Le Temps - mirages touristiques

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Valais 17:59
Ces mirages touristiques qui ne se réalisent pas
Par Marie Parvex
Ces mirages touristiques valaisans qui ne se réalisent pas Dans les Alpes, des
projets immobiliers se transforment en trous béants, abandonnés dans les
stations. Exemples à Grimentz, Morgins et Hérémence, alors qu’Aminona
attend toujours le premier coup de pioche de son méga-projet
Nendaz. La salle de réunion du centre sportif est comble. Citoyens, commerçants, entreprises de construction
sont venus nombreux assister à la présentation du projet «Mer de Glace». «L’hôtel doit être livré pour Noël 2013,
sinon je serai crucifié sur le rond-point de la place du village», plaisante Jean-Daniel Masserey, promoteur de ce
projet de résidences, d’un hôtel et d’un spa au cœur de la station.
C’est que les Valaisans se sont mis à craindre ces immenses projets immobiliers à plusieurs millions, dont la
plupart ne voient jamais le jour. En Valais, on décrit des promoteurs qui roulent dans de belles voitures et mettent
l’eau à la bouche des habitants avant d’entamer les démarches auprès des politiques. Des élus locaux, à qui les
promoteurs paient des voyages pour visiter leurs établissements à l’étranger – la présidente de Troistorrents
raconte ainsi avoir été invitée à deux reprises avec toute sa famille. Certains laissent ensuite des trous béants
qui défigurent les stations, d’autres changent d’investisseurs et de visage sans que la moindre pierre ne soit
posée. D’autres projets sont construits mais peinent à trouver un exploitant.
A Grimentz, le promoteur belge, Thierry Dubuisson, a disparu, dit-on dans la station. Depuis plus d’une année,
les fondations de l’hôtel Inalp et de ses chalets attenants sont restées nues, juste à côté des pistes de ski. En
2008 déjà, le chantier des chalets «Flives», dans la même station et géré par le même promoteur, s’interrompait
faute de paiement. Thierry Dubuisson est depuis connu pour de multiples faillites et pour un conflit avec l’un de
ses investisseurs dans le projet de la Marina au Bouveret. Il a pourtant obtenu une autorisation de construire et
commencé ses travaux en 2011.
«L’autorisation de construire a été délivrée en 2008 par la commune de Grimentz», explique Simon Crettaz,
conseiller communal responsable des constructions de la nouvelle commune d’Anniviers, résultat de la fusion en
2009 de toutes les communes de la vallée. «C’est à elle [ndlr: cette commune qui n’existe plus] qu’il faut
demander pourquoi l’autorisation de construire a été donnée, et pour les questions en lien avec le projet, il faut
vous adresser au promoteur.»
Pour Simon Crettaz, il n’y a pas de problème avec ce projet, qui, selon lui, devrait se poursuivre dès le printemps
prochain. L’architecte luxembourgeois installé à Grimentz et responsable de la réalisation disait pourtant il y a
quelques semaines à la RTS s’être «fait rouler» par Thierry Dubuisson, n’ayant jamais vu les millions promis par
le promoteur. Aujourd’hui, Paul Fritsch affirme que Thierry Dubuisson quitte le projet de l’hôtel Inalp, mais qu’un
nouveau partenaire suisse a été trouvé. Quant à Thierry Dubuisson, il n’aurait pas disparu mais serait toujours
actif dans le «Hameau des Bains», un projet de complexe thermal… A Grimentz encore.
Un trou, il en reste aussi un à Morgins, béant depuis 4 ans. «C’est juste à l’entrée de la station et c’est
catastrophique pour son image», déplore la présidente de commune, Marianne Maret. En 2008, un promoteur de
la région donne le coup d’envoi du chantier d’un grand centre aquatique, quelques jours avant l’expiration de son
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permis de construire. Depuis, plus rien ne bouge. «Nous n’avions aucun moyen d’empêcher ce projet qui
répondait aux normes», raconte Marianne Maret. «Depuis, les terrains et le projet ont été vendus à Michel Blank,
un homme d’origine bernoise. Il a décidé de modifier les plans et nous dit qu’il veut recommencer les mises à
l’enquête.»
La présidente n’est pourtant pas de celle qui se laisse éblouir par d’hypothétiques millions. Cette autorisation a
d’ailleurs été délivrée avant qu’elle ne soit élue présidente. «J’ai été approchée à de nombreuses reprises par
des promoteurs hollandais ou suisses, mais ils ont tous renoncé.» Marianne Maret vérifie leurs expériences, les
interroge sur leur business plan. Et s’aperçoit souvent que les investisseurs ne connaissent pas l’hôtellerie de
montagne et n’ont pas de vrais projets pour faire venir la clientèle à Morgins.
«J’étais sceptique et perdu face à ce projet, alors que je passe beaucoup de temps à calmer les ardeurs de mes
collègues présidents de commune face aux millions d’investissements qu’on leur promet», raconte aussi Francis
Dumas, président de Nendaz, face à ses citoyens. Une allusion à Aminona où se trouve le plus grand projet
hôtelier du canton? 650 millions d’investissements pour un village entier d’hôtels et de résidences, qui promet
aussi de financer les remontées mécaniques dont les droits d’exploitation expirent cette année.
Les promoteurs russes ont obtenu le dézonage de prairies sèches protégées. Ils ont reçu le feu vert du Tribunal
fédéral pour une première zone de construction en juillet dernier. Et l’Etat du Valais a reconnu l’entier de leur
projet comme hôtelier, ce qui leur évite d’être soumis, comme «Mer de Glace» ou les «Trois Rocs» à Verbier, à
la loi fédérale sur l’acquisition d’immeuble par des étrangers. Cette loi interdit le financement de construction non
hôtelière par des promoteurs qui ne seraient pas domiciliés en Suisse. A Aminona, on a considéré que le service
hôtelier proposé dans les appartements qui seront vendus à des privés équivalait à l’exploitation d’un hôtel. Tous
les obstacles sont donc levés pour que les promoteurs de l’ancienne société Mirax puissent entamer les travaux.
Mais rien ne bouge.
Les terrains n’ont toujours pas été achetés et le projet n’a toujours pas de banque partenaire. «Tout devrait être
finalisé durant cette fin d’année», assure Fréderic Jacquemoud, responsable de la communication du projet.
«Les négociations avec les propriétaires des terrains qui ont reçu un acompte de 10% en guise de promesse
d’achat arrivent à leur terme. Quant au financement et aux discussions avec les partenaires financiers, étant
donné les enjeux, cela prend en effet du temps et le processus est encore en cours.» Le début des travaux est
toujours prévu au printemps 2013.
Les Thermes de la Dixence, dans le val d’Hérens, devaient eux aussi commencer au printemps. En 2010. Mais à
ce jour, les bains, l’hôtel, les immeubles résidentiels et les chalets n’ont pas vu le jour. Les investisseurs ont
changé et le projet conçu en 2000 doit être réadapté. «Un fonds d’investissement suisse est intéressé, mais le
contrat n’est pas encore signé», explique Jean-Pierre Emery, auteur du projet. «Le nouveau projet sera mis à
l’enquête au début de l’année prochaine», assure-t-il.
A Nendaz, les résidences sont construites et vendues, le toit de l’hôtel vient d’être posé et Jean-Daniel Masserey
lui a trouvé un exploitant: le groupe Boas. «C’est la pierre angulaire de ce projet», explique-t-il. «Si je n’avais pas
trouvé de pilote, les appartements déjà vendus auraient perdu de leur valeur et cela aurait été une catastrophe.»
Ce que n’ont pas su faire les Bains de Val-d’Illiez qui ont ouvert en octobre 2010. L’hôtel est construit mais n’est
toujours pas aménagé et semble avoir de la peine à trouver un exploitant.
Les Nendards ont touché le jackpot et le conseil d’administration de Télénendaz remercie les investisseurs en
pensant avec émotion à toutes ces journées de ski supplémentaires que l’hôtel apportera. Mais il subsiste un
point noir au tableau. Ses remontées mécaniques ont vieilli et, sans plan d’aménagement communal, la station
ne parvient pas à obtenir les autorisations pour rénover ses installations. Ce qui sera pourtant nécessaire pour
satisfaire la clientèle de son hôtel et de ses résidences de luxe.
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■ ILS SE RÉALISENT
Nendaz: Le projet «Mer de Glace» compte 140 lits hôteliers, 420 lits para-hôteliers, un spa de 2000 m2, trois
restaurants pour 130 millions d’investissement. Exploité par le groupe Boas, il ouvrira ses portes en décembre
2013.
Verbier: Les «Trois Rocs» ont fêté un chantier qui se déroule dans les temps. L’hôtel de luxe situé au pied des
pistes de ski ouvrira en décembre 2013, exploité par le groupe américain Starwood: 123 chambres d’hôtel, 18
résidences secondaires, 15 résidences hôtelières, 150 emplois à l’année, pour un investissement de 200 millions
de francs.
■ ILS SONT TOUJOURS AU STADE DE PROJET
Grimentz: L’hôtel Inalp et ses chalets n’ont laissé qu’un trou au bord des pistes de ski. Dans la station, certains
affirment que le promoteur connu pour ses faillites et ses factures impayées a disparu, mais la commune affirme
toujours que le projet reprendra au printemps. Quant à l’architecte du projet, il affirme avoir trouvé un nouveau
partenaire suisse pour construire ses résidences.
Aminona: Aminona Luxury Resort&Village a obtenu toutes les autorisations pour démarrer le chantier en juillet
dernier. Cependant, les terrains n’ont toujours pas été achetés et les promoteurs russes n’ont pas encore de
banque partenaire.
Hérémence: Les Thermes de la Dixence sont en projet depuis 2000. Les travaux devaient commencer au
printemps 2010, mais les investisseurs ont changé. Le projet doit être remis au goût du jour et de nouvelles
mises à l’enquête devraient avoir lieu dès le début de l’année prochaine.
Les Mayens de Bruson: Après la faillite d’Intrawest, une entreprise canadienne spécialisée dans les complexes
hôteliers de sport d’hiver, le grand projet en face de Verbier se cherche de nouveaux investisseurs. «Nous avons
reçu quatre propositions et nous en choisirons deux d’ici à trois mois», explique Eric Balet, directeur de
Téléverbier. En attendant, la construction de la télécabine qui reliera Bruson à Verbier a commencé. Elle sera
terminée au début de l’hiver prochain.
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