SOLIDAIRES, UNITAIRES, DÉMOCRATIQUES Mouvement anti

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SOLIDAIRES, UNITAIRES, DÉMOCRATIQUES Mouvement anti
INFO
SOLIDAIRES, UNITAIRES, DÉMOCRATIQUES
Mouvement anti-CPE :
un coup de jeune dans la lutte pour une autre société
Le mouvement des étudiant-e-s et des lycéen-ne-s donne un véritable
« coup de jeune » à la lutte contre le libéralisme. Plus qu'une simple lutte
contre le CPE et même le CNE (à quoi certains politiques et les médias
voudraient bien la réduire), il s'agit d'une véritable remise en question d'un
modèle de société, celui de la précarité et la flexibilité généralisées, celui de
l'injustice sociale, de l'individualisme, de la concurrence et de la compétition.
Ce mouvement est aussi une bouffée d'oxygène dans les
mobilisations sociales : à la fois par sa détermination dans les revendications,
par son auto-organisation et ses pratiques démocratiques, par ses actions
innovantes... Le fait que les étudiant-e-s et lycéen-ne-s ne « perdent » pas de
journées de salaire ne doit pas inciter à minorer leur engagement : la mise en
péril d'une année d'études est pour certains le prix à payer de la lutte, et nous
devons saluer leur courage.
Mais ce mouvement ne doit pas se limiter à une lutte par
procuration. Nous ne pouvons nous contenter de « soutenir » les étudiant-e-s
et lycéen-ne-s. Si le mouvement est populaire, si nous sommes tous conscients
qu'il touche une question centrale, bien au-delà du CPE et de la situation des
« jeunes », la réponse des organisations syndicale et la mobilisation salariée
reste encore aujourd'hui largement insuffisante : l’ultimatum du 17 avril arrive
pour nous bien tard ! Salariés de l'Education Nationale, nous devons nous
engager plus avant, notamment pour obtenir plus largement l’abrogation de la
loi sur « l’égalité des chances », qui comporte également des mesures telles
que l’apprentissage à 14 ans, le travail de nuit à 15 ans, ou encore le « contrat
de « responsabilité parentale»…
Aujourd'hui, il est possible de faire reculer le gouvernement.
L'incohérence a ses limites, et si le ridicule ne tue pas, il déstabilise fortement !
Nous devons nous opposer à ces mesures qui prétendent hypocritement aller
dans le sens de l’intérêt des jeunes, mais qui sont tout sauf une réponse au
problème du chômage et de la précarité : encore une fois, voilà un beau cadeau
accordé au Medef. Nous ne pouvons pas non plus accepter la seule réponse
finalement donnée au mouvement : la répression policière et judiciaire qui
s'amplifie, y compris face à des manifestants pacifiques.
Nous devons donc être aux côtés des jeunes dans l'action. C'est
pourquoi Sud éducation a appelé à la grève et à la participation à des actions
menées par les étudiant-e-s et lycéen-ne-s. C'est pourquoi l'Union syndicale
Solidaires pousse à ce que l'intersyndicale s'engage à des actions décisives.
Au-delà de la lutte ponctuelle, nous devons aussi œuvrer pour que ce
mouvement s’inscrive dans la durée, ce qui semble déjà se faire à travers la
mise en place d’assemblées de quartier par exemple, ou la réflexion de fond
engagée par les étudiant-e-s et salarié-e-s sur les questions de précarité.
LLILLE CTC
CTC
Dispensé de timbrage
SUD
EDUCATION
59/62
Déposé le :11/04/06
Sommaire
p1 : édito
p2 et 3 : loi de prévention de
la délinquance
p4 : immigration jetable /
répression mouvement lycéen
Bulletin d’information
du syndicat SUD Education
Nord/Pas-de-Calais
84 rue de Cambrai
59000 Lille
tél/fax 03-20-55-99-29
e-mail :
[email protected]
site :
sudeduc5962.lautre.net
Directeur de la publication:
Guy Lesniewski
Imprimé par nos soins
N°CPPAP : 0210S06842
ISSN : 1767-9184
Mensuel : n°45
avril 06
prix 1 €
Prévention de la délinquance dès trois ans : les bavards sous ritaline
Des banlieues aux
facs en passant par
les
lycées,
le
gouvernement a fort
à faire avec la
jeunesse.
La
tentation était donc
grande,
depuis
longtemps,
de
contrôler
cette
dernière pour la
mettre au pas dès le
plus jeune âge avec
la complicité des
enseignants ou des
travailleurs médico
sociaux, invités à
dénoncer et à réprimer. Ce rêve abondamment caressé
risque de devenir réalité grâce au rapport de l’INSERM
sur les troubles de conduite chez l’enfant et à la loi de
Prévention de la Délinquance.
les « repérer ») seront soumis à une batterie de tests
neuropsychiatriques d’origine anglo-saxonne qui
détermineront la future thérapie. Cette approche est
d’autant plus inquiétante que le modèle de psychiatrie
prôné par l’INSERM préconise l’usage massif de
médicaments et de thérapies comportementalistes qui
nient bien souvent le malaise social. Le danger est
énorme– et c’est voulu – d’obtenir, à l’arrivée, une
jeunesse soumise à grandes gorgées de Ritaline et de
contrôle médico-social quasi totalitaire qui feint
d’ignorer qu’une bonne partie de ces fameuses conduites
trouvent aussi leur origine dans la politique économique
et sociale.
Si l’on peut s’étonner du peu de valeur
scientifique du rapport, on ne sera pas surpris, en
revanche, de la réponse apportée par le gouvernement :
obligation, dans le cadre du Projet de Loi de Prévention
de la Délinquance, de dénoncer les facteurs et autres
conduites « à risques » dès la maternelle et à les inscrire
dans un livret de comportement qui suivra l’élève au fil
de sa scolarité. Les enfants dénoncés (le rapport parle de
spécialisés et formés
dans
l’Education
Nationale et la santé
publique qui ne soient
pas instrumentalisés à
des fins de contrôle
social.
Ce projet de Loi est donc pour le gouvernement
intéressant à plus d’un titre. D’un côté, il musèle sa
jeunesse dès le plus âge avec la complicité des
enseignants en niant les effets de sa politique ; d’un
autre, il supplée au manque organisé de personnels
spécialisés par la fuite en avant vers le tout sécuritaire.
La boucle est donc bouclée : les enseignants fliquent
Dans cette expertise, qui tombe à point nommé
leurs élèves et de copieuses économies sont réalisées.
comme la plupart des rapports Bénisti et autres, des
Pour Sud éducation, reconnaître la souffrance
comportements
tels
que
« l’indocilité »,
« l’hétéroagressivité » , un « faible contrôle émotif » et sociale ou psychique des enfants et y apporter une
un « indice bas de moralité » sont pointés comme des réponse est un élément essentiel du rôle des enseignants
comportements asociaux et l’amorce d’un parcours vers et des travailleurs médico-sociaux. La stigmatisation, la
la délinquance. Joli retour en arrière, au temps béni des délation et le formatage ne constituent pas des thérapies.
mesures de crâne, des faciès d’assassin et du Bien au contraire. Le mal être des enfants doit être traité
déterminisme social. On dénonce un symptôme isolé de au sein de l’école avec des partenaires sûrs et formés,
l’histoire personnelle de l’enfant ou d’un environnement qui ne risquent pas de dénoncer leurs patients aux
générateur d’angoisse, d’insécurité sociale, et dans le autorités. Au moment où se mettent en place des bases
même temps on stigmatise l’origine « génétique », de données élèves généralisées à l’ensemble de
prénatale ou environnementale (chômage, précarité, l’Education nationale, il convient plus que jamais de
immigration ?) comme un facteur de trouble mental / résister à la transformation des écoles en centre de
social. Dans ces conditions, n’importe quel enfant un détention et de contrôle social. Sud éducation invite
peu trop agité ou issu d’une famille précarisée devient donc tous les personnels enseignants et les parents à
scientifiquement un délinquant en puissance tandis que signer la pétition afin d’obtenir le retrait de ce projet de
la moindre bêtise se transforme en pathologie grave. loi.
Gare aux bavardages et aux vols de cubes dans les (http://www.pasde0deco
maternelles ! L’INSERM oublie au passage que nduite.ras.eu.org/appel )
l’indocilité, comme bon nombre de conduites
Combattre
oppositionnelles à l’école ou la maison, font aussi partie cette Loi, c’est aussi
du développement de l’enfant et de sa structuration exiger la titularisation
mentale.
massive de personnels
« Prévention » de la délinquance ?
répression et contrôle social avant tout !
La loi pour la prévention de la délinquance
n’est pas encore parue mais tous les rapports (Bénisti,
Hermange, INSERM, texte de Sarkozy,) vont dans le
même sens ainsi qu’un certain nombre de lois dont celle
de la cohésion sociale de Borloo et de l’égalité des
chances de M. de Villepin (et oui encore lui !). Voilà
quelques petits florilèges :
►Partenariat travailleurs sociaux / enseignants /
municipalité pour un dispositif de contrôle social.
Les travailleurs sociaux, comme les personnels de
l’Education Nationale sont amenés à faire du repérage
et du signalement à
travers
divers
dispositifs déjà en
place comme les
Conseils Locaux de
Sécurité
et
de
Prévention de la
Délinquance
(CLSPD).
Les
informations
sont
centralisées par le
maire qui est placé au
centre
de
ce
dispositif.
Ses
pouvoirs
sont
considérablement
accrus (encore un
effet de la décentralisation) notamment en termes
judiciaires.
Ces pratiques qui sont déjà mises en place à titre
expérimental dans certains endroits conduisent aux
premiers dérapages tels que la tendance à constituer des
fichiers sociaux illégaux comme à Vitry Le François, et
plus généralement à considérer les données détenues
par les services sociaux, médico-sociaux, éducatifs,
comme consultables sur simple demande. A Annonay
encore, le collège adressait au commissariat les photos
de tous les élèves de l’établissement. Les services de
PMI seraient chargés de dépister les futurs délinquants
dès la crèche.
Ainsi par le nouveau concept de « secret partagé » qui
permettrait la circulation d’informations concernant la
vie privée dans diverses sphères qu’elles soient
politiques ou policière, on met fin au secret
professionnel.
►Sanctions associées au contrat de bonne conduite
pour les familles. Dans la loi sur l’égalité des chances,
Dominique de Villepin instaurait déjà le contrat de
responsabilité parentale piloté par les chefs
d’établissements scolaires, qui prévoit des sanctions
dans le cas où la famille ne se conformerait pas aux
termes dudit contrat, comme la mise sous tutelle des
allocations familiales ou la suspension du versement de
ces allocations.
Dans son projet de plan de prévention de la délinquance
Nicolas Sarkozy envisage le Conseil pour les droits et
les devoirs des familles. Le maire aurait dans ce cadre
le nouveau pouvoir de prononcer un rappel à l’ordre. Il
pourra également, prononcer des « stages de
parentalité » censés aider les parents « défaillants au
niveau éducatif », notamment comme alternative aux
poursuites (en application de l’article 227-17 du code
pénal). Par exemple, si un enfant s’absente souvent de
l’école, les enseignants doivent le dénoncer au maire et
les parents seront convoqués afin de suivre « un stage
de parentalité », et ils devront payer en plus une
amende.
►Elargissement vers des personnes privées des
moyens juridiques relatifs au constat des infractions
Ainsi la possibilité serait-elle accordée aux bailleurs
sociaux ou aux personnels des transports de pouvoir
constater des contraventions d’atteinte aux personnes
(menaces de violence, bruits et tapages nocturnes).
►Durcissement de la répression envers les jeunes
mineurs : En réaction aux violences urbaines, le projet
prévoit de réhabiliter le principe d’une responsabilité
pénale collective telle qu’elle fut établie en 1970 avec la
loi anti-casseurs puis abrogée en 1981. Pour les jeunes
mineurs (13-16 ans), dont on considère que « la
capacité de nuire » a évolué et devient « comparable à
celle des 16-18 ans de 1945 » (fantasme qu’aucun fait
avéré n’atteste selon les professionnels et les
chercheurs), on prévoit un panel de sanctions élargi
(avertissement judiciaire, stage d’instruction civique,
admonestation...). Le développement de « centres
d’éducation
adaptée »
est
aussi
envisagé
comme
mesure
d’éloignement. Pour les
mineurs de moins de 13
ans, le texte prévoit la
possibilité de prononcer
une mesure de travail
d’intérêt général ! Cette
mesure conduit ni plus ni
moins à légaliser de
façon
détournée
le
travail des enfants.
Plus d’info : voir le site du collectif national unitaire
Résistance à la Délation : www.abri.org/antidélation
A Jacky, qui va nous manquer dans cette lutte contre ces lois injustes
Contre l’immigration « jetable »
Le projet de loi CESEDA (Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile) présenté par
Sarkozy constitue une nouvelle atteinte sans précédent aux droits fondamentaux des étrangers. Sous prétexte d’en
« finir avec l’immigration subie pour promouvoir une immigration choisie », c’est plutôt l’immigration jetable et
soumise au vouloir du patronat qu’on parachève. Cette réforme prévoit de restreindre considérablement les droits
des étrangers et de rendre quasiment impossible les régularisations, maintenant la plupart des étrangers dans une
situation de non-droit : conditions « d’intégration républicaine » (loi de 2003) étendue à la carte de séjour
temporaire, protections contre les mesures d’éloignement restreintes (d’où recrudescence inévitable des « doubles
peines » soi-disant annulées par ce même Sarko), restriction drastique du droit au respect de la vie privée et
familiale (assortiment de conditions de ressources et de logements quasiment impossible à réunir), restriction de
l’accueil des étrangers malades, restriction du droit d’asile, etc. Dans le même temps, on crée une carte de séjour
particulière, « capacités et talents » réservée aux étrangers estimés « rentables » pour l’économie française, et
évidemment soumise à la durée du contrat de travail….On crée une nouvelle catégorie d’étranger, qui de toute
façon se trouve réduit à une « marchandise », travailleur jetable dont on pourra user et abuser puis expulser, tout
déniant à tous les droits les plus fondamentaux comme celui d’être protégé contre les persécutions, de vivre en
famille, ou de se soigner.
Un collectif « Uni(e)s contre une immigration jetable », rassemblant près de 300 organisations s’est créé
pour dénoncer et lutter contre ce projet de loi. Pétition à signer en ligne : www.contreimmigrationjetable.org.
Des compléments d’information sur ce même site, ou sur le site du gisti (www.gisti.org).
Un collectif s’est aussi monté dans la région lilloise, dont le Réseau Education Sans Frontière fait partie.
Info RESF : de plus en plus de situations sont portées à la connaissance du réseau. La mobilisation de tous est de
plus en plus nécessaire pour faire vivre le réseau et agir pour défendre les droits des élèves sans-papier. A noter la
présence de RESF 59/62 pour le festival « tous debout » le 21 avril à Noyelles-Godeau.
Contre la répression du mouvement anti-CPE : Pas un-e militant-e en prison !
Face à un mouvement social toujours plus
massif contre la précarisation et l'emblématique CPE, le
gouvernement et l'UMP prétendent, après l'avoir ignoré
avec morgue, vouloir dialoguer. Pourtant, « la main
tendue » assène la matraque aux militant-e-s qualifié-es de casseurs. A chaque manifestation, les CRS et la
BAC chargent violemment, distribuent coups, gaz
lacrymogènes, flash-balls, canons à eau... Notre
camarade Cyril Ferez de SUD PTT est toujours entre la
vie et la mort après avoir été très gravement blessé par
les policiers samedi 18 mars. Des cas moins graves se
multiplient. A Lille, le 5 avril après un blocage
pacifique des voies de chemin de fer à la gare Lille
Flandres, les CRS ont matraqué « pour le plaisir » des
lycén-ne-s, étudiant-e-s et salarié-e-s qui venaient
pourtant de quitter les voies sans aucune résistance. A la
violence policière succèdent encore les centaines
d'interpellations (plus de 100 à Lille dont 67 le 4 avril).
Après les gardes à vue viennent les poursuites
judiciaires pour jets de projectiles et les pratiques
« outrages et rébellion », puis la mise en « dépôt », les
comparutions immédiates, les procès à venir. Sur les 5
personnes déjà passées en comparution immédiate à
Lille, 4 ont vu leur procès reporté à la fin avril mais une
autre est placée en détention. Un premier procès qui
s'est tenu le 4 avril s'est soldé par deux mois avec sursis
et 5 ans (!) de mise à l'épreuve. Plusieurs procès sont
prévus entre la fin avril et la fin mai. En comparution
immédiate, un lycéen à Paris a écopé de 1 mois de
prison ferme et de cinq mois avec sursis et un autre du
Mans a écopé de 10 mois de prison ferme...
En plus de la surdité ou des tergiversations du
gouvernement, l'appel de De Robien à réouvrir coûte
que coûte les lycées bloqués, y compris par la force (et
ce malgré les tristes souvenirs de l'année dernière lors
de la lutte contre la loi Fillon), pourrait encore
augmenter le nombre de victimes de la violence
policière et d'une justice aux ordres. Ajoutons que les
lycéen-ne-s sont aussi victimes de pressions
injustifiables de chefs d'établissement zélés:
empressement soudain à signaler aux parents toute
absence, menaces de renvoi du lycée ou de l'internat...
Certains sont même passés aux actes. Le proviseur du
lycée Baggio à Lille a fait virer une cinquantaine
d'internes le 28 mars après midi pour les punir
(heureusement ils ont pu dormir à lille III)et 3 élèves
ont été exclus définitivement de l'internat et attendent
de passer en conseil de discipline... à moins de 3 mois
du bac.
Personnels de l'éducation, ne laissons pas
s'appliquer les décisions arbitraires de l'administration.
Exigeons l’abandon des poursuites contre les
manifestant-e-s arrêtés pendant les mobilisations
anti-CPE (mais aussi contre la loi Fillon), leur relaxe
et l’amnistie pour tous et toutes.