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LA GESTION DURABLE DU PATRIMOINE ARBORÉ
D’UNE COMMUNE
Jean-Michel Pichard
service des espaces verts d’Alençon
La gestion durable des arbres dans la ville ou une commune
n’a pas le même sens qu’à l’extérieur de la cité. L’habitat ou
les conditions de vie y sont plus difficiles :
• Pollution de l’air
• Compacité des sols
• Agression de toutes sortes :
- parasites, (insectes, champignons, mais aussi oiseaux),
- taille en tout genre : de mise au gabarit (routier et
réseaux), de complaisance, sanitaire ou de sécurité,
- accidents routiers,
- travaux en sous-sol,
- blessures gratuites.
Le défi pour les collectivités et leurs décideurs est donc de
pouvoir végétaliser leur territoire en connaissance de tous ces
facteurs. L’apparition de la graphiose de l’orme a transformé
le paysage dans le nord de la France mais aussi dans notre
bocage. À partir de ce phénomène, les collectivités ont perçu
le danger lorsqu’un genre d’arbre domine dans le paysage.
Ainsi, à partir des années 1975-1980, bon nombre d’entre elles
ont entrepris de faire un inventaire du patrimoine arboré.
Sur le territoire d’Alençon, c’est à partir des années 1990
que le service des espaces verts a établi sa carte des espèces.
Après plus d’un an et demi de recensement entre les parcs,
jardins, aménagements de zones urbanisées, et les rues et
avenues, le résultat est le suivant :
- Sur 12 000 sujets, 10 000 sont des feuillus, les 2 000 autres
étant des conifères.
- Sur les feuillus, 3 genres se détachent : Acer (érables), Tilia
(tilleuls) et Populus (peupliers).
Le recensement a donc orienté le choix des nouvelles plantations afin de diversifier la population végétale et éviter le
risque de voir disparaître 20 % des arbres en cas d’une attaque
parasitaire. Dans un même temps, la politique de la collectivité a été d’établir un plan de plantation pluriannuel sur les
avenues et rues de la ville, plan mis en place avec l’aide d’un
cabinet d’urbanisme. Nous nous approchions du sommet de
Rio (3-14 juin 1992), mais déjà la notion de durable s’introduisait dans la ville !
Le projet de végétaliser les voies a obligé le service espaces
verts à établir des conventions avec les différents concessionnaires (EDF, GDF, France Télécom, Lyonnaise des Eaux...)
Des critères sont définis : volume des fosses, mélanges
terreux, protection des réseaux, distances minimales, déclarations de travaux à proximité des arbres, et un barème pour
dégradations d’arbres est adopté par le conseil municipal.
Dans cet espace, l’arbre, en plus du symbole de fraternité,
de liberté, a la capacité de structurer la ville. Il n’y a pas que
les parcs et jardins pour laisser les arbres évoluer : imaginez
les grandes artères ou pénétrantes routières sans la moindre
présence végétale !
En plus de cet effet structurant, l’arbre est un fixateur de
carbone et là, nous nous rapprochons des nouvelles notions
de développement durable. L’arbre a pour effet de diminuer
l’impact carbone ou polluant de l’activité urbaine.
À cela s’ajoute son influence climatique, non pas à l’échelle
planétaire, mais plus simplement au niveau de quartiers.
En effet, de récentes études ont démontré qu’il existait des
écarts de température entre des quartiers urbanisés avec le
même type d’habitat mais avec ou sans arbres ; ces derniers
agissent contre la réverbération.
Cet écart peut être de 2 °C en moyenne dans les secteurs
plantés. Or, 2 petits degrés, cela ne paraît pas grand chose
mais ferait baisser de 20 % la mortalité humaine en période
caniculaire !
Evolution du nombre d’arbres (1991 - 2004)
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dant des difficultés apparaissent, car quelques manquements
ou dysfonctionnements ont été commis ou non appréciés
lors des projets :
- Retard dans les programmes d’effacement de réseaux
- Plantations avant le réaménagement des voiries
(problème de niveau)
- Difficultés d’applications des techniques de plantations
- Pas de projections du type d’entretien dans le temps
(coût d’entretien, cohabitation difficile entre riverains et
arbres...)
- Abattage de sélection difficile à mettre en place
Au final, entre 1990 et 2007, 2 500 arbres d’alignement bourgeonnent sur les trottoirs d’Alençon. Cela représente l’équivalent d’un bois ou d’une parcelle de forêt d’un peu moins
de 12 hectares, soit un peu plus de 10% de la superficie alençonnaise. La volonté de diversification est aussi marquée, le
panel d’espèces étant de 45 parmi 25 genres différents.
De son côté, le personnel de la collectivité s’efforce d’entretenir au mieux ce capital vert. La taille douce, dite à l’anglaise, est le plus souvent utilisée. Les tailles strictes ne sont
réservées qu’aux arbres malades ou à ceux pour lesquels une
taille architecturée est retenue (rideau tête de chat), modèle
qui a ses adeptes et ses détracteurs...
Par ailleurs, l’utilisation des pesticides est petit à petit proscrite. Les agents du S.E.V. perçoivent tout à fait l’intérêt de
ce choix et en sont souvent les demandeurs :
- Moins ou zéro désherbant anti-germinatif
- Utilisation de paillage
- Désherbage thermique
- Plantations de plantes tapissantes (vivaces, arbustes)
Ces méthodes douces au pied des arbres s’accompagnent de
gestes aussi raisonnés sur la partie aérienne. Ainsi, depuis
deux ans, le service utilise les insectes auxiliaires et les
phéromones pour lutter contre certains parasites.
Aujourd’hui, la gestion de ces nouveaux arbres n’est pas
encore totalement intégrée. Le challenge pour le service est
d’établir un véritable plan de gestion pour les
12 000 sujets. Ce document se devra d’être le plus pertinent
possible et devra intégrer deux grands chapitres :
• Quel arbre pour quel espace ?
• Quel entretien ?
Ce document adaptable en chartre pourrait être un aboutissement pour :
- Protéger les arbres de la ville
- Bien concevoir les nouveaux aménagements
- Informer et sensibiliser les habitants
La photographie de ce projet semble presque parfaite. Cepen-
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