quels risques pour quelles assurances?

Transcription

quels risques pour quelles assurances?
QUALITÉ
Le contrat de responsabilité
civile décennale assure le
paiement des travaux de
réparation de l’ouvrage
lorsque la responsabilité
du constructeur est
engagée. Le montant de
la garantie peut être
plafonné à 150 millions
d’euros lorsque les travaux
sont destinés à un usage
autre que l’habitation.
L’assurance comporte
systématiquement une
franchise dont le montant
varie selon les contrats,
qui n’est pas opposable
aux victimes puisqu’elles
sont indemnisées
intégralement.
Toutefois, il faut souligner
que l’assuré peut perdre
tout droit à garantie en cas
d’inobservation inexcusable
des Règles de l’art.
Celles-ci sont définies par
la réglementation en
vigueur : normes françaises
homologuées ou normes
publiées par les autres
États membres de l’Union
européenne (voire par des
États signataires d’un
accord économique) offrant
un degré de sécurité et de
pérennité équivalent.
Rappelons que le programme
d’accompagnement des
professionnels du bâtiment
« Règles de l’art Grenelle
Environnement 2012 » vise
notamment à actualiser
les normes DTU et à rédiger
de nouvelles Règles
(notamment dans la
rénovation) et des guides
techniques. Dans ce
contexte, le Costic a été
chargé d’élaborer des
Recommandations
professionnelles relatives
à la conception, la mise en
œuvre et la maintenance
d’équipements techniques.
Photo Testo
Photo DR
Attention au
respect des
Règles de l’art
PERFORMANCE ÉNERGÉTIQUE
QUELS RISQUES
POUR QUELLES
ASSURANCES?
Les enjeux de l’efficacité
énergétique et de la réduction des
consommations du parc immobilier existant modifient
les pratiques professionnelles et font émerger de
nouveaux risques et exigences pour les acteurs. Face à
cela, les assureurs adaptent leurs garanties.
TEXTE : ALAIN SARTRE
PHOTOS : CLIPSOL, DERBIGUM, DR, JACKSON,
KARAWITZ, MONNIER, TESTO, XELLA
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QUALITÉ CONSTRUCTION • N° 132 • MAI / JUIN 2012
’obligation de responsabilité décennale est
inscrite dans les articles 1792 et suivants
du Code civil: «Tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit, envers
le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des
dommages, même résultant d’un vice du sol, qui
compromettent la solidité de l’ouvrage ou […] le rendent
impropre à sa destination» (article 1792).
La notion de constructeur recouvre aussi bien les
entreprises que les maîtres d’œuvre ou les professionnels qui interviennent en tant que mandataire
du propriétaire. Leur responsabilité implique indirectement les sous-traitants ainsi que les fournisseurs, industriels ou distributeurs de composants.
Elle couvre les éléments qui «font indissociablement
corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation,
d’ossature, de clos ou de couvert» (article 1792-2).
Il est précisé que les actions «dirigées contre les
constructeurs […] et leurs sous-traitants se prescrivent
par dix ans à compter de la réception des travaux»
(article 1792-4-3) et que «toute clause d’un contrat
qui a pour objet, soit d’exclure ou de limiter la responsabilité […] est réputée non écrite» (article 1792-5).
L
Responsabilité
décennale et garanties
Face à cette responsabilité civile décennale, le Code
des assurances impose une obligation d’assurance
dans ses articles L.241, L.242 et L.243. Cette exigence
vise bien sûr en premier lieu les constructeurs:
«Toute personne physique ou morale, dont la responsabilité décennale peut être engagée sur le fondement
de la présomption établie par les articles1792 et suivants
du Code civil, doit être couverte par une assurance»
(article L.241-1).
Mais elle s’applique également aux propriétaires ou
professionnels agissant en cette qualité : «Toute
personne physique ou morale qui […] fait réaliser des
travaux de construction, doit souscrire avant l’ouverture du chantier, pour son compte ou pour celui des
propriétaires successifs, une assurance garantissant,
en dehors de toute recherche des responsabilités, le
paiement de la totalité des travaux de réparation des
dommages» (article L.242-1).
Cette «Dommages-Ouvrage» (DO) comporte toutefois des exclusions: elle n’est pas obligatoire pour
les personnes de droit public ou les intervenants
qui leur sont liés dans le cadre d’un contrat de partenariat, ni pour les personnes de droit privé d’une
dimension économique suffisante pour assurer
elles-mêmes le préfinancement des réparations
lorsqu’elles font réaliser pour leur compte des travaux de construction autre que d’habitation.
En plus de la responsabilité décennale, le Code
civil impose deux autres garanties hors obligation
légale d’assurance. L’article 1792-3 indique que
«les autres éléments d’équipement de l’ouvrage font
l’objet d’une garantie de bon fonctionnement d’une
durée minimale de deux ans à compter de sa réception». L’article 1792-6 définit «la garantie de parfait
achèvement, à laquelle l’entrepreneur est tenu pendant un délai d’un an à compter de la réception ».
Celle-ci couvre la réparation des désordres signalés par le maître d’ouvrage « soit au moyen de
“Tout
constructeur
d’un ouvrage
est responsable
de plein droit,
envers le
maître ou
l’acquéreur
de l’ouvrage,
des dommages,
même
résultant d’un
vice du sol, qui
compromettent
la solidité de
l’ouvrage ou
[…] le rendent
impropre à sa
destination”
(1) La C2P rassemble des
représentants des sociétés
d’assurance (Fédération
française des sociétés
d’assurance et Groupement
des entreprises mutuelles
d’assurances), des entreprises
(Capeb et FFB), des industriels
(AIMCC), des contrôleurs
techniques (Coprec), des
certificateurs (Afocert), des
bureaux de normalisation
(BNTEC) et des centres
techniques (CSTB).
(2) Pour en savoir plus:
www.qualiteconstruction,
rubrique «La Prévention
produits (C2P)».
réserves mentionnées au procès-verbal de réception, soit par voie de notification écrite pour ceux
révélés postérieurement à la réception».
Autorité du Bureau
central de tarification
L’obligation d’assurance s’applique aux assureurs
eux-mêmes: «Toute personne assujettie à l’obligation
de s’assurer qui, ayant sollicité la souscription d’un
contrat auprès d’une entreprise d’assurance […], se
voit opposer un refus, peut saisir un Bureau central
de tarification », précise l’article L.243-4 du Code
des assurances. Ne sont concernés que les assureurs dont les statuts autorisent la prise en
charge du risque construction. Le Bureau central
de tarification (BCT) a pour rôle de fixer le montant de la prime. Il peut déterminer le montant
d’une franchise qui reste à la charge de l’assuré.
Le BCT intervient selon les modalités des
articles R.250-1 à R.250-6 de ce même code.
Composé de délégués des assureurs et des organisations professionnelles concernées, il doit être
saisi par lettre recommandée avec avis de réception dans les 15 jours suivant le refus de contrat.
Celui-ci est considéré comme implicite lorsque l’assureur n’a pas répondu dans un délai de 45 jours
après réception de la demande de souscription.
Rappelons que l’Agence qualité construction (AQC),
dans sa mission de prévention des désordres dans
le secteur de la construction, anime la Commission
Prévention Produits mis en œuvre (C2P). La C2P (1)
intervient sur les familles de produits et les textes
qui en définissent la mise œuvre. En s’appuyant sur
sa connaissance des pathologies et sur l’expertise
de ses membres, elle a pour mission d’identifier
les techniques susceptibles d’engendrer des
risques de sinistres. Ainsi, pour les techniques ou
produits nouveaux dits non traditionnels – c’est-àdire ne relevant pas d’un DTU pour leur mise en
œuvre –, elle examine les Avis Techniques édités
par le CSTB et met en observation une famille de
produits et/ou de procédés lorsqu’elle discerne un
risque particulier: absence de recul suffisant pour
appréhender sa pérennité, pathologie existante sur
des techniques similaires, conditions de mise en
œuvre ou technicités complexes voire irréalistes par
rapport aux conditions de chantier, etc. Le constructeur souhaitant prescrire ou mettre en œuvre des
produits ou des procédés mis en observation
peut, en cas de sinistre, ne pas être couvert par sa
police d’assurance décennale. Il doit, avant toute
prescription ou mise en œuvre, se rapprocher
de son assureur pour connaître les conditions
complémentaires qu’il doit éventuellement remplir
pour être couvert (2).
Des assurances adaptées
Autre point réglementaire important, la réception
– avec ou sans réserves – est l’acte qui transfère
la garde de l’ouvrage du constructeur au maître
d’ouvrage. Prononcée contradictoirement par écrit
de façon amiable ou à défaut judiciaire, elle marque
le point de départ des garanties de parfait achèvement d’un an, de bon fonctionnement MAI / JUIN 2012 • N° 132 • QUALITÉ CONSTRUCTION
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QUALITÉ
de deux ans et de responsabilité décennale.
Pendant les travaux, comme le précise l’article 1788
du Code civil, les constructeurs sont responsables
des dommages qui touchent l’ouvrage : effondrement, tempête ou catastrophe naturelle, incendie, attentat, dégradation, vol, perte… Leur responsabilité civile professionnelle peut en outre être
recherchée par le maître d’ouvrage ou des tiers pour
des dommages corporels, matériels ou immatériels.
Parallèlement, l’entreprise doit bien sûr couvrir les
risques encourus par son personnel, ses biens matériels et immobiliers. Ainsi, les PME souscrivent
le plus souvent des assurances «multirisques» ou
«tous risques chantier» avec des limites contractuelles très variables.
Les polices peuvent intégrer des clauses particulières telles que:
• la garantie des erreurs d’implantation par rapport aux règles d’urbanisme, aux obligations du
permis de construire, aux limites de propriété, aux
plans et documents contractuels remis à l’assuré avant démarrage des travaux;
• la garantie des dommages causés aux avoisinants: biens immobiliers qui appartiennent au
maître d’ouvrage ou à des tiers, sur lesquels le
constructeur n’intervient pas, mais qui sont situés à proximité du chantier;
• la garantie des travaux par points chauds qui
concerne les entreprises exécutant des opérations
de soudage, découpage ou autres, à la flamme.
À noter, l’article 16 de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977
sur l’architecture stipule que «tout architecte, personne physique ou morale, dont la responsabilité peut
être engagée en raison des actes qu’il accomplit à
titre professionnel ou des actes de ses préposés, doit
être couvert par une assurance». Cette obligation
couvre la responsabilité décennale de l’architecte,
ou de la société d’architecture, mais également sa
responsabilité civile de droit commun.
Une couverture modulable
Les différents contrats de la SMABTP illustrent
l’étendue de l’offre d’assurances proposée aux
constructeurs. Le contrat Pac (Police d’assurance
construction) permet aux entreprises de remplir
leur obligation de responsabilité décennale. Il
couvre également les dommages par suite d’effondrement en cours de travaux ainsi que la garantie
de bon fonctionnement. Le contrat Artec (Assurance
risques travaux des entreprises de construction)
répond aux conséquences pécuniaires de la responsabilité civile de l’entreprise lorsque celle-ci est
engagée pour des dommages causés aux tiers dans
l’exercice de son activité professionnelle déclarée.
L’assureur dispose également d’une offre combinée.
Le contrat unique CAP 2000 s’adresse aux entreprises du bâtiment et des travaux publics de 16 salariés et plus. Conçu selon le principe du «tout sauf»,
il facilite l’adaptabilité à toute obligation nouvelle:
évolution d’activité, de la loi ou jurisprudence. D’une
grande souplesse, il se décline selon différentes
formules tant en termes de montants de garantie et
franchise que de couverture variable des dommages.
Autre contrat unique : PPAB Activité réunit des
14
“Tout architecte, personne physique ou
morale, dont la responsabilité peut être
engagée en raison des actes qu’il accomplit à
titre professionnel ou des actes de ses
préposés, doit être couvert par une assurance”
Photo Monnier
1
Photo Derbigum
assurances de responsabilités et de dommages,
avec en plus une protection juridique. Il est destiné
aux artisans du bâtiment jusqu’à cinq salariés qui
interviennent aussi bien comme sous-traitant que
contractant direct auprès du maître d’ouvrage.
Élaboré en complément d’Artec ou de Cap 2000, le
contrat Astre BTP permet aux entreprises de se prémunir contre les sinistres d’ampleur exceptionnelle
sans mettre en péril leurs fonds propres. Elles peuvent
ainsi souscrire par abonnement des extensions de
garantie, en évitant tout risque d’omission, pour
répondre à des demandes spécifiques de maîtres
d’ouvrage exigeant des plafonds majorés.
Installations photovoltaïques
2
1 L’incorporation de panneaux
photovoltaïques dans les parois
peut poser des problèmes
d’étanchéité et de sécurité
incendie.
2 Des assurances permettent
de couvrir les risques de
dysfonctionnement et la perte
de recette des installations de
production d’électricité.
QUALITÉ CONSTRUCTION • N° 132 • MAI / JUIN 2012
Parallèlement, «pour accompagner les innovations
et exigences de performance énergétique élaborées
dans le cadre du Grenelle Environnement, nous avons
introduit de nouveaux contrats en concertation avec les
professionnels», indique Hervé Leblanc, responsable
du département technique de la SMABTP. Ils sont
notamment portés à travers l’offre Batinovation.
Premier volet de cette nouvelle gamme: le contrat
«Production d’électricité photovoltaïque», conçu
à la fois pour valoriser l’offre commerciale des
constructeurs et pour protéger l’investissement des
maîtres d’ouvrage futurs vendeurs d’énergie verte.
Portée par l’entreprise pour le compte de son client,
cette garantie concerne les équipements implantés
en France métropolitaine. La couverture vise les
dysfonctionnements qui rendent les installations
inaptes à leur fonction, liés à une erreur de conception, un vice de matériau ou un défaut de mise en
œuvre. L’objectif est de couvrir les frais éventuels
de dépose, repose et protection des matériels, le remplacement pouvant s’opérer par tout produit équivalent assurant la remise en marche. Elle prend également en charge les pertes de recettes résultant
des pannes. Le montant de l’indemnité est constitué par la différence de recette (montant des facturations au gestionnaire de réseau) par rapport à un
fonctionnement normal constaté ou estimé. La garantie fait l’objet d’une prime unique intégrable dans
le montant de l’investissement. La période d’assurance commence à la réception de l’installation pour
les dysfonctionnements et à la mise en service pour
les pertes de recette. Elle se termine à l’expiration
d’une durée ferme de dix ans pour les générateurs
et de cinq ans pour les autres équipements.
Deux contrats complémentaires sont proposés aux
maîtres d’ouvrage propriétaires d’une centrale
photovoltaïque. D’abord, une couverture dommages
«multirisque», qui protège contre les CAPTEURS SOLAIRES THERMIQUES
DIFFÉRENCE ENTRE SOLAR
KEYMARK ET CSTBat
Enerplan, association qui réunit les
professionnels de la filière solaire,
diffuse une note d’information sur
l’assurabilité des capteurs solaires
thermiques. Elle porte sur les deux
systèmes de reconnaissance qui
cohabitent pour ces produits: la
certification européenne Solar Keymark
et la procédure française d’Avis Technique
(ATec) délivrée sous l’égide du CSTB, avec
certification CSTBat. Dans ce dernier cas,
les installations sont couvertes
globalement, les prescriptions techniques
visant à la fois les caractéristiques des
capteurs et leurs modalités de mise en
œuvre. En revanche, Solar Keymark ne
concerne que les données liées aux
produits, sans autre référence à la
réglementation française, notamment en
termes d’exigence sanitaire, de sécurité
électrique et incendie, de résistance aux
Photo Clipsol
charges climatiques… Pour être
sélectionné dans sa marque «Ô Solaire»,
Enerplan demande que les fournisseurs
s’engagent sur la conformité de leurs
matériels. En effet, l’association attire
l’attention des professionnels sur le risque
juridique encouru en cas de sinistre. Il est
demandé que l’attestation d’assurance du
fabricant comporte une formule rédigée de
la manière suivante: «Le contrat a pour
objet de garantir sur le territoire français,
pour les seuls produits X, le coût des travaux
de réparation des dommages à l’ouvrage ou
à l’existant auxquels ont été incorporés les
produits, y compris le remplacement du
produit, lorsque l’assuré en est tenu
responsable en raison d’un vice caché du
produit ou lorsqu’il est responsable
solidairement avec l’entreprise qui a mis en
œuvre le produit en vertu des dispositions de
l’article 1792-4 du Code civil.» ■
LES DÉMARCHES CIBLÉES DES ASSUREURS
Voici une liste non exhaustive de
contrats d’assurance centrés sur la
performance énergétique.
• Axa France : l’entreprise Evasol
compte parmi les leaders en matière
d’installation de systèmes
photovoltaïques. Axa l’accompagne
dans son offre commerciale en
proposant une assurance « Garantie
de performance » qui garantit aux
maîtres d’ouvrage de percevoir au
moins 80 % de la production annoncée
pendant 10 ans. « Les clients d’Evasol
sont les premiers à bénéficier de cette
couverture innovante qui complète
l’assurance décennale », précise JeanBaptiste Crocombette, agent chargé
des relations avec l’entreprise.
• Chevreuse Courtage : cabinet
indépendant fondé en 2000,
Chevreuse Courtage s’est spécialisé
depuis son origine dans le secteur de
l’assurance construction pour les
professionnels. Attentif à l’actualité
fiscale et réglementaire, il s’est
intéressé très tôt aux énergies
renouvelables et particulièrement à
l’assurance des installations
photovoltaïques. Le cabinet a
développé ses propres produits
innovants tant en matière de
responsabilité qu’en dommage, aussi
bien pour les entreprises (fabricants
et installateurs) que pour les clients
maîtres d’ouvrage (particuliers,
agriculteurs ou industriels).
• Verspieren : le courtier en assurances
Verspieren a signé un accord de
partenariat avec CertiVéa : il s’engage
à proposer une offre de contrats
professionnels privilégiée aux
bureaux d’études certifiés
« NF Études thermiques ».
Parallèlement, il a élaboré un contrat
multirisques habitation appelé
« Batigreen, l’assurance des
bâtiments durables » pour les
propriétaires d’immeubles HQE® ou
équipés en énergies renouvelables.
Son offre comporte également les
produits suivants :
– « Eole Assur » destiné à couvrir les
parcs éoliens ;
– « Photovoltassur » dédié au
photovoltaïque, qui associe
assurance dommages, perte de
recettes et responsabilité civile ;
– « Energ’Assur » conçu sous l’égide
des installateurs de l’UECF-FFB
(Union des entreprises de génie
climatique et énergétique de France
de la Fédération française du
bâtiment), avec le soutien technique
du Costic, pour garantir les
économies d’énergie dans le cadre
de la rénovation d’une chaufferie. ■
MAI / JUIN 2012 • N° 132 • QUALITÉ CONSTRUCTION
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QUALITÉ
risques naturels (vent, foudre, grêle, neige ou glace),
mais aussi contre les dangers d’incendie, les accidents
électriques ou explosions provenant des équipements comme des bâtiments supports, à l’occasion
d’un usage normal ou lors d’opérations de maintenance. Ensuite, une assurance de responsabilité
civile en tant que producteur d’électricité: demandée par le gestionnaire du réseau de distribution
publique, elle couvre les conséquences pécuniaires
encourues du fait de l’installation, sur quelque fondement juridique que ce soit, en raison de dommages
corporels, matériels et immatériels, causés aux tiers
(avec possible atteinte à l’environnement).
Photo Jackson
3
Photo Xella
Rénovation énergétique
Deuxième volet de la gamme Batinovation: le contrat
«Réno Sûre», conçu en concertation avec les professionnels qui souhaitent proposer à leurs clients
une offre globale de rénovation avec un engagement
de performance de type changement d’étiquette ou
niveau 2 de l’éco PTZ. Outre la Dommages-Ouvrage
et la caution de bonne fin de travaux dans les délais,
souscrites au bénéfice du maître d’ouvrage, cette offre
intègre en plus une garantie «erreur thermique». Elle
repose sur la réalisation d’une étude avant et après
travaux par un BET spécialisé. Le rénovateur bénéficie ainsi d’une couverture pour l’engagement
contractuel pris envers le client. Elle peut être activée s’il est constaté à la réception des travaux que
le niveau de performance énergétique défini au
marché n’est pas atteint. En effet, les conséquences
peuvent être dommageables en terme de classe
énergétique, dans le cadre de l’affichage du DPE,
voire même de satisfaction aux conditions d’obtention d’un prêt à taux zéro éco PTZ. L’assureur peut
être amené à rembourser les frais de dépose et de
remplacement des ouvrages exécutés, avec dommages immatériels qui en résultent éventuellement.
Il peut aussi s’acquitter d’une indemnité contractuelle
en compensation du préjudice.
Autre volet de la gamme Batinovation, la garantie
spécifique dédiée aux « Pros de la performance
énergétique », marque initiée par la Fédération
française du bâtiment (FFB) et aujourd’hui gérée par
Qualibat. Objectif: accompagner la formation et la
qualification des entreprises qui se positionnent sur
le marché des travaux de rénovation énergétique.
Ce nouveau métier est expérimenté par des professionnels d’horizons divers: menuisiers, plaquistes,
plombiers, chauffagistes ou électriciens, qui peuvent
intervenir en groupement momentané formel ou
informel… Certains prennent en charge la conception et définition du programme de travaux et proposent ainsi un conseil en évaluation d’économies.
D’autres assurent le pilotage et la coordination des
diverses interventions avec suivi de chantier. Pour
couvrir ces différents risques supplémentaires, la
SMABTP apporte une solution d’assurance adaptée par extension du contrat combiné CAP 2000.
4
Photo Karawitz
5
3 Des garanties adaptées sont
proposées aux entreprises qui se
spécialisent sur le marché de la
performance et la rénovation
énergétique.
4 Test de perméabilité en
logement BBC : une bonne
étanchéité à l’air dépend d’une
prestation globale qui implique
différents intervenants.
5 Maison passive : plus les
consommations sont réduites, plus
les dérives sont visibles et
susceptibles d’être dénoncées.
Accompagner les labels
Dans la suite logique de «Réno Sûre», la SMABTP propose également un contrat «Erreur thermique BBC».
Il a été conçu pour les promoteurs et constructeurs
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QUALITÉ CONSTRUCTION • N° 132 • MAI / JUIN 2012
de maisons individuelles commercialisant des bâtiments à basse consommation labellisés BBCeffinergie® dont les performances correspondent
aux exigences de la Réglementation thermique 2012.
Les autres assureurs présents sur le marché des
professionnels de la construction s’intéressent également aux enjeux du Grenelle Environnement.
Ainsi, Axa encourage la démarche Haute qualité
environnementale (HQE®). Une réduction sur la
prime d’assurance Dommages-Ouvrage est offerte
aux maîtres d’ouvrage qui s’engagent dans cette
certification HQE®. Des garanties spécifiques sont
prévues pour favoriser les investissements en énergie photovoltaïque et éolienne. Les contrats «BTPlus»
(entreprises) et «BTPlus Concept» (maîtres d’œuvre)
sont adaptés pour accompagner les acteurs qui
formalisent une offre en matière de rénovation énergétique. «La couverture que nous proposons convient
aux préoccupations et nouveaux métiers issus du
Grenelle », précise Vincent Figarella, directeur
Construction d’Axa France. Cette démarche est illustrée par le contrat «BTPlus Spécial ÉCO Artisan®».
Initialement mise en place par la Capeb (Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du
bâtiment), cette marque aujourd’hui gérée par
Qualibat s’adresse aux artisans qui s’impliquent
dans l’amélioration de la performance énergétique
des logements. En complément des clauses traditionnelles, le contrat propose une garantie de
responsabilité civile qui s’étend aux prestations de
services spécifiques à ce type d’activité: évaluation
thermique du bâtiment, conseil global en rénovation, réalisation des travaux et contrôle de leur
qualité. Là encore, l’assureur entend prévenir toute
erreur de calcul et diagnostic préalable. Il pourrait
en découler des prestations inappropriées susceptibles de générer un préjudice pour le maître
d’ouvrage. L’amélioration de la performance énergétique constitue une intervention très technique,
il est donc préférable d’anticiper et de prendre en
compte les risques même infimes de mise en cause
des acteurs.
Nouvelle approche
liée aux bâtiments BBC
Depuis fin 2011, la RT 2012 entre progressivement
en application. Cette nouvelle réglementation change
les pratiques des professionnels. D’abord, elle nécessite une définition des objectifs d’efficacité énergétique dès le stade du projet architectural. Il est
d’ailleurs indispensable que ces données soient
bien précisées aux entreprises lors des appels
d’offres. Un récapitulatif standardisé d’étude thermique doit être établi et mis à disposition de la personne chargée d’en vérifier la conformité. Ensuite,
à l’image du label BBC-effinergie®, il faut valider
la bonne étanchéité à l’air du bâtiment. Celle-ci est
liée à un ensemble de composants d’enveloppe et
de réseaux qui impliquent autant d’intervenants: menuiseries, parois, installations d’électricité, de plomberie ou de ventilation… Les tests sont déclenchés
le plus tôt possible dans le déroulement du chantier,
en tout cas avant les phases finales de finition afin de
limiter les frais s’il s’avère nécessaire de procéder
CONFORT THERMIQUE D’ÉTÉ:
UNE GARANTIE DÉCENNALE
La décision du Conseil d’État n° 346189
(lecture du vendredi 9 décembre 2011)
sanctionne le différend qui opposait la
commune de Mouans-Sartoux (06) à son
maître d’œuvre, suite à la construction de
l’école de l’Orée du Bois, un groupe scolaire
réunissant sections maternelle et primaire.
Objet du litige jugé une première fois en
avril 2002: «l’inconfort thermique des combles
et l’insuffisante ventilation des classes», qui a
été ensuite complété par «la
surconsommation énergétique ou le léger
inconfort thermique résultant du nombre
insuffisant de réseaux de chauffage». Les
attendus des différents jugements successifs
à une dépose partielle d’ouvrage. Dans la relation
entre maître d’ouvrage et constructeurs, ces essais
instituent une nouvelle échéance préalable à la
phase de réception. Si les résultats ne sont pas à la
hauteur, elle déclenche une pause dans l’avancement
des travaux pour détecter et réparer les défauts.
«Un expert peut ainsi être désigné pour procéder à
une recherche de désordres », souligne Roland
Fauconnier, en charge du pôle «Énergie, prospective, environnement» au sein de la direction technique de la FFB. En outre, comme les équipements
thermiques sont définis en amont dans le cadre des
calculs réglementaires, le chauffagiste peut-il être
tenu pour responsable du dimensionnement des installations et donc du confort des futurs occupants?
«Dans le cadre des bâtiments BBC, la satisfaction
des exigences de performance énergétique dépend de
l’action collective des acteurs », indique Catherine
Emon, chef du service assurance de la FFB. À la lumière des régimes de responsabilité, une réflexion
a été engagée avec les assureurs pour réaliser une
cartographie des risques techniques et juridiques.
Objectif: étudier les éventuelles conditions de leur
transfert à l’assurance.
RT 2012 : un enjeu
de responsabilité décennale
«Plus les bâtiments sont économes, plus les dérives de
consommation d’énergie sont visibles et conséquentes»,
analyse Vincent Figarella d’Axa France. Dans le
cadre de la RT 2012, le seuil des 50 kWhEP/m².an
fait l’objet d’une très large publicité. Les usagers
seront ainsi en mesure de comparer leur dépense
réelle à cet objectif de performance. De nombreuses
questions se posent. S’agit-il d’un risque d’entreprise,
apportent les précisions suivantes:
• «cette élévation anormale de température
était limitée à certaines de ces salles et ne
se produisait que l’été, lorsque les
températures extérieures étaient très
élevées»;
• «dans des salles de classe de l’école
primaire, situées au premier étage, les
températures estivales sont supérieures à
celles normalement admises et peuvent
ainsi dépasser 34 degrés»;
• «que de telles températures, difficilement
supportables par de jeunes enfants, ne leur
permettent pas d’étudier normalement»;
• «que ce désordre, qui affecte l’immeuble
Pour en
savoir plus
Le CSTB propose une
formation intitulée
« L’impact du Grenelle
dans les évolutions de
l’assurance construction ».
Celle-ci a pour objectif de :
• connaître les évolutions
en cours depuis la
réforme du 8 juin 2005,
notamment au regard du
Grenelle ;
• faire un point sur les
pratiques actuelles du
marché de l’assurance
construction et les
principales évolutions
jurisprudentielles ;
• analyser les nouveaux
besoins et identifier
les solutions à mettre
en œuvre.
Pour en savoir plus :
http://formation.cstb.fr
(3) Voir dans la rubrique
«Juridique» de ce numéro,
l’article «Rénovation
énergétique et responsabilité
décennale», en page 18.
pendant des périodes où les enfants sont
scolarisés, est de nature à le rendre
impropre à sa destination»;
• «que […] cette élévation anormale de
température résulte d’une mauvaise
conception du bâtiment et, en particulier, de
la toiture, qui est imputable au maître
d’œuvre».
La décision du Conseil d’État a finalement
engagé la responsabilité décennale de
l’architecte «du fait de la surchauffe des salles
de classe de l’étage». Les circonstances
hivernales de surconsommation
énergétique et d’inconfort thermique n’ont
pas été retenues. ■
d’un engagement contractuel couvert par la responsabilité civile? Le non-respect des exigences
rentre-t-il dans le cadre de la responsabilité
décennale sous le prétexte que la construction
pourrait ainsi être considérée comme «impropre
à sa destination»? Par ailleurs, quel est l’impact
de la maintenance, du bon réglage et entretien
des installations d’éclairage, de chauffage, production d’eau chaude ou ventilation? L’habitant, ou
un quelconque intervenant ultérieur, n’a-t-il pas
porté atteinte aux qualités de l’ouvrage livré?
«La réglementation thermique définit un mode de
calcul conventionnel, c’est-à-dire reposant sur des
hypothèses standardisées notamment en ce qui
concerne le comportement des occupants», rappelle
Stéphane Pénet, directeur des assurances de biens
et de responsabilité à la Fédération française des
sociétés d’assurance (FFSA). En vérité, les consommateurs connaissent déjà ce principe d’appréciation.
Par exemple, les automobilistes savent que la
consommation des véhicules dépend bien à la fois
de la route et du mode de conduite. Cette même
logique doit être appliquée au mode d’occupation
des bâtiments. Les dépenses d’énergie ne découlent
pas seulement de la qualité intrinsèque du bâti et
des équipements techniques.
Il est encore trop tôt pour appréhender toutes les
conséquences juridiques et assurantielles du
Grenelle Environnement. Les professionnels sont
particulièrement attentifs à ce sujet (3). Justement,
en décembre 2011, une décision du Conseil d’État
a engagé après une dizaine d’années de procédure
la responsabilité décennale d’un architecte pour
défaut de confort thermique dans une école (voir
encadré ci-dessus). ■
MAI / JUIN 2012 • N° 132 • QUALITÉ CONSTRUCTION
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