Les Ecrans à Plasma Modélisation et diagnostics pour l`amélioration

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Les Ecrans à Plasma Modélisation et diagnostics pour l`amélioration
Les Ecrans à Plasma
Modélisation et diagnostics pour l’amélioration des performances
J.P. Boeuf, Th. Callegari, R. Ganter, Ph. Guillot, J. Galy
Centre de Physique des Plasmas et Applications de Toulouse
CNRS, ESA 5002, Université Paul Sabatier
Les écrans à plasma ont maintenant atteint un
niveau de performance élevé et sont bien placés pour
jouer à brève échéance un rôle majeur dans le
domaine de la télévision haute définition1. Il reste bien
entendu à résoudre le problème des coûts. Le coût
d’un écran à plasma est lié d’une part à la fabrication
du panneau mais également à l’électronique de
commande. La part de l’électronique de commande
dans le coût total de l’écran devrait devenir
rapidement dominante2.
Bien que la qualité d’image des écrans plasma
récents soit excellente, l’efficacité de ces écrans reste
faible, de l’ordre de 1 lmn/W. La réduction du coût
global se fera par une réduction des coûts des
procédés de fabrication, mais également en cherchant
à améliorer l’efficacité des écrans. En effet une
meilleure efficacité permettra de fonctionner à plus
basse tension, ou, au moins, à plus basse puissance, ce
qui aura des répercussions positives sur le coût de
l’électronique de commande.
Dans cet article, nous dressons un bilan des
paramètres physiques affectant l’efficacité et le
contraste d’un écran à plasma, puis décrivons
brièvement les efforts de recherche menés au Centre
de Physique des Plasmas et Applications de Toulouse
en collaboration avec Thomson Plasma. Le but de ces
recherches est d’améliorer les performances des
écrans à plasma, notamment l’efficacité lumineuse, la
durée de vie, et l’adressage des cellules, à l’aide
d’une meilleure compréhension et caractérisation du
plasma basée sur la modélisation et les diagnostics.
Rappel des principes de fonctionnement d’une
cellule d’écran à plasma
Une cellule d’écran à plasma produit des photons
UV qui sont convertis en photons visibles par des
luminophores dans les trois couleurs fondamentales.
Un élément d’image ou pixel de l’écran est donc
constitué de trois cellules. L’émission de photons UV
par chaque cellule est le résultat d’une décharge
électrique dans un mélange de gaz rares
(généralement xénon et néon) qui crée un plasma froid
hors-équilibre.
Dans ce plasma de décharge luminescente, les
électrons, beaucoup plus énergétiques que les ions
excitent et ionisent les atomes de xénon et de néon. La
cinétique qui s’en suit conduit à l’émission de photons
à 147 nm correspondants à un niveau résonant du
xénon, et à l’émission de photons dans un continuum
autour de 173 nm, correspondant à la désexcitation
d’états excités moléculaires (excimères) du xénon.
Ces états moléculaires sont produits par collisions à
trois corps entre états excités atomiques du xénon et
atomes de xénon et de néon dans l’état fondamental.
Observateur
Electrode
Face avant
Diélectrique
Verre
UV
MgO
Verre
Face arrière
Gaz
Barrière
Luminophore
Electrode
Figure 1 : Coupe d’un écran à plasma alternatif
matriciel
La décharge électrique dans la cellule est initiée
par l’application d’une tension supérieure à la tension
de claquage du gaz entre deux électrodes disposées
dans la cellule. Les électrodes forment un réseau
matriciel (voir figure 1) dans la configuration choisie
par Thomson Plasma3. Des configurations à trois
électrodes ont été adoptées par la plupart des
constructeurs asiatiques (Fig. 2). Dans le cas de la
configuration matricielle (Fig. 1), des électrodes
lignes et des électrodes colonnes (environ 100 µm de
largeur) sont disposées perpendiculairement sur deux
dalles de verre. Une cellule de l’écran est définie par
l’intersection d’une ligne et d’une colonne. Une
couche diélectrique en émail d’environ 30 µm est
disposée au dessus des réseaux d ‘électrodes. Le
courant est donc limité capacitivement, et l’écran
fonctionne nécessairement en régime alternatif (nous
ne décrivons pas dans cet article les technologies à
courant continu qui semblent avoir été abandonnées).
Des barrières diélectriques (épaisseur environ 150
µm) séparent les électrodes colonnes pour minimiser
l’interaction électrique et optique entre cellules
voisines. La distance entre les surfaces des couches
diélectriques recouvrant les électrodes est d’environ
100 µm, et la pression du mélange de gaz est de
l’ordre de 500 torr.
Electrode Y
Electrode X
Email
MgO
Visible
UV
Luminophore
Electrode
d’adressage
Verre
Figure 2 : Coupe d’un écran à plasma à électrode
coplanaires. Des barrières diélectriques sont
disposées parallèlement à l’électrode d’adressage
dans des plans entourant le plan de coupe.
Des signaux de tension rectangulaires (amplitude
de l’ordre de 150 à 200 V) à une fréquence de 100
kHz sont appliqués en permanence entre l’ensemble
des lignes et l’ensemble des colonnes de l’écran.
L’amplitude de cette tension d’entretien est inférieure
à la tension de claquage du mélange gazeux. Pour
faire passer une cellule de l’écran de l’état éteint à
l’état allumé, on superpose à la tension d’entretien
entre la ligne et la colonne définissant cette cellule,
une impulsion d’écriture supérieure à la tension de
claquage du gaz, pendant quelques microsecondes.
L’intensité des avalanches électroniques dues à
l’ionisation du gaz en volume, et alimentées par
l’émission électronique secondaire à la surface
cathodique, induite par le bombardement des ions,
conduit au passage d’un courant dans le gaz. Ce
courant est associé à la formation d’un milieu
conducteur quasi-neutre, le plasma, constitué
d’électrons et d’ions de xénon et de néon. Dans les
conditions typiques d’un écran à plasma alternatif, la
densité de plasma atteint environ 1014 cm-3 au moment
du pic de courant. Le milieu est donc faiblement
ionisé puisque la densité d’atomes de gaz à 500 torr et
dans les conditions normales de température est
supérieure à 1019 cm-3 (un électron libre ou un ion en
moyenne pour 105 atomes). Du côté cathodique, le
plasma est séparé de la surface du diélectrique
recouvrant la cathode par une région de charge
d’espace positive, la gaine dans laquelle la plus
grande partie du potentiel appliqué se redistribue (le
champ est faible dans le plasma en raison de sa
conductivité relativement élevée). Les électrons émis
par la surface du diélectrique au-dessus de la cathode
sont fortement accélérés par le champ électrique de la
gaine, et déposent leur énergie dans le plasma sous
forme de collisions inélastiques avec les atomes de
gaz. L’énergie moyenne des électrons dépasse 10 eV
dans la gaine et est inférieure à 1 eV dans le plasma.
En raison de la présence des couches diélectriques,
la décharge est nécessairement transitoire. En effet la
charge progressive des capacités constituées par les
couches diélectriques induit une tension qui s’oppose
à la tension appliquée, et la tension aux bornes de
l’espace gazeux chute jusqu’à l’extinction de la
décharge. La durée de l’impulsion de courant est de
quelques dizaines de nanosecondes. Le plasma créé
par l’impulsion de courant diffuse vers les parois et se
recombine en des temps beaucoup plus longs, de
l’ordre de 5 µs. L’émission d’UV continue également
après l’impulsion de courant pendant quelques
microsecondes. Lors de l’alternance suivante de la
tension d’entretien, la tension due aux charges
accumulées précédemment sur les diélectriques
(charges « mémoires ») s’ajoute à la tension aux
bornes des électrodes, et la tension aux bornes de
l’espace gazeux passe à nouveau au-dessus de la
tension de claquage. Une nouvelle décharge
transitoire se produit. L’état allumé d’une cellule est
donc constitué d’une succession de décharges
impulsionnelles. A chaque alternance de la tension
d’entretien, la charge des diélectriques varie comme
+Q, -Q, +Q, …, c’est à dire que les décharges
électriques transfèrent chacune la charge 2Q dans un
sens puis dans l’autre. Pour passer de l’état allumé
d’une cellule à l’état éteint, il suffit donc de faire en
sorte qu’une décharge ne transfère que la charge Q, en
appliquant à un instant donné une tension plus faible
que la tension d’entretien. Ceci suffit à effacer la
charge mémoire et la cellule retourne dans l’état éteint
puisque la tension d’entretien à elle seule ne permet
pas le claquage du gaz.
L’intensité lumineuse de l’écran est ajustée en
changeant la fréquence de la tension d’entretien (à ces
fréquences l’œil intègre la lumière émise par les
impulsions successives de l’état allumé d’une cellule).
Les différents niveaux de gris de l’image sont obtenus
en modulant le nombre d’alternances pendant
lesquelles la cellule est maintenue dans l’état allumé.
Les écrans actuels permettent d’arriver à 16.8 millions
de couleurs (24 bit).
Amélioration de l’efficacité
Plusieurs caractéristiques des écrans à plasma
doivent être améliorées pour assurer à cette
technologie la domination du marché des écrans plats
de grande taille. Les différentes compagnies
impliquées dans le développement d’écrans à plasma
maintiennent un important effort de recherche. Ceci
est vrai notamment en Corée du Sud où un nombre
impressionnant d’équipes universitaires collaborent
avec les grands groupes comme Samsung ou LG
Electronics, et au Japon ou un consortium regroupant
une quinzaine d’équipes universitaires unit ses efforts
pour améliorer les performances des écrans à plasma.
Thomson Plasma, en France, travaille également en
étroite
collaboration
avec
des
laboratoires
universitaires.
Comme on l’a dit plus haut, l’une des
caractéristiques d’un écran à plasma qui doit être
absolument améliorée dans les années à venir est
l’efficacité lumineuse. Celle-ci est actuellement de
l’ordre de 1 lm/W ce qui équivaut à une utilisation
d’environ 0.5% de la puissance électrique dissipée
dans le panneau pour la production de photons
visibles (un bilan énergétique est représenté
schématiquement sur la figure 3). Un écran de 40 à 50
pouces de diagonale consomme actuellement de 400 à
500 W dont une grande partie est dissipée par effet
Joule ! Le contraste de l’écran est également un
paramètre important et qui doit être amélioré. Nous
discutons dans cette section les limitations et les voies
d’amélioration de l’efficacité lumineuse et du
contraste d’un écran à plasma.
- Bilan énergétique et efficacité
L’efficacité globale d’une cellule d’écran à plasma
est le résultat d’une succession de conversions
énergétiques. On a pu estimer, grâce à des modèles
physiques du plasma, que 15% seulement de la
puissance électrique est dissipée par les électrons dans
l’excitation du xénon. Une partie de la puissance
électrique restante est dissipée inutilement par les ions
dans la gaine (plus de 60%) sous forme de collisions
élastiques ou avec échange de charge avec les atomes
de gaz, et également lors de collisions avec la surface
des diélectriques. Le reste de la puissance est dissipée
dans l’ionisation du milieu (ceci est nécessaire à la
formation du plasma) et dans l’excitation du néon. Il
est clair qu’il faut chercher à minimiser l’excitation du
néon qui se désexcite en émettant des photons dans le
rouge-orangé, ce qui est nuisible à la pureté des
couleurs. Le néon est néanmoins nécessaire (les
mélanges utilisés contiennent de 4% à 10% de xénon
dans du néon) car, du fait du coefficient d’émission
électronique secondaire élevé des ions de néon, sa
présence permet de diminuer les tensions de
fonctionnement ce qui est fondamental pour réduire
les coûts de l’électronique de commande du panneau.
La surface des diélectriques en émail est recouverte
d’une couche mince de MgO qui a un coefficient
d’émission électronique secondaire particulièrement
élevé sous l’impact des ions de néon (de l’ordre de
0.5). Le MgO est également très résistant à la
pulvérisation induite par le bombardement des ions, ce
qui confère aux écrans à plasma actuels une durée de
vie assez satisfaisante (environ 30000 heures), même
si toujours inférieure à celle des écrans à tube
cathodique.
Le xénon est un émetteur de photons UV efficace
et des calculs cinétiques simples montrent que sur les
15% de la puissance utilisée par les électrons pour
exciter le xénon, environ 10% contribuent à
l’émission de photons UV (voir Fig. 3) ; une partie de
l’énergie est perdue dans les différentes cascades de
désexcitation des états du xénon, avec notamment,
production de photons infrarouges dans les 800 nm.
La disposition des phosphores dans la cellule ne
permet généralement pas une collection des photons
UV par les phosphores meilleure que 40%.
Énergie dissipée dans la décharge
100%
10%
Énergie utilisée pour la production de photons UV
10%
40%
Photons UV atteignant les luminophores
4%
25%
Conversion UV visible
1%
40%
Photons visibles atteignant la face avant
0.4%
Figure 3 : Bilan énergétique approximatif d’une
cellule d’écran à plasma
Le rendement de conversion des photons UV en
photons visibles peut être estimé à 25%. Ce faible
rendement est dû au fait que même si le rendement
quantique du phosphore est proche de un (un photon
visible émis pour un photon UV incident), la
différence d’énergie entre les photons UV du xénon
(147 nm, 173 nm) et les photons visibles est telle que
plus d’un tiers de l’énergie est perdue dans la
conversion.
Enfin les photons visibles émis par les phosphores
ne sont pas tous collectés efficacement et on peut
estimer à 40% le rendement de collection de ces
photons.
Le produit de ces différents rendements donne un
rendement global (puissance rayonnée sur puissance
électrique) de l’ordre de 10%x40%x25%x40% soit
0.4%, ce qui correspond à une efficacité de l’ordre de
1 lm/W encore bien inférieure à celle des tubes à
rayons cathodiques.
Amélioration de l’efficacité lumineuse
La description ci-dessus du bilan énergétique d’une
cellule d’écran à plasma nous amène à distinguer trois
voies distinctes d’amélioration du rendement
lumineux:
- recherche de luminophores de meilleur rendement
quantique
-
amélioration de la collection des photons UV par
les luminophores, et des photons visibles vers la
face avant
- augmentation de la part de l’énergie totale
dissipée dans l’excitation du xénon par les
électrons du plasma.
La recherche sur les phosphores est un élément
important de l’amélioration du rendement. Des
résultats encourageants4 ont été obtenus récemment
par des chercheurs d’Utrecht qui ont élaboré un
luminophore capable de produire deux photons
visibles (dans le rouge) pour un photon UV.
L’efficacité quantique de ce luminophore est de
190% ! Il reste cependant à trouver des luminophores
vert et bleu présentant des propriétés similaires pour
les photons UV du xénon. Une autre voie est
d’essayer de minimiser la perte d’énergie dans la
conversion photon UV-photon visible, en cherchant
un gaz émettant des photons UV moins énergétiques
que ceux du xénon. Comme on l’a dit plus haut, les
photons UV du xénon, entre 150 et 170 nm, ont des
énergies environ trois fois plus élevées que les
photons visibles. Le mercure, utilisé dans les lampes à
décharge permet une meilleure conversion, mais son
utilisation dans un écran à plasma n’est pas
envisageable.
L’optimisation de la géométrie de la cellule pour
une meilleure collection des photons est un aspect
fondamental de l’amélioration du rendement puisque,
d’après l’estimation de la figure 3, 40% des photons
UV, et 40% des photons visibles ne sont pas collectés
efficacement. Ceci est dû au fait que toute la surface
de la cellule ne peut pas être recouverte de
luminophores puisque les surfaces participant à la
décharge, au-dessus des électrodes, sont soumises
d’une part au bombardement intense des ions et
doivent avoir d’autre part un coefficient d’émission
secondaire élevé. La couche de MgO protège l’émail
et assure un coefficient d’émission secondaire élevé
mais elle absorbe les photons UV. D’autre part, dans
les configurations actuelles, les photons UV sont
produits par la décharge très près de ces surfaces. La
collection des photons pourra être augmentée de façon
significative si l’on arrive à déposer des couches
réfléchissant les photons sur les surfaces non
couvertes de phosphore5, et/ou si l’on trouve des
régimes de décharge permettant une émission des
photons UV plus loin de ces surfaces.
L’augmentation de la fraction de l’énergie totale
dissipée dans l’excitation du xénon par les électrons
semble un objectif réalisable à court terme. Dans les
configurations actuelles une partie importante de
l’énergie est dissipée inutilement par les ions dans la
gaine cathodique. D’autre part l’énergie électronique
gagnée par les électrons dans cette gaine est trop
grande et peu adaptée à l’excitation efficace du xénon.
En effet dans un mélange xénon-néon, les électrons
dissipent la plus grande partie de leur énergie dans
l’excitation du xénon à condition que leur énergie
moyenne soit suffisamment faible, et ce même si le
xénon est largement minoritaire. Ceci est dû au fait
que l’excitation et l’ionisation du néon ont des seuils
énergétiques plus élevés que ceux du xénon (environ 8
eV et 12 eV pour l’excitation et l’ionisation du xénon,
contre 16 eV et 21 eV pour le néon), et que les
sections efficaces de collisions électron-xénon sont
supérieures à celles des collisions électron-néon. Pour
des énergies électroniques trop élevées, les électrons
effectuent davantage d’excitation du néon, et
d’ionisation, au détriment de l’excitation du xénon.
- retard à l’allumage et contraste
Le claquage du gaz nécessite la présence, au
moment de l’application de la tension, d’un nombre
suffisant d’électrons libres dans la cellule pour initier
des avalanches conduisant à la formation du plasma.
En régime d’entretien, on peut penser, si la fréquence
de la tension appliquée est assez grande, que le
nombre d’électrons présents dans la cellule au début
d’une alternance de la tension est directement lié à la
décroissance du plasma de la décharge ayant eu lieu
dans la cellule au cours de l’alternance de tension
précédente. Si une cellule est restée éteinte longtemps
(zone « noire » de l’écran), le nombre d’électrons
libres dans la cellule résultant des décharges
précédentes devient quasi-nul et il devient difficile de
« rallumer » cette cellule. Pour empêcher les échecs
possibles d’écriture de cellules longtemps éteintes, on
allume de temps en temps toutes les cellules du
panneau pendant un temps court, de façon à maintenir
dans toutes les cellules un densité d’électrons libres
suffisante pour permettre une écriture au moment
voulu. Il est clair que ce procédé nuit au contraste
puisque on allume tout l’écran à intervalles réguliers.
En fait les mécanismes qui contrôlent la densité
résiduelle d’électrons libres dans une cellule
longtemps éteinte sont assez mal compris.
En particulier les simulations de la décroissance du
plasma pendant la post-décharge indiquent même
qu’il ne devrait pratiquement plus rester d’électrons ni
d’ions dans la cellule après quelques centaines de
microsecondes. Or l’expérience montre qu’on peut en
fait rallumer une cellule sans problème après plusieurs
millisecondes (mais pas au-delà d’une vingtaine de
millisecondes). Ceci peut être dû à l’effet de photons
UV provenant de cellules voisines allumées, et qui, en
frappant les surfaces diélectriques provoqueraient un
processus d’émission photoélectrique de la surface. Il
n’est pas non plus exclu que la surface des
diélectriques qui sont soumis à des champs élevés
pendant l’impulsion de décharge continuent à émettre
longtemps après, un très faible flux d’électrons
suffisant pour initier une décharge au moment où une
impulsion d’écriture est appliquée à nouveau.
D’une manière générale l’émission d’électrons par
la surface (de MgO dans notre cas) est un processus
très mal compris et non contrôlé. D’autre part il est
clair que le fonctionnement de l’écran ne pourrait que
bénéficier de la présence dans les cellules de
matériaux susceptibles d’émettre facilement des
électrons.
Diagnostics et modèles
Le Centre de Physique des Plasmas et Applications
de Toulouse a développé depuis plusieurs années un
ensemble de modèles qui ont permis de mieux
comprendre le détail des phénomènes physiques
impliqués dans la formation et l’extinction du plasma
d’une cellule6,7. Ces modèles peuvent prédire, pour
une géométrie et un mélange de gaz quelconques,
l’évolution spatio-temporelle des densités d’électrons
et d’ions dans la cellule, du potentiel électrique, des
charges sur les diélectriques et des densités d’espèces
excitées et de l’émission de photons. Ces modèles
sont basés sur la résolution d’équations de transport de
type fluide pour les électrons et les ions, couplés à
l’équation de Poisson pour le champ électrique. La
description de la cinétique des espèces excitées et du
transport de photons peut également être couplée au
modèle de transport des particules chargées. Le bilan
énergétique de la décharge est également fourni par le
calcul.
2.0
macro-cellule
Courant (mA)
1.5
courant
capacitif
modèle (5 torr)
1.0
courant de décharge
0.5
0.0
495
500
505
510
Temps (µs)
Figure 4 : Courants mesuré et calculé dans une
macrocellule. L’échelle de temps doit être divisée par
100 pour obtenir le courant dans une cellule réelle.
Ces modèles ont permis d’avoir accès à des
grandeurs difficilement mesurables en raison de la
taille des cellules et de la rapidité des phénomènes. Ils
ont également permis de comprendre les signaux
d’adressage complexes utilisés dans les cellules
coplanaires7 (à trois électrodes) par les compagnies
asiatiques. Ils sont actuellement utilisés pour
rechercher des structures et des conditions de
fonctionnement optimisant l’efficacité lumineuse des
cellules.
Parallèlement à cette approche de modélisation
nous avons mis au point une expérience basée sur
l’étude d’une macrocellule, représentation à l’échelle
100 d’une cellule réelle. Nous avons montré que les
lois d’échelle simples et classiques (échelle des
distances multipliée par 100, échelle des temps
multipliée par 100, pression de gaz réduite d’un
facteur 100, même tension appliquée) sont applicables
pour une grande partie des propriétés physiques de la
cellule (évolution du courant et du potentiel dans la
cellule, énergie dissipée dans l’excitation du xénon
etc…). Des diagnostics plasma comme l’imagerie par
caméra CCD intensifiée ou la spectroscopie résolue
spatialement et temporellement sont possibles à
réaliser de façon simple et à relativement faible coût
sur cette cellule compte tenu de la multiplication par
100 des échelles spatiales et temporelles. Cette cellule
permet également de changer très facilement la
structure géométrique de la cellule et constituera un
outil très précieux d’optimisation du fonctionnement
et de recherche de nouvelles structures. Les figures 4
et 5 illustrent quelques résultats de mesures
électriques et optiques sur une macro-cellule.
La macro-cellule présente également l ‘avantage de
permettre l’analyse d’une cellule isolée, ce qui est
plus difficile dans un panneau réel. Ainsi la
comparaison précise des courants mesuré et calculé
dans une cellule isolée (Fig. 4) n’avait pas été faite
jusqu’à présent faute de mesures fiables sur une
cellule isolée dans un panneau réel (la mesure du
courant dans un panneau comprenant un grand
nombre de cellule allumées est plus simple, mais le
jitter entre les différentes cellules fait apparaître un
courant moyen de durée beaucoup plus longue que
celle d’une cellule isolée).
L’imagerie CCD dont une illustration est donnée
sur la figure 5 est une source d’informations
précieuses sur la dynamique du plasma et sur le dépôt
d’énergie électronique. La figure 5 représente deux
images du plasma au voisinage du pic de courant
d’une décharge dans une configuration d’électrodes
matricielles. La macro-cellule est constituée de deux
électrodes perpendiculaires séparées d’une distance de
1 cm, à pression de gaz de 3 torr (mélange à 10% de
xénon dans du néon). Le produit pression x distance
est semblable à celui d’une cellule réelle (quelques
centaines de torr de pression pour une distance interélectrode de 100 µm). La largeur des électrodes est de
16 mm. Les électrodes sont transparentes, en ITO
(Indium Tin Oxide), de façon à permettre de visualiser
le plasma à travers le plan d’une des électrodes. La
tension d’entretien appliquée a une amplitude de 240
V, à une fréquence de 1 kHz (signaux rectangulaires).
L’impulsion de courant dure environ 5 µs (100 fois
plus que pour une cellule réelle) dans ces conditions
(voir Fig. 4).
Les deux images de la figure 5 correspondent à un
temps d’exposition de 500 ns au voisinage du pic de
courant. La figure 5a donne l’image intégrale du
système tandis qu’un filtre passe haut est utilisé pour
la figure 5b (les photons de longueur d’onde inférieure
à 700 nm sont éliminés).
(a)
cathode
désexcitation du néon. On voit donc que
conformément aux prédictions des modèles, la région
de plasma au-dessus de l’anode est beaucoup plus
efficace pour l’excitation du xénon (car la
« température » électronique y est plus faible) que la
région cathodique.
L’utilisation conjointe de diagnostics sophistiqués
et de la modélisation devrait permettre, comme cet
exemple le montre, de mieux comprendre les
mécanismes de dépôt de l’énergie électronique dans le
plasma, et de rechercher les conditions les plus
favorables à l’excitation du xénon.
La recherche sur les écrans à plasma en France
anode
(b)
Un réseau de laboratoires s’est constitué
récemment autour de Thomson Plasma pour renforcer
le potentiel de recherche sur la physique des écrans à
plasma et pour améliorer leurs performances. Ce
réseau inclut le Centre de Physique des Plasmas et
Applications de Toulouse (diagnostic et modélisation
du plasma), le Laboratoire de Spectrométrie Physique
de Grenoble (spectroscopie du plasma), l’Institut de
Physique Fondamentale (étude du bombardement
ionique des surfaces, durée de vie), et le Laboratoire
des Matériaux et de Génie Physique de Grenoble
(optimisation des couches émissives de type MgO ou
autres).
Références
Figure 5 : Images par caméra CCD intensifiée d’une
décharge dans une macro-cellule matricielle au
voisinage du pic de courant , dans les mêmes
conditions que la figure 4. (a) sans filtre ; (b) avec
filtre passe-haut (λ>700 nm)
La différence très nette entre les deux images
permet de déduire que le xénon est excité plus
efficacement dans la région du plasma au-dessus de
l’anode que dans la région cathodique. En effet
certains états excités du xénon se désexcitent en
émettant des photons infra-rouges, de longueur d’onde
dans la bande 800 nm – 1000 nm. L’image de la
figure 5b donne donc une représentation des régions
ou la densité de ces états excités est la plus grande.
Une analyse spectrale plus détaillée, à l’aide de filtres
plus sélectifs, permettra vraisemblablement de
conclure que la région de plasma au dessus de la
cathode émet davantage de photons provenant de la
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