Organisation du village au début du XVIIIème siècle 1) La Mappe

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Organisation du village au début du XVIIIème siècle 1) La Mappe
Organisation du village au début du XVIIIème siècle
1) La Mappe
d’informations.
Sarde:
la
première
grande
source
A partir de 1730, nos connaissances s’appuient sur des
documents scientifiques précis: la “Mappe Sarde”, “ancêtre” de notre
cadastre actuel.
Chaque paroisse de Savoie possède désormais sa mappe officielle où
figurent les parcelles, maisons, chemins, bois, cours d’eau...etc. Un
registre, “la Tabelle” dresse la liste des propriétaires et de leurs
parcelles, numérotées, localisées, mesurées, précisant même le type
de mise en valeur (prés, champs, jardins) de chaque lopin de terre.
Ce travail méticuleux est réalisé par une armée de géomètres,
“trabucans” (aides-géomètres), délégués de l’intendant général de
Savoie, aptes à donner tous les renseignements sur les propriétaires,
les terrains avec leurs particularités et valeur (degré de “bonté”).
Ainsi, avant la France, la Savoie s’est dotée d’un remarquable
cadastre, qui a favorisé l’assiette et le recouvrement des impôts,
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répartis avec plus de justice. La Mappe de Vinzier de 1,95m est
d’une précision confondante : le réseau actuel de communications
est déjà en place en 1730 ainsi que les principaux hameaux.
Elle nous offre, avec la Tabelle, des informations exceptionnelles
sur l’histoire et la vie du village au XVIIIème siècle. (cf. annexes 5 à
9).
2) L’organisation politique du village au début du
XVIIIème siècle.
Les habitants du village ne s’intéressent que de très loin à la
politique du royaume (le Duc est devenu Roi de Piémont-Sardaigne
en 1717) . Il ont tendance à s’adapter aux évènements ... d’autant
plus que l’exemple vient d’en haut, ils n’hésitent pas à changer de
camp, passant de côté français ou impérial selon les circonstances.
Un historien ironique a caricaturé ainsi la politique savoyarde :”Petit
état frontalier, il tourne comme une girouette... mais pas assez
rapidement pour ne pas être régulièrement occupé!”.
On comprend mieux la réputation de prudence des savoyards,
immortalisés par quelques dictons piquants:
-”Savoyard, pas bavard!”
-”Les Savoyards ne disent jamais avant midi, que le
soleil s’est levé, de peur de trop s’avancer.”
L’intérêt des habitants se concentre principalement sur la vie de
leur village. Ils parlent avec déférence et crainte du châtelain : c’était
jadis, l’homme de confiance du Comte, chargé de régir ses domaines;
le travail est désormais effectué par un notaire, responsable de la
paroisse, dépositaire de l’autorité publique. C’est en général un
bourgeois aisé, gros propriétaire de terres, habitant Thonon ou
Evian. Il rédige les procès-verbaux officiels. En 1730, la Mappe de
Vinzier a été validée par le châtelain (notaire) Paul-Aimé Dubouloz
de Thonon.
Les communiers (chefs de famille du village) se réunissent à l’issu de
la messe dominicale dans l’église, sur la place principale ou dans le
cimetière; avec le “syndic” (mandataire élu de la communauté,
ancêtre du maire actuel) et ses conseillers (adjoints), ils traitent les
affaires courantes de la paroisse. En 1730, le syndic Nicod est assisté
par les deux conseillers Joseph Dutruel et Paul Béchet.
Les décisions sont prises à l’unanimité (un quota de 2/3 de présents
est indispensable). Ce sont les paysans les plus aisés, qui jouent le
rôle principal. Le “secrétaire”, nommé et rétribué par l’intendant de
Savoie sur proposition du conseil de la communauté, dresse le rôle
des impôts, établit le budget et met à jour les registres.
Le recouvrement des impôts est assuré par un “exacteur” qui a
acheté sa charge. En 1743, à l’impôt ordinaire, la Taille, déjà lourde
(657 livres), s’ajoute l’impôt extraordinaire exigé par l’envahisseur
espagnol, la “Capitation”. Il sera “garanti” par Joseph Command, un
paysan de 40 ans, père de 3 enfants, nommé pour cette triste
besogne, par le conseil des communiers.
Celui-ci est amené à désigner des responsables, chaque fois qu’une
tâche particulière doit être accomplie; ainsi, en 1730, pour
l’établissement de la Mappe, les Vinzolais, Claude Nicod, André
Barbaz et Joseph Béchet ont été nommés “indicateurs” et Joseph
Dutruel, Paul Béchet “estimateurs”.
Ces diverses responsabilités sont délicates , mais la plus sujette à
différends est celle de “regrettier”, chargé de la distribution du sel,
cruciale pour les paysans. Cette fonction est sujette à des querelles
incessantes... A tel point qu’à Vinzier, personne ne s’est estimé à la
hauteur de la charge. On a dû faire intervenir un “étranger”, Joseph
Travail d’Evian.
En l’absence des nobles et des bourgeois, qui, bien que propriétaires
de terres, n’habitent pas dans la paroisse, le prêtre est le notable
incontournable, attentif à la morale et aux bonnes moeurs.
Le curé de Vinzier, Jacques Burquier, en 1730, veille sur ses ouailles
et sur une cure riche de plus de 20 hectares de prés et de champs. Il
dispose d’un presbytère, d’une grange, d’un grenier, de deux jardins
et perçoit la “Dîme” (impôt pour le clergé, prélevé en nature 1/12ème
de la récolte en gerbes sur le sol). Celle-ci est versée à l’abbaye
d’Abondance.
Le rôle du curé est capital: il a une instruction très supérieure à celle
des locaux et, venu de l’extérieur, son regard critique s’avère souvent
novateur et constructif. Il a en charge, l’état-civil, l’école, et
intervient pour régler de multiples problèmes aussi bien d’ordre
privé que d’ordre politique.
L’église est le centre de gravité du village, c’est là que la population
se rassemble lors des grands évènements et où on entend, tour à
tour, les trois langues usitées à cette époque.
Si le patois franco-provençal local, la langue parlée par les Vinzolais
au quotidien, est utilisé pour le sermon; le latin demeure la langue
liturgique. Le français, par contre, est la langue administrative des
écrits officiels, maîtrisé par les rares lettrés et les notables.