Regards croisés sur les Emplois d`avenir

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Regards croisés sur les Emplois d`avenir
Etude-action sur
les Emplois d’avenir
Regards croisés sur les Emplois d’avenir
Territoire de la Mission Locale de
l’agglomération de Montpellier
Rapport final
Anne Le Bissonnais, Julie Erceau – Octobre 2014
Tous les documents constituant l’étude sont téléchargeables à partir
du site : www.institutbertrandschwartz.org
1
Sommaire
Introduction............................................................................................................................................. 3
Rappel des objectifs de l’étude ........................................................................................................... 3
Eléments méthodologiques................................................................................................................. 3
1.
Le contexte du territoire ................................................................................................................. 5
1.1 Un territoire dynamique sur le plan démographique, un taux de chômage important ............... 5
1.2 Une Mission Locale bien implantée sur le territoire, plus de 11 000 jeunes accompagnés ......... 6
2.
La mise en œuvre du dispositif Emplois d’avenir ............................................................................ 7
2.1 Un dispositif globalement bien accueilli sur le territoire .............................................................. 7
2.2 Un démarrage difficile, une montée en puissance progressive .................................................... 8
2.3 Une organisation qui a évolué pour faire face à la montée en charge du dispositif .................. 12
2.4 « Le socle de collaboration » régional et le rôle de la « cellule opérationnelle » ....................... 18
2.5 Un objectif ambitieux pour 2013, difficile à atteindre ................................................................ 20
3.
Un dispositif d’emploi important pour les jeunes peu qualifiés du territoire .............................. 21
3.1 Pour les jeunes, une véritable opportunité d’emploi stable ....................................................... 21
3.2 Pour les employeurs, des motivations différentes de recruter.................................................. 25
3.3 Des modalités d’intégration, d’accompagnement et de tutorat variables selon les employeurs
........................................................................................................................................................... 27
3.4 La mise en œuvre des parcours de formation ............................................................................ 30
4.
Eléments de synthèse et questionnements .................................................................................. 32
Annexes ................................................................................................................................................. 36
Annexe 1. Entretiens réalisés ........................................................................................................... 36
Annexe 2. Compte-rendu de la restitution de l’étude ...................................................................... 37
2
Introduction
Rappel des objectifs de l’étude
L’objectif du Volet 2 de l’étude sur les Emplois d’avenir (EAV), portée par l’Institut Bertrand Schwartz,
est de comprendre comment le dispositif est mis en œuvre sur le terrain, comment il fonctionne et
comment les différents acteurs concernés le perçoivent. Il ne s’agit pas d’une évaluation mais d’une
étude qualitative, permettant de recueillir le point de vue des différents interlocuteurs (conseillers,
directeurs, élus, employeurs, services de l’Etat, jeunes) sur :
- la conception du dispositif des Emplois d’avenir et sa pertinence (public ciblé, employeurs concernés,
aide financière, formation dispensée etc.) ;
- les difficultés concrètes rencontrées, en particulier par les jeunes, les conseillers et les employeurs ;
- les points de blocage, les éléments facilitateurs et les pistes d’amélioration.
L’étude est réalisée sur six territoires, ceux des Missions Locales du Pays Salonais, de Nord Essonne,
de l’Agglomération de Montpellier, de l’arrondissement d’Aurillac, du Poitou et des Hautes-Pyrénées
(Tarbes) entre novembre 2013 et juin 2014.
Eléments méthodologiques
Ce rapport concerne l’enquête réalisée sur le territoire de la Mission Locale de l’Agglomération de
Montpellier (MLJAM). Des entretiens préparatoires effectués à Montpellier fin 2013 avec Monsieur
Abder Abouitman, directeur-adjoint de la Mission Locale et avec Monsieur Florian Burlet, conseiller
référent sur les Emplois d’avenir ont permis:
- de connaître l’organisation de la Mission Locale pour la mise en œuvre des EAV, les objectifs fixés et
les premiers résultats obtenus ;
- d’identifier les personnes à interroger dans le cadre des entretiens qualitatifs et d’organiser les prises
de rendez-vous ;
- de recueillir les documents utiles (rapports, tableaux, comptes rendus de cellules opérationnelles etc.).
Au total, une vingtaine d’entretiens semi-directifs (d’une durée d’une heure en moyenne) ont été
réalisés entre janvier et avril 2014 auprès de professionnels et conseillers de la Mission Locale,
d’employeurs, de représentants de l’Etat et de jeunes (voir liste des entretiens en annexe 1).
Ce document a pour objectif de rendre compte des constats et des points de vue recueillis sur le
territoire, d’en faire une analyse croisée et d’en tirer les premiers enseignements. Ces éléments ont été
mis en débat lors d’une restitution, organisée en septembre 2014, en présence des personnes
interrogées. Le compte-rendu de cette rencontre a été intégré au rapport (voir annexe 2).
Après avoir présenté le contexte du territoire et de la Mission Locale, nous analyserons comment le
dispositif Emplois d’avenir a été mis en œuvre et comment les acteurs se sont organisés. Nous
montrerons ensuite l’intérêt des Emplois d’avenir pour les jeunes et pour les employeurs ainsi que la
variété des modalités de mise en place du tutorat et des plans de formation. Enfin, nous présenterons
une synthèse des enseignements tirés de l’étude.
3
Compte tenu de la durée de l’enquête (4 jours) et du nombre faible d’entretiens réalisés par catégorie
d’acteurs, il convient d’être prudent dans les interprétations; le travail d’enquête sur les autres territoires
viendra enrichir l’analyse et permettra d’approfondir les premières hypothèses formulées. Le rapport
transversal, intégrant les éléments des six rapports de site, sera finalisé en octobre 2014 et fera l’objet
d’une restitution plus large.
4
1. Le contexte du territoire
1.1 Un territoire dynamique sur le plan démographique, un taux de chômage important
La communauté d’agglomération de Montpellier représente 31 communes et 419 291 habitants1. Le
territoire est attractif et dynamique sur le plan démographique; la croissance démographique y est deux
fois plus élevée que la moyenne régionale, avec un flux de plus de 5 500 habitants par an en solde
migratoire, dont plus d’un tiers sont diplômés de l’enseignement supérieur.
A elle seule, la Commune de Montpellier compte 264 538 habitants au recensement de 2011.
C’est une ville jeune, avec 32,5% de la population âgée de 15 à 29 ans (17,6% à l’échelle de
l’Agglomération).
Avec 29 000 entreprises, 60 000 étudiants et des Pôles d'excellence dans les domaines de la santé, de
l'eau, de l'agronomie ou des technologies de pointe, l’Agglomération a des atouts mais la conjoncture
économique reste mauvaise. Les projets de développement (lignes de tramway, construction de
logements sociaux et d’équipements tels que les parcs d’activités et les pépinières d’entreprises)
permettent de maintenir l’emploi dans le secteur des travaux publics. Le tissu économique local des
Très petites entreprises (TPE) est fortement touché par la crise.
Les activités de la sphère présentielle2 et en particulier dans le secteur des services à la personne, sont
majoritaires.
Les emplois sont fortement concentrés à Montpellier et dans certaines communes limitrophes comme
Lattes, Pérols, Saint Jean de Vedas ou Castelnau le Lez.
En raison du développement du chômage et des emplois peu qualifiés, les revenus de la population du
bassin d’emploi sont en dessous de ceux de la moyenne nationale : 48% des foyers fiscaux ne sont pas
imposables contre 45,5% en France métropolitaine.
Alors que le taux de chômage a augmenté de 3,6% dans le département de l’Hérault (109 782
demandeurs d’emploi catégories A, B et C inscrits à Pôle emploi fin mars 2014), il a diminué
légèrement pour les jeunes. En mars 2014, il y avait pour le département de l’Hérault 16 531
demandeurs d’emploi de moins de 25 ans inscrits à Pôle emploi (catégories A, B et C) contre 16 819 un
an avant3; cette légère baisse peut être attribuée à la mise en œuvre des EAV.
Pour la zone d’emploi de Montpellier (plus large que l’Agglomération), le chômage était de 13,5%
au 4° trimestre (contre 13,9% pour la Région et 9,8% pour la France).
Le chômage des jeunes reste élevé ; il est particulièrement important dans les quartiers prioritaires de la
Ville de Montpellier, notamment dans les cinq Zones urbaines sensibles (ZUS) : Gély-Figuerolles, La
Paillade (plus de 15 000 habitants, dont 34,4% de moins de 20 ans et 73,2% de jeunes adultes sans
diplôme de niveau au moins égal au bac), Les Cévennes, Pas du Loup-Val de Croze-Paul Valéry, et
Petit Bard-Pergola.
Le territoire ne comporte pas de Zone de revitalisation rurale (ZRR).
1
Au 1er janvier 2012 (source INSEE)
L’économie présentielle regroupe les activités mises en œuvre localement pour la production de biens et de services visant
la satisfaction des besoins de personnes présentes dans la zone, qu’elles soient résidentes ou touristes.
3 http://www.languedoc-roussillon.direccte.gouv.fr/IMG/pdf/STMT1403-note.pdf
2
5
1.2 Une Mission Locale bien implantée sur le territoire, plus de 11 000 jeunes accompagnés
Créée en 1983, la Permanence d’accueil, d’information et d’orientation (PAIO) est devenue Mission
locale d’insertion de la Ville de Montpellier en 1997 puis Mission Locale des jeunes de l’agglomération
de Montpellier (MLJAM) en 2002.
Financée en 2013 à 50% par l’Etat et à 24% par l’agglomération, l’association Mission Locale
regroupe 82 professionnels (dont une conseillère détachée par Pôle emploi) et dispose de 15 lieux
d’accueil : 7 antennes (Montpellier Mosson, Montpellier Centre, Montpellier Croix d’Argent, Castries,
Pignan, Lattes, Villeneuve les Maguelone) et 8 permanences décentralisées, dans les quartiers de
Montpellier ou les communes rurales.
La Mission Locale accompagne les jeunes dans les différents champs de l’insertion sociale et
professionnelle (formation, emploi, santé, mobilité, logement); elle collabore avec les partenaires locaux
intervenants dans ces domaines. Elle mène des actions spécifiques dans les quartiers, dans le cadre du
Contrat urbain de cohésion sociale (CUCS). Un réseau de parrains actifs ou retraités renforce le travail
d’accompagnement des jeunes vers l’emploi.
Le partenariat avec Pôle emploi est concrétisé par une Convention de co-traitance : en 2013, 1140
Jeunes ont pu bénéficier du Programme Personnalisé d’Accompagnement à l’Emploi (PPAE).
La MLJAM co organise ou participe également aux salons emploi/formation (rencontres pour l’emploi de
Montpellier Agglo, TAF, Handi Job, rencontres Interprofessionnelles, etc.) mais aussi à des
manifestations autour de la santé ou de la mobilité internationale.
Depuis 2008, la Mission Locale développe des actions particulières d’accompagnement vers l’emploi et
l’alternance (information sur les contrats, mises en relation, sécurisation des recrutements etc.) ; en
2009, elle a renforcé ces actions avec les employeurs en créant un service relations entreprises
chargé de la prospection d’offres d’emploi et d’un soutien gratuit aux employeurs qui souhaitent recruter
(choix du profil, du contrat, aide au montage des dossiers, présélection des candidats etc.).1935
entreprises sont inscrites dans la base Parcours 3 de la MLJAM.
L’existence de ce service a été un atout dans le cadre de la mise en œuvre des Emplois d’avenir. En
effet, après une première étape de reconnaissance des compétences du réseau des Missions Locales
en 2005 avec leur intégration au sein du Service Public de l’Emploi des Jeunes, l’Etat leur a confié
en 2012 pour la première fois, la gestion totale du dispositif Emploi d’Avenir.
En 2013, la MLJAM a accompagné 11 662 jeunes4, dont 50% étaient âgés de 22 à 25 ans. 25%
étaient non diplômés, 29% avaient un niveau CAP/BEP, 37% avaient un niveau Bac et 9% au moins
un niveau bac + 2.
17,2% des jeunes accompagnés sont issus des ZUS.
4471 nouveaux jeunes ont été accueillis pour la première fois en 2013.
4
Voir Rapport d’activité 2013 de la Mission Locale de l’agglomération de Montpellier.
6
2. La mise en œuvre du dispositif Emplois d’avenir
2.1 Un dispositif globalement bien accueilli sur le territoire
Pour les acteurs rencontrés, la durée du contrat proposé et la mise en place des parcours de formation
constituent les aspects les plus intéressants du dispositif5.
L’animatrice territoriale de la Direccte (Unité territoriale 34) met en avant l’opportunité du parcours de
qualification :
« On a affaire à des jeunes non demandeurs de formation, qui recherchent prioritairement un
emploi; l’intérêt, c’est la durée longue du contrat durant laquelle ils vont comprendre les enjeux
et trouver progressivement le sens de la professionnalisation. »
Elle souligne également l’intérêt de la logique de co construction avec la Mission Locale, l’employeur et
le jeune et le rapprochement des Missions Locales avec les Organismes Paritaires Collecteurs Agréés
(OPCA).
Pour Pôle emploi, les principaux avantages du dispositif sont les suivants :
« - La cible des jeunes non qualifiés (public prioritaire très touché par la sélectivité du marché
du travail),
- le travail sur le parcours formation – qualification en lien avec l’embauche,
- la durée du contrat (CDI temps plein ou sur dérogation temps-partiel),
- l’accompagnement dans l’emploi qui favorise l’intégration et la mise en œuvre plan d’action
formation) ».
Le dispositif a été également bien accueilli par les professionnels de la Mission Locale, même si
certains aspects, liés aux critères d’éligibilité notamment, ont été parfois difficiles à gérer :
« Le dispositif est une réponse adaptée à un public ciblé, qui est d’ailleurs souvent en
accompagnement renforcé; donc, on l’a accueilli avec enthousiasme. C’est une occasion pour
les jeunes de se former pour rebondir ensuite. Car il s’agit souvent de CDD (…). C’est souvent
la première fois qu’ils ont la possibilité d’accéder à un emploi. Au départ, les collègues ont été
sceptiques sur l’antenne Centre car nous n’avons pas de ZUS et l’objectif était de toucher ces
jeunes de ZUS. Mais les jeunes en centre-ville ont été pris. Il y a beaucoup de jeunes en
difficulté dans certains quartiers dans Aiguelongue, la cité Montassinos par exemple, ou la
Pompignane. (…) Il a fallu aussi gérer la pression du public, celle des jeunes diplômés qui se
plaignaient de ne pas avoir accès aux Emplois d’avenir. Le point négatif est lié à cet aspect :
« Si j’avais su, je n’aurais pas eu mon bac » En 2014, on a moins cette pression. »
(Responsable territorial)
Dans les antennes et quartiers Politique de la Ville, où les attentes des jeunes étaient fortes, la pression
a sans doute été accentuée :
« J’ai bien accueilli le dispositif mais sa mise en œuvre s’est faite dans la précipitation. (…) Il y
a eu une mauvaise communication au niveau national et des effets d’annonce. On a « sur
5
Pour rappel, les contrats Emplois d’avenir sont des CDI ou des CDD de 1 à 3 ans, à temps plein (sauf exception).
7
communiqué » et il y a eu un effet négatif; on a été assaillis par les jeunes ; ils venaient ici
comme si on avait reçu le matin des cartons d’Emplois d’avenir et ils venaient chercher le leur.
C’était difficile à gérer : on gérait la violence, l’incompréhension, la déception. Il fallait réajuster
le tir. (…) Les associations ont fait le relais de la communication et les jeunes sont venus là ;
mais ils n’étaient pas toujours dans les critères ; c’étaient des jeunes en difficulté, peu ou pas
qualifiés, avec peu ou pas d’expérience (…) les plus revendicateurs ; certains avaient une
expérience dans le bâtiment mais les offres concernaient surtout le non marchand. On
demandait des jeunes avec des qualifications spécifiques. » (Conseiller référent emploi
Mosson)
« Les Emplois d’avenir apportent une plus-value pour les Missions Locales; c’est une mesure
intéressante (…) même si les critères d’éligibilité sont compliqués à gérer et même s’il est
difficile aussi de gérer les objectifs quantitatifs. » (Responsable territorial)
L’existence d’un service relation entreprises au sein de la ML était un atout, selon le conseiller chargé
depuis plusieurs années de la gestion des offres, de la présélection des candidats et de la relation avec
les employeurs :
« Quand les Emplois d’avenir sont arrivés, j’ai trouvé que le signal était positif; cela a révélé le
bien fondé de tout ce qui avait été mis en place auparavant, notamment la structuration du
service entreprise. Nous avions déjà constitué un fichier entreprises et nous étions déjà
mobilisés sur les autres contrats aidés (CIE et CAE). Nous étions donc prêts. Les Emplois
d’avenir ont dynamisé le service. » (Chargé de relations entreprises de la ML)
2.2 Un démarrage difficile, une montée en puissance progressive
Dès la sortie des textes officiels, la MLJAM s’est engagée dans la mise en œuvre du dispositif EAV,
avec un objectif fixé de 636 contrats à signer avant le 31 décembre 2013.
En novembre 2012, le ministre de l’économie sociale et solidaire, Benoit Hamon, était à Montpellier
pour signer la convention d’engagement pour les Emplois d’avenir avec le Conseil général de l'Hérault.
A cette occasion, les quatre premiers recrutements en EAV ont été réalisés avec Hérault Sport 6 à
l’Institut régional du travail social (IRTS) de Montpellier en présence du ministre.
Mais, selon le référent Emplois d’avenir de la Mission Locale :
« La mise en place du dispositif au démarrage a été un peu lente sur l’agglo; on était peu
nombreux à y travailler ; on n’a pas impliqué plus que ça les conseillers au démarrage. S. et
moi, avons absorbé toutes les demandes de la part des associations etc. parce qu’au départ,
seul le secteur non marchand était concerné. Puis on est monté en puissance et au bout de 8
mois, on a dû mettre en place une organisation spécifique pour le déploiement des Emplois
d’avenir. (…)
Dans les premiers mois, les offres provenaient essentiellement des associations et des
collectivités locales (…) Nous avons fait 300 offres à deux pendant ces 8 mois, de novembre et
juin 2013. Puis quand le dispositif a été connu et mis en place, c’est arrivé dans tous les sens.
On a dû se poser, réfléchir à une organisation. Pendant l’été, on a fait énormément de
signatures. On est au taquet depuis juin 2013. Et donc, on a fait une proposition d’organisation
en septembre et on est passé à 18 personnes impliquées dans le dispositif. »
6
Association regroupant 80 fédérations sportives, associée au département.
8
Plusieurs raisons expliquent le démarrage lent du dispositif: l’insuffisante préparation en amont, la
réticence des collectivités locales, le manque d’offres sur le territoire, l’exigence de la qualité et la
difficulté à placer des jeunes en ZUS. En outre, selon le référent EAV de la Mission Locale, « c’est un
dispositif qui s’est construit au fil de l’eau et a été en perpétuelle évolution au niveau de ses règles
(durée des contrats, éligibilités des jeunes,…) avec des moyens de communication « Etat » à l’attention
des employeurs erronés, notamment au niveau du coût d’un EAV. »
Un déficit de préparation en amont du dispositif
La création d’un nouveau dispositif demande toujours un certain temps de « mise en route », d’autant
plus lorsqu’il est de l’envergure de celui des Emplois d’avenir. Son démarrage difficile dans les premiers
mois sur un certain nombre de ML de la Région s’explique pour un certain nombre d’acteurs par
un déficit de préparation en amont :
« En juin, quand je suis arrivée, je pense qu’il y avait des frustrations qui sont remontées d’un
d’un seul coup; n’importe quel nouveau dispositif nécessite une énergie supplémentaire. Là,
c’est sûr que c’est un dispositif qui est ce qu’il est sur le plan administratif, qui implique une
démarche de travail différente des autres: le contrat d’engagement, la démarche d’aller vers
l’employeur ; même si les ML le faisaient avant, il a fallu y aller d’autant plus. Et les outils ont
suivi après, les explications de telle procédure etc. ; il fallait y aller à fond alors que derrière,
tout n’était pas calé. (…) Il y a une masse d’informations, qui en outre ont évolué au fil de l’eau :
les taux ont évolué : offices HLM, privés, pas privés etc., la question de l’éligibilité des jeunes,
des employeurs, etc. : pour le conseiller, c’était difficile à suivre.
Nous avons organisé une réunion en juin 2013 entre référents EAV [de la région]: il fallait ouvrir
les frustrations, le manque de partage d’infos, la charge de travail, la relation autour de l’AFPA.
Ici, la formation AFPA a eu lieu début avril mai-juin : c’était l’explication du process Emplois
d’avenir qui venait 6 mois après le lancement pour des référents EAV qui étaient déjà à plein
régime; donc complètement en décalage, même si cette formation pouvait être intéressante
pour des personnes plus extérieurs au dispositif, comme les chargés d’accueil. » (Chargée de
projet ARML Languedoc Roussillon)
Les professionnels de la ML confirment le peu d’intérêt de ces formations AFPA, réalisées tardivement
et sur des contenus déjà connus d’eux :
« On s’est fait former par l’AFPA une journée ou deux, sur l’aspect administratif des EAV (bilan
à trois mois etc.) mais c’est nous qui leur apprenions (…) C’était une commande de la Direccte,
mais pourquoi ne nous a-t-on pas impliqués dans la mise en place ? C’est coûteux. »
(Conseiller emploi Mosson)
Suite à la réunion organisée en juin 2013, la chargée de projet ARML a élaboré différents outils à
destination des conseillers et des employeurs: plaquette sur les différents contrats proposés dont les
EAV (avec le contact des référents EAV), site intranet (lancé en novembre 2013), mémos sur la
contractualisation, la dématérialisation, le suivi, fiches OPCA etc.
Ces outils et les échanges entre référents EAV de la Région apparaissent comme utiles mais auraient
pu être réalisés plus tôt.
L’animatrice territoriale de la Direccte estime elle aussi que la mise en œuvre des Emplois d’avenir n’a
peut-être pas été assez préparée:
9
« La complexité de la mesure et la charge de travail ont été sous-évaluées. (…) L’ingénierie de
la formation aurait pu être anticipée. L’offre de formation du CNFPT est une offre d’adaptation.
Le qualifiant n’a pas été préparé. (…) Pour les Emplois jeunes, nous avions préparé des
éléments de contexte. On avait réfléchi sur les enjeux et les évolutions par secteur (la médiation
par exemple), les profils de poste : on était dans une logique d’innovation. Il y avait eu un travail
méthodologique en amont. »
Des collectivités locales au départ réticentes
Selon l’animatrice territoriale de la Direccte, la mobilisation des collectivités locales a été longue et
compliquée, malgré les nombreuses réunions organisées, territoire par territoire. Au printemps, le préfet
de l’Hérault a relancé par courrier l’ensemble des maires du département, pour les inciter à recruter des
Emplois d’avenir. Il a convoqué une réunion à laquelle ont participé 30 ou 40 maires.
Sans doute les difficultés budgétaires des CL ont-elles freiné les recrutements ; mais elles étaient
également interrogatives sur les modalités de recrutements et le public ciblé par le dispositif :
« Fin 2012, il y avait pas mal d’interrogations ; nous ne savions pas exactement quel était
l’interlocuteur, Pôle emploi ou la MLI ? Nous ne savions pas comment procéder pour le
recrutement (…). Nous voulions une marge de manœuvre, pouvoir sélectionner dans nos
viviers, des jeunes de notre commune. Au départ, cet aspect n’était pas très clair. C’est
pourquoi cela a trainé. Quand cela a été un peu plus cadré, vers mars-avril, on a pu envoyer
des jeunes vers la MLI et faire en sorte que la MLI fasse un mixte entre nos jeunes et les jeunes
pré-sélectionnés par la Mission Locale7. » (Service RH de Castelnau)
Globalement, comme le souligne le directeur-adjoint de la MLJAM, dans les territoires ou les élus
portaient le dispositif politiquement, et notamment dans les communes rurales qui ont joué le jeu, les
recrutements se sont développés.
Une autre difficulté rencontrée par des CL de taille plus importante était liée à l’opposition des syndicats
qui ne voulaient pas de recrutements extérieurs alors que de nombreux vacataires étaient en poste.
C’était le cas de l’Agglomération de Montpellier, notamment, où il fallait que les recrutements passent
par la validation des syndicats qui autorisaient à passer l’offre. Le Conseil général estime quant à lui
que ses « recrutements non massifs et progressifs » ont permis d’éviter le blocage des syndicats et le
risque de concurrence avec des agents non titulaires.
Les collectivités ont développé progressivement leurs recrutements à partir de l’été 2013. Au 1er février
2014, la Commune de Montpellier avait recruté 36 Emplois d’avenir et l’Agglomération 7. Le Conseil
régional Languedoc-Roussillon avait recruté 11 Emplois d’avenir.
En mars 2014, sur 31 communes de l’Agglomération, 20 avaient recruté au moins un Emploi d’avenir.
7
Selon le référent Emplois d’avenir de la ML, « il avait bien été précisé que les offres devaient être « ouvertes »
afin d’être transparentes dans le recrutement et éviter toute forme de discrimination. En conséquence, même si
la Mairie avait des candidats à « placer », ceux-ci devaient passer par le circuit de recrutement MLJAM. »
10
Le manque d’offres et l’ouverture tardive au secteur marchand
Les collectivités mais aussi les autres employeurs potentiels, notamment les associations, compte tenu
de leurs difficultés financières, ont été prudentes dans leurs recrutements.
Selon Pôle emploi, mais aussi pour la plupart des acteurs interrogés, l’ouverture tardive au secteur
marchand, qui s’est faite en outre en trois temps (certains secteurs puis tous secteurs hors entreprise
de travail temporaire - ETT, aide à domicile et saisonnier puis au final tous secteurs hors ETT et
saisonnier8) n’a pas facilité la mise en place des Emplois d’avenir. L’ouverture à tous les secteurs
d’activité aurait pu être réalisée plus rapidement, selon nos interlocuteurs.
De façon générale, le recueil des offres en Emplois d’avenir a été (et reste) difficile. La Direccte a
conventionné avec la Chambre régionale d’économie sociale et solidaire (CRESS), pour recruter une
personne chargée de recueillir des offres mais les résultats ont été limités. Par ailleurs, une Convention
a été établie avec FACE (Fondation Agir contre l’exclusion) pour mobiliser son réseau et collecter des
offres; là aussi les résultats ont été faibles, en particulier parce que les entreprises liées à ce réseau ont
des politiques de ressources humaines qui ne correspondent pas au public EAV.
Pôle emploi et Cap emploi ont également constaté les difficultés de recueil d’offres. Peu d’offres ont été
transmises de leur part.
L’exigence de la qualité
« Au départ, on nous avait dit : c’est trois ans, temps plein obligatoire et on a tenu. Et les
dérogations doivent être exceptionnelles. Au début, à Montpellier, sur les dérogations, on a été
un peu trop bon élève : on a fait 10 dérogations jusqu’à octobre. Pour une offre, nous pensions
que si nous présentions les candidatures bac + 2, l’employeur prendrait ces bac + 2 ; c’était
injuste au regard du public ciblé par le dispositif. Donc, on a décidé de ne présenter d’abord que
les non bacheliers. Les candidatures dérogatoires étaient adressées dans un second temps
quand l’employeur avait écarté les premières candidatures « non dérogatoires ». Et puis
ensuite, on a vu que les autres ML de la Région faisaient beaucoup de dérogations. Certains
étaient à 100 % de dérogatoires sur les ZUS. Donc, on a ouvert après un an sur Mosson et
Croix d’Argent. Depuis octobre 2013, depuis que nous avons eu les données régionales. »
(Référent EAV)
L’animatrice territoriale de la Direccte confirme cette volonté de la ML de travailler sur la qualité des
emplois proposés :
« Sur Montpellier, la ML a mis du temps à démarrer car ils recherchaient la qualité des postes
et une durée longue des contrats. (…). Sur le département, l’aspect qualitatif a été respecté: sur
270 contrats Emplois d’avenir en juin 2013, 243 étaient d’une durée supérieure à 12 mois. »
Même si les dérogations qualification sont plus nombreuses aujourd’hui et que les contrats sont pour la
plupart des CDD, la MLJAM maintient son objectif de vérifier sur le terrain que les exigences liées aux
EAV sont respectées par l’employeur (engagement sur le tutorat et la formation en particulier).
8
Arrêtés préfectoraux du 11/06/2013 qui ouvre au secteur marchand avec trois restrictions et du 14/08/2013
qui lève une des restrictions
11
La difficulté de placer des jeunes résidant en ZUS
Un travail de réflexion mené par l’ARML Languedoc Roussillon avec les équipes des ML de la région a
permis d’identifier plusieurs freins au développement des Emplois d’avenir dans les ZUS9 ; outre le
phénomène de discrimination, d’autres facteurs ont été identifiés comme la rareté des offres d’Emplois
d’avenir dans les quartiers et le manque de mobilité des jeunes des quartiers dans certains cas, la
mobilisation difficile de ces derniers sur le volet formation qui peut être un obstacle à l’embauche en
EAV, la fréquence des offres fermées (employeurs ayant déjà sélectionné leur candidat quand ceux-ci
se rapprochent de la Mission Locale pour la contractualisation, il n’est donc plus possible de positionner
des jeunes en ZUS), les situations complexes (liées aux titres de séjour, notamment), et la difficulté
parfois de faire aboutir des dossiers de dérogations (certaines Unités territoriales Direccte (UT)
demandant par exemple une lettre de motivation des employeurs, ce qui est difficile à comprendre pour
ces derniers).
2.3 Une organisation qui a évolué pour faire face à la montée en charge du dispositif
Une équipe mobilisée
Compte tenu de la charge de travail liée aux Emplois d’avenir constatée à partir de juin 2013, les
moyens mis en œuvre par la Mission Locale ont été développés. Au moment où nous avons démarré
l’enquête début janvier 2014, 18 personnes étaient impliquées sur le dispositif :
- le directeur-adjoint, qui assure le pilotage stratégique du dispositif ; il est chargé également de la
validation des contrats (le directeur peut aussi intervenir sur la validation si besoin),
- un coordinateur référent EAV et son assistante (« Appui Emploi d’avenir »),
- un chargé de relation entreprise, responsable du service relations entreprises, et son assistante,
- 4 « conseillers-développeurs » (« Appui développement de branches ») qui organisent diverses
actions de mise en relation entre les jeunes suivis et des entreprises en tension de main-d’œuvre
(bâtiment travaux publics, service à la personne, commerce, tourisme-hôtellerie-restauration),
- 3 référents emploi (« Appui équipes et territoires »), qui appuient les équipes sur chacun des
territoires,
- un « Appui Pôle emploi CAE/CIE» (avec la conseillère Pôle emploi mise à disposition et une
assistante) : chargé de la transformation des CAE et CIE en EAV,
- 4 responsables territoriaux (antennes de Mosson, Centre, Croix d’Argent et Castries) : « Appui
collectivités » : ils sont chargés des recrutements réalisés par les communes rattachées à leur secteur
géographique.
Enfin, un conseiller a été affecté, début mars 2014, au suivi des bilans à trois mois et à la mise en
œuvre des plans de formation ; il vient en complément ou en appui aux professionnels déjà mobilisés
sur le suivi des jeunes en EAV.
9
Le constat de l’ARML était le suivant : sur la Région Languedoc-Roussillon, l’objectif régional sur les ZUS était,
pour 2013, de 16,3%. L’augmentation du poids des jeunes en ZUS parmi les jeunes recrutés en Emplois d’avenir
s’est fait progressivement. Le taux est passé de 10,8% en juillet 2013 à 12,8% au 31 octobre 2013.
Actuellement, les résultats en ZUS sont plutôt bons.
12
Le dispositif est coordonné par le chargé de développement - référent Emplois d’avenir, qui
dispose à la fois d’une expérience de plusieurs années dans la ML et d’une expérience dans le secteur
privé. Il est basé dans les locaux de la plateforme transversale (au siège de la ML) qui est la « porte
d’entrée » pour les employeurs qui veulent recruter. Un numéro unique Emplois d’avenir a été créé,
permettant d’apporter une réponse à chaque entreprise. Si cette entreprise est déjà connue de la ML,
c’est le référent de cette entreprise qui s’en chargera. L’objectif est que chaque employeur ait un
interlocuteur unique.
La gestion d’une offre
Des outils ont été créés par l’équipe, comme le « guide méthodologique pour la gestion d’une offre
Emploi d’avenir », qui détaille la procédure à suivre pour les trois situations qui peuvent se présenter :
- l’employeur souhaite ouvrir son offre et ne l’a pas déposée à Pôle emploi
- l’employeur a repéré son candidat mais souhaite ouvrir son offre
- l’employeur a en vue un candidat et souhaite monter le dossier administratif (recrutement « fermé »).
La description des tâches à accomplir illustre la lourdeur du travail à mener sur chaque offre :
- vérification de la fiche de poste et de l’existence légale de l’employeur
- préparation et établissement de la fiche de poste si elle n’existe pas (et le travail peut alors être long)
- saisie de l’offre sur Parcours 3 + Mise en relation (MER)
- envoi de l’offre aux conseillers
- envoi de l’offre à Pôle emploi et Cap emploi pour diffusion
- entretiens de présélection (pour les jeunes de la MLJAM)
- consultation de la boite « Emploi d’avenir » pour vérifier les candidatures reçues par Pôle emploi
- transmission des candidatures à l’employeur (un seul courriel pour l’ensemble des candidatures
(MLJAM-Pôle emploi) : 10 candidatures maximum: 4 CV de la ML, 4 de Pôle emploi et 2 de Cap emploi
ou 5 CV de la ML et 5 de Pôle emploi
- lorsque l’employeur a sélectionné son candidat : lancement de la procédure dématérialisée de saisie
de CERFA
- si le jeune est directement recruté par l’employeur : vérification de son éligibilité, inscription à la ML s’il
ne l’est pas déjà et montage du dossier
- mise à jour de l’offre sur Parcours 3 (qui sera « suspendue » en attendant le démarrage du contrat)
- créer un entretien sur le dossier du jeune, ouvrir le programme « EA » sur le dossier du jeune et
mettre à jour la situation du jeune
- validation du contrat par la direction
- préparation du rendez-vous avec l’employeur (édition du CERFA en 4 exemplaires, dossier
d’engagement)
- signature des CERFA et du dossier d’engagement + recueil du contrat de travail et autres éléments
administratifs (RIB de l’entreprise, carte d’identité du jeune etc.) : cela suppose des déplacements
- dépôt du dossier complet auprès de l’assistante qui enregistre dans le tableau de bord ML
- mise à la signature des CERFA auprès de la direction MLJAM qui signe au nom de l’Etat
- envoi du CERFA papier à l’Agence de services et de paiement (ASP) + édition de la « notification
d’attribution » et de la « note Sylae » et envoi à l’employeur
- clôture de l’offre à la date de démarrage du contrat
- suivi du jeune en emploi pendant 3 ans selon un échéancier fixé à la signature du contrat avec comme
objectif de vérifier la bonne intégration du jeune dans l’entreprise et le respect des engagements pris
par l’employeur au niveau des formations proposées.
13
Outre les tâches directement liées à une offre, le dispositif mobilise également l’équipe pour la
prospection et le recueil d’offres, l’information aux employeurs et aux jeunes, la préparation des jeunes,
le suivi dans l’emploi (bilans à trois mois, suivi selon le besoin), la mise en place des parcours de
formation, le « reporting « (tableau de suivi des contrats signés qui renseigne sur les jeunes, les
employeurs, les secteurs d’activités, etc.) et la participation aux différentes réunions relatives aux EAV,
en particulier les réunions de cellule opérationnelle, dont la Mission Locale assure l’animation et la
rédaction des comptes rendus pour l’ensemble des partenaires.
La prospection et l’information des employeurs
Pour ce travail de prospection et de recueil des offres, une répartition a été faite entre le référent
Emplois d’avenir, chargé particulièrement des « Grands comptes » (c'est-à-dire les « entreprises
stratégiques » et les entreprises ayant signé une Convention nationale, comme la SNCF par exemple),
le chargé de relations entreprises, chargé des associations et des projets de recrutement
« ouvert » (l’objectif étant de fidéliser de nouveaux employeurs), les responsables territoriaux, chargés
des Communes de leur territoire, et les conseillers développeurs, pour les entreprises des secteurs dont
ils sont chargés.
Beaucoup de réunions d’information avec les employeurs, notamment du secteur non marchand, ont
été organisées sur le territoire :
« Nous avons eu chaque mois des réunions de sensibilisation sur le dispositif, avec des
entreprises, les branches, les associations, le secteur du sanitaire et sociales, les Maisons de
retraite etc. » (Référent EAV)
Au total, 628 offres EAV ont été recueillies par l’équipe ML depuis fin 2012 correspondant à 766 postes
(à la date de notre enquête). La MLJAM ayant signé au 17 avril 2014, 498 Emplois d’avenir, le référent
EAV souligne que de nombreuses offres prises par la MLJAM ont étés pourvues par des jeunes inscrits
dans d’autres Missions Locales et par CAP Emploi. Le travail de prospection de la MLJAM a donc servi
à intégrer des jeunes de la Région. Cette mutualisation des offres pose la question de la pertinence qu’il
y aurait eu à mutualiser également les objectifs d’EAV au niveau régional (ou au niveau départemental
au moins).
L’information et la préparation des jeunes aux EAV
Les jeunes accompagnés par la MLJAM ont été rapidement informés du dispositif Emplois d’avenir,
notamment par l’intermédiaire de leurs conseillers. Les offres d’emploi en EAV sont affichées
notamment dans l’antenne Mosson et les jeunes peuvent venir les consulter régulièrement. Par ailleurs,
des informations ont été faites aux partenaires, en particulier aux Réseaux qui travaillent régulièrement
avec la ML dans les quartiers de Montpellier: Réseau Pailladins, Réseau Rimbaud, Réseau des
Cévennes, qui regroupent les associations, centres sociaux etc. et se réunissent tous les mois, ou les
Ecoles de la Deuxième Chance.
La Mission Locale a mis en place un certain nombre d’actions permettant d’informer le public sur les
EAV et de les préparer aux postes proposés. L’antenne centre, par exemple, a organisé des ateliers
Emplois d’avenir chaque semaine, animés par deux conseillères. « En 2013, 80% des jeunes de ces
ateliers ont décroché un Emploi d’avenir », selon la responsable territoriale. Des ateliers de préparation
aux entretiens d’embauche en EAV ont également été expérimentés, en partenariat avec une
association de retraités.
14
Dans l’antenne de Mosson, des ateliers de préparation aux EAV d’une demi-journée par semaine (2
demi-journées par semaine en 2013) sont animés par les conseillers.
« On a mis en place les ateliers de préparation à partir d’octobre: une demi-journée pour que
les jeunes mettent en valeur le peu qu’ils savent, pour qu’ils s’approprient leur CV etc. et puis
un atelier de simulations d’entretien pour les candidats aux EAV mais ouverts aux autres jeunes
s’il y avait suffisamment de place. » (Conseiller emploi Antenne Mosson)
Les besoins étant importants sur cette antenne (plus de 3000 jeunes suivis, avec des délais d’attente
pour les rendez-vous qui s’allongent), les conseillers se sont organisés et ont fait évoluer leurs actions:
« On s’est mis ensemble pour réfléchir dans l’antenne entre midi et deux et on a mis en place
des ateliers tous les jours entre 14 h et 15 h pour accueillir les jeunes (…). Je viens en support
aux collègues. Tous les jours de 14 h à 15 h, je suis disponible sans rendez-vous pour les
jeunes qui veulent des renseignements sur les EAV ou une préparation pour un entretien etc. »
(Conseiller emploi Antenne Mosson)
Ces actions semblent efficaces et adaptées, ce qui n’est pas le cas des ateliers organisés sur une
semaine par l’AFPA (financement Etat) pour les jeunes issus de ZUS et intitulés « Semaine de coaching
« Jeunes, soyez proactifs pour accéder à l’emploi ». Très peu de jeunes ont suivi ces formations, selon
les professionnels de la ML :
« Sur l’atelier AFPA, je n’ai pas de retour. Tous les jeunes qui passaient par l’atelier, je leur
proposais. Mais c’est davantage de l’occupationnel; ils n’y vont pas trop : ils ont déjà fait ce
type de travail à la ML. Et puis c’est sur plusieurs jours, à l’AFPA : certains y sont allés une
demi-journée et n’y sont pas retournés ensuite. » (Conseiller emploi Antenne Mosson)
« Pour ces ateliers l’AFPA organisés sur plusieurs jours, il n’y a pas de restauration sur place et
cette action n’offre pas aux jeunes d’indemnisation. Et puis nous faisons déjà ce type d’actions
en interne (…). Nous manquons de moyens ; ils auraient mieux fait de nous donner plus de
moyens. » (Référent EAV)
Le suivi en emploi, une fonction chronophage
Le suivi et l’accompagnement en emploi sont des fonctions déjà connues des professionnels des
Missions Locales. Le travail est cependant d’autant plus lourd dans le cadre des EAV qu’il s’agit d’un
dispositif qui concerne en particulier des jeunes avec des problématiques souvent difficiles et que les
exigences pour l’employeur (tutorat, formation) sont importantes et qu’il s’agit de les faire respecter:
« La commande de l’Etat est notamment de placer des jeunes des ZUS : mais ce sont des
jeunes qui prennent du temps et on le sait. L’employeur veut bien prendre le risque mais nous
prenons aussi le risque de se « griller » l’employeur ; et puis après, l’employeur a besoin de
nous, il a des aides financières mais il n’est pas éducateur, ni pédagogue ou formateur : nous
sommes en lien permanent avec le jeune, avec les parents mais aussi avec l’employeur pour
éviter les ruptures de contrat : « le jeune ne s’est pas levé le matin, je ne sais pas comment
faire etc. ». Le plus long et le plus difficile, ce n’est pas la signature du contrat ou le montage du
dossier administratif, c’est le suivi en emploi et les différentes actions de « médiation » qui
peuvent être mises en place. » (Référent EAV)
Le rôle de la ML est d’abord de monter le dossier d’engagement avec l’employeur à partir duquel le
suivi va être réalisé. Il s’agit souvent en amont de travailler sur la fiche de poste. Les compétences des
professionnels de la ML dans ce domaine sont donc appréciées :
15
« Le dossier d’engagement et de suivi10 est lourd : identité du jeune de l’employeur, du
conseiller référent, code ROME, cœur de métier, type de contrat, mission principale à laquelle
sera rattaché le jeune (employé aux espaces vert etc.). Où se situe le jeune dans
l’organigramme, activités du jeune, compétences à acquérir, certification à mettre en place etc.
(…) Pour le monter, on fait la fiche de poste avec l’employeur : « le jeune va donner un coup de
main pendant la fête du village ? Est-ce qu’il utilise des machines: est-ce qu’il fait la taille des
arbres ? Si oui, il faut alors l’habiliter pour travailler en hauteur ; va-t-il faire le traitement des
arbres etc. ? Et on essaye de chercher les formations qui vont être nécessaires. Pour certains
postes polyvalents d’accueil et de secrétariat dans des Mairies ou des associations, on va
décortiquer aussi toutes les tâches : l’accueil mais aussi du secrétariat, un peu de compta, la
caisse à la fin de la journée etc.
A partir du moment où il y a ces fiches de postes, on peut faire le point et évaluer l’évolution des
compétences du jeune : « en quoi est-il meilleur en taille des arbres etc. ? »: la fiche de poste
est essentielle pour évaluer, objectiver et recadrer sur « ça se passe mal », ou « ça se passe
bien ». (…) On fait comprendre aux employeurs qu’il y a des critères objectifs et que sans cette
fiche de poste détaillée et sans avoir identifié chaque compétence et les niveaux de
performances attendus, on ne peut pas évaluer le jeune. » (Référent EAV)
L’investissement de la ML dans le suivi en emploi n’est pas le même selon les jeunes placés mais aussi
selon les entreprises, celles qui disposent de services RH et sont outillées et celles qui ne le sont pas :
« A l’Agglo ou dans les communes comme Montpellier ou Castelnau, ils ont des fiches de
poste, mais dans des petites boites, Pro courrier, le petit restaurant, la petite commune, ils n’ont
pas de fiches de poste. C’est pareil sur l’aspect tutorat : on conseille à l’employeur de faire la
formation des tuteurs car souvent, le tuteur n’est pas formé et à cette fonction, un bon
professionnel n’est pas obligatoirement un bon tuteur ; le suivi et l’évaluation d’un jeune ne
s’improvisent pas. » (Référent EAV)
En revanche, comme on le verra plus loin, des employeurs plus importants comme la Ville de Castelnau
ou le Conseil général, mettent en place des modalités de tutorat et de suivi efficaces :
« Certains employeurs, ceux qui font de l’apprentissage, notamment ont des outils. A
Castelnau, ils ont fait un document de suivi magnifique; moi je ne viens pas avec le mien.»
(Référent EAV)
Par ailleurs, le logiciel Parcours 3 ne facilite pas la gestion administrative du suivi des formations des
jeunes en EAV: il ne permet pas d’identifier quel est l’intitulé d’une formation préparée par exemple, ce
qui ne facilite pas le suivi des engagements en matière de formation :
« La retranscription du suivi dans Parcours 3 pose problème: un jeune qui va au CNFT, quand
il a 10 formations certifiantes à faire, je ne peux préciser le libellé de la formation; on va mettre
que l’on va réaliser une formation certifiante : l’employeur doit laisser une trace pour lui donner
les certifications correspondantes. (…) J’enregistre les engagements de l’employeur après la
signature car notre mission, c’est de contrôler que les engagements de l’employeur soient
respectés.» (Référent EAV)
10
Dossier commun à toutes les ML mais que beaucoup ont retravaillé pour le rendre plus opératoire, notamment la MLJAM.
16
La question des grands comptes
Dans la mesure où les grandes entreprises (« Grands comptes », comme la Poste ou la SNCF par
exemple) ont leur siège régional à Montpellier, la MLJAM était déjà en relation avec elles. En outre,
chaque ML prenant les offres situées sur son secteur géographique, le référent EAV de la MLJAM avait
déjà entamé une démarche commerciale sur les Emplois d’avenir :
« Il a beaucoup pris la main sur ces grandes entreprises mais n’avait plus le temps de faire le
lien avec ses collègues des autres ML. Il a absorbé tous les CERFA de la Poste, de la SNCF. A
un moment donné, c’était trop compliqué pour lui. On est arrivé en renfort, moi en tant que
chargée de projet. » (ARML LR)
« Pour le recrutement régional de la SNCF, j’étais déjà en contact avec le DRH, il a voulu que je
sois le seul interlocuteur ; je me suis retrouvé sur le pilotage régional ; si un jeune était de
Lunel, je devais contacter Lunel. (…). A la Poste, comme l’employeur est basé à Montpellier, il
n’y a que moi qui pouvais prendre l’offre, même si le recrutement était ailleurs. (…) Il y a eu un
manque de pilotage régional qui est retombé sur nous, cela nous a fait perdre du temps et cela
a créé des frustrations.(…) On a voulu que l’ARML prenne la main et coordonne ces
recrutements régionaux mais l’ARML ne peut assurer la gestion d’une offre en interne, elle ne
peut que diffuser l’information aux autres ML ce qui, au final, nous oblige à coordonner la
gestion des candidatures des ML au niveau Région, ce qui est vite devenu ingérable et nuisait à
nos relation inter-ML. » (Référent EAV)
Concernant deux grands comptes comme le CHRU ou la CAF, Pôle emploi avait déjà établi un
partenariat avec eux, ce qui a facilité leur mobilisation sur le dispositif.
La Méthode de recrutement par simulation (MRS) a été proposée par Pôle emploi, notamment pour le
recrutement des Emplois d’avenir à la CAF; la méthode est fondée sur l’évaluation des habiletés et de
la motivation des candidats à tenir un poste de travail :
« Cette méthode permet de présenter à une entreprise des candidats qui, certes ne possèdent
pas nécessairement la totalité des savoirs mis en œuvre par les salariés observés
(connaissances techniques), mais qui, par les habiletés qu'ils ont mis en évidence, vont
s’adapter au poste de travail (directement en entreprise et/ou avec une formation).
Cette approche permet à la fois de sortir des critères habituels de recrutement, exprimés
essentiellement en termes de diplôme ou d'expérience professionnelle mais également de
conserver le niveau d’exigence légitime de l'entreprise, puisque les résultats de l'évaluation
peuvent être comparés à ceux des salariés de l'entreprise. A ce titre, la méthode de
recrutement par simulation permet de lutter contre les difficultés de recrutement, et contre la
sur-sélectivité du marché du travail. Le recrutement s'appuie ainsi sur des critères mesurés,
identiques pour tous les candidats, donc équitables, partageables et transparents.» (Pôle
emploi)
Certains recrutements ont été très sélectifs et lourds à organiser, selon la Mission Locale:
« Le projet de la TAM11, qui passe aussi par la méthode MRS, est de prendre pendant trois ans
des jeunes sur des postes de contrôleur (contrôle des billets etc.) pour enchainer à l’issue sur
des postes de chauffeur. Donc en amont, ils font des tests MRS sur le comportement : gestion
du stress mais aussi sur la capacité à être chauffeur à l’issue des 3 ans. Il y a des tests
11
TAM : Transports de l’agglomération de Montpellier.
17
psychotechniques et des entretiens. On a fait une information collective sur la TAM en
décembre 2013 : il y avait 300 candidats pour 10 postes. On a donc informé sur les critères et
on a filtré un maximum après l’info collective. Pôle emploi a fait déjà les premiers tests maths,
etc. Mais on ne peut pas vendre la personnalité d’un jeune, sa motivation etc. (…). A l’issue,
les jeunes doivent encore passer par une POE12 .»
Selon Pôle emploi, « le recours aux Préparations opérationnelles à l’emploi (POE) n’a pas vocation à
ajouter une étape supplémentaire de sélection; il s’inscrit dans une logique de sécurisation des parcours
en permettant aux jeunes de bénéficier d’un parcours d’adaptation à la prise de poste. Pôle emploi et
les OPCA sont ainsi engagés dans la mobilisation de leurs moyens pour contribuer à la réussite de
l’insertion des jeunes en entreprise. »
Aujourd’hui, sur les « grands comptes », l’ARML Languedoc Roussillon fait le relais, l’interface et le suivi
derrière. Au moment de notre enquête, les recrutements étaient terminés pour la SNCF dans la région;
sur les 18 jeunes recrutés dans cette entreprise, 13 étaient issus de la MLJAM. Et ce sont les Apprentis
d’Auteuil qui font le suivi. Ils ont le contact de chaque jeune et celui du conseiller; ils doivent assurer le
retour de ces suivis à la ML.
2.4 « Le socle de collaboration » régional et le rôle de la « cellule opérationnelle »
Au niveau régional, une charte locale de coopération entre la Direccte, Pôle emploi et les Missions
Locales (« socle de collaboration ») a été mise en place dès novembre 2012.
La mise en œuvre du dispositif est définie de la façon suivante :
Etape 1
Prospection
des
employeurs
Etape 2
Qualification
des offres
d’emplois
d’avenir
Etape 3
Repérage et
l’orientation
des jeunes
Etape 4
Mise en
relation d’un
employeur
avec des
candidats
Etape 5
Négociation
avec
l’employeur
de ses
engagements
Etape 6
Signature
de la
demande
d’emploi
d’avenir
Etape 7
Suivi du
jeune et de
l’employeur
Etape 8
Préparation
de la sortie
du jeune
« Les Missions Locales et les Cap emplois pour les jeunes reconnus travailleurs handicapés
sont chargés de la mise en œuvre du dispositif et les étapes 5 à 8 relèvent de la seule
compétence de ces deux structures. Pôle emploi intervient, aux côtés des Missions Locales et
de Cap emploi sur les phases en amont (phases 1 à 4). Il s’agit pour notre institution d’informer
les employeurs et les jeunes concernés, de collecter les offres d’Emplois d’avenir et de mettre
en relation les jeunes sur les offres d’Emploi d’avenir. » (Pôle emploi)
Pôle emploi décrit ses interventions plus spécifiques de la façon suivante :
Au niveau régional :
- Une campagne marketing de promotion des emplois d’avenir auprès des entreprises éligibles,
- La mise en place d’une procédure permettant la meilleure circulation de flux entrants et sortants
d’offres d’emploi entre le réseau des Missions Locales et Pôle emploi,
- La mise à disposition, pour chaque agence, d’une liste de demandeurs d’emploi éligibles aux Emplois
d’avenir,
- La participation au Comité de Pilotage régional du dispositif,
12
La Préparation opérationnelle à l’emploi (POE) est une formation de préparation à la prise de poste.
18
- Le suivi des indicateurs.
Au niveau territorial et local :
- La concertation avec la ou les mission(s) locale(s) du territoire ainsi qu’avec le Cap emploi
départemental afin de répartir la prospection entre les différents acteurs,
- La prospection des entreprises relevant du champ d’intervention de Pôle emploi,
- La collecte des offres d’emploi d‘avenir,
- La mise en relation des jeunes sur les offres d’emploi d’avenir,
- L’organisation des modalités de suivi des offres avec la ou les missions(s) locale(s) du territoire,
- La réception des jeunes demandeurs d’emploi éligibles aux emplois d’avenir sur la base des listes
transmises par la Direction régionale,
- La participation aux instances de pilotage infrarégionales.
Localement, sur le territoire de Montpellier, la cellule opérationnelle (CO) a été mise en place en mars
2013 et se réunit tous les mois dans les locaux de la mission locale. Les personnes régulièrement
présentes sont le directeur-adjoint de la ML et le référent EAV, la directrice de l’Agence Malbosc de
Pôle emploi qui est responsable du partenariat avec la MLJAM, le directeur de Cap Emploi et la
représentante de la Direccte.
« L’objectif est de faire respecter l’esprit de la circulaire, de travailler sur les modalités de suivi
et de faire le point sur les nouveaux contrats signés, les actions entreprises etc. Au début, il
fallait aussi répondre aux questions techniques : contrats, dérogations etc. (…). Il y avait aussi
la question des grands comptes. (…) La CO ne traite pas systématiquement les demandes de
dérogations.» (Animatrice territoriale de la Direccte)
Pour Pôle emploi, ce comité de partenaires permet d'évoquer les difficultés liées aux recrutements des
EAV, comme la question de la présélection des candidatures, par exemple : « Pôle emploi a mis en
place depuis janvier 2014 un réseau de référents jeunes (un par agence) afin de sécuriser les
recrutements Emplois d’avenir. Il est le point central et le lien avec le correspondant MLI. » (Pôle
emploi)
Les rencontres mensuelles de CO se poursuivent en 2014 et permettent de traiter certains nouveaux
thèmes comme le financement des parcours de formation, en invitant par exemple des OPCA. Les
professionnels de la ML regrettent cependant (au moment de notre enquête), que ces réunions ne
parviennent pas à résoudre les difficultés de relations avec Pôle emploi. Ces difficultés concernent par
exemple les CV transmis sans travail de présélection, des candidatures qui parfois ne rentrent pas dans
les critères (candidats de plus de 30 ans, et même parfois de plus de 50 ans, par exemple).
Pôle emploi mentionne de son côté les problèmes de transmission de CV de la ML vers Pôle emploi et
« les difficultés de suivi des offres d’emploi enregistrées Pôle emploi au niveau du réseau Mission
Locale ». Mais la ML estime que les conseillers Pôle emploi ont les éléments pour assurer ce suivi :
« Je transmets notre tableau de bord à Pôle emploi. Il y a le numéro de SIRET, le nom de
l’entreprise, le poste, le salarié, l’identifiant etc. tous les éléments sur nos candidats (…).
Globalement, la collaboration est compliquée car il y a 600 conseillers Pôle emploi susceptibles
de gérer une offre. (…) Avec Cap emploi, les relations sont bonnes. Mais on n’a jamais eu
d’offre de leur part. » (Référent EAV)
Avec l’évolution de l’organisation et la mise en place d’un référent jeune par agence chargé de cette
relation ainsi que la coordination par la conseillère Pôle emploi mise à disposition à la ML, la
collaboration devrait s’améliorer.
19
La Direccte et les services de l’Etat se sont fortement investis dans la mise en œuvre du dispositif, dès
le départ :
« Nous avons beaucoup travaillé en interne, pour recueillir de la documentation, pouvoir
répondre aux questions-réponses (septembre 2103), sur les aspects juridiques notamment, les
aides Agefiph, la question des structures d’insertion par l’économique éligibles aux EAV
marchands ou non marchands en fonction de leur statut et fonctions proposées etc.(…). Nous
avons organisé un SPEL dédié à la mise en œuvre des EAV en Hérault en décembre 2012. »
(Animatrice territoriale de la Direccte)
La Mission Locale souligne l’intérêt de la collaboration avec le Préfet :
« On a la chance d’avoir un préfet à fond sur les EAV ; il impulse, il nous appuie ; il a une vraie
implication. » (Référent EAV)
2.5 Un objectif ambitieux pour 2013, difficile à atteindre
L’objectif fixé pour la MLJAM jusqu’à fin décembre 2013 était de 636 Emplois d’avenir13.
Au 31 octobre 2013, 297 prescriptions avaient été faites, dont 275 dans le secteur non marchand et
dont :
104 dans des associations
152 dans des collectivités locales
19 dans des établissements publics sanitaires et sociaux
Et dont 22 dans le secteur marchand.
Parmi le total des contrats prescrits, 234 jeunes étaient de niveau infra IV, dont 63 de niveau V bis et 21
de niveau VI. 59 jeunes résidaient en ZUS.
Le taux de rupture des contrats n’était que de 4% (dont 2% à l’initiative de l’employeur).
La part des jeunes ayant démarré un parcours formatif sur le total des contrats prescrits était de 65%.
Si l’objectif n’a pas été atteint à la fin 2013 (392 contrats signés, 61,6% de l’objectif réalisé), le nombre
de signatures d’EAV a fortement progressé pour atteindre le chiffre de 637 début juillet 2014, dont :
. 69,54% de CDD dans le secteur non marchand
. 9,89% de CDD dans le secteur marchand
. 12,87% de CDI dans le secteur marchand
. 7,69 % de CDI dans le secteur non marchand
Sur les 637 jeunes, les femmes sont majoritaires (55,7%).
Les jeunes de 22 ans ou plus sont largement majoritaires puisqu’ils représentent 69% du total contre
31% pour les 16 à 21 ans.
424 jeunes (66,5%) résident dans la commune de Montpellier, dont 138 en ZUS (soit 21,6% du total des
jeunes en EAV).
13
L’objectif pour l’ensemble du département était de 1735 EAV.
20
L’objectif pour 2014 est fixé à 495 Emplois d’avenir dont 285 pour le premier semestre, objectif qui a
été largement dépassé.
3. Un dispositif d’emploi important pour les jeunes peu qualifiés du territoire
Comme nous venons de le voir, près de 80% des jeunes recrutés en EAV sont de niveau infra IV. Les
jeunes que nous avons interrogés font partie de ces jeunes peu qualifiés. Agés de 22 à 25 ans, ils
avaient tous une expérience de travail avant leur entrée en EAV (ce qui sans doute contribue à leur
capacité d’adaptation et d’intégration dans leur poste) mais connaissaient des difficultés d’accès à
l’emploi durable. L’emploi d’avenir représente donc pour tous une opportunité importante d’emploi
stable même si leurs itinéraires et leurs motivations diffèrent: pour certains, l’Emploi d’avenir est une
occasion de découvrir un nouveau métier (Noémie, Damien); pour d’autres, il permet de s’intégrer de
façon stable dans un emploi quel qu’il soit (Amel) ou dans le secteur d’activité déjà choisi (Adrien,
Marie, Jordan).
3.1 Pour les jeunes, une véritable opportunité d’emploi stable
Noémie, 24 ans, en Emploi d’avenir depuis février 2014 à Coeptis (secrétariat)
Originaire de Montpellier, Noémie interrompt ses études en 2007, à la fin de la classe de première. Elle
est admise en terminale pour préparer un Bac pro secrétariat-comptabilité mais, alors enceinte, elle
s’arrête pendant deux ans et demi pour s’occuper de son fils. Lorsque celui-ci est en âge d’aller à
l’école, Noémie s’inscrit à la ML et est suivie par l’antenne Croix d’Argent.
Intéressée par le milieu médical, elle réalise d’abord un stage de trois semaines à la maison de retraite
de Croix d’Argent, à la suite duquel elle est recrutée comme agent de service hospitalier (ASH) à temps
partiel dans le cadre d’un CAE ; elle y reste un an. En 2012, elle revient vers la ML, afin de poursuivre le
travail engagé sur la construction de son projet professionnel.
Parallèlement, pendant un an, Noémie effectue des remplacements en tant qu’ASH (travail de nuit et de
jour selon les besoins). Les horaires sont contraignants physiquement mais aussi difficilement
compatibles avec le fait de devoir s’occuper seule de son fils. Une conseillère de la ML la rappelle alors
pour lui parler des EAV et l’incite à prendre rendez-vous avec un des conseillers chargés de la mise en
relation avec les entreprises. Après un entretien, elle signe un contrat (en CDD de trois ans à temps
plein) au sein d’une association accueillant des personnes en situation de handicap. Elle est en poste
au service RH : elle fait de l’accueil téléphonique, suit les dossiers du personnel, effectue des tâches
administratives, etc. Pendant un mois, au tout début de son EAV, elle suit des cours de bureautiques,
ce qui lui permet de se remettre à niveau. D’un point de vue professionnel, Noémie fait ses preuves et
les relations avec ses collègues sont bonnes. En revanche, elle rencontre des difficultés avec le
directeur de l’association (harcèlement moral) et fait appel à sa conseillère. Finalement, elle bénéficiera
d’une rupture conventionnelle et quitte cet emploi au bout de 8 mois, mi-décembre 2013. La ML lui
recherche un nouvel emploi.
Deux mois et demi plus tard, début février 2014, elle signe un emploi d’avenir (CDD de trois ans à
temps plein payé au SMIC) avec le groupe COEPTIS pour travailler au sein d’une école (7-8 salariés)
qui propose de la formation initiale et de la formation continue.
Le processus de recrutement s’est déroulé en deux temps :
21
« J’ai passé des tests oraux, des tests écrits, avec une mise en situation sur logiciel où je
devais faire de la création de publipostage, j’étais évaluée sur la rapidité de saisie, l’aptitude à
répondre au téléphone, on a vraiment été testé sur ça. Et aussi un entretien de motivation la
seconde fois ».
Noémie ne se prépare pas particulièrement pour ces épreuves, mais les modules de remise à niveau
auxquels elle avait participé dans le cadre de son premier EAV l’aident. La réponse positive pour son
recrutement lui parvient rapidement, une semaine après le second test.
Aujourd’hui, Noémie occupe le poste de secrétaire administrative et appuie également la secrétaire de
la formation initiale pour le suivi des étudiants. C’est un poste où elle « touche à tout » : réservation de
salles, suivi des étudiants, accueil téléphonique, etc. Pour Noémie, le fait de ne pas avoir fait d’études
n’a pas été un handicap : « L’école n’est pas le seul moyen pour apprendre, estime-t-elle, il y a d’autres
choses, on peut lire, sortir, etc. C’est juste une question de volonté parfois ». Elle prépare l’examen du
permis de conduire, qu’elle a pu financer grâce à une aide attribuée par Pôle emploi, dans le cadre du
dispositif ANI.
Elle se dit satisfaite de son emploi et de son salaire :
« Y’a pas l’inquiétude de savoir comment je vais finir le mois, ça me permet d’avoir une vision
beaucoup plus claire. »
Noémie se voit bien à long terme dans l’établissement, même s’il lui semble un peu prématuré de se
poser la question :
« Je n’ai pas tellement de visibilité par rapport à mon poste. Si on me propose de rester, je
serais ravie de rester. Mais je n’en ai aucune idée. »
Le secteur médical continue de l’attirer, mais aujourd’hui, elle se sent encore fragile physiquement :
« En même temps, à travers ce que je fais aujourd’hui, je retrouve le contact que je recherchais dans le
médical : je suis au contact des étudiants, des profs, des intervenants, etc. Je ne me sens pas isolée. »
Adrien, 23 ans, en Emploi d’avenir depuis mai 2013 à la Mairie de Castelnau (peintre)
L’école n’a jamais intéressé Adrien; dès sa sortie du collège à 16 ans, sans avoir obtenu son Brevet des
Collèges, il veut travailler et saisit l’opportunité d’un emploi à temps partiel en plomberie, dans lequel il
reste deux ans. Même si la plomberie ne lui plaisait pas, il estime avoir appris beaucoup pendant cette
période. Après deux mois de recherche, il effectue un CDD de 6 mois comme manœuvre (maçonnerierénovation). Suite à une nouvelle période de chômage de 6 mois, il trouve un emploi en peinture qui lui
plait :
« En 2012, j’ai fait une formation adulte ; ca a duré de septembre à juillet (rémunéré par la
région, à St Jean de Vedas) pour passer le CAP. Et entre temps, j’ai eu tout ce cursus avec la
MLI pour le recrutement en EAV et je suis entré à la Mairie le 21 mai, ça va faire un an.»
Résidant chez ses parents à Castelnau, il avait envoyé dès l’été 2013 son CV à la Mairie. Lorsque le
recrutement EAV a été ouvert pour 4 postes dont un poste de peintre, il a été contacté :
« Moi, vu que j’étais à la MLI, la Mairie m’a appelé pour me dire comme quoi il y avait ces offres
d’emploi et qu’il fallait passer par la MLI (…). Le CV, ils l’ont regardé, vu qu’ils cherchaient un
peintre; M. Y [le peintre] devait partir à la retraite (…). J’ai eu un rendez-vous avec mon
conseiller; il a ouvert un dossier et j’ai eu une présélection; j’ai passé un petit entretien, pour
22
voir un peu mes compétences, ce que j’avais fait; j’ai été sélectionné; ensuite, je suis passé par
la Mairie devant la DGS, la DGST, il y avait tout le gratin, c’était impressionnant, surtout que je
n’avais jamais fait d’entretien de ma vie. Mais mon conseiller m’a donné des conseils : il m’a dit
qu’il fallait connaitre la ville, le minimum, de faire attention aux questions pièges (…). J’ai passé
l’entretien et ça s’est très bien passé sincèrement quand je suis sorti je me suis dit c’est bon; j’ai
parlé un peu technique (…), j’ai pas menti ; j’ai dit que des choses que je savais faire. Moi,
après je leur ai dit : « sincèrement, mon but c’est de travailler pour vous. J’habite depuis 16 ans
à Castelnau, je suis bien ». Et puis à ce poste il n’y avait que moi apparemment (…) ils m’ont
appelé deux jours après, et m’ont dit de passer, faire la visite ; on a signé nos contrats papier et
puis après, le Préfet est venu, il y avait le Midi libre tout ça; le maire a fait un discours, le préfet
aussi on a signé devant les photographes, le Livre d’or des EAV. Et puis cela a été vite (…).
Recruté pour trois ans, Adrien souhaiterait être intégré définitivement dans son poste à la Mairie :
« C’est un contrat de 3 ans, mais chaque année, si je veux partir, je peux, à chaque
anniversaire ; eux aussi, ils font ce qu’ils veulent. S’ils sont contents de moi, pourquoi chercher
ailleurs ? Là, ils sont contents et moi, je me plais ; Monsieur N. m’avait dit au bilan de 3 mois :
« Vous vous voyez 40 ans chez nous » ? Moi oui, sincèrement, j’ai pas menti. Je suis bien
intégré, je peux pas mieux ; je suis bien (…) Le salaire me convient, à mon âge, vu le chômage
qu’il y a… je suis au SMIC 37 heures et demi ; tous les deux mois, je fais les astreintes (…) Et
suivant les jours fériés, ça double. C’est pas la même vie que dans le privé ».
Jordan, 22 ans, en Emploi d’avenir depuis juin 2013 au CHU (service brancardage)
Après sa 3° DP 6 [découverte professionnelle] qu’il a suivie à Avignon où il résidait, Jordan a entamé un
BEP sanitaire et sociale qu’il a interrompu au bout d’un an, à cause, selon lui, de ses « conneries de
jeunesse ». Il a ensuite travaillé comme serveur les soirs et le week-end à Avignon puis à Montpellier où
il réside depuis 4 ans. Accompagné par la Mission Locale, il a effectué en 2010 un contrat de
professionnalisation dans un hôtel-restaurant à Castelnau le Lez. Il a souhaité ensuite rechercher un
emploi dans le secteur sanitaire, social ou médical, ayant toujours aimé le milieu hospitalier, le rapport
aux patients et le contact humain. Il a pris conscience de cet intérêt plus jeune lorsqu’il s’occupait de sa
grand-mère. Un stage en Maison de retraite effectué en 3° l’avait aussi particulièrement motivé.
Ayant postulé au CHU de Montpellier, il a été recruté en CUI-CAE, après avoir passé un entretien de
motivation au centre administratif et une visite médicale. Il devait être embauché comme ASH
(entretiens des chambres) mais il a été en fait affecté au brancardage il accompagne les patients pour
les examens, il les descend au bloc. Il est resté un an en CAE (à mi-temps) à partir d’avril 2012 avant
de voir son contrat transformé en emploi d’avenir14 le 1° en juin 2013, avec un CDD de deux ans à
temps plein.
« Les Emplois d’avenir, c’est ma chef qui m’en a parlé, mais j’en avais entendu parler aussi par
la radio ».
Jordan considère qu’il a maintenant un pied dans l’hôpital et souhaite y rester.
14
Il est possible en effet d’intégrer un Emploi d’avenir à l’issue d’un CUI (CAE ou CIE) dans la limite de 3 ans au
total (exemple : si déjà 2 ans en CAE, accès à un emploi d’avenir pour 1 an).
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« Je suis motivé quand je me lève le matin. Le CAE, il y avait la signature tous les 6 mois; là,
l’Emploi d’avenir, c’est deux ans, c’est une sécurité, je peux me loger. Je gagne 1191 euros par
mois.»
Damien, 25 ans, en Emploi d’avenir depuis avril 2013 au CHU (service logistique)
A 16 ans, Damien a intégré un CAP menuisier-alu, qu’il a interrompu au bout d’un an et demi. Il a
ensuite effectué des missions d’intérim. Inscrit à la Mission Locale, il a alors réalisé une « mobilisation
professionnelle » avant d’entrer en formation de chauffeur de bus; mais il n’a pas été reçu à l’examen,
n’ayant pas suffisamment révisé selon lui. Il voulait en réalité devenir ambulancier mais n’avait pas à ce
moment là les trois années de permis de conduire exigées. Il a ensuite passé son CACES (permis
cariste) et effectué un an d’intérim dans un entrepôt, emploi qui ne lui plaisait pas. Accompagné dans le
cadre du CIVIS, il a postulé pour le CHU où il est entré en CUI-CAE le 1er avril 2012. Son patron a vu
qu’ « il faisait du bon travail ». Sa conseillère est venue le voir pour proposer de transformer le CAE en
Emploi d’avenir. Il était au tri avant de travailler dans le conditionnement des médicaments pendant 8
mois. Actuellement, il prépare les commandes pour les services de soins (masques à respiration etc.).
En CDD à temps plein jusqu’en 2015, il pense pouvoir être titularisé. Il pourrait remplacer une personne
qui part à la retraite l’an prochain.
Ses horaires sont variables mais lui conviennent car il a son planning une semaine à l’avance. Payé au
SMIC, il gagne le double de ce qu’il avait en CAE.
« C’est moins que l’intérim mais il y a la sécurité de l’emploi. Je ne travaille pas dehors et je ne
vais pas me casser le dos (…). Aujourd’hui, je prends à cœur mon travail. Avant, je n’avais pas
de motivation, j’attendais la paye. C’est un rythme maintenant dans ma vie. Je ne me vois plus
ailleurs qu’à l’hôpital. C’est un équilibre, le travail. Ma mère ne se fait plus de soucis pour moi.
Je suis sérieux ».
Amel, 24 ans, en Emploi d’avenir depuis janvier 2014 dans un Lycée (Conseil régional)
Originaire d’Algérie, Amel est arrivée en France en 2012 pour se marier. Ainée de la famille, elle a
travaillé très vite après sa Terminale littéraire pour aider ses parents. En 2010, elle a été vendeuse dans
une superette et a effectué du petit secrétariat dans une entreprise de fabrication de téléviseurs.
Souhaitant depuis toujours devenir institutrice et appréciant le contact avec les enfants, elle a pu
effectuer en 2011 un remplacement comme ATSEM dans une école pendant un an. Installée en France
en 2012, elle s’inscrit au CNED pour passer le CAP petite enfance. Suivie par la Mission Locale, elle
entre à l’Ecole de la Deuxième Chance (Port Marianne), où elle reste durant un an, et effectue des
stages dans des écoles de Montpellier. Ayant échoué aux épreuves du CAP en juin 2013, elle entame à
partir de septembre de courtes missions de travail (restauration collective, entretien de locaux) avec une
association intermédiaire de Montpellier.
Eligible aux Emplois d’avenir, elle se positionne sur différentes offres proposées par la Mission Locale.
N’étant pas titulaire du CAP petite enfance, elle ne parvient pas à décrocher un emploi en crèche ; elle
postule alors aux Emplois d’avenir d’agent d’entretien dans les Lycées, dont elle a connaissance par la
directrice de l’Ecole de la Deuxième Chance avec laquelle elle était restée en contact. Elle démarre son
contrat début janvier 2014 (CDD de 3 ans) et s’intègre très rapidement, avec des horaires qui lui
conviennent (11h30 - 19h30) et des tâches qu’elle apprécie; elle est à l'accueil quelques heures dans la
journée mais préfère l’entretien des locaux :
24
"L’accueil, c’est bien, mais j'aime bien bouger ; le ménage, tu fais ce que tu as à faire. On est
toujours en action. C’est pas stressant ! »
Elle souhaite être intégrée dans cet emploi définitivement mais estime que l’opportunité de formation
aura été bonne à saisir quelle que soit l’issue :
« J’ai un travail stable, si ça peut continuer… S’il n’y a pas de problèmes, ils peuvent
m’embaucher (…). S’ils ne m’embauchent pas, j’aurais quand-même une formation (…).
J’aimerais être recrutée. Je pars le matin sans être stressée ; je suis contente, je m’entends
bien avec mes collègues. C’est un soulagement. »
Marie, 22 ans, en Emploi d’avenir à la crèche de M. depuis octobre 2013
Originaire de Castelnau, Marie habite depuis un an à Jacou, dans un logement autonome, avec son
petit-ami.
Après l’obtention de son CAP petite enfance en 2009, dans un établissement près de Béziers, Marie
cherche du travail pendant un an. Suivie par la ML et Pôle emploi, elle décroche un CAE en août 2010
dans une crèche d’Assas où elle avait réalisé un stage durant son CAP (contrat à temps partiel).
Elle y reste 2 ans avant de se retrouver de nouveau au chômage. Malgré son expérience de deux ans,
les entretiens qu’elle décroche ne débouchent pas jusqu’au jour où elle postule sur une offre de CAE à
la crèche de M.; lors de l’entretien, elle précise qu’elle ne peut prétendre à un CAE mais qu’elle est
éligible aux EAV ; la crèche ayant un besoin urgent, elle démarre par un CDD fin septembre puis signe
un EAV à partir du 13 octobre (CDD de 3 ans à temps plein). Elle s’occupe des enfants de 13h15 à 17h
30 puis assure l’entretien des locaux :
« J’adore ce que je fais (…) L’ambiance est super dans la crèche (…) C’est génial, j’attends
juste un CDI. (…) Mais ils ne me prendront pas en CDI ; ça déprime un peu. On m’a dit de
réfléchir à ce que je voulais faire dans trois ans (…) C’est dommage que ce soit encore des
petits contrats. Car à la fin, j’aurais 25 ans, j’aurai plus droit à rien ; et il n’y a pas de travail dans
le coin. Au final, j’aurai 5 ans d’expérience. J’espère que cela comptera. »
3.2 Pour les employeurs, des motivations différentes de recruter
Pour un certain nombre d’employeurs, dont beaucoup de collectivités locales, les emplois d’avenir sont
une opportunité pour répondre à leur problématique de gestion prévisionnelle des emplois et des
compétences (GPEC) et d’anticiper sur des futurs départs à la retraite. C’est le cas de la Ville de
Castenau le Lez :
« Les premiers recrutements sont intervenus entre mars et avril 2013; à Castelnau, on est
assez actifs en matière de dispositifs, de contrats aidés, de formation, de contrats
d’apprentissage parce qu’on est une collectivité qui accueillons en moyenne une dizaine de
jeunes en contrats d’apprentissage ; il s’agit principalement de CAP sur 2 ans, il y a donc un
roulement (…). Proportionnellement à la taille de la commune, c’est un excellent ratio. On a
également des contrats d’insertion, et on a intégré différents agents. La politique de la ville est
de prendre des contrats aidés pour pouvoir intégrer ensuite; on essaye d’avoir cette logique
d’intégrer à terme les jeunes (…) S’il a su s’intégrer et répondre aux besoins de la commune,
25
pourquoi pas l’intégrer. Quand le dispositif Emplois d’avenir est sorti, le Maire a souhaité que
l’on fasse également un effort en la matière ».
L’objectif du Conseil général de l’Hérault15 était aussi de favoriser l’intégration de jeunes dans la
collectivité, dans la mesure où ces derniers ne constituent qu’un faible pourcentage des effectifs. La
situation budgétaire étant difficile, les recrutements allaient vers ceux qui avaient le plus d’expérience.
« Mais s’il n’y a pas de jeunes, on se coupe de façons d’être, de savoirs et de savoir faire ; le
dispositif Emplois d’avenir était donc une opportunité pour nous de recruter des jeunes, avec
l’objectif de pérenniser les emplois ensuite. » (Mission diversité du CG 34)
Une Convention entre l’Etat et le département de l’Hérault a été établie, mentionnant que ce dernier
s’engage à « créer 40 Emplois d’avenir au sein des services et à favoriser la création de 60 Emplois
d’avenir au sein des associations prestataires dans le domaine social et médico-social ».
« Il y a eu sept recrutements en novembre 2012. On a débloqué très vite ; on a recruté mais on
n’avait pas les profils de poste; il a fallu faire vite. Ils sont rentrés en réalité en février ou mars
2013; puis nous avons échelonné les recrutements ensuite (…) » (Mission diversité du CG 34)
20 jeunes avaient été recrutés à la date de l’entretien ; deux ou trois emplois en restauration scolaire
(cuisines des collèges), dont « l’intégration était réussie et pour lesquels les témoignages des tuteurs
étaient positifs ». Des jeunes également dans les services espaces verts et en voirie, ainsi qu’à Hérault
sport, dont une personne en situation de handicap.
Un Emploi d’avenir a été recruté également au siège, sur un poste plus qualifié d’assistance
informatique, sur les services réseaux du CG et pour lequel la direction n’envisageait pas au départ de
jeune en EAV; un jeune diplômé, en situation de handicap et résidant en ZUS à Montpellier a finalement
été embauché, et pour lequel, « tout se passe bien. » (Mission diversité du CG 34)
La Chambre de commerce et d’industrie (CCI) a souhaité quant à elle expérimenter un projet de
recrutement de « stewards urbains » qu’elle portait. Selon son responsable ressources humaines, elle
n’aurait jamais recruté s’il n’y avait pas eu le dispositif EAV. Il ne considère donc pas les recrutements
effectués comme un effet d’aubaine mais comme une opportunité dont la CCI s’est saisie.
Quatre « stewards urbains » ont donc été recrutés (CDD d’un an à temps plein, renouvelable deux
fois) : deux jeunes en septembre 2013 (avec au départ 7 candidatures provenant pour moitié de ML et
pour moitié de Pôle emploi) et deux jeunes en janvier 2014 ; il s’agissait de jeunes de niveau Bac. Leur
mission est d’accueillir et d’informer les commerçants du centre-ville, de présenter les services de la
CCI, de participer aux événements portés par la CCI ou la ville, de relever les problèmes liés à
l’affichage sauvage ou aux dégradations.
Trois jeunes ont été recrutés sur des postes d’agents d’accueil (à Ganges, Lunel et Lodève) et deux
jeunes en assistante de vie scolaire (AVS) pour les CFA hôtellerie-restauration et commerce.
Le GEIQ BTP de l’Hérault16 a été informé du dispositif EAV par leur « tête de réseau » ; partenaire de
la MLJAM depuis plusieurs années, il s’est mis rapidement en relation avec le référent EAV, lorsqu’une
opportunité s’est présentée :
15
Le CG 34 apporte en outre un financement complémentaire à celui de l’État, pour l’embauche d’Emplois
d’avenir au sein des établissements relevant de leur compétence.
26
« Nous n’avons pas mis d’offre à la ML. On reçoit des jeunes en permanence et nous avons un
vivier de candidats en attente d’un contrat en alternance. Le premier candidat pour les Emplois
d’avenir avait été repéré par l’entreprise. Agé de 20 ans, le jeune avait été à l’école mais était
en situation d’illettrisme; la signature d’un contrat de professionnalisation n’était donc pas
possible. J’ai fait le choix de l’Emploi d’avenir ; l’entreprise a accepté compte tenu de l’aide
financière (47% de prise en charge17). Il n’y a donc pas eu d’effets d’aubaine ; c’est moi qui aie
proposé la solution de l’emploi d’avenir. » (Directrice du GEIQ)
Deux jeunes ont donc été recrutés à la même période, en juillet-août 2013, par des entreprises
« historiques » du GEIQ, sur des postes de manœuvre :
« Les deux jeunes, on les avait vus deux ou trois fois avant ; l’un avait travaillé en entreprise
(…). Ils avaient des parcours compliqués mais ils avaient un projet dans le BTP et pouvaient
s’adapter (…) Cela se passe très bien dans l’entreprise avec ces deux jeunes (…). On ne
démarre pas de parcours sans savoir où on va avec les jeunes … cela veut dire que le jeune a
validé son projet. En 2013, sur 60 contrats, on a eu trois ruptures. »
La directrice ne sait pas si d’autres recrutements pourront se faire :
« Si l’occasion se présente, je peux recruter. Je n’ai pas forcément de demande. Et puis l’EAV
c’est conjoncturel, on ne sait pas combien de temps cela va durer. Le contrat de
professionnalisation, c’est notre cœur de métier (30 par an sont signés); on maitrise cet outil. »
Selon elle, les EAV ont eu peu de succès au niveau du réseau national des GEIQ car le montage en
formation est lourd administrativement et il y a une réticence des OPCA. Elle estime également qu’il n’y
a pas eu beaucoup de communication sur les EAV dans le secteur marchand dont l’ouverture s’est faite
tardivement « comme s’ils y allaient à reculons ».
3.3 Des modalités d’intégration, d’accompagnement et de tutorat variables selon les employeurs
L’accompagnement des jeunes dans l’emploi est l’un des aspects essentiels du dispositif Emplois
d’avenir; la désignation d’un tuteur (salarié de l’entreprise) dès la signature du contrat est une obligation
pour l’employeur. Dans la réalité, les pratiques de tutorat sont variées.
A Castelnau, un tutorat « renforcé » et des outils de suivi adaptés
Le Service DRH de la Ville de Catelnau a mis en place deux outils, deux « leviers » pour
l’accompagnement des jeunes, un double tutorat et un livret de suivi spécifique :
- Tous les jeunes en Emploi d’avenir ont deux tuteurs : un référent technique (le collègue de travail qui a
une expérience ou un contremaitre ou un chef d’équipe qui travaille avec le jeune) et un référent
administratif, l’ingénieur voirie par exemple :
« On s’est dit que le référent technique était important pour l’apprentissage technique mais sur
les aspects administratifs, quelqu’un de la direction concernée pouvait assurer ce rôle (…). Les
16
Créé en 1997 dans l’objectif de proposer des parcours de formation dans le secteur BTP à des jeunes
faiblement qualifiés, le GEIQ 34 regroupe 35 adhérents (dont 20 adhérents historiques): des entreprises filières
de grands groupes ou de PME, principalement dans le gros œuvre et travaux publics (coffreurs, conduite
d’engins).
17
La Convention GEIQ mentionne que la prise en charge est de 47% comme pour les Entreprises d’insertion
(EI). La prise en charge est de 75% si le recrutement est destiné à l’association GEIQ.
27
tuteurs ont pris à cœur leur rôle, ils sont pleinement investis; c’est un véritable
accompagnement (…). On est proche du maitre d’apprentissage ».
- La ville a construit un Livret de suivi qui accompagne le jeune tout au long de son parcours de trois
ans : « La DRH peut accéder au Livret pour réaliser les suivis réguliers et pour voir les mises à jour, les
appréciations, s’il y a des besoins de formation à déclencher etc. »
Adrien, peintre en EAV à la Ville, confirme le suivi rapproché de ses tuteurs et sa bonne intégration
dans les services:
« J’ai deux tuteurs, le responsable CTM [centre technique municipal] et mon chef bâtiment. Je
les vois tous les jours. On est à côté. C’est nickel, si j’ai un problème, j’y vais. Pour l’instant, il
n’ya jamais eu de problème. (…) Mon chef a dit « tu es un agent ; c’est juste le statut que tu n’a
pas ; tu regardes tes chantiers, t’es un agent comme un autre. Sinon, des gens vont dire c’est
un Emploi d’avenir » ; quand je vais travailler, je suis intégré. Avec M.I [parti en retraite], j’ai
travaillé avec lui deux mois, mais je savais déjà le métier, j’avais travaillé en peinture. Depuis
qu’il est parti, ils me font confiance : je suis seul ; si j’ai besoin de quelqu’un, je demande ».
Pour le Conseil général, un moyen d’innover sur les fonctions d’accompagnement
Pour le CG 34, les aspects tutorat, formation et suivi liés aux EAV sont intéressants même s’ils
apparaissaient au départ contraignants pour certains. Selon le responsable de la Mission Diversité, les
méthodes d’intégration et d’accompagnement imposées peuvent servir à d’autres adaptations (par
exemple dans le cadre des mutations d’un service à l’autre). Dans une optique de transmission
intergénérationnelle, « l’idée est aussi que les dispositifs de tutorat peuvent marcher dans les deux
sens ; on peut avoir des jeunes qui apportent des choses (…) L’idée serait aussi de « découpler le
technique et le relationnel » et de promouvoir l’idée des « tuteurs d’intégration » qui vont être là
notamment pour faciliter la relation avec l’équipe, l’interconnaissance (…) On essaye de promouvoir
cette approche en partant de ce qui existe. Et allant vers des formes de compagnonnage ; et les EAV
nous aident pour ça. »
Les tuteurs d’Emplois d’avenir ont été formés (formation spécifique CNFPT) et il a été décidé de leur
accorder une prime, la même que pour le maitre d’apprentissage, c'est-à-dire 80 euros par mois.
Le GEIQ assure lui-même l’accompagnement en lien avec le tuteur de l’entreprise
Le GEIQ assure lui-même un accompagnement rapproché des jeunes en EAV, dont les modalités sont
inscrites dans la Convention nationale.
Un tuteur est désigné dans l’entreprise qui a recruté mais le GEIQ assure également un tutorat : la
directrice se rend en entreprise ; elle dispose de son outil de suivi qu’elle réalise régulièrement pendant
la durée du contrat et fait le point également avec le formateur (les deux jeunes sont en formation tous
les mois) ; le conseiller ML fait le point avec elle à l’extérieur de l’entreprise.
Au CHU de Montpellier, un tutorat assuré par les services en interne
Jordan estime qu’il a été très bien accueilli à l’hôpital et qu’il y a une bonne entente dans le service ; il a
été intégré dans le service comme les autres. Sa tutrice, qui est infirmière (cadre de santé), le voit tous
28
les jours (elle est également tutrice d’un autre agent en CAE); il peut l’appeler à tout moment en cas de
besoins et inversement. Elle juge de son côté que Jordan s’est bien intégré dans l’équipe, surtout
depuis qu’il est à temps plein; il travaille en binôme et s’entend bien avec l’ensemble du personnel. Elle
l’évalue régulièrement à partir de sa fiche de poste. Elle le connait depuis deux ans (elle était sa tutrice
lorsqu’il était en CAE) et n’a jamais eu de problèmes avec lui. Selon elle, « il cerne bien le métier
d’ASH ». Elle regrette qu’il n’y ait pas eu encore de regroupement de tuteurs. Elle attend celui qui
devrait avoir lieu en avril (sur 2 ou 3 jours).
Damien est également bien intégré au CHU; il s’entend bien avec le personnel (il est le plus jeune du
service). Il a le même tuteur depuis 2012. Tous les 6 mois, il a une évaluation avec son tuteur (sur sa
tenue, le travail en équipe etc.). Sa conseillère de la Mission Locale a fait le point avec son tuteur et lui
lors d’un bilan il y a 6 mois.
Si le tutorat interne semble bien assuré, les engagements en matière de formation ne sont pas
forcément tenus de la même façon pour tous les jeunes recrutés au CHU ; la question posée est celle
de l’interface avec la Mission Locale qui n’est pas toujours facile, selon le conseiller chargé du suivi et le
référent EAV :
« Avec un effectif de plus de 8200 personnes, une organisation très sectorisée (1 référent
Cerfa, 1 chargé du montage des contrats, 1 chargé des recrutements, 1 responsable formation
qui, pour la plupart ne collaborent que rarement ensemble (service recrutement et service
formation par exemple), avec des jeunes positionnés sur différents types de postes au sein de
différentes structures rattachées au CHU, on ne sait pas qui monte le plan de formation. Il est
donc monté a postériori lors notamment du 1er bilan d’intégration à 3 mois avec le tuteur du
jeune, qui, au final, est le seul à vraiment connaitre le jeune et l’activité qu’il exerce chaque
jour. » (Référent EAV)
Pour des structures moins importantes comme certaines associations, les jeunes ont sûrement
davantage d’autonomie. Noémie a été bien intégrée au sein de l’équipe mais :
«En même temps, il a fallu s’adapter très vite, comprendre très vite comment ça fonctionnait car
la charge de travail est importante (…) Pour l’instant j’ai plus l’impression de subir
l’organisation, car je suis arrivée en cours d’année scolaire, mais l’an prochain je pourrai
m’organiser plus comme je veux ».
« Il n’y avait personne sur ce poste au départ donc, à la fois ça me permet d’être assez libre,
mais en même temps ça demande beaucoup d’autonomie ». « Si on compare avec le poste
que j’avais précédemment, ici on m’encourage beaucoup à prendre des initiatives (..) après le
précédent poste que j’ai eu, cela me rassure d’avoir cet EAV et que ça se passe bien avec mes
collègues (…) J’ai eu peur que ça me porte préjudice, que ça me suive ».
Au sein de l’établissement, Noémie a une tutrice, qui est la personne chargée des RH ; le bilan à trois
mois prévu dans le cadre des EAV devrait être bientôt programmé selon elle.
Globalement, le tutorat semble avoir été mis en place partout, même si les modalités diffèrent selon les
employeurs :
A la CCI, un tuteur (agent de maitrise) a été désigné pour les quatre jeunes stewards urbains; il a été
formé et semble valorisé par cette fonction de tutorat, selon le responsable RH. Des entretiens de suivi
sont également planifiés une fois tous les trois mois avec les RH.
Dans beaucoup de structures, les tuteurs sont les salariés qui travaillent au quotidien avec les jeunes
recrutés; c’est le cas d’Amel, recrutée comme agent d’entretien au sein d’un Lycée et qui explique
29
qu’elle s'entend très bien avec sa tutrice, elle-même agent d’entretien et avec qui elle travaille tous les
jours ; c’est le cas aussi de Marie, en poste à la crèche de M. Sa tutrice est sa directrice-adjointe, avec
laquelle elle a un suivi régulier.
Selon le conseiller chargé du suivi des EAV, les cas les plus complexes concernent certaines petites
entreprises du secteur marchand (notamment dans le secteur de la restauration) qui ne mettent pas en
place de tutorat ou de formation parce qu’ils connaissent personnellement le jeune recruté (offre
fermée) et qui sont en outre peu ouvert à des suivis extérieurs. Cela représente selon lui entre 5 et 10
employeurs.
3.4 La mise en œuvre des parcours de formation
La mise en place d’actions de formation pour accéder à de nouvelles compétences est l’un des autres
aspects essentiels du dispositif, même si son objectif est avant tout l’emploi. En théorie, « l’employeur
élabore le plus en amont possible, avec son OPCA, un parcours de formation permettant au jeune
d’accéder à une qualification ». Dans la pratique, les contraintes sont importantes: réticences des
employeurs, en particulier les plus petits, à laisser partir les jeunes en formation, problèmes
d’organisation de la formation, difficultés de financements des formations qualifiantes. Le CNFPT par
exemple, qui intervient pour former les jeunes en EAV dans les CL, ne finance pas de formations
qualifiantes. C’est le cas également de l’Association Nationale de la Formation Hospitalière (ANFH)
dans le secteur médico-social public, secteur qui recrute également beaucoup de jeunes en Emplois
d’avenir.
« Il faut également souligner le manque de réponse « formation » sur le terrain car les
organismes de formation ne sont pas adaptés à mettre en œuvre une formation spécifique pour
X salariés de l’entreprise Y. Il faudrait en effet, mettre en place des parcours de formation
individualisés et adaptés à la réalité de l’entreprise et au niveau du jeune. Cette problématique
se pose moins pour les formations « diplômantes » car le jeune est alors intégré dans les
groupes de formation déjà en place, contrat de professionnalisation par exemple. » (Référent
EAV)
La mobilisation du CNFPT par les collectivités locales
« On oriente les jeunes vers le CNFPT (…) On profite de cette formation CNFPT qui nous
satisfait (…). Sauf pour le jeune recruté en sérigraphie, on a définit avec le responsable une
formation que l’on a payée ; sur ce cas précis, on a fait en sorte que l’agent sur le poste
bénéficie aussi de cette formation. Ils participent ensemble à une même formation. » (Service
RH de Castelnau)
Adrien est satisfait des formations réalisées :
« En septembre dernier, j’ai fait l’initiation à la fonction publique, territoriale, régionale,
départementale (…). C’est le DRH de Marseillan qui faisait la formation, au CNFPT, et du coup,
le dernier jour, il y a eu une intervention de F. [référent EAV de la ML] pour avoir un petit bilan
de cette formation. Elle a duré trois jours ; moi, j’ai appris des choses ; je ne savais pas qu’il y
avait des choses qui appartenaient à la Région. C’est des choses toutes bêtes mais quand on
n’a pas le nez dessus, on ne sait pas. Et puis j’ai fait une formation CNFPT à Montpellier, de
trois jours sur la maintenance des bâtiments publics : en amont, la sécurité hygiène, permis feu,
arrêts préfectorale, habilitations, des choses qu’on ne sait pas : si je veux peindre tel mur, il faut
telle habilitation. En général, les communes arrivent à se mettre au niveau. Dans le privé,
30
seulement 3 sur 100 peintres ont cette habilitation ; mais s’il arrive quelque chose, un incendie,
c’est à leur charge (…). »
Il est plus nuancé sur l’intérêt de la formation en électricité qu’il a suivie à Nîmes :
« Elle n’était pas trop adaptée pour moi, il fallait être électricien au minimum. Mais au CNFPT, il
y a pas trop de formations dans le bâtiment : on a 14 jours à faire par an, mais dans le
bâtiment, ce n’est pas évident : la peinture, je n’ai pas besoin, ni la plomberie et après, il y a pas
grand chose d’intéressant ».
C’est aussi au CNFPT qu’Amel a suivi une formation de deux jours (adaptation au poste de travail)
avec 17 autres jeunes en Emploi d’avenir ; elle a apprécié l’ambiance dans laquelle s’est déroulée cette
formation et pense pouvoir réaliser une formation d'agent d'accueil probablement à partir de
septembre : "c'est toujours bien de se former". Avant cela, elle se prépare pour repasser son CAP petit
enfance qu’elle avait tenté l’année précédente et pour lequel elle n'a que deux épreuves à passer.
Au CHU, Jordan doit démarrer une formation de remise à niveau en mai (maths, français, biologie).
Selon sa tutrice, « au début, il n’était pas chaud pour faire de la remise à niveau ». Il est convaincu
maintenant car il est certain de son projet et de sa volonté d’intégrer l’hôpital : « ça va me permettre de
me remettre dans le bain : 80 heures, financées par l’hôpital ». Cette remise à niveau doit lui permettre
d’entrer en formation, de septembre à février, pour préparer le concours d’aide-soignant. Il réalisera
cette formation dans son temps de travail, une journée par semaine, jusqu’à la fin de son contrat en
février. L’objectif est de passer le concours pour être recruté à la rentrée de septembre 2015.
La formation tarde à se mettre en place dans le cas de Damien qui voudrait suivre une formation
sécurité-incendie ; il pense que cette obligation de formation, « cela n’arrange pas ses responsables ».
Et il ne veut pas « réclamer », de peur d’avoir ensuite des problèmes.
Noémie, quant à elle, n’a pas encore évoqué la question de la formation avec sa tutrice :
« Je voudrais qu’on me laisse le temps de me poser sur mon poste avant de me projeter sur
une formation (…) mais mon idée est de valider un diplôme quand-même, comme un D.A.E.U
par exemple, l’équivalent d’un bac. Ce serait assez général. »
Marie devait faire une première formation « Gestes et postures » mais celle-ci a été annulée car elle
était la seule inscrite. Elle devait suivre en mai une journée en formation sur l’Autorité, avec le CFA
Partner à Montpellier. Sa responsable lui a demandé de réfléchir à son projet de formation par la suite :
« En fait, j’avais pensé en dernier recours au concours d’ATSEM. La VAE, pour l’instant, je n’ai
pas assez d’heures. Il faut trois ans à temps complet ; donc, le seul truc, c’est le concours
d’ATSEM. Le concours d’auxiliaire de puériculture, cela me fait peur (…). Ma conseillère m’a
conseillé de le faire en alternance mais ma référente trouve que c’est difficile. A la crèche, c’est
pas possible ».
Pour le GEIQ dont la mise en œuvre de parcours de parcours est le cœur de métier, la formation est
une priorité :
« On nous avait présenté les Emplois d’avenir comme un sas qui pouvait aboutir sur un contrat
en alternance (notre cœur de métier) mais cette perspective n’est pas possible car le salaire
deviendrait plus faible à l’issue: c’est trop compliqué ; donc, pour ces jeunes au parcours
scolaire chaotique (l’un n’a jamais été à l’école), on a mis en place un parcours de remise à
niveau, sur les savoirs de base (300 heures, une semaine par mois) la première année, puis de
31
formation technique (420 heures avec l’AFPA). La semaine de remise à niveau est difficile car
ce sont des jeunes qui ont été peu scolarisés mais ils s’accrochent (…) ils s’en sortiront. »
(Directrice GEIQ)
4. Eléments de synthèse et questionnements
L’étude sur le territoire de l’Agglomération de Montpellier a mis en lumière l’intérêt du dispositif des EAV
pour les jeunes peu qualifiés, en difficulté d’insertion professionnelle. Issus de Montpellier ou des
communes avoisinantes, les jeunes interrogés ont de 22 à 25 ans ; ils disposaient d’une expérience
professionnelle avant leur entrée en emploi d’avenir mais ne parvenaient pas à trouver un emploi
stable. Au total, 637 jeunes sont entrés en EAV entre novembre 2012 et juin 2014, ce qui représente un
chiffre important même si l’objectif pour 2013 n’a pas été atteint. La légère diminution du chômage des
jeunes dans l’Hérault (- 1,3% en mars 2014 pour les jeunes de moins de 25 ans en catégorie A) est
sans doute liée au développement des EAV.
Un dispositif efficace et pertinent pour un public particulier
Les jeunes, comme les professionnels de la ML, voient dans ces EAV, l’avantage de pouvoir intégrer un
emploi stable tout en étant suivis et formés. Noémie résume les atouts du dispositif :
« Parce que pour des jeunes comme nous, qui n’avons pas le niveau, on n’aurait jamais été
recruté. Donc ça permet de nous ouvrir des portes, sur des choses que l’on n’aurait jamais pu
imaginer, même en rêves (…) mais il faut que ce soit bien encadré, et que l’on soit considéré.
Et pour ça je pense que s’il y a un suivi régulier et des bilans, on peut éviter certaines dérives ».
Si l’accès à la formation est l’un des aspects essentiels de l’EAV, le public concerné n’est pas le même
que celui qui entre en apprentissage. Les jeunes apprentis sont en général moins âgés et ne
poursuivent pas le même objectif :
« Un jeune qui va en apprentissage, son objectif, c’est le diplôme. Le jeune qui entre en Emploi
d’avenir, son objectif, c’est d’abord l’emploi. Le pari, il est là : les jeunes ne veulent plus
remettre les pieds à l’école, ils veulent aller au travail ; ils y vont et au bout d’un an, avec le
tuteur à côté, les collègues, les perspectives d’évolution, les jeunes viennent petit à petit à la
qualification. Certains disent « je veux bien passer un diplôme. » (Référent EAV)
Pour la Mairie de Castelnau, qui recrute une dizaine d’apprentis par an, il n’y a pas de concurrence
entre EAV et apprentissage :
« On n’est pas dans la concurrence. Le contrat d’apprentissage, c’est permettre d’acquérir un
métier, d’obtenir un diplôme, et point, sans avoir l’objectif d’être gardé. C’est arrivé une fois ou
deux car cela représentait un intérêt pour la commune. Un ou deux jeunes en plomberie. (…).
Pour les Emplois d’avenir, on est dans l’aspect contrat de travail, dans le professionnel avec
une perspective, pourquoi pas, de pérennisation dans l’emploi. »
Même si la baisse de l’apprentissage est constatée globalement sur le territoire, liée aux difficultés
économiques des entreprises, le nombre de jeunes suivis à la MLJAM entrant en apprentissage n’a pas
diminué. La Direccte estime également qu’il n’y a pas concurrence entre ces deux dispositifs.
32
« Il y a d’autres contrats plus avantageux si on vise la formation pure et notre rôle est de
l’expliquer aux employeurs ; cela permet à ces différents contrats d’être complémentaires et pas
en concurrence, parce qu’il y a un public pour chacun. » (Directeur-adjoint de la ML)
Le cas d’Adrien illustre l’évolution des jeunes qui avaient un blocage vis-à-vis des études et qui voient
progressivement l’intérêt de la formation à partir d’une expérience professionnelle :
« Je leur avais dit à l’entretien que j’allais passer mon CAP ; ils m’ont laissé passer les
épreuves, il y a pas eu de soucis. Et je l’ai eu tranquillement. Même si le CAP n’est pas un
niveau scolaire vraiment… A l’école, sincèrement, je n’ai jamais voulu m’intéresser quand j’étais
petit ; maintenant que j’ai réfléchi, je me dis que je serais plus motivé pour un bac pro. On
m’aurait dit : « fais un CAP, j’aurais dit non: j’ai pas envie d’aller à l’école »; là, le CAP il suffit de
travailler un minimum et au final, j’ai eu des bonnes notes [entre 15 et 17 environ]… pourtant, je
n’ai pas révisé des masses; pour quelqu’un qui à l’école…n’a pas eu son brevet... Ce qui me
motivait, c’est d’avancer, d’avoir au moins un diplôme : quand j’ai eu la période de 6 mois sans
rien faire, au chômage, à chaque fois que je cherchais, ils demandaient un diplôme, un CAP
minimum, ou 6 ans d’expérience, mais il y a 3 ans, je les avais pas. Et puis, faut les prouver les
6 ans, y suffit qu’on ait un peu travaillé au black… (…) Le CAP, c’est pour moi-même, pour
avoir un diplôme, et vu que j’ai aimé ce métier et que je compte y rester, voilà ; après je peux
toujours passer mon bac pro ou un BP. Tout dépend (…) »
Cet enjeu de la formation pour des jeunes qui ont souvent été en difficultés avec l’école est important :
le référent EAV suggère toujours aux employeurs d’ajouter un article « Tutorat et formation » dans leur
contrat de travail afin de rappeler aux jeunes que cet axe formation est obligatoire :
Article 2 – Formation et tutorat
Monsieur X bénéficiera d’actions d’accompagnement professionnel et de formation lui permettant
d’obtenir une certification professionnelle dans les métiers de l’animation sportive suivant le document
d’engagement et de suivi tripartite annexé au présent contrat.
Des représentations des employeurs vis-à-vis des jeunes qui évoluent
Selon les professionnels de la ML, le dispositif a permis de faire évoluer l’image que les employeurs
avaient des jeunes « jeunes en difficultés », c’est le cas de petites communes rurales qui ont recruté
des jeunes issus de ZUS, comme Cournonsec par exemple (même si beaucoup ne recrutent que les
jeunes de leur commune) mais aussi de l’agglomération de Montpellier. Un jeune du quartier Petit Bard
qui avait connu des problèmes d’incarcération a été recruté à l’Agglomération ; il a été régulièrement
suivi par la ML et a passé le cap d’un an.
Selon l’animatrice territoriale de la Direccte, le regard a changé sur le public ZUS, même s’il y a
plusieurs territoires et plusieurs publics ZUS différents : la Paillade et Petit Bard ont des tissus
associatifs différents, par exemple. Avant, il y avait plutôt un regard positif sur les apprentis et un regard
négatif sur les jeunes sans qualification suivis à la ML ; ces regards sont en train de changer dans la
mesure où ces jeunes placés en EAV font preuve de maturité et de capacités d’adaptation et de travail,
souvent acquises lors de leurs expériences précédentes. Les ruptures de contrats sont globalement peu
nombreuses, comparées notamment aux ruptures constatées dans l’apprentissage.
Une connaissance et une reconnaissance plus grandes des compétences de la Mission Locale
Pour certains de nos interlocuteurs, les EAV ont permis la montée en compétences des professionnels
de la ML, en particulier en ce qui concerne la mise en place de plans de formation, grâce notamment au
33
travail avec les OPCA, et en ce qui concerne le suivi dans la durée des parcours de jeunes en
entreprises ; pour d’autres, il s’agit davantage d’une mise en lumière de leurs compétences. Selon
l’animatrice territoriale de la Direccte, « les EAV ont légitimé les ML qui ont désormais une place en tant
que prescripteurs ». Les EAV ont révélé également l’importance de l’approche globale de la Mission
Locale, du suivi sur tous les aspects périphériques de l’insertion du jeune.
Les entreprises connaissent davantage la MLI et ses services.
Pour le DRH de la Commune de Castelnau, qui n’avait jamais eu de relations avec MLI avant : « Les
relations sont très bonnes avec la Mission Locale. Avec les contrats d’apprentissage, il n’y avait pas de
relations avec les MLI, pas de contacts ; on recevait des candidatures spontanées et on organisait
l’inscription des jeunes en CFA s’ils n’avaient pas fait les démarches avant. »
La MLI représente également un contact nouveau pour la CCI qui était en relation essentiellement avec
Pôle emploi.
Les EAV ont été une opportunité pour la MLI d’accroitre son fichier d’entreprises et de développer son
savoir faire en matière de relations entreprises.
L’enjeu est maintenant pour la ML de maintenir ce capital de confiance et de fidéliser son réseau
d’employeurs, notamment en ayant l’occasion de transférer ce savoir faire sur d’autres dispositifs
emploi.
Limites du dispositif et points de vigilance
Une des limites principales concerne la mise en place de la formation, en particulier qualifiante :
« La première difficulté est liée aux formations qualifiantes ou diplômantes : pour les
Collectivités locales, le CNFPT n’a construit que des formations professionnalisantes, donc
courtes et successives. Pour les formations diplômantes, certains employeurs étaient prêts à
passer par l’externe, en payant des formations en CFA notamment et cela aurait pu constituer
une réponse rapide, il y avait des montages possibles, sauf que le monde de l’apprentissage a
vécu le dispositif EAV comme un concurrent et non complémentaire à l’apprentissage. (…) Les
plus belles formations sont réalisées pour des éducateurs spécialisés ou des moniteurs
éducateurs ; ce sont des exemples minimes mais éclairants : les employeurs ont adapté le
début et la fin du contrat à la formation car celle-ci était trop longue par rapport au contrat ; c’est
l’exemple de GESTARE, une association de réinsertion sociale qui a recruté une éducatrice
pour faire du lien social. » (Directeur adjoint de la ML)
Beaucoup d’employeurs cherchent avant tout un jeune salarié et si les montages en formation sont
compliqués et chers, les parcours de qualification vont être difficiles à mettre en place.
Selon Uniformation, la question du financement n’est pas la seule limite : « pour les auxiliaires de
puériculture ou les aides soignants, il est impossible d’arriver à ces formations dans le cadre des EAV
car il y a une sélection à la formation par concours (agréée par ARS 18 et Région) et un Numérus
Clausus : on prend les meilleurs, des jeunes qui ont Bac + 3 (…). Dans toutes les crèches, les jeunes
ont un CAP Petite enfance, à 80%. Elles vont aller en préparation d’auxiliaire de puériculture mais
n’obtiendront pas le concours ».
18
ARS : Agence régionale de santé
34
Une autre difficulté concerne le tutorat que les employeurs mettent en place de façon inégale avec une
interrogation pour les petites entreprises, du secteur marchand notamment, qui ne prennent pas en
compte cette nécessité de l’accompagnement rapproché des jeunes, nécessaire à leur bonne
intégration et à leur professionnalisation.
L’un des points de vigilance essentiel, pour la ML, comme pour la Direccte, est de maintenir des
emplois de « qualité », respectant les exigences du dispositif, notamment en matière de tutorat et de
formation. Cette exigence implique que le temps passé par les professionnels de la ML pour vérifier et
suivre les engagements des employeurs va s’accroitre avec l’augmentation du nombre de jeunes en
EAV en 2014.
35
Annexes
Annexe 1. Entretiens réalisés (territoire MLJAM)
Mission Locale :
Directeur-adjoint
Référent EAV
Chargé de relations entreprises
Responsable antenne Centre
Responsable antenne Mosson
Conseiller référent emploi
Conseiller suivi EAV
Chargée de mission ARML
Services de l’Etat et partenaires :
DIRECCTE : animatrice territoriale UT 34
Pôle emploi (apport écrit)
Employeurs :
CCI
GEIQ
Mairie de Castelnau
Conseil général 34
CHU Tutrice
Jeunes :
Noémie (EAV Coeptis)
Marie (EAV crèche de M.)
Amel (EAV Lycée)
Adrien (EAV Ville de Castelnau)
Jordan (EAV CHU)
Damien (EAV CHU)
Participation à la Cellule opérationnelle du 27 mars 2014, en présence de deux OPCA : Uniformation
et Agefos PME
36
Annexe 2. Compte-rendu de la restitution de l’étude
Lundi 22 septembre 2014, à Montpellier
La restitution de l’étude sur le territoire de l’agglomération de Montpellier s’est tenue le 22 septembre,
soit près de 5 mois après la fin de la conduite des entretiens réalisés (les entretiens ont été menés pour
l’essentiel entre les mois de janvier et d’avril 2014).
Près d’une trentaine de personnes étaient présentes à cette rencontre, représentant les différentes
familles d’acteurs interrogées lors de l’étude: jeunes, équipes de la ML impliquées dans la mise en
œuvre des EAV (référent EAV, RT, CRE, conseiller référent emploi, conseiller EAV, direction), Direccte
(dont le directeur de l’UT 34, Monsieur Aygalent), Pôle emploi, employeurs (CG 34, GEIQ BTP, Coeptis,
tutrice CHU), OPCA, ARML.
Le Maire de Pérols, Monsieur Rico, représentait le bureau de la Mission Locale.
Le nombre important de participants témoigne de la mobilisation des différents acteurs autour
du dispositif et de l’intérêt porté à l’étude et à ses résultats. Il a été souligné que peu d’occasions
existaient de faire se rencontrer ces différentes catégories d’acteurs; beaucoup ne se connaissaient
pas.
Après la présentation synthétique du rapport (illustrée sur plusieurs points par les témoignages de
jeunes et d’employeurs), plusieurs éléments, repris ci-dessous, ont été mis en débat. Certains sujets,
comme la question de la mise en place des parcours de formation, ont pris davantage de place que
d’autres. Lorsque les questions abordées sont assez techniques (telle que le financement de la
formation), il n’est pas facile pour tous et plus particulièrement pour les jeunes, de s’exprimer. Le rôle de
l’animateur est important, il connaît l’ensemble des participants et est en mesure de donner la parole à
chacun.
Tous les sujets n’ont donc pas pu être abordés. Il n’a pas été question des évolutions des
représentations sur les jeunes peu qualifiés par exemple, ni des changements que le dispositif a pu
engendrer sur les pratiques des conseillers au sein de la Mission Locale.
Les pistes d’amélioration évoquées, comme le regroupement de tuteurs ou la mutualisation de
formations, ont suscité de l’intérêt mais n’ont pas été approfondies.
La concurrence EAV/apprentissage
L’OPCA OPCALIA s’est interrogé sur la concurrence possible, notamment en 2015, entre les EAV et
l’apprentissage en raison, notamment, de la prise en charge du financement de la formation à hauteur
de 92% par l’Etat dans le cadre de l’IEJ (voir ci-après).
La direction de la ML a rappelé qu’à ce jour, cette concurrence n’était pas avérée sur le territoire de de
l’agglomération de Montpellier. Le nombre de jeunes orientés par la Mission Locale pour signer un
contrat d’apprentissage est en hausse de 20% sur le début de l’année 2014 par rapport à l’année 2013.
La directrice du GEIQ BTP de l’Hérault a rappelé que les deux jeunes recrutés en EAV au sein de sa
structure avaient un profil différent des jeunes habituellement recrutés en contrats de
professionnalisation ou en apprentissage. Pour les jeunes en EAV, il a été nécessaire de construire un
parcours de formation personnalisé (Cf. rapport).
L’animateur de l’ARML Languedoc Roussillon a fait remarquer que si concurrence il existe, c’est
entre les Emplois d’avenir et les CAE, dont le nombre est en forte baisse sur la région.
La représentante du CG de l’Hérault a rappelé que pour les jeunes recrutés en EAV, l’objectif est bien
de pérenniser les contrats (contrairement aux jeunes recrutés en contrat d’apprentissage).
37
Le tutorat
Deux jeunes, Alan/Adrien et Noëlla/Noémie, ont témoigné de l’importance du tutorat dans le cadre de
leur EAV. Adrien, employé depuis mai 2013 en tant que peintre à la commune de Castelnau a rappelé
l’intérêt du double tutorat dont il bénéficie dans le cadre de son emploi : un tuteur pour les aspects
techniques sur le terrain et un tuteur pour les aspects administratifs. « J’obtiens ainsi rapidement les
réponses dont j’ai besoin ». (Adrien)
La tutrice de Geoffrey/Jordan, en EAV au CHU, a expliqué que tous les six mois, les tuteurs de
jeunes en EAV au CHU devaient remettre un rapport écrit à leur direction. En tant que tutrice, elle s’est
sentie parfois isolée, elle aurait souhaité pouvoir échanger davantage avec d’autres tuteurs. Cela
rappelle des remarques formulées dans d’autres territoires sur la possibilité et l’intérêt d’organiser des
échanges de pratiques entre tuteurs sur le territoire (Cf. Expérience du Centre de ressources Politique
de la Ville dans l’Essonne).
La formation
Noëlla/Noémie, embauchée comme assistante initiale en EAV au sein de l’école COEPTIS, a témoigné
de l’importance de laisser le temps aux jeunes pour définir et construire leur projet de formation. Son
employeur est allé dans le même sens : « Noëlla est entrée dans la structure sur un poste d’assistante
initiale. Aujourd’hui, on peut envisager avec elle un parcours de formation, qui consiste à la former sur
un poste de secrétaire comptable et pourquoi pas, à terme, sur un poste de comptable. Cela n’aurait
pas été envisageable si l’on ne s’était pas laissé le temps de mieux se connaître ».
L’une des tutrices du CHU confirme cette importance du facteur temps pour permettre aux jeunes de
mûrir leur projet et de définir avec eux leur projet de formation : « Geoffrey a pu mieux définir son projet
à l’issue de sa première année à l’hôpital. Il a pu prendre le temps de passer un test pour mieux
mesurer quelles étaient ses possibilités. Aujourd’hui, il fait une remise à niveau pour lui permettre
d’entrer en préparation pour passer le concours d’aide-soignant. Le temps passé au sein de l’hôpital a
joué un rôle dans la définition de son projet ».
Les professionnels de la ML sont revenus sur la difficulté de construire des parcours de formation,
avec une offre de formation parfois très limitée. Dans certains cas, encore rares, les formations sont
mutualisées entre plusieurs structures. C’est le cas d’une formation « animateur-éducateur sportif » par
exemple ou d’une formation CQP « animateur en milieu scolaire ». Cette difficulté à trouver des
formations pour les jeunes en EAV demeure importante dans les collectivités territoriales (où ces
difficultés ne concernent pas que les EAV). Le CNFPT fait des efforts pour que des formations soient
organisées de manière spécifique en direction des jeunes en EAV, mais les manques sont importants.
L’OPCA AGEFOS PME est revenu sur les difficultés à assurer le financement de parcours de formation
longs et certifiants, parfois peu adaptés aux EAV, et a insisté sur les baisses de financement auxquelles
sont confrontés les OPCA. En effet, les OPCA se font refinancer les fonds engagés pour ces parcours
au niveau national, par le Fonds de sécurisation des parcours professionnels (FSPP). Or, il y a eu une
baisse de 72% des fonds accordés aux OPCA en 2014. AGEFOS PME a par exemple pu financer les
parcours jusqu’au 1er avril 2014, puis a assuré ce financement sur fonds propres. Pour certains OPCA,
les financements des parcours de formation des jeunes en EAV sont aujourd’hui assurés via l’IEJ
(depuis le 1er juillet pour l’OPCA OPCALIA). C’est la piste de financement aujourd’hui envisagée par
d’autres OPCA (réponse d’OPCA AGEFOS PME en cours pour bénéficier de fonds européens - IEJ).
Alan/Adrien, jeune en EAV au sein de la mairie de Castelnau a témoigné de l’intérêt de certaines
formations qu’il a effectuées (Cnfpt) mais aussi de ses interrogations sur les possibilités d’accéder à des
formations permettant d’évoluer dans son domaine, la peinture, lui étant déjà titulaire du CAP.
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Le directeur départemental de la Direccte a conclu la rencontre sur l’importance du partenariat
dans un dispositif aussi complexe, dans lequel tous se sont engagés. Il a souligné la nécessité
d’améliorer encore sa qualité, dans un objectif de réduction du chômage des jeunes (celui-ci reste en
effet encore important sur le territoire malgré sa légère baisse en un an, liée au développement des
EAV). L’information auprès des différents acteurs doit donc être poursuivie. Ce d’autant plus que le
dispositif est maintenu pour l’année 2015.
39