Évangéline : le désir pudique de l`être-parmi de la
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Évangéline : le désir pudique de l`être-parmi de la
DIALOGUES FRANCOPHONES Volume 18/2012, Pages 29-44 DOI: 10.1515/difra-2015-0022 Évangéline : le désir pudique de l’être-parmi de la communauté acadienne de l’Île-du-Prince-Édouard Carlo LAVOIE Université de l’Île-du-Prince-Édouard Canada Résumé. La culture acadienne de la province canadienne de l’Île-du-Prince-Édouard confère à la chanson le rôle traditionnellement reconnu à la littérature. En ouvrant un imaginaire stigmatisé par la figure d’Évangéline créée au XIXe siècle par l’Américain Longfellow, la chanson « Évangéline, Acadian Queen » de l’Acadienne Angèle Arsenault propose un possible espace culturel et communautaire propre à l’Acadien et contribue à la promotion d’un « êtreparmi » dont le désir pudique serait de parler français. Abstract. The Prince Edward Island (Canada) Acadian culture allocates to the song the role traditionally played by literature. By opening an imaginary universe stigmatized by the Evangeline figure created in nineteenth century by the American Longfellow, Angèle Arsenault’s song “Évangéline, Acadian Queen” offers a possible cultural and community space specific to the Acdian and contributes to the promotion of a “being-among” whose modest desire is to speak French. Mots-clés: Évangéline, Angèle Arsenault, Longfellow, chanson acadienne, Île-du-PrinceÉdouard Keywords: Evangeline, Angèle Arsenault, Longfellow, acadian song, Prince Edward Island J’habite un cri de terre en amont des espérances Larguées sur toutes les lèvres Déjà mouillées aux soleils des chalutiers incandescents […] Et toute parole abolit le dur mensonge Des cavernes honteuses de notre silence (Leblanc 1972, 45) C’est le 15 août. Les enfants sont couchés. Ma femme est allée à son cours de danse. Devant moi, c’est la fête à la télé : la Fête nationale de l’Acadie en direct de Dieppe, au Nouveau-Brunswick. On y voit les prestations d’artistes représentant divers courants musicaux qui rayonnent en Acadie : Mia Martina, Cayouche, Radio Radio, Annie Blanchard… C’est la fête de l’Acadie, Unauthenticated Download Date | 2/11/17 1:07 AM 30 DIALOGUES FRANCOPHONES No. 18/2012 la fête de l’oralité, la fête de la culture populaire. Selon le directeur artistique, Daniel Castonguay, le spectacle, « présenté sous le signe de la joie, reflète toutes les facettes et les couleurs d’une Acadie moderne et vibrante » (RadioCanada, §3). Comme beaucoup l’ont expérimenté lors du 400e anniversaire de l’Acadie en 2004, « qui dit fête dit bien entendu chanson, chez un peuple pour qui la tradition a longtemps été le seul moyen d’exprimer sa manière de vivre, ses craintes et ses aspirations » (Proulx 2006, 121). C’est une façon comme une autre d’effectuer sa quête identitaire, mais aussi sa quête du bonheur. Après tout, dans nombre de cultures, la chanson tient de la fête. Toutefois, cet espace festif, d’ordre public, s’instaure dans un espace plus restreint, l’espace privé. Bien sûr, j’y participe dans mon salon, tout seul. Mais j’y participe aussi seul dans mon quartier, un quartier anglophone dans lequel ma famille et moimême sommes pratiquement les seuls francophones, ou à tout le moins les seuls à parler français. Difficile alors de s’identifier à mes voisins qui trouvent maintes interrogations dans nos discussions les plus banales. Pour eux, le 15 août est le jour de la fête chrétienne de l’Assomption. C’est que, dans ce territoire que j’habite, jadis connu sous le nom d’Acadie et qui correspond maintenant plus ou moins aux provinces maritimes du Canada (soit le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse et l’Île-du-PrinceÉdouard), vivent encore d’irréductibles francophones qui tentent de garder, et même faire leur place en français dans ce pays qui se veut bilingue, le Canada. À la différence d’Astérix et d’Obélix, ces irréductibles ne possèdent aucune potion magique mais partagent tout de même le goût de la fête et de la chanson. Véritable précurseur de la littérature en milieu minoritaire où la langue se voit menacée comme en Acadie de l’Île-du-Prince-Édouard qui ne possède qu’une seule revue historique (La petite souvenance) et un seul journal hebdomadaire (La Voix acadienne) de langue française, la chanson acquiert un rayonnement qui dépasse de loin celui du texte écrit. Elle se veut un substitut à la poésie, une façon contemporaine d’abolir « le dur mensonge des cavernes honteuses de notre silence ». La chanson sert littéralement « d’instrument de protestation contre toutes les forces assimilatrices et d’outil de promotion sur le plan national et international » (Paré 2001, 151). Mais est-ce suffisant pour assurer les assises d’une communauté linguistique en situation minoritaire? Comment en effet habiter ce « cri de terre » et sortir de la solitude alors que la fête, la chanson, prend des allures impudiques en touchant de près, aux yeux de la communauté linguistique majoritaire, la vie intime d’un voisin? Cette fête, je la regarde seul à la télévision, à l’ombre de la bienséance des regards et des oreilles de mes voisins. Elle est retransmise en direct de Dieppe, une communauté majoritairement francophone qui vit aux côtés d’une communauté anglophone dont les membres ignorent ce qui s’y passe. Cette Unauthenticated Download Date | 2/11/17 1:07 AM DIALOGUES FRANCOPHONES No. 18/2012 31 scène publique est paradoxalement privée, propre aux Acadiens. Le cri qui s’en dégage ne rejoint pas l’autre communauté : il demeure en marge, marginal, muet aux oreilles de la majorité. Comment dès lors constituer une communauté qui ne soit pas en marge d’une autre, mais qui en fasse partie à part entière et enfin sortir de la dialectique « Nous autres/les autres » ? Comment une minorité pourrait-elle partager ses symboles avec la majorité qu’elle côtoie tous les jours sans voir ces symboles dévier de leur signification ? Ou encore, comment la majorité pourrait-elle voir ces symboles sans qu’ils lui paraissent indécents, puisque de l’ordre du privé ? Pour répondre à ces questions, il serait particulièrement intéressant d’interroger l’un des plus forts symboles acadiens, soit le mythe d’Évangéline. Ce n’est toutefois pas le protagoniste du poème éponyme du XIXe siècle qui m’intéresse réellement, mais plutôt ce que ce symbole est devenu au XXe siècle. Ce sera à la poésie romantique que remédiera cette fois la chanson populaire. La chanson « Évangéline, Acadian Queen » de l’auteure-compositrice-interprète acadienne de l’Île-du-Prince-Édouard, Angèle Arsenault, nous permettra de combler la distance qui sépare deux communautés et de remonter aux sources de l’origine même du désir pudique de parler français d’une communauté culturelle et linguistique minoritaire. La distance habitée de la communauté minoritaire Dans La distance habitée (2003), un essai percutant, François Paré établit la culture comme fondement de la communauté (45). Remontant à Fernand Dumont, qui voyait la culture comme « un univers second où nous poursuivons la recherche du sens de notre vie et du sens des choses » (Dumont cité par Paré, 45), il en vient à comprendre la culture « comme l’ensemble des institutions et des discours sur lesquels se tiennent en équilibre les communautés » (47). Vue ainsi, la culture se présente comme un élément hétéroclite de l’identité individuelle, un élément qui engendre une conscience de l’hétérogénéité du monde. La culture crée alors une distance dans laquelle s’installe un vaste éventail de choix auquel l’individu se prête tous les jours pour devenir « un lieu où s’engage les actes de résistance, les refus, les manœuvres d’affirmation » (49). C’est dans cette distance que se crée un lieu de gouvernance qui permet de penser, par exemple, les liens multiples qui unissent les francophones de l’Île-du-Prince-Édouard, liens qui dépassent le rêve utopique de la refrancisation de certains territoires et même de reconnaissance juridique. Toutefois, la taille même de la communauté pose plus souvent qu’autrement un problème dans la province insulaire. Ainsi, cette province – la Unauthenticated Download Date | 2/11/17 1:07 AM 32 DIALOGUES FRANCOPHONES No. 18/2012 plus petite des dix provinces canadiennes – ne contient environ que 143 500 âmes (Chagnon et Milan 2011, §7)1, dont environ 5 600 avaient le français comme langue maternelle en 2006 (Chavez, Lepage et Bouchard-Coulombe 2012, 8). Cependant, lorsque vient le temps de parler de francophones sur l’Île-du-Prince-Édouard, la situation se corse davantage car la définition de « francophone » est loin d’être stable. À ce niveau, même les analystes de l’agence Statistique Canada se questionnent : on peut se demander si la définition de la population francophone de l’Île-du-Prince-Édouard correspond aux quelque 5 600 personnes qui ont déclaré le français comme langue maternelle lors du Recensement de 2006, aux 5 100 personnes ayant cette langue comme première langue officielle parlée, ou encore aux 5 200 personnes parlant le français soit le plus souvent (2 800) soit régulièrement (2 400) à la maison. Ou encore doit-on considérer une définition large qui inclurait l’ensemble des quelque 17 200 locuteurs du français, voire plus si l’on ajoute les jeunes enfants qui ne parlent pas le français, mais dont au moins l’un des parents en est un locuteur maternel? (Ibid) Comment un aussi petit groupe linguistique pourrait-il se reconnaître pour former une communauté et sortir de son espace privé sans devenir indécent aux yeux du groupe majoritaire ? C’est que, pour être membre du groupe, il faut se reconnaître une identité, tant personnelle que collective. Comme le sociologue acadien Joseph Yvon Thériault (2007) le fait remarquer, [d]ans sa dimension tant individuelle que collective, l’identité apparaît comme la construction d’un Moi ou d’un Nous, en fait d’un Sujet qui se pose comme porteur d’une historicité qui lui est particulière. J’ai une identité quand j’affirme faire ma propre histoire […]. Dans les sociétés dites traditionnelles, l’identité est conçue comme émanant d’un extérieur que l’on ne contrôle pas – Dieu, la nature, la tradition – et inscrite dans un groupe – la famille, le clan, la patrie – qui seul est véritablement porteur de l’identité. Dans les sociétés modernes, au contraire, l’identité est réflexive, c’est-à-dire que la construction de son Moi ou de son Nous est l’objet d’un travail conscient et explicite sur soi. (Thériault, 37) Retenons donc que l’identité collective moderne est l’objet d’un travail du Sujet sur lui-même. Dans de telles conditions, l’identité acadienne se construirait en marge de, et en résistance à, une identité collective plus grande, celle de la 1 Il s’agit d’une estimation pour l’année 2010 selon les données démographiques recueillies par l’agence gouvernementale Statistique Canada. Unauthenticated Download Date | 2/11/17 1:07 AM DIALOGUES FRANCOPHONES No. 18/2012 33 majorité, ce qui pourrait en partie expliquer la difficulté des analystes de Statistique Canada à définir la notion de francophone, entre autres sur l’Île-du-Prince-Édouard. Il ne s’agit plus seulement de parler français et de choisir d’appartenir à un groupe dont la vie s’articule autour de cette langue, il faut aussi pouvoir partager, et aussi se voir accorder la possibilité de partager l’historicité de ce groupe de francophones qui, sur l’Île comme dans les autres provinces canadiennes des maritimes se réclament de descendance acadienne : Fondée en 1604, l’Acadie est à l’origine une colonie française, située dans l’actuelle province de la Nouvelle-Écosse. Après des débuts difficiles, cette colonie devient prospère. Les Acadiens ont en effet réussi leur pari d’obtenir une vie meilleure en tentant l’aventure du Nouveau Monde. Devenus sujets britanniques par suite de la capitulation de la France devant l’Angleterre en 1713, ils tentent de négocier un statut de neutralité, mais finissent par subir la déportation avec tout son lot de tragédies. De 1755 à 1763, la moitié des quelque 14 000 Acadiens sont déportés et près de 3 000 meurent à cette occasion. (Magord et Belkhodja 2005, 45) Cela ne veut pas pour autant dire qu’il faille nécessairement se réclamer d’une famille qui fut soumise à la Déportation des Acadiens en 1755 pour se dire acadien, mais plutôt au discours institutionnel qui fera de l’Acadie une communauté dotée d’une conscience collective malgré l’absence d’un territoire géographique et politique. L’ensemble des facteurs qui constituent la conscience collective acadienne trouve ses racines dans les années 1860 alors que les Acadiens développent une conscience nationale et se dotent d’attributs symboliques – drapeaux, hymne national, etc. – qui les distinguent des autres populations des provinces maritimes et des Canadiens français du reste du Canada. Ils se doteront aussi, au niveau de la société civile, d’institutions qui leur sont propres : maisons d’enseignement – couvents, collèges –, journaux – le Moniteur acadien et ensuite l’Évangéline –, paroisses, à travers l’acadianisation du clergé qui sera chose réalisée au début du XIXe siècle et, un peu plus tard, institutions économiques – réseaux de coopératives et de caisses populaires. (Thériault 2007, 41) Ces éléments ont donc servi d’assises à l’Acadie traditionnelle, c’est-à-dire que ce projet voulait s’inscrire dans une filiation avec le passé et les ancêtres. L’Acadie comme sujet historique confirme sa marginalisation, mais aussi sa résistance; c’est comme « communauté pré-moderne tenue à l’écart des forces corruptrices de l’urbanisation, de l’industrialisation et de la laïcisation que l’Acadie affirme dans un premier temps et pendant près d’un siècle son identité » (43). Il s’agit bien sûr d’une identité homogène, ou encore monolithique qui tombera peu à peu en désuétude et qui se folklorisera faute Unauthenticated Download Date | 2/11/17 1:07 AM 34 DIALOGUES FRANCOPHONES No. 18/2012 d’un territoire acadien propre. Suite à la diversification des institutions socioéconomiques devenues laïques dans la seconde partie du XXe siècle en divers endroits de l’Acadie, l’identité acadienne se fragmente, un peu à l’image du territoire sur lequel elle se retrouve. La Déportation, l’errance et le déracinement qui caractérisaient naguère une Acadie imaginaire céderont le pas à une vision de l’Acadie plus globale, consciente de sa diaspora. Il y aura alors autant d’Acadies qu’il y aura de foyers acadiens sur la mappemonde et autant de façons d’agir localement. La marginalisation et la résistance quittent le terrain de la tradition : « [l]es pratiques de résistance ne sont pas, à proprement parler, acadiennes ; l’acadianité apparaît avant tout un médium qui tente de transformer des marginalités en sujet historique ». (55) L’identité acadienne apparaîtrait ainsi postmoderne, une sorte d’épreuve voulant donner une nouvelle cohésion, une nouvelle sociabilité, à un ensemble marginalisé. La tradition romantique d’Évangéline C’est, dans une certaine mesure, à ce projet de société civile que participe Angèle Arsenault en faisant paraître en 1977 une chanson à l’allure humoristique et festive, « Évangéline, Acadian Queen ». « La Reine acadienne » est en fait un clin d’œil au célèbre poème Évangéline, de l’américain Henry W. Longfellow. Les destinées de l’Acadie traditionnelle, reposant sur la nature, Dieu et la tradition, se voient magnifiées sous le prisme de la vision de Longfellow. Publié aux États-Unis en 1847 sous le titre original Evangeline, a Tale of Acadie, ce poème a servi à dépeindre l’Acadie et les Acadiens comme les héritiers d’une tradition romantique. L’auteur y raconte l’épopée de la jeune Évangéline Bellefontaine qui, la veille de son mariage, se voit séparée de son fiancé, Gabriel Lajeunesse. Le début de l’action nous situe en 1755, lors de la Déportation qui conduira les Acadiens de la région de Grand-Pré vers les colonies américaines du Sud. Les Acadiens seront refusés au Massachussetts et refoulés jusque vers la Géorgie, certains se rendant même jusqu’en Louisiane. De l’antique forêt de l’ouverture du poème aux descriptions idylliques de Grand-Pré avant le fatidique jour qui verra les femmes séparées des hommes, s’y retrouvent magnifiés : l’Histoire, la nature et l’amour. Destin individuel et destin social s’accompagnent à travers les larges strophes qui énoncent que l’être est d’abord fait de rêve et d’émotion. Les États-Unis d’Amérique n’ont pas un siècle et la poésie cherche à bien jeter les racines d’une civilisation. Dans l’effervescence du romantisme, le nationalisme culturel a joué un grand rôle. Son sujet, Longfellow le choisit donc consciemment américain. De là s’ouvre une errance, un inventaire, qui tout au long du poème sera la description des marques d’un continent offrant par ses paysages une âme où Unauthenticated Download Date | 2/11/17 1:07 AM DIALOGUES FRANCOPHONES No. 18/2012 35 pousser la recherche identitaire d’une culture déjà nostalgique de ses fondements. (Beausoleil 1994, viii) L’harmonie, la nature et la jeunesse se voient glorifiées dans la première partie du poème. Dans la seconde et dernière partie, c’est la quête d’Évangéline qui, pendant des dizaines d’années, traverse le continent américain pour finalement retrouver Gabriel aux portes de la mort qui nous est racontée. Cette histoire d’amour devient le symbole d’une histoire tragique : Le destin du peuple acadien, arraché à ses racines, devient symbolique de l’arrachement de l’âme individuelle à la Source et Évangéline, dans son humble grandeur, devient l’image même d’une Acadie originelle à la recherche de son âme perdue dans la tragédie du Grand Dérangement. (Villemaire 1994, 104) L’auteur a créé plus qu’une légende, c’est un mythe. On peut toutefois se questionner au sujet de la longévité de ce mythe en Acadie n’eut été de sa traduction par le poète canadien-français Pamphile Lemay. Bien sûr, peu après sa parution en anglais, le poème sera traduit en plusieurs langues et sera connu dans plusieurs pays. Une traduction paraît d’ailleurs en France en 1853. Ce n’est toutefois qu’en 1865 que paraîtra la traduction de Lemay, une première traduction qu’il retravaillera et qu’il fera suivre d’une seconde version en 1870 et d’une troisième en 1912. En 1867, le journal Le Moniteur acadien le publiera sous forme de feuilleton et le journal L’Évangéline fera de même en 1887. Les résultats se feront connaître sans tarder : les Acadiens s’accrochent à ce poème comme à une bouée de sauvetage, leur apportant une sécurité morale qui semble leur avoir manqué pendant le siècle qui suivit la déportation. À toutes les occasions, l’élite acadienne cite des extraits du poème pour affermir auprès des Acadiens la force de leur race, bâtie par “les pleurs, les larmes et les sueurs de leurs ancêtres”. (CapAcadie, §4) Ce qui sera au cœur de ce poème pour les Acadiens sera le culte de la tradition, un culte qui leur avait en fait permis de conserver leur langue et leur religion plus de cent après la Déportation : La figure d’Évangéline est en effet venue légitimer et donner tout son sens au mouvement de la Renaissance acadienne, mouvement qui prend forme, dans les années 1860 […] Les Acadiens sortent alors de leur long exil de “cent ans dans les bois”, pour emprunter l’expression d’Antonine Maillet, et essaient tant bien que mal de regrouper leurs forces vives, sous la férule de penseurs comme Rameau de Saint-Père, Pascal Poirier, Placide Gaudet et Phileas Bourgeois. La figure d’Évangéline va donc occuper une place importante dans le discours de la Renaissance acadienne et des grandes conventions nationales qui vont se succéder à partir de 1880, de sorte que le personnage Unauthenticated Download Date | 2/11/17 1:07 AM 36 DIALOGUES FRANCOPHONES No. 18/2012 d’Évangéline, personnage essentiellement imaginaire, faut-il le rappeler, va devenir bientôt une figure à la fois historique et légendaire, notamment dans la tradition populaire, qui pose le personnage en question comme une personne. Sans être absent, le ressentiment historique cède la place à un sentiment de douleur et de perte : douleur des amants séparés, perte du paradis terrestre. (Morency 2012, 107) Car, en fait, les Acadiens sont revenus habiter le territoire que les Britanniques leur avaient enlevé en colonisant les quatre coins des provinces maritimes. Avant même la naissance du Canada en 1867, les Acadiens auront le droit de revenir dans l’ancienne Acadie à la condition de laisser les nouveaux propriétaires occuper leurs anciennes terres et de ne constituer que de petites communes éloignées les unes des autres : Un siècle plus tard [après la Déportation], des communautés acadiennes se reforment dans la province voisine du Nouveau-Brunswick. Elles sont tolérées par les autorités coloniales, qui empêchent néanmoins tout regroupement important. Des communautés acadiennes subsistent ou s’installent en Nouvelle-Écosse, à l’Île-du-Prince-Édouard, aux îles de la Madeleine et à Terre-Neuve. D’autres se forment en Louisiane, en NouvelleAngleterre et en France. Les Acadiens réfugiés au Québec ne forment pas de communautés distinctes mais ils préservent, à des degrés divers, leur sentiment d’appartenance spécifique. (Magord et Belkhodja 2005, 45) Il serait possible de voir dans ce retour dans la nouvelle Acadie le prolongement d’un mythe voulant que les Acadiens soient revenus vivre en paix auprès du conquérant selon une attitude rebelle qui signifie que rien ne pourrait les faire disparaître. L’idéologie de la survivance trouve ainsi une forte résonance chez Évangéline : Cette idéologie est basée sur la fidélité à la langue, à la religion, aux traditions nationales et à l’histoire d’une Acadie qui lutte pour son existence, rêve d’un avenir meilleur et du paradis retrouvé. […] Les premiers colons et les déportés ont été héroïques et leurs descendants ne sont pas moins valeureux. Il n’en tient qu’à eux maintenant, s’ils restent fidèles aux traditions, à la langue et à la foi des ancêtres, d’assurer la survie nationale, car la Providence veille sur l’Acadie et le pays est promis à un bel avenir. (Viau 1998, 73) Il serait aussi cependant possible d’y voir un peuple revenu vivre auprès du conquérant pour y subir de nouvelles humiliations. Il reste encore un grand pan de l’histoire de l’Acadie à écrire, autant avant la Déportation qu’après la Déportation. Oui, les Acadiens ont survécu, mais leur histoire est surtout orale et se confond avec le folklore et les traditions : Unauthenticated Download Date | 2/11/17 1:07 AM DIALOGUES FRANCOPHONES No. 18/2012 37 L’imaginaire acadien, comme tant d’autres phénomènes culturels, prend son origine profonde dans la Déportation de 1755. Jean-Paul Hautecoeur, dans son livre L’Acadie du discours, affirme qu’il s’agit là de l’an 1 du peuple acadien, celui qui le fonde dans le martyr et qui imprime dans son imaginaire un comportement qui le marque depuis. À partir de cette date fatidique, l’Acadie disparaît des manifestations matérielles et géographiques, le nom se renfloue dans une sorte de vénération religieuse et, pour plus de 100 ans, il se produit une errance dont nous ne savons rien ou presque. Sans institution, sans protection et sans scolarisation, il ne nous est resté que la mémoire pour renflouer des souvenirs dont la douleur était impensable. Comme toutes les collectivités déportées nous avons fait de la première Acadie, celle d’avant la Déportation, une terre de rêves perdue à jamais. Cette idéologie est perceptible dans les complaintes que nous avons composées sur le mode mineur et qui ressemblent fort aux blues des Noirs américains ou aux cantors des Juifs de la diaspora. L’inconsolable mélopée du paradis perdu. (Chiasson 2004, 147-148) Déjà en 1969, des auteurs voulaient s’affranchir d’une Évangéline restée fidèle jusqu’à sa mort, de cette Acadie traditionnelle portée à se replier sur elle-même pour écouter ses complaintes. C’est le début de la contre-lecture du mythe par une nouvelle génération d’artistes d’une « Acadie-à-faire » dont l’un des porteétendards sera le poète Léonard Forest : Évangéline porte mal la mini-jupe. Son regard est tourné vers le passé. Elle pleure longuement une patrie perdue. Debout et stoïque à Grand-Pré (Nouvelle-Écosse), assise et inconsolable à Saint-Martinville (Louisiane), Évangéline rumine un bonheur ancien qui s’est terminé en cauchemar. Mais le temps ne reviendra pas sur lui-même. La fidélité chaste de cette fille douce aux grands yeux sombres s’use dans un silence que nul n’écoute plus […] Cette Acadie nouvelle conteste sa propre fidélité. Elle l’interroge, la secoue, la redéfinit au futur. Dans ce débat souvent douloureux, parfois violent, on ne veut plus entendre les soupirs de celle qui fut, pendant un siècle, à la fois l’héroïne et la sainte, à la fois souvenir et symbole d’espoir, à la fois fierté et honte. Évangéline est l’image même de la fidélité, mais la jeune Acadie veut descendre de son socle la fidélité. (Forest 1969, 135-136) Aux yeux de ces nouveaux auteurs, Évangéline représente l’aliénation de l’Acadie. En effet, comme le montre éloquemment Robert Viau (1998) : L’héroïne acadienne a été créée par un auteur étranger, américain. Le poème évoque l’oppression des Acadiens par les Anglais, mais il a été écrit en anglais. Évangéline est un symbole de piété catholique, selon un protestant, et c’est l’image de la femme idéale, selon un homme. Certes, le poème raconte un épisode de l’histoire acadienne, mais en même temps il nie l’Acadie. Evangeline souligne doublement le vide, le néant de l’Acadie, car c’est une épopée Unauthenticated Download Date | 2/11/17 1:07 AM 38 DIALOGUES FRANCOPHONES No. 18/2012 étrangère, américaine, et son sujet est la destruction de l’Ancienne Acadie. De plus, Évangéline aurait été imposée comme héroïne nationale et archétype par l’élite traditionnelle qui trouvait en elle une incarnation des valeurs de piété, de soumission et de résignation ; en somme, un personnage bien pensant qui respecte l’Église et l’autorité civile. (147) La route est cependant longue pour s’affranchir d’un tel symbole. Chaque année, des milliers de gens se déplacent à Grand-Pré, devenu site historique national, pour visiter l’église qui symbolise le lieu du début de la Déportation, et voir la statue d’Évangéline. L’on semble même avoir oublié que ce n’est pas à Grand-Pré que la Déportation a commencé, « mais à Beaubassin, dans l’isthme de Chignectou, où les Britanniques ont emprisonné et déporté les premiers groupes d’Acadiens ». (Arsenault 2008, 22) Évangéline devient même une marque de commerce qui se monnaie au niveau touristique. En 1960, les Acadiens de l’Île-du-Prince-Édouard fondent à Abram-Village l’École régionale Évangéline (Arsenault 1982, §11), nom que prendra également toute cette région où habitent la grande majorité des Acadiens de l’Île. C’est dans ce sens que Angèle Arsenault, native de cette région insulaire, prendra la parole afin de faire réaliser à la population en général ce qu’est devenu le symbole d’Évangéline. La nouvelle Évangéline acadienne D’entrée de jeu, elle confie dans sa chanson qu’elle veut raconter l’histoire de quelqu’un que le gens connaissent, mais qu’elle veut aussi se dissocier de Longfellow : Je m’en vais vous parler de quelqu’un que vous connaissez Oui mais trompez-vous pas, a vient pas des États, Même si un certain fellow, qui s’appelait Longfellow, l’a popularisée, y a deux cents ans passés. (Arsenault 1977, §12) Dans le reste de cette chanson, qui ne contient aucun refrain, l’auteurecompositrice-interprète cherche à rectifier les faits et à corriger les erreurs de Longfellow en fonction de l’histoire des Acadiens. Elle prend soin de camper son personnage à la façon « acadienne » : « elle était ben ben fine », c’est-à-dire très gentille et intelligente ; « ils étaient riches en maudit », en référence aux sols riches cultivés par les Acadiens. Elle opte pour un point de vue féminin, faisant 2 Puisqu’il s’agit d’un disque, les citations faisant référence à cette chanson sont ma propre transcription de la chanson, même s’il est possible d’en retrouver plusieurs « non officielles » sur Internet. Unauthenticated Download Date | 2/11/17 1:07 AM 39 DIALOGUES FRANCOPHONES No. 18/2012 de Gabriel autant un objet d’amour qu’un objet égaré, un sujet passif soumis aux actions des Anglais. Seule Évangéline effectue une recherche3 : Elle s’appelait Évangéline, elle était ben ben fine. Elle aimait Gabriel, sur la terre comme au ciel. Ils vivaient en Acadie, ils étaient riches en maudit. Mais un jour les Anglais n’étaient pas satisfaits, Alors ils les ont déportés, Gabriel a disparu. Évangéline déconfortée l’a cherché tant qu’elle a pu. (Ibid.) C’est toutefois dans le deuxième paragraphe que la description d’Évangéline change : elle devient un personnage d’action qui va en Acadie, au Québec, en Ontario, en Floride, en Idaho et en Louisiane accompagnée (pour les besoins de la rime ?), « de sa cousine Diane » (§2). Bien sûr que ce trajet est impossible à imaginer pour Longfellow : l’héroïne du poème ne peut pas venir au Canada car les Acadiens ont été dispersés dans les colonies américaines. Arsenault fait plutôt ici référence au symbole qui s’est propagé de l’Acadie au reste du Canada au gré des déplacements des Acadiens contemporains qui quittent à la recherche de nouveaux emplois, mais qui s’est aussi déplacé aux États-Unis, faisant ainsi référence aux sources même de Longfellow. Voilà également que l’héroïne est accompagnée de sa cousine, et non plus d’un prêtre. Les plus hautes dimensions morales du mythe se trouvent de la sorte annihilées car Évangéline ne porte plus les valeurs de l’Église. Elle devient plutôt une voyageuse et rejoint la cause de l’émancipation des femmes et, accompagnée de sa cousine, elle prend la décision en Louisiane de mettre un terme à sa quête. Comme dans le poème de Longfellow, Évangéline consacre son temps à soigner les malades à l’hôpital, là où elle retrouvera finalement Gabriel sur son lit de mort. Cependant, au lieu de lui dire merci et de s’éteindre avec lui (Longfellow, 98), elle lui dit : merci beaucoup. Asteur que t’es enterré, j’vais pouvoir m’en retourner. Je m’en vais pour investir dans les compagnies de l’avenir Afin que le nom d’Évangéline soit connu en câline4. (Arsenault 1977, §3) Et quelles sont ces compagnies de l’avenir dans lesquelles elle se propose d’investir ? 3 Ce qui, cependant, n’est pas très loin de la version du poème de Longfellow dans lequel Gabriel semble un « amoureux mou » dans sa quête, préférant se joindre aux Amérindiens pour entreprendre son voyage à travers le continent et se transformer en chasseur. Ignorant qu’Évangéline le cherche, il passera quelques fois tout près d’elle sans le savoir. 4 C’est-à-dire beaucoup connu. Unauthenticated Download Date | 2/11/17 1:07 AM 40 DIALOGUES FRANCOPHONES No. 18/2012 Evangeline Fried Clams Evangeline Salon Bar Evangeline Sexy Ladies Wear Evangeline Comfortable Running Shoes Evangeline Automobile Springs Evangeline Regional High School Evangeline Savings Mortgage and Loan Evangeline the only French newspaper in New Brunswick Evangeline Evangeline Acadian Queen Les entreprises qu’elle cible appartiennent surtout au secteur tertiaire de l’économie de par la nature des biens et services qu’elles offrent : un restaurant de fruits de mer, un bar, une boutique de lingerie féminine, une boutique de chaussures de sport, une compagnie de distribution de pièces automobiles et une société financière de prêts et hypothèques. À l’exception de la Evangeline High School, qui est en fait l’école Évangéline, soit la première école régionale de langue française à l’Île-du-Prince-Édouard fondée en 1960, et le journal Évangéline, qui déménagea de la Nouvelle-Écosse pour devenir le seul journal francophone quotidien du Nouveau-Brunswick de 1905 à 1982, tous les autres noms d’entreprises sont en anglais. Voilà, pour Angèle Arsenault, une façon éloquente d’aborder deux problèmes majeurs en Acadie : 1) le groupe majoritaire côtoyé étant anglophone, le commerce ne peut se faire qu’en anglais ; 2) le peuple acadien, n’en déplaise à son élite, est anglicisé tout comme son héroïne qui, puisque d’invention américaine, ne pouvait parler français dans la version originale du poème. Même deux des symboles acadiens de langue française risquent de tomber face à l’anglicisation qui les guette. Ce sont les affres de l’assimilation par son versant économique que dénonce Arsenault sur les rythmes d’une musique festive. La survivance n’est pas religieuse comme au XIXe siècle, ni même de tradition ou linguistique dans l’Acadie de l’Île-du-Prince-Édouard contemporaine, elle est plutôt de nature économique. L’Acadien doit assumer son être-parmi les anglophones en s’assurant d’abord de son égalité économique. Ce n’est pas en œuvrant au sein du secteur primaire de l’économie que les Acadiens le réussiront, mais plutôt en se hissant dans les hautes sphères des secteurs de la transformation et du service à la clientèle. Et, pour réussir financièrement, ils auront besoin de clients qui possèdent l’argent, soit les anglophones. Par une réflexion sur la réalité quotidienne, Arsenault questionne le comportement social de l’Acadien et propose de réécrire son histoire pour que le présent soit plus soutenable. Comme elle le dira dans la chanson « Grand-Pré » en 1994, il ne fait pas s’arrêter sur ce que l’Acadie aura été, mais plutôt réfléchir à ce qu’elle pourrait devenir : Unauthenticated Download Date | 2/11/17 1:07 AM 41 DIALOGUES FRANCOPHONES No. 18/2012 si mon histoire est triste, ce n’est pas votre faute mais soyons des artistes, écrivons-en une autre qui sera bien plus belle, beaucoup moins dramatique […] à partir d’aujourd’hui bâtissons l’avenir en gardant du passé nos plus beaux souvenirs. (Arsenault 1994, §1) D’une population majoritaire qui partageait le territoire avec les Amérindiens en 1758, les Acadiens de l’Île-du-Prince-Édouard sont passés à une communauté minoritaire qui doit constamment combattre pour sa survie. Comme Évangéline, les symboles de ce peuple ont été décidés par une élite qui, souvent, ignorait la réalité du peuple : un peuple de pêcheurs, d’agriculteurs et de bûcherons qui durent attendre le milieu du XXe siècle avant de pouvoir se scolariser. Les discours des chefs nationalistes qui, depuis environ 1860, les enjoignent de « demeurer fidèles à leurs traditions et à leur langue, tout en aspirant, cependant, vers un statut social plus élevé » (Arsenault 1985, 44), semblent avoir été en partie écoutés. Les Acadiens ont délaissé leur état d’infériorité pour acquérir un statut d’égalité avec la population anglophone au niveau socio-économique. Il semble donc avoir gagné au niveau de l’être-parmi, c’est-à-dire que les Acadiens arrivent à vivre avec la communauté anglophone tout en passant inaperçus aux yeux de leurs voisins pour se bâtir un avenir. Malheureusement, ils passent également inaperçus aux oreilles de ces derniers. Il est très rare encore de nos jours d’entendre parler français à l’extérieur des maisons et des écoles de langue française. Il s’agit de créer une distance par rapport à sa langue maternelle, une manœuvre d’affirmation par la négative. Les Acadiens de l’Île se reconnaissent sans pour autant se parler français. Mais il s’agit aussi d’une manœuvre de résistance face à une certaine ghettoïsation. Par exemple, dans la capitale provinciale, Charlottetown, il est impossible de voir des affiches en français à l’exception de celles qui arborent le nom des rues selon le bilinguisme officiel. Seuls quelques rares commerces peuvent à l’occasion nous servir en français, surtout en haute saison touristique. Seuls les bureaux de la fonction publique fédérale et provinciale offrent des services complets dans les deux langues, encore faut-il se présenter aux heures de travail des quelques préposés qui parlent français. Contrairement au centre-ville typique retrouvé dans de grandes villes d’Europe et d’Amérique qui abrite bon nombre de communautés linguistiques, le centreville de Charlottetown ne possède pas d’écoles autres que des écoles de langue anglaise. Pour aller à la seule école et au seul centre communautaire de langue Unauthenticated Download Date | 2/11/17 1:07 AM 42 DIALOGUES FRANCOPHONES No. 18/2012 française de la grande région de la Capitale, il faut se rendre à la périphérie. Le désir d’être-parmi les Acadiens et la société en général se voit de la sorte pousser en marge de la communauté qui détient le pouvoir. Oui, l’Acadien a obtenu l’égalité socio-économique, mais il souffre encore d’un grand complexe au niveau de l’utilisation de sa langue. Malgré le fait que l’Île-du-PrinceÉdouard soit une province qui aspire à devenir officiellement bilingue, le français y a plutôt l’air d’un handicap. L’Acadien qui veut y connaître la prospérité se doit d’abord, tout comme Évangéline, de maîtriser la langue anglaise. Muet aux oreilles des anglophones, l’Acadien doit asseoir son identité collective et culturelle sur des assises qui lui sont étrangères. L’hétérogénéité des éléments qui le définissent en font un être qui n’aspire qu’à vivre parmi la majorité malgré le fait qu’il soit constamment repoussé vers la marge. L’Acadien de l’Île-du-Prince-Édouard n’a pas encore de littérature, mais des auteurs-compositeurs-interprètes de la trempe d’Angèle Arsenault sont les poètes contemporains qui ouvrent l’imaginaire et contribuent à créer un désir d’espace culturel et communautaire qui lui soit propre. Ils lui proposent une relecture des faits historiques qui va plus loin que le folklore pour ainsi le faire sortir des murs de son silence et mettre l’accent sur sa résistance. Dans ce sens, la chanson populaire de l’Acadien ne peut que rejoindre la culture de son élite dans la promotion d’un être-parmi dont le désir pudique serait de parler français. Bibliographie Arsenault, Angèle. « Grand Pré ». Transparente. Montréal : Justin Times Records Inc., JTR8448-2, 1994. Arsenault, Angèle. « Évangéline Acadian Queen ». Libre. 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