1 PRISE EN CHARGE DE LA DOULEUR EN PEDIATRIE Dr

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1 PRISE EN CHARGE DE LA DOULEUR EN PEDIATRIE Dr
PRISE EN CHARGE DE LA DOULEUR EN PEDIATRIE
Dr. Ricardo Carbajal
Centre National de Ressources de Lutte Contre la Douleur. Hôpital d’enfants Armand
Trousseau. Assistance Publique-Hôpitaux de Paris. Paris
Mise à jour du 1 décembre 2006
Correspondance :
Dr. Ricardo Carbajal
Centre National de Ressources de Lutte contre la Douleur.
Hôpital d’enfants Armand Trousseau.
26, av du Dr Arnold Netter.
75012 Paris. France
Tel : 0144735421
Email [email protected]
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1. INTRODUCTION
D’énormes progrès ont été réalisés durant la dernière décennie pour améliorer la prise en
charge de la douleur chez l’enfant. L’attitude générale, sociale et médicale, vis-à-vis de la
douleur a changé. Les attentes des patients et des familles sont différentes : la douleur n’est
plus vue comme une fatalité ou une « rançon » obligatoire à payer pour être soigné. La
prévention et le traitement de la douleur des patients sont devenus une obligation du personnel
de santé. Par conséquent, nous devons laisser définitivement derrière nous le sous-traitement
de la douleur qui fut la « norme » autrefois. Cette mauvaise prise en charge était en partie
expliquée par la peur des complications dues aux analgésiques centraux, la crainte de masquer
un diagnostic, la mauvaise évaluation de la douleur de l’enfant et le manque de formation du
personnel médical à cette prise en charge [1]. L’enseignement médical a longtemps considéré
que la douleur était un maître symptôme et à respecter en tant que tel. Pourtant, s’il est vrai
que la douleur est importante à la survie de tout être humain, son rôle protecteur peut être
rapidement, et le plus souvent, facilement défini en médecine. Ainsi, lorsque la douleur
accompagne une pathologie dont le diagnostic est aisément posé, elle n’a plus aucun rôle et
son traitement doit être immédiatement réalisé. De même, la douleur liée aux gestes
diagnostiques ou thérapeutiques n’a aucun rôle protecteur. Sa prévention et son traitement
doivent être les piliers d’une prise en charge humaine et globale du patient. Quant à la douleur
d’une pathologie non identifiée, la plupart du temps le soulagement de la douleur non
seulement ne nuit pas au diagnostic mais peut, au contraire, le faciliter. C’est le cas,
notamment, de la douleur abdominale pour laquelle, il persiste encore parfois le « dogme » de
l’abstention de traitement antalgique alors que des études réalisées chez l’adulte ont montré
que l’utilisation d’un analgésique majeur peut, au contraire, aider à affiner le diagnostic de ce
type de douleur [2]. Chez l’enfant, des études récentes ont également montré que l’utilisation
de morphine intraveineuse soulage efficacement la douleur abdominale sans nuire au
diagnostic [3, 4].
2. LES ENFANTS N’AIMENT PAS LES PIQURES
La prise en charge des enfants malades comporte très souvent des actes diagnostiques et
thérapeutiques générateurs de douleur. L’agression que ces actes engendre chez l’enfant est
augmentée par le fait que la plupart d’entre eux, surtout les plus jeunes, ne comprennent pas
qu’étant déjà malades et souffrants, on leur inflige une nuisance supplémentaire. Les piqûres
ne sont pas l’apanage de l’enfant malade, car même les enfants bien portants subissent ces
gestes, par exemple, lors des injections systématiques de vaccins.
En pédiatrie, l’acte agressif le plus souvent pratiqué est la ponction veineuse. Lorsqu’on
interroge des enfants hospitalisés, ils signalent que la partie la plus pénible de leur séjour à
l’hôpital a été les piqûres [5]. Les enfants détestent et craignent les piqûres. Ils se sentent
impuissants et agressés par les piqûres ; ils n’ont pas une connaissance précise du geste et leur
vécu est fortement mêlé de croyances et de fantasmes. Les peurs des enfants sont souvent
irrationnelles et les adultes ont du mal à les imaginer. Les enfants imaginent des piqûres
immenses, qui traversent leur corps de part en part, ou qui restent à l’intérieur [6]. La douleur
produite par ces piqûres n’est pas une fatalité car il existe des moyens analgésiques pour la
diminuer ou l’éliminer.
3. L’ANALGESIE DES GESTES EST UNE OBLIGATION DES SOIGNANTS
La réalisation d’actes diagnostiques et thérapeutiques de nature douloureuse est
malheureusement souvent inévitable chez l’enfant. La prévention et le soulagement de la
douleur induite par ces actes sont une obligation de tous les soignants. Le choix de l’agent
analgésique doit tenir compte du rapport bénéfice/risque selon chaque situation ; ce choix
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n’est pas toujours aisé pour des gestes souvent assez douloureux mais d’une durée
relativement courte.
Avantages d’un soulagement efficace de la douleur des gestes chez l’enfant
• Avantage humain : empêcher une douleur inutile.
• Limiter le traumatisme psychologique et physique du passage à l’hôpital ou d’une prise en
charge médicale.
• Eviter ou diminuer la phobie des aiguilles déclenchée par une expérience douloureuse
chez les enfants. Cela peut permettre d’envisager d’une façon plus sereine les éventuels
prélèvements ultérieurs.
• Eviter aux parents l’angoisse de voir souffrir leur enfant. Les parents, désemparés par
cette angoisse, peuvent parfois agresser verbalement leur enfant qui ne se calme pas.
• Diminuer le stress des infirmières ou des médecins qui réalisent les actes chez les enfants.
• Accomplir le devoir des soignants qui est de soulager ses patients, auquel s’ajoute une
gratification morale pour le personnel de santé du « travail bien fait ».
Lors de la prise en charge de la douleur de l’enfant, il ne faut pas négliger l’anxiété qui est
souvent présente chez l’enfant. Il est parfois nécessaire de donner, outre les médicaments
destinés au contrôle de la douleur, des médicaments pour diminuer d’une façon spécifique
l’anxiété. Les antalgiques centraux et les anxiolytiques possèdent un effet sédatif.
L’utilisation des analgésiques pour une douleur aiguë, prolongée, ou continue nécessite une
évaluation de la douleur soit par une auto-évaluation chez les enfants de 5 à 6 ans ou plus, soit
avec une échelle d’hétéro évaluation chez les enfants plus jeunes. L’évaluation de la douleur
de l’enfant n’est pas traitée ici.
4. QUELQUES ANALGESIQUES ET SEDATIFS UTILISES CHEZ L’ENFANT [7]
L’analgésique utilisé doit correspondre à l’intensité de la douleur. L’utilisation d’un
antalgique mineur pour des douleurs sévères ne soulage que la conscience du prescripteur.
Une description des principaux médicaments utilisés chez l’enfant est faite ci-dessous. Le
tableau 1 présente un récapitulatif de ces médicaments.
4.1. MORPHINE
La morphine est l’analgésique majeur de référence. Elle procure une analgésie, une sédation
et une anxiolyse. Elle est plus efficace pour la douleur intense et continue que pour la douleur
aiguë ponctuelle d'un geste douloureux. Elle peut entraîner une dépression respiratoire. Elle
est utilisée par voie intraveineuse (IV) et orale. Par voie IV, son délai d'action est de 5 min. et
sa durée d'action de 3 à 4 heures. La morphine est synergique avec le paracétamol.
Dose
En cas de douleur intense, la voie IV est souvent préférée avec l’administration d’un bolus
initial de 0,1 mg/kg suivie habituellement d’une perfusion veineuse continue à la dose de 0,5 à
1 mg/kg/j, soit 0,02 à 0,04 mg/kg/h. Pour les enfants de moins de trois mois, commencer avec
de doses de 0,01 mg/kg/h.
Le soulagement d’une douleur intense nécessite d’effectuer une titration. Celle-ci consiste à
administrer un bolus initial (souvent de 0,05 à 0,1 mg/kg) puis d’attendre 5 minutes. Si la
douleur persiste, une deuxième dose de 0,025 à 0,03 mg/kg est administrée. Si la douleur
persiste, on continue à administrer de doses similaires à la deuxième toutes les 5 minutes
jusqu’au soulagement du patient. Lorsque la dose totale administrée atteint 0,2 mg/kg, il est
nécessaire de réévaluer la cause de la douleur et de s’assurer clairement de l’absence d’effets
secondaires.
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La morphine peut aussi être administrée dès le début par voie orale. Cette voie doit, d’ailleurs,
être privilégiée chaque fois que cela est possible. Per os, la dose initiale habituelle est de 0,5 à
1 mg /kg/jour répartie en 6 prises. Les doses peuvent être augmentées par paliers de 30 à 50%
en cas d'inefficacité. Il n’existe pas de posologie unique. La bonne dose est celle qui soulage
le patient sans effet secondaire majeur.
Il faut d’autre part réaliser des prescriptions claires en signalant la dose en mg/kg/j (ou par
dose) et la dilution à effectuer. Cette rigueur diminue le risque d’erreur.
Lorsque le traitement dure quelques jours, l'arrêt doit être progressif. La morphine entraîne
parfois des nausées, un prurit et une constipation. La prescription d’un laxatif doit être faite
dès le début du traitement. Une surveillance rapprochée de la fréquence respiratoire et de
l’état de conscience est indispensable. La façon la plus efficace pour la surveillance est
d’établir une feuille ad-hoc avec report systématique des constantes vitales, douleur et effets
secondaires.
PCA (Analgésie contrôlée par le patient)
La morphine peut être administrée en PCA aux enfants âgés de 5 à 6 ans et plus. Le plus
souvent un débit continu est utilisé chez l’enfant. Ce débit continu est habituellement démarré
à 0,02 mg/kg/h. Les doses de bolus sont initialement fixées à 0,02-0,04 mg/kg/h. La période
réfractaire est le plus souvent fixée à 6 minutes. La dose cumulée maximale autorisée par 4
heures sert à fixer une limite de sécurité. Elle doit être réglée en fonction du débit continu
prévu et de doses de bolus autorisés.
Présentation :
IV : Plusieurs présentations existent pour la morphine injectable. Elles vont de 0,1 à 50 mg
par ml. La présentation la plus usuelle est celle contenant 10 mg/ml.
Per os : Deux formes de morphine orale existent : à libération immédiate et à libération
prolongée (LP).
Libération immédiate : l’action analgésique débute environ 30 minutes après la prise et dure
environ 4 heures. Plusieurs concentrations existent pour la solution buvable. Les plus
courantes en pédiatrie sont celles contenant 1 mg/ml ou 2 mg/ml. Il faut s’assurer de la forme
disponible dans chaque centre. En sirop, la présentation de la Morphine Aguettant® contient 5
mg/ml ; la pipette fournie délivre 0,5 mg/graduation mais les graduations commencent à 2,5
mg. Actiskenan® gélules à 5, 10, 20 ou 30 mg. L’AMM en France est à partir de 6 mois pour
l’Actiskenan®. Des comprimés sécables de 10 et 20 mg (Sevredol®) sont également
disponibles.
Libération prolongée : elle est aussi appelée morphine retard. L’efficacité de ce type de
morphine commence 2 à 4 heures après l’administration et la durée d’action est d’environ 12
h. La forme LP est commencée lorsque l’on a déterminé les besoins en morphine et que le
patient est soulagé. Dans cette situation, des interdoses avec de la morphine à libération
immédiate doivent être prévues en cas de reprise de la douleur ; ces interdoses sont
équivalentes à 1/10ème de la dose LP. Les prises de morphine LP doivent donc être espacées
de 12 heures. Elle est disponible en gélules ouvrables (Skenan®) à 10, 30, 60, 100 et 200 mg
ainsi qu’en comprimés non sécables à ne pas écraser (Moscontin®) à 10, 30, 60, 100 mg.
Gestion des effets indésirables de la morphine [8]
On distingue les effets indésirables graves des effets secondaires nécessitant une adaptation de
posologie ou des mesures permettant d’améliorer la tolérance. Un effet indésirable grave
(apnée) nécessite l’administration urgente de naloxone (Narcan®). En l’absence d’effet
indésirable majeur, ne pas arrêter la morphine mais gérer plutôt les effets secondaires et
discuter ensuite la diminution de la posologie.
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Lorsqu’un effet secondaire gênant survient, on peut ajouter du Narcan® en IV continu sur 24
h à la dose de 0,25 microgrammes/kg/h (une ampoule contient 400 microgrammes). Les
antagonistes de la morphine à petite dose diminuent les effets indésirables sans gêner l’action
antalgique ; efficaces surtout sur le prurit, les nausées et la rétention d’urine. Quelques
suggestions pour la gestion des effets secondaires sont données ci-après ; elles correspondent
aux pratiques de certaines équipes [8] mais ne constituent pas des « normes » de traitement.
1. Constipation : Elle doit être prévenue par l’administration systématique dès le début du
traitement de morphiniques de Lansoyl® ou de Duphalac®. Si la constipation persiste,
associer du Forlax® dès le 3e jour (1 sachet pour 30 kg, augmenter chaque jour si pas de
selles).
2. Nausées, vomissements : peuvent être traités par une prescription de Primpéran® IV,
Zophren® IV (attention à la majoration de la constipation)
3. Rétention d’urine : on peut injecter des bolus de Narcan® de 0,5 à 1 mcg /kg répétés
toutes les 5 min jusqu’à miction. Le sondage vésical (sous MEOPA) n’est à réaliser qu’en
cas d’inefficacité du Narcan®. Attention, la titration de Narcan® peut lever l’analgésie.
4. Prurit. Les antihistaminiques ont des effets sédatifs qui peuvent potentialiser de façon peu
prévisible ceux de la morphine. Il faut privilégier le Narcan® en première intention.
4.2. NALBUPHINE
Il s'agit d'un morphinique de type agoniste-antagoniste. Son effet antalgique est inférieur à
celui de la morphine. La nalbuphine possède un effet plafond : à partir d’une dose seuil (0,4
mg/kg), l’augmentation de la posologie n’augmente pas l’analgésie. Si la nalbuphine s’avère
inefficace, il faut passer à la morphine.
Dose : IV 0,2 mg /kg à renouveler toutes les 4 à 6 heures ; par voie intrarectale à la dose de
0,4 mg / Kg .
Présentation : Nubain® amp de 2 ml = 20 mg. L’AMM en France est à partir de 18 mois.
4.3. CODEINE
La codéine est un antalgique central faible utilisé pour les douleurs d’intensité modérée.
Comme tous les morphiniques, il possède un effet synergique avec le paracétamol. La codéine
agit par transformation en morphine dans l’organisme. Il a été signalé que 7 à 10 % de la
population générale serait incapable de réaliser cette transformation en morphine.
Dose : 1 mg/kg/4 à 6 h per os [9].
Présentation : La codéine seule est commercialisée dans la spécialité Codenfan® en sirop (1
ml = 1 mg). L’AMM pour le sirop Codenfan® est à partir de 1 an.
Plusieurs autres spécialités associant codéine et paracétamol sont actuellement disponibles en
France : Efferalgan codéine® (500 mg de paracétamol et 30 mg de codéine), Codoliprane®
(400 mg de paracétamol et 20 mg de codeïne) et Dafalgan codéine® (500 mg de paracétamol
et 30 mg de codéine).
4.4. MIDAZOLAM
Le midazolam est une benzodiazépine de demi-vie plus courte que celle du diazépam (106 +
29 min. versus 18 heures, chez l'enfant) [10]. Il est fréquemment utilisé dans la sédation
consciente de l’enfant. Il peut être utilisé par voie IV, orale, sublinguale, intranasale et
intrarectale [11, 12]. Il produit une sédation associée à une relaxation musculaire et une
amnésie antérograde et rétrograde. Il ne possède pas d'effet antalgique ; lorsqu’il est utilisé
pour des gestes douloureux, il doit donc être associé à un antalgique. A fortes doses, il peut
entraîner une apnée et une hypotension. Les effets du midazolam sont contrecarrés par le
flumazénil (Anexate®, voir plus loin dans la section antidotes). Le délai d'action varie selon
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la voie d'administration : IV (2 min.), intranasale, sublinguale, intrarectale (10 à 15 min.), et
orale (20 à 30 min.). Sa durée d’action quand il est administré par voie IV est de 20 à 30 min.
Quelques enfants présentent un effet paradoxal d’excitation 15 à 20 minutes après
l’administration, cet effet dure environ 20 à 30 minutes habituellement.
Doses : Intraveineux 0,05 à 0,1 mg/Kg ; sublinguale et intranasale, à 0,3 mg/kg ; intrarectale,
0,4 mg/Kg ; per os 0,5 mg/Kg. La dose maximale totale par voie transmuqueuse ne doit pas
dépasser 10 mg. En perfusion veineuse continue, en réanimation, il est administré
habituellement à raison de 0,03 à 0,06 mg/kg/h.
Présentation : Hypnovel® amp de 1 ml = 5 mg. L’AMM en France existe pour l’enfant
lorsqu’il est administré par voie rectale ; par voie veineuse, elle est à partir du nouveau-né.
4.5. PROTOXYDE D'AZOTE
Le protoxyde d'azote est un gaz qui a des propriétés sédatives, anxiolytiques et analgésiques.
Il produit un état d'euphorie et de somnolence [10, 13]. Il agit probablement en stimulant la
sécrétion d’opioïdes endogènes [10]. Le pic analgésique est obtenu en 3 à 5 minutes
d’inhalation et la durée d’action est brève après la fin de l’administration. Il est administré en
mélange équimoléculaire protoxyde d’azote-oxygène (MEOPA). L’administration de ce gaz
est facile et comporte peu d'effets indésirables [14, 15]. Il est essentiellement utilisé pour le
soulagement de la douleur induite par les actes médicaux et paramédicaux. Selon l’indication
et l’âge de l’enfant, le MEOPA utilisé seul procure une analgésie complète ou partielle dans
environ 75 à 80% des cas. Lorsque des gestes antérieurs pratiqués sans analgésie ont créé des
phobies chez l’enfant, le MEOPA est moins efficace.
L’utilisation du protoxyde d’azote à une concentration de 50% ne rentre pas dans le cadre de
l’anesthésie car cette concentration est insuffisante pour induire une anesthésie générale.
Ce gaz n’est pas métabolisé par l’organisme et il est éliminé tel quel par les poumons. Les
effets du protoxyde d’azote en dehors du système nerveux central sont très limités.
Indications du MEOPA chez l’enfant [13]
D’une manière générale, tout acte diagnostique ou thérapeutique douloureux qui nécessite une
analgésie de courte durée chez l’enfant est une indication potentielle pour l’utilisation du
MEOPA. Les principales indications sont : l’analgésie lors de l’aide médicale d’urgence, les
ponctions lombaires, les ponctions de moelle osseuse, les ponctions veineuses chez l’enfant
phobique ou ne pouvant pas bénéficier d’une analgésie de contact, les sutures superficielles
(associé à une infiltration locale de lidocaïne), la réduction des certaines fractures et luxations
simples, l’ablation des drains et des corps étrangers, les pansements des plaies et des brûlures
peu étendues, l’ablation des drains trans-tympaniques, la fibroscopie bronchique, l’endoscopie
gastrique, la biopsie rénale ou hépatique percutanée, le cathétérisme vésical, et la réduction
d’hernie inguinale.
Il ne faut pas administrer le mélange gazeux pendant plus de 60 minutes en continu et en cas
d’utilisation répétée il est conseillé de ne pas dépasser 15 jours consécutifs.
Contre-indications du MEOPA [16]
Le MEOPA est contre-indiqué chez les enfants présentant un traumatisme crânien non évalué,
une altération de l’état de conscience, une hypertension intracrânienne, une embolie gazeuse,
des bulles d’emphysème, un accident de plongée, un traumatisme maxillo-facial empêchant
une étanchéité entre le masque et la face, un pneumothorax non drainé, une distension
gastrique ou abdominale car ces cavités peuvent se distendre rapidement en raison d’une
diffusion rapide du protoxyde d’azote pour équilibrer les pressions partielles entre le sang et
les cavités.
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Administration du MEOPA
La prescription du MEOPA est une prescription médicale nominative. Il peut être administré
par du personnel paramédical formé. L’expérience sur plusieurs milliers d’utilisation montre
que l’administration du MEOPA est extrêmement sûre. L’administration du MEOPA est
possible à tout âge. Dans les précautions d’emploie figurant dans l’AMM du produit, il est
indiqué que l'utilisation est possible chez l'enfant à partir de 4 ans (âge permettant une
coopération active) et que chez l'enfant plus jeune, l'administration devra être faite par un
praticien familier de la méthode. Il est indiqué que le taux de succès chez les enfants de moins
de 3 ans est plus faible car la concentration alvéolaire minimum efficace est supérieure à celle
des enfants plus grands.
Il faut prendre le temps de convaincre l’enfant d’accepter le masque et l’inhalation.
Commencer toujours en expliquant à l’enfant et à ses parents la finalité de l’administration du
MEOPA. Cette explication se voudra rassurante et mettra en exergue les effets analgésiques
que l’administration du gaz va procurer à l’enfant ; prévenir l’enfant qu’il ne dormira pas mais
qu’il se sentira comme dans un drôle de rêve. Montrer le masque à l’enfant et si possible lui
permettre de manipuler, voire jouer, avec le masque avant le branchement du système
d’inhalation. Attendre au moins 3 minutes d’inhalation du MEOPA avant de débuter le geste.
En cas d’inefficacité totale au bout de 5 minutes d’inhalation, il faut savoir changer de moyen
analgésique.
Présentations : Kalinox®, Medimix®, Antasol®, Oxynox®
4.6. PARACETAMOL
C'est un antalgique périphérique efficace dans les douleurs peu intenses.
Dose : 15 mg/Kg/prise X 4 fois /jour per os . On dispose également de la forme injectable
(Perfalgan®, ampoules de 500 mg et 1000 mg) qui est administrée à la même dose. L’AMM
en France est à partir du nouveau-né.
4.7. ACIDE ACETYLSALICYLIQUE
Ce médicament est utile surtout pour les douleurs de type rhumatologique ou inflammatoire.
Son utilisation est déconseillée pendant la période péri-opératoire et il ne doit pas être utilisé
après une suture à cause de son effet anti-aggrégant plaquettaire qui allonge le temps de
saignement. Il ne doit pas être utilisé en cas de varicelle en raison du risque de syndrome de
Reye.
Dose : 15 mg/kg/6 heures
4.8. ANTI-INFLAMMATOIRES NON STEROIDIENS (A.I.N.S.) [17]
Les A.I.N.S. sont parfois utilisés chez l’enfant. Ils sont surtout utiles pour les douleurs ostéomusculaires et la dysménorrhée. Ils peuvent entraîner des saignements digestifs ou un
dysfonctionnement rénal ou hépatique. Les A.I.N.S. ne doivent pas être associés entre eux ni
avec l’aspirine. Les AINS ne doivent pas être utilisés en cas de varicelle ni de suspicion de
varicelle en raison des risques de majoration des lésions cutanées. Les doses varient selon les
A.I.N.S. utilisés [1]. Les A.I.N.S. les plus utilisés chez l’enfant sont :
a) Morniflumate (Nifluril® suppositoires enfant à 400 mg, gélules à 250 mg). La posologie
par voie rectale est de ½ suppositoire (200 mg de morniflumate), 2 fois par jour pour les
enfants de 6 à 30 mois et de 1 suppositoire (400 mg) par 10 kg de poids et par jour sans
dépasser 3 suppositoires par jour. Dans les indications ORL et stomatologiques, le traitement
ne doit pas dépasser 4 à 5 jours. Les gélules sont réservées à l’enfant de plus de 12 ans.
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b) L’Ibuprofène (Advil® comprimés à 200 mg, sirop à 20 mg/ml ; Nureflex® en sirop dosé à
20 mg/ml). Dose : 30 mg/kg/j en 3 à 4 prises. L’AMM en France est à partir de 3 mois.
4.9. CREME EMLA®
La crème EMLA est un mélange équimoléculaire de deux anesthésiques locaux, la lidocaïne
et la prilocaïne. L’effet analgésique de la crème EMLA® est obtenu grâce à une diffusion au
travers de la peau pour bloquer la transmission neuronale des récepteurs dermiques. Elle
s'applique sur peau saine avec un pansement occlusif pendant une durée de 60 à 90 minutes
avant une ponction veineuse, une ponction lombaire ou autre effraction cutanée [7] . Elle peut
être appliquée également en patch contenant 1 g de crème Emla®. L’anesthésie cutanée
obtenue est d’une profondeur de 3 mm si la crème est appliquée pendant 1 heure et de 5 mm
si elle est appliquée pendant 2 heures. L’ablation du pansement adhésif est parfois
douloureuse ; une option pour contourner ce problème est d’appliquer la crème EMLA® à
l’intérieur des anneaux en caoutchouc obtenus en découpant des tétines et de couvrir
l’ensemble avec un film alimentaire [18]. Un obstacle à l’utilisation de la crème EMLA® aux
urgences est le temps d’attente nécessaire à son action qui prolonge le séjour de l’enfant. Il a
été montré dans une étude qu’il est possible de sélectionner, à l’accueil, des enfants qui ont de
très fortes probabilités de subir une ponction veineuse et qui peuvent ainsi bénéficier de la
pose de la crème EMLA® en amont de la consultation médicale [19]. L’AMM est donnée en
France à partir des nouveau-nés à terme.
Une nouvelle crème de lidocaïne-prilocaïne (Anesderm Ge ®) est commercialisée en France
depuis septembre 2005 ; elle se présente en tubes de 5 grammes ; il n’existe pas (en 2006) de
patchs pour cette nouvelle présentation.
4.10. KETAMINE [7]
La kétamine a des propriétés analgésiques, sédatives et amnésiques. Elle produit un état de
dissociation qui interfère avec la perception sensorielle douloureuse et sa mémorisation. La
kétamine produit une sédation profonde ou une anesthésie générale. Son utilisation est
réservée au cadre de la réanimation et aux médecins entraînés (anesthésistes ou réanimateurs)
et expérimentés dans son maniement.
Effets secondaires : une augmentation de la fréquence cardiaque, de la tension artérielle, de la
pression intracrânienne est observée ; elle produit très rarement un laryngospasme. Elle
entraîne très peu de dépression respiratoire. La kétamine produit une hypersécrétion des voies
aériennes et le réveil peut être grevé d'hallucinations. Pour palier ces deux inconvénients on
précède son utilisation de l’administration d’atropine à raison de 0,01 à 0,015 mg/Kg en IVD
et du midazolam à la dose de 0,05 mg/Kg en IV, mais ceci prolonge la durée de la sédation.
Doses : IV : 0,5 à 1 mg /Kg pour une sédation légère ; 2 à 5 mg /Kg pour une sédation très
profonde ou anesthésie générale (titration, administration par paliers). Per os : 5 à 6 mg /Kg.
Rectal : 5 à 10 mg / Kg. Contre-indications : traumatisme crânien, infections des voies
aériennes supérieures, maladies psychiatriques.
Présentation : Ketalar 10® amp 5 ml=50 mg ; Ketalar 50® amp de 5ml=250 mg.
L’AMM existe pour l’enfant.
4.11. SUCCION ET SOLUTIONS SUCREES
Chez le nouveau-né et le nourrisson de moins de 3 mois, la succion non nutritive d’une tétine
ainsi que l’administration d’une solution concentrée de saccharose ou du glucose ont montré
un effet analgésique lors de gestes mineurs tels que des prélèvements sanguins [20]. L’effet
analgésique du sucre est très probablement dû à la libération de morphiniques endogènes car
l’effet a été bloqué, en expérimentation animale, par l’administration préalable de naloxone.
L’effet analgésique débute environ 1 minute après le contact de la solution sucrée avec la
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langue ; il est maximal au bout de 2 minutes et il dure au total environ 5 à 7 minutes. Si le
geste se prolonge au-delà de 5 minutes, il est conseillé de renouveler l’administration de
solution sucrée. La solution sucrée est efficace jusqu’à l’âge de 2 mois. On utilise soit une
solution de saccharose de 24 à 30 %, soit la solution glucosée à 30% (G30%). On administre
habituellement 1 à 2 ml pour les nouveau-nés à terme ou jeunes nourrissons ; pour les enfants
prématurés de moins de 2500 g, la dose habituelle est de 0,5 ml. Pour les enfants de moins de
1500 g, elle est de 0,2 à 0,3 ml. Il existe un effet synergique entre les solutions sucrées et la
succion d’une tétine. C’est pourquoi, il est conseillé de les associer lors de la réalisation de
gestes douloureux mineurs.
4.12. ALLAITEMENT MATERNEL
Des études récentes ont montré que l’allaitement maternel donné aux nouveau-nés lors d’un
geste douloureux mineur possède un effet analgésique très puissant [20]. Cette technique est
très utile en maternité et en néonatologie et peut être proposée également aux urgences ou en
pédiatrie pour les jeunes nourrissons allaités.
4.13. ANESTHESIE LOCALE.
Les anesthésiques locaux bloquent de façon réversible la conduction de l’influx le long des
fibres nerveuses centrales ou périphériques. Il est nécessaire de respecter les doses maximales
recommandées car ces anesthésiques sont absorbés dans le sang.
Les anesthésiques locaux peuvent être associés à l’adrénaline ou au bicarbonate de sodium.
L’adrénaline, par son effet vasoconstricteur, diminue l’absorption plasmatique et augmente la
fixation neuronale locale ; l’adjonction d’adrénaline est contre-indiquée dans les zones
périphériques où la circulation artérielle est de type terminale : doigts, orteils, région périorbitaire et pénis. L’ajout du bicarbonate de sodium augmente la forme non ionisée de la
lidocaïne et accélère sa vitesse de diffusion. Cela diminue la douleur lors de l’infiltration
locale. On ajoute habituellement 1 ml d’une solution à 4,2 % de bicarbonate de sodium dans
10 ml de lidocaïne à 1 %.
La lidocaïne (Xylocaïne®) peut être utilisée en application topique ou en injection. La dose
est de 2 à 4 mg/kg [21] ; il ne faut pas dépasser 6 mg/kg. Le délai d’action en application
muqueuse et en infiltration est de 5 à 10 min. et sa durée d’action est de 20 à 30 min.
4.14. ANTIDOTES
4.14.1 Naloxone (Narcan®). Elle est l’antidote des morphiniques. Dose : 5 à 10
microgrammes /kg (ampoules 1 ml = 400 microgrammes) en cas d’effet indésirable grave. La
durée d'action de la naloxone est de 30 à 45 minutes ce qui rend possible la re-sédation.
L'observation prolongée de l’enfant est donc nécessaire. Les ampoules de naloxone doivent
toujours être disponibles dès lors que l’on utilise la morphine.
4.15.2 Flumazénil (Anexate® 5 ml = 0,5 mg et 10 ml = 1 mg). Il a été utilisé efficacement
chez l'enfant pour contrecarrer les effets des benzodiazépines. Dose : 10 microgrammes/kg en
intraveineux [7]. En soins intensifs, l’AMM chez l’enfant inclut le nouveau-né. Dans les
situations d’urgence et lors du transport médicalisé, l’AMM est à partir de 6 ans.
L’OMS a établi trois paliers pour le traitement de la douleur : palier I (douleur légère), palier
II (douleur modérée) et palier III (douleur sévère). Parmi les médicaments cités ci-dessus, le
paracétamol, l'acide acétylsalicylique et les A.I.N.S. sont utilisés pour le palier I ; la codéine
et la nalbuphine pour le palier II et la morphine et la Kétamine pour le palier III.
9
TABLEAU 1 : QUELQUES PRODUITS UTILISES DANS LA SEDATION ET
L’ANALGESIE DE L'ENFANT
MEDICAMENT QUELQUES
SPECIALITES
VOIE ET DOSE
DELAI
D'ACTION
DUREE
COMMENTAI
D'ACTION RES
Morphine
-Morphine injectable
(1 ml = 10 mg)
-Morphine buvable
(1 ml = 2 mg)
IV : 0,1 mg/kg en bolus
(titration) suivie de 0,5 à 1
mg/kg/jour en IV continu
PO : 0,5 à 1 mg/kg/j en 6 prises
5-10 min.
3 à 4 heures
Nubain®
(2 ml = 20 mg)
Hypnovel®
(1 ml = 5 mg)
IV : 0,2 mg/kg/4 à 6 h
IR : 0,4 mg/kg/4 à 6 h
IV : 0,05 à 0,1 mg/kg
SL, N : 0,3 mg/kg
IR : 0,4 mg/kg
PO : 0,5 mg/kg
3 min.
15 min.
2 min.
10-15 min.
10-15 min
20 à 30 min.
Protoxyde d'azote
Kalinox® Mélange
équimoléculaire avec
de l'oxygène
Medimix®
Inhalation par masque
3 min.
Masque déclenché par le patient
ou système avec ballon gonflable
et valve antiretour
Codéine
Efferalgan codéine®
30 min.
(paracétamol 500 mg et
codéine 30 mg)
Codoliprane®
(paracétamol 400 mg et
codéine 20 mg)
Codenfan® sirop
PO : Codenfan® 1 mg/kg/4 à 6 h
Paracétamol
Efferalgan®
(1 CM = 2 ml = 60 mg)
Doliprane® 250 mg et
500 mg
Dafalgan® 500 mg
Aspegic®
Catalgine®
Nifluril®
(suppositoire 400 mg,)
Nalbuphine
Midazolam
Acide
acétylsalicylique
Acide niflumique
Ibuprofène
Lidocaïne et
prilocaïne
Lidocaïne
15 min.
4 heures
30 min.
45 min.
45 min.
45 min.
Hypotension,
libération
d'histamine,
constipation.
Penser à la
titration
Effet plafond
Absorption
variable par voie
transmuqueuse
PO : 15 mg/kg/6 h
20 min.
Pendant toute
l’inhalation.
Disparition en
moins de 3
min. après
l’arrêt de
l’inhalation
4 heures
Les effets
antalgiques du
paracétamol et de
la codéine sont
additifs. On peut
associer au
Codenfan® un
sirop de
paracétamol
4 à 6 heures
PO : 15 mg/kg/6 h
20 min.
4 à 6 heures
IR :
6 à 30 mois : ½ suppositoire, 2
fois/j
> 30 mois : 1 suppositoire/10 kg
de poids/ jour sans dépasser 3
suppositoires par jour
PO : gélule à partir de 12 ans
PO : 30 mg/kg/j en 3 à 4 prises
Advil® (cp 200 mg,
sirop 5 ml = 100 mg)
Nureflex®
(5ml = 100 mg)
Crème EMLA®
Transcutanée
(1 tube = 5 g ;
Pansement occlusif
Patch=1 g)
Anesderm® 1 tube=5 g
Xylocaïne® injectable Infiltration : 4 mg/kg
à 1% (1 ml = 10 mg)
60 min.
5 à 10 minutes
Ajouter du
bicarbonate de
sodium à 4,2 %
(1 ml/10 ml de
lidocaïne).
IV : intraveineux ; IVL : intraveineux lent ; PO : per os ; IR : intrarectal ; N : nasal
10
5. RECOMMANDATIONS GENERALES DE BONNE PRATIQUE POUR
L’EXECUTION DE GESTES INVASIFS
Un groupe d’experts de la fédération nationale des centres de lutte contre le cancer a
récemment publié de recommandations de bonne pratique pour la réalisation des gestes
invasifs chez l’enfant [22]. Ces recommandations incluent de principes généraux qui doivent
être considérés lors de la réalisation des gestes chez l’enfant. Ils sont les suivants :
• Il faut systématiquement évaluer la nécessité d’effectuer un geste invasif douloureux et se
demander s’il n’existe pas une alternative à celui-ci ;
• Tout geste invasif doit être exécuté par une personne compétente utilisant un matériel
adapté.
• Le geste doit être accompli dans un endroit calme. L’enfant doit être installé
confortablement, dans un climat de confiance.
• Lorsque l’indication du geste est posée, les parents et l’enfant (en fonction de son
développement cognitif) doivent être informés du geste lui-même (but, déroulement) et de
son caractère douloureux. Ils doivent pouvoir exprimer leurs préférences quant au choix
d’une stratégie antalgique. Il est en revanche déconseillé d’insister sur l’aspect douloureux
du geste au moment exact de son exécution afin d’éviter une anticipation de la douleur.
• La présence des parents lors de l’exécution du geste est une mesure majeure qui diminue
la détresse ressentie par l’enfant et qui doit donc être proposée systématiquement. Si cette
participation est acceptée par les parents et par l’enfant, il est recommandé de conseiller
aux parents de garder un contact physique et/ou verbal rassurant avec leur enfant. Il n’est
en revanche pas souhaitable de demander aux parents de maintenir leur enfant pour
l’immobiliser pendant le geste.
• La mise en œuvre d’une intervention à visée antalgique ne doit jamais entraîner de retard
de prise en charge de l’enfant, en cas d’urgence vitale.
• La mise en œuvre d’une stratégie à visée antalgique doit impérativement respecter le délai
d’action et tenir compte de la durée d’action de l’intervention retenue.
• La mise en œuvre d’une stratégie à visée anxiolytique répond aux mêmes principes. Des
molécules à durée d’action courte doivent être privilégiées dans ce contexte.
• Une évaluation systématique de la pénibilité et/ou de la douleur du geste pour l’enfant doit
être effectuée après le geste. Le résultat de chaque évaluation devra orienter le praticien
sur la nécessité éventuelle de reconsidérer la stratégie antalgique à proposer à l’enfant
pour le geste suivant.
• En pédiatrie, les experts recommandent la tenue d’une fiche de suivi de l’analgésie propre
aux gestes douloureux subis par l’enfant. Cette fiche de suivi devra faire partie du dossier
de soins.
6. TRANSPORT DES PATIENTS SEDATES
Les patients sédatés peuvent parfois avoir besoin d’être transportés à la salle de radiologie ou
à une autre salle de l’hôpital pour des explorations. S’ils n’ont pas encore regagné un état de
conscience normal, ils doivent être accompagnés par du personnel qualifié.
7. CRITERES DE RETOUR A DOMICILE APRES UNE SEDATION/ANALGESIE
Nourrissons :
- Fonctions vitales normales sous air.
- Activité normale : tient assis, debout ou marche à 4 pattes selon l'âge.
- Enfant éveillé et bon contact avec son entourage.
Enfant :
- Fonctions vitales normales sous air.
- Peut exécuter des ordres, langage normal.
11
- Enfant éveillé et bon contact avec son entourage.
- Fonction motrice normale.
- Boit un liquide correctement.
8. CONSEILS AUX PARENTS LORS DU RETOUR A DOMICILE
Lorsque de médicaments sédatifs on été utilisés chez des enfants traités en ambulatoire, il est
important d’expliquer aux parents que les médicament utilisés pour soulager l’inconfort ou la
douleur de leur enfant ont des effets sur la conscience et l’activité motrice et que ces effets
peuvent se prolonger après le retour à domicile. Il est donc conseillé de limiter les activités
physiques de l’enfant pendant 12 heures, notamment éviter de monter à vélo, faire du
skateboard ou toute autre activité nécessitant une bonne coordination motrice. Il est également
conseillé de donner, pendant les premières heures, des repas légers car les médicaments
administrés peuvent parfois entraîner des vomissements. Enfin, on doit informer les parents
qu’en cas de sommeil prolongé de l’enfant, il faut surveiller une éventuelle difficulté pour
respirer, une pâleur ou une coloration bleutée, ou une impossibilité à réveiller l’enfant.
Auquel cas ils doivent contacter immédiatement le service d’urgences.
9. PROPOSITIONS DE SEDATION ET D’ANALGESIE SELON LES SITUATIONS
CLINIQUES
Les médicaments utilisés pour la sédation et l’analgésie de l’enfant doivent être adaptés à
chaque situation et la sécurité de l’enfant doit rester une priorité absolue. Ces propositions ne
constituent que de simples suggestions et ne doivent pas être considérées comme des
« recettes de cuisine » que l’on applique au pied de la lettre. Ces propositions doivent être
validées localement avant d’être utilisées. Voir tableau 2.
TABLEAU 2. QUELQUES PROPOSITIONS DE SEDATION ET D’ANALGESIE
AUX URGENCES PEDIATRIQUES (Tableau non exhaustif)
SITUATION CLINIQUE
Suture d'une plaie mineure
PREMIERE PROPOSITION
Protoxyde d'azote + Anesthésique local ±
Midazolam intrarectal (surveillance
nécessaire après le geste)
Suture d'une plaie complexe ou Sédation profonde ou anesthésie générale :
étendue
anesthésiste
Ablation des points de suture
EMLA® 1 heure avant.
Extraction d'un corps étranger Midazolam intrarectal
Examen lors des sévices sexuels Protoxyde d'azote
Ponction veineuse
EMLA®
1 à 2 ml solution glucosé 30% (ou
saccharose) + tétine pour les enfants de
moins de 3 mois.
Ponction veineuse et ponction
1 à 2 ml d’une solution de glucose à 30 %
lombaire chez le nouveau-né
(ou de saccharose) suivis de la succion d’une
tétine
Ponction lombaire
EMLA® + protoxyde d’azote
Réduction manuelle d'un
Midazolam + Protoxyde d'azote + lidocaïne
paraphimosis
gel
Douleur persistante à domicile Paracétamol ou
après passage aux urgences
Aspirine (à éviter si risque de saignement)
Brûlures à l’arrivée aux
Douleur modérée : paracétamol + codéïne
urgences
Douleur sévère : morphine IV (titration puis
perfusion continue)
Brûlures (pansements)
Protoxyde d’azote
DEUXIEME PROPOSITION
Protoxyde d'azote
Midazolam sublingual ou intranasal
Protoxyde d’azote
Paracétamol + codéïne si plaie importante
AINS si douleur traumatologique
Nalbuphine
Lésions très douloureuses : sédation
profonde ou une anesthésie générale :
anesthésiste
12
Crise douloureuse
drépanocytaire
Sondage vésical
Tomodensitométrie
Intubation endotrachéale
Douleur modérée : Paracétamol + codéïne.
Douleur sévère : Morphine IV
Protoxyde d’azote + lidocaïne
Midazolam
Kétamine + midazolam + atropine
Nalbuphine
Propofol (Diprivan®) + atropine
EN REANIMATION
Intubation endotrachéale
Atropine 0,01 mg / kg + Fentanyl 2µg/kg +
Midazolam IV OU
Propofol (3,5 mg/kg) + atropine
Atropine 0,01 mg/kg en IVD + Kétamine +
Midazolam
Investigations digestives ou
bronchiques
Atropine 0,01 mg / kg IVD + Midazolam +
Kétamine
Cathétérisme veineux, drainage
thoracique, dénudation
veineuse, pansements des
grands brûlés, ponction de
moelle osseuse
Non ventilé : Midazolam + Atropine +
Kétamine
Sédation Analgésie pour une
ventilation artificielle
- Morphine + Midazolam
Ventilé : Utilisation facile d'une analgésie
profonde :
- Fentanyl + Midazolam ou
- Kétamine + Midazolam
- Fentanyl + Midazolam
Sédation pour les patients ayant - Fentanyl + Midazolam + curare
une hypertension intracrânienne (Norcuron® )
DOULEUR POSTOPERATOIRE
a) enfant non intubé
- Paracétamol IV (surtout si impossibilité d'avaler) ou
- Paracétamol PO +/- codéine ou
- Nalbuphine ou
- Morphine
b) enfant intubé
- Morphine en continu + midazolam
10. CONCLUSION
Les services qui prennent en charge des enfants doivent utiliser des protocoles de prise en
charge de la douleur selon les différentes situations cliniques, les intensités possibles de celleci, et la disponibilité du personnel pouvant assurer une sédation et une surveillance adéquate.
Il ne faut plus se cacher derrières des alibis tels que : « cet enfant exagère », « ça ne fait pas
très mal ». Il est de notre devoir de combattre la douleur sous toutes ses formes de
présentation pour que les cris des enfants ne constituent plus un bruit de fond « normal » d’un
service de pédiatrie ou d’urgences. L’utilisation des analgésiques pour une douleur prolongée
ou continue nécessite une évaluation de la douleur soit, par auto-évaluation chez les enfants
de 5 à 6 ans ou plus, soit avec une échelle d’hétéro évaluation chez les jeunes enfants.
11. REFERENCES
13
1.
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(rapport intégral). Document disponible sur le site de la Fédération nationale des
centres de lutte contre le cancer : www.fnclcc.fr, 2005.
15

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