurs régimes de retraite au cours de leur carrière,
la somme des pourcentages est supérieure à 100. Seuls les régimes principaux des cotisants de
l’Ircantec sont reportés.
S OURCE : EIC, calcul des auteurs.
Une première approche repose sur l’analyse des régimes de base auxquels les cotisants de l’Ircantec ont également été affiliés au cours de leur carrière. Le tableau
28
Présentation des données
1.4 montre que la quasi totalité des individus passés par l’Ircantec ont cotisé à la
Cnav. 21 % d’entre-eux ont également cotisé à la MSA en tant que salarié, 16 %
à la CNRACL et 13 % au SRE civil. Cette première approche ne donne qu’une vision limitée de la mobilité professionnelle des cotisants. Certains changement de
secteur d’emploi ne sont en effet pas observables à partir de l’analyse des régimes
de base 12 .
TABLEAU 1.5 – Régimes complémentaires des cotisants Ircantec au cours
de leur carrière.
Régimes complémentaires
Ircantec seulement
Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés (ARRCO)
Retraite additionnelle de la fonction publique (RAFP)
Association générale des institutions de retraite complémentaire
des cadres (AGIRC)
Régime social des indépendants (RSI)
Caisse autonome de retraite des médecins de France (CARMF)
Caisse interprofessionnelle de la prévoyance et d’assurance
vieillesse (CIPAV)
Caisse autonome de retraite et de prévoyance des infirmiers, masseurs kinésithérapeutes, pédicures-podologues, orthophonistes et
orthoptistes (CARPIMKO)
Mutualité sociale agricole non salariés (MSA)
Pourcentage
6%
89 %
22 %
18 %
6%
1%
1%
1%
1%
N OTE : Les cotisants ayant pour la plupart plusieurs régimes au cours de leur carrière, la somme
des pourcentages est supérieure à 100. Seuls les principaux régimes sont reportés.
S OURCE : EIC, calcul des auteurs.
Afin de mieux appréhender les changements de statut des cotisants, il est indispensable d’analyser également les autres régimes complémentaires auxquels ils
cotisent (tableau 1.5). Comme on peut le constater, la proximité entre emplois Ircantec et emplois privés est confirmée par la grande proportion d’individus ayant
cotisé à l’Arrco et à l’Agirc (respectivement 89 % et 18 %). Par ailleurs, 22 %
des cotisants se retrouvent également affiliés au RAFP. Comme nous le verrons,
il s’agit essentiellement de cotisants ayant travaillé un premier temps à l’Ircantec
avant d’être titularisés. Finalement, la part très importante de polycotisants parmi
les cotisants de l’Ircantec, d’environ 94 %, souligne leur grande mobilité à travers
les secteurs d’emploi 13 .
12. Prenons le cas d’un cotisant affilié simultanément à la Cnav (régime de base) et à l’Ircantec (régime
complémentaire) qui serait amené à travailler dans le secteur privé. À partir de l’analyse des régimes de base,
aucun changement ne serait alors observé.
13. Il est d’usage de calculer le taux de polycotisants à partir des régimes de base. Cependant, comme nous
29
Les carrières des non-titulaires du secteur public
1.2.4
Les carrières les plus fréquentes
F IGURE 1.4 – Carrières les plus fréquentes.
L ECTURE : La carrière des cotisants est représentée en ligne. À chaque année correspond un état
traduisant la situation d’emploi des cotisants. Par ailleurs, afin de rendre compte de la représentativité de chacune des carrières types, le nombre de cotisants est disponible en ordonnée.
N OTE : Calculé à partir d’un échantillon de 615 individus nés au mois d’octobre, entrés sur le
marché du travail en 1990, ayant cotisé à l’Ircantec et n’ayant pas eu de périodes d’inactivité et/ou
chômage durant les 20 premières années de leur carrière. Seules les 50 carrières les plus fréquentes
sont représentées. Il est à noter que l’analyse des carrières des cotisants n’est à ce stade qu’illustrative. Les statistiques reportées dans cette figure ne sont ainsi pas représentatives de l’ensemble des
cotisants de l’Ircantec. Une analyse plus approfondie de la carrière d’un échantillon beaucoup plus
important de cotisants est présentée lors de la typologie dans le chapitre 3.
S OURCE : EIC, calcul des auteurs.
La figure 1.4 représente les 50 carrières les plus fréquentes parmi les individus
ayant intégré le marché du travail en 1990 et cotisé à l’Ircantec. Ces 50 carrières
les plus fréquentes ne représentent que 26 % de l’échantillon, ce qui traduit la
grande diversité des carrières des cotisants de l’Ircantec. De plus, bien que la majorité d’entre-eux soit amenée à fluctuer entre emplois privés et emplois Ircantec,
il n’est pas possible de définir une règle générale indiquant l’ordre dans lequel ces
emplois se succèdent. Enfin, les individus observés plus de cinq années consécutives à l’Ircantec ont une forte probabilité d’y rester jusqu’à la fin de leur carrière.
Trois carrières types se dessinent à partir de cette première approche :
– certains cotisants commencent leur carrière à l’Ircantec et y cotisent au moins
venons de le voir, une telle approche ne serait pas à même de retranscrire la mobilité réelle des cotisants.
30
Présentation des données
20 ans ;
– d’autres cotisants n’entrent à l’Ircantec que temporairement. Ils proviennent
généralement du secteur privé, où ils retourneront à la fin de leur affiliation
à l’Ircantec ;
– enfin, certains cotisants de l’Ircantec effectuent la plupart de leur carrière dans
le public. Ils passent seulement quelques années à l’Ircantec (généralement une
ou deux) avant d’être titularisés.
Dans le chapitre 3, nous entreprenons une analyse plus systématique de la carrière
des cotisants afin d’en proposer une typologie.
1.3
Données de l’enquête Emploi : mieux connaître
les cotisants
Les données issues de l’enquête Emploi sont disponibles pour les années 1982 à
2011. L’enquête est effectuée sur un échantillon de ménages français, avec un taux
de sondage de 1/300e pour les enquêtes antérieures à 2003 et 1/600e depuis. La
principale difficulté dans le traitement de ces données est le passage à l’enquête
Emploi en continu en janvier 2003. En effet, alors qu’auparavant les ménages
sélectionnés étaient interrogés tous les ans pendant trois ans, ils sont interrogés
tous les trimestres pendant un an et demi depuis 2003.
L’enquête Emploi a l’avantage d’offrir un large panel de variables traitant des caractéristiques individuelles, ainsi qu’une description précise des situations d’emploi lors de la semaine de référence des sondés (c’est-à-dire la semaine précédant l’enquête). Ces données viennent en ce sens compléter les autres sources
d’information sur les non-titulaires. Les difficultés liées à l’identification des nontitulaires à partir des informations disponibles limitent cependant leur pertinence
dans le cadre de cette étude. L’enquête Emploi n’est ainsi utilisée que pour étudier certains aspects importants de l’emploi Ircantec qui ne peuvent être abordés
à partir des informations de l’Ircantec et de l’EIC. Nous l’utilisons donc uniquement pour les caractéristiques individuelles des cotisants (qualifications), le type
de contrat (CDI, CDD), le nombre d’heures travaillées et les rémunérations.
31
Les carrières des non-titulaires du secteur public
1.3.1
Identification des cotisants Ircantec
Nous avons procédé à l’identification des emplois Ircantec à partir des situations
d’emploi lors de la semaine de référence. L’harmonisation des variables et modalités sur l’ensemble de la période d’étude n’ont malheureusement pas permis une
identification parfaite des cotisants. Nous avons dû faire les hypothèses suivantes :
– parmi les individus travaillant dans la fonction publique d’État : seuls les nontitulaires ont été sélectionnés, c’est-à-dire les contractuels, auxiliaires, vacataires, pigistes et les autres salariés de l’État (hors fonctionnaires 14 ) ;
– parmi les individus travaillant dans les collectivités locales : les non-titulaires
ont été considérés comme affiliés à l’Ircantec, ainsi que les agents titulaires
travaillant moins de 28 heures hebdomadaire ;
– parmi les individus travaillant dans la fonction publique hospitalière : deux
cas de figure sont à considérer. Avant 2003, il n’était pas possible de distinguer les titulaires des non-titulaires. Tous les individus travaillant moins de 28
heures ont donc été considérés comme affiliés à l’Ircantec. À partir de 2003,
les non-titulaires travaillant plus de 28 heures ont pu être ajoutés aux affiliés
de l’Ircantec. Pour l’ensemble de la période, les médecins sans activité libérale
et les internes en médecine, odontologie et pharmacie ont été comptés comme
cotisants Ircantec ;
– parmi les individus travaillant dans une entreprise publique, sont considérés
comme affiliés à l’Ircantec : les cadres, professions intermédiaires et employés
de La Poste, France Telecom et PTT ; les cadres artistiques et technico-artistiques,
les assistants techniques et directeur d’édition de l’audiovisuelle ; les ouvriers
non qualifiés de l’assainissement et du traitement des déchets. Ont été également inclus les emplois dans les domaines des transports ; de l’eau, du gaz, et
de l’électricité ; de la production de combustibles et de carburants ; des Postes
et télécommunications ; de l’éducation ; des administrations publiques ; de la
santé et des actions sociales ;
– finalement, tous les individus exerçant une activité secondaire dans le domaine
14. Y compris stagiaires et élèves.
32
Présentation des données
public et dont l’activité principale est extérieure au secteur public, ont été affiliés
à l’Ircantec.
Cette identification statistique des cotisants Ircantec est très approximative, notamment en ce qui concerne les emplois des entreprises publiques. On peut se
faire une idée de la qualité de l’approximation en comparant les effectifs des cotisants Ircantec dans la base Ircantec et tels que nous les définissons à partir de
l’enquête Emploi. Le tableau 1.6 présente le rapport en pourcentage entre les effectifs annuels des cotisants Ircantec estimés à partir de l’enquête Emploi sur les
effectifs estimés à partir de la base Ircantec 15 . En moyenne, les effectifs estimés
dans les deux bases sont relativement proches (92 %). 97 % des cotisants des
fonctions publiques territoriale et hospitalière et des entreprises publiques sont
identifiés chaque année. Ils ne sont que 73 % dans la fonction publique d’État.
Ces résultats s’avèrent donc relativement satisfaisants, bien que des différences
liées aux changements qu’a connu l’enquête (en 1990 et en 2003) aient un effet
important sur l’identification, et cela malgré le travail d’homogénéisation qui a été
fait.
De plus, certaines périodes sont caractérisées par une sur-estimation ou une sousestimation importante. Cela est notamment le cas des années 1990 où le nombre
de cotisants à l’Ircantec est largement sur-estimé dans les fonctions publiques
territoriale et hospitalière, alors qu’il est sous-estimé dans la fonction publique
d’État. Outre les approximations liées à l’identification des cotisants Ircantec, cela
semble être dû, au moins en partie, à une sous-pondération de la fonction publique d’État et à une sur-pondération des deux autres fonctions publiques dans
les données de l’enquête Emploi. En effet, comme l’indique le tableau A.4 présenté en annexe, les fonctions publiques hospitalière et territoriale y sont relativement sur-représentées au cours des années 90, alors que la fonction publique d’État y est relativement sous-représentée pendant cette même période.
Plus généralement, lorsque les taux d’identification sont particulièrement élevés
(respectivement faibles) pour une catégorie de cotisants, il y a également une
15. Les effectifs pour l’enquête emploi sont calculés sur la base des individus cotisants à l’Ircantec le mois de
l’enquête (de janvier à avril pour les années avant 2003 et toute l’année depuis 2003).
33
Les carrières des non-titulaires du secteur public
sur-pondération (sous-pondération) de cette catégorie dans l’enquête Emploi.
TABLEAU 1.6 – Résultats de l’identification des cotisants de l’Ircantec à
partir de l’enquête Emploi.
Années
1982
1983
1984
1985
1986
1987
1988
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
Moyenne
Ensemble
État
FPT et FPH
95 %
100 %
100 %
104 %
104 %
100 %
96 %
91 %
108 %
110 %
111 %
115 %
116 %
114 %
116 %
113 %
106 %
94 %
92 %
87 %
88 %
69 %
66 %
63 %
64 %
69 %
71 %
73 %
69 %
67 %
92 %
108 %
111 %
120 %
113 %
110 %
103 %
102 %
104 %
87 %
69 %
58 %
69 %
60 %
63 %
66 %
65 %
65 %
53 %
50 %
50 %
48 %
80 %
76 %
60 %
52 %
48 %
50 %
55 %
50 %
45 %
73 %
59 %
63 %
61 %
75 %
82 %
78 %
71 %
67 %
110 %
126 %
139 %
143 %
148 %
143 %
145 %
144 %
128 %
114 %
108 %
99 %
101 %
61 %
60 %
72 %
79 %
84 %
87 %
88 %
84 %
80 %
97 %
Entreprises
publiques
150 %
162 %
155 %
151 %
141 %
142 %
141 %
131 %
117 %
114 %
103 %
96 %
96 %
96 %
93 %
86 %
93 %
87 %
98 %
99 %
99 %
74 %
70 %
41 %
35 %
49 %
50 %
44 %
41 %
47 %
97 %
N OTE : En pourcentage du nombre d’individus observés à l’Ircantec pendant les
périodes d’enquête.
S OURCES : Enquête Emploi et Ircantec, calcul des auteurs.
34
Présentation des données
1.3.2
Caractéristiques individuelles des cotisants par famille
d’employeur
Comme cela a déjà été indiqué, l’enquête Emploi a l’avantage de fournir des informations sur le niveau d’éducation, la profession, le nombre d’heures travaillées
et le type de contrat de travail des cotisants. Il est également possible d’obtenir
une classification proche des familles d’employeurs dont on dispose dans les données de l’Ircantec : fonction publique d’État, fonctions publiques territoriale et
hospitalière et entreprises publiques. Nous présentons dans cette partie quelques
statistiques générales sur les cotisants et les emplois Ircantec par familles d’employeurs. À titre de comparaison, pour chaque figure présentée ci-dessous, une
figure équivalente portant sur l’ensemble de la population active occupée et sur
les titulaires de la fonction publique est disponible en annexe à la page 169.
F IGURE 1.5 – Niveau d’éducation des cotisants de l’Ircantec.
N OTE : Les sauts observés en 1990 et 2003 sont dus aux différentes vagues d’enquêtes.
S OURCES : Enquête Emploi, calcul des auteurs.
La part des cotisants ayant au plus un CEP a constamment régressé depuis 1982,
passant de 40 % à 11 %. Cette baisse s’est accompagnée d’une très forte croissance du nombre de diplômés du second et troisième cycle universitaire et des
grandes écoles au sein des trois fonctions publiques. En comparaison, la part des
diplômés du supérieur spécialisés (c’est-à-dire DUT et BTS) est restée relativement
stable pendant cette même période. Lorsque l’on compare les niveaux d’éducation
35
Les carrières des non-titulaires du secteur public
F IGURE 1.6 – Niveau d’éducation des cotisants de l’Ircantec par famille d’employeur.
A. Fonction publique d’État.
B. Fonction publique territoriale et hospitalière.
C. Entreprises publiques.
N OTE : Les sauts observés en 1990 et 2003 sont dus aux différentes vagues d’enquêtes.
S OURCES : Enquête Emploi, calcul des auteurs.
36
Présentation des données
des cotisants au sein des fonctions publiques, ils sont plus élevés pour les nontitulaires de la fonction publique d’État. En effet, en 1982 et 2011 respectivement
31 % et 7 % des cotisants dans la fonction publique d’État ne possédaient aucun
diplôme ou un CEP, ce même taux était de 52 % en 1982 et de 14 % en 2011
dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière. La répartition au sein des
entreprises publiques contraste, comme l’on pouvait s’y attendre, avec celles des
fonctions publiques. Les individus ne possédant pas de diplôme du supérieur y
sont nettement plus représentés, au détriment des travailleurs les plus qualifiés.
Finalement, en comparaison à la population active française, les qualifications
des cotisants de l’Ircantec s’avèrent particulièrement élevées. Ce résultat est la
conséquence d’un recours moins important aux non diplômés et plus important
aux très diplômés (2e et 3e cycles universitaire et grandes écoles) au sein des
fonctions publiques. De plus, on a observé une convergence entre les qualifications
des non-titulaires et celles des titulaires. En effet, bien qu’au début des années
1980 les non-titulaires étaient en moyenne moins qualifiés, à cause d’une part
élevée de travailleurs ne disposant pas de diplôme supérieur au CEP, la hausse du
niveau des qualifications plus importante pour les non-titulaires a conduit à une
distribution similaire entre ces deux types d’agents de la fonction publique depuis
la fin des années 2000.
La prépondérance des personnels qualifiés à l’Ircantec se retrouve également à
travers la distribution des cotisants par profession. En moyenne, entre 1982 et
2011, 40 % des cotisants étaient des employés, 12 % des professions intermédiaires, 12 % des instituteurs et assimilés, 10 % des professions scientifiques, 9
% des ouvriers qualifiés, 5 % des cadres ou ingénieurs et 5 % des techniciens,
contremaîtres et agents de maîtrise. Cette répartition a subi plusieurs évolutions
notables au cours du temps. Les professions intermédiaires ont augmenté de cinq
points, passant de 10 % des emplois en 1982 à 15 % en 2011. Le poids des professions scientifiques a connu une hausse encore plus importante, de 5 % à 12 %. Le
recours accru à ces emplois semble avoir conduit à une baisse de celui des techniciens, contremaîtres et agents de maîtrise (baisse de 7 % à 3 %), des ouvriers
qualifiés (de 14 % à 6 %) et des ouvriers non qualifiés (de 9 % à 3 %).
37
Les carrières des non-titulaires du secteur public
F IGURE 1.7 – Professions des cotisants de l’Ircantec.
N OTE : Les sauts observés en 1990 et 2003 sont dus aux différentes vagues d’enquêtes.
S OURCES : Enquête Emploi, calcul des auteurs.
La répartition des professions est relativement similaire au sein des trois fonctions
publiques, à l’exception des cadres et ingénieurs qui, bien que quasiment absents
des fonctions publiques territoriale et hospitalière (environ 5 %), représentaient
plus de 15 % des emplois dans la fonction publique d’État en 2011. La situation
des entreprises nationales est une fois encore extrêmement différente. En effet,
alors que les professions scientifiques représentaient une part importante des emplois dans les trois fonctions publiques, elles sont quasiment inexistantes au sein
des entreprises nationales. Par ailleurs, et comme cela a déjà été indiqué lors de
l’analyse des niveaux d’éducation, le recours à des employés disposant de qualifications spécifiques est plus courant dans les entreprises nationales. Les ouvriers
qualifiés, les cadres et ingénieurs, les techniciens, contremaîtres et agents de maîtrise y ont en effet un poids considérable, sans comparaison avec ce qui est observé
dans la fonction publique.
Il est par ailleurs remarquable de constater que les professions des titulaires et des
non-titulaires sont semblables. À l’aide de la figure A.2 (page 171) on constate en
effet que, hormis un recours légèrement plus important aux instituteurs et plus
faible aux ouvriers qualifiés dans les années 1980, les titulaires ont des professions
très proches de celles des non-titulaires.
38
Présentation des données
F IGURE 1.8 – Professions des cotisants de l’Ircantec par famille d’employeur.
A. Fonction publique d’État
B. Fonction publique territoriale et hospitalière
C. Entreprises publiques
N OTE : Les sauts observés en 1990 et 2003 sont dus aux différentes vagues d’enquêtes.
S OURCES : Enquête Emploi, calcul des auteurs.
39
Les carrières des non-titulaires du secteur public
40
C HAPITRE 2
CARACTÉRISTIQUES
DES EMPLOIS
I RCANTEC
Le chapitre précédent a présenté les trois bases de données que nous exploitons
dans cette étude et dessiné à grands traits les contours de l’emploi Ircantec à travers ces différentes sources. Cette seconde partie a pour objectif de décrire plus
précisément les caractéristiques des emplois exercés par les cotisants de l’Ircantec
afin de dresser un panorama du marché du travail propre aux non-titulaires du
secteur public. Les différences entre employeurs et type de fonction publique seront soulignées, ainsi que les évolutions de ces caractéristiques qui apparaissent
au fil de l’analyse. Nous mettrons ainsi en évidence le caractère temporaire des
emplois Ircantec (partie 2.1), la multiplicité des emplois pour les non-titulaires
(partie 2.2), la répétition de courtes périodes de cotisation (partie 2.3) et enfin la
faiblesse des rémunérations annuelles qui en découle (partie 2.4).
2.1
Des emplois temporaires
Dans cette première section, nous décrivons les formes prises par les emplois Ircantec (temps plein, temps partiel, etc.), leur durée, la période pendant laquelle
ils ont lieu et traitons également de leur possible cumul.
41
Les carrières des non-titulaires du secteur public
2.1.1
De nombreux emplois à temps partiel
Durant l’ensemble de la période 1971-2011, 64 % des emplois étaient à temps
plein, 16 % à temps partiel, 13 % étaient des emplois temporaires et 3 % avaient
une autre forme 16 . Cette distribution des formes d’emploi est éloignée de celle
que l’on retrouve pour l’ensemble de la population active occupée puisque, entre
1982 et 2011, 85 % des activités principales étaient à temps complet 17 .
La fonction publique hospitalière avait le taux de temps plein le plus élevé avec
75 % de ses emplois, alors qu’il était de 67 % pour la famille Autres, de 63 % pour
la fonction publique d’État et de 59 % pour la fonction publique territoriale. Ces
deux dernières familles d’employeurs se distinguent par leur recours accru à des
contrats temporaires. La proportion d’emplois temporaires y était respectivement
de 13 % et 17 %. En ce qui concerne les temps partiels, seule la fonction publique
territoriale se distingue par un recours moins fréquent à ce type d’emploi, d’environ 14 %, alors qu’il est compris entre 17 % et 20 % pour les trois autres familles
d’employeurs.
La répartition de ces formes d’emploi est inégale à travers les différents employeurs. Gaz de France (92 %), EDF (89 %), la Banque de France (87 %), la
Caisse des Dépôts et consignations (95 %) et les services du Premier ministre
sont les employeurs qui concentrent le plus de temps plein. À l’inverse, parmi les
employeurs ayant le plus recours à du temps partiel, on retrouve l’Assistance publique des hôpitaux de Paris (37 %) et les anciens PTT, La Poste et France Telecom
(24 %). Enfin, le pourcentage d’emplois temporaires, loin d’être négligeable dans
certains secteurs, représente jusqu’à 25 % des emplois dans les centres de gestion.
Il est également répandu dans les associations foncières (19 %), le CNRS (22 %),
les établissements publics relevant des ministères (17 %), les communes (19 %)
et les organismes sociaux ou professionnels et sociétés anonymes (26 %).
Lorsque l’on s’interesse à la répartition de ces contrats par sexe, on observe une
16. On compte également 4 % de non-renseignés. La catégorie des emplois temporaire comprend les intermittents, les saisonniers, les vacataires et occasionnels. Celle des autres emplois comprend principalement les
emplois à domiciles et à temps non complet.
17. Calculs des auteurs à partir des données de l’enquête Emploi.
42
Caractéristiques des emplois Ircantec
TABLEAU 2.1 – Contrats par type d’employeurs.
Familles
État
Hospitalière
Territoriale
Autres
Employeurs
Caisse des Dépôts
CNRS
Autorités indépendantes
INRA
Services du 1er ministre
Établissements publics relevant des ministères
Ministères et directions d’État
APHP
Hôpitaux
Syndicats inter hospitaliers
Établissements médicaux sociaux
Associations foncières
Centres de gestion
Outre mer
Départements
Régions
Services d’une collectivité locale
Communes
Établissements publics spécialisés et non spécialisés
Sociétés audiovisuelles
Banque de France
EDF
Gaz de France
GIP et groupements
Établissement relevant des IEG
Organismes sociaux ou professionnels et sociétés anonymes
Régies et EPIC
Pôle Emploi (+ ex ANPE)
Anciens PTT, La Poste et France Telecom
Associations
Ensemble
Temps plein
95 %
45 %
59 %
78 % 63 %
93 %
57 %
66 %
60 %
78 %
75 %
76 %
71 %
48 %
48 %
74 %
76 %
59 %
77 %
70 %
57 %
57 %
46 %
87 %
89 %
92 %
65 %
81 % 67 %
61 %
69 %
64 %
65 %
54 %
64 %
Temps partiel
1%
29 %
4%
9%
17 %
5%
17 %
17 %
37 %
14 %
17 %
10 %
12 %
31 %
12 %
12 %
9%
14 %
4%
8%
15 %
13 %
34 %
4%
8%
1%
8%
20 %
12 %
12 %
14 %
13 %
24 %
23 %
16 %
Emplois temporaires
0%
22 %
28 %
3%
13 %
1%
17 %
11 %
1%
4%
4%
6%
6%
17 %
25 %
11 %
8%
17 %
5%
14 %
19 %
16 %
17 %
8%
1%
1%
16 %
11 %
2%
26 %
11 %
20 %
10 %
16 %
13 %
Autres emplois
0%
0%
0%
6%
3%
0%
3%
3%
1%
0%
1%
1%
2%
3%
8%
2%
2%
5%
5%
3%
4%
8%
0%
0%
0%
0%
1%
0%
1%
0%
0%
0%
0%
0%
3%
Non renseignés
3%
4%
8%
4%
4%
1%
6%
3%
1%
4%
4%
8%
7%
1%
7%
2%
5%
5%
9%
4%
5%
6%
4%
2%
2%
6%
10 %
2%
5%
2%
6%
3%
0%
6%
4%
N OTE : Sur la base des emplois observés entre 1971 et 2011 par sous-famille. Les calculs sont effectués à partir des cotisants nés au mois
d’octobre et entrés à l’Ircantec après 1971. La catégorie des emplois temporaires comprend les intermittents, les saisonniers, les vacataires
et occasionnels. Celle des autres emplois comprend principalement les emplois à domiciles et les temps non complets.
S OURCE : Ircantec, calcul des auteurs.
43
Les carrières des non-titulaires du secteur public
très faible différence puisque, sur l’ensemble de la période, 65 % des hommes et
63 % des femmes étaient à temps plein. Les taux étaient respectivement de 16 %
et 17 % pour l’emploi à temps partiel.
Bien que la distribution des cotisants par forme d’emploi soit déjà présentée dans
le tableau 2.1, les informations complémentaires fournies par l’enquête Emploi
permettent de différencier les cotisants à temps partiel n’ayant pas la volonté
d’augmenter leur temps travail de ceux le désirant. Ces derniers sont alors qualifiés de temps partiel subi dans la mesure où ils se retrouvent à temps partiel à
défaut d’obtenir un temps plein ou au moins un volume horaire plus conséquent.
F IGURE 2.1 – Temps partiel subi.
N OTE : Calculs effectués à partir des données de l’enquête Emploi de 1990 à 2011. Le temps partiel subi comprend les travailleurs à temps
partiel ou non complet, ayant déclaré vouloir augmenter leur volume horaire.
S OURCES : Enquête emploi, calcul des auteurs.
La part de temps partiel subi est restée relativement stable entre 1990 et 2011.
Elle contenait 10 % à 20 % des cotisants sur cette période. Une hausse de quelques
points de pourcentage pour cette catégorie de cotisants est toutefois à noter dans
les années 1990.
En ce qui concerne les familles d’employeurs, c’est dans les fonctions publiques
hospitalière et territoriale qu’il est le plus courant. Entre 1990 et 2011, il y concernait prés de 20 % des cotisants contre environ 15 % dans la fonction publique
d’État.
44
F IGURE 2.2 – Temps partiel subi par famille d’employeur.
A. Fonction publique d’État
B. Fonction publique territoriale et hospitalière
C. Entreprises publiques
N OTE : Le temps partiel subi comprend les travailleurs à temps partiel ou non complet, ayant déclaré vouloir augmenter leur volume
horaire. Les calculs sont effectués à partir des données de l’enquête Emploi de 1990 à 2011, pour les emplois principaux à l’Ircantec. La part
trop importante de temps complet dans la famille des Autres emplois de l’Ircantec est due au biais d’identification des cotisants à partir des
données de l’enquête. Se référer au tableau 2.1 (page 43) pour obtenir la répartition des cotisants en fonction des types d’emplois.
S OURCES : Enquête Emploi, calcul des auteurs.
Les carrières des non-titulaires du secteur public
2.1.2
Des emplois de courte durée
Entre 2003 et 2011, 39 % à 47 % des cotisants étaient en contrat à durée indéterminée. Les autres contrats prenaient essentiellement la forme de contrats à durée
déterminée, dont un à deux pour cent étaient des contrats saisonniers. Aucune
évolution au niveau agrégé ne semble se dégager quant au recours à ces types de
contrats. À partir de l’analyse des familles d’employeurs, on remarque cependant
que le recours au CDI a cru dans la fonction publique d’État, passant de 30 %
à 45 % entre 2003 et 2010, alors qu’il était remarquablement constant dans les
fonctions publiques territoriale et hospitalière aux environs de 30 %.
Cette prédominance des contrats à durée déterminée affecte inévitablement la durée en emploi des cotisants qui était en moyenne de 1,8 années. Tout comme pour
la forme des contrats, des différences sont notables d’une famille d’employeurs à
l’autre. Ainsi, la fonction publique territoriale et les autres emplois de l’Ircantec
ont des durées d’emploi supérieures à celles des fonctions publiques d’État et hospitalière. Les écarts sont toutefois plus flagrants lorsque l’on s’interesse aux sousfamilles d’employeurs. La durée moyenne y atteint son minimum à 0,5 années
avec Gaz de France et son maximum à 5,4 années pour les associations foncières.
La faible durée de cotisation observée dans la fonction publique d’État, dont les
principaux composants sont les ministères et directions d’État et les établissements
publics relevant des ministères, traduit la mobilité importante des cotisants dans
ces deux secteurs (la durée moyenne en emploi y était respectivement de 1,7 et
de 1,6 années). À l’opposé, les durées importantes dans les régies et EPIC (3,2
années), à Pôle Emploi (3,2 années) et dans les anciens PTT, La Poste et France
Telecom (1,9 années) sont responsables de la plus faible mobilité des cotisants au
sein des emplois de la famille Autres.
2.1.3
Des emplois saisonniers
La spécificité des emplois Ircantec implique qu’il existe de nombreux emplois saisonniers. Outre les déclarations sur les contrats que nous venons de présenter, une
autre approche consiste à considérer le nombre de cotisants observés chaque mois
46
Caractéristiques des emplois Ircantec
de l’année.
F IGURE 2.3 – Saisonnalité de l’emploi Ircantec.
N OTE : Mois passés à l’Ircantec entre 1971 et 2011 pour les cotisants entrés à l’Ircantec après 1971.
Les rapports sont effectués sur la base de l’ensemble des cotisants observés par année chaque mois.
S OURCE : Ircantec, calcul des auteurs.
On voit en effet à partir du graphique 2.3 que le nombre de cotisants à l’Ircantec
augmente pendant les mois d’été, entre juin et août, et décroît fortement par la
suite. Les emplois créés lors de cette période sont particulièrement courts car 78 %
ont une durée inférieure ou égale à 3 mois et 50 % ont une durée maximale d’un
mois. De plus, on constate une certaine stabilité des cotisants présents lors de cette
période de l’année puisque 42 % des individus ayant commencé un emploi entre
juin et septembre cotiseront à nouveau à l’Ircantec pendant la saison estivale de
l’année suivante, sans avoir exercé un autre emploi à l’Ircantec entre temps. La
recrudescence d’activité dans les communes pendant la saison estivale en font les
principaux créateurs d’emplois saisonniers.
47
Les carrières des non-titulaires du secteur public
2.2
2.2.1
Des emplois multiples
Une forte mobilité intra-Ircantec des cotisants
La mobilité intra-Ircantec des cotisants, mesurée ici comme le fait d’avoir plusieurs emplois à l’Ircantec la même année pour un individu, est une des caractéristiques majeures des cotisants de l’Ircantec. Du fait d’une population importante
d’intermittents et d’emplois à temps partiel, de nombreux cotisants ont plus d’un
employeur au cours de l’année. Cette tendance semble s’être accentuée au cours
des dernières décennies puisque la mobilité intra-Ircantec des cotisants concernait
12 % des cotisants en 2011, contre 8 % en 1973. Dans le même temps, le nombre
moyen d’employeurs par année est passé de 1,03 à 1,15 par cotisant.
Sur l’ensemble de la période, on constate une hausse de la proportion d’individus
travaillant pour plus d’un employeur à l’Ircantec par an dans chacune des fonctions publiques. La hausse la plus importante se trouve dans la fonction publique
d’État, où elle est passée de 12 % à 17 %. Seuls les emplois de la famille Autres
ont connu une baisse de la proportion de salariés travaillant pour plusieurs employeurs par année. Ce comportement se concentre finalement auprès d’un petit
nombre d’employeurs, parmi lesquels on retrouve les associations foncières où
près d’un employé sur deux avait plus d’un employeur entre 1992 et 2011, ou encore l’assistance publique des hôpitaux de Paris, où ils étaient plus d’un sur quatre.
Par ailleurs, les cotisants à temps partiel et les emplois temporaires sont, comme
on pouvait s’y attendre, les plus mobiles au sein des emplois Ircantec. Cela souligne la fragilité de leur situation qui, à cause de plus faibles revenus et d’emplois
sur de plus courtes périodes, les conduit à cumuler plusieurs emplois par année.
2.2.2
Des emplois secondaires
La mobilité intra-Ircantec des cotisants ne permet pas de distinguer le cumul de
la succession d’emplois. Bien que ces deux éléments traduisent conjointement la
mobilité des cotisants entre emplois Ircantec, ils se doivent d’être séparés afin
d’analyser l’emploi secondaire. Dans ce but, nous avons défini un indicateur de
48
Caractéristiques des emplois Ircantec
TABLEAU 2.2 – Mobilité intra-Ircantec des cotisants par employeur.
Familles
État
Hospitalière
Territoriale
Autres
Employeurs
Caisse des Dépôts
CNRS
Autorités indépendantes
INRA
Services du 1er ministre
Établissements publics relevant des ministères
Ministères et directions d’État
APHP
Hôpitaux
Syndicats inter hospitaliers
Établissements médicaux sociaux
Associations foncières
Centres de gestion
Outre mer
Départements
Régions
Services d’une collectivité locale
Communes
Établissements publics spécialisés et non spécialisés
Sociétés audiovisuelles
Banque de France
EDF
Gaz de France
GIP et groupements
Établissement relevant des IEG
Organismes sociaux ou professionnels et sociétés anonymes
Régies et EPIC
Pôle Emploi (+ ex ANPE)
Anciens PTT, La Poste et France Telecom
Associations
Ensemble
1971-1991
3%
16 %
6%
7 % 12 %
6%
18 %
11 %
28 %
11 %
12 %
11 %
5%
53 %
20 %
3%
8%
8%
7%
7%
7%
10 %
8%
5%
5%
5%
16 %
8%
3%
9%
3%
4%
9%
14 %
9%
1992-2011
4%
19 %
14 %
12 % 17 %
11 %
22 %
15 %
32 %
14 %
15 %
13 %
9%
47 %
22 %
2%
8%
10 %
10 %
11 %
9%
12 %
4%
5%
5%
4%
12 %
7%
4%
13 %
5%
2%
7%
11 %
12 %
L ECTURE : Entre 1971 et 1991, en moyenne 12 % des cotisants dans la fonction publique d’État avaient plus d’un employeur par année. Ils
étaient 3 % à la Caisse des Dépôts et consignations.
N OTE : La mobilité intra-Ircantec se définit comme l’existence d’au moins deux employeurs pour un même cotisant lors d’une année. Les
calculs sont effectués sur la base des cotisants nés au mois d’octobre et entrés à l’Ircantec après 1971.
S OURCE : Ircantec, calcul des auteurs.
49
Les carrières des non-titulaires du secteur public
multi-emploi reportant les situations où un cotisant travaille dans plus d’un emploi
à l’Ircantec au même moment. Cet indicateur étant très sensible aux dates de
début et fin d’emploi qui sont parfois mal renseignées, il surestime certainement
le cumul d’emploi. On retrouve ainsi à partir des données de l’Ircantec que chaque
année en moyenne 9 % des cotisants cumulaient plus d’un emploi entre 1971 et
1991, taux qui a augmenté par la suite à 11 % sur la période de 1992 à 2011.
Afin de limiter le biais lié aux incertitudes portant sur les dates de début et de
fin d’emploi, nous avons également utilisé les données de l’enquête Emploi. Selon
celles-ci, environ 6 % des cotisants avaient un emploi secondaire à l’Ircantec et
pour 54 % d’entre-eux leur emploi principal était également à l’Ircantec. Le faible
taux d’emploi secondaire pour les cotisants présents à l’Ircantec, en comparaison
des résultats issus des données de l’Ircantec, a pour origine le caractère déclaratif des données. Ainsi, il est fort probable qu’un individu exerçant une même
profession dans deux communes ne considère pas avoir un emploi secondaire. Il
en est de même pour un intervenant extérieur exerçant dans plusieurs établissements scolaires. Si l’on suppose que les individus ne considèrent avoir un second
emploi que lorsqu’il existe des différences suffisamment importantes entre leurs
employeurs, on observe une convergence entre les résultats des deux bases : le
taux d’emploi secondaire de 3,7 % que l’on retrouve dans les données de l’Ircantec en considérant les employeurs à partir de leur sous-famille entre 2003 et 2011
est proche de celui de 3,2 % fournit par les données de l’enquête Emploi.
Notre estimation de 6 % est également extrêmement faible en comparaison de
l’estimation de 16,6 % réalisée par le GMV-conseil (1998) à partir de l’enquête
Emploi de 1996. La différence entre ces deux résultats s’explique par l’identification des cotisants en second emploi à l’Ircantec. L’étude de GMV-conseil avait fait
l’hypothèse que tous les individus de plus de 15 ans ayant un emploi secondaire
dans la production d’énergie, les postes et télécommunications, les administrations publiques, l’éducation, la santé et les actions sociales, l’assainissement des
voiries et déchets, l’audiovisuelle et la presse étaient affiliés à l’Ircantec. Cette
hypothèse conduisait à inclure de nombreux travailleurs qui n’étaient en fait pas
affiliés à l’Ircantec. Notre méthodologie présentée au chapitre 1 à la page 32 utilise
50
Caractéristiques des emplois Ircantec
les informations supplémentaires disponibles dans l’enquête Emploi après 2003 18 .
Afin de mieux cerner les déterminants des situations d’emploi secondaire, nous
avons procédé à une analyse statistique – formellement des régressions logistiques
de la probabilité d’être dans un emploi principal ou secondaire – des caractéristiques des emplois et des non-titulaires les plus associées à cette forme d’emploi.
Le tableau 2.3 reproduit les résultats de ces analyses : les coefficients pour chaque
variable se lisent comme l’effet sur la probabilité d’être associée à la situation
d’emploi étudiée. On voit ainsi que les hommes ont une probabilité plus importante d’avoir un emploi secondaire à l’Ircantec que les femmes. Par ailleurs, l’effet
des qualifications sur cette probabilité n’est pas linéaire puisque seuls les cotisants
les plus qualifiés (c’est-à-dire les diplômés du second et troisième cycle et des
grandes écoles) ont une probabilité significativement plus élevée que leurs homologues. Certaines professions se distinguent par une propension plus importante
à disposer d’un emploi secondaire à l’Ircantec, parmi lesquelles, les professions
libérales et les professions de l’information et de l’art. De plus, on constate également que les cotisants n’étant pas à temps plein ont une probabilité plus forte,
toutes choses égales par ailleurs, d’avoir un emploi secondaire à l’Ircantec. Finalement, l’emploi secondaire est plus courant dans la fonction publique d’État que
dans toutes les autres familles.
La comparaison des cotisants disposant à la fois de leur emploi principal et secondaire à l’Ircantec, par rapport à ceux qui n’y sont que dans le cadre d’un emploi
secondaire, fait apparaître quelques différences notables. Ainsi, alors que le fait de
ne pas être à temps complet réduit toutes choses égales par ailleurs la probabilité
d’avoir un emploi secondaire à l’Ircantec, cela augmente la probabilité de disposer
simultanément d’un emploi principal et secondaire à l’Ircantec.
18. Les individus travaillant en emploi secondaire dans l’une des trois fonctions publiques et les entreprises
nationales sont ainsi directement identifiés, offrant une assiette de cotisants plus fiable pour l’analyse de l’emploi
secondaire. Pour rappel, les cotisants travaillant dans la fonction publique ou les entreprises nationales tout en
disposant d’un emploi principal dans le secteur public hors Ircantec n’ont pas été identifiés comme cotisants de
l’Ircantec.
51
Les carrières des non-titulaires du secteur public
TABLEAU 2.3 – Emploi secondaire et caractéristiques individuelles des
cotisants.
Variables
Principal uniquement Secondaire uniquement Principal et secondaire
(1)
(2)
(3)
Genre
Homme
Femme
Diplômes
CEP et aucuns diplômes
BEPC
Ref.
Ref.
Ref.
0.477∗∗∗
-0.648∗∗∗
-0.386∗∗∗
(0.041)
(0.077)
(0.048)
Ref.
Ref.
Ref.
-0.038
0.235
-0.004
(0.094)
(0.207)
(0.106)
(0.073)
(0.159)
0.208∗∗∗
CAP et BEP
-0.153∗∗
Baccalauréat et équivalents
(0.075)
1er cycle, BTS et DUT
2 et
3e cycles
et grandes écoles
Professions
Employés
Agriculteurs et ouvriers agricoles
Artisans, commerçants et chefs de petites entreprises
0.249
0.166∗∗
(0.176)
0.501∗∗∗
(0.082)
-0.101
(0.084)
(0.171)
(0.098)
0.503∗∗∗
0.427∗∗∗
(0.077)
(0.163)
(0.086)
Ref.
Ref.
Ref.
0.527
1.205
n.r.
(0.723)
(0.738)
0.896
(1.023)
0.868
(1.041)
Professions libérales
-1.704∗∗∗
Professions intermédiaires
-0.200∗∗∗
0.780∗∗∗
(0.072)
(0.090)
(0.144)
0.855∗∗∗
(0.159)
(0.235)
(0.163)
(0.149)
(0.081)
0.454∗
(0.244)
(0.128)
(0.182)
(0.112)
1.456∗∗∗
0.213
0.419∗∗
n.r.
0.271∗∗
2.283∗∗∗
(0.169)
0.357∗∗∗
Ouvriers non qualifiés
-0.026
-0.427∗∗∗
-0.440∗∗∗
Ouvriers qualifiés
(0.082)
0.055
Cadres et Ingénieurs
Techniciens, contre maitres et agents de maîtrise
-0.338∗∗∗
0.220
(0.226)
0.006
(0.327)
-0.592∗∗
(0.245)
-0.538∗∗∗
(0.155)
-0.481∗∗
(0.215)
Professions scientifiques
-0.708∗∗∗
Professions de l’information et de l’art
-2.004∗∗∗
Instituteurs et assimilés
-0.845∗∗∗
1.420∗∗∗
0.674∗∗∗
(0.066)
(0.134)
(0.077)
Ref.
Ref.
Ref.
-0.681∗∗∗
-0.490∗∗∗
1.015∗∗∗
(0.040)
(0.086)
(0.049)
Ref.
Ref.
Ref.
-1.951∗∗∗
0.957∗∗∗
1.006∗∗∗
(0.165)
(0.081)
(0.072)
(0.087)
Temps complet
Temps complet
Autres
Famille d’employeurs
Entreprises publiques
FPE
-1.906∗∗∗
FPT et FPH
1.265∗∗∗
0.042
(0.148)
1.530∗∗∗
(0.207)
n.r.
(0.164)
Age
0.522∗∗∗
(0.082)
2.020∗∗∗
(0.093)
(0.169)
1.403∗∗∗
(0.166)
-0.118∗∗∗
0.264∗∗∗
(0.012)
(0.027)
(0.013)
Age au carré
0.001∗∗∗
Constante
8.119∗∗∗
-11.34∗∗∗
-6.948∗∗∗
(0.301)
(0.577)
(0.320)
101 578
0.0952
89 686
0.1108
101 298
0.0989
(0.000)
Observations
Pseudo-R2
Seuils des tests de significativité : ∗ 1 %, ∗∗ 5 % et ∗∗∗ 10 %.
-0.003∗∗∗
0.075∗∗∗
(0.000)
-0.001∗∗∗
(0.000)
N OTE : Régressions logistiques sur le fait d’avoir uniquement un emploi principal (1), uniquement un emploi secondaire (2) ou à la fois un emploi principal et un emploi secondaire (3) à l’Ircantec. Calculs effectués à partir des
données de l’enquête Emploi de 2003 à 2011 sur l’ensemble des cotisants identifiés en tant qu’affilié de l’Ircantec.
Les données ont été pondérées afin quelles soient représentatives de la population française, selon les recommendations fournies dans l’enquête Emploi. L’emploi secondaire porte sur tous les emplois qui ne sont pas principaux
(c’est-à-dire le second, troisième et quatrième emploi dans les données de l’enquête Emploi).
S OURCE : Enquête Emploi, calculs des auteurs.
52
Caractéristiques des emplois Ircantec
2.3
Des périodes de cotisation courtes mais répé-
tées
Le graphique 2.4 présente la fonction de survie des cotisants à l’Ircantec lors de
leur première période de cotisation – c’est-à-dire leur probabilité d’avoir cotisé
sans interruption à l’Ircantec x années après leur première cotisation. Environ
la moitié des cotisants à l’Ircantec ont cessé de cotiser un an après la première
affiliation et seulement 7 % des cotisants entrés en 1975 à l’Ircantec ont cotisé
plus de 10 années consécutives à l’Ircantec. Ces probabilités tendent d’ailleurs à
diminuer : la fonction de survie de 1982 se trouve au sud-ouest de la fonction
de survie de 1975 et est elle-même au nord-est de celle de 1992 ; bien que l’on
observe une inversion de cette tendance depuis le début des années 2002.
F IGURE 2.4 – Fonctions de survie des cotisants.
N OTE : Les fonctions de survie indiquent la probabilité de rester à l’Ircantec pendant « x » années
lors de la première période de cotisation. Les calculs sont effectués sur l’ensemble des cotisants
entrés en 1975, 1982, 1992 ou 2002. Les fonctions de survie font ici référence au nombre d’années
consécutives que passent les cotisants à l’Ircantec sans arrêt de cotisation supérieur à 30 jours.
S OURCE : Ircantec, calcul des auteurs.
53
Les carrières des non-titulaires du secteur public
2.3.1
De multiples périodes de cotisation
Les fonctions de survie ne permettent cependant d’apprécier que la durée sans
discontinuité de cotisation et délaissent ainsi l’analyse d’une classe particulière de
cotisants qui, du fait d’un nombre important d’allers-retours, inscrivent l’Ircantec
et ses emplois comme l’un des principaux éléments de leur carrière. C’est pourquoi
nous avons développé une analyse complémentaire en terme de périodes de cotisation. Celle-ci permet, en plus de la simple analyse des durées en emploi, de saisir
la continuité ou la discontinuité des cotisations. Pour ce faire, nous avons défini
un indicateur de période qui regroupe tous les épisodes de cotisation à l’Ircantec
qui se suivent sans discontinuité de plus de 30 jours. Afin d’illustrer la logique
de cet indicateur, prenons le cas d’un cotisant travaillant chaque été à un même
poste dans une collectivité locale pendant trois années. Sa carrière sera alors caractérisée par trois périodes. À l’inverse, un cotisant intervenant extérieur dans
différentes écoles pendant trois années sans interruption n’aura qu’une période.
TABLEAU 2.4 – Durée des périodes de cotisation en années.
Générations
1971
1991
Durée
3,9
1,4
1er
Individus
100%
100%
Durée
3,4
1,4
2e
Individus
33%
57%
Périodes
3e
Durée
Individus
2,8
14%
1,3
33%
Durée
2,2
1,3
4e
Individus
7%
20%
Durée
1,9
1,2
5e
Individus
4%
12%
L ECTURE : 33 % des cotisants entrés à l’Ircantec pour la première fois en 1971 ont connu au moins deux périodes de
cotisation. La durée moyenne de cotisation lors de la seconde période était de 3,4 années.
N OTE : Les périodes font référence à toutes les périodes de temps observées à l’Ircantec sans discontinuité de plus de 30
jours. Seules les cinq premières périodes ont été reportées dans le tableau. À titre d’information, jusqu’à 29 et 34 périodes
étaient observées pour les cotisants entrés respectivement en 1971 et 1991. Les calculs sont effectués sur l’ensemble des
cotisants nés au mois d’octobre et entrés à l’Ircantec en 1971 et 1991.
S OURCE : Ircantec, calcul des auteurs.
La décroissance de la durée de cotisation par période, observée dans le tableau
2.4, est la conséquence directe de la sélection des cotisants effectuant des allersretours fréquents à l’Ircantec et qui ont pour habitude de rester peu de temps
sans interruption à l’Ircantec. Ainsi, on constate que les individus présents pour
la 5e fois à l’Ircantec cotisaient en moyenne 1,9 années sans interruption pour la
génération entrée en 1971. Ces individus ont donc un comportement très différent
de l’individu moyen qui entre à l’Ircantec pour la première fois. Il est intéressant
de noter que l’on a observé une hausse progressive du nombre de période par
54
Caractéristiques des emplois Ircantec
cotisant. Ainsi, bien que déjà importante dès la création de l’Ircantec, la tendance
à quitter puis revenir à l’Ircantec s’est accentuée : les cotisants entrés en 1971
ont travaillé environ 1,7 périodes, alors que ceux entrés en 1991 ont travaillé 2,5
périodes. Cette tendance moyenne ne serait cependant le fruit que de l’évolution
très marquée d’une poignée de cotisants puisqu’ils n’étaient que 33 % à effectuer
plus de deux périodes de cotisation en 1991.
2.3.2
Périodes de cotisation par employeur
Cette forte concentration se retrouve à partir de la répartition des cotisants par
famille et sous-famille d’employeurs. Ainsi, sur la période de 1971 à 1981, les
collectivités locales et l’État sont les familles d’employeurs ayant le plus faible
nombre de périodes par cotisant (respectivement 1,8 et 1,9 périodes), bien que
l’écart avec les emplois de la famille Autres (1,9 périodes) et les hospitaliers (2
périodes) soit faible. Entre 1982 et 1991, on a assisté à un net détachement de cet
indicateur, creusant l’écart entre d’une part les collectivités locales et la fonction
publique d’État (2,2 périodes) et d’autre part les emplois de la famille Autres et
les hospitaliers (respectivement 2,7 et 2,5 périodes).
Une fois de plus, l’analyse à l’échelle des familles d’employeurs dissimule l’hétérogénéité des différentes sous-familles d’employeurs. Ainsi, la hausse observée
pour la famille Autres est due à l’évolution des cotisants employés à France Telecom, à La Poste et aux anciens PTT. D’autres employeurs ont connu par ailleurs
une hausse importante du nombre de périodes de cotisation à l’Ircantec, parmi
lesquels on retrouve, entre autres, la Caisse des Dépôts et consignations et l’Assistance publique des hôpitaux de Paris tandis que les services des collectivités
locales et les sociétés audiovisuelles connaissaient une baisse.
2.3.3
Déterminants de la sortie de l’Ircantec
Afin d’évaluer l’effet des determinants individuels et des caractéristiques d’emploi
des cotisants sur leur probabilité de sortir de l’Ircantec, une régression logistique
55
Les carrières des non-titulaires du secteur public
TABLEAU 2.5 – Évolution du nombre de périodes par employeur.
Familles
État
Hospitalière
Territoriale
Autres
Employeurs
Caisse des Dépôts
CNRS
Autorités indépendantes
INRA
Services du 1er ministre
Établissements publics relevant des ministères
Ministères et directions d’État
APHP
Hôpitaux
Syndicats inter hospitaliers
Établissements médicaux sociaux
Associations foncières
Centres de gestion
Outre mer
Départements
Régions
Services d’une collectivité locale
Communes
Établissements publics spécialisés et non spécialisés
Sociétés audiovisuelles
Banque de France
EDF
Gaz de France
GIP et groupements
Établissement relevant des IEG
Organismes sociaux ou professionnels et sociétés anonymes
Régies et EPIC
Pôle Emploi (+ ex ANPE)
Anciens PTT, La Poste et France Telecom
Associations
Ensemble
Nombre de périodes
1971 - 1981 1982 - 1991
1,6
3,1
2,3
2,3
1,5
1,8
2,1
1,9 2,5
2,2
1,8
1,8
2,2
2,4
1,8
2,1
2,1
2,8
2,0
2,5
2,0
2,5
2,7
2,3
1,7
2,2
1,0
1,6
1,8
2,2
1,6
2,0
1,7
2,2
1,8
2,2
1,7
1,8
3,4
2,5
1,8
2,2
1,8
2,1
2,3
2,1
1,7
2,2
1,8
2,2
1,7
2,3
n.r.
1,6
1,9 2,0
2,7
1,5
1,8
2,1
1,8
2,2
1,6
1,8
2,0
3,1
2,4
2,5
1,9
2,4
N OTE : Les années correspondent à l’année de la première cotisation. Les sous-familles d’employeurs sont également considérées lors
de l’entrée. Ainsi, un cotisant ayant connu plusieurs employeurs classés dans des sous-familles différentes, vera son nombre de périodes
reporté dans la sous-famille de son premier employeur. Les calculs sont effectués sur l’ensemble des cotisants nés au mois d’octobre et entrés
à l’Ircantec entre 1971 et 1991.
S OURCE : Ircantec, calcul des auteurs.
56
Caractéristiques des emplois Ircantec
est effectuée à partir des données de l’enquête Emploi. Celle-ci porte sur la probabilité, pour un cotisant donné, d’être toujours à l’Ircantec un an après sa première
interrogation dans l’enquête Emploi. Comme on peut le constater à partir des résultats reportés dans le tableau 2.6, les caractéristiques individuelles des cotisants,
leur situation familiale, ainsi que leur situation d’emploi, sont des déterminants
essentiels pour la sortie des cotisants.
Les résultats de la régression indiquent que les femmes ont une probabilité identique à celle des hommes de rester à l’Ircantec. De plus, plus les cotisants sont
âgés plus leur probabilité de rester à l’Ircantec augmente. En ce qui concerne leur
situation familiale, les cotisants célibataires ou veufs restent généralement moins
à l’Ircantec que leurs homologues mariés ou divorcés. On constate par ailleurs
que le nombre d’enfants de moins de trois ans et de moins de six ans n’influe pas
significativement sur la probabilité de rester à l’Ircantec.
Les qualifications initiales des cotisants jouent légèrement sur cette probabilité.
On constate en effet une différence entre les cotisants diplômés du supérieur et
les autres : les cotisants ayant les qualifications les plus élevées restent moins souvent à l’Ircantec. Finalement, la qualité des emplois s’avère déterminante. Ainsi,
les cotisants en contrat à durée indéterminée sont plus souvent à l’Ircantec un an
après leur première interrogation que ceux en contrat à durée déterminée (saisonnier ou non) ou en stage. Il est à ce titre également intéressant de noter que
la probabilité pour les saisonniers de rester à l’Ircantec est supérieure à celle des
autres CDD. Cela traduit, comme nous l’avons déjà indiqué, l’existence de cotisants qui ont pour habitude de cotiser à l’Ircantec plusieurs saisons de suite.
57
Les carrières des non-titulaires du secteur public
TABLEAU 2.6 – Résultats de la régression logistique de la présence du
cotisant un an après sa première interrogation sur les determinants individuels.
Variable
Coefficient
Écart-type
Ref.
0.047
(0.037)
Ref.
0.365∗
-0.007
0.152∗∗
(0.039)
(0.128)
(0.070)
Ref.
0.000
0.073
-0.033
-0.109∗∗∗
-0.187∗
(0.066)
(0.048)
(0.055)
(0.064)
(0.067)
Ref.
-0.762∗
-0.310∗
-0.791∗
(0.193)
(0.034)
(0.201)
Ref.
-0.352
0.178∗∗
-0.381
0.010
0.311∗
0.113∗∗∗
-0.200∗∗
0.079
0.132
0.070
0.271
(0.358)
(0.071)
(0.237)
(0.051)
(0.073)
(0.058)
(0.087)
(0.081)
(0.139)
(0.063)
(0.742)
Ref.
0.141∗
(0.048)
0.019∗
0.003∗∗∗
(0.002)
(0.002)
Salaire redressé
-0.000
(<0.001)
Nombre d’enfants de moins de 3 ans
Nombre d’enfants de moins de 6 ans
-0.080
0.008
(0.071)
(0.044)
Constante
-1.098∗
Pseudo-R2
0,033
Observations
23 434
Seuils des tests de significativité : ∗∗∗ 1 %, ∗∗ 5 % et ∗ 10 %.
(0.112)
Genre
Homme
Femme
Situation familiale
Célibataire
Marié
Veuf
Divorcé
Diplômes
CEP et aucuns diplômes
BEPC
CAP et BEP
Baccalauréat et équivalents
1er cycle, BTS et DUT
2 et 3e cycles et grandes écoles
Emploi
CDI
CDD
Saisonnier
Stages
Employés
Agriculteurs et ouvriers agricoles
Cadres et Ingénieurs
Professions libérales
Professions intermédiaires
Techniciens, contre maitres et agents de maîtrise
Ouvriers qualifiés
Ouvriers non qualifiés
Professions scientifiques
Professions de l’information et de l’art
Instituteurs et assimilés
Clergé, religieux
Temps complet
Temps complet
Temps partiel
Age
Heures de travail habituelles
N OTE : Résultats de la régression logistique de la présence des cotisants un an
après leur première interrogation dans l’enquête Emploi. Les calculs sont effectués
sur la base des cotisants interrogés dans l’enquête Emploi entre 1982 et 2011
et identifiés à l’Ircantec lors de la première interrogation. Les données ont été
pondérées afin quelles soient représentatives de la population française selon les
recommendations fournies dans l’enquête Emploi.
S OURCE : Enquête Emploi, calcul des auteurs.
58
Caractéristiques des emplois Ircantec
2.4
Des rémunérations faibles
Après les caractéristiques des emplois des cotisants de l’Ircantec, nous nous concentrons à présent sur leurs rémunérations. Nous utilisons comme mesure des rémunérations l’assiette de cotisation qui est reportée dans les bases du régime Ircantec 19 . Afin de faciliter les comparaisons dans le temps, les rémunérations sont
exprimées en pourcentage du plafond de sécurité sociale. Enfin, ces rémunérations sont calculées au niveau annuel et peuvent donc correspondre à plusieurs
emplois en cas de mobilité intra-Ircantec. Les rémunérations n’étant pas corrigées
par la durée en emploi, les faibles rémunérations peuvent refléter un temps de
travail faible, plutôt qu’une rémunération horaire basse. Pour cette raison, nous
utilisons les données du régime Ircantec portant sur les formes d’emploi et le taux
d’activité pour construire des rémunérations en équivalent temps plein, puis les
données de l’enquête Emploi pour analyser les rémunérations horaires.
2.4.1
Distribution des rémunérations
Les rémunérations des cotisants de l’Ircantec sont extrêmement faibles (voir figure 2.5). Elles sont comprises, en moyenne, entre 30 % et 35 % du plafond de
sécurité sociale sur la période de 1975 à 2011 et sont restées stables, malgré une
légère hausse en fin de période. En 2011, 35 % du plafond de sécurité sociale
représente 1 060 euros. Par comparaison, le salaire moyen brut par tête dans le
secteur concurrentiel tel que le mesure l’Acoss (2011) était de 2 290 euros 20 . La
figure 2.5 montre également qu’il existe une inégalité forte de rémunération entre
le 10e percentile, qui est proche de 2 % de plafond de sécurité sociale, et le 90e
percentile qui est d’environ 75 % de plafond de sécurité sociale. Reflétant cette
inégalité, la médiane est d’un tiers plus faible que la moyenne.
19. Les rémunérations étant mal renseignées lors des premières années, nous restreignons la période servant
à analyser leur évolution. Les statistiques fournies dans cette partie ne portent ainsi que sur la période de 1975
à 2011.
20. Le calcul du salaire moyen brut par tête réalisé par l’Acoss repose sur les assiettes salariales totales qui
servent de base au calcul des cotisations de sécurité sociale. Le salaire moyen brut par tête est égal à la somme
de ces assiettes, c’est-à-dire la masse salariale, divisée par les effectifs totaux des employeurs du secteur concurrentiel.
59
Les carrières des non-titulaires du secteur public
F IGURE 2.5 – Évolution des rémunérations annuelles moyennes.
N OTE : Les rémunérations sont calculées comme la somme des revenus issus des emplois impliquant une affiliation à l’Ircantec pour un cotisant lors d’une année. Celles-ci sont exprimées en
pourcentage du plafond de sécurité sociale. Il est à noter que de faibles rémunérations peuvent
refléter des emplois de courte durée ou des durées de travail faibles. Les calculs sont effectués sur
l’ensemble des cotisants entrés après 1971 à l’Ircantec et nés au mois d’octobre.
S OURCE : Ircantec, calcul des auteurs.
La comparaison des graphiques 2.5 et 2.6 suggère que les rémunérations pendant
la première année de cotisation sont plus faibles que les rémunérations moyennes
sur toute la durée de l’emploi. Cela reflète la progression salariale importante de
certains travailleurs au sein des emplois Ircantec. Ainsi, la moyenne des rémunérations à l’entrée est inférieure à 10 % du plafond de sécurité sociale, soit trois fois
moins que les rémunérations moyennes. De plus, on retrouve des signes de cette
progression salariale dans la dispersion plus grande des rémunérations moyennes
au sein d’un emploi, par rapport aux rémunérations à l’entrée : en particulier, le
90e percentile des rémunérations au cours de la carrière est de 80 %, plus de
deux fois plus élevé que le 90e percentile des rémunérations la première année de
cotisation. À l’inverse, certains cotisants de l’Ircantec ont des rémunérations très
faibles et ne restent pas plus d’un an à l’Ircantec : les 10e percentiles des deux
distributions sont proches (inférieurs à 10%).
Une des raisons pour lesquelles les cotisants de l’Ircantec ont de faibles rémunérations est qu’ils sont souvent à temps partiel ou en emploi temporaire. On constate
60
Caractéristiques des emplois Ircantec
F IGURE 2.6 – Évolution des rémunérations annuelles à l’entrée à l’Ircantec.
N OTE : Les rémunérations à l’entrée sont calculées comme la somme des rémunérations issues
d’emplois impliquant une affiliation à l’Ircantec, la première année où le cotisant est observé à
l’Ircantec. Celles-ci sont exprimées en pourcentage du plafond de sécurité sociale. Comme il est
d’usage, les calculs sont effectués sur l’ensemble des cotisants entrés après 1971 à l’Ircantec et nés
au mois d’octobre.
S OURCE : Ircantec, calcul des auteurs.
en effet que la rémunération moyenne en temps plein est proche de 35 %, bien
supérieure à celle des temps partiels (20 %) et des emplois temporaires (10 %).
L’écart entre temps plein et temps partiel s’est cependant réduit, avec une hausse
de 10 points des rémunérations pour les temps partiels entre 1975 et 2010. Outre
une possible variation de la rémunération horaire ou du nombre d’heures effectuées par emploi, celle-ci traduit l’évolution de l’emploi multiple parmi les temps
partiels : comme nous l’avons vu, le recours au multi-emploi a en effet augmenté
parmi les temps partiels plus que dans les autres catégories de contrat.
2.4.2
Rémunérations par employeur
Le tableau 2.7 reporte les rémunérations annuelles moyennes en pourcentage du
plafond de la sécurité sociale pour chaque type d’employeurs. Il apparaît ainsi
que la fonction publique territoriale offrait les rémunérations les plus faibles sur
l’ensemble de la période (25 % du plafond de sécurité sociale), inférieures de
61
Les carrières des non-titulaires du secteur public
TABLEAU 2.7 – Rémunérations moyennes par employeur (en % du plafond de la sécurité sociale).
Familles
État
Autres
Hospitalière
Territoriale
Employeurs
Caisse des Dépôts
CNRS
Autorités Indépendantes
INRA
Services du 1er Ministre
Établissements Publics relevant des ministères
Ministères et Directions d’État
Sociétés audiovisuelles
Banque de France
EDF
Gaz de France
GIP et groupements
Établissement relevant des IEG
Organismes Sociaux ou Professionnels et Sociétés anonymes
Régies et EPIC
Pôle Emploi (+ ex ANPE)
Anciens PTT, La Poste et France Telecom
Associations
APHP
Hôpitaux
Syndicats Inter hospitaliers
Établissements médicaux sociaux
Associations Foncières
Centres de Gestion
Outre Mer
Départements
Régions
Services d’une collectivité locale
Communes
Établissements Publics spécialisés et non spécialisés
Ensemble
1975-1991
20 %
61 %
104 %
35 % 41 %
72 %
41 %
41 %
78 %
34 %
14 %
13 %
52 %
14 % 29 %
29 %
42 %
55 %
21 %
34 %
37 %
37 %
36 %
41 %
31 %
30 %
29 %
33 %
37 %
25 %
66 %
33 %
24 %
25 %
33 %
1992-2011
18 %
42 %
85 %
29 % 35 %
85 %
38 %
33 %
107 %
40 %
14 %
14 %
64 %
23 % 46 %
33 %
58 %
68 %
35 %
47 %
42 %
50 %
47 %
52 %
31 %
36 %
27 %
41 %
44 %
27 %
47 %
34 %
24 %
27 %
35 %
N OTE : Les rémunérations reportées sont les rémunérations annuelles. Elles sont exprimées en pourcentage du plafond de sécurité sociale.
Les calculs sont effectués sur l’ensemble des cotisants entrés après 1971 à l’Ircantec et nés au mois d’octobre.
S OURCE : Ircantec, calcul des auteurs.
62
Caractéristiques des emplois Ircantec
11 points à celles qui étaient pratiquées dans la fonction publique hospitalière
et de 16 points à celles dans la fonction publique d’État sur la première moitié
de la période. On a ensuite assisté à une baisse des rémunérations au sein des
fonctions publiques d’État et une stagnation dans la fonction publique territoriale
entre 1992-2011, tandis que les rémunérations dans la fonction publique hospitalière et la famille Autres augmentaient fortement. La baisse des rémunérations
dans la fonction publique d’État reflète principalement la baisse de 8 points de plafond de sécurité sociale observée dans les ministères et directions d’État, ainsi que
les très fortes baisses observées au CNRS et à l’Inra. Ces dernières sont la conséquence des politiques de titularisation du début des années 1980, excluant une
part importante des travailleurs réguliers de ces secteurs du cadre de l’Ircantec.
2.4.3
Rémunérations en équivalent temps plein.
Il est indispensable de rappeler que ces faibles rémunérations annuelles ne tenant
pas compte de la durée de travail effective dans l’année, elles peuvent refléter une
rémunération horaire basse mais également du travail à temps partiel ou des emplois saisonniers et intermittents. Afin d’appréhender les rémunérations des nontitulaires en éliminant l’effet du temps de travail, nous avons calculé ces rémunérations en équivalent temps plein (ETP). En pratique, cela revient à pondérer les
rémunérations en fonction du nombre de jours travaillés dans l’année et du taux
d’activité des cotisants. La méthode de calcul est détaillée en annexe à la page 172.
Ces calculs restent néanmoins approximatifs dans la mesure où ils reposent sur
les dates d’emploi déclarées par les employeurs qui sont parfois mal renseignées :
certains employeurs remplissent systématiquement l’année complète comme période d’emploi, y compris pour les emplois de quelques mois. Nous avons ainsi
également appliqué une méthode permettant d’isoler les rémunérations en ETP
aberrantes.
La figure 2.7 présente la distribution des rémunérations en équivalent temps plein.
Le contraste avec les rémunérations non corrigées du temps de travail (figure 2.5)
est frappant. Tout d’abord, les rémunérations en équivalent temps plein sont près
63
Les carrières des non-titulaires du secteur public
de deux fois supérieures aux rémunérations annuelles : la moyenne est de 52 %
du plafond de sécurité sociale soit 1 531 euros par mois en 2011. Ensuite, la distribution des rémunérations en équivalent temps plein est moins inégale : moyenne
et médiane sont très proches l’une de l’autre. Néanmoins, même si les rémunérations en équivalent temps plein des cotisants de l’Ircantec sont plus fortes, elles
restent en moyenne d’un tiers plus faibles que le salaire brut moyen par tête dans
le secteur privé qui est de 2 290 euros par mois selon l’Acoss (2011).
F IGURE 2.7 – Évolution des rémunérations moyennes en équivalent
temps plein.
N OTE : Les rémunérations en équivalent temps plein, mesurées en pourcentages de plafond de
sécurité sociale, prennent en compte le nombre de jours travaillés et le taux d’activité. Ce dernier
n’étant pas systématiquement renseigné, les formes d’emploi (temps plein, temps partiel, etc.) ont
également été prises en compte. La méthode de calcul est décrite dans l’annexe A.0.6 (page 172).
Les calculs sont effectués sur l’ensemble des cotisants entrés après 1971 à l’Ircantec et nés au mois
d’octobre.
S OURCE : Ircantec, calcul des auteurs.
2.4.4
Rémunérations et déterminants individuels
Afin d’analyser l’effet des caractéristiques individuelles des cotisants sur leur rémunération, nous avons utilisé les données de l’enquête Emploi. À partir du salaire
net et du nombre d’heures travaillées, la rémunération horaire a pu être déduite
pour les cotisants dont l’emploi principal est à l’Ircantec. L’effet des déterminants
64
Caractéristiques des emplois Ircantec
individuels des cotisants sur leur rémunération horaire est alors estimé à partir
d’une équation de salaire. Elle consiste en la régression du logarithme de la rémunération horaire sur les caractéristiques individuelles.
Les résultats de la régression sont reportés dans le tableau 2.8. Toutes choses
égales par ailleurs, les femmes sont payées 8,5 % de moins que les hommes. Cet
écart de salaire reste relativement faible en comparaison de celui que l’on retrouve dans le secteur privé (19,1 % en équivalent temps plein en 2010, selon
l’Insee). Sans grande surprise, le rendement de l’éducation est positif. Les professions scientifiques, de la communication et de l’art sont les plus rémunératrices,
alors que les ouvriers non qualifiés ont des rémunérations plus faibles. Les nontitulaires n’étant pas à temps complet ont également une rémunération plus faible
en comparaison de ceux qui le sont. Enfin, les rémunérations horaires sont plus
importantes dans les entreprises publiques que dans la fonction publique.
Pour conclure, quelle que soit la dimension choisie (la forme des emplois, leur durée ou leur cumul) l’emploi Ircantec est éminemment temporaire. Ainsi 50 % des
cotisants qui entrent à l’Ircantec n’y seront plus l’année suivante. La faiblesse des
rémunérations annuelles, qui peut paraître surprenante au vu du niveau des qualifications et des postes occupés par les non-titulaires du secteur public, s’explique
en grande partie par un temps de travail réduit. Un grand nombre de cotisants ne
travaillent ainsi comme non-titulaires qu’une partie de l’année ; certains d’entre
eux ont une activité saisonnière et cotisent régulièrement à l’Ircantec quelques
mois par an. Ce caractère temporaire de l’emploi Ircantec tend même à s’accentuer au cours du temps, avec une réduction de la durée des périodes de cotisation
et une augmentation du nombre de périodes par cotisant entre 1971 et 2011.
Au-delà de ces observations générales, l’analyse détaillée des « carrières » Ircantec
révèle une profonde hétérogénéité : quoi de commun entre un expert venu du
secteur privé pour une vacation dans un ministère, un technicien embauché sur
un CDI chez Gaz de France, un professeur de l’Education Nationale qui fait une
année de stage, et un médecin hospitalier qui cotisera à l’Ircantec pendant toute
65
Les carrières des non-titulaires du secteur public
TABLEAU 2.8 – Équation de salaire.
Variable
Coefficient
(écart-type)
Ref.
-0.085∗∗∗
(0.009)
Ref.
0.154∗∗∗
0.164∗∗∗
0.238∗∗∗
0.382∗∗∗
0.461∗∗∗
(0.015)
(0.011)
(0.013)
(0.015)
(0.018)
Professions
Employés
Agriculteurs et ouvriers agricoles
Cadres et Ingénieurs
Professions libérales
Professions intermédiaires
Techniciens, contremaîtres et agents de maîtrise
Ouvriers qualifiés
Ouvriers non qualifiés
Professions scientifiques
Professions de l’information et de l’art
Instituteurs et assimilés
Clergés, religieux
Ref.
-0.139
0.322∗∗∗
0.231∗∗∗
0.170∗∗∗
0.143∗∗∗
0.040∗∗∗
-0.128∗∗∗
0.462∗∗∗
0.428∗∗∗
0.249∗∗∗
-0.323∗∗
(0.093)
(0.019)
(0.057)
(0.011)
(0.016)
(0.012)
(0.022)
(0.024)
(0.040)
(0.014)
(0.141)
Temps complet
Temps complet
Autres
Ref.
-0.040∗∗∗
(0.009)
Famille d’employeurs
Entreprises publiques
FPE
FPT et FPH
Ref.
-0.253∗∗∗
-0.186∗∗∗
(0.011)
(0.009)
0.0463∗∗∗
-3.94e-03∗∗∗
0.955∗∗∗
(0.003)
(3.39e-05)
(0.056)
Genre
Homme
Femme
Diplômes
CEP et aucuns diplômes
BEPC
CAP et BEP
Baccalauréat et équivalents
1er cycle, BTS et DUT
2 et 3e cycles et grandes écoles
Age
Age au carré
Constante
Observations
R-squared
Seuils des tests de significativité : ∗∗∗ 1 %, ∗∗ 5 % et ∗ 10 %.
36 624
0.395
N OTE : Régression du logarithme du salaire horaire sur les déterminants individuels et d’emploi des cotisants.
Les calculs sont effectués à partir des données de l’enquête Emploi de 1990 à 2011 sur l’ensemble des cotisants
identifiés en tant qu’affilié de l’Ircantec. Les données ont été pondérées afin quelles soient représentatives de la
population française, selon les recommendations fournies dans l’enquête Emploi.
S OURCE : Enquête Emploi, calculs des auteurs.
66
Caractéristiques des emplois Ircantec
sa carrière ? Un enseignement de cette partie est qu’il est relativement difficile
de saisir cette hétérogénéité en se fondant seulement sur les caractéristiques des
employeurs ou même celles des cotisants Ircantec : le même employeur pourra
faire appel à des types de cotisants Ircantec différents, et des cotisants aux caractéristiques socio-démographiques et aux niveaux d’études similaires pourront
avoir des profils de cotisation entièrement différents. Ce qui les distingue c’est la
place de l’Ircantec dans l’ensemble de leur carrière professionnelle.
Dans la partie suivante, nous proposons une typologie des cotisants Ircantec qui
se fonde précisément sur la place des périodes de cotisation Ircantec dans la succession des secteurs d’activité qui compose leur carrière. Cette approche complémentaire permet de mieux comprendre les différences de rémunération, de forme
et de durée d’emploi documentées dans cette partie.
67
Les carrières des non-titulaires du secteur public
68
C HAPITRE 3
T YPOLOGIE
DES CARRIÈRES DES
COTISANTS
La partie précédente a décrit les caractéristiques principales des emplois des cotisants de l’Ircantec en veillant à analyser les différences d’emploi et de rémunération à partir des caractéristiques des employeurs et des cotisants. Nous avons ainsi
vu qu’au delà de leurs différences, les emplois Ircantec ont le point commun d’être
souvent de courte durée, généralement d’une ou deux années. La brièveté de ces
périodes de cotisation est un réel défi pour l’analyse puisque les très courtes « carrières Ircantec » prennent leur source et aboutissent hors du champ de l’Ircantec.
Les cotisants Ircantec peuvent ainsi être des stagiaires en voie de titularisation,
des internes en médecine qui exerceront plus tard dans le privé ou encore des vacataires dont l’activité principale appartient au secteur privé. C’est pourquoi dans
cette troisième partie nous adoptons une approche complémentaire, qui consiste
à considérer l’ensemble de la carrière professionnelle des cotisants Ircantec dans
les données de l’échantillon EIC. En utilisant la méthode dite d’appariement optimal, nous constituons quatre types de cotisants en fonction de la séquence dans
laquelle s’inscrivent les années de cotisation à l’Ircantec. Nous montrons ensuite
que ces quatre groupes permettent de bien comprendre l’emploi Ircantec et de
résumer sa diversité.
69
Les carrières des non-titulaires du secteur public
3.1
Méthodologie
Dans cette partie nous présentons la méthode d’appariement optimal qui est utilisée pour effectuer une typologie des cotisants de l’Ircantec. Nous décrivons ensuite
comment nous la mettons en pratique sur l’échantillon EIC apparié avec les données Ircantec. Enfin, nous présentons les résultats et les quatre types de cotisants
ainsi constitués.
3.1.1
Méthode d’appariement optimal
Les méthodes d’appariement optimal (optimal matching) ont vocation à mesurer
le degré de similarité entre séquences. Initialement conçues pour l’analyse du séquençage ADN, elles se sont étendues aux sciences sociales grâce aux travaux de
Abboot et Hrycak (1990). Leur transcription à l’analyse des carrières impose de
définir à chaque période un état caractérisant la situation d’emploi des individus. Les séquences ainsi obtenues sont comparées une à une afin de fournir une
mesure de similarité. Formellement, cette mesure de similarité prend la forme
d’une distance, calculée comme la somme des coûts associés à chaque opération
élémentaire permettant de passer d’une séquence à une autre. Ces opérations élémentaires peuvent prendre trois formes : insertion d’un état, suppression d’un état
ou substitution d’un état par un autre.
La multitude des transformations permettant de passer d’une séquence A à une
séquence B nécessite de retenir uniquement la distance la plus petite ou, de manière équivalente, le chemin de coût minimal 21 . Afin d’illustrer ce mécanisme,
soient deux séquences A et B de quatre événements telles que :
A = {a, b, a, a} et B = {b, a, b, a}
Avec a et b deux états.
Il existe différentes façons de transformer la séquence B en A :
21. Se référer à Chan (1999) pour une présentation intuitive de la détermination du chemin de coût minimal.
70
Typologie des carrières des cotisants
– La première serait de supprimer la première position de la séquence B, puis
d’ajouter l’événement a à la fin de celle-ci. Le coût total de ce chemin serait
donc d’une suppression d’un état b et de l’insertion d’un état a.
– Une seconde transformation serait de substituer les états b par a et l’élément a,
en seconde position, par b. Le coût total serait alors de trois substitutions entre
a et b.
Cette étape est généralement mise en œuvre à l’aide de l’algorithme de NeedlemanWunsch qui repose sur la distance de Levensthein. Le choix des distances pour
l’appariement optimal ne fait cependant pas consensus et reste, quoi qu’il en soit,
fortement lié au sujet d’étude. À notre connaissance, trois distances sont généralement utilisées. La première que nous venons de présenter permet, à partir de la
définition d’une matrice de coûts, de déterminer le chemin le plus court à l’aide
des trois opérations élémentaires. La seconde, dite de distance d’Hamming, repose
sur un principe similaire n’autorisant toutefois ni les insertions ni les suppressions.
Ces deux distances sont souvent mises en opposition. La distance d’Hamming a, à
l’inverse de sa rivale, tendance à favoriser le facteur temps au détriment des états
(Lesnard et Saint Pol 2009). Finalement, une troisième distance plus rarement
utilisée repose sur l’idée que plus la probabilité de concomitance entre deux états
est élevée, plus le coût de passage associé doit être faible. Cette distance de Hamming dynamique, proposée par Lesnard (2010), permet d’introduire des coûts qui
varient dans le temps en fonction de la probabilité de transition entre deux états.
3.1.2
Mise en œuvre à partir des données de l’Ircantec et de
l’EIC
Pour la mise en œuvre de l’appariement optimal, nous avons utilisé l’échantillon
apparié des données EIC et Ircantec (présenté à la page 26) qui donne à la fois
une perspective sur les carrières des cotisants et des détails sur leur situation d’emploi pendant qu’ils cotisent à l’Ircantec. Nous n’avons retenu que les 20 premières
années de carrière 22 des individus entrés sur le marché du travail entre 1971 et
22. La typologie a également été effectuée en retenant un nombre d’années moindre. Les résultats conduisent
cependant à une distinction moins forte des groupes.
71
Les carrières des non-titulaires du secteur public
1990 et ayant cotisé à l’Ircantec. Ceci nous permet d’avoir une perspective relativement longue sur les carrières et de considérer des changements dans les types
de carrières entre les générations. Le sous-échantillon ainsi formé se compose de
21 622 individus. Afin que la méthode ne repose sur aucune classification a priori
des cotisants, l’ensemble de l’échantillon est utilisé, sans distinction entre familles
d’employeurs. L’analyse de la composition des groupes prendra cependant une approche similaire à celle effectuée dans le second chapitre, par grandes catégories
d’employeurs.
Comme nous l’avons vu, les méthodes d’appariement optimal imposent de définir
les carrières sous la forme de séquences. Pour chaque année il a donc fallu définir
un état caractérisant la situation d’emploi de chacun des cotisants. Les secteurs
d’emplois ont été hiérarchisés suivant les règles décrites à la page 25 en quatre
catégories : Ircantec, public, privé et chômage/inactivité, par ordre décroissant de
priorité. Une modalité supplémentaire, concernant les années travaillées à la fois
à l’Ircantec et dans le secteur privé a également été prise en compte. L’ajout de
cette cinquième situation d’emploi a vocation à fournir une analyse plus fine des
situations d’emploi lorsque les individus cotisent à l’Ircantec.
L’analyse des cotisants de l’Ircantec impliquait que la priorité soit avant tout mise
sur les secteurs d’emploi. Nous avons donc opté pour la distance de Levensthein.
Dès lors, il ne restait qu’à définir une matrice de coûts. Dans la mesure où certains
états sont du point de vue de cette étude plus informatifs que d’autres, nous avons
souhaité différencier certaines substitutions. Ainsi, puisque l’inactivité transcrit la
plupart du temps l’absence d’information pour un cotisant, elle devait être substituable à tout autre état pour un faible coût. À l’inverse, la particularité des emplois
publics, privés et Ircantec, ainsi que leur rôle central dans cette analyse impliquait
que la substitution soit plus coûteuse pour ces états. Finalement, la matrice de
coûts utilisée est la suivante :
72
Typologie des carrières des cotisants
Ircantec
Ircantec et Privé
Public
Privé
Inactivité
Ircantec
0
2
2
2
2
Ircantec et Privé
2
0
2
2
2
Public
2
2
0
2
0,5
Privé
2
2
2
0
0,5
Inactivité
2
2
0,5
0,5
0
Enfin, les coûts associés aux insertions et suppressions sont constants et normalisés à un.
La dernière étape de la typologie consiste à regrouper les cotisants. Deux approches sont généralement entreprises. La première consiste à déterminer la distance de chaque séquence par rapport à une séquence de référence, fournissant
ainsi un degré de dissimilitude directement utilisable pour former des classes.
Malgré sa simplicité, cette méthode n’a pas été retenue. Elle a en effet le désavantage de rapprocher les cotisants ayant des carrières très différentes, mais dont
les distances par rapport à la séquence de référence sont proches. La seconde méthode se base sur la mesure des distances entre toutes les paires de séquences. Le
regroupement est alors effectué par une méthode de classification, à savoir une
classification ascendante hiérarchique utilisant la méthode de Ward 23 . Bien que
très exigeante en calculs, cette seconde méthode a été retenue car elle assure une
typologie robuste ne reposant pas sur le choix des séquences de référence.
3.1.3
Résultats
Quatre types permettent de classer efficacement les cotisants en fonction de leur
carrière. Le premier type comprend les cotisants ayant passé de nombreuses années, voire la totalité de leur carrière, à l’Ircantec sans travailler dans le privé
en parallèle. Le second type comprend les cotisants qui ont également passé une
grande partie de leur carrière à l’Ircantec en cumulant toutefois un emploi dans
le privé en parallèle. Le troisième type est celui des cotisants qui, hormis quelques
années à l’Ircantec et en inactivité, ont passé l’essentiel de leur carrière dans le
secteur privé. Enfin, le dernier type est composé des cotisants qui après quelques
23. La méthode de Ward repose sur la minimisation de la variance intra-classe.
73
Les carrières des non-titulaires du secteur public
années à l’Ircantec ont effectué la majorité de leur carrière dans le secteur public.
Les séquences des cotisants par type sont présentées dans la figure 3.1 :
F IGURE 3.1 – Carrières des cotisants par type.
L ECTURE : La carrière des cotisants est représentée par ligne. À chaque année correspond un état traduisant la situation d’emploi des
cotisants.
S OURCE : Appariement des données de l’EIC et de l’Ircantec, calcul des auteurs.
Le tableau 3.1 présente la répartition des cotisants, des rémunérations et des cotisations par type en 1990 en ne considérant que les cotisants entrés à l’Ircantec
cette même année. En termes de cotisants, le troisième type est prédominant puisqu’il représente 63 % des cotisants entrés à l’Ircantec en 1990, alors que les premier, second et quatrième types représentent respectivement 4 %, 7 % et 26 % des
cotisants entrés cette même année. Si l’on considère à présent les rémunérations,
qui font intervenir simultanément le nombre de cotisants, les rémunérations en
équivalent temps plein et le nombre d’heures effectuées en emploi non-titulaire,
74
Typologie des carrières des cotisants
on observe que les parts des cotisants des premier et quatrième types augmentent,
alors que celles des second et troisième types baissent. Ceci s’explique non par des
différences de durée d’emploi et de type de contrat (temps plein, temps partiel)
lors de la première année, mais par des rémunérations en équivalent temps plein
légèrement plus élevées pour les types 1 et 4. Enfin, la similitude de la répartition
des rémunérations et de celle des cotisations traduit le faible niveau des rémunérations dans la seconde tranche lors de la première année de cotisation.
TABLEAU 3.1 – Répartition des types pour les cotisants entrés en 1990.
Type 1
Rémunérations
4,9 %
Tranche A
Tranche B
Cotisations
4,9 %
1,9 %
4,8 %
Tranche A
Tranche B
Cotisants
Type 2
6,3 %
6,2 %
29,0 %
6,5 %
4,9 %
1,9 %
4%
Type 3
56,4 %
56,2 %
69,1 %
56,5 %
6,2 %
29,0 %
7%
Type 4
32,4 %
32,7 %
0,0 %
32,2 %
56,2 %
69,1 %
63 %
32,7 %
0,0 %
26 %
L ECTURE : Parmi les cotisants entrés à l’Ircantec en 1990, 4 % étaient du premier type, 7 % du second, 63 % du troisième
et 26 % du quatrième. En terme de rémunération, ils représentaient respectivement 5 %, 6 %, 56 % et 32 %.
S OURCE : Appariement des données de l’Ircantec et de l’EIC, calculs des auteurs.
Le tableau 3.2 présente la répartition de tous les cotisants par type en 1990
quelque soit leur année d’entrée. Par comparaison avec les résultats du tableau
3.1, on remarque que la proportion des cotisants en « stock » est la même que
celle en « flux ». Ceci suggère qu’en 1990 l’emploi Ircantec a atteint son régime
stationnaire. La répartition en termes de rémunération est en revanche différente
en « flux » et en « stock ». En effet, à cause de la progression salariale des cotisants au cours de leur carrière, le poids des rémunérations et cotisations d’un type
de cotisants est d’autant plus fort qu’il reste longtemps à l’Ircantec. Ce processus
d’évolution de la masse salariale revient de fait à donner une pondération plus importante aux individus des deux premiers types. Au final, la répartition obtenue
est plus équilibrée : le premier type représente 21 % des rémunérations, le second
20 %, le troisième 30 % et le quatrième 29 %. Le fait que les deux premiers types
ont plus souvent des rémunérations supérieures au plafond de sécurité sociale se
traduit par une part d’environ un point de pourcentage plus élevée dans les cotisations que les rémunérations, au détriment des cotisants du quatrième groupe
qui n’ont que rarement des rémunérations dans la seconde tranche.
75
Les carrières des non-titulaires du secteur public
TABLEAU 3.2 – Répartition des types en 1990.
Type 1
Rémunérations
20,9 %
Tranche A
Tranche B
Cotisations
20,8 %
36,8 %
21,8 %
Tranche A
Tranche B
Cotisants
Type 2
20,1 %
19,4 %
35,6 %
21,1 %
20,7 %
36,8 %
5%
Type 3
30,4 %
30,7 %
24,5 %
30,1 %
19,4 %
35,7 %
7%
Type 4
28,6 %
29,1 %
3,1 %
26,9 %
30,8 %
24,5 %
62 %
29,1 %
3,1 %
26 %
L ECTURE : Parmi les cotisants présents à l’Ircantec en 1990, 5 % étaient du premier type, 7 % du second, 62 % du troisième
et 26 % du quatrième. En terme de rémunération, ils représentaient respectivement 21 %, 20 %, 30 % et 29 %.
S OURCE : Appariement des données de l’Ircantec et de l’EIC, calculs des auteurs.
3.2
Type 1 : les non-titulaires permanents
Le premier type de cotisants Ircantec qui se détache nettement de l’analyse des
carrières rassemble les cotisants qui font des carrières longues à l’Ircantec.
Des carrières longues à l’Ircantec dans la fonction publique d’État et la famille Autres
En ce qui concerne les caractéristiques individuelles et les emplois de ces cotisants,
la concentration des femmes y est relativement forte en comparaison des autres
types. Lors de leur entrée ils avaient en moyenne 21 ans. Plus de 90 % sont entrés avant l’âge de 25 ans. Leur situation d’emploi s’avère particulièrement stable
puisque leur taux de temps plein à 67 % est remarquablement haut pour l’Ircantec. De plus, les rémunérations y sont particulièrement élevées car près de deux
fois supérieures à la rémunération moyenne à l’Ircantec. Malgré cette stabilité apparente, 16 % des cotisants avaient plus d’un employeur chaque année. Ce groupe
s’adresse essentiellement aux employés de la fonction publique d’État (19 % des
cotisants de la FPE sont du premier groupe) et de la famille Autres (22 %). Cela
notamment grâce à la proportion importante de cotisants employés dans les ministères et directions d’État (22 %), de Pôle Emploi (45 %) et des Régies et EPIC
(25 %) qui se retrouvent dans ce premier groupe.
Les cotisants de type 1 resteront en moyenne 14 années à l’Ircantec au cours
de leur carrière. Seulement 6 % passeront moins de cinq années à l’Ircantec, alors
76
Typologie des carrières des cotisants
F IGURE 3.2 – Devenir des cotisants de type 1 après leur première cotisation à l’Ircantec.
L ECTURE : Cohorte des cotisants depuis leur entrée à l’Ircantec (année zéro). Cinq années après
leur entrée, 85 % des cotisants sont toujours à l’Ircantec, environ 10 % sont dans le secteur privé,
deux à trois pour cent sont dans le secteur public et près de 7 % sont en inactivité.
S OURCE : Appariement EIC et Ircantec, calcul des auteurs.
qu’ils seront plus de 20 % à y rester plus de vingt ans. Environ 20 % d’entre-eux effectueront la totalité de leurs cotisations à l’Ircantec d’une seule traite. Le nombre
moyen de périodes reste tout de même élevé avec une moyenne de quatre périodes
par cotisant. Si l’on suit les individus après leur première année de cotisation à l’Ircantec (figure 3.2), on s’aperçoit que les premiers départs s’effectuent entre un et
trois ans après la première cotisation à l’Ircantec. Les interruptions entre deux
périodes à l’Ircantec sont généralement effectuées dans le secteur privé. Les liens
entre emploi privé et Ircantec sont d’ailleurs très forts pour ce type de cotisants
qui est caractérisé par une part importante de cotisants cumulant un emploi Ircantec et un emploi privé en début de carrière. Finalement, une très faible part
des cotisants du type 1 sera titularisée après un dizaine d’années à l’Ircantec.
77
Les carrières des non-titulaires du secteur public
3.3
Type 2 : les spécialistes intervenant dans le pu-
blic
Le second type de cotisants Ircantec se caractérise par un va-et-vient entre le secteur privé et les employeurs affiliés à l’Ircantec.
Des carrières longues entre emplois Ircantec et privés dans le milieu hospitalier et les collectivités locales
La proportion importante de cotisants ayant une expérience professionnelle avant
d’intégrer l’Ircantec se traduit par une entrée tardive, à 24 ans en moyenne. Les
emplois prennent plus qu’ailleurs la forme de temps partiel (18 %) à cause d’un
recours extrêmement faible aux emplois temporaires (10 %) et modéré aux temps
plein (66 %). Les rémunérations ne semblent toutefois pas affectées par cette
réduction du temps de travail, car elles sont en moyenne bien plus fortes que
celles des trois autres groupes. Un regard plus approfondi sur la distribution des
rémunérations indique cependant qu’elles sont particulièrement élevées dans le
haut de la distribution, et proches de celles des cotisants du premier type dans
le bas. Les emplois Ircantec semblent être la principale source de revenu de ces
cotisants puisque, durant les années où ils travaillaient également dans le secteur
privé, ils gagnaient en moyenne 91 % en 1975 (77 % et 74 % respectivement en
1991 et 2009) de la somme de leur revenu du travail dans des emplois Ircantec.
Dans la fonction publique hospitalière et dans la fonction publique territoriale, respectivement 42 % et 24 % des cotisants sont du second groupe. Les sous-familles
d’employeurs principales dans la fonction publique hospitalière sont les hôpitaux
(39 %) et l’assistance publique des hôpitaux de Paris (70 %). On y retrouve ainsi
la quasi totalité des praticiens hospitaliers cotisants à l’Ircantec. Pour la fonction publique territoriale, les cotisants proviennent essentiellement des communes
(22 %), des régions (50 %) et des établissements spécialisés et non spécialisés
(30 %).
Les cotisants du second type restent encore plus longtemps à l’Ircantec que leur
78
Typologie des carrières des cotisants
F IGURE 3.3 – Devenir des cotisants de type 2 après leur première cotisation à l’Ircantec.
L ECTURE : Cohorte des cotisants depuis leur entrée à l’Ircantec (année zéro). Cinq années après
leur entrée, plus de 70 % des cotisants sont toujours à l’Ircantec, 20 % sont dans le secteur privé
et près de 5 % sont en inactivité.
S OURCE : Appariement EIC et Ircantec, calcul des auteurs.
homologues du premier type. Leur durée totale de cotisation est en effet de 16
années en moyenne. Ils sont plus de 25 % à y rester au moins 22 ans. Malgré cette
différence dans les durées de cotisation, les distributions du nombre de périodes
sont très proches : tout comme les cotisants du premier type, le nombre moyen
de périodes est de quatre et la médiane de trois. Seule une petite différence subsiste dans le bas de la distribution, puisqu’ils seront seulement 12 % à effectuer
l’ensemble de leurs cotisations en une fois. Deux années après leur entrée, ils seront environ 30 % à avoir quitté l’Ircantec, essentiellement pour le privé. Bien
que ces départs ne soient en grande majorité que temporaires, la répartition des
cotisants dans chacune des catégories d’emploi restera constante par la suite. La
particularité des carrières de ces cotisants veut qu’ils aient connu plus d’années
en emplois privé avant d’intégrer l’Ircantec que les autres cotisants effectuant des
carrières longues à l’Ircantec (figure 3.1). Les liens entre emploi privé et emploi
Ircantec semblent ainsi très différents de ce que l’on observait pour les cotisants
du premier type.
79
Les carrières des non-titulaires du secteur public
3.4
Type 3 : les intermittents du secteur privé
Les cotisants du troisième type sont les plus nombreux : ils font l’essentiel de
leur carrière dans le secteur privé, mais cotisent à l’Ircantec à un moment de leur
carrière, pour une période relativement brève.
Des emplois de court terme ou à temps partiel pour l’État, les grandes entreprises publiques et les collectivités locales
Cette catégorie de cotisants concerne principalement les emplois de la famille
Autres (44 %), des fonctions publiques territoriale (43 %) et d’État (41 %). Dans
la famille d’employeurs Autres, 50 % des cotisants des anciens PTT, La Poste et
France Telecom et 43 % des régies et EPIC se retrouvent dans le troisième groupe.
Parmi les cotisants de la fonction publique territoriale, 43 % des cotisants employés par les départements, 41 % par les communes et 45 % par les établissements spécialisés et non spécialisés demeurent également dans ce groupe. Enfin,
pour la fonction publique d’État, il concerne respectivement 44 % et 41 % des cotisants dans les établissements publics relevant des ministères et dans les ministères
et directions d’État.
La situation d’emploi à l’Ircantec de ces cotisants est fragile : 42 % des emplois
dureront moins de six mois. Les temps pleins y sont plus rares que dans les autres
groupes, laissant une place plus importante aux emplois temporaires. De plus, les
rémunérations y sont les plus faibles des quatre types. Comme le traduit l’écart
entre la médiane et la moyenne, une part importante de cotisants ont des rémunérations extrêmement faibles. Ils sont donc souvent amenés à cumuler un emploi
dans le privé pendant leurs quelques années à l’Ircantec.
Les cotisants du troisième type restent beaucoup moins longtemps à l’Ircantec que
leurs collègues des deux premiers types. Près de 40 % cotiseront moins d’une
année. Ils effectueront, dans 40 % des cas, l’ensemble de leurs cotisations sans
interruption. Leur passage à l’Ircantec est ainsi généralement bref et exceptionnel
à l’échelle de leur carrière. Suite à leur première période, 65 % se dirigeront vers
80
Typologie des carrières des cotisants
F IGURE 3.4 – Devenir des cotisants de type 3 après leur première cotisation à l’Ircantec.
L ECTURE : Cohorte des cotisants depuis leur entrée à l’Ircantec (année zéro). Cinq années après
leur entrée, 20 % des cotisants sont toujours à l’Ircantec, 60 % sont dans le secteur privé et près
de 20 % sont en inactivité.
S OURCE : Appariement EIC et Ircantec, calcul des auteurs.
le secteur privé, secteur qui représente la destination principale des cotisants du
troisième type. En effet, cinq années après leur entrée, plus de 60 % des individus
sont des employés du privé. Comme nous l’avons déjà vu, la frontière entre emploi Ircantec et emploi privé est très mince puisque ces deux secteurs coexistent
régulièrement dans la carrière des cotisants. Ainsi, on ne s’étonnera pas que le
troisième type soit le plus important dans la composition de l’Ircantec (57 % des
cotisants).
3.5
Type 4 : les futurs titulaires
Les cotisants du quatrième type représentent 30 % de l’ensemble des cotisants.
Pour eux l’emploi non-titulaire est une étape vers l’emploi titulaire.
Des emplois de très courte durée pour l’État et les collectivités territoriales
Les cotisants du quatrième type proviennent essentiellement de la fonction pu81
Les carrières des non-titulaires du secteur public
blique d’État (27 %) et de la fonction publique hospitalière (23 %). Ce type
s’adresse principalement aux employés du CNRS (51 %), de l’Inra (48 %), des
services du premier ministre (75 %) et de la Banque de France (84 %). Lors de
leur entrée à l’Ircantec, ils avaient en moyenne 23 ans et la majorité d’entre-eux
sont entrés avant l’âge de 20 ans. Ces cotisants sont particulièrement jeunes, y
compris lorsque qu’on les compare aux autres cotisants de l’Ircantec. En ce qui
concerne leurs rémunérations, elles ne sont ni particulièrement fortes, ni faibles
au regard de celles des autres cotisants (environ 29 % du plafond de sécurité
sociale).
F IGURE 3.5 – Devenir des cotisants de type 4 après leur première cotisation à l’Ircantec.
L ECTURE : Cohorte des cotisants depuis leur entrée à l’Ircantec (année zéro). Cinq années après
leur entrée, 35 % des cotisants sont toujours à l’Ircantec, près de 50 % sont dans le secteur public
et 15 % sont soit dans le secteur privé soit en inactivité.
S OURCE : Appariement EIC et Ircantec, calcul des auteurs.
Tout comme les cotisants du troisième type, ceux du quatrième ne restent pas
longtemps à l’Ircantec. Plus de 40 % auront quitté l’Ircantec après deux années.
Le temps moyen qu’ils passent à l’Ircantec est de trois années. Environ 33 % effectueront la totalité de leurs cotisations en une période. La quasi totalité des
cotisants partis à la fin de leur première période seront employés dans le public
(80 %). Les 20 % restant, par contre, travailleront dans le privé (13 %), ou se82
Typologie des carrières des cotisants
ront en inactivité (7 %). Cependant, même s’ils partent dans le secteur privé, ces
cotisants repassent par l’Ircantec peu après et sont titularisés. C’est la spécificité
essentielle de ces cotisants qui ont vocation à être employés dans le secteur public
après quelques années à l’Ircantec, parfois entrecoupées d’années de travail dans
le privé. Ce comportement, clairement identifiable à partir de l’analyse du devenir
des individus dans la figure 3.5, conduit environ 90 % des individus à travailler
dans le secteur public 15 ans après leur entrée à l’Ircantec.
83
Les carrières des non-titulaires du secteur public
84
C HAPITRE 4
D ÉTERMINANTS
POLITIQUES ,
INSTITUTIONNELS ET
MACROÉCONOMIQUES DE L’ EMPLOI
I RCANTEC
Dans les deux chapitres précédents, nous avons tenté de décrire l’emploi des cotisants Ircantec et son évolution entre 1971 et 2011. Dans ce quatrième et dernier
chapitre de l’analyse rétrospective, nous complétons cette approche individuelle et
descriptive par une démarche explicative agrégée afin d’analyser les déterminants
de l’évolution du volume de l’emploi Ircantec. Nous considérons successivement
deux types de facteurs : les facteurs politiques et institutionnels d’une part, tels
que la décentralisation et les politiques de titularisation, et des facteurs macroéconomiques ensuite, tels que le chômage et l’emploi privé. Notre analyse porte
sur des séries temporelles agrégées et lie la variation dans le temps des facteurs
explicatifs et de l’emploi Ircantec. Notons que si l’analyse statistique nous permet
de tester la robustesse de leur relation, elle n’a pas toujours pour objectif d’identifier le lien causal direct entre l’emploi Ircantec et ses déterminants.
85
Les carrières des non-titulaires du secteur public
4.1
Emploi public et recours aux non-titulaires
Le volume et la structure des emplois non-titulaires reflètent d’abord l’organisation de l’action publique et le fonctionnement des administrations publiques.
Parmi les grands changements intervenus au cours des quatre dernières décennies,
nous considérons tout particulièrement le rôle de la décentralisation et de l’autonomie des établissements publics. Mais le recours aux non-titulaires fait également l’objet de politiques spécifiques, qui visent à limiter, voire résorber le nombre
de non-titulaires dans les fonctions publiques. C’est pourquoi, nous étudions dans
un second temps les politiques de titularisation et leurs effets sur l’emploi nontitulaire.
4.1.1
Les non-titulaires dans l’emploi public
Le tableau 4.1 présente la répartition des cotisants dans les trois fonctions publiques et son évolution entre 1971 et 2011 24 . Au cours des dernières décennies,
les fonctions publiques territoriale et hospitalière (FPT et FPH respectivement)
ont gagné en importance au détriment de la fonction publique d’État (FPE). En
1971 la FPE représentait 56 % des cotisants Ircantec travaillant dans la fonction
publique, contre 13 % pour la FPH et 31 % pour la FPT. La situation était tout
autre en 2011 puisque seulement 34 % de ces cotisants étaient dans la FPE, alors
qu’ils étaient 22 % dans la FPH et 43 % dans la FPT. Cette évolution a pris place
pour l’essentiel entre 1971 et 2001, alors que la part de chaque fonction publique
est restée relativement stable depuis 2001.
Ces changements dans la structure de l’emploi des non-titulaires reflètent en partie l’évolution des trois composantes de la fonction publique dans l’emploi public
total (titulaire et non-titulaire). Comme le montre le tableau 4.1, entre 1971 et
2007 la part de la FPE dans l’emploi public total est passée de 67 % à 51 %, celle
de la FPT de 20 % à 32 % et celle de la FPH de 12 % à 17 % (Bozio et Grenet,
24. La famille Autres, qui comprend notamment les grandes entreprises publiques, est volontairement exclue
de cette analyse.
86
Déterminants de l’emploi Ircantec
TABLEAU 4.1 – Répartition des non-titulaires et de l’emploi public total.
Années
1971
1981
1991
2001
2007
2011
Non-titulaire
FPE
FPH
FPT
56,2 % 13,1 % 30,7 %
41,9 % 19,4 % 38,6 %
38,1 % 20,1 % 41,8 %
35,9 % 19,3 % 44,8 %
34,4 % 20,9 % 44,8 %
34,3 % 22,3 % 43,4 %
Emploi public total
FPE
FPH
FPT
67,2 % 12,4 % 20,4 %
60,7 % 16,0 % 23,3 %
56,9 % 16,3 % 26,8 %
54,9 % 16,5 % 28,6 %
50,7 % 17,0 % 32,3 %
48,1 % 18,3 % 33,6 %
N OTE : Calculs effectués sur la base des cotisants nés au mois d’octobre et présents dans l’une des
trois fonction publique. À partir des effectifs présents au 31 décembre. L’emploi public total fait
référence à l’emploi titulaire et non-titulaire.
S OURCE : Bozio et Grenet (2010) et données de l’Ircantec, calcul des auteurs.
2010) 25 . L’augmentation de la part de la FPT au détriment de la FPE est notamment le résultat des politiques de décentralisation, lancées par la loi Defferre de
1982, qui ont accru les responsabilités des collectivités territoriales augmentant
ainsi leurs besoins de personnels titulaires ou non-titulaires. Il ressort ainsi que
l’évolution de la structure de l’emploi non-titulaire suit donc approximativement
celle de l’emploi public total.
Cette évolution parallèle cache cependant de profondes différences dans le recours aux non-titulaires entre fonctions publiques, et de fortes variations au cours
du temps. La figure 4.1 montre que la FPT et la FPH se distinguent par un recours fort aux non-titulaires(dû notament à la présence des praticiens hospitaliers
pour la FPH), tandis que ce recours est plus modéré dans la FPE entre 8 % et
20 %. Le tableau sous la figure 4.1 fait également apparaître l’évolution spectaculaire du recours aux non-titulaires dans la fonction publique au cours des quatre
dernières décennies. La part des non-titulaires dans l’emploi total a ainsi fortement diminué entre 1971 et 1991, avant d’augmenter nettement entre 1991 et
2007. Il est également frappant que malgré des taux de recours différents, les
trois fonctions publiques connaissent la même évolution. Deux phénomènes distincts semblent expliquer cette variation. La baisse observée entre 1971 et 1991
serait le fait des différents plans de titularisation ayant pris place (et que nous
25. La répartition des trois fonctions publiques parmi l’emploi public total est calculée en équivalent temps
plein.
87
Les carrières des non-titulaires du secteur public
F IGURE 4.1 – Évolution de la part de non-titulaires dans les effectifs des
trois fonctions publiques.
Années
1971
1981
1991
2001
2007
2011
État
20 %
15 %
8%
15 %
18 %
21 %
Territoriale
39 %
37 %
36 %
43 %
38 %
38 %
Hospitalière
23 %
22 %
22 %
28 %
33 %
35 %
Ensemble des FP
24 %
21 %
18 %
25 %
27 %
29 %
N OTE : Les calculs sont effectués sur la base des cotisants présents à l’Ircantec sans tenir compte
de l’année d’entrée et nés au mois d’octobre. Un taux de sondage d’un douzième est appliqué afin
d’obtenir les niveaux annuels. Les données portant sur l’évolution dans les fonctions publiques sont
issues de Bozio et Grenet (2010). Les effectifs sont calculés en équivalents temps plein.
S OURCE : Ircantec, calcul des auteurs.
traiterons dans la section suivante du rapport). À l’inverse, la hausse du recours à
l’emploi non-titulaire depuis les années 1990 serait due au phénomène de décentralisation qui implique un besoin croissant de personnels maîtrisant les nouvelles
technologies de l’information et de la communication, compétences rares dans la
fonction publique des années 1990, et qui explique le recrutement d’experts sur
des postes non-titulaires. Elle s’explique également par la délégation de nouvelles
responsabilités aux établissements et aux collectivités locales dans une logique de
décentralisation, qui les a conduit à rechercher des compétences de gestion (financière, juridique, gestion des ressources humaines) qu’elles ont souvent trouvé
dans le secteur privé. Enfin, l’autonomie croissante des collectivités territoriales,
et les contraintes budgétaires fortes auxquelles ils sont soumis les ont incité à
88
Déterminants de l’emploi Ircantec
recourir à une main d’œuvre plus flexible, qui s’ajuste aux variations de l’activité.
4.1.2
Les politiques de titularisation affectent fortement l’em-
ploi non-titulaire
Comme nous venons de le voir, les politiques de titularisation semblent avoir affecté le recours à l’emploi non-titulaire et cela notamment lors des années 1980.
Nous nous concentrons ainsi sur ces politiques. Ces titularisations peuvent prendre
deux formes : la première est l’admission régulière de personnels par voie de
concours et la seconde correspond à des plans exceptionnels de titularisation qui
visent des catégories spécifiques d’agents non titulaires. Dans cette partie, nous
nous concentrons sur le second type de titularisation qui est à la fois plus important quantitativement et plus visible sur l’effectif des cotisants de l’Ircantec.
À plusieurs reprises l’État français a souhaité réduire le recours à des agents non
titulaires via des plans de titularisation. Il est d’ailleurs d’usage de se référer à ces
derniers par le terme de vagues de titularisation, traduisant le caractère massif et
récurrent qui les a défini jusqu’au milieu des années 2000. Leur répétition depuis
1945 souligne toutefois les difficultés liées à la limitation du recours à ce type
d’emploi qui, comme le résumait F. Hamon (1983), constitue « le seul moyen
de mettre un peu d’huile dans les rouages de la machine administrative ». Une
description détaillée des politiques de titularisation depuis 1945 est présentée en
annexe à la page 177.
Du point de vue de l’Ircantec, les titularisations conduisent au départ prématuré
de certains cotisants et affectent ainsi directement l’effectif des cotisants. Afin de
mesurer l’effet d’une titularisation sur l’effectif des cotisants, une étude économétrique utilisant des variables instrumentales est entreprise. Les détails de cette
analyse et le choix de la specification sont présentés à la page 187 en annexe.
Les résultats indiquent que lors d’un plan de titularisation, chaque titularisation
conduit en moyenne au départ de trois cotisants de l’Ircantec. Cet effet, supérieur
à un simple impact de « un pour un », souligne le rôle déterminant à court terme
89
Les carrières des non-titulaires du secteur public
des titularisations pour l’Ircantec. Il serait principalement dû aux spécificités de
l’emploi non-titulaire. En effet, dans la mesure où les titulaires restent en emploi
alors que les non-titulaires se succèdent sur un même poste au cours de l’année,
la titularisation d’un non-titulaire doit naturellement provoquer le départ de plus
d’un cotisant. Cette même logique s’applique également aux emplois à temps partiel qui sont, comme nous l’avons vu, largement répandus à l’Ircantec : les nouveaux titulaires travaillent à temps complet et remplacent deux non-titulaires à
temps partiel. Finalement, l’effet des contraintes budgétaires pesant sur les employeurs publics participe très largement au départ des cotisants : le coût relatif
élevé des titulaires par rapport aux non-titulaires peut expliquer qu’un employeur
soucieux d’éviter une augmentation de la masse salariale devra détruire plus d’un
emploi non-titulaire pour l’embauche d’un titulaire.
4.2
Déterminants macroéconomiques
La section précédente a montré l’importance des facteurs politiques et institutionnels pour comprendre l’évolution de l’emploi Ircantec. Dans cette section, nous
réalisons un exercice différent en explorant successivement la relation statistique
entre l’emploi Ircantec et deux indicateurs macroéconomiques majeurs : l’emploi
privé et le chômage. Nous utilisons pour cela des données agrégées, qui corrèlent
l’évolution du nombre de cotisants et celle de chaque indicateur économique. Dans
le cas du chômage nous sommes même capables d’étudier cette corrélation au
niveau des départements, en utilisant le taux de chômage départemental. Il est
important de souligner que les analyses statistiques dans cette section ont un caractère plus descriptif qu’explicatif. En effet, s’il est raisonnable de supposer que la
situation macroéconomique a une influence sur l’emploi Ircantec, cette influence
est souvent diffuse et indirecte. Par exemple, une augmentation du chômage peut
augmenter les besoins de non-titulaires dans les services de Pôle Emploi et les
services médicaux-sociaux, ou même inciter les employeurs publics à augmenter temporairement leurs effectifs au delà de leurs besoins. Il est également possible qu’un autre facteur influence simultanément la situation macroéconomique
90
Déterminants de l’emploi Ircantec
et l’emploi Ircantec. Ainsi, le développement des nouvelles technologies de l’information et de la communication est bénéfique pour la croissance et l’emploi privé ;
il a aussi rendu nécessaire l’embauche de non-titulaires dans le secteur public,
dont le personnel titulaire n’avait pas la formation nécessaire pour maîtriser ces
nouvelles technologies. Ainsi, nous ne cherchons pas directement à identifier les
relations de causalité entre les variables économiques et l’emploi Ircantec, mais
plutôt des évolutions similaires.
4.2.1
Emploi privé et effectif des cotisants
Étant donné la proximité entre emplois privés et Ircantec, aussi bien du point de
vue des professions exercées que de la succession de ces secteurs d’emploi dans la
carrière de nombreux cotisants, une analyse de l’évolution conjointe des emplois
dans ces deux secteurs s’impose. Afin d’analyser l’évolution de l’emploi privé pour
chaque trimestre, nous utilisons des données de l’Insee qui reportent le nombre
de salariés dans les secteurs principalement marchands (hors agriculture, administration, éducation, santé et action sociale) du quatrième trimestre de 1970 au
second trimestre de 2013. À notre connaissance, aucune série trimestrielle portant sur l’emploi privé (hors emploi Ircantec), pendant une période suffisamment
longue n’est disponible. Ainsi, l’évolution dans les secteurs marchands, principaux
composants de l’emploi privé, s’avère être particulièrement adaptée à une approximation de l’évolution de l’emploi privé depuis 1970. Les données portant sur
l’évolution de l’effectif des cotisants proviennent des informations fournies par
l’Ircantec 26 .
L’analyse de l’effet de l’emploi privé sur l’effectif des cotisants est effectué à l’aide
de méthodes macroéconométrique. Celles-ci ont pour objectif d’analyser les liens
entre nos deux variables en permettant des effets décalés dans le temps. L’un de
leurs principaux avantages est de permettre de reconstruire l’évolution d’une variable suite à une hausse non-anticipée d’une seconde variable. Dans notre cas,
26. Afin de corriger l’effet saisonnier caractéristique de l’évolution des cotisants, les données ont été lissées
par la méthode des moyennes mobiles. Cela assure la cohérence des données puisque celles de l’Insee ont été
corrigées au préalable par une méthode similaire.
91
Les carrières des non-titulaires du secteur public
cela permet d’étudier la dynamique temporelle de l’effectif des cotisants lorsque
le niveau d’emploi privé augmente. On parle alors de fonction de réponse (figure 4.2).
F IGURE 4.2 – Fonction de réponse de l’emploi privé sur l’effectif des
cotisants.
L ECTURE : L’axe des abscisses est en trimestres. Ainsi, suite à une hausse non anticipée de l’emploi
privé, on observe une hausse du nombre de cotisants à l’Ircantec. L’effet est maximal après environ
sept à huit ans. Il se réduit très légèrement par la suite, avant de se stabiliser.
N OTE : Profil de réponse issu de l’estimation du modèle VEC.
S OURCE : Ircantec et Insee, calcul des auteurs.
Comme on peut le constater à partir de la fonction de réponse de l’emploi privé
sur l’effectif des cotisants, une hausse de l’emploi privé implique une hausse persistante de l’effectif des cotisants. Ainsi, durant une trentaine de trimestres après
la hausse de l’emploi privé, de plus en plus d’individus se tourneront vers l’emploi non-titulaire. L’effet se réduit toutefois légèrement par la suite, avant de rejoindre un nouvel équilibre laissant le nombre de cotisants à niveau plus important
qu’avant la hausse.
4.2.2
Chômage et recours aux non-titulaires
Afin d’étudier l’impact du chômage sur l’effectif des cotisants, deux analyses distinctes ont été entreprises. La première, au niveau macroéconomique, cherche à
analyser l’impact d’une augmentation du chômage national sur le nombre total
de cotisants à l’Ircantec afin de déduire des relations de moyen et long terme
92
Déterminants de l’emploi Ircantec
entre ces deux variables. La seconde, à un niveau plus désagrégé, s’interesse plus
particulièrement à l’évolution de court terme en étudiant l’impact d’une augmentation du chômage départemental sur l’emploi des collectivités territoriales. Elle a
pour principal avantage, par rapport à l’analyse macroéconomique, de prendre en
compte l’hétérogénéité inobservée des cotisants et de l’évolution du chômage.
4.2.2.1
En France métropolitaine
L’étude de la relation de moyen et long terme entre le chômage et l’effectif des
cotisants est effectuée à partir de données trimestrielles. La série chronologique
de l’évolution des cotisants à l’Ircantec est issue des informations fournies par
l’Ircantec 27 . Elle porte sur l’ensemble des cotisants nés au mois d’octobre. Les
niveaux trimestriels ont été déduits par la suite, en appliquant un taux de sondage
d’un douzième. La série sur le chômage, quant à elle, comporte le nombre de
chômeurs au sens BIT par trimestre en France métropolitaine. Cette dernière,
fournie par l’Insee, s’étend du premier trimestre de 1975 au second trimestre de
2013.
De façon similaire à ce qui vient d’être présenté pour l’emploi privé, nous avons
reporté le profil de réponse de l’effectif des cotisants de l’Ircantec suite à une
augmentation du nombre de chômeurs.
Ainsi, suite à une augmentation non anticipée du chômage, l’effectif des cotisants
de l’Ircantec augmente. Après environ une douzaine d’années, cet effet s’estompe
légèrement, avant de se stabiliser. La persistance de cette évolution souligne l’impact permanent des chocs exogènes du chômage sur le nombre de cotisants. Ce
résultat pourrait avoir différentes origines. Il pourrait traduire la préférence pour
le secteur public des travailleurs en période instable, l’usage de l’emploi public
afin de lutter contre le chômage (avec les emplois aidés par exemple), ou encore
la hausse des besoins médicaux et sociaux durant cette période. En tout état de
cause, il souligne l’une des caractéristique majeures de l’evolution de l’effectif des
27. Afin de corriger l’effet saisonnier caractéristique de l’évolution des cotisants, les données ont été lissées
par la méthode des moyennes mobiles. Cela assure la cohérence des données puisque celles de l’Insee ont été
corrigées au préalable par une méthode similaire.
93
Les carrières des non-titulaires du secteur public
F IGURE 4.3 – Fonction de réponse de l’effectif des cotisants suite à une
hausse du chômage.
L ECTURE : L’axe des abscisses est en trimestres. Suite à une hausse impromptue du nombre de
chômeurs, on observe une hausse du nombre de cotisants à l’Ircantec pendant environ 50 trimestres
qui s’atténue légèrement par la suite.
N OTE : Profil de réponse issu de l’estimation du modèle VECM.
S OURCE : Données Ircantec et Insee, calcul des auteurs.
cotisants : l’emploi Ircantec est contracyclique, c’est-à-dire qu’il évolue à l’opposé
du cycle économique.
4.2.2.2
Dans les départements
L’analyse macroéconomique offre une vision globale de l’évolution des cotisants
de l’Ircantec suite à une variation du taux de chômage. Elle absorbe cependant
l’hétérogénéité des réponses individuelles pouvant être dommageable aux résultats, notamment à très court terme où ces derniers s’avèrent non-significatifs. L’approche microéconomique présentée ici veille à produire des résultats robustes à
l’hétérogénéité individuelle des cotisants. Elle repose sur l’étude d’un panel constitué de l’effectif des cotisants à l’Ircantec par département et trimestre, ainsi que
sur le taux de chômage trimestriel fournit par l’Insee pour la période s’étendant
du quatrième trimestre de 1970 au second trimestre de 2013. Dans la mesure
localisée du chômage retenue par l’Insee, seules les personnes sans emploi, immédiatement disponibles, sans activité salariée ou non salariée et tenues d’accomplir
des actes positifs de recherche d’emploi sont considérées.
94
Déterminants de l’emploi Ircantec
TABLEAU 4.2 – Synthèse des méthodes utilisées pour l’estimation de l’impact du chômage sur l’effectif des cotisants à très cour terme.
Principe
Estimation simple, n’autorisant aucune hétérogénéité.
Introduction d’une hétérogénéité entre départements, fixe dans le temps.
Effet temporel identique pour tous les départements.
Effet temporel identique pour tous les départements et effet fixe au niveau des départements.
Introduction d’une hétérogénéité dans la réponse
suite à une variation du chômage.
Prise en compte de facteurs communs inobservables, pouvant impacter différemment les départements.
Hétérogénéité dans les réponses suite à une variation du taux de chômage et dans l’effet des
facteurs communs inobservables
Estimateur
OLS
Effet fixe individuel
Effet fixe temporel
Effets fixes individuel et temporel
Standard Mean Group (MG)
Common Correlated
Mean Pooled (CCEP)
Effects
Common Correlated Effects
Mean Group (CCEMG) et
Augmented Mean Group (AMG)
La complexité des données considérées 28 nous a amené à entreprendre différentes spécifications et méthodes d’estimation. Les méthodes utilisées, robustes
à la cointégration, se distinguent essentiellement par les degrés d’hétérogénéité
qu’elles supposent. Les méthodes statistiques usuelles admettent généralement
la constance des réactions au niveau individuel, c’est-à-dire dans notre cas, une
réaction identique pour tous les départements suite à une variation du taux de
chômage. Or, il ne serait pas surprenant que, du fait de caractéristiques inobservées comme par exemple le poids du secteur industriel, les réactions d’un département à l’autre ne soient pas systématiquement identiques. Une seconde source
d’hétérogénéité se retrouve dans la prise en compte de facteurs communs inobservés. En effet, l’effet conjoncturel commun aux départements doit être pris en
compte dans l’analyse économétrique. Celui-ci étant inobservé, des méthodes économétriques ont également été mises en œuvre afin de le contrôler. L’effet de ces
facteurs communs soulève toutefois d’autres questions quant à la réaction individuelle des départements. On peut en effet aisément supposer que la diversité des
caractéristiques économiques des départements et de leurs orientations en terme
de politiques publiques conduisent à des réactions d’ampleur différentes. Ainsi,
28. Les séries sont en effet cointégrées au niveau du panel et au niveau individuel. Elles sont également non
stationnaires.
95
Les carrières des non-titulaires du secteur public
nous proposons également les résultats d’estimations robustes à l’hétérogénéité
dans l’effet des facteurs communs inobservés entre départements. Le tableau 4.2
présente l’ensemble des estimateurs utilisés, en fonction des hypothèses portant
sur l’hétérogénéité des réactions aux variations du chômage et aux facteurs communs.
TABLEAU 4.3 – Résultats des régressions du taux de chômage sur l’effectif
des cotisants à l’Ircantec.
OLS
(1)
Taux de chômage 79.153∗∗∗
Observations
Effet fixe individuel Effet fixe temporel
(2)
(3)
Effets fixes individuel et temporel
MG
CCEP
CCEMG
AMG
(4)
(5)
(6)
(7)
(8)
-28.085∗∗∗
113.349∗
-.106
-29.631∗∗∗
9.052
4.483
8.108∗∗
(7.193)
(9.652)
(61.659)
(14.759)
(9.965)
(9.929)
(10.234)
(3.394)
11136
11136
11136
11136
11136
11136
11136
11136
N OTE : La régression (1) OLS est une simple régression par la méthode des moindres carrés ordinaires. La deuxième régression, introduit un effet fixe au niveau des départements. La troisième suppose un effet fixe temporel, au niveau des
trimestres. La quatrième, prend en compte un effet fixe au niveau des départements et pour chaque trimestre. La cinquième
régression est effectuée avec l’estimateur Standard Mean Group (MG), autorisant une hétérogénéité des réponses des départements aux variations du taux de chômage. La sixième régression utilise l’estimateur Common Correlated Effects Mean
Pooled (CCEP), autorisant une hétérogénéité temporelle au sein des groupes et une hétérogénéité dans les réponses individuelles face à un facteur commun inobservé. Finalement, les deux dernières régressions prennent en compte l’ensemble
des hétérogénéités présentées avec les estimateurs MG et CCEP. L’estimateur Augmented Mean Group (AMG) s’oppose toutefois à l’estimateur Common Correlated Effects Mean Group (CCEMG) dans la prise en compte de l’ensemble des facteurs
communs inobservables, qu’il ne considère pas comme une nuisance.
S OURCE : Données Ircantec et Insee, calcul des auteurs.
Le tableau 4.3 reporte les coefficients ainsi estimés. Les résultats de la régression
par OLS (regression (1)) soulignent l’existence d’un lien positif entre chômage
sur l’effectif des cotisants de l’Ircantec. C’est à partir de la comparaison avec ceux
obtenus après introduction des effets fixes individuels et temporels (regressions
(2), (3) et (4)), que l’on prend la mesure des difficultés liées à la prise en compte
de l’hétérogénéité et de son impact sur les résultats qui s’avèrent extrêmement
variables d’une spécification à l’autre. Il semblerait par ailleurs que l’introduction
d’une hétérogénéité quant à l’effet d’une variation du taux de chômage entre départements (regression (5)) tend à affecter, de façon non négligeable, la valeur
du coefficient. Enfin, les résultats s’avèrent relativement stables dès lors qu’une
hétérogénéité dans l’effet des facteurs communs inobservables est introduite (regression (6), (7) et (8)).
L’effet du chômage est non significatif lorsque l’on s’interesse aux estimations issues du CCEP et CCEMG. Nous préférons néanmoins retenir les résultats de la
96
Déterminants de l’emploi Ircantec
méthode AMG. Celle-ci a en effet pour avantage, par rapport à la méthode CCEP,
de prendre en compte l’hétérogénéité des réponses face aux variations du taux
de chômage. De plus, bien que les méthodes AMG et CCEMG soient très proches,
cette première ne considère pas l’ensemble des facteurs communs inobservables
comme une nuisance, dont il faut corriger les coefficients ex-post ; mais utilise une
spécification visant également à les analyser.
L’effet d’une hausse sur le chômage conduit donc, à très court terme, à une très
faible, mais significative hausse de l’effectif des cotisants. En effet, suite à une
augmentation du chômage d’un pour cent, on observe une hausse d’environ 8
cotisants par département au même trimestre 29 .
Dans cette dernière partie, nous avons considéré successivement différents facteurs de l’évolution de l’emploi Ircantec : déterminants institutionnels et déterminants macroéconomiques. Nous avons été capables d’établir une relation négative
forte entre titularisations et emplois non-titulaires, et même de quantifier l’impact
des titularisations : pour un non-titulaire qui bénéficie d’une vague de titularisation, il y a trois non-titulaires en moins. En ce qui concerne les déterminants macroéconomiques, les résultats indiquent que l’emploi privé a un effet positif fort et
de long terme. De plus, le chômage a lui aussi un effet positif durable sur l’emploi
Ircantec, tant au niveau agrégé qu’au niveau départemental. Cette relation positive entre chômage et emploi Ircantec peut soit refléter un besoin croissant dans
les services de l’emploi ou les services médicaux sociaux, soit une politique délibérée de réduction du chômage par la création d’emploi public. Cette seconde solution semble d’ailleurs particulièrement bien décrire les politiques d’emploi aidé.
29. À titre de comparaison, le nombre moyen de cotisants par département chaque trimestre sur l’ensemble
de la période est de 1295.
97
Les carrières des non-titulaires du secteur public
98
C ONCLUSION
DE L’ ANALYSE
RÉTROSPECTIVE
Cette première partie du rapport a dessiné les contours de l’emploi des nontitulaires du secteur public qui cotisent au régime de retraite complémentaire
de l’Ircantec. Trois sources statistiques ont été mises à contribution : les données du régime Ircantec, celles de l’Échantillon inter-régimes de cotisants et celles
de l’enquête Emploi. Conformément à la réglementation concernant l’usage de
personnels contractuels dans la fonction publique, les emplois non-titulaires sont
souvent temporaires, voire saisonniers. Le temps de travail est souvent réduit et
une part non négligeable des cotisants à l’Ircantec cumulent plusieurs emplois.
Du fait de la brièveté de leur emploi, et malgré un niveau de qualification élevé,
les non-titulaires reçoivent en moyenne des rémunérations faibles et versent donc
également des cotisations faibles. Une analyse des types de cotisants permet cependant d’affiner ce constat d’ensemble : si la majorité des non-titulaires exerce de
courtes missions dans le secteur public en marge d’une carrière dans le privé, pour
certains ces missions se répètent de sorte que leur carrière se construit dans un vaet-vient entre public et privé. D’autres cotisent à l’Ircantec en tant que contractuels
ou auxiliaires, avant d’être titularisés et de passer l’ensemble de leur carrière dans
le secteur public. Enfin, certaines catégories de personnels, comme les praticiens
hospitaliers ou les salariés des entreprises publiques, cotisent à l’Ircantec pendant
l’essentiel de leur carrière. Ces différents types reflètent l’hétérogénéité de l’emploi non-titulaire, qui répond à la fois à des besoins temporaires de main d’œuvre
du secteur public et à des besoins plus structurels de spécialistes. La part des
non-titulaires dans la fonction publique a évolué fortement au cours des dernières
99
Les carrières des non-titulaires du secteur public
décennies, entre une phase de résorption relative dans les années 1970 et 1980,
du fait des grandes vagues de titularisation, et une phase de croissance dans les
années 1990 et 2000. Cette croissance peut s’expliquer en partie par l’autonomie
croissante des établissements publics et des collectivités locales dans un contexte
de restriction budgétaire qui accroît les besoins de compétences spécialisées et
incite à une plus grande flexibilité des politiques d’emploi. Enfin, l’analyse macroéconomique suggère que l’emploi non-titulaire augmente quand le chômage
augmente, probablement parce que l’emploi public temporaire est utilisé pour
lutter contrer le chômage, et que l’emploi non-titulaire augmente quand l’emploi
privé augmente. Ces résultats jettent les bases de la seconde partie de ce projet
de recherche visant à étudier de façon prospective l’emploi des non-titulaires du
secteur public.
100
Deuxième partie
Projection de l’évolution du régime
de l’Ircantec
101
Les carrières des non-titulaires du secteur public
102
C HAPITRE 5
LE
MODÈLE DE PROJECTION
La publication du premier rapport du Conseil d’orientation des retraites en 2001,
dont l’objectif était d’alerter les décideurs publics sur l’impact des évolutions démographiques pour les finances du système de retraite français, a généralisé l’utilisation des méthodes d’évaluation ex-ante pour la gestion des régimes de retraite.
Ainsi, la délégation au conseil d’administration du régime complémentaire des
agents non titulaires de la gestion des paramètres techniques (taux de cotisation, valeur d’achat du point, etc.), prévue par la réforme de 2008 impliquait une
révision profonde de leurs outils statistiques. Conscient des spécificités de leurs
cotisants et de la nécessité de disposer d’un outil de projection fiable afin d’aider
les gestionnaires du régime complémentaire, l’Ircantec a fait appel aux services
de l’Institut des politiques publiques afin de développer un outil de projection
pour l’effectif et la masse salariale des cotisants. Le présent chapitre décrit la méthodologie qui a été retenue afin de rendre compte des spécificités de l’emploi
non-titulaire.
5.1
Le choix de modélisation
De nombreux modèles de projection pour les régimes de retraite sont actuellement
utilisés dans les administrations françaises. Le Conseil d’orientation des retraites
(2012b) les regroupait en deux catégories : les modèles de microsimulation et les
modèles flux-stock. Ces premiers reposent sur une modélisation au niveau indivi103
Les carrières des non-titulaires du secteur public
duel et s’appuient sur les caractéristiques idiosyncratiques afin de déterminer la
trajectoire professionnelle des cotisants. À l’image du modèle Destinie de l’Insee
(2003) ou Prisme de la CNAV (2009) ils sont majoritairement généralistes 30 , en ce
sens où ils portent sur l’ensemble de la population française. Les modèles de fluxstock 31 reposent quant à eux sur la modélisation d’individus-types. Cette approche
se retrouve plus naturellement lors de l’analyse de populations spécifiques dont
l’hétérogénéité peut être appréhendée à partir d’une discrimination pertinente des
cotisants. L’architecture générale des différents modèles de projection est relativement similaire et peut être résumée comme suit : un premier module portant
sur la démographie, un second sur la carrière et l’acquisition des droits et enfin un
troisième module pour les âges de cessation d’activité et de liquidation. Bien qu’il
soit d’usage que les projections des régimes spéciaux et complémentaires reposent
sur des lois de probabilité exogènes (parfois modifiées en projection) pour les modules de la démographie et de l’âge de liquidation, la modélisation des carrières
doit être plus flexible et tenir compte des déterminants de l’emploi. Il n’existe
ainsi pas de consensus méthodologique et les approches reposent principalement
sur les spécificités de la population étudiée.
Du point de vue de l’Ircantec, ces projections de carrière correspondaient à celles
du secteur privé dans les projections tous régimes du Conseil d’orientation des
retraites, elles-mêmes issues du modèle Prisme. Les cotisants de la Cnav étaient
ainsi mécaniquement affiliés soit à l’Arrco (et éventuellement à l’Agirc) soit à l’Ircantec, les deux régimes complémentaires des cotisants du régime général. Dès
lors, la modélisation des carrières des cotisants de l’Ircantec ne tenait pas compte
des spécificités de l’emploi non-titulaire. Le modèle de projection que nous développons veille ainsi à combler ce manque en se focalisant sur les déterminants du
recours à ce type d’emplois. À terme, ces projections permettront à l’Ircantec de
30. Il est à noter que les modèles de microsimulation ne sont pas nécessairement généralistes (par exemple
le modèle de la RATP) et que les modèles de flux-stock peuvent également être généralistes (par exemple le
modèle Promess de la DREES (Aubert et al. (2010)).
31. Le terme flux-stock fait référence à la dynamique modélisée. En effet, tout stock, c’est-à-dire par exemple
le nombre de cotisants présents dans un régime de retraite, peut être analysé à partir de sa variation d’année
en année. Ainsi, le stock de cette année est donné par le stock de l’an dernier et les variations qu’il a connu.
Ces variations s’appellent des flux. En reprenant l’exemple de l’effectif des cotisants à chaque exercice, les flux
représentent les cotisants qui entrent dans le régime et ceux qui en sortent.
104
Le modèle de projection
disposer du nombre de points ou droits à retraite acquis lors de chaque exercice.
L’horizon des projections étant lointain (2060) différents scénarios institutionnels
et macroéconomiques seront étudiés.
5.1.1
Niveau d’analyse
Une première étape essentielle à la modélisation consiste à choisir le niveau d’hétérogénéité du modèle. En effet, alors que l’introduction d’un niveau accru d’hétérogénéité entre les cotisants peut amener les projections à reposer sur des caractéristiques individuelles et d’emploi non essentielles et les rendre par conséquent instables, son exclusion peut quant à elle limiter la capacité du modèle à retranscrire
les possibles effets de composition que l’on pourrait observer. Dès lors, l’approche
retenue afin de modéliser la carrière des cotisants de l’Ircantec est fondée sur
quelques résultats phares de l’analyse rétrospective présentée dans les précédents
chapitres : (a) une croissance de l’effectif des cotisants plus ou moins soutenue
d’une famille d’employeurs à l’autre, (b) des comportements de cotisation très
différents et (c) des profils salariaux fortement liés à la durée de cotisation.
Une croissance de l’effectif des cotisants plus ou moins soutenue d’une famille d’employeurs à l’autre
La croissance spectaculaire de l’effectif des cotisants, qui est passé de 1,1 millions en 1971 à environ 2,8 millions en 2011, n’a pas affecté de façon similaire
l’ensemble des familles d’employeurs (fonction publique d’État, fonction publique
hospitalière, fonction publique territoriale et Autres). Le développement de la
fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière apparaît en
effet comme le moteur principal de cette hausse. Leur part dans l’emploi Ircantec
a très largement augmenté, passant de 26 % à 40 % pour les collectivités locales
et de 11 % à 20 % pour la fonction publique hospitalière entre 1971 et 2011. En
faible croissance, la fonction publique d’État a, quant à elle, vu sa part diminuer
de 47 % à 29 %. Comme nous l’avons précédemment indiqué, ces changements
reflètent la tendance globale des trois composantes de la fonction publique dans
105
Les carrières des non-titulaires du secteur public
l’emploi public total (titulaire et non-titulaire), au centre du phénomène de décentralisation observé en France.
Par ailleurs, la famille Autres dont les employeurs principaux sont La Poste, France
Telecom, les Régies et EPIC et les associations, a vu son poids parmi les emplois
de l’Ircantec baisser, passant de 16 % en 1971 à 11 % en 2011. Ce déclin relatif
s’explique par la forte dépendance de cette famille à la frontière constamment
changeante entre secteur public et privé. La famille Autres fait en effet référence à
la fois aux entreprises publiques et à un grand nombre d’employeurs publics ayant
recours à des contrats de travail privés. Les incertitudes portant sur l’évolution de
cette famille d’employeurs sont ainsi extrêmement importantes car souvent le fait
de réformes ou accords spécifiques portant sur le spectre de l’emploi Ircantec. Cela
a notamment été le cas par le passé des politiques de privatisation, de nationalisation ou encore de la loi portant création de la SA La Poste et qui implique le
transfert des contractuels de La Poste recrutés après 2011 vers les régimes complémentaires de l’Arrco et de l’Agirc. À l’avenir, une dynamique semblable, dont
l’ampleur devrait toutefois être bien plus importante, est attendue suite à la promulgation de la loi du 20 janvier 2014 dont l’article 51 consacré à la réaffirmation
du champ d’intervention de l’Ircantec précise que dorénavant le critère d’affiliation sera le caractère juridique du contrat de travail. L’Ircantec devrait ainsi observer une baisse conséquente du nombre de ses cotisants employés dans la famille
Autres.
Le constat de cette divergence entre les quatre familles d’employeurs et les différentes forces qui en affectent l’évolution conduisent à traiter leur modélisation de
façon distincte. En outre, l’anticipation du rôle majeur que devrait jouer la loi du
20 janvier 2014 sur le champ d’intervention de l’Ircantec nous a conduit à scinder la famille Autres en deux sous-catégories lors de la modélisation, permettant
ainsi de traiter séparément l’évolution des employeurs qui devraient être peu ou
pas touchés par cette nouvelle réforme et ceux dont plus de 90 % des contrats de
travail sont privés. Enfin, la dynamique très spécifique qui affecte les cotisants de
La Poste depuis la création de la SA La Poste nous a également conduit à isoler
cette sous-famille d’employeurs. La description détaillée de cette répartition est
106
Le modèle de projection
présentée en annexe à la page 175.
Des comportements de cotisation très différents
L’analyse rétrospective de l’emploi non-titulaire a fait état d’une opposition importante du rôle des emplois Ircantec dans la carrière des cotisants. En effet, bien
que l’Ircantec ait la particularité d’être un régime de passage pour la majorité de
ses cotisants, on observe également l’existence d’une poignée de non-titulaires qui
y passeront l’ensemble de leur carrière. Cette dichotomie du comportement de cotisation est essentielle pour la modélisation de l’effectif des individus à l’Ircantec.
Une méthode permettant de l’appréhender consiste à différencier les cotisants qui
entrent pour la première fois à l’Ircantec de ceux qui y cotisent à nouveau après un
arrêt de cotisation. En isolant ainsi les individus qui effectuent des allers-retours
dans le régime, le modèle permet de retranscrire l’hétérogénéité des carrières qui
a été soulignée dans le chapitre 3.
Des profils salariaux fortement liés à la durée de cotisation
La coexistence d’individus passant peu de temps à l’Ircantec et d’autres y passant l’essentiel de leur carrière est également déterminante pour les ressources
de l’Ircantec. On constate en effet qu’en 1990, alors que les cotisants permanents
représentaient seulement 12 % des effectifs, ils comptaient pour 41 % de la masse
salariale totale et 44 % des cotisations perçues par le régime 32 . Ces différences de
rémunération s’expliquent principalement par les profils salariaux très variés que
l’on retrouve à partir de la figure 5.1 qui reporte le montant des rémunérations
en équivalent temps plein (exprimé en pourcentage de plafond de sécurité sociale) lors de chaque année de cotisation selon la durée totale qu’effectueront les
cotisants à l’Ircantec. On distingue ainsi trois profils salariaux majeurs : pour les
cotisants restant moins de 30 ans, la progression salariale est relativement nulle ;
pour les cotisants restant de 30 à 35 années, la progression salariale est plus im32. Le régime de l’Ircantec étant un régime par tranche de cotisation, une hausse d’un euro de la rémunération
ne génère pas le même montant de cotisation selon que celle-ci est supérieure ou inférieure au plafond de
sécurité sociale.
107
Les carrières des non-titulaires du secteur public
portante lors des 10 premières années de cotisation et devient rapidement lisse ;
finalement, pour les cotisants restant 35 années ou plus, la progression salariale
en début de carrière est encore plus forte et reste positive par la suite. Loin d’être
anecdotique pour les finances de l’Ircantec, ces différents profils salariaux doivent
se retrouver au cœur de la modélisation des rémunérations.
F IGURE 5.1 – Evolution salariale en équivalent temps plein.
N OTES : Les rémunérations sont calculées en équivalent temps plein et exprimées en plafonds
de sécurité sociale. La durée totale est ici définie comme la période de temps entre la première
année et la dernière année de cotisation. Dans le cas d’une interruption momentanée de cotisation,
l’individu est exclu de l’échantillon servant au calcul du salaire moyen, mais le réintégrera par la
suite.
S OURCE : Données de l’Ircantec, calcul des auteurs.
5.1.2
Architecture générale du modèle
Au vu des quelques faits stylisés qui viennent d’être rappelés, nous avons opté
pour un modèle flux-stock reposant sur une analyse mésoscopique des cotisants,
c’est-à-dire à la frontière des méthodes de microsimulation au niveau individuel
et des méthodes de macrosimulation qui s’appuient sur des agrégats globaux. Les
individus sont ainsi répartis dans une multitude de groupes en fonction de leur
famille d’employeurs, de leur comportement de cotisation et de la durée totale
de cotisation à l’Ircantec. La modélisation se focalise ensuite sur l’évolution de
l’individu moyen de chaque groupe. Cette approche permet ainsi d’appréhender
108
Le modèle de projection
efficacement l’hétérogénéité caractéristique des cotisants de l’Ircantec. Les projections à l’horizon 2060 sont finalement obtenues en faisant vieillir l’échantillon des
cotisants déjà présents à l’Ircantec, tout en simulant l’entrée de nouveaux cotisants.
Plus spécifiquement, le modèle de projection repose sur la modélisation des flux
d’entrée et de sortie des cotisants. Contrairement à une modélisation directe des
stocks, cette approche a l’avantage de s’appuyer sur la forte mobilité des cotisants
de l’Ircantec. Ces derniers connaissent en effet un taux de renouvellement particulièrement important 33 qui s’explique à la fois par les nombreux allers-retours
qu’ils effectuent et par le caractère temporaire de certains emplois Ircantec. Le
modèle de projection est ainsi composé de quatre modules, tous calibrés sur des
variables résumant l’environnement économique, institutionnel et du marché du
travail.
Le premier module se concentre sur la modélisation du flux des cotisants entrant
à l’Ircantec. À l’aide d’hypothèses démographiques de natalité et d’immigration,
il fournit une estimation du nombre de recrutements pour les travailleurs qui
seront affiliés à l’Ircantec. Il repartit ensuite ces cotisants selon qu’ils entrent à
l’Ircantec pour la première fois ou qu’ils ont déjà connu un épisode de cotisation
auparavant. Les durées de cotisation de ces cotisants nouvellement recrutés sont
calculées dans le second module. On obtient ainsi une estimation du nombre de
cotisants qui seront toujours présents à l’Ircantec 1 an après leur entrée, 2 ans
après, etc. À ce stade, il est d’ores et déjà possible de reconstruire le stock de cotisants lors de chaque exercice. L’étape suivante consiste alors à estimer leur salaire
afin d’être en mesure de calculer la masse salariale globale. Finalement, le dernier
module répartit cette masse salariale entre la tranche A, composée des rémunérations inférieures au plafond de sécurité sociale, et la tranche B, composée des
rémunérations comprises entre 1 et 8 plafonds de sécurité sociale. La figure 5.2
reprend l’architecture générale du modèle en soulignant les liens entre chaque
module.
33. Dans les années 2000 le flux de cotisants entrant chaque année était à peu prêt égal au flux sortant.
109
Les carrières des non-titulaires du secteur public
F IGURE 5.2 – Architecture du modèle.
N OTE : Synthèse des liens entre les différents modules du modèle de projection de l’effectif et de
la masse salariale des cotisants à l’Ircantec.
Cette modélisation semble a priori particulièrement bien adaptée aux spécificités
de l’Ircantec pour au moins deux raisons. D’une part, l’approche flux-stock veille
ici à reproduire la coexistence si caractéristique de cotisants permanents et de cotisants passant que peu de temps à l’Ircantec. D’autre part, l’évolution de la composition du stock de cotisants se traduit naturellement dans la reconstruction de
la masse salariale totale et dans sa répartition par tranche de cotisation. Cette approche s’avère ainsi particulièrement pertinente afin de répondre aux incertitudes
spécifiques qui pèsent sur l’Ircantec. En effet, que ce soit dans le but d’étudier
les conséquences de la réforme du 20 janvier 2014 portant sur le spectre d’intervention de l’Ircantec, les politiques de titularisation ou encore le phénomène de
décentralisation, le modèle permet de capturer les conséquences que cela aura sur
110
Le modèle de projection
la composition du stock de cotisants, et ainsi d’appréhender au mieux les implications pour les finances de l’Ircantec.
5.2
Effectif des cotisants par exercice
L’architecture générale du modèle ayant maintenant été présentée, nous développons dans cette partie le détail de la modélisation permettant de retrouver le stock
des cotisants chaque année. Pour ce faire, la spécification du flux entrant de cotisants est tout d’abord présentée. Nous nous tournons ensuite vers la modélisation
des fonctions de survie à l’Ircantec. Le modèle de projection décrit ici repose sur
les données administratives de l’Ircantec pour l’ensemble des périodes cotisées et
validées pour les cotisants nés au mois d’octobre hors élus locaux. Il est à noter
que l’approche flux-stock que nous avons retenue nécessite que l’échantillon des
cotisants soit tronqué par la gauche. En effet, dans la mesure où le point de départ de la modélisation est le recrutement des travailleurs nouvellement affiliés à
l’Ircantec, nous ne pouvons pas tenir compte des cotisants déjà présents avant la
première année de la modélisation. Le modèle de projection porte ainsi uniquement sur les cotisants entrés depuis 1971 à l’Ircantec 34 . Cette année a été choisie
car elle correspond à l’année de création de l’Ircantec. La sélection de l’échantillon
revient ainsi à exclure les cotisants ayant cotisé à l’Ipacte et à l’Igrante avant de
rejoindre l’Ircantec en 1971. Les biais liés à cette sélection ont été largement discutés dans le premier chapitre (voir p. 21) où il a été montré que les différences
entre les deux échantillons, quoique importantes lors des toutes premières années,
deviennent très faibles dans les années 1990 et insignifiantes à partir des années
2000.
34. Hors élus locaux.
111
Les carrières des non-titulaires du secteur public
5.2.1
Premier module : les nouveaux cotisants
Le flux des cotisants entrant à l’Ircantec a connu une croissance importante depuis
sa création en 1971, passant de 246 000 à 1 070 000 en 2011 35 , qui traduit la
montée en charge progressive qu’a connu le régime complémentaire. De façon
similaire à l’évolution du nombre de cotisants, on constate que la progression au
sein de la fonction publique territoriale est bien plus importante que celles qu’ont
connues les fonctions publiques hospitalière et d’État.
F IGURE 5.3 – Flux entrant de cotisants.
L ECTURE : Environ un million de cotisants sont entrés à l’Ircantec en 2011, dont 240 000 dans la
fonction publique d’État.
N OTES : Flux entrant des cotisants à l’Ircantec pour chaque famille d’employeurs. Pour rappel,
les cotisants entrant à nouveau à l’Ircantec après un arrêt de cotisation supérieur à 30 jours sont
également comptabilisés dans le flux entrant.
S OURCE : Données de l’Ircantec, échantillon des cotisants nés au mois d’octobre. Calcul des auteurs.
Parmi ces cotisants entrant, la part des nouveaux cotisants, c’est-à-dire ceux n’ayant
jamais cotisé auparavant à l’Ircantec, a fortement décru dans les années 1970
avant de se stabiliser entre 40 % et 60 % depuis le début des années 1990. La
baisse tendancielle observée durant les premières années ne traduit cependant pas
une évolution globale que l’on pourrait imputer au comportement des cotisants
mais à un effet d’échantillonnage. En effet, l’échantillon retenu pour la projec35. Un salarié ayant arrêté de cotiser pendant une période supérieure à trente jours est considéré comme un
nouvel entrant.
112
Le modèle de projection
tion étant celui des cotisants entrés pour la première fois après 1971 à l’Ircantec,
ce taux doit nécessairement connaître une baisse tendancielle le ramenant de un
en 1971 à sa valeur tendancielle. Une correction préalable des données visant à
capturer cette dynamique non pertinente pour la modélisation a été effectuée. La
méthode utilisée est présentée en annexe à la page 174.
La première étape consiste à estimer les recrutements des travailleurs qui seront
affiliés à l’Ircantec. Pour ce faire, on reproduit l’évolution de la part de ces recrutements dans la population active. En effet, en estimant non pas le nombre
de cotisants entrant, mais leur proportion dans la population active, la croissance
de long terme 36 du flux entrant est donnée par la croissance démographique.
Cette approche est indispensable à l’exercice de projection et permet d’inclure les
hypothèses de croissance démographique (naissances et immigration) de façon
exogène. Cette croissance « naturelle » des embauches est ensuite modulée selon
les contraintes économiques et institutionnelles pesant sur les employeurs, ainsi
que les caractéristiques de l’offre de travail. Les estimations étant effectuées séparément pour la fonction publique d’État, la fonction publique hospitalière, la
fonction publique territoriale et les trois sous-populations composant la famille
Autres, l’environnement économique et institutionnel affecte différemment chacune de ces catégories d’employeurs. Cette approche permet, entre autres, de reproduire le développement de la fonction publique hospitalière et de la fonction
publique territoriale au détriment de la fonction publique d’État et de la famille
Autres que l’on a observé dans le passé.
Formellement, la modélisation du flux entrant des cotisants repose sur la spécification suivante pour chaque famille d’employeurs :
0
Ej,t
P opActivet
= aj + βj M acrot + γj P olj,t + δj Of f rej,t + j,t
∀j, t
(5.1)
0
Où Ej,t
est le nombre de cotisants entrant à l’Ircantec à la date t dans la famille
d’employeurs j, P opActivet est la population active en France, M acrot l’ensemble
des déterminants macroéconomiques, P olt,j l’ensemble des facteurs politiques et
institutionnels et Of f ret,j les déterminants de l’offre de travail. Dans le cadre
36. Le long terme est défini ici lorsque la part des entrants parmi la population active est constante.
113
Les carrières des non-titulaires du secteur public
des modèles de régression que nous utilisons, nous ferons dorénavant référence
à l’ensemble de ces déterminants (macroéconomiques, institutionnels et de l’offre
de travail) par le terme de régresseurs.
À l’issue de cette première étape, on dispose d’une prévision du nombre de cotisants entrant à l’Ircantec chaque année. Cependant, comme nous l’avons vu, il
est indispensable pour l’analyse de la durée des cotisations d’identifier les cotisants qui effectuent des allers-retours à l’Ircantec. En effet, ces derniers restent en
moyenne moins longtemps à l’Ircantec que leurs homologues qui entrent pour la
première fois. En affinant ainsi l’analyse à des groupes de cotisants avec des comportements de départ homogènes, on améliore d’autant l’analyse de leurs probabilités de rester à l’Ircantec qui sera effectuée dans le module suivant. On ne
regrettera que le caractère ex-post de cette méthode qui ne permet de distinguer
les individus particulièrement mobiles qu’une fois qu’ils se sont signalés, c’est-àdire qu’ils effectuent un premier retour à l’Ircantec.
La répartition du flux entrant entre nouveaux cotisants et retours repose une fois
de plus sur des facteurs conjoncturels, traduisant l’environnement économique
et institutionnel. Elle s’effectue à partir de l’estimation de la part des cotisants
n’ayant jamais cotisé à l’Ircantec parmi les travailleurs nouvellement recrutés :
Yt,j = aj + βj M acrot + γj P olj,t + δj Of f rej,t + j,t
∀j, t
(5.2)
Où Yt,j est le taux de nouveaux cotisants parmi les cotisants entrés l’année t dans
la famille d’employeurs j.
5.2.2
Second module : l’arrêt de cotisation
Le nombre de cotisants entrant à l’Ircantec ayant été calculé à l’aide du premier
module, il est maintenant nécessaire de modéliser la durée en emploi de chacun
de ces individus. Pour cela, nous cherchons à reconstruire leur fonction de survie,
c’est-à-dire la probabilité qu’un cotisant soit toujours à l’Ircantec « x » années après
y être entré. Comme nous avions pu le constater lors de l’analyse rétrospective à
114
Le modèle de projection
la page 53, ces probabilités ont changé au cours du temps : en moyenne, les
cotisants restent de moins en moins longtemps à l’Ircantec sans interruption de
cotisation. La modélisation veille donc également à capturer cette dynamique en
ayant recours à un large ensemble de caractéristiques traduisant les contraintes
exogènes qui pèsent sur les employeurs et les cotisants.
F IGURE 5.4 – Probabilité instantanée de rester à l’Ircantec.
N OTES : Probabilités instantanées de rester à l’Ircantec des cotisants par famille et nouveaux/retours.
S OURCE : Données de l’Ircantec, échantillon des cotisants nés au mois d’octobre et ayant cotisé
pour la première fois après 1970. Calcul des auteurs.
Formellement, la modélisation s’appuie sur la probabilité instantanée de rester à
l’Ircantec des cotisants (c’est-à-dire un moins le taux de hasard). Le pas d’observation étant annuel, la spécification doit contraindre cette probabilité à être comprise entre 0 et 1. C’est pourquoi elle est effectuée à partir d’une transformation
logarithmique. Elle doit par ailleurs être adaptée au comportement spécifique des
cotisants de l’Ircantec et plus particulièrement rendre compatible la présence de
carrières stables à l’Ircantec et d’autres beaucoup plus mobiles. Cette dichotomie
des carrières est en effet une fois de plus confirmée par l’analyse des probabilités
instantanées de survie (figure 5.4) qui restent remarquablement stables et à un
niveau élevé après environ cinq années, alors qu’elles connaissent une variabilité
importante et des niveaux faibles auparavant. Nous avons ainsi opté pour une
estimation par partie autorisant les coefficients estimés à différer en fonction de
115
Les carrières des non-titulaires du secteur public
l’ancienneté. Les regroupements d’ancienneté ont ainsi été effectués à partir de la
comparaison des probabilités moyennes et de leur variance pour chaque ancienneté. Finalement, les groupes retenus sont les suivants : 1, 2, 3, 4, 5, de 6 à 9,
de 10 à 16 et de 17 à 41 ans. Il peut être montré que les résultats ne sont pas
sensibles à des changements marginaux de ces regroupements. L’estimation des
probabilités instantanées repose ainsi sur la spécification suivante :
logit(PN,t,j,r ) = aN,j,r + βN,j,r M acrot + γN,j,r P olj,t + δN,j,r Of f rej,t + N,j,r,t (5.3)
Avec PN,t,j,r la probabilité instantanée de rester à l’Ircantec l’année t avec une ancienneté (n) appartenant au regroupement N dans la famille j pour les cotisants
r (nouveaux cotisants ou retours).
5.3
Masse salariale et tranche de cotisation
L’effectif et la composition du stock de cotisants ayant été obtenus à partir des
deux premiers modules, nous nous tournons à présent vers la modélisation de la
masse salariale par tranche de cotisation. Celle-ci est une fois de plus effectuée
en deux étapes. Dans un premier temps, la masse salariale totale est reconstruite
à partir d’équations de salaire. Cette masse salariale globale est ensuite répartie
entre la première tranche, comprenant les rémunérations inférieures au plafond
de sécurité sociale, et la seconde tranche, composée des rémunérations comprises
entre un et huit plafonds de sécurité sociale. Il est à noter que la définition des
rémunérations retenue pour cette analyse fait référence aux salaires bruts en euros
courants. De plus, la partie des salaires supérieure à huit plafonds de sécurité
sociale étant exclue de l’assiette servant au calcul des rémunérations à l’Ircantec,
elle est également exclue lors de la calibration du modèle.
5.3.1
Troisième module : les salaires
La dynamique des rémunérations peut être analysée à partir de l’évolution de la
productivité réelle du travail, de l’inflation et de la partie endogène du salaire.
116
Le modèle de projection
Cette décomposition permet de se concentrer uniquement sur la modélisation de
la partie endogène des salaires, tout en tenant compte de la croissance exogène
des salaires en France à travers l’inflation et la productivité du travail.
Le terme de salaire endogène, bien qu’abstrait à première vue, fait référence à
l’ensemble des caractéristiques individuelles des cotisants. Cela inclut notamment
leurs caractéristiques idiosyncratiques (sexe, diplôme, etc.) ainsi que leur histoire
(expériences, emplois, situation matrimoniale, etc.). L’une des difficultés majeures
lors de la modélisation est que nous ne disposons pas de la plupart de ces informations. Nous avons donc recours à des effets fixes afin de capturer les caractéristiques individuelles constantes dans le temps. De plus, la spécification est choisie
de façon à reproduire le plus fidèlement possible les salaires observés dans le
passé. Ainsi, le logarithme de la partie endogène du salaire individuel est donné
par une fonction quadratique de l’expérience en emploi reproduisant l’évolution
salariale des cotisants. De plus, les rémunérations n’étant pas annualisées, des indicatrices pour la première année et la dernière année d’emploi sont également
introduites. Ces dernières permettent de tenir compte du fait qu’en moyenne, les
recrutements ne sont pas tous effectués le 1er janvier et que le départ des cotisants
n’a pas systématiquement lieu au 31 décembre. Finalement, le taux de chômage
est également introduit dans l’équation de salaire. Il permet d’apprécier le rôle des
cycles économiques sur le salaire réel individuel qui a été à nouveau récemment
souligné pour le cas français par les travaux de Verdugo (2013) et Debrand et
Privat (2004).
Le modèle n’étant toutefois pas au niveau individuel, les équations de salaire sont
estimées pour les individus moyens définis par les combinaisons des familles d’employeurs, des comportements de cotisation et des durées à l’Ircantec sans interruption de cotisation. L’estimation doit par ailleurs permettre de reproduire les
différents profils salariaux que nous avons précédemment identifiés 37 en fonction
de la durée totale passée à l’Ircantec. Pour ce faire, les durées totales sans interruption de cotisation sont regroupées pour les estimations : de 1 à 29 ans, de 30
11. Cela est notamment le cas car PN,t,j,r est nécessairement différent de zéro pour tous N, t, j, r.
37. Voir la discussion page 107
117
Les carrières des non-titulaires du secteur public
Encadré : un modèle tourné vers le futur
L’une des difficultés majeures liées à la discrimination des cotisants selon la durée totale sans
interruption de cotisation tient au fait qu’il est impossible d’observer le futur. En effet, dans la
mesure où l’on ne peut connaître la durée totale de cotisation qu’une fois que les individus ont
quitté l’Ircantec, la masse salariale totale ne peut être retrouvée qu’en effectuant des hypothèses
en projection sur les fonctions de survie.
Afin d’illustrer cette spécificité, prenons l’exemple de l’équation de salaire qui s’applique aux cotisants restant 41 années à l’Ircantec sans interruption de cotisation. Les données dont nous disposons s’étendent de 1971 à 2011. Ainsi, les seuls cotisants que nous observons effectivement 41
années sont les quelques individus entrés en 1971 et dont la dernière cotisation renseignée était
en 2010. Cet exemple, quelque peu extrême, illustre bien le mécanisme de sélection endogène
de l’échantillon servant à l’estimation des salaires : au fur et à mesure que l’on se rapproche du
présent, le champ des durées totales observées est de plus en plus réduit.
Dès lors, il est nécessaire de projeter la distribution des cotisants selon la durée de cotisation que
l’on obtient à partir des fonctions de survie estimées dans le second module, et cela y compris
lorsque on est amené à reproduire l’évolution passée. On prend ainsi en compte l’existence d’individus entrés en 1972 et qui resteront également 41 ans, bien que nous ne puissions les observer.
Se pose alors la question de la durée maximale qu’un cotisant peut être amené à passer à l’Ircantec.
Dans la mesure où le modèle de projection ne modélise pas directement le comportement de départ
en retraite, la durée de vie d’une cohorte à l’Ircantec tend vers l’infinie 11 :
Ŝ(n)t−n,j,r = 0 ⇐⇒ n ↦ ∞
Une hypothèse ad-hoc sur le comportement de cotisation s’est également avérée indispensable
dans le but de contraindre la durée de vie maximale d’une cohorte. Le choix s’est porté sur 43
années. Cette hypothèse coïncide avec la durée de cotisation requise pour une retraite au taux
plein prévue à terme par la réforme de 2013 (dite réforme Ayrault). Bien que l’on ne tienne pas
compte des durées de cotisation effectuées dans les autres régimes, il semble tout à fait raisonnable
de supposer qu’un individu ayant passé 43 années à l’Ircantec n’a pas ou que très marginalement
cotisé dans un autre cadre. Finalement, on notera que les effectifs affectés par cette hypothèse sont
suffisamment faibles pour qu’elle soit sans conséquence pour l’exercice de projection.
Cette dernière hypothèse affecte toutefois directement la modélisation des salaires puisque, faute
d’un recul suffisant, la durée maximale dont nous disposons dans la base de données de l’Ircantec
est de 41 années et non 43. Il est ainsi nécessaire de reconstruire les effets fixes pour l’équation de
salaire de ces cotisants. Nous avons utilisé pour cela le fait que la sélection des cotisants en fonction
de leur durée totale est un facteur suffisamment discriminant pour que les différences entre les
cotisants passant 41 années à l’Ircantec et ceux y restant 42 ou 43 années soient marginales.
118
Le modèle de projection
à 35 ans et plus de 35 ans 38 . De plus, afin d’autoriser des dynamiques différentes
d’une famille d’employeurs à l’autre et selon que les cotisants entrent à l’Ircantec
pour la première fois ou y retournent après un arrêt de cotisation, les estimations
sont une fois de plus dissociées pour ces catégories. Les profils salariaux estimés
sont donc :
a
b
c
E
wt−n,d,j,r
(n) = aD,j,r + ρD,j,r f (n) + βD,j,r
In=0 + βD,j,r
In=d + βD,j,r
Ut (5.4)
+ θd,j,r + εd,n,j,r,t
E
Où wt−n,D,j,r
(n) est le logarithme de la partie endogène du salaire d’un cotisant
de type r (nouveau/retour) dans la famille d’employeurs j entré à la date t − n
avec une ancienneté n et qui a une durée totale de cotisation d appartenant au
regroupement D, ρD,j,r f (n) le profil salarial, In=0 et In=d les indicatrices pour
respectivement la première et la dernière année de cotisation et Ut le taux de
chômage.
5.3.2
Quatrième module : les tranches de cotisation
Le calcul des cotisations perçues par l’Ircantec dépend de la répartition des rémunérations par tranche. Le dernier module du modèle de projection a été conçu
pour prédire cette répartition à partir des masses salariales estimées par le troisième module. La décomposition est effectuée à partir de la part des rémunérations comprises dans la seconde tranche de cotisation (entre un et huit plafonds de sécurité sociale) au niveau des familles d’employeurs, type de cotisants
(nouveau/retour) pour chaque année et ancienneté. La distribution de cette part
connaît un pic important à zéro (voir le graphique en annexe à la page 200), traduisant le fait que dans plusieurs de nos groupes d’analyse (essentiellement ceux
correspondant à des cotisants de faible ancienneté), l’ensemble des cotisants ont
des rémunérations inférieures au plafond de sécurité sociale. Afin de tenir compte
de cette caractéristique des données dans la modélisation, nous avons recours à
38. Une fois de plus, il peut être montré que les résultats obtenus ne sont pas sensibles à des variations de ce
regroupement.
119
Les carrières des non-titulaires du secteur public
un modèle Tobit 39 (Tobin, 1958). Cela revient à supposer qu’il existe une variable
latente 40 censurée telle que :
⎧
⎪
0
si b⋆t,r,j (n) < 0
⎪
⎪
⎪
⎪
⎪
bt,r,j (n) = ⎨ b⋆t,r,j (n) si b⋆t,r,j (n) ∈ [0, 1]
⎪
⎪
⎪
⎪
⎪
⎪
si b⋆t,r,j (n) > 1
⎩ 1
∀ t, n, j, r
(5.5)
Où b⋆t,r,j (n) la variable latente est donnée par le processus :
b⋆t,r,j (n) = aj,r + βj,r M acrot + γj,r P olj,t + δj,r Of f rej,t
N
+ ∑ Ii=n θi,j,r + j,r,t,n
i=1
La modélisation des rémunérations dans la seconde tranche de cotisation dépend
ainsi de l’environnement économique et institutionnel. Par ailleurs, l’ancienneté
dans le régime est un facteur déterminant et intervient à travers le terme ∑N
i=1 Ii=n
qui permet de capturer l’ensemble des caractéristiques constantes dans le temps
spécifiques aux cotisants présents à l’Ircantec depuis exactement n années.
39. Pour plus d’informations sur les modèles Tobit, se reporter à l’encadré à la page 200 en annexe.
40. Une variable latente est une variable hypothétique, non-mesurable et que l’on ne peut observer dans les
données. Elle permet d’appréhender des concepts théoriques sous-jacents à ce qui a été mesuré, c’est-à-dire en
ce qui nous concerne, d’outrepasser les difficultés liées à la censure des données.
120
C HAPITRE 6
P ERFORMANCE
ET VALIDATION DU
MODÈLE
Les quatre modules constituant le modèle de projection de l’effectif et de la masse
salariale des cotisants ayant été présentés en détail, le présent chapitre a pour
objectif d’évaluer sa capacité à reproduire l’évolution passée. Il procède en trois
étapes. Tout d’abord, la dynamique interne au modèle est analysée à travers les
exemples d’une hausse de la population active et du chômage. Dans un second
temps, nous comparons les projections que nous obtenons sur le passé à l’évolution qui a réellement été observée pour le régime de l’Ircantec. Finalement, les
résultats de cet exercice de projection sont comparés à ceux de plusieurs modèles
concurrents. Ce chapitre est complété par une annexe à la page 193 traitant exclusivement des problématiques liées à l’estimation du modèle. Le lecteur intéressé
pourra notamment y trouver la méthode de sélection des variables explicatives et
les résultats des différentes estimations.
6.1
Dynamique interne
Le modèle de projection a la particularité de capturer les évolutions complexes qui
affectent la composition du stock de cotisants. Il offre ainsi un outil extrêmement
pertinent afin d’analyser en détail les conséquences des variations de l’environnement économique et institutionnel pour le régime de retraite complémentaire des
121
Les carrières des non-titulaires du secteur public
agents non titulaires. Dans ce but, et afin d’illustrer les mécanismes d’ajustement
internes au modèle de projection, nous étudions les dynamiques observées suite à
une hausse de la population active et du taux de chômage. L’approche que nous
proposons ici s’inspire des méthodes macroéconométriques. Elle vise à étudier les
fonctions d’impulsion–réponse, c’est-à-dire la dynamique propre au modèle, simulées suite à un choc temporaire d’une variable explicative, en gardant tous les
autres determinants de l’emploi non-titulaire constants.
6.1.1
La population active
La dynamique engendrée par une hausse exogène de la population active est relativement simple et constitue en cela un exemple particulièrement intéressant.
Rappelons tout d’abord que le modèle de projection ne s’appuie sur l’évolution
de la population active qu’à travers la variation de l’effectif des cotisants entrant
dans le régime complémentaire. En effet, à niveau constant de la part des entrants
parmi la population active, une augmentation de la population active traduit une
hausse de la natalité et/ou de l’immigration en France. Ainsi, on s’attend à ce
qu’elle soit positivement corrélée à l’effectif des cotisants. Cela se retrouve à travers la fonction d’impulsion-réponse du graphique 6.1 qui reporte l’effet d’une
hausse transitoire de 1 % de la population active. Comme on peut le constater, ce
choc temporaire de la population active conduit à une hausse du nombre de cotisants entrant à l’Ircantec d’environ 10 100 individus. Cet effet, quoique important
à très court terme, s’estompe rapidement et cela notamment à cause de la faible
durée de cotisation des individus à l’Ircantec. Ainsi, seulement trois années après
la hausse de la population active, le surplus de cotisants n’est plus que de 1 700.
Le retour vers l’équilibre qui aurait prévalu sans hausse de la population active
s’effectue alors au rythme du départ des cotisants. Finalement, après 44 années
(c’est-à-dire la durée maximale d’une carrière à l’Ircantec) la hausse transitoire de
la population active n’a plus aucun effet sur l’effectif des cotisants à l’Ircantec.
En ce qui concerne l’évolution du salaire endogène des cotisants, c’est-à-dire le
salaire hors inflation et productivité réelle du travail, l’entrée de nouveaux coti122
Performance et validation du modèle
F IGURE 6.1 – Effet d’une hausse temporaire de la population active.
B - Salaire endogène moyen
A - Effectif des cotisants
L ECTURE : Étant donnée la situation économique et institutionnelle en 2011, une hausse de 1 % de la population active implique une
hausse instantanée de 10 100 cotisants. Trois années plus tard, la hausse de l’effectif issue de l’augmentation de la population active n’est
plus que de 1 700 cotisants.
N OTE : Variation de l’effectif des cotisants (graphique de gauche) et du salaire endogène moyen (droite) suite à une hausse de 1 % de la
population active lors de l’année 0 et étant donné l’environnement économique et institutionnel en 2011. Le salaire endogène correspond
au salaire corrigé de l’évolution de l’inflation et de la productivité réelle du travail.
S OURCE : Calcul des auteurs à partir du modèle de projection de l’effectif et de la masse salariale des cotisants de l’Ircantec.
sants a pour effet immédiat d’augmenter la part des individus avec une ancienneté
faible parmi les cotisants. Ces derniers ayant des salaires moins élevés, on observe
une baisse du salaire moyen. Cependant, au fur et à mesure qu’une partie de ces
cotisants restent à l’Ircantec, les gains salariaux liés à leur ancienneté en emploi
font qu’ils atteignent des rémunérations plus importantes. On constate ainsi une
hausse du salaire moyen après deux années. Finalement, le différentiel se réduit
progressivement avec le départ des cotisants et devient nul après 44 années.
6.1.2
Le taux de chômage
La dynamique engendrée par une hausse du taux de chômage est plus complexe.
Celle-ci augmente le nombre de cotisants entrant à l’Ircantec l’année du choc d’environ 13 400 individus. Elle affecte de plus les probabilités de survie des cotisants
déjà présents : les probabilités instantanées de rester à l’Ircantec l’année du choc
baissent en moyenne pour les cotisants présents depuis un an et augmentent pour
tous les autres. Ainsi, ce surplus d’anciens cotisants restant à l’Ircantec et qui seraient sortis en l’absence de hausse du taux de chômage s’ajoute à l’effet initial
123
Les carrières des non-titulaires du secteur public
sur le flux entrant de cotisants. En conséquence, la hausse totale de l’effectif des
cotisants de l’Ircantec est d’environ 19 900 individus dès la première année. La
convergence vers le niveau qui aurait prévalu sans la hausse du chômage s’effectue ensuite au rythme du départ de ces cotisants 41 . Finalement, la dynamique
observée suite à une hausse du taux de chômage souligne une fois de plus le rôle
contracyclique de l’emploi non-titulaire et rejoint ainsi les résultats trouvés lors de
l’analyse rétrospective de l’emploi non-titulaire.
F IGURE 6.2 – Effet d’une hausse temporaire du taux de chômage.
B - Salaire endogène moyen
A - Effectif des cotisants
L ECTURE : Étant donnée la situation économique et institutionnelle en 2011, une hausse de 1 point de pourcentage du taux de chômage
implique une hausse instantanée de 19 900 cotisants.
N OTE : Variation de l’effectif des cotisants (graphique de gauche) et du salaire endogène moyen (droite) suite à une hausse de 1 point
de pourcentage du taux de chômage lors de l’année 0 et étant donné l’environnement économique et institutionnel en 2011. Le salaire
endogène correspond au salaire corrigé de l’évolution de l’inflation et de la productivité réelle du travail.
S OURCE : Calcul des auteurs à partir du modèle de projection de l’effectif et de la masse salariale des cotisants de l’Ircantec.
La procyclicité du salaire implique qu’il doit baisser l’année de la hausse du taux
de chômage. Cette évolution instantanée se retrouve dans la baisse initiale du
salaire endogène moyen dans le graphique 6.2-B. Outre cet effet instantané qui
s’estompe dès que le taux de chômage retrouve son niveau initial (soit une année
après le choc), la variation du salaire moyen traduit les effets de composition du
stock de cotisants qui sont beaucoup plus persistants. Ceux-ci peuvent prendre
plusieurs formes : la répartition des cotisants selon leur ancienneté, entre les familles d’employeurs, etc.
41. Il est à noter que ce rythme est plus lent que celui que l’on retrouve lors d’une simple hausse des entrants
(voir la figure 6.1 par exemple). En effet, du fait de probabilités instantanées de survie plus élevées, l’effet sur
les cotisants qui étaient déjà présents à l’Ircantec est plus persistant à court et moyen terme.
124
Performance et validation du modèle
L’effet dominant dans le cas du chômage semble être celui de l’ancienneté. En
effet, de façon similaire à ce que l’on a observé pour la hausse de la population
active, on s’attend à une baisse à très court terme du salaire due à l’arrivé de
nouveaux cotisants. Or, suite à une hausse du taux de chômage, cette baisse est
toutefois contrecarrée par le maintien en emploi d’anciens cotisants. Ces derniers,
dont les rémunérations sont très élevées, permettent au salaire moyen d’augmenter légèrement juste après le choc.
6.2
Premier exercice de projection
Afin d’évaluer la capacité de la modélisation à retranscrire l’évolution passée, le
modèle est estimé sur la période 1971–1991. Des prédictions sont ensuite calculées pour les années de 1992 à 2011 et comparées à l’évolution réellement observée. Ce premier exercice de projection reproduit fidèlement ce qui sera effectué
afin d’obtenir les projections à l’horizon 2060, la seule différence étant que nous
observons ici les valeurs exactes des variables explicatives. Le choix des variables
explicatives reposant également à la marge sur cet exercice de prédiction, nous
reportons également les résultats de ce même exercice calibré cette fois-ci sur la
période de 1971–2001. Cette seconde approche permet de s’assurer de la stabilité
des résultats et plus particulièrement de leur robustesse vis-à-vis de la méthode
de sélection des variables explicatives. Par ailleurs, il a été choisi pour le reste de
l’analyse de mesurer la précision des projections à partir de l’erreur moyenne absolue (MAPE). Cet indicateur a pour avantage, contrairement aux autres que l’on
retrouve généralement dans la littérature 42 , d’être facilement interprétable et indépendant des effets d’échelle. Néanmoins conscients de ses imperfections 43 , nous
avons choisi de reporter également l’ensemble des graphiques des projections afin
que le lecteur puisse se faire sa propre opinion de la précision des résultats en
fonction des critères qu’il jugera pertinents (minimisation de l’erreur moyenne, de
42. Voir Shcherbako (2013) pour une présentation exhaustive.
43. Les défauts généralement cités sont : (1) des erreurs identiques au-dessus de la vraie valeur conduisent
à une erreur absolue plus grande, (2) l’erreur moyenne absolue est d’autant plus grande que les valeurs de la
série originelle sont faibles. (Woschnagg, (2004)
125
Les carrières des non-titulaires du secteur public
l’erreur absolue, des erreurs très importantes, etc.).
F IGURE 6.3 – Exercice de projection : cotisants.
B - Calibré sur la période 1971–2001
A - Calibré sur la période 1971–1991
N OTES : Résultats des projections de l’effectif des cotisants à l’Ircantec sur le passé selon que le modèle est calibré sur la
période 1971–1991 ou 1971–2001.
S OURCE : Calcul des auteurs.
La prévision de l’effectif des cotisants aboutit à des résultats particulièrement remarquables. En estimant le modèle sur la période 1971–1991, l’erreur moyenne
absolue calculée entre 1992 et 2001 est de seulement 4,89 %. Lorsque l’on double
la période de projection de 10 à 20 ans, l’erreur absolue se voit également augmenter de 2,8 points de pourcentage. Globalement, la croissance des cotisants à
l’Ircantec semble être correctement capturée par le modèle, à l’exception de l’accélération qu’a connu le régime à la fin des années 1990. Cela semblerait s’expliquer
par la contrainte très forte que nous imposons en ne calibrant le modèle que sur
20 années. En effet, lorsque l’on étend la période de calibration du modèle de
1971 à 2001, les résultats se voient très nettement améliorés : l’erreur moyenne
absolue n’est plus que de 1,11 %.
En ce qui concerne la masse salariale, les résultats restent également satisfaisants.
L’erreur moyenne absolue calculée sur les dix premières années est respectivement de 7,60 % et de 6,64 % selon que le modèle est calibré sur la période de
1971 à 1991 ou de 1971 à 2001. Les projections à 20 ans restent par ailleurs re126
Performance et validation du modèle
F IGURE 6.4 – Exercice de projection : masse salariale.
B - Calibré sur la période 1971–2001
A - Calibré sur la période 1971–1991
N OTES : Résultats des projections de la masse salariale des cotisants à l’Ircantec sur le passé selon que le modèle est calibré sur la période
1971–1991 ou 1971–2001.
S OURCE : Calcul des auteurs.
marquablement proches des niveaux observés avec une erreur absolue moyenne
de 7,91 %.
F IGURE 6.5 – Exercice de projection : rémunérations entre 1 et 8 PSS.
B - Calibré sur la période 1971–2001
A - Calibré sur la période 1971–1991
N OTES : Résultats des projections de la masse salariale des cotisants à l’Ircantec sur le passé selon que le modèle est calibré sur la période
1971–1991 ou 1971–2001. Des hypothèses supplémentaires ont dû être faites afin de reconstruire les effets fixes pour la seconde tranche
de cotisation et sont la principale raison de l’écart que l’on observe lorsque le modèle est calibré sur la période de 1971 à 1991.
S OURCE : Calcul des auteurs.
Finalement les résultats pour les rémunérations appartenant à la seconde tranche
de cotisation sont à première vue plus mitigés. En effet, il apparaît clairement
que le modèle, lorsqu’il n’est calibré que sur les 20 premières années, ne permet
pas de reproduire l’évolution passée en projection. Ce constat n’est qu’à moitié
127
Les carrières des non-titulaires du secteur public
surprenant : en estimant le quatrième module uniquement sur les 20 premières
années, nous sommes contraints d’appliquer une hypothèse ad-hoc afin de retrouver les effets fixes de l’équation (5.5) pour la moitié des anciennetés. Autrement
dit, nous devons supposer que la part des rémunérations appartenant à la tranche
B est identique pour les cotisants ayant 20 années d’ancienneté et ceux en ayant
40. Cette hypothèse est évidemment trop forte et ne tient pas compte de la corrélation importante entre la durée en emploi, les rémunérations et les tranches de
cotisation. Le rôle primordial de la période d’estimation apparaît plus clairement
lorsque l’on contraste ces résultats à ceux obtenus en ajoutant une décennie à la
période de calibration. On constate en effet que le modèle aboutit à des résultats
bien meilleurs avec une erreur absolue moyenne de 4,87 %.
En conclusion, les résultats empiriques fournis par cet exercice de projection permettent de valider le modèle et soulignent la robustesse des projections, y compris
au vu de la méthode de sélection des déterminants de l’emploi Ircantec qui a été
utilisée. Ils rappellent toutefois la nécessité de disposer d’une période d’observation suffisamment importante afin de limiter l’effet des hypothèses nécessaires à la
reconstruction du comportement des cotisants qui resteront longtemps à l’Ircantec. Cette conclusion reste également vraie lorsque l’on cherche à exclure les années les plus anciennes de la calibration (voir en annexe à la page 204 pour la période de 1971 à 1980). On ne peut ainsi rester qu’optimiste quant à la robustesse
des projections à l’horizon 2060 qui seront présentées dans les deux chapitres
suivants puisqu’elles seront calibrées sur l’ensemble des informations disponibles.
6.3
Modèles concurrents
Le modèle que nous proposons reste particulièrement sophistiqué et repose sur un
grand nombre d’hypothèses. Bien que celles-ci soient en partie issues des conclusions de l’analyse rétrospective des cotisants, se pose la question de leur légitimité
et de l’intérêt de la complexité de la modélisation. Pour tenter de répondre à
cette question, nous comparons nos résultats à ceux de modèles concurrents plus
128
Performance et validation du modèle
simples. Cette approche est standard pour tout prévisionniste soucieux de fournir
les résultats les plus robustes possible.
Trois types de modèles concurrents ont été retenus :
Le lissage exponentiel : Bien qu’ils soient généralement utilisés pour des projections à très court terme, le caractère autoregressif des modèles de lissage exponentiel en fait un bon candidat ici. Étant donné les séries étudiées, nous retenons
la spécification de Holt-Winter avec tendance.
Les modèles Arima : Le second type de modèle que nous utilisons sont les modèles Arima. Le choix de leur spécification diffère d’une série à l’autre et est effectué à partir de l’analyse des fonctions d’autocorrélation (ACF) et d’autocorrélation
partielle (PACF), ainsi que des tests standards de stationnarité.
Les régressions multivariées : Finalement, nous avons recours à des modèles de
régression multivariés avec tendance. La sélection de la spécification est similaire
à celle que nous avons utilisée pour le modèle principal de projection.
La comparaison des différents modèles confirme une fois de plus la qualité des
projections obtenues avec le modèle principal. Sur les quatre projections présentées pour l’effectif des cotisants et la masse salariale, il existe deux situations où
au moins un des modèles concurrents fournit des projections avec une erreur absolue moyenne plus faible : les projections à 20 ans pour l’effectif des cotisants et
les projections à 10 ans pour la masse salariale. Dans ces deux cas, les résultats
obtenus à l’aide du modèle de régression sont significativement meilleurs 44 . Dans
l’ensemble, le modèle de régression ne semble toutefois pas préférable au modèle
principal. En effet, la qualité des prédictions est très fortement variable d’une comparaison à l’autre : par exemple pour la masse salariale, le modèle de régression
conduit à une MAPE plus faible de 3,1 points de pourcentage à un horizon de 10
ans, alors que la MAPE est plus importante de 5,8 points lorsque l’horizon est de
20 ans. Ces écarts ne traduisent finalement que l’arbitrage qui a été fait lors de
44. Résultats obtenus à l’aide du test de comparaison de la qualité des projections de Diebold-Mariano à 5 %.
129
Les carrières des non-titulaires du secteur public
TABLEAU 6.1 – Comparaison des modèles concurrents.
Calibré sur la période
1971–1991 1971–2001
20 ans
10 ans
Modèles
Horizon des projections
Effectif des cotisants
Lissage exponentiel Holt-Winter
Arima(1,1,1)
OLS
Modèle principal
7,80 %
10,35 %
4,29 %
7,73 %
4,53 %
7,39 %
9,87 %
1,11 %
Masse salariale
Lissage exponentiel Holt-Winter
Arima(2,1,1)
OLS
Modèle principal
14,36 %
25,47 %
13,74 %
7,91 %
4,94 %
10,91 %
3,49 %
6,64 %
Seconde tranche de cotisation
Lissage exponentiel Holt-Winter
Arima(3,1,2)
OLS
Modèle principal
34,86 %
40,49 %
32,30 %
42,39 %
13,79 %
8,37 %
11,30 %
4,87 %
N OTES : Résultats de l’erreur moyenne absolue (MAPE) de chacun des modèles concurrents pour l’effectif des cotisants, la masse salariale et la seconde tranche de cotisation. Les
résultats sont obtenus en estimant les données sur la période 1971–1991 (respectivement
1971–2001) afin de construire des projections sur la période 1992–2011 (2002–2011). Le
modèle principal est celui que nous souhaitons comparer. Les projections pour les modèles
autorégressifs sont effectuées à l’aide des valeurs estimées pour les retards (comme cela
serait effectué pour projeter l’évolution future).
S OURCE : Données de l’Ircantec, calculs des auteurs.
130
Performance et validation du modèle
la modélisation en faveur d’un modèle structurel contraignant les comportements
de cotisation afin d’assurer la stabilité des résultats d’un exercice de projection à
l’autre.
Finalement, le fait que notre modèle se classe dernier lors des projections des rémunérations comprises dans la seconde tranche lorsque le modèle est calibré sur
la période de 1971 à 1991 et premier lorsqu’il est calibré sur la période de 1971
à 2001, avec une erreur moyenne absolue de projection environ deux fois plus
faible que son plus proche concurrent, renforce l’argument précédemment présenté : les contraintes supplémentaires que l’on doit imposer afin de reconstruire
les rémunérations de la tranche B sont trop importantes lorsque la période servant
à calibrer le modèle est trop restreinte (voir la discussion à la page 127).
En conclusion des différentes analyses que nous venons de présenter dans ce chapitre, le modèle de projection de l’effectif et de la masse salariale des cotisants
semble particulièrement bien adapté afin de retranscrire les spécificités du régime
de l’Ircantec. Sa grande flexibilité permet en effet de capturer les changements
dans la composition du stock des cotisants et ainsi de reproduire le plus finement
possible leurs effets sur la masse salariale et la seconde tranche de cotisation.
Les projections obtenues sont ainsi particulièrement fiables, et cela notamment
lorsqu’elles sont comparées à d’autres modèles statistiques standards.
131
Les carrières des non-titulaires du secteur public
132
C HAPITRE 7
P ROJECTIONS
À L’ HORIZON
2060
Les capacités prédictives du modèle ayant été discutées, nous nous tournons à présent vers les scénarios d’évolution à l’horizon 2060. Le but n’étant pas de deviner
le nombre de cotisants et leur masse salariale dans 50 ans, mais plutôt d’étudier
l’évolution que l’on peut anticiper à partir de versions plus ou moins optimistes de
l’environnement économique et institutionnel ; nous prenons le parti de procéder
en plusieurs étapes afin de différencier l’évolution strictement macroéconomique
et démographique de celle strictement institutionnelle. Nous présentons ainsi dans
ce chapitre les projections principales reposant sur les hypothèses macroéconomiques et démographiques du Conseil d’orientation des retraites (Cor). Plusieurs
variantes institutionnelles seront ensuite discutées dans le huitième chapitre.
7.1
Scénarios économiques et démographiques
La particularité de l’emploi Ircantec est de reposer sur un certain nombre de facteurs institutionnels qui ne sont que partiellement liés à l’environnement économique. À ce stade, il paraît nécessaire d’analyser l’évolution du régime complémentaire tout en contrôlant pour ces facteurs institutionnels exogènes que l’on
pourrait anticiper. Cette approche ceteris paribus offre des projections collant le
plus possible aux scénarios d’évolution du Cor. Elle revient toutefois à supposer
un environment institutionnel constant et ne permet d’apprécier que l’influence
des indicateurs économiques sur le régime de retraite de l’Ircantec.
133
Les carrières des non-titulaires du secteur public
7.1.1
Hypothèses macroéconomiques
Les cinq variantes macroéconomiques du Conseil d’orientation des retraites (2012a)
sont utilisées pour les projections de l’effectif et de la masse salariale des cotisants
de l’Ircantec à l’horizon 2060. Un scénario macroéconomique supplémentaire est
également analysé. Celui-ci admet une dégradation permanente de l’économie
suite à la crise de 2008 qui resterait à un niveau comparable à celui rencontré
sur la période de 2008 à 2013. Le détail des hypothèses macroéconomiques de
chacun de ces six scénarios est présenté dans cette partie.
Rappel des scénarios macroéconomiques du Cor
Le conseil d’orientation des retraites (Cor) publie des scénarios macroéconomiques
pour les exercices de projection qu’il mène régulièrement (2001, 2006, 2007,
2010 et 2012). Ces scénarios font foi au sein de l’ensemble des services administratifs travaillant sur la problématique des retraites et se retrouvent également
dans les travaux académiques et ce malgré leur optimisme flagrant : « à courtterme, les projections du Cor ont été à chaque fois trop optimistes par rapport
aux réalisations des années suivantes » (Blanchet, Bozio et Rabate (2013)). Non
sans rester indifférent à ces critiques, le Cor a élargi progressivement le spectre
de ses scénarios en proposant de plus en plus de variantes. Le onzième rapport du
Conseil d’orientation des retraites (2012a) définit ainsi 5 évolutions différentes de
l’environnement économique. Ces scénarios étaient présentés comme suit :
Scénario A : un retour aux gains de productivité observés sur très longue période
Dans le scénario A, le taux de croissance annuel de la productivité du travail est
de 1,8 % à long terme, ce qui correspond à l’évolution moyenne observée entre le
début des années 1990 et l’immédiat avant-crise. L’hypothèse de taux de chômage
à long terme est de 4,5 %, niveau jugé compatible avec le retour au plein emploi.
Dans ce scénario, les effets négatifs de la crise sur la croissance du PIB seraient
assez rapidement rattrapés grâce à la mise en œuvre d’une politique de réformes.
Scénario B : un retour aux gains de productivité observés juste avant la crise.
134
Projections à l’horizon 2060
TABLEAU 7.1 – Scénario A.
Taux de croissance moyen (en % par
an)
PIB (volume)
Productivité apparente du travail par
tête
Taux de chômage (en %)
2011–2020
2020–2030
2030–2040
2040–2050
2050–2060
1,6
0,9
2,1
1,7
1,9
1,8
1,9
1,8
1,9
1,8
2020
7,3
2030
4,5
2040
4,5
2050
4,5
2060
4,5
S OURCE : Onzième rapport du Conseil d’orientation des retraites (2012a).
Le scénario B, un peu moins favorable, ne remet pas en cause l’hypothèse de retour
au plein emploi à terme, mais suppose que les gains de productivité ne retrouvent
pas leur tendance de très longue période. Le taux de croissance annuelle de la
productivité du travail est de 1,5 % à long terme, soit un retour à l’évolution
moyenne observée depuis le début des années 2000 jusqu’au déclenchement de
la crise.
TABLEAU 7.2 – Scénario B.
Taux de croissance moyen (en % par
an)
PIB (volume)
Productivité apparente du travail par
tête
Taux de chômage (en %)
2011–2020
2020–2030
2030–2040
2040–2050
2050–2060
1,6
0,9
1,9
1,5
1,6
1,5
1,6
1,5
1,6
1,5
2020
7,6
2030
4,8
2040
4,5
2050
4,5
2060
4,5
S OURCE : Onzième rapport du Conseil d’orientation des retraites (2012a).
Scénario C : des gains de productivité du travail durablement amoindris.
Le scénario C tient compte d’effets négatifs durables de la dégradation de la
conjoncture depuis 2010 en raison de la diffusion de la crise en zone euro. Dans
ce scénario, la crise modifie le taux de croissance de la productivité globale des
facteurs – et donc de la productivité du travail à long terme. Les gains de productivité seraient alors durablement amoindris et se stabiliseraient à terme à 1,3 %
par an, soit l’évolution moyenne observée entre 1998 et 2011, alors que le taux
de chômage à long terme ne redescendrait pas en dessous de 7 %.
Variantes A’ et C’ : des gains de productivité du travail davantage contrastés à long
terme.
135
Les carrières des non-titulaires du secteur public
TABLEAU 7.3 – Scénario C.
Taux de croissance moyen (en % par
an)
PIB (volume)
Productivité apparente du travail par
tête
Taux de chômage (en %)
2011–2020
2020–2030
2030–2040
2040–2050
2050–2060
1,6
0,9
1,5
1,3
1,4
1,3
1,4
1,3
1,4
1,3
2020
7,8
2030
7,0
2040
7,0
2050
7,0
2060
7,0
S OURCE : Onzième rapport du Conseil d’orientation des retraites (2012a).
La variante A’ reprend la même évolution du taux de chômage que le scénario A
avec, à long terme, un taux de 4,5 % et suppose, en plus du rattrapage des niveaux
de productivité d’avant-crise, un regain de croissance avec des taux de croissance
annuels de la productivité du travail atteignant 2 % à long terme.
TABLEAU 7.4 – Scénario A’.
Taux de croissance moyen (en % par
an)
PIB (volume)
Productivité apparente du travail par
tête
Taux de chômage (en %)
2011–2020
2020–2030
2030–2040
2040–2050
2050–2060
1,6
0,9
2,3
1,8
2,1
2,0
2,1
2,0
2,1
2,0
2020
7,3
2030
4,5
2040
4,5
2050
4,5
2060
4,5
S OURCE : Onzième rapport du Conseil d’orientation des retraites (2012a).
La variante C’ correspond à un scénario de décrochement durable de la croissance
qui, à long terme, conduirait à des gains de productivité annuels de 1 %. Comme
dans le scénario C, le taux de chômage ne redescendrait pas en dessous de 7 %.
TABLEAU 7.5 – Scénario C’.
Taux de croissance moyen (en % par
an)
PIB (volume)
Productivité apparente du travail par
tête
Taux de chômage (en %)
2011–2020
2020–2030
2030–2040
2040–2050
2050–2060
1,5
0,9
1,2
1,0
1,1
1,0
1,1
1,0
1,1
1,0
2020
7,8
2030
7,0
2040
7,0
2050
7,0
2060
7,0
S OURCE : Onzième rapport du Conseil d’orientation des retraites (2012a).
Finalement, l’inflation est supposée revenir à son niveau structurel de 1,75 % dès
2015 pour tous les scénarios.
136
Projections à l’horizon 2060
Le prolongement de la crise économique a conduit le Conseil d’orientation des retraites à revoir les prévisions de très court terme des scénarios avec la publication
du rapport Evolutions et perspectives des retraites en France en juin 2014. Ces nouvelles recommendations ont également été reprises dans les projections fournies
dans le présent document.
Scénario D : un environnement macroéconomique constant
Suite à la critique du Haut Conseil des finances publiques qui a qualifié de trop
optimistes les hypothèses de projection du Cor, nous envisageons également un
scénario macroéconomique supplémentaire. Ce dernier a pour ambition de fournir la trajectoire d’évolution du régime de l’Ircantec dans un environnement économique extrêmement dégradé. Pour ce faire, il est supposé que l’effet de la crise
de 2008 est permanent. Dès lors, l’évolution de long terme de l’économie devient
identique à ce que l’on a rencontré entre 2008 et 2013. Plutôt que de se substituer
aux hypothèses macroéconomiques du Cor, ce nouveau scénario D vient les compléter. En effet, en élargissant ainsi le spectre des scénarios macroéconomiques,
il devient possible d’analyser les conséquences pour le régime de l’Ircantec des
fortes incertitudes qui pèsent sur l’évolution de la productivité globale des facteurs pour les pays situés le long de la frontière technologique 45 . En outre, ce
nouveau scénario permet d’étudier la dynamique du régime et de ses finances
dans un environnement économique stable et similaire à celui que nous rencontrons actuellement.
La croissance de la productivité réelle du travail serait amenée à stagner jusqu’en
2060 au niveau particulièrement faible de 0,5 % par an dans ce nouveau scénario
D et avec elle la croissance du PIB qui serait quasiment nulle (0,1 % par an).
Cette faible dynamique économique s’accompagnerait d’une hausse substantielle
45. Les incertitudes pesant sur l’évolution de la productivité globale des facteurs traduisent l’opposition forte
que l’on retrouve dans la littérature économique entre d’une part des théoriciens "pessimistes" qui considèrent
que les principales innovations ont déjà été réalisées (Gordon (2012)) et d’autre part des théoriciens plus
optimistes qui considèrent quant à eux qu’il existe un décalage important entre le moment de l’innovation et
celui où l’on constate les gains de productivité liés à cette innovation. Finalement, cette incertitude liée à la
forme de la fonction de production future des innovations (Fernald and Jones (2014)) conduit à élargir le
spectre des scénarios macroéconomiques en complétant les scénarios du Cor par un scénario très pessimiste.
137
Les carrières des non-titulaires du secteur public
du taux de chômage par rapport aux scénarios du Cor qui resterait à son niveau
moyen depuis la crise de 2008, à 8,8 %.
7.1.2
Hypothèses démographiques
L’évolution de la population active à l’horizon 2060 est issue des projections de
l’Insee (2010). Celle-ci continuerait d’augmenter de façon assez soutenue jusqu’en
2025, avec 110 000 actifs supplémentaires par an, avant de marquer une pause
et de repartir à la hausse à partir de 2035 (+45 000 personnes par an jusqu’en
2060). Trois scénarios sont proposés par l’Insee : une version haute, médiane et
basse. En accord avec les projections effectuées dans le onzième rapport du Cor,
nous ne retenons que le scénario central qui repose sur une hypothèse de fécondité
de 1,95 enfants à partir de 2015, une espérance de vie à la naissance de 91,1 ans
en 2060 pour les femmes et de 86,0 ans pour les hommes et un solde migratoire
constant de 100 000.
L’évolution du taux de féminisation des cotisants est également calée sur les projections de l’Insee pour la population active (2010). Ce taux étant toutefois particulièrement élevé à l’Ircantec, seuls les taux de croissance annuelle pour la population active sont appliqués. Il n’est ainsi pas supposé que la féminisation de
l’Ircantec rejoindra à terme celle de la population active, mais plutôt que leur
variation d’année en année suivra la même tendance :
TABLEAU 7.6 – Hypothèses pour la féminisation.
Croissance moyenne (en % par an)
Part des femmes
2011–2015
0,0013
2015–2020
0,0004
2020–2030
-0,0008
2030–2040
-0,0008
2040–2060
-0,0004
S OURCE : Projections de l’Insee à l’horizon 2060 pour la population active (Blanpain and Chardon (2010)).
Finalement, les projections de l’âge de fin d’étude sont quant à elles issues des
résultats du modèle de microsimulation Destinie de l’Insee (2014). Celui-ci devrait
passer de 20,1 ans en 2009 à 21 ans en 2040 et rester constant par la suite. Partant
de l’hypothèse que l’âge à l’entrée des cotisants suit une évolution identique à
celle de l’âge de fin d’étude, nous y appliquons une croissance annuelle moyenne
138
Projections à l’horizon 2060
de 0,14 % entre 2011 et 2040 et nulle par la suite.
7.2
Effectif des cotisants à l’horizon 2060
L’effectif des cotisants entrant serait amené à augmenter légèrement à très court
terme. L’amélioration de l’environnement économique et plus particulièrement du
chômage implique toutefois une baisse progressive dans les scénarios A’, A et B,
alors que le maintien du taux de chômage à un niveau relativement élevé de 7 %
dans les scénarios C et C’ et de 8,8 % dans le scénario D préserverait la croissance
de l’effectif des cotisants entrant. Ainsi, au début des années 2020, les projections
des scénarios C, C’ et D deviennent supérieures à celles des scénarios A’, A et B. Cet
écart continuerait de croître jusqu’en 2030, le temps que les scénarios rejoignent
leur dynamique de long terme. Il se maintiendrait par la suite et l’effectif augmenterait dans tous les scénarios au rythme de la population active. À terme, le flux
d’entrants devrait ainsi passer de 1,04 millions en 2011 à 1,09 dans les scénarios
A’, A et B en 2060, 1,13 dans les scénarios C et C’ et 1,16 dans le scénario D.
Cette dynamique affecterait l’évolution de l’effectif des cotisants présents lors de
chaque exercice (figure 7.1). Un fois de plus, les cinq scénarios aboutissent à des
évolutions similaires à court terme. L’écart se creuserait à partir de la décennie
2020–2030, période durant laquelle on observerait une convergence vers les niveaux structurels pour le chômage, la croissance et la productivité réelle du travail. Outre l’effet du flux entrant de cotisants, le différentiel entre les scénarios les
plus optimistes et les scénarios C, C’ et D augmenterait du fait d’un changement
durable du comportement de cotisation : le taux de chômage structurel élevé retenu dans les scénarios C, C’ et D implique un allongement permanent de la durée
de cotisation des individus à l’Ircantec 46 . Finalement, cet écart cesserait de se
creuser assez rapidement et on retrouverait une croissance de l’effectif poussée
par la démographie dès 2040. L’effectif des cotisants passerait ainsi de 2,65 millions en 2011 à 2,92 en 2060 pour les scénarios A’ et A, 2,91 pour le B, 3,13 pour
46. Se référer aux résultats complémentaires en annexe à la page 207 pour plus d’informations.
139
Les carrières des non-titulaires du secteur public
F IGURE 7.1 – Projections de l’effectif des cotisants.
N OTES : Résultats des projections de l’effectif des cotisants par exercice à partir des scénarios du Conseil
d’orientation des retraites.
S OURCE : Données de l’Ircantec, échantillon des cotisants nés au mois d’octobre et ayant cotisé pour la
première fois après 1970. Calcul des auteurs.
les C et C’ et 3,32 pour le D. Au final, ces projections soulignent une fois de plus le
rôle contracyclique de l’emploi non-titulaire : toutes choses égales par ailleurs, les
employeurs publics préfèrent avoir recours à des emplois pérennes en limitant le
recrutement de non-titulaires lorsque l’environnement économique est favorable.
7.3
Masse salariale et tranche de cotisation à l’ho-
rizon 2060
Le salaire moyen des cotisants est peu sensible aux hypothèses de projection à
court terme. En euros constants, il devrait ainsi passer d’environ 12 300 en 2011
à 15 600 en 2020 pour les scénarios A’ et A, 15 400 pour le B et 15 300 pour les
C et C’ et 14 500 pour le D. L’écart se creuserait toutefois au fur et à mesure de la
projection et cela à cause des hypothèses d’évolution de la productivité réelle du
travail. Ainsi, en 2060 un cotisant à l’Ircantec gagnerait en moyenne 37 400 euros
140
Projections à l’horizon 2060
avec le scénario A, 33 200 avec le scénario médian et 28 200 avec le scénario C.
F IGURE 7.2 – Projections de la masse salariale.
N OTES : Résultats des projections de la masse salariale par exercice en euros constants de 2011.
S OURCE : Données de l’Ircantec, échantillon des cotisants nés au mois d’octobre et ayant cotisé pour la
première fois après 1970. Calcul des auteurs.
La dynamique de la masse salariale est similaire à celle du salaire moyen et dépend donc également fortement de l’hypothèse retenue pour la productivité réelle
du travail. L’écart entre les scénarios pessimistes (C, C’ et D) et les trois autres serait toutefois réduit via le rôle contracyclique de l’emploi non-titulaire qui conduit,
comme nous l’avons vu, à une hausse plus importante des effectifs pour ces scénarios. La masse salariale hors inflation des cotisants de l’Ircantec devrait ainsi
augmenter de 32,8 milliards en 2011 à 113,3 en 2060 pour le scénario A’, 104,8
pour le A, 93,0 pour le B, 86,5 pour le C, 76,5 pour le C’ et 68,0 pour le D.
La part de la masse salariale comprise entre un et huit plafonds de sécurité sociale
baisserait légèrement dans tous les scénarios. Cette baisse serait moins importante
pour les scénarios macroéconomiques pessimistes grâce à une proportion plus élevée de cotisants passant l’essentiel de leur carrière à l’Ircantec. Les rémunérations
dans la seconde tranche de cotisation devraient ainsi représenter 7 % de la masse
salariale d’ici 2060 selon les scénarios A’, A et B, 9 % des rémunérations selon les
141
Les carrières des non-titulaires du secteur public
F IGURE 7.3 – Projections de la seconde tranche de cotisation.
N OTES : Résultats des projections de la part de la masse salariale appartenant à la seconde tranche de
cotisation par exercice.
S OURCE : Données de l’Ircantec, échantillon des cotisants nés au mois d’octobre et ayant cotisé pour la
première fois après 1970. Calcul des auteurs.
scénarios C et C’ et 10 % selon le scénario D.
142
C HAPITRE 8
VARIANTES
INSTITUTIONNELLES DES
PROJECTIONS
Que ce soit via des politiques de titularisation, décentralisation, privatisation ou
affectant le champ d’intervention du régime, l’Ircantec est particulièrement sensible aux évolutions de l’environnement institutionnel. Cette spécificité se doit
d’être analysée afin d’étudier l’évolution future du régime. L’une des difficultés
majeures de cet exercice est liée à l’anticipation des réformes à venir dont les
formes peuvent être multiples et n’ont pour seule limite que l’imagination des décideurs publics. C’est pourquoi il a été décidé, afin de restreindre le nombre de
scénarios institutionnels, de se concentrer sur trois types de réformes ayant de
fortes chances d’être observées dans un avenir proche : la modification du champ
d’intervention de l’Ircantec prévue par l’article 51 de la loi no 2014-40, le phénomène de décentralisation et les politiques de titularisation et CDIsation. Nous
présentons dans ce chapitre les projections fondées sur des scénarios alternatifs
tenant compte de ces possibles évolutions institutionnelles. Une fois de plus, il a
été choisi de décomposer l’effet de chacune de ces réformes en les présentant tour
à tour et en n’utilisant que les hypothèses macroéconomiques du scénario médian
du Cor.
143
Les carrières des non-titulaires du secteur public
8.1
Modification du champ d’intervention de l’Ir-
cantec
L’affiliation des travailleurs à l’Ircantec reposait jusqu’à maintenant sur le caractère juridique de l’employeur. Ainsi, un salarié avec un contrat de droit privé travaillant pour un employeur public se voyait affilié à l’Ircantec. La promulgation de
la loi du 20 janvier 2014 dont l’article 51 est consacré à la réaffirmation du champ
d’intervention de l’Ircantec vient toutefois sonner le glas de cet équilibre qui avait
jusqu’alors favorisé le développement de l’Ircantec. En effet, selon ce même article, le critère d’affiliation des cotisants ne doit plus être le caractère juridique de
l’employeur mais celui du contrat de travail. Ainsi, l’effectif des cotisants devrait
être affecté par cette réforme à partir du 1er janvier 2014 et connaître le départ
de la plupart des individus travaillant dans la famille d’employeurs Autres.
8.1.1
Scénario sur le champ d’intervention de l’Ircantec
La réforme du champ d’intervention de l’Ircantec conduira à trois évolutions majeures pour le régime. D’une part, les travailleurs embauchés avec un contrat de
droit privé par un employeur public 47 seront affiliés à l’Arrco ou à l’Agirc à partir
du premier janvier 2017. De façon symétrique, cela conduira également au transfert des nouveaux salariés dont le contrat est public et l’employeur privé des régimes complémentaires de l’Arrco et de l’Agirc vers l’Ircantec 48 . Enfin, tout changement de la situation juridique d’un employeur (fusion, changement de nature
juridique, etc.) entraîne dès 2014 la bascule immédiate des contrats de droit privé
de l’Ircantec vers l’Arrco ou l’Agirc. En ce qui concerne l’évaluation des conséquences de cette réforme, nous ne pouvons analyser que le cas de la sortie des cotisants dont les contrats sont de droit privé et les employeurs publics. Autrement
dit, les résultats que nous reportons ici ne tiennent pas compte du transfert des
futurs cotisants de l’Arrco ou l’Agirc, ni des possibles changements de la situation
47. Le terme d’employeur public fait ici référence à l’ensemble des employeurs dont les salariés sont, au moins
en partie, affiliés à l’Ircantec. Sont ainsi également inclus certains employeurs privés dont le capital est en partie
public.
48. Cela sera probablement le cas des enseignants du privé.
144
Variantes institutionnelles des projections
juridique des employeurs. Pour ce faire, l’Ircantec a pu évaluer à l’aide des DADS
la part des cotisants sous contrat de droit privé pour chaque sous-famille d’employeurs en 2011. En utilisant la composition des familles d’employeurs par sousfamille d’employeurs pour cette même année, nous en avons déduit le nombre de
cotisants qui auraient été affectés par la loi du 20 janvier 2014 si celle-ci avait
été effective en 2011. Dès lors, les projections sont effectuées en supposant que
la part des cotisants sous contrat privé pour chacune des cinq familles modélisées
est constante au cours du temps et telle que calculée à partir des DADS de 2011.
Nous réduisons alors simplement des projections obtenues à partir des scénarios
du Cor les recrutements sous contrat de droit privé à partir de 2017, comme prévu
par l’article 51. La distribution des cotisants de droit privé par sous-famille d’employeurs pour la famille Autres est fournie en annexe à la page 176. Le taux estimé
par l’Ircantec pour les cotisants des trois fonctions publiques était de 4,8 %.
8.1.2
Evolution à l’horizon 2060
Le transfert des travailleurs sous contrat de droit privé vers les régimes de l’Agirc et
de l’Arrco à partir de 2017 sera synonyme pour l’Ircantec d’une baisse de ses effectifs. Selon nos estimations et en reprenant les projections macroéconomiques du
scénario médian du Cor, l’effectif des cotisants serait réduit d’environ 89 000 individus dès 2017. Dans la mesure où seuls les individus nouvellement recrutés sont
affiliés à l’Arrco (ou Agirc), l’effet de la réforme se ferait de plus en plus important
au fur et à mesure que l’on se rapproche de l’horizon maximal des projections.
Ainsi, en 2060 le nombre d’individus transférés vers les régimes complémentaires
du secteur privé serait beaucoup plus important et s’élèverait à environ 264 000
individus.
Le non-remplacement des cotisants avec des rémunérations importantes dans la
famille Autres, c’est-à-dire les cotisants avec une ancienneté élevée dans cette
même famille, conduira progressivement à une baisse du salaire moyen qui affectera à son tour la masse salariale. En comparaison d’une situation sans application
de la loi du 20 janvier 2014, la masse salariale baisserait ainsi d’environ 0,57 mil145
Les carrières des non-titulaires du secteur public
F IGURE 8.1 – Contrats privés et effectif des cotisants.
N OTES : Résultats des projections de l’effectif des cotisants par exercice pour le
scénario sur le champ d’intervention de l’Ircantec. Les hypothèses macroéconomiques sont celles du scénario médian du Cor.
S OURCE : Données de l’Ircantec, échantillon des cotisants nés au mois d’octobre et
ayant cotisé pour la première fois après 1970. Calcul des auteurs.
liards d’euros dès 2017 et de 11,9 milliards en 2060. La croissance extrêmement
importante de cet écart entre les deux scénarios s’explique d’une part par l’effet
progressif de la réforme qui ne conduit à transférer que les cotisants nouvellement
recrutés ; mais également par l’évolution des cotisants affectés par cette réforme :
alors qu’en 2017 la réforme ne concerne que les individus qui seraient entrés à
l’Ircantec cette même année et dont les rémunérations auraient été relativement
faibles, elle affecte également en 2060 les individus qui auraient dû entrer à l’Ircantec durant les 43 années précédentes et qui auraient connu des rémunérations
plus importantes grâce à la progression salariale.
Cette même évolution explique également que les effets sur la part des rémunérations appartenant à la seconde tranche de cotisation sont négligeables à court
terme. En effet, dans la mesure où les cotisants travaillant dans la famille Autres
et dont les rémunérations sont suffisamment importantes pour cotiser dans la seconde tranche sont principalement des individus en milieu et fin de carrière, il
faut attendre une vingtaine d’années avant que la part des rémunérations dans la
seconde tranche soit affectée par la réforme. La baisse en 2060 serait néanmoins
146
Variantes institutionnelles des projections
F IGURE 8.2 – Contrats privés et masse salariale.
N OTES : Résultats des projections de la masse salariale par exercice pour le scénario sur le champ d’intervention de l’Ircantec. Les hypothèses macroéconomiques
sont celles du scénario médian du Cor. Les projections sont exprimées en euros
constants de 2011.
S OURCE : Données de l’Ircantec, échantillon des cotisants nés au mois d’octobre et
ayant cotisé pour la première fois après 1970. Calcul des auteurs.
importante puisque la part de la seconde tranche de cotisation dans la masse salariale ne serait plus que 5,9 %, soit 0,9 points de pourcentage en moins par rapport
à une situation sans réforme.
8.2
La décentralisation
On a également assisté en janvier 2014 à la mise en place du troisième acte de décentralisation via la promulgation de la loi de modernisation de l’action publique
territoriale et d’affirmation des métropoles. Ce phénomène de décentralisation,
qui a été instauré en France par les lois Defferre votées en 1982 par le gouvernement Mauroy et poursuivi avec la réforme constitutionnelle de 2003, affecte
directement l’Ircantec via la délocalisation des compétences administratives de
l’État vers des entités locales, et donc une réorganisation de la main d’œuvre publique. À minima, deux canaux peuvent jouer sur l’effectif des cotisants. D’une
part, on peut supposer qu’un État centralisé implique une plus forte spécialisation
de l’emploi public. Ainsi, la délégation de compétences administratives à des em-
147
Les carrières des non-titulaires du secteur public
ployés multi-taches dans les collectivités peut conduire à une hausse de l’emploi
public. D’autre part, le recours à l’emploi non-titulaire n’est pas identique dans
les trois fonctions publiques. En effet, entre 1971 et 2011, la part des affiliés à
Ircantec dans la fonction publique d’État était très nettement inférieure (environ
15 % en équivalent temps plein) à celle dans la fonction publique territoriale
(environ 34 %). En conséquence, en supposant que ces caractéristiques tiennent
plus aux politiques des ressources humaines qu’aux emplois eux-mêmes, on doit
également s’attendre à une hausse de l’effectif des cotisants lors du processus de
décentralisation (à niveau d’emploi public donné).
8.2.1
Scénarios de décentralisation
Afin d’évaluer l’effet du processus de décentralisation en projection, nous avons
retenu trois scénarios reprenant les hypothèses macroéconomiques du scénario
médian du Conseil d’orientation des retraites :
Un scénario de décentralisation haut : Le processus de décentralisation continuera lors de la prochaine décennie (2011–2020) de façon identique à ce que
nous avons observé sur la dernière décennie (2001–2010), puis se stabilisera.
Ce scénario de décentralisation suppose ainsi que les contraintes budgétaires pesant sur les employeurs de la fonction publique territoriale seront suffisamment
souples pour absorber le surplus d’employés auxquels ils feront face. Un scénario
alternatif, dans lequel les employeurs de la fonction publique territoriale seraient
au contraire financièrement contraints, est ainsi analysé en annexe à la page 210.
Un scénario de décentralisation médian : Le processus de décentralisation que
l’on a connu a atteint son niveau stationnaire dès 2011 et reste constant. Ce scénario correspond au scénario macroéconomique médian du Cor que nous avons
présenté dans le chapitre 3.
Un scénario de décentralisation bas : À l’inverse, ce scénario reprend une hypothèse de concentration qui devrait progressivement ramener la situation en 2020
à celle d’avant la mise en place de la réforme constitutionnelle.
148
Variantes institutionnelles des projections
8.2.2
Evolution à l’horizon 2060
Comme on peut le constater à partir de la figure 8.3, la question de la décentralisation est centrale pour les projections de l’Ircantec.
F IGURE 8.3 – Décentralisation et effectif des cotisants.
N OTES : Résultats des projections de l’effectif des cotisants par exercice pour les
scénarios de décentralisation. Les hypothèses macroéconomiques sont celles du
scénario médian du Cor.
S OURCE : Données de l’Ircantec, échantillon des cotisants nés au mois d’octobre et
ayant cotisé pour la première fois après 1970. Calcul des auteurs.
Le scénario de décentralisation implique une hausse substantielle de l’effectif des
cotisants qui passerait de 2,65 millions en 2011 à 3,33 en 2060, soit une croissance totale de 25,7 % largement supérieure à la simple évolution qui serait due
aux facteurs macroéconomiques (9,8 %). À l’inverse, le scénario de concentration
réduirait l’effectif à 2,53 millions de cotisants en 2060, soit une croissance négative de 4,5 % entre 2011 et 2060. Naturellement, la composition de l’effectif
par famille d’employeurs serait affectée : le scénario de décentralisation provoquerait une hausse de la part des effectifs dans la fonction publique territoriale
(45,3 % des cotisants en 2060 contre 41,6 % avec le scénario médian), alors
qu’à l’inverse le scénario de concentration impliquerait une baisse (37,1 % des
effectifs en 2060). Ces bouleversements dans la composition du stock de cotisants
provoqueraient une baisse du salaire moyen puisque les rémunérations sont en
moyenne plus faibles dans la fonction publique territoriale 49 . L’effet final sur la
49. Lors de l’analyse rétrospective, nous avons montré que les rémunérations étaient en moyenne de 27 % du
149
Les carrières des non-titulaires du secteur public
masse salariale serait ainsi moins important que pour l’effectif des cotisants. Une
décentralisation accrue impliquerait en effet une hausse de la masse salariale de
32,8 milliards en 2011 à 104 milliards en 2060 , alors qu’une concentration de
l’État la verrait passer à 83 milliards.
F IGURE 8.4 – Décentralisation et masse salariale.
N OTES : Résultats des projections de la masse salariale par exercice pour les scénarios de décentralisation. Les hypothèses macroéconomiques sont celles du scénario
médian du Cor. Les projections sont exprimées en euros constants de 2011.
S OURCE : Données de l’Ircantec, échantillon des cotisants nés au mois d’octobre et
ayant cotisé pour la première fois après 1970. Calcul des auteurs.
En ce qui concerne la part des rémunérations appartenant à la seconde tranche
de cotisation, celle-ci ne serait quasiment pas affectée par le phénomène de décentralisation. Elle resterait ainsi à 6,9 % pour le scénario de décentralisation et
n’augmenterait que de 0,2 points avec le scénario de concentration.
8.3
Les titularisations et CDIsations
La dernière variante institutionnelle que nous étudions porte sur les titularisations. Celles-ci peuvent prendre deux formes : les titularisations régulières par
voie de concours et reconnaissance des acquis professionnels et les titularisations
exceptionnelles prenant place dans le cadre de plans de titularisation ayant pour
objectif de réduire la précarité de l’emploi public. Ces deux types de titularisation
PSS dans la FPT contre 35 % dans la FPE, 47 % pour la FPH et 46 % pour la famille Autres entre 1992 et 2011.
150
Variantes institutionnelles des projections
entrent dans le modèle de projection. Les premières sont supposées endogènes,
c’est-à-dire qu’elles interviennent indirectement à travers la modélisation des fonctions de survie des cotisants à l’Ircantec. La prise en compte des secondes nécessite
quant à elle des scénarios spécifiques. Nous nous concentrons donc uniquement
sur ces dernières dans les scénarios présentés dans cette partie. Finalement, nous
étudions les conséquences du remplacement des plans de titularisation par des
politiques en faveur de la CDIsation des non-titulaires.
8.3.1
Scénarios de titularisation
L’effet des plans de titularisation sur l’effectif des cotisants depuis 1975 a fait
l’objet d’une analyse approfondie lors de l’analyse rétrospective (à la page 89).
Il avait ainsi été montré à l’aide de méthodes économétriques que la titularisation d’un cotisant qui n’aurait pas été titularisé en dehors d’un plan conduit au
départ de trois cotisants de l’Ircantec. Cet effet, supérieur à un effet mécanique
de un pour un, se justifie par les contraintes économiques que subissent les employeurs dans la mesure où le coût relatif d’un titulaire est supérieur à celui d’un
non-titulaire ; mais également par le fait que les non-titulaires se succèdent sur un
même emploi, contrairement aux agents titulaires. La construction des projections
reprend cette hypothèse d’impact d’une titularisation exogène pour 3,25 cotisants
en moins. Les départs sont ensuite effectués selon la probabilité que la titularisation concerne un cotisant étant donné la famille d’employeurs où il travaille, son
ancienneté et le fait qu’il ait déjà connu ou non un épisode de cotisation 50 . Nous
faisons ainsi implicitement l’hypothèse, cohérente avec les explications que nous
venons de mentionner, que les individus quittant l’Ircantec sans être titularisés
sont, du point de vue de leur famille d’employeurs, de leur ancienneté et de leur
comportement de cotisation (nouveau ou retour), identiques aux cotisants qui ont
été titularisés.
Trois scénarios sont explorés. Ils varient par l’ampleur du plan de titularisation
50. Ces probabilités ont été calculées à partir de l’échantillon apparié des données de l’Ircantec et de l’EIC sur
les individus se dirigeant vers le secteur public (titulaire) après avoir cotisé à l’Ircantec entre 1971 et 2007.
151
Les carrières des non-titulaires du secteur public
qu’ils simulent. Le premier scénario aboutit à 10 000 titularisations exogènes par
an de 2015 à 2017 (inclus). Ce premier plan de titularisation, d’ampleur relativement modeste, est similaire au plan Sapin de 2001. Le second scénario simule un
plan de titularisation deux fois plus important que le premier, de 20 000 titularisations par an entre 2015 à 2017. Il se rapproche ainsi des titularisations ayant
ayant été observées dans le cadre du plan Perben en 1996. Finalement, le dernier
scénario porte sur un plan de titularisation beaucoup plus important, similaire
aux plans Peyronnet et Le Pors mis en place durant les années 1970 et 1980. On
observerait cette fois-ci 50 000 titularisations par an, toujours entre 2015 et 2017.
Il est à noter, une fois de plus, que l’ampleur du plan de titularisation fait ici référence uniquement aux titularisations exogènes, c’est-à-dire aux titularisations qui
n’auraient pas eu lieu en dehors de ce plan.
8.3.2
Titularisations et évolution du régime à l’horizon 2060
Les titularisations ont uniquement un effet transitoire sur l’effectif des cotisants.
En effet, en augmentant le flux instantané de cotisants quittant l’Ircantec, le stock
des cotisants est réduit par rapport à un scénario contrefactuel dans lequel on
n’aurait pas observé de titularisations. Cet écart s’estompe cependant au fur et à
mesure que les individus qui ont été titularisés quittent également le régime complémentaire dans le scénario sans titularisation. Autrement dit, les titularisations
conduisent du point de vue de l’Ircantec au départ prématuré de certains cotisants.
Leur effet sur l’effectif des cotisants n’est ainsi que transitoire puisque ces cotisants
auraient de toute façon été amenés à quitter l’Ircantec et à être remplacés par de
nouveaux individus.
152
Variantes institutionnelles des projections
F IGURE 8.5 – Titularisation et effectif des cotisants.
N OTES : Résultats des projections de l’effectif des cotisants par exercice pour les
scénarios de titularisation. Les hypothèses macroéconomiques sont celles du scénario médian du Cor.
S OURCE : Données de l’Ircantec, échantillon des cotisants nés au mois d’octobre et
ayant cotisé pour la première fois après 1970. Calcul des auteurs.
Les titularisations affectent l’effectif des cotisants à partir de 2016. Ce décalage
d’une année est dû au pas annuel de la modélisation : les titularisations au cours
de l’année conduisent au départ des cotisants l’année suivante. Sans surprise, la
titularisation de 10 000 cotisants en 2015 provoque le départ de 32 500 cotisants
en 2016. Cet effet traduit directement l’hypothèse d’impact qui a été retenue pour
la modélisation des titularisations. Il apparaît également que l’effet d’un plan de
titularisation atteint son maximum un an après sa fin. L’effet maximal des trois
scénarios de titularisation est ainsi en 2018 où l’écart par rapport au scénario
médian est de 71 300 cotisants pour le premier, de 142 400 pour le second et
de 356 300 pour le troisième. Le retour vers le scénario contrefactuel s’effectue
ensuite au rythme du départ des cotisants. Ainsi, dès 2040 la différence entre le
scénario médian et le premier scénario de titularisation n’est plus que de 3 600
cotisants. Pour le second et troisième scénario de titularisation, la différence est
respectivement de 7 300 et 18 200 cotisants.
En affectant plus les cotisants de la fonction publique d’État et ceux ayant une
ancienneté inférieure à trois ans, les titularisations changent marginalement la
composition du stock de cotisants, ce qui conduit à une très faible baisse du sa153
Les carrières des non-titulaires du secteur public
laire moyen. On observerait alors une baisse de la masse salariale en 2018 de 42,0
milliards pour le scénario médian du Cor à 40,6 pour le premier scénario de titularisation, 39,3 pour le second et 35,2 pour le dernier. Comme on peut le constater
à partir de la figure 8.6, le retour vers le scénario médian s’effectue ensuite au
rythme du départ des cotisants.
F IGURE 8.6 – Titularisation et masse salariale.
N OTES : Résultats des projections de la masse salariale par exercice pour les scénarios de décentralisation. Les hypothèses macroéconomiques sont celles du scénario
médian du Cor. Les projections sont exprimées en euros constants de 2011.
S OURCE : Données de l’Ircantec, échantillon des cotisants nés au mois d’octobre et
ayant cotisé pour la première fois après 1970. Calcul des auteurs.
En ce qui concerne la part des rémunérations appartenant à la seconde tranche
de cotisation, l’effet des titularisations est plus complexe. Dans un premier temps,
elles se traduiraient par le départ de cotisants relativement jeunes et donc une
hausse de cette part. Cependant, après une dizaine d’année, le départ des cotisants
qui se sont vus titularisés implique un non-remplacement des individus avec une
ancienneté importante à l’Ircantec, et donc une baisse des rémunérations dans la
seconde tranche. Ainsi, 9,5 % des rémunérations en 2018 seraient dans la seconde
tranche de cotisation avec le premier scénario, 9,6 % avec le second et 10,0 avec
le troisième, taux qui se réduirait progressivement afin d’atteindre 6,8 % en 2060
avec les trois scénarios.
154
Variantes institutionnelles des projections
8.3.3
Scénarios de CDIsation
La mise en place du CDI de droit public en 2005 a instauré un outil supplémentaire afin de lutter contre la précarité des emplois des non-titulaires. Celui-ci s’est
notamment retrouvé au cœur du dernier plan de titularisation de 2012 qui devait
conduire à deux fois plus de CDIsations que de titularisations. Du point de vue
du régime de l’Ircantec, l’impact des titularisations n’est toutefois pas équivalent
à celui des CDIsations. En effet, alors que ces premières impliquent le transfert
des cotisants vers les regimes de retraite des agents titulaires, la CDIsation d’un
agent non titulaire implique son maintien à l’Ircantec pour le reste de sa carrière.
En favorisant la CDIsation aux politiques de titularisation, l’État risque ainsi de
chambouler la composition du stock des cotisants en accroissant la part des nontitulaires permanents au détriment des individus ne cotisant que quelques années
à l’Ircantec. L’évaluation des conséquences du développement des politiques de
CDIsation pour le régime et ses finances s’avère donc indispensable. Un tel exercice reste cependant difficile à appréhender dans la mesure où, en l’absence d’un
recul suffisant, il n’est pas possible de calibrer cette évaluation sur des plans de
CDIsation passés. Par conséquent, nous proposons deux variantes qui s’opposent
par l’ampleur des contraintes que les CDIsations font peser sur les employeurs et
a fortiori sur les futurs recrutements.
Afin de modéliser l’effet des CDIsations, nous supposons que celles-ci impliquent
un allongement considérable de la durée de cotisation des individus qu’elles affectent : lorsqu’un cotisant voit son contrat de travail transformé en CDI, il reste
en emploi non-titulaire jusqu’à la fin de sa carrière (c’est-à-dire jusqu’à 43 années
de cotisation). Ainsi, à titre d’exemple, un non-titulaire présent à l’Ircantec depuis 3 ans (sans interruption) et à qui on propose un CDI, continuera de cotiser
à l’Ircantec lors des 40 années à venir. Par ailleurs, partant de l’hypothèse que
les CDIsations seront à l’avenir un substitut aux titularisations, il est également
supposé pour la modélisation que les cotisants bénéficiant d’un CDI sont, du point
de vue de leur ancienneté dans le régime, de leur famille d’employeurs et de leur
comportement de cotisation, identiques aux individus qui ont été titularisés dans
155
Les carrières des non-titulaires du secteur public
le passé. Enfin, et comme cela a été constaté pour les titularisations, les plans de
CDIsations viennent très probablement contraindre les employeurs et donc changer leurs habitudes de recrutement. On peut en effet supposer que les CDIsations
réduisent le nombre de non-titulaires travaillant sur un même emploi 51 , ou encore qu’elles impliquent des contraintes budgétaires fortes pour les employeurs
qui se verraient alors contraints de limiter leur masse salariale. Nous proposons
ainsi deux variantes afin d’évaluer les conséquences des scénarios de CDIsation.
La première analyse l’effet des politiques de CDIsation sans tenir compte des possibles contraintes qu’elles pourraient impliquer pour les employeurs. La seconde
variante vient quant à elle compléter cette première version en supposant que
les contraintes pesant sur les employeurs auraient un effet de un pour un : lorsqu’un cotisant bénéficie d’un CDI, un autre cotisant sort des effectifs du régime de
l’Ircantec.
8.3.4
CDIsation et évolution du régime à l’horizon 2060
La figure 8.7 reporte l’évolution de l’effectif des cotisants obtenue lors de la simulation d’un plan de 20 000 CDIsations par an entre 2015 et 2017 (inclus). Il apparaît que l’évolution de très court terme est particulièrement sensible à l’hypothèse
que l’on retient afin de rendre compte des contraintes pesant sur les employeurs.
Ainsi, bien que la première variante, qui suppose que ces contraintes sont nulles,
conduit à une hausse de l’effectif de 9 300 cotisants en 2016, la seconde variante,
qui repose quant à elle sur une hypothèse d’impact de « un pour un », implique
une baisse de 10 700 cotisants lors de cette même année. La convergence entre
les deux variantes s’effectue ensuite progressivement au rythme du remplacement
des cotisants sortis prématurément dans la seconde variante. Finalement, l’effet
maximal de ce plan de CDIsation se ferait ressentir aux alentours de 2050 et représenterait un surplus de 59 000 cotisants avec la première variante et 56 000
avec la seconde. Passé cette date, les conséquences des CDIsations sur l’effectif
des cotisants se dissiperaient progressivement, avant de devenir nulles dès 2061.
51. Comme nous le savons, les non-titulaires, souvent à temps partiel ou en emploi seulement quelques mois,
peuvent être plusieurs à travailler sur un même emploi lors d’une année. Ainsi, en pérennisant les emplois avec
156
Variantes institutionnelles des projections
F IGURE 8.7 – CDIsation et effectif des cotisants.
N OTES : Résultats des projections de l’effectif des cotisants par exercice pour les
scénarios de CDIsation. Les hypothèses macroéconomiques sont celles du scénario
médian du Cor. La variante 1 correspond à un scénario de 20 000 CDIsations par
an entre 2015 et 2017 (inclus) et la version 2 à 20 000 CDIsations par an également en supposant cette fois-ci qu’elles impliquent des contraintes économiques
sur les employeurs qui doivent alors réduire leur nombre d’employés.
S OURCE : Données de l’Ircantec, échantillon des cotisants nés au mois d’octobre et
ayant cotisé pour la première fois après 1970. Calcul des auteurs.
En ce qui concerne l’effet des CDIsations sur la masse salariale des cotisants de
l’Ircantec, celui-ci serait relativement faible. En comparaison d’un scénario sans
CDIsations, la première variante conduirait à une hausse de deux milliards d’euros (hors inflation) en 2018. La hausse ne serait plus que d’un milliard avec la seconde variante de CDIsation. Les projections de ces deux variantes convergeraient
ensuite toutes deux afin d’atteindre 3,5 milliards d’euros en 2050. Une nouvelle
fois l’effet des CDIsations ne serait pas permanent et deviendrait nul après 2061.
Finalement, l’effet sur la part des rémunérations dans la seconde tranche de cotisation serait plus important. En effet, en augmentant la part des cotisants passant
l’essentiel de leur carrière à l’Ircantec, les CDIsations provoquent une augmentation progressive de l’ancienneté moyenne des cotisants présents à l’Ircantec et
donc de la part des rémunérations comprises dans la seconde tranche de cotisation. Ainsi, en 2050 8,2 % des rémunérations appartiendraient à la seconde
tranche de cotisation selon les deux variantes de CDIsation, alors que ce taux ne
serait que de 6,8 % dans le scénario médian du Cor sans CDIsations.
des contrats à durée indéterminée, on peut s’attendre à ce que le nombre moyen de cotisants par emploi baisse.
157
Les carrières des non-titulaires du secteur public
F IGURE 8.8 – CDIsation et masse salariale.
N OTES : Résultats des projections de la masse salariale par exercice pour les scénarios de CDIsation. Les hypothèses macroéconomiques sont celles du scénario
médian du Cor. Les projections sont exprimées en euros constants de 2011. La
variante 1 correspond à un scénario de 20 000 CDIsations par an entre 2015 et
2017 (inclus) et la version 2 à 20 000 CDIsations par an également en supposant
cette fois-ci qu’elles impliquent des contraintes économiques sur les employeurs
qui doivent alors réduire leur nombre d’employés.
S OURCE : Données de l’Ircantec, échantillon des cotisants nés au mois d’octobre et
ayant cotisé pour la première fois après 1970. Calcul des auteurs.
8.3.5
Synthèse des scénarios institutionnels
Les résultats des quatre variantes institutionnelles présentées dans le huitième
chapitre du rapport sont résumés dans le tableau suivant :
TABLEAU 8.1 – Projections à l’horizon 2060 avec les scénarios institutionnels
Cotisant
Masse salariale
Seconde tranche de cotisation
Scénario B
(contrefactuel)
2,9
93,0
6,4
Champ
d’intervention
2,6
81,1
4,8
Décentralisation
Concentration
Titularisations
CDIsations
3,3
104,0
7,2
2,5
82,9
5,9
2,9
92,8
6,3
2,9
93,6
6,6
N OTES : Le nombre de cotisants est exprimé en millions d’individus. La masse salariale et le montant de la seconde tranche
de cotisation sont exprimés en milliards d’euros de 2011. Les trois scénarios de titularisation aboutissant à des résultats
similaires en 2060, nous avons reporté que ceux issus du scénario de 50 000 titularisations par an entre 2015 et 2017. Pour
la même raison, seuls les résultats de la première variante de CDIsation sont présentés dans le tableau. S OURCE : Calculs
des auteurs.
La conclusion générale qui se dégage de l’analyse des différents scénarios institutionnels est que dans un environnement institutionnel relativement stable, le
régime de l’Ircantec devrait continuer de croître.
158
C ONCLUSION
GÉNÉRALE
Cette étude a passé en revue la structure et l’évolution de l’emploi non-titulaire en
France. Elle a abouti à l’élaboration d’un modèle de projection de l’effectif et de la
masse salariale pour le régime de retraite de l’Ircantec.
L’institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’État et des
collectivités publiques (Ircantec) s’adresse à une population particulière de cotisants. Contrairement à ce qu’il est d’usage pour le régime général du secteur
privé ou les autres régimes spéciaux du secteur public, l’Ircantec est généralement un régime de passage pour ses cotisants. Ces derniers, pour la plupart des
vacataires et contractuels dans la fonction publique, n’ont pas vocation à rester
dans des emplois non-titulaires et se dirigent généralement vers le secteur privé
ou sont titularisés après quelques années. Cette forte mobilité s’explique par le
caractère temporaire de l’emploi non-titulaire qui ne doit, par définition, pas être
permanent. Une analyse fine de la carrière des non-titulaires a toutefois permis
d’identifier l’existence de cotisants qui passent l’essentiel de leur carrière dans les
emplois de l’Ircantec. Ces individus, à l’image des praticiens hospitaliers, sont par
exemple des techniciens pour lesquels il n’existe pas de corps de titulaire. Cette
hétérogénéité importante des cotisants reste cependant difficile à appréhender
puisqu’elle ne se retrouve pas tant dans les caractéristiques individuelles et des
emplois des cotisants, que dans la place qu’occupe l’Ircantec dans leur carrière.
Ainsi, le modèle de projection que nous avons élaboré afin de guider les gestionnaires et administrateurs de l’Ircantec, veille a retranscrire cette dichotomie forte
dans la composition du stock de cotisants et s’éloigne ainsi des techniques de microsimulation usuelles reposant sur les caractéristiques individuelles des cotisants.
159
Les carrières des non-titulaires du secteur public
Les résultats des projections que nous avons effectuées à partir des scénarios économiques du Conseil d’orientation des retraites conduisent à une hausse de l’effectif des cotisants qui serait d’autant plus importante que le taux de chômage
structurel serait élevé. Cela traduit l’une des spécificités essentielles de l’emploi
non-titulaire qui, contrairement à l’emploi privé et à l’emploi public titulaire, a
un rôle contracyclique majeur. Il semblerait ainsi que lorsque la situation économique est favorable, l’État préfère assurer des emplois pérennes en réduisant le
recours aux non-titulaires, alors qu’au contraire lorsque la situation économique
se dégrade, l’emploi public devient un outil afin de lutter contre le chômage (via
par exemple le recours aux emplois aidés). Par ailleurs, nous avons également
souligné le rôle important des politiques de décentralisation qui se retrouvent à
nouveau au cœur de l’actualité grâce à la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles. Celle-ci devrait participer très
largement au développement de l’effectif et de la masse salariale des cotisants. Finalement, nous avons également pu évaluer l’effet de la réforme de janvier 2014
affectant le champ d’intervention de l’Ircantec. Dans le cadre du scénario macroéconomique médian du Conseil d’orientation des retraites, elle impliquerait le
départ d’environ 267 000 cotisants en 2060 et une baisse de la masse salariale
hors inflation de 12 milliards d’euros pour cette même année.
160
Annexes
161
Les carrières des non-titulaires du secteur public
162
A. T RAITEMENTS
COMPLÉMENTAIRES
DES DONNÉES
Des nombreuses corrections et reconstructions ont été effectuées sur les données
de l’Ircantec, de l’EIC et de l’enquête Emploi. Cette annexe décrit les principaux
changements qui ont été effectués. Afin de faciliter la lecture, ils sont présentés
dans l’ordre d’apparition du corps du rapport.
Reconstruction de la rémunération dans les données de l’Ircantec
La méthode utilisée afin de corriger les erreurs ou déclarations anormales pour
les rémunérations par tranche s’inspire à la fois de la méthode d’annualisation des
revenus de l’Ircantec et des corrections effectuées par l’EIC de 2005.
Le tableau ci-dessous synthétise les corrections appliquées lorsque des situations
anormales ont été repérées dans les données.
Par ailleurs, il est à noter l’existence de rémunérations négatives. Elles sont dues à
des corrections ex-post effectuées par l’Ircantec lorsqu’il existait des erreurs dans
les déclarations émanant des employeurs. Ne pouvant déterminer quelles déclarations étaient erronées, les rémunérations ont simplement été bornées à zéro.
53. Dans les faits, cette situation est possible en cas d’emploi multiple.
163
Les carrières des non-titulaires du secteur public
TABLEAU A.1 – Reconstruction de la rémunération.
Situation
Correction effectuée
Tranche A nulle, alors que la
tranche B est strictement positive 53 .
Le montant indiqué dans la tranche B a été
considéré comme étant la rémunération totale.
Il a donc été transféré dans la tranche A. Si ce
montant s’avérait supérieur au plafond de sécurité sociale, l’excédant était alors redistribué
dans la tranche B.
On remplace le montant déclaré par le montant du plafond de sécurité sociale.
Tranche A supérieure au plafond
de sécurité sociale, alors que la
tranche B est nulle.
Nombre de
corrections
6146
833
Caractérisation des activités annuelles dans l’EIC
Une extrapolation des activités annuelles des cotisants à partir des régimes de
retraite de base et complémentaires a permis de classer les activités entre emplois Ircantec, public (hors Ircantec), privé, chômage ou toute combinaison de ces
modalités. Pour ce faire, nous avons défini à l’aide de la législation en vigueur
l’ensemble des comptes de base permettant une affiliation à l’Ircantec. En croisant
cette information avec une classification entre public et privé des régimes de base
et complémentaires, les différents domaines d’activité des cotisants ont pu être
identifiés. Les règles retenues pour la caractérisation des comptes sont résumées
dans les tableaux A.2 et A.3. Celles portant sur l’identification des activités sont
disponibles dans l’encadré A-1 ci-dessous.
164
Annexes
Encadré A-1 : Identification des activités annuelles dans l’EIC
– Si l’individu n’a pas cotisé à l’Ircantec dans l’année, ses activités sont, en fonction de la classification des régimes de base, soit privées, soit publiques, soit les deux.
– Si l’individu a pour seul régime complémentaire l’Ircantec, il est classé comme Ircantec.
– Si l’individu a une ou plusieurs complémentaire(s) privée(s) en plus de l’Ircantec, et pas de
complémentaire publique :
Dans le cas où tous les régimes de base sont privés (compatibles avec l’Ircantec ou non) :
Ircantec + Privé
Dans le cas où des bases privées (compatibles ou non compatibles) côtoient uniquement des
bases publiques compatibles avec l’Ircantec : Ircantec + Privé
Dans le cas où des bases privées côtoient des bases publiques qui ne sont pas toutes compatibles : Ircantec + Privé + Public
– Si l’individu a une ou plusieurs complémentaire(s) publique(s) en plus de l’Ircantec, et pas de
complémentaire privée :
Dans le cas où tous les régimes de base sont publics (compatibles avec l’Ircantec ou non) :
Ircantec + Public
Dans le cas où des bases publiques (compatibles ou non compatibles) côtoient uniquement
des bases privées compatibles avec l’Ircantec : Ircantec + Public
Dans le cas où des bases publiques côtoient des bases privées qui ne sont pas toutes compatibles : Ircantec + Privé + Public
– Si l’individu a une ou plusieurs complémentaire(s) publique(s) en plus de l’ircantec, et une ou
plusieurs complémentaire(s) privée(s) : Ircantec + Public + Privé
165
Les carrières des non-titulaires du secteur public
TABLEAU A.2 – Classification des régimes complémentaires présents dans
l’EIC.
Régimes
Public
Ircantec
MSA (Mutualité sociale agricole)
RSI (Régime social des indépendants)
CRN (Caisse de retraite des notaires)
CAVOM (Caisse de retraite des officiers ministériels)
CARMF (Caisse autonome de retraite des médecins de France)
CARCDSF (Caisse autonome de retraite des chirurgiens-dentistes et sages-femmes)
CAVP (Caisse d’assurance vieillesse des pharmaciens)
CARPIMKO (Caisse autonome de retraite et de prévoyance des infirmiers,
masseurs kinésithérapeutes, pédicures-podologues, orthophonistes et orthoptistes)
CARPV (Caisse autonome de retraite et de prévoyance des vétérinaires)
IRCEC (Institution de retraite complémentaire de l’enseignement et de la création)
CAVAMAC (Caisse d’allocation vieillesse des agents généraux et des mandataires non
salariés de l’assurance et de la capitalisation)
CIPAV (Caisse interprofessionnelle de la prévoyance et d’assurance vieillesse)
CAVEC (Caisse d’assurance vieillesse des experts-comptables)
CNBF (Caisse nationale des barreaux français)
RAFP (Retraite additionnelle de la fonction publique)
CRPNPAC (Caisse de retraite du personnel naviguant professionnel de l’aéronautique civile)
AGIRC (Association générale des institutions de retraite complémentaire des cadres)
ARRCO (Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés)
166
✓
✓
Privé
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
Annexes
TABLEAU A.3 – Classification des régimes de base présents dans l’EIC.
Régimes
Public
CNAV (Caisse Nationale d’assurance vieillesse)
SRE (Service des retraites de l’État
MSA (Mutualité sociale agricole)
CNRACL (Caisse nationale de retraite des agents des
collectivités locales)
FSPOEIE (fonds spécial des pensions des ouvriers des
établissements industriels d’État)
RSI (régime sociale des indépendants)
CPR SNCF (Caisse de prévoyance et de retraite du personnel
de la Société nationale des chemins de fer français)
ENIM (Établissement national des invalides de la marine)
CANSSM (Caisse autonome nationale de la Sécurité
sociale dans les mines)
CAVIMAC (Caisse d’assurance vieillesse invalidité
et maladie des cultes)
IEG (pensions industries électriques et gazières)
CRP RATP (Caisse de retraites du personnel de la
Régie autonome des transports parisiens)
CRPCEN (Caisse de retraite et de prévoyance des
clercs et employés de notaires)
Caisse de réserve des employés de la Banque de France
RAVGDT (Régime d’allocations viagères des gérants de tabacs)
CRN (Caisse de retraite des notaires)
CAVOM (Caisse de retraite des officiers ministériels)
CARMF (Caisse autonome de retraite des médecins de France)
CARCDSF (Caisse autonome de retraite des
chirurgiens-dentistes et sages-femmes)
CARPIMKO (Caisse autonome de retraite et de prévoyance
des infirmiers, masseurs kinésithérapeutes,
pédicures-podologues, orthophonistes et orthoptistes)
CARPV (Caisse autonome de retraite et de prévoyance
des vétérinaires)
IRCEC (Institution de retraite complémentaire de
l’enseignement et de la création)
CAVAMAC (Caisse d’allocation vieillesse des agents
généraux et des mandataires non salariés de
l’assurance et de la capitalisation)
CIPAV (Caisse interprofessionnelle de la prévoyance
et d’assurance vieillesse)
CAVEC (Caisse d’assurance vieillesse des experts-comptables)
CNBF (Caisse nationale des barreaux français)
✓
Privé
Ircantec
✓
✓
✓⋆
✓
✓
✓⋆
✓
✓⋆
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
✓
Les statuts d’emploi étant disponibles pour ces régimes, l’affiliation à l’Ircantec était conditionnelle à un emploi de non-titulaire ou de titulaire sans droit à pension d’un régime de la fonction
publique.
⋆
167
Les carrières des non-titulaires du secteur public
Pondération dans l’enquête Emploi pour la fonction
publique
TABLEAU A.4 – Pondération dans l’enquête Emploi pour la fonction publique.
Années
1982
1983
1984
1985
1986
1987
1988
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
Moyenne
FPE
93 %
93 %
91 %
92 %
95 %
93 %
95 %
96 %
76 %
61 %
54 %
60 %
58 %
57 %
55 %
53 %
54 %
51 %
51 %
52 %
49 %
99 %
96 %
67 %
65 %
55 %
72 %
FPT et FPH
69 %
73 %
69 %
76 %
79 %
77 %
75 %
74 %
89 %
92 %
99 %
101 %
107 %
108 %
107 %
106 %
105 %
104 %
104 %
100 %
101 %
81 %
80 %
104 %
106 %
114 %
92 %
Ensemble
83 %
85 %
82 %
86 %
89 %
87 %
86 %
87 %
82 %
75 %
74 %
78 %
79 %
80 %
78 %
77 %
77 %
75 %
75 %
74 %
72 %
91 %
89 %
85 %
84 %
84 %
81 %
N OTE : Rapports du nombre d’équivalent temps plein
dans les fonctions publiques à partir de l’enquête Emploi,
sur la base du nombre d’équivalent temps plein renseigné
dans Bozio and Grenet (2010).
168
Annexes
Diplômes et emplois dans la population active et
pour les titulaires de la fonction publique
Les figures présentés ci-dessous accompagnent la partie consacrée aux caractéristiques individuelles des cotisants de l’Ircantec de ce rapport (partie 1.3.2). Ils
portent sur l’ensemble de la population active occupée ou les titulaires de la fonction publique (hors FPH avant 2002), offrant ainsi une base de comparaison pour
les cotisants de l’Ircantec.
A.0.6
Population française active
F IGURE A.1 – Niveau d’éducation et professions en France.
A. Diplômes
169
Les carrières des non-titulaires du secteur public
B. Professions
N OTE : Calculé sur l’ensemble de la population active.
S OURCES : Enquête Emploi, calcul des auteurs.
170
Annexes
Titulaires de la fonction publique
F IGURE A.2 – Niveau d’éducation et professions des titulaires de la fonction publique.
A. Diplômes
B. Professions
N OTE : Pour les titulaires de la fonction publique. Avant 2002, les titulaires de la fonction publique hospitalière étaient exclus.
S OURCES : Enquête Emploi, calcul des auteurs.
171
Les carrières des non-titulaires du secteur public
Construction des rémunérations en équivalent temps
plein et traitement des valeurs aberrantes
Les rémunérations en équivalent temps plein sont les rémunérations annuelles,
telles que calculées dans l’annexe 8.3.5 (page 163), pondérées par un coefficient
d’activité. Ce dernier est calculé comme le produit du taux d’activité hebdomadaire et du taux d’activité dans l’année.
● Le taux d’activité dans l’année est mesuré à partir des dates de début et fin
d’emploi. Il est égal au nombre de mois travaillés dans l’année divisé par 12.
● Le taux d’activité hebdomadaire est habituellement renseigné dans les données
Ircantec. Cependant, à cause des valeurs manquantes, il a dû être complété par
les informations sur les formes d’emploi. Ainsi, dès lors que nous ne disposions
pas de taux d’activité, les règles suivantes ont été appliquées :
– Pour les emplois à temps plein, le taux d’activité hebdomadaire est supposé
égal à un.
– Pour les emplois d’intermittent, à domicile, saisonniers, de vacataire et occasionnels, le taux d’activité hebdomadaire est supposé égal à 0,5.
– Pour les temps partiel, les « plafond de sécurité sociale réduit » et les temps
non complet, le coefficient est supposé égal à 0,5.
Le coefficient d’activité obtenu est calculé au niveau du contrat–année. Ainsi,
lorsque plusieurs emplois coexistent durant une même année, le coefficient d’activité annuel consiste en la somme des coefficients d’activité calculés au niveau des
contrat–année. Nous l’avons borné à un.
Enfin, la rémunération en équivalent temps plein est donnée par :
Rému ETP =
Rémunération annuelle
Coefficient d’activité annuel
Afin d’illustrer la méthode de calcul des équivalents temps plein, prenons l’exemple
d’un cotisant ayant travaillé à temps partiel trois mois dans l’année et pour lequel
nous ne disposons pas de renseignement sur son taux d’activité hebdomadaire.
Le taux d’activité annuel de ce cotisant est alors d’un quart (c’est-à-dire 3/12).
172
Annexes
Puisque nous ne disposons pas du taux d’activité hebdomadaire de ce cotisant,
mais que nous savons qu’il travaille à temps partiel, son taux hebdomadaire est
renseigné à 0.5. Le coefficient d’activité est finalement égal à un huitième (c’està-dire 0.5 × (1/4)).
De façon similaire, un cotisant à temps plein, ayant travaillé dix mois dans l’année
à temps plein a un coefficient d’activité de cinq sixièmes.
La distribution des rémunérations en équivalent temps plein ainsi calculée est
caractérisée par des valeurs aberrantes dans les queues de distribution (c’est-àdire pour les valeurs extrêmes), dommageables à l’analyse des moyennes. Il a
donc été décidé de corriger ces valeurs par la méthode du double intervalle de
confiance. Sont alors exclues de l’analyse les rémunérations qui n’appartiennent
ni à l’intervalle de confiance des rémunérations pour une années donnée, ni à
celui de la sous-famille d’employeur.
Au vue de la distribution des rémunérations au sein de ces deux ensembles, nous
avons supposé que les rémunérations en ETP suivent une distribution Gaussienne.
Les intervalles sont alors définis par :
CIAnnée=i = [Rému ETPi − 1.96 × σi ;
CIEmployeur=j = [Rému ETPj − 1.96 × σj ;
Rému ETPi + 1.96 × σi ]
Rému ETPj + 1.96 × σj ]
Avec Rému ETPi la moyenne des rémunérations pour l’année i et σi leur écart
type.
Ainsi, toutes les rémunérations telles que :
Rému ETPij ∉ CIAnnée=i
et
Rému ETPij ∉ CIEmployeur=j
sont exclues de l’analyse.
173
Les carrières des non-titulaires du secteur public
Correction du taux de nouveaux cotisants
F IGURE A.3 – Part des nouveaux cotisants parmi le flux entrant.
N OTES : Les nouveaux cotisants sont les cotisants qui entrent pour la première fois
à l’Ircantec. S OURCE : Données de l’Ircantec, échantillon des cotisants nés au mois
d’octobre et ayant cotisé pour la première fois après 1971. Calcul des auteurs.
La baisse tendancielle de la part des nouveaux cotisants parmi le flux entrant observée avant les années 90 est due à la sélection des cotisants entrés après 1971 à
l’Ircantec. Ainsi, nous devons contrôler cet effet supposé exogène lors de l’estimation de ce taux. Pour cela, on procède à une estimation préliminaire utilisant une
tendance quadratique. La date de cassure à partir de laquelle l’effet de la sélection
est négligeable n’étant pas connue, nous la choisissons à partir d’un processus récursif. L’idée de ce processus peut être résumée ainsi : l’effet de la sélection doit
être pris en compte tant que les données ne s’éloignent pas durablement de la
tendance quadratique. Une des méthodes afin d’obtenir cette date est d’utiliser récursivement la régression suivante et de déterminer la période à partir de laquelle
la variable 1t>t̄ est significative :
P artN ouveauxt = α + β1 1t>t̄ + β2 Xt + εt
Où Xt est la tendance quadratique et 1t>t̄ est une indicatrice temporelle. En effectuant cette estimation de façon récursive en augmentant au fur et à mesure t̄, on
obtient une année à partir de laquelle il n’est plus nécessaire de corriger l’effet de
174
Annexes
la sélection. L’estimation (5.2) du modèle de projection est alors effectuée sur Yt
tel que :
⎧
⎪
⎪
⎪ P artN ouveauxt
Yt = ⎨
⎪
ˆ
⎪
⎪
⎩ P artN ouveauxt − β2 Xt − α̂
si t ≥ t̄
sinon
Répartition de la famille d’employeurs Autres
La prise en compte de la loi portant création de la SA La Poste, qui implique
le maintien des contractuels de La Poste à l’Ircantec et l’affiliation des nouveaux
embauchés à l’Agirc et l’Arrco dès 2011, nous a conduit à isoler la modélisation
de cet employeur. Cette étape s’avère en effet indispensable afin de modéliser le
départ progressif des cotisants de La Poste dans tous les scénarios prospectifs.
De plus, dans le but d’analyser le plus finement possible l’effet des réformes à venir
sur le champ d’intervention de l’Ircantec, il a été choisi de scinder en deux catégories les autres employeurs de la famille Autres afin d’isoler les employeurs qui
seront fortement affectés par la loi du 20 janvier 2014 – c’est-à-dire les employeurs
dont la plupart des employés cotisant à l’Ircantec ont un contrat de travail de droit
privé. Pour ce faire, l’Ircantec a estimé la part des cotisants avec un contrat privé
par sous-famille d’employeurs à l’aide des DADS de 2011 (voir le tableau A.5).
Nous avons alors utilisé cette distribution afin d’isoler les employeurs dont plus
de 90 % des contrats étaient privés dans la famille Autres B.
Finalement, la famille Autres est ainsi découpée en trois catégories : la catégorie
Autres A qui comprend les employeurs qui seront peu ou pas affectés par le changement du spectre d’intervention suite à la loi de janvier 2014 ; la catégorie Autres
B qui regroupe à l’inverse les employeurs qui seront fortement affectés par cette
loi ; et finalement la catégorie Autres C qui correspond aux emplois de La Poste et
dont le seul objectif est de modéliser le départ progressif de cet employeur dans
les projections. Le tableau A.5 résume les regroupements qui ont été fait. Les estimations fournies par l’Ircantec pour les contrats privés et le poids respectif de
chacune des sous-familles d’employeurs dans les nouvelles catégories Autres A,
Autres B et Autres C y sont également présentés.
175
Les carrières des non-titulaires du secteur public
TABLEAU A.5 – Redécoupage de la famille d’employeurs Autres.
Famille
Autres A
Sous-famille d’employeurs
Banque de France
GIP et groupements
Établissement relevant des IEG
Organismes Sociaux ou Professionnels et Sociétés anonymes
Pôle Emploi (+ ex ANPE)
n.r.
Autres B
Sociétés audiovisuelles
EDF
Gaz de France
Régies et EPIC
Associations
Autres C
Anciens PTT, La Poste et France Telecom
Contrats privés
27,6 %
34,0 %
27,6 %
27,6 %
0 %∗∗
9,7 %∗
Cotisants
4,0 %
19,7 %
1,8 %
4,0 %
67,9 %
2,5 %
100,0 %
99,4 %
99,4 %
89,8 %
100,0 %
11,2 %
6,1 %
1,2 %
57,0 %
24,4 %
0 %∗∗
100 %
N OTES : ∗ l’information n’étant pas disponible à partir des DADS, elle est remplacée par la moyenne pondérée de la famille
Autres A. ∗∗ Pôle Emploi, La Poste et France Telecom n’étant pas concernés par la loi du 20 janvier 2014, la part des contrats
privés y est fixée à zéro par convention afin de souligner leur exclusion lors de la modélisation des effets de la réforme.
S OURCE : Ircantec à partir des DADS de 2011 et calcul des auteurs.
176
B. P OLITIQUES
DE TITULARISATION
Cette annexe décrit dans un premier temps les différentes politiques de titularisation observées en France depuis 1945. Elle présente ensuite la méthodologie
entreprise afin d’évaluer économétriquement l’effet de ces titularisations sur l’effectif des cotisants de l’Ircantec.
Les politiques de titularisation depuis 1945
La naissance des politiques de titularisation (1945-1980)
Le premier plan de titularisation, à notre connaissance, est l’ordonnance no 451006 du 21 mai 1945 relative à la titularisation des emplois d’auxiliaires temporaires de l’État. Il offre la possibilité d’être titularisé après dix ans d’exercice pour
les auxiliaires âgés de plus de 35 ans (Cabanel, J., and Gourdon J. L. (1991)). Il
aboutit à 21 000 titularisations entre 1945 et 1947.
Il est suivi par la loi no 50-400 du 3 avril 1950 qui inscrit le recours aux nontitulaires dans le cadre que nous connaissons aujourd’hui, à savoir, lorsqu’une dérogation au recrutement d’un titulaire a été mise en place. Ce second plan conduit
à la création de 80 500 emplois de titulaires. Parmi ces premières initiatives, on
trouve également, une quinzaine d’années plus tard, le décret no 65-528 du 29
juin 1965 relatif à la titularisation dans les corps de fonctionnaires de la catégorie
D d’agents de l’État recrutés en qualité d’auxiliaires.
Le premier plan de titularisation d’envergure est mis en place à l’automne 1975
par la volonté de M. Peyronnet, alors secrétaire d’État à la fonction publique.
L’objectif principal de ce plan est la résorption de l’auxiliariat. En quatre ans, il doit
177
Les carrières des non-titulaires du secteur public
conduire à la titularisation de 250 000 auxiliaires à temps complet. Les résultats
ne sont pas à la hauteur de cet objectif, puisque seulement 109 000 titularisations
sont effectuées. Elles ont essentiellement lieu dans l’éducation nationale (53 % des
titularisations), dans les PTT (25 %), aux ministères de l’économie et du budget
(7,2 %), de l’équipement (2,7 %) et dans les autres ministères (8,7 %) 54 .
La loi Le Pors (1982-1986)
C’est dans la lignée de ces premiers plans de titularisation que s’inscrit la loi
Le Pors de 1982. Elle doit son nom à A. Le Pors, alors ministre chargé des réformes administratives, auquel succède J. Le Garrec en 1984. La loi Le Pors a
pour objectif « d’asseoir une vaste politique de résorption de la fonction publique
« parallèle » et d’amélioration des conditions de travail des agents non titulaires
de l’État » (Bernard-Steindecker, 1990). Elle est à la fois plus ambitieuse et plus
contraignante que les précédents plans de titularisation : le dispositif mis en place
concerne toutes les catégories d’employés et l’administration a l’obligation légale
de faire une proposition de titularisation aux agents.
TABLEAU B.1 – Les non-titulaires civils et les conditions de titularisation
contenues dans le projet de loi.
Titularisables
Agents à temps complet
Auxiliaires
Contractuels type CNRS
Maîtres auxiliaires
Instituteurs remplaçants
Vacataires
Médecins
Assistants
Professeurs associés
Autres contractuels
Agents à temps partiel supérieur
ou égale au mi-temps (hors indéterminés)
À déduire
Étrangers en France
Total
Indéterminés
7 300
12 600
32 700
3 000
8 000
1 300
2 600
900
57 700
156 100
Emplois à mi-temps ou plus
Maîtres et surveillants d’internat
Ouvriers
Coopérants civils
Assistants chefs de clinique
Contractuels « pointus »
47 100
6 000
8 400
5 000
1 000
67 500
44 400
2 000
198 500
67 500
S OURCE : Rapport Hamon (1983)
Initialement, le rapport Hamon (1983) accompagnant le projet de loi, prévoit que
54. Selon les Cahiers Français, la Fonction Publique, Tome 1 p. 58 cité par Cabanel et Gourdon 1991.
178
Annexes
271 000 agents publics bénéficient d’une titularisation, dont 170 800 de l’État
(hors PTT), 27 700 des PTT et 72 500 des établissements publiques administratifs 55 . Le tableau B.1, extrait du rapport Hamon (1983) classe les agents de l’État
et des PTT, selon les conditions de titularisation contenues dans le projet de loi.
La loi vise essentiellement les agents à temps complet et employés de façon continue. Elle exclut par là-même les employés à temps très partiel, les vacataires,
intermittents et les employés saisonniers qui n’avaient, dès lors, pas vocation à
être titularisés.
Les résultats de cette politique, quoique significatifs, sont cependant bien en-deçà
des objectifs annoncés. Finalement, la loi Le Pors aurait donné lieu à 130 000
titularisations, dont 49 000 d’agents de l’enseignement primaire et secondaire et
2 800 d’agents de l’enseignement supérieur (Bernard-Steindecker, 1990 et Cabanel et Gourdon, 1991). Le plan Le Pors ressemble donc au plan Peyronnet, tant
par le nombre de titularisations, que par l’écart entre l’ambition du projet et ses
résultats.
Les mesures récentes (1987-2012)
Une dizaine d’années plus tard, la loi « Perben » 56 , issue du protocole d’accord
du 14 mai 1996, ouvre la possibilité d’organiser dans chaque fonction publique,
pendant une période de quatre ans, des concours réservés à certaines catégories d’agents non titulaires. Elle instaure à nouveau un dispositif spécifique qui
ne s’adresse qu’aux seuls agents non titulaires de catégorie C dans la fonction
publique d’État, de catégorie B et C dans la fonction publique territoriale et à l’ensemble des catégories dans la fonction publique hospitalière. La loi impose également des conditions d’ancienneté, puisqu’il faut justifier d’une présence au 14
mai 1996 et d’une ancienneté de quatre ans dans les huit années précédant cette
date. Ce plan de titularisation aurait aboutit, selon le rapport du Sénat (2011), à
60 000 titularisations, dont l’essentiel dans la fonction publique d’État.
Parmi les grands plans de titularisation récents, on retrouve la loi 2001-2 du 3
55. Auxquels s’ajoutent 67 500 agents de l’État pour lesquels la situation était encore indéterminée.
56. Loi 96-1234 du 16 décembre 1996.
179
Les carrières des non-titulaires du secteur public
janvier 2001, dite loi « Sapin ». Cette loi, relative à la résorption de l’emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique ainsi qu’au
temps de travail dans la fonction publique territoriale, s’appuie sur le protocole
d’accord du 10 juillet 2000. Elle élargit les principes généraux du plan Perben.
Pour chacun des versants de la fonction publique, des modalités différentes sont
retenues (Sénat (2011)) :
– Dans la fonction publique d’État, les concours réservés au corps de catégorie
A se sont ouverts aux candidats visés par le protocole d’accord Durafour du 9
février 1990 57 . L’accès au corps de la catégorie C est, quant à lui, devenu accessible par voie d’examen professionnel 58 . De plus, les candidats exerçant des
fonctions n’appartenant pas au corps de catégorie C et remplissant les conditions posées par la loi « Perben » pouvaient également accéder à un corps de
fonctionnaires par voie d’examen professionnel.
– Dans la fonction publique territoriale, une intégration directe comme fonctionnaire a été ouverte pour les agents non titulaires recrutés après le 27 janvier
1984 dans l’emploi qu’ils occupaient. De plus, des concours ont été ouverts
pour les agents recrutés avant le 14 mai 1996 59 .
– Enfin, dans la fonction publique hospitalière, des concours et examens professionnels ont été ouverts.
Pour être éligible à ces dispositions, il faut justifier d’au moins deux mois d’exercice au cours de la période d’un an précédant le 10 juillet 2000, des titres ou
diplômes requis aux concours externes 60 et d’une durée de service effective de
trois ans (en équivalent temps plein) au cours des huit dernières années. Selon
l’étude d’impact 61 de l’Assemblée nationnale (2011), la loi aurait abouti à 33 000
titularisations dans la fonction publique d’État, 4 600 dans la fonction publique
territoriale et 2 160 dans la fonction publique hospitalière.
57. Pour ce qui concerne les non-titulaires, le protocole s’adresse aux « agents non titulaires des trois fonctions
publiques et les agents des établissements publics de caractère non industriel et commercial de l’État et des
collectivités territoriales lorsque leur rémunération est déterminée ou évolue par référence à la grille indiciaire
de la fonction publique » (protocole d’accord Durafour du 9 février 1990).
58. Voire sans concours pour les corps de catégorie C les moins élevés.
59. À condition qu’un seul concours ait été organisé avant leur recrutement par contrat.
60. Une procédure de reconnaissance des acquis professionnels ayant été instituée.
61. Accompagnant le projet de la loi no 2012-347 du 12 mars 2012.
180
Annexes
Finalement, la loi no 2012-347 du 12 mars 2012 est le dernier grand plan de titularisation : il concerne l’ensemble des contractuels, en contrat à durée déterminée
ou indéterminée, en situation de précarité. L’objectif est de pérenniser 150 000
emplois, soit par une titularisation des agents (un tiers des emplois), soit par une
CDIsation (deux tiers).
Outre ces larges plans de titularisation ou de CDIsation, quelques plans sectoriels
et politiques spécifiques ont été mis en place. Ces derniers, de plus petite envergure, s’adressent généralement à des professions et non à des situations d’emploi.
Ils sont résumés dans l’encadré B.1. La figure B.1 résume quant à elle l’ensemble
des principaux plans de titularisation et leur chronologie.
181
Les carrières des non-titulaires du secteur public
Encadré B.1 : Autres politiques de titularisation
1 - Pour les instituteurs/trices, la loi 49-238 du 23 février 1949 prévoit une titularisation si ils/elles
ont enseigné durant quatre ans « en tant que remplaçant sans pouvoir obtenir un poste vacant ». En
1950, une mesure dérogatoire réduit ce délai à un an pour les départements déficitaires. Possibilité
qui a perduré longtemps sous la forme de recrutement sur les listes complémentaires et passage
l’année suivante à l’École normale ou à l’UIFM.
2 - Titularisation des suppléants contractuels de juge de paix (fin des années 50).
3 - Le décret no 62-379 de 1962 détaille les dispositions applicables aux maîtres auxiliaires, nontitulaires du second degré. Il instaure trois catégories selon le diplôme et une échelle de rémunération selon l’ancienneté.
4 - Titularisation des personnels de recherche (loi du 17 juillet 1982).
5 - Titularisation de certains personnels de recherche du CNRS (décret no 85-1461 du 30 décembre
1985).
6 - Le décret no 88-974 du 12 octobre 1988 relatif à la titularisation dans des emplois de catégorie
C et D des agents non titulaires des établissements mentionnés à l’article 2 de la loi no 86-33 du 9
janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.
7 - Le protocole d’accord du 9 février 1990, dit protocole Durafour, portant sur la requalification
de certains emplois de catégorie C et D, a permis aux administrations de recourir, sans concours, à
des agents non qualifiés après suivit d’une formation.
8 - La transposition de la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999 a également été considérée comme
une loi visant la réduction de la précarité des emplois dans la fonction publique, dans la mesure
où, elle a limité à six ans la durée d’emploi en contrat à durée déterminée. Période suite à laquelle,
le contrat doit nécessairement être transformé en contrat à durée indéterminée.
9 - Certains vacataires permanents (« les Berkani »), tels que des personnels de service en fonction
dans les services de l’État, en leur reconnaissant le bénéfice d’un CDI et la faculté d’opter pour un
contrat de droit privé (loi no 2000-321 du 12 avril 2000, article 35).
10 - Ingénieurs et personnels techniques de la Culture (décret no 2000-733 du 31 juillet 2000 fixant
les dispositions applicables à la titularisation de personnels contractuels régis par le décret no 78210 du 28 février 1978 relatif au statut des personnels contractuels techniques et administratifs
affectés à la recherche au ministère de la culture et de l’environnement).
11 - Contractuels mentionnés à l’article 5 de l’ordonnance du 25 mars 2009 pour les offices agricoles.
12 - Techniciens supérieurs de la météo (décret no 2011-1139 du 21 septembre 2011 portant statut
particulier du corps des techniciens supérieurs de la météorologie).
N OTE : Cette liste n’est pas exhaustive. S OURCES : Sénat (2011), Assemblée nationnale (2011) et
Emancipation (2010).
182
Annexes
F IGURE B.1 – Synthèse des titularisations de 1970 à 2010.
Plans de titularisation
Autres titularisations
1970
Peyronnet, 1975
(109 000 titularisations)
1975
1980
Le Pors, 1982
Titularisation des personnels
de recherche, 1982
(130 000 titularisations)
1985
Titularisation au sein
du CNRS, 1985
Titularisations dans
la FPH, 1988
1990
Protocole d’accord
Durafour, 1990
1995
Perben, 1996
(60 000 titularisations)
Sapin, 2001
(33 000 titularisations)
Directive européenne limitant
le recours aux CDD, 1999
2000
Titularisation des
« Berkani », 2000
Ingénieurs et personnels techniques
de la culture, 2000
2005
2010
183
Ordonnance du
25 mars 2005
Les carrières des non-titulaires du secteur public
Stratégie empirique d’identification de l’effet des titularisations sur l’effectif des cotisants
Effet des plans de titularisation sur la probabilité de titularisation des cotisants de l’Ircantec.
Nous disposons de deux mesures de la proportion de cotisants Ircantec titularisés
chaque année. La première provient des données de l’Ircantec : nous observons
les années cotisées en tant que non-titulaire qui ont été transférées vers des régimes de retraite pour les titulaires de la fonction publique. L’avantage de cette
mesure est que l’information est disponible pour tous les cotisants qui ont fait valider leurs années en tant que non-titulaire après leur titularisation. L’inconvénient
est que tous les cotisants ne font pas cette démarche, ou pas immédiatement. La
seconde mesure provient des données de l’échantillon apparié EIC-Ircantec : nous
observons les individus qui cotisent à l’Ircantec et l’année suivante cotisent à un
régime de retraite titulaire (SRE, CNRACL, régimes spéciaux). Cette seconde mesure n’est disponible que sur l’échantillon apparié mais elle ne dépend pas de la
procédure de transfert. En d’autre termes, si la seconde mesure est moins précise
que la première, elle ne souffre pas du même biais.
Données Ircantec
À l’aide des données Ircantec pour les cotisants qui ont transféré des cotisations de
l’Ircantec vers les régimes des titulaires, nous identifions l’année de titularisation
comme étant la dernière année de cotisation Ircantec transférée. Nous construisons ensuite la proportion de cotisants titularisés chaque année comme la proportion de cotisants pour lesquels il s’agit de leur dernière année transférée. La figure
B.2 montre graphiquement l’évolution pour chaque année de la proportion de cotisants titularisés. Les zones grisées représentent les vagues de titularisation. Le
taux de titularisation des cotisants de l’Ircantec par année a fluctué entre 0,5 % et
3 % entre 1970 et 2006. Son évolution se caractérise par une baisse tendancielle,
qui peut s’expliquer par le biais de cette mesure de titularisation induit par le délai
de traitement. La probabilité d’avoir transféré des années de cotisation est en effet
184
Annexes
F IGURE B.2 – Rapport du nombre de transferts vers le public sur le
nombre de cotisants à l’Ircantec par année.
N OTE : Les zones grisées représentent les divers plans de titularisation et les grands décrets ayant
trait à la titularisation des non-titulaires de la fonction publique. Les calculs sont effectués sur
l’ensemble des cotisants de l’Ircantec nés au mois d’octobre.
S OURCE : Données Ircantec, calcul des auteurs.
plus forte pour les cotisants les plus vieux, c’est-à-dire ceux qui ont été titularisés
plus tôt.
Les transferts vers le public, rapportés au nombre de cotisants de l’Ircantec, augmentent systématiquement à la suite des plans de titularisation effectués entre
1970 et 2005. Les effets sont toutefois fortement variables, comme l’indique par
exemple la comparaison des plans de titularisation de 1975 et 1983, qui ont vu
une progression importante de la part des cotisants transférés, et de ceux des années 2000, dont les effets restent marginaux. L’impact de ces différents plans est
toutefois extrêmement bref, puisque la grande majorité des titularisations s’effectuent en une année. Alors que le taux de transferts baisse systématiquement à la
suite de celle-ci, rejoignant ainsi son évolution tendancielle.
Par ailleurs, comme on peut le constater à partir de l’analyse de la figure B.2, les
plans de titularisation ne sont pas les seuls à influer sur le taux de transferts vers
le secteur public. On voit en effet que la forte hausse, observée en 1988-1990,
185
Les carrières des non-titulaires du secteur public
est due à la parution de décrets ayant trait à la titularisation de non-titulaires de
la fonction publique, ne s’inscrivant pas dans le cadre plus général d’un plan de
titularisation. Elle est ainsi la conséquence, entre autres, du protocole d’accord
Durafour du 9 février 1990, sur la requalification de certains emplois de catégorie
C et D, permettant aux administrations de recourir sans concours à des agents
non qualifiés après suivit d’une formation. Ainsi que du décret no 88-974 du 12
octobre 1988 relatif à la titularisation dans des emplois de catégorie C et D des
agents non titulaires de la fonction publique hospitalière.
F IGURE B.3 – Transferts vers le secteur public par famille d’employeur.
N OTE : Calculs effectués à partir des données de l’Ircantec, sur l’ensemble des cotisants nés au mois d’octobre.
S OURCE : Ircantec, calcul des auteurs.
Comme cela avait déjà été indiqué par l’analyse des employeurs des cotisants du
quatrième type (partie 3.5, page 81), tous les affiliés ne sont pas égaux devant la
titularisation. La part de cotisants titularisés est en général plus importante au sein
186
Annexes
des fonctions publiques hospitalière et d’État. De plus, l’impact des politiques, et
notamment celles du début des années 1990, n’est pas uniforme. On observe ainsi
une hausse très importante des titularisations en 1990 dans la fonction publique
hospitalière, alors que la fonction publique d’État connaissaient quant à elle une
baisse des titularisations lors de cette même période. De façon analogue, le plan
Le Pors n’a pas, ou très peu, affecté la titularisation dans les fonctions publiques
hospitalière et territoriale, alors qu’il a conduit à un doublement de la part de
cotisants titularisés dans la fonction publique d’État.
Échantillon Apparié EIC-Ircantec
La baisse tendancielle du taux de titularisation dans les années 2000 que l’on
observe avec les données de l’Ircantec traduit potentiellement le délai entre la
titularisation des cotisants et le transfert de leurs années cotisées à l’Ircantec.
Afin de contrôler le biais que pourrait générer ce problème avec les données de
l’Ircantec, nous utilisons également une seconde mesure du taux de titularisation
calculée cette fois-ci à partir de l’échantillon apparié avec les données de l’EIC. Le
taux de titularisation est mesuré comme la fraction des cotisants de l’Ircantec qui
passe à des régimes de titulaire. Le figure B.4 reporte le taux de titularisation ainsi
obtenu.
En comparaison des résultats fournis par les données de l’Ircantec (figure B.2),
les taux moyens de titularisation par année sont plus importants d’environ deux
points de pourcentage. La série chronologique fournie par les données de l’appariement, ne présente ainsi plus de baisse tendancielle dans les dernières années.
Cette différence est due à la proportion importante de titularisations qui n’ont pas
donné lieu à un transfert des années de cotisation Ircantec, proportion plus forte
pour les titularisations les plus récentes. Les deux mesures fournissent cependant
la même conclusion : les plans de titularisations conduisent à une augmentation
du taux de titularisation.
Analyse économétrique
Pour l’analyse économétrique qui va suivre, nous utilisons le taux de titularisation,
mesuré sur l’échantillon apparié pour expliquer les changements dans le nombre
187
Les carrières des non-titulaires du secteur public
F IGURE B.4 – Titularisations à partir des données de l’appariement.
N OTE : Les calculs sont effectués à partir de l’appariement des données de l’EIC et de l’Ircantec. Les
titularisations sont mesurées par les départs des cotisants vers le secteur public. S OURCE : Ircantec
et EIC, calcul des auteurs.
de cotisants Ircantec.
Celle-ci a pour objectif de rendre compte de l’effet des titularisations sur l’effectif
des cotisants de l’Ircantec. Elle consiste en la régression du nombre de cotisants
sur le nombre de titularisations chaque année. Les séries chronologiques analysées
sont reportées dans le figure B.5.
Une première approche consiste à apprécier les effets des titularisations comme
une variation par rapport à la tendance observée pour l’effectif des cotisants. Cette
approche, bien qu’ayant pour avantage d’être facilement interpretable, fournit
des résultats dépendant de la spécification de la tendance. Les figures B.7 reproduisent l’évolution du nombre de cotisants avec différentes estimations de la
tendance. Afin de clarifier l’impact de la spécification sur l’évaluation des titularisations, l’évolution observée sur la période de 1984 à 1986, au coeur du plan
Le Pors, s’avère particulièrement illustrative. Ainsi, lorsque la tendance est supposée linéaire, l’effet des titularisations de 1984 à 1986 conduit à une hausse des
cotisants. Cet effet est cependant inexistant lorsque l’on considère une tendance
quadratique.
188
Annexes
F IGURE B.5 – Transferts par année.
N OTE : Les calculs sont effectués à partir de l’appariement des données de l’Ircantec et de l’EIC. Les niveaux annuels ont été déduits avec
un taux de sondage d’un douzième.
S OURCE : Ircantec et EIC, calcul des auteurs.
Pour cette raison, l’analyse s’effectuera sur une série chronologique ne présentant
pas de tendance, à savoir, la différence première de l’effectif des cotisants avec la
spécification suivante :
∆yt = at + bxt−1 + εt
Où ∆yt = yt − yt−1 la variation de l’emploi Ircantec entre l’année t et l’année t − 1, at
une constante, xt−1 les titularisations à l’année t − 1, b l’effet des titularisations sur
l’emploi et εt le terme d’erreur. Les estimations sont réalisées avec deux variables
dépendantes (yt ) différentes : l’une sur l’effectif des cotisants, et l’autre sur le
nombre d’emplois par année.
La prise en compte des titularisations avec un décalage d’une année est la conséquence de la construction des données. Ainsi, dès lors qu’une titularisation, c’està-dire le départ d’un cotisant de l’Ircantec vers un régime de retraite pour les
employés du secteur public n’est pas effectuée le 1er janvier, le cotisant sera toujours comptabilisé dans les effectifs de l’Ircantec à l’année du transfert. L’effet des
189
Les carrières des non-titulaires du secteur public
F IGURE B.6 – Probabilité de titularisation par famille.
N OTE : Calculs effectués à partir de l’appariement des données de l’Ircantec et de l’EIC.
S OURCE : Ircantec et EIC, calcul des auteurs.
F IGURE B.7 – Estimations de la tendance de l’effectif des cotisants.
N OTE : Calculs effectués à partir de l’appariement des données de l’Ircantec et de l’EIC.
S OURCE : Ircantec et EIC, calcul des auteurs.
titularisations sur les effectifs se fait donc avec un décalage d’une période.
L’estimation se fait dans un premier temps par les moindres carrés ordinaires.
Cependant, on pourrait craindre un biais d’endogénéité, dû au fait que l’em190
Annexes
ploi public titulaire et non-titulaire répondent aux mêmes cycles économiques
ou politiques. Par exemple, une politique de recrutement dans la fonction publique (notamment dans l’éducation) pourrait se traduire simultanément par des
créations de postes titulaires et non-titulaires. Dans ce cas, le coefficient b sera
surestimé. C’est la raison pour laquelle dans un second temps, nous estimons b
par la méthode des variables instrumentales. Nous utilisons des indicatrices correspondant aux années des cinq plans de titularisation (1975-1979, 1982-1986,
1988-1991,1997-2001 et 2001-2005) pour prédire les transitions vers l’emploi
public et estimer leur effet sur le nombre de cotisants et le nombre d’emplois.
TABLEAU B.2 – Estimation de l’effet des titularisations sur l’effectif des
cotisants et les emplois à l’Ircantec.
constante
Transferts vers le public
Observations
OLS
Cotisants
(1)
775.095∗∗∗
OLS
Emplois
(2)
859.428∗∗
IV
Cotisants
(3)
1663.592∗∗∗
IV
Emplois
(4)
1619.661∗∗∗
(239.081)
(346.372)
(470.767)
(372.507)
-1.354∗∗∗
-1.513∗∗
-3.255∗∗∗
-3.116∗∗∗
(.505)
(.693)
(.997)
(.745)
37
37
37
37
N OTES : Les symboles *,** et *** indiquent respectivement la significativité aux seuils de 1, 5 et 10 %. Les écarts-types sont entre parenthèses.
S OURCE : Ircantec et EIC, calcul des auteurs.
Les résultats de la régression par moindres carrés ordinaires, reportés dans les
deux premières colonnes de la table B.2, indiquent que pour une titularisation,
il y a 1,4 cotisants Ircantec en moins et 1,5 emplois Ircantec en moins. Dans les
deux cas, le coefficient b estimé est non significativement inférieur à -1. Lorsque
l’on utilise la méthode des variables instrumentales, en utilisant les plans de titularisation pour prédire les titularisations, les coefficients estimés doublent : une
titularisation entraîne la destruction de -3,1 emplois non-titulaires, et la disparition -3,2 cotisants Ircantec. Les deux coefficients sont significativement inférieurs
à -1.
Ces résultats suggèrent que les titularisations ont un effet plus fort sur l’emploi
non-titulaire qu’un simple effet mécanique « un pour un ». Ceci pourrait s’expli191
Les carrières des non-titulaires du secteur public
quer par le fait que les titulaires restent en emploi, alors que les non-titulaires se
succèdent sur un même poste au cours de l’année. Il est également possible que les
nouveaux titulaires travaillent à temps complet et remplacent deux non-titulaires
à temps partiel. Enfin, le coût relatif élevé des titulaires par rapport aux nontitulaires (lié notamment aux droits à pension) peut expliquer qu’un employeur
soucieux d’éviter une augmentation de la masse salariale devra détruire plus d’un
emploi non-titulaire pour l’embauche d’un titulaire.
192
C. E STIMATION
DU MODÈLE DE
PROJECTION
Cette annexe fournit les informations techniques complémentaires sur l’estimation
du modèle de projection. Elle comprend la description de la méthode de sélection
des variables explicatives, les résultats des différentes régressions et la méthode
servant à caler les projections.
Sélection des variables explicatives
Jusqu’alors les variables explicatives du premier, du second et du quatrième module n’ont été présentées qu’à travers des catégories génériques : macroéconomie,
offre, politique. Cette partie a donc pour objectif d’éclaircir la spécification exacte
en présentant la méthodologie de sélection des régresseurs pour chacun de ces
trois modules 62 .
Tout exercice de prédiction dépend d’un arbitrage entre parcimonie et précision :
il s’agit d’avoir la prédiction la plus précise possible avec le moins de prédicteurs.
En effet l’ajout de régresseurs comporte en effet un écueil en faisant dépendre
la prédiction à des éléments secondaires auxquels on donne un poids trop important. Ainsi, la méthode de sélection des régresseurs ambitionne de trouver
un compromis satisfaisant répondant à ces deux objectifs contradictoires. Dans
ce but, un certain nombre de déterminants de l’emploi Ircantec, essentiellement
issus de l’analyse rétrospective, ont été repris. Nous disposons ainsi initialement
62. Il est à noter que cette sélection ne s’applique pas aux équations de salaire (troisième module) dont la
spécification exacte a déjà été présentée.
193
Les carrières des non-titulaires du secteur public
d’un large ensemble de variables explicatives a priori disponibles pour l’estimation
(tableau C.1).
TABLEAU C.1 – Variables explicatives.
Variables
Croissance
Taux de chômage
Dépense des APU
Inflation
Emplois salariés principalement marchand
Effectifs des fonctions publiques
Part de temps plein parmi les Ircantec
Age moyen à l’entrée des cotisants
Part de femmes parmi les Ircantec
Sources
Insee
Insee
Insee
Insee
Insee
Bozio et Grenet et rapport annuel de la fonction publique
Calculs des auteurs
Calculs des auteurs
Calculs des auteurs
Notes
En pourcentage du PIB
En pourcentage de la population active
En pourcentage de l’emploi public, par fonction publique
Par famille d’employeurs
Par famille d’employeurs
Par famille d’employeurs
La sélection des variables est ensuite effectuée en deux étapes. Tout d’abord, un
algorithme de sélection des variables est utilisé. Celui-ci, implémenté par Éric Dubois et Emmanuel Michaux (2011), reprend les principes de l’approche LSE (Gilbert, 1989). En explorant plusieurs spécifications à partir des régresseurs initialement disponibles, il sélectionne la spécification qui se rapproche le plus du DGP
(data-generating process) au vu des critères d’information et des tests de Fisher. La
seconde étape est quant à elle plus spécifique à l’exercice de projection. Elle reprend la spécification obtenue précédemment en effectuant des changements à la
marge afin de minimiser l’erreur absolue moyenne de projection pour la période
1992–2009 calculée en estimant le modèle sur la période 1971–1991. Cette approche out-of-sample permet de répondre partiellement au défaut de la sélection
d’une spécification basée sur les critères d’information lorsque l’on est amené à
effectuer des projections (voir par exemple l’article de Qia et Zhang, 2001).
Cette méthodologie est effectuée pour le premier, le second et le quatrième module au niveau des familles d’employeurs. Dans le cas où les estimations sont
par partie, les régresseurs restent identiques pour l’ensemble des estimations portant sur la même famille d’employeurs. Cette restriction permet d’assurer une
cohérence globale de la modélisation. Il est à noter qu’en effectuant une sélection
principalement empirique des déterminants de l’emploi Ircantec, le modèle se rapproche plus en ce point du domaine de la statistique que de l’économie. En effet,
plutôt que de chercher à obtenir des coefficients issus d’une spécification structurelle, l’approche se veut plus globale et vise à capturer des corrélations pertinentes
en se fondant sur ce que l’on a pu observer dans le passé.
194
Annexes
La liste des variables explicatives ainsi sélectionnées est présentée dans le tableau
C.2.
TABLEAU C.2 – Spécification pour chaque module.
Module 1
Variables
Croissance
Taux de chômage
Dépense des APU
Inflation
Emplois privés
Effectifs des fonctions publiques
Part de temps plein
Age moyen à l’entrée
Part de femmes
FPE
√
√
√
-
Eq. (5.1)
FPH FPT A B
√
√ √
√
√ √ √
√
√
√
√
√ √ √
√
√
√
√
-
C
√
FPE
√
√
√
√
Eq. (5.2)
FPH FPT A B C
√
√ √ √ √
√
√ √ √ √
√
√
√
√
√
√
√
√
√
-
-
-
√
√
√ √
√
√
√ √
-
-
-
-
FPE
√
-
Module 2
Eq. (5.3)
FPH FPT A B C
√
√ √ √ √
√
√
√
√ √
√
√ √ √
√
√ √
√
√ √
-
FPE
√
√
√
Module 4
Eq. (5.5)
FPH FPT A
√ √
√
√ √
√
√ √
√ √
√
√ √
√
√ √
√
√
B
√
√
√ √
√
√
√ √
-
N OTE : Les sous-familles d’employeurs A, B et C font références aux trois composantes de la famille Autres présentées à la page 175.
Résultats des estimations
La spécification du modèle ayant été présentée, nous nous tournons à présent vers
les résultats des estimations.
Le tableau C.3 reporte les coefficients estimés à partir de l’équation (5.1) pour
chaque famille d’employeurs. Comme on peut le constater, le flux des cotisants entrant à l’Ircantec est affecté différemment par l’environnement économique d’une
famille d’employeurs à l’autre. Ainsi, toutes choses égales par ailleurs, une hausse
du chômage d’un point de pourcentage conduit par exemple à une hausse de
0,00005 de la part des cotisants entrant à l’Ircantec dans la fonction publique
territoriale parmi la population active, alors que cette même hausse du chômage
a un effet négatif pour la fonction publique hospitalière. Il apparaît ainsi clairement que la dynamique des recrutements dans chacune des familles d’employeurs
repose sur des facteurs qui lui sont spécifiques. Ces différences traduisent notamment les oppositions fortes entre les emplois que l’on retrouve dans chacune des
fonctions publiques et la proximité plus ou moins forte entre ces emplois et ceux
du secteur privé. Par ailleurs, l’évolution des recrutements est fortement liée à
la dynamique de chacune des fonctions publiques. Ainsi, une croissance relative195
C
√
Les carrières des non-titulaires du secteur public
TABLEAU C.3 – Estimation du nombre d’entrants.
Variables
Croissance
FPE
FPH
0.000135
(0.000551)
Chômage
Autres A
Autres B
Autres C
-0.000335∗
0.000153
-1.85e-05
0.000200
(0.000183)
(0.000180)
(0.000103)
(0.000494)
(0.000198)
(0.000172)
-0.000859∗
(0.000430)
Emplois privés
FPT
0.00525∗∗∗
(0.00136)
-0.000273 0.000496∗∗∗
0.000917∗
0.00670∗∗∗
-0.000823∗∗∗
(0.000494)
(0.000942)
(0.000230)
Dépenses des APU
Inflation
0.000213
(0.000627)
-0.000183
(0.000162)
-0.00125∗∗∗
-0.000233
(0.000253)
Effectifs FPE
(0.000185)
-0.00216∗∗∗
(0.000312)
Effectifs FPH
0.00955∗∗∗
(0.000622)
Effectifs FPT
0.00545∗∗∗
-0.00102∗
0.00179∗∗∗
(0.00176)
(0.000507)
(0.000255)
0.00564∗∗∗
(0.000478)
-6.20e-05∗∗
Temps partiel
(2.49e-05)
0.000313∗
Part de femmes
6.83e-05
(0.000160)
-7.12e-06∗∗∗
Age à l’entrée
Constante
Observations
R-squared
(0.000143)
(2.49e-05)
-1.40e-05∗∗
(6.41e-06)
0.00203∗∗∗
-0.00179∗∗∗
-0.00564∗∗∗
0.000924∗∗∗
-0.000129
0.000418
(0.000162)
(0.000208)
(0.000525)
(0.000146)
(0.000108)
(0.000292)
41
0.853
41
0.958
41
0.983
41
0.889
41
0.896
40
0.144
N OTES : Résultats de l’équation (5.1) pour le premier module. Les écarts-types sont indiqués entre parenthèses. Les symboles
signifient respectivement que le coefficient est significatif au seuil de 1 %, 5 % et 10 %.
S OURCE : Données de l’Ircantec, calcul des auteurs.
196
∗∗∗ , ∗∗
et
∗
Annexes
ment supérieure des effectifs titulaires et non-titulaires dans la fonction publique
d’État implique une baisse du recrutement des agents non-titulaires dans cette
même famille.
TABLEAU C.4 – Estimation de la part des nouveaux cotisants.
Variables
Croissance
FPE
FPH
-0.0111
0.0296
0.237
0.584
0.376
0.335
(0.536)
(0.169)
(0.312)
(0.598)
(0.246)
(0.470)
Chômage
Dépenses des APU
3.771∗∗∗
0.899∗∗∗
-0.155
(0.543)
(0.313)
(0.590)
(0.321)
(0.882)
-0.495
1.262∗∗
0.342
-0.171
(0.440)
(0.611)
(0.214)
(0.598)
-8.243∗∗∗
-5.487∗∗∗
-4.844∗∗
(1.522)
(0.571)
(1.831)
0.876∗∗
(0.954)
(0.337)
-0.436
Effectifs FPH
-3.873∗∗∗
(0.828)
Effectifs FPT
Age à l’entrée
Constant
Observations
R-squared
Autres C
-1.064∗∗∗
-0.209
(0.612)
Temps partiel
Autres B
-0.225
Inflation
Effectifs FPE
Autres A
-1.144
(1.100)
Emplois privés
FPT
0.0843
-0.203∗∗
(0.148)
(0.0920)
(0.00704)
(0.00347)
-0.939∗∗∗
(0.109)
0.00636 -0.00971∗∗∗
0.676
0.478∗∗∗
0.288∗∗∗
0.884∗∗∗
0.705∗∗∗
0.705∗∗∗
(1.589)
(0.170)
(0.0683)
(0.195)
(0.0719)
(0.209)
41
0.975
41
0.991
41
0.984
41
0.972
41
0.992
40
0.958
N OTES : Résultats de l’équation (5.2) pour le premier module. Les écarts-types sont indiqués entre parenthèses. Les symboles
signifient respectivement que le coefficient est significatif au seuil de 1 %, 5 % et 10 %.
S OURCE : Données de l’Ircantec, calcul des auteurs.
∗∗∗ , ∗∗
Le tableau C.4 reporte les estimations de l’équation (5.2) répartissant les recrutements entre les cotisants n’ayant jamais cotisé à l’Ircantec et ceux ayant déjà
connu au moins un épisode de cotisation auparavant. L’environnement économique et institutionnel affecte une fois de plus différemment les six familles d’employeurs. Il ressort de cette estimation que la part des nouveaux cotisants parmi
197
et
∗
Les carrières des non-titulaires du secteur public
les recrutements dépend fortement de la répartition de l’emploi public titulaire
et non-titulaire dans les trois fonctions publiques. Ainsi, une hausse d’un point
de pourcentage du poids de la fonction publique hospitalière dans l’emploi public implique une baisse de 0,039 points de pourcentage de la part des nouveaux
cotisants parmi les recrutements dans cette même fonction publique.
TABLEAU C.5 – Estimation des probabilités instantanées de survie.
Variables
Croissance
FPE
FPH
FPT
Autres A
Autres B
Autres C
1,669
-1,394
0,649
1,057
1,341
0,007
4,118
1,367
2,535
11,738
4,756
17,827
-327,921
-1412,766
Chômage
Dépenses des APU
-3,987
Emplois privés
0,041
Inflation
-1,664
Temps partiel
-0,244
0,101
-0,051
Age à l’entrée
0,082
0,038
0,026
324,177 49,716
349,181
Constante
105,571
N OTES : Résultats de l’équation (5.3) pour le second module. Les coefficients estimés ne portent pas directement sur
la probabilité instantanée de rester à l’Ircantec mais sur sa transformation logistique. L’estimation des probabilités est
effectuée par regroupement d’ancienneté, pour les nouveaux cotisants et les retours et par famille d’employeurs. Afin de
faciliter l’interprétation des résultats, nous ne reportons pas les 80 estimations mais les coefficients moyens par famille. Ces
derniers sont calculés comme la moyenne des coefficients pondérés par la distribution des cotisants en 2011.
S OURCE : Données de l’Ircantec, calcul des auteurs.
L’analyse des liens entre les variables explicatives et les probabilités instantanées
de rester à l’Ircantec est plus difficile car elle repose sur 80 estimations. Il a ainsi
été décidé de ne reporter que les coefficients moyens par famille d’employeurs
pondérés par la distribution des cotisants en 2011. De plus, rappelons que les
estimations ne portent pas directement sur les probabilités instantanées, mais sur
leur transformation logistique. Ainsi, l’effet d’une variable est non-linéaire et doit
donc être analysé conjointement avec les autres régresseurs 63 .
63. À titre d’information, la reconstruction des probabilités à partir des informations fournies dans le tableau
exp(â+β̂X)
C.5 s’obtient grâce à la transformation : P̂ = 1+exp(â+
β̂X)
198
Annexes
L’estimation du module salarial porte uniquement sur la partie endogène du salaire, c’est-à-dire les salaires hors inflation et corrigés de l’évolution de la productivité réelle du travail. Les estimations sont effectuées sur le logarithme du
salaire endogène moyen avec des effets fixes pour la durée totale de cotisation
pour chaque regroupement d’individus, c’est-à-dire les combinaisons des familles
d’employeurs, des types de cotisants (nouveau et retour) et des regroupements
de durée totale. Dans un soucis de lisibilité, nous ne reportons pas les résultats
de ces 30 estimations mais uniquement les coefficients moyens pondérés par la
distribution des cotisants en 2011 pour chacune des familles d’employeurs.
TABLEAU C.6 – Estimation du salaire endogène.
Variables
FPE
FPH
FPT
Autres A
0,0326
0,0478
0,0290
0,0317
0,0117
0,0440
Ancienneté au carré
-0,0010 -0,0014 -0,0008
-0,0009
-0,0003
-0,0011
Indicatrice pour la dernière année
-0,4912 -0,5468 -0,5107
-0,4731
-0,3604
-0,4662
Indicatrice pour la première année -0,6081 -0,5982 -0,6071
-0,5841
-0,5036
-0,6654
Chômage
-4,6345
0,8863
-4,9039
Ancienneté
-6,3868 -6,1018
-1,4898
Autres B Autres C
L ECTURE : Le modèle étant en log-niveau, l’interprétation est la suivante : le fait qu’un individu dans la
fonction publique d’État (FPE) cotise pour la première fois baisse son salaire endogène de 48,23 %.
N OTES : L’estimation du salaire endogène est effectuée par regroupement de durée totale de cotisation,
pour les nouveaux cotisants et les retours et par famille d’employeurs avec des effets fixes pour la durée
de cotisation. Afin de faciliter l’interprétation des résultats, nous ne reportons pas les 30 estimations mais
les coefficients moyens par famille. Ces derniers sont calculés comme la moyenne des coefficients pondérés
par la distribution des cotisants en 2011. S OURCE : Données de l’Ircantec, calcul des auteurs.
Les résultats des équations de salaire confirment les intuitions théoriques. Plus
particulièrement, l’effet de l’expérience, mesuré ici à partir de l’ancienneté dans
le régime sans interruption de cotisation, est concave. De plus, comme on pouvait également l’attendre, l’évolution du salaire est procyclique. Enfin, en ce qui
concerne les indicatrices pour l’année de début et de fin de cotisation, elles affectent négativement le salaire des cotisants. Elles capturent ainsi correctement le
fait que les cotisants ne commencent pas systématiquement leur emploi au premier janvier et ne le terminent pas le 31 décembre.
Finalement, nous présentons les résultats pour les régressions de la part des ré-
199
Les carrières des non-titulaires du secteur public
munérations dans la seconde tranche de cotisation. Comme on peut le constater
à partir de la figure C.1, la distribution de cette part connaît un pic important à
zéro. Afin de capturer ce fait stylisé qui traduit l’absence de rémunérations supérieures au PSS pour de nombreux cotisants entrés récemment dans le régime de
retraite complémentaire, nous avons recours à une modélisation de type Tobit.
F IGURE C.1 – Distribution de la part des rémunérations dans la seconde
tranche
N OTES : Distribution de la part des rémunérations dans la seconde tranche de cotisation au niveau des individus moyens modélisés et pour chaque ancienneté et année. S OURCE : Données de
l’Ircantec, échantillon des cotisants nés au mois d’octobre. Calcul des auteurs.
Le tableau C.7 reporte les résultats du dernier module pour la part des rémunérations comprises dans la seconde tranche de cotisation. Rappelons que ces estimations ne porte que sur la variable latente et ne tiennent pas compte (hormis lors
de l’estimation) directement de la censure.
200
Annexes
Encadré : le modèle Tobit
La part des rémunérations comprises dans la seconde tranche de cotisation ne pouvant être inférieure à zéro, sa modélisation doit tenir compte de cette contrainte. Pour cela nous avons recours
à un modèle de censure : le modèle Tobit de type 1. Ce dernier admet l’existence d’une variable
latente définit sur R que l’on ne peut observer que sur un interval restreint R+ . En se focalisant sur
l’estimation du processus générant la variable latente, cette méthode offre d’une certaine façon la
possibilité de différencier les individus qui ne cotisent pas dans la seconde tranche en les classant
selon qu’ils sont plus ou moins loin d’y cotiser.
Formellement, la part des rémunérations appartenant à la seconde tranche de cotisation (b) est
donnée par l’équation :
b = max(0, b⋆ )
Où b⋆ est une variable non-observable définie sur R par :
b⋆ = Xβ + ε
Avec X la matrice contenant les régresseurs, β le vecteur contenant les coefficients à estimer et ε
un terme d’erreur suivant une loi Gaussienne centrée réduite.
La modélisation veille ainsi à analyser l’effet des régresseurs sur la variable latente non-censurée.
Pour ce faire, on cherche à estimer β par la méthode du maximum de vraisemblance :
β̂ = arg max
β
n
∏
i=0
1
b⋆ − Xβ b=b
))
( φ(
σ
σ
I
⋆
(1−Ib=b⋆ )
Xβ
))
(1 − Φ(
σ
On peut ainsi obtenir une estimation non biaisée de la variable latente et, en appliquant la censure,
de la part des rémunérations comprises dans la seconde tranche de cotisation (b).
201
Les carrières des non-titulaires du secteur public
TABLEAU C.7 – Estimation de la part des rémunérations dans la seconde
tranche.
Variables
FPE
FPH
FPT
Chômage
Dépenses des APU
-0,085
Emplois privés
Autres A
Autres B
Autres C
0,785
1,415
-1,072
-1,121
0,007
0,681
0,135
0,913
0,769
Inflation
0,313
-0,333
0,038
0,132
0,307
Temps partiel
0,191
0,184
0,012
-0,035
0,016
Part de femmes
-0,829
0,346
-0,147
0,152
-0,192
Constante
40,565 26,796
-31,377
-3,607 -104,416
-20,310
N OTES : L’estimation de la part des rémunérations dans la seconde tranche de cotisation est effectuée
à l’aide d’un modèle Tobit avec effets fixes pour l’ancienneté dans le régime par famille d’employeurs
et en distinguant les nouveaux cotisants des retours. Dans un soucis de lisibilité des résultats, nous ne
reportons pas les 10 estimations mais les coefficients moyens par famille. Ces derniers sont calculés comme
la moyenne des coefficients pondérés par la distribution des cotisants en 2011.
S OURCE : Données de l’Ircantec, calcul des auteurs.
202
Annexes
Méthode de calage
Bien que les prédictions obtenues par le modèle soient proches de la réalité, il est
indispensable d’avoir recours à des méthodes de calage afin d’assurer la concordance des projections et de l’évolution passée. Nous présentons ainsi les deux
méthodes qui ont été utilisées.
Calage de l’effectif des cotisants
Les deux premiers modules aboutissent à un modèle dynamique dont l’effectif en
t est une fonction de l’effectif antérieur. Il peut en effet être analysé comme la
somme des cotisants entrés en t et des cotisants présents en t − 1 qui sont restés
à l’Ircantec. En itérant ce processus, on retrouve assez naturellement la forme
suivante :
t−1971
0
Et = ∑ St−n (n) Et−n
(C.1)
n=0
C’est-à-dire que l’effectif en t est une somme pondérée (par les fonctions de survie)
du nombre de cotisants entrés chaque année depuis 1971. Il s’en suit que les
termes d’erreur suivent une dynamique similaire. En notant x̂ = E(x) l’espérance
de x et εx = x − x̂ le terme d’erreur, on a en reprenant la notation précédente :
Et =
=
t−1971
n
n=0
t−1971
i=0
0
+ εE
∑ ( ∏ (P̂N (i),t−i + εPN (i),t−i )) (Êt−n
t−n )
(C.2)
0
+ εE
∑ (Ŝt−n (n) + εSt−n (n)) (Êt−n
t−n )
(C.3)
0
0
n=0
t−1971
= Êt + ∑ εEt−n (n)
(C.4)
n=0
Une méthode intuitive afin de limiter les termes d’erreur et d’assurer la convergence entre les niveaux observés et le début de la projection revient à utiliser
l’ensemble des informations dont nous disposons afin de s’assurer que l’erreur
lors de la première année de projection (h) soit uniquement donnée par les erP
reurs contemporaines : εE
h et εN (n),h ∀n ∈ {1, . . . , min(h − 1971, 43)}. Autrement
0
203
Les carrières des non-titulaires du secteur public
dit, cela revient à annuler toutes les erreurs qui ont pu être commises par le modèle avant le commencement de l’exercice de projection et qui en auraient affecté
les résultats.
Calage de la masse salariale et les tranches de cotisation
La méthode de calage utilisée pour la masse salariale et les tranches de cotisation
est plus usuelle. On calcule dans un premier temps la différence entre la prédiction
et le niveau observé une année avant la projection. La cale pour chaque année de
projection (Ch+t ) est alors une fonction de cette différence (Dh ) telle que :
Ch+t = ρh+t Dh
∀t≥0
Où ρ est un coefficient à définir strictement inférieur à 1.
Le choix du coefficient a été effectué à partir des deux exercices de projection
présentés dans le sixième chapitre de ce rapport. Il a ainsi été décidé de le fixer à
0,9. Cela revient à réduire le niveau de la cale de 10 % d’année en année et ainsi
de s’assurer que les cales soient rapidement marginales au regard des projections
sans correction.
Prise en compte de la montée en charge du régime durant les années 1970
Le régime de l’Ircantec a connu une montée en charge progressive durant les
années 1970 avec une croissance de l’effectif et de la masse salariale particulièrement importante. Il est ainsi légitime de se demander dans quelle mesure l’exclusion de cette période très spécifique de la calibration du modèle peut affecter la
qualité des prévisions. Cette question se rapproche d’un domaine plus global de la
statistique qui revient à decider de la période optimale sur laquelle la calibration
du modèle doit être effectuée. On parle alors de choix du n optimal, c’est-à-dire
le nombre d’année servant à la calibration. Dans la mesure où il n’existe aucun
204
Annexes
consensus théorique, le choix repose sur une analyse empirique visant à juger de
la qualité des prédictions 64 . Afin de déterminer dans quelle mesure la prise en
compte de la montée en charge du régime durant les années 1970 affecte les projections, nous avons estimé le modèle sur la période de 1981 à 2001 et comparé
les projections de 2002 à 2011 à l’évolution qui a réellement été observée. Ces
nouvelles projections peuvent ainsi être directement contrastées avec celles présentées à la page 125 qui ont été calculées en calibrant le modèle sur la période
de 1971 à 2001.
F IGURE C.2 – Exercice de projection : exclusion des années 1970.
A - Cotisants
B - Masse salariale
C - Seconde tranche de cotisation
N OTES : Résultats des projections de l’effectif des cotisants, de la masse salariale et de la seconde tranche de cotisation lorsque
le modèle est calibré sur la période 1981–2001.
S OURCE : Données de l’Ircantec, calcul des auteurs.
La figure C.2 reporte l’ensemble des projections ainsi obtenues. Comme on peut le
64. De façon similaire à ce que nous avons effectué dans le chapitre 6
205
Les carrières des non-titulaires du secteur public
constater, les projections se détériorent très nettement pour l’effectif des cotisants
et la masse salariale : l’erreur absolue moyenne est de 6,06 % pour l’effectif des
cotisants et de 15,93 % pour la masse salariale, alors qu’elle était respectivement
de 1,11 % et de 6,64 % en incluant les années 1970 dans la calibration. Les
projections pour la seconde tranche de cotisation sont quant à elles plus proches
de ce que l’on a précédemment obtenu avec une calibration entre 1971 et 2001,
bien que toujours moins satisfaisantes (la MAPE est de 6,21 % contre 4,87 % dans
la version 1971–2001).
Ces résultats rejoignent ainsi les conclusions de l’exercice de projection à la page
125. Il semblerait en effet à nouveau que les projections sont d’autant plus fiables
que la période de calibration est longue. Ce constat concerne principalement le
module salarial pour lequel on ne peut plus observer le début de carrière des
individus restant plus de 30 années à l’Ircantec en restreignant la calibration aux
années après 1980. La progression salariale de ces cotisants ne peut ainsi pas être
reproduite de façon satisfaisante.
206
D. C OMPLÉMENTS
POUR LES
PROJECTIONS À L’ HORIZON
2060
Cette annexe présente quelques résultats complémentaires pour les projections à
l’horizon 2060. Dans un premier temps, les projections de l’effectif des cotisants
issues des scénarios du Cor (chapitre 7) sont analysées à partir de l’évolution du
taux de remplacement et de la distribution des cotisants entre les quatre familles
d’employeurs. Enfin, nous développons une variante institutionnelle supplémentaire de décentralisation dans laquelle les contraintes budgétaires pesant sur la
fonction publique territoriale ne permettraient pas le recrutement de nouveaux
cotisants.
Compléments pour les projections des scénarios macroéconomiques
L’évolution du taux de remplacement offre une alternative intéressante afin d’analyser l’évolution de l’effectif des cotisants à l’Ircantec à partir des flux d’entrée et
de sortie. Ce taux, calculé comme le rapport du nombre de recrutements sur le
nombre de cotisants quittant l’Ircantec, fournit une indication de la croissance
de l’effectif. Ainsi, un taux de remplacement égal à l’unité signifie que l’on observe autant de cotisants entrant à l’Ircantec que de cotisants en sortant. L’effectif
est alors parfaitement stable d’année en année et sa croissance nulle. À l’inverse,
lorsque ce taux est supérieur (resp. inférieur) à un, l’effectif connaît une croissance positive (négative). Comme on peut le constater à partir de la figure D.1,
207
Les carrières des non-titulaires du secteur public
les projections conduisent à des taux de remplacement constamment supérieurs
à un dans les scénarios C et D. La croissance de l’effectif resterait ainsi positive
sur l’ensemble de la période de projections. À l’inverse, les scénarios les plus optimistes impliquent un taux de remplacement inférieur à un entre 2022 et 2035.
Selon ces scénarios économiques, l’effectif des cotisants baisserait légèrement sur
cette même période.
F IGURE D.1 – Projections des taux de remplacement.
N OTES : Projections du taux de remplacement pour les trois scénarios principaux.
Le taux de remplacement est calculé comme le rapport du flux de cotisants entrant
à l’Ircantec sur le flux sortant.
S OURCE : Données de l’Ircantec, échantillon des cotisants nés au mois d’octobre et
ayant cotisé pour la première fois après 1970. Calcul des auteurs.
Par ailleurs, en ce qui concerne la composition de l’effectif par famille d’employeurs, les scénarios économiques concluent tous à un recul de la famille Autres.
La fonction publique d’État et la fonction publique territoriale seraient quant à
elles amenées à se développer d’ici à 2060. Plus particulièrement, le développement de la fonction publique d’État serait d’autant plus important que l’environnement économique deviendrait favorable. Ainsi, elle devrait représenter 31,7 %
des emplois de l’Ircantec en 2060 avec le scénario A, 31,5 % avec le B, 29,1 %
avec le C et 26,4 % avec le D. L’évolution de la fonction publique hospitalière
est moins sensible aux hypothèses de projection. Elle devrait ainsi contenir entre
20,8 % et 19,5 % des emplois de l’Ircantec selon ces quatre scénarios. Par ailleurs,
l’évolution de la fonction publique territoriale est moins nette. En effet, alors que
208
Annexes
dans les scénarios A et B elle jouerait un rôle de moins en moins important pour
les emplois de l’Ircantec, on observe une évolution inverse avec les scénarios C et
D<.
TABLEAU D.1 – Projection de la composition de l’effectif par famille d’employeurs.
Année
2020
2040
2060
Scénario
2011
A
B
C
D
A
B
C
D
A
B
C
D
FPE
28,5%
28,5%
29,0%
28,8%
27,6%
31,5%
31,3%
29,2%
26,7%
31,7%
31,5%
29,1%
26,4%
FPH
18,9%
18,9%
18,9%
18,9%
19,4%
19,8%
19,9%
19,4%
20,3%
19,8%
20,0%
19,5%
20,8%
FPT
41,2%
43,2%
43,4%
43,5%
44,4%
41,2%
41,4%
44,6%
46,6%
41,5%
41,6%
45,1%
47,0%
Autres
11,4%
8,8%
8,8%
8,7%
8,6%
7,4%
7,4%
6,9%
6,3%
7,0%
6,9%
6,4%
5,8%
N OTES : Répartition des cotisants par famille d’employeurs obtenue à partir des
projections.
S OURCE : Données de l’Ircantec, échantillon des cotisants nés au mois d’octobre et
ayant cotisé pour la première fois après 1970. Calcul des auteurs.
Finalement, la modélisation permet également de se concentrer sur l’évolution
de la durée moyenne de cotisation sans interruption des cotisants du régime de
l’Ircantec. Comme on peut le constater à partir du tableau D.2, l’évolution de
la durée de cotisation moyenne des non-titulaires de la fonction publique d’État
reste remarquablement similaire d’un scénario macroéconomique de projection à
l’autre. Ainsi, on devrait observer une hausse de cette durée la ramenant de 2,8
années de cotisation en 2011 à 3,7 pour le scénario A et 3,5 pour le D. L’évolution dans la fonction publique hospitalière reposerait quant à elle beaucoup plus
sur la situation économique. Une très forte baisse serait en effet constatée avec
les scénarios macroéconomiques A et B (de 3,1 années en 2011 à 1,7 en 2060),
alors qu’à l’inverse le scénario macroéconomique le plus pessimiste impliquerait
une forte hausse à 5,7 années en 2060. En ce qui concerne la fonction publique
territoriale, la dynamique serait encore différente puisque une augmentation de la
durée de cotisation y serait observée pour tous les scénarios macroéconomiques.
Cette hausse serait toutefois d’autant plus importante que l’environnement écono209
Les carrières des non-titulaires du secteur public
mique est dégradé : la durée de cotisation serait de 3,7 années avec les scénarios
A et B, 4,2 avec le C et 4,3 avec le D. Finalement, c’est dans la famille Autres
que l’évolution de la durée de cotisation serait la plus marquée. Selon nos projections, la durée moyenne de cotisation devrait y passer de 7,8 années en 2011
à 10,6 années en 2020 pour tous les scénarios. Cette hausse extrêmement rapide
est cependant principalement due au non-renouvellement des postiers. En effet,
comme nous l’avons vu, les nouveaux postiers recrutés depuis 2011 ne sont plus
affiliés à l’Ircantec. Ainsi, une part importante des cotisants de la famille Autres
vieillit mécaniquement.
TABLEAU D.2 – Projection de la durée moyenne de cotisation.
Scénario
A
B
C
D
Année
2011
2020
2040
2060
2020
2040
2060
2020
2040
2060
2020
2040
2060
FPE
2,8
3,1
3,6
3,7
3,1
3,6
3,7
3,1
3,6
3,6
3,0
3,4
3,5
FPH
3,2
3,3
1,8
1,7
3,3
1,8
1,7
3,4
2,8
3,0
3,7
4,8
5,7
FPT
2,9
3,5
3,8
3,8
3,5
3,9
3,8
3,5
4,0
4,2
3,4
4,1
4,3
Autres
7,8
10,6
11,2
10,1
10,6
11,1
10,0
10,6
11,0
9,9
10,6
10,7
9,6
N OTES : Durée moyenne de cotisation (en années) sans interruption supérieure à plus de 30 jours obtenue à partir des projections pour chacune
des quatre familles d’employeurs.
S OURCE : Données de l’Ircantec, échantillon des cotisants nés au mois d’octobre et ayant cotisé pour la première fois après 1970. Calcul des auteurs.
Décentralisation et contraintes budgétaires
Suite au groupe de travail sur les scénarios macroéconomiques des projections de
long terme de l’Ircantec du jeudi 5 juin 2014, un scénario alternatif de décentralisation est également étudié. Celui-ci suppose que le frein budgétaire au recrutement pourrait être plus fort à l’avenir et empêcher que les politiques de décentralisation se traduisent par un report des recrutements vers la fonction publique
territoriale. En comparaison du scénario principal de décentralisation, la fonction
210
Annexes
publique territoriale se verrait contrainte et ne pourrait ainsi pas embaucher plus
de non-titulaires que l’évolution strictement due aux facteurs économiques et démographiques.
F IGURE D.2 – Effectif des cotisants avec le scénario de décentralisation
alternatif.
N OTES : Résultats des projections de l’effectif des cotisants par exercice pour le scénario de décentralisation alternatif. Les hypothèses macroéconomiques sont celles
du scénario médian du Cor.
S OURCE : Données de l’Ircantec, échantillon des cotisants nés au mois d’octobre et
ayant cotisé pour la première fois après 1970. Calcul des auteurs.
La figure D.2 reporte l’évolution de l’effectif des cotisants pour le scénario de
décentralisation alternatif. Comme on peut le constater, il conduirait également à
une hausse du nombre de cotisants. Elle serait toutefois bien plus faible qu’avec le
scénario sans contrainte budgétaire empêchant le recrutement des non-titulaires
dans la fonction publique territoriale. En 2060, l’Ircantec compterait ainsi 3,01
millions de cotisants. Soit une hausse par rapport au scénario médian quatre fois
moins importante qu’avec le scénario principal de décentralisation.
Le non recrutement d’individus supplémentaires dans la fonction publique territoriale aurait un effet similaire sur la masse salariale. Celle-ci s’élèverait en 2060 à
97,2 milliards, soit 6,7 milliards de moins qu’avec le scénario de décentralisation
standard. En réduisant le nombre de nouveaux cotisants chaque année, la concentration des anciens cotisants dans l’effectif serait plus forte. Ainsi, on observerait
211
Les carrières des non-titulaires du secteur public
F IGURE D.3 – Masse salariale avec le scénario de décentralisation alternatif.
N OTES : Résultats des projections de la masse salariale par exercice pour le scénario de décentralisation alternatif. Les hypothèses macroéconomiques sont celles
du scénario médian du Cor. Les projections sont exprimées en euros constants de
2011.
S OURCE : Données de l’Ircantec, calcul des auteurs.
une faible hausse de la part des rémunérations comprises dans la seconde tranche
par rapport au scénario principal de décentralisation (7,0 % dans ce nouveau scénario contre 6,9 % dans le scénario de décentralisation principal).
212
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G LOSSAIRE
AGIRC Association générale des institutions de retraite complémentaire des cadres
APHP Assistance des hôpitaux de Paris
ARRCO Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés
ASPA Allocation de vieillesse aux personnes âgées
AVTS Allocation aux vieux travailleurs salariés
BEP Brevet d’études professionnelles
BEPC Brevet d’études du premier cycle du second degré
BTS Brevet de technicien supérieur
CANSSM Caisse autonome nationale de la Sécurité sociale dans les mines
CAP Certificat d’aptitude professionnelle
CARCDSF Caisse autonome de retraite des chirurgiens-dentistes et sages-femmes
CARMF Caisse autonome de retraite des médecins de France
CARPIMKO Caisse autonome de retraite et de prévoyance des infirmiers, masseurs kinésithérapeutes, pédicures-podologues, orthophonistes et orthoptistes
CARPV Caisse autonome de retraite et de prévoyance des vétérinaires
CAVAMAC Caisse d’allocation vieillesse des agents généraux et des mandataires
non salariés de l’assurance et de la capitalisation
CAVEC Caisse d’assurance vieillesse des experts-comptables
CAVIMAC Caisse d’assurance vieillesse invalidité et maladie des cultes
CAVOM Caisse de retraite des officiers ministériels
CAVP Caisse d’assurance vieillesse des pharmaciens
217
Les carrières des non-titulaires du secteur public
CEP Certificat d’études primaires
CIPAV Caisse interprofessionnelle de la prévoyance et d’assurance vieillesse
CNAV Caisse nationale d’assurance vieillesse
CNAVTS Caisse nationale d’assurance vieillesse des travailleurs salariés
CNBF Caisse nationale des barreaux français
CNRACL Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales
CNRS Centre national de la recherche scientifique
CPR SNCF Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la Société nationale des chemins de fer français
CRN Caisse de retraite des notaires
CRPCEN Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires
CRPNPAC Caisse de retraite du personnel naviguant professionnel de l’aéronautique civile
CRP RATP Caisse de retraites du personnel de la Régie autonome des transports
parisiens
DADS Déclaration annuelle de données sociales
DRA Départ en retraite anticipée
DUT Diplôme universitaire de technologie
EDF Électricité de France
EDP Échantillon démographique permanent
EIC Échantillon inter-régimes de cotisants
EPIC Établissement public à caractère industriel et commercial
ETP Équivalent temps plein
ENIM Établissement national des invalides de la marine
FPE Fonction publique d’État
FPH Fonction publique hospitalière
FPT Fonction publique territoriale
218
Bibliographie
FSPOEIE Fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels
d’État
GIP Groupement d’intérêt public
IEG Pensions des industries électriques et gazières
INRA Institut national de la recherche agronomique
IRCANTEC Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de
l’État et des collectivités publiques
IRCEC Institution de retraite complémentaire de l’enseignement et de la création
MSA Mutualité sociale agricole
PLFSS Projet de loi de financement de la Sécurité sociale
PSS Plafond de la Sécurité sociale
PTT Postes, télégraphes et téléphones
RAFP Retraite additionnelle de la fonction publique
RAVGDT Régime d’allocations viagères des gérants de tabacs
RSI Régime social des indépendants
SAMB Salaire annuel moyen de base
SRE Service des retraites de l’État
VECM Modèle autorégressif à correction d’erreurs
219
Les carrières des non-titulaires du secteur public
220
L ISTE
DES TABLEAUX
1.1 Principaux employeurs des cotisants de l’Ircantec.
. . . . . . . . . .
19
1.2 Comparaison de la distribution des emplois par sous famille d’employeurs. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
24
1.3 Sexe et âge des cotisants dans l’échantillon apparié. . . . . . . . . . .
27
1.4 Régimes de base des cotisants Ircantec au cours de leur carrière.
.
28
carrière. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
29
1.5 Régimes complémentaires des cotisants Ircantec au cours de leur
1.6 Résultats de l’identification des cotisants de l’Ircantec à partir de
l’enquête Emploi. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
34
2.1 Contrats par type d’employeurs. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
43
2.2 Mobilité intra-Ircantec des cotisants par employeur. . . . . . . . . . .
49
2.3 Emploi secondaire et caractéristiques individuelles des cotisants. . .
52
2.4 Durée des périodes de cotisation en années. . . . . . . . . . . . . . .
54
2.5 Évolution du nombre de périodes par employeur. . . . . . . . . . . .
56
2.6 Résultats de la régression logistique de la présence du cotisant un
an après sa première interrogation sur les determinants individuels. 58
2.7 Rémunérations moyennes par employeur (en % du plafond de la
sécurité sociale). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
62
2.8 Équation de salaire. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
66
3.1 Répartition des types pour les cotisants entrés en 1990. . . . . . . .
75
3.2 Répartition des types en 1990. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
76
221
Les carrières des non-titulaires du secteur public
4.1 Répartition des non-titulaires et de l’emploi public total. . . . . . . .
87
4.2 Synthèse des méthodes utilisées pour l’estimation de l’impact du
chômage sur l’effectif des cotisants à très cour terme. . . . . . . . . .
95
4.3 Résultats des régressions du taux de chômage sur l’effectif des cotisants à l’Ircantec. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
96
6.1 Comparaison des modèles concurrents. . . . . . . . . . . . . . . . . . 130
7.1 Scénario A. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 135
7.2 Scénario B. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 135
7.3 Scénario C. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136
7.4 Scénario A’. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136
7.5 Scénario C’. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136
7.6 Hypothèses pour la féminisation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 138
8.1 Projections à l’horizon 2060 avec les scénarios institutionnels
. . . 158
A.1 Reconstruction de la rémunération. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 164
A.2 Classification des régimes complémentaires présents dans l’EIC. . . 166
A.3 Classification des régimes de base présents dans l’EIC. . . . . . . . . 167
A.4 Pondération dans l’enquête Emploi pour la fonction publique. . . . 168
A.5 Redécoupage de la famille d’employeurs Autres. . . . . . . . . . . . . 176
B.1 Les non-titulaires civils et les conditions de titularisation contenues
dans le projet de loi. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 178
B.2 Estimation de l’effet des titularisations sur l’effectif des cotisants et
les emplois à l’Ircantec. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 191
C.1 Variables explicatives.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 194
C.2 Spécification pour chaque module. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 195
C.3 Estimation du nombre d’entrants. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 196
C.4 Estimation de la part des nouveaux cotisants. . . . . . . . . . . . . . . 197
C.5 Estimation des probabilités instantanées de survie. . . . . . . . . . . 198
C.6 Estimation du salaire endogène. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 199
222
Liste des tableaux
C.7 Estimation de la part des rémunérations dans la seconde tranche. . 202
D.1 Projection de la composition de l’effectif par famille d’employeurs. . 209
D.2 Projection de la durée moyenne de cotisation. . . . . . . . . . . . . . 210
223
Les carrières des non-titulaires du secteur public
224
L ISTE
DES FIGURES
1.1 Évolution du nombre d’employeurs. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
20
1.2 Évolution du nombre de cotisants. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
21
1.3 Évolution du nombre d’employeurs. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
22
1.4 Carrières les plus fréquentes. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
30
1.5 Niveau d’éducation des cotisants de l’Ircantec. . . . . . . . . . . . . .
35
1.6 Niveau d’éducation des cotisants de l’Ircantec par famille d’employeur. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
36
1.7 Professions des cotisants de l’Ircantec. . . . . . . . . . . . . . . . . . .
38
1.8 Professions des cotisants de l’Ircantec par famille d’employeur. . . .
39
2.1 Temps partiel subi. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
44
2.2 Temps partiel subi par famille d’employeur. . . . . . . . . . . . . . . .
45
2.3 Saisonnalité de l’emploi Ircantec. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
47
2.4 Fonctions de survie des cotisants. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
53
2.5 Évolution des rémunérations annuelles moyennes. . . . . . . . . . .
60
2.6 Évolution des rémunérations annuelles à l’entrée à l’Ircantec. . . . .
61
2.7 Évolution des rémunérations moyennes en équivalent temps plein.
64
3.1 Carrières des cotisants par type.
74
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.2 Devenir des cotisants de type 1 après leur première cotisation à
l’Ircantec. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
77
3.3 Devenir des cotisants de type 2 après leur première cotisation à
l’Ircantec. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
225
79
Les carrières des non-titulaires du secteur public
3.4 Devenir des cotisants de type 3 après leur première cotisation à
l’Ircantec. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
81
3.5 Devenir des cotisants de type 4 après leur première cotisation à
l’Ircantec. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
82
4.1 Évolution de la part de non-titulaires dans les effectifs des trois
fonctions publiques.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
88
4.2 Fonction de réponse de l’emploi privé sur l’effectif des cotisants. . .
92
4.3 Fonction de réponse de l’effectif des cotisants suite à une hausse du
chômage. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
94
5.1 Evolution salariale en équivalent temps plein. . . . . . . . . . . . . . 108
5.2 Architecture du modèle. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110
5.3 Flux entrant de cotisants.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112
5.4 Probabilité instantanée de rester à l’Ircantec.
. . . . . . . . . . . . . 115
6.1 Effet d’une hausse temporaire de la population active. . . . . . . . . 123
6.2 Effet d’une hausse temporaire du taux de chômage. . . . . . . . . . . 124
6.3 Exercice de projection : cotisants. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126
6.4 Exercice de projection : masse salariale. . . . . . . . . . . . . . . . . . 127
6.5 Exercice de projection : rémunérations entre 1 et 8 PSS. . . . . . . . 127
7.1 Projections de l’effectif des cotisants.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . 140
7.2 Projections de la masse salariale. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141
7.3 Projections de la seconde tranche de cotisation. . . . . . . . . . . . . 142
8.1 Contrats privés et effectif des cotisants. . . . . . . . . . . . . . . . . . 146
8.2 Contrats privés et masse salariale. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 147
8.3 Décentralisation et effectif des cotisants. . . . . . . . . . . . . . . . . 149
8.4 Décentralisation et masse salariale.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 150
8.5 Titularisation et effectif des cotisants. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 153
8.6 Titularisation et masse salariale. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 154
226
Liste des figures
8.7 CDIsation et effectif des cotisants. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157
8.8 CDIsation et masse salariale.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 158
A.1 Niveau d’éducation et professions en France. . . . . . . . . . . . . . . 169
A.2 Niveau d’éducation et professions des titulaires de la fonction publique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 171
A.3 Part des nouveaux cotisants parmi le flux entrant.
. . . . . . . . . . 174
B.1 Synthèse des titularisations de 1970 à 2010. . . . . . . . . . . . . . . 183
B.2 Rapport du nombre de transferts vers le public sur le nombre de
cotisants à l’Ircantec par année. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 185
B.3 Transferts vers le secteur public par famille d’employeur. . . . . . . . 186
B.4 Titularisations à partir des données de l’appariement. . . . . . . . . 188
B.5 Transferts par année. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 189
B.6 Probabilité de titularisation par famille. . . . . . . . . . . . . . . . . . 190
B.7 Estimations de la tendance de l’effectif des cotisants. . . . . . . . . . 190
C.1 Distribution de la part des rémunérations dans la seconde tranche
200
C.2 Exercice de projection : exclusion des années 1970. . . . . . . . . . . 205
D.1 Projections des taux de remplacement. . . . . . . . . . . . . . . . . . 208
D.2 Effectif des cotisants avec le scénario de décentralisation alternatif. 211
D.3 Masse salariale avec le scénario de décentralisation alternatif. . . . . 212
227
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