« Moi, je suis venu pour qu`on ait la vie et qu`on l`ait surabondante. »
Transcription
« Moi, je suis venu pour qu`on ait la vie et qu`on l`ait surabondante. »
Homélie de Monseigneur Gérald Cyprien Lacroix Archevêque de Québec Primat du Canada aux funérailles de L’ABBÉ JEAN-YVES GAGNON Église Notre-Dame, Paroisse St-Joseph de Lévis, Lévis, Québec, 12 novembre 2011 « Moi, je suis venu pour qu’on ait la vie et qu’on l’ait surabondante. » Très chers frères et sœurs, Nos mots humains s’avèrent assez limités dans de pareilles circonstances. C’est pourquoi nous laissons une large place à la Parole de Dieu. Elle vient à notre secours ; elle oriente notre regard et console notre cœur. L’apôtre Pierre, témoin oculaire des événements de la vie de Jésus, écrit dans sa première lettre : « Béni soit Dieu, le Père de Jésus Christ notre Seigneur : dans sa grande miséricorde, il nous a fait renaître grâce à la résurrection de Jésus Christ pour une vivante espérance, pour l’héritage qui ne connaîtra ni destruction, ni souillure, ni vieillissement ». Mes amis, après avoir dit cela, j’ai l’impression d’avoir tout dit. Car ce que nous célébrons ici aujourd’hui à l’occasion du décès de notre ami, l’abbé Jean-Yves, prend tout son sens dans la mort et la résurrection du Christ. C’est l’événement fondateur du christianisme qui dissipe les ténèbres sur le Golgotha, le Vendredi Saint. C’est la puissance de sa résurrection qui nous soutient encore aujourd’hui. Elle nous permet d’élever notre regard et de voir plus loin que la mort, la séparation et la tristesse d’un décès. La foi n’enlève pas la douleur de la mort, ne maquille pas les sentiments et la peine devant le départ d’un être cher, mais elle nous permet de voir la promesse de vie qu’elle contient. 2 Dans sa très belle Encyclique sur l’espérance chrétienne, le pape Benoît XVI écrit : Dans l'espérance nous avons été sauvés, dit saint Paul aux Romains et à nous aussi (Rm 8, 24). Selon la foi chrétienne, la « rédemption », le salut n'est pas un simple donné de fait. La rédemption nous est offerte en ce sens que nous a été donnée l'espérance, une espérance fiable, en vertu de laquelle nous pouvons affronter notre présent : le présent, même un présent pénible, peut être vécu et accepté s'il conduit vers un terme et si nous pouvons être sûrs de ce terme, si ce terme est si grand qu'il peut justifier les efforts du chemin (Spe salvi, 30 novembre 2007, no 1). C’est cette qualité de foi et d’espérance qui a permis à l’abbé Jean-Yves de vivre toute sa vie, d’affronter avec courage cette dernière étape, marquée par la maladie qui l’a conduit à la mort. Il répétait souvent une phrase qui étonnait parfois ses visiteurs : « Je Lui ai tout offert et donné depuis longtemps, et je continue à Lui remettre toute ma vie jusqu`à la fin, je suis en paix et serein ». Sans la foi, impossible de vivre habité par cette paix et cette sérénité devant la mort. En voyant se dérouler notre vie, nous nous rendons surtout compte que nous avons besoin d'une espérance fiable, et que celle-ci ne se trouve que dans le Christ Jésus. Il embrasse toutes les dimensions du temps, parce qu'il est mort et ressuscité ; il est « le Vivant ». Tandis qu'il partage notre précarité humaine, il demeure pour toujours et nous offre la stabilité même de Dieu. Il est « chair » comme nous et il est « roc » comme Dieu. Jean-Yves voulait qu’à ses funérailles soit proclamé le texte de l’Évangile selon saint Jean que nous venons d’entendre. Cette Parole de Dieu exprime avec beaucoup d’éloquence ce qu’est un pasteur qui veut vivre selon le cœur de Dieu ; un homme qui, comme le Seigneur, veut partager la vie en abondance avec chaque personne. Notre ami Jean-Yves a certainement médité à plusieurs reprises cette page d’Évangile. D’ailleurs, il n’est pas surprenant que tant de personnes reconnaissent en lui un prêtre donné, livré, d’une profondeur remarquable, un passionné de Dieu, un homme en service, désireux de conduire ses frères et sœurs à la Source de la vie. Quelqu’un me disait avant les funérailles : «Il avait du plaisir à être prêtre. » Un confrère prêtre m’avouait ce matin, « Sa vie n’était pas embrouillée. Elle était claire ! » Pour nous, prêtres, diacres, évêques, voir partir un confrère si jeune nous touche beaucoup. Je vous avoue que ma peine est grande de voir un homme de sa trempe nous quitter si rapidement. Notre Église a tant besoin de pasteurs qui se donnent, se livrent et aiment le Peuple de Dieu au point d’en faire leur seule raison d’être. L’exemple de Jésus continue de nous interpeller : « Je suis le bon pasteur; le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis ». Chers frères et sœurs, vous qui êtes venus aujourd’hui prier avec nous, intercédez auprès du Seigneur afin qu’il appelle encore des jeunes qui seront généreux et prêts à donner leur vie. Le Seigneur Jésus nous le rappelle : « J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cet enclos; celles-là aussi, il faut que je les mène ». Nous aussi, pasteurs de l’Église de Québec, avons à vivre de cette « espérance fiable », que Dieu prend soin de son Peuple et qu’il nous donnera les ouvriers dont nous avons besoin. 3 En poursuivant notre célébration, laissons monter notre prière d’action de grâce au Seigneur pour la vie de notre frère et ami, l’abbé Jean-Yves. À travers ses années de ministère, il a touché un grand nombre de personnes. Par sa prédication, les célébrations qu’il présidait, les gens qu’il accueillait et accompagnait, il a fait route avec le Peuple de Dieu et l’a nourri avec générosité. Demandons au Seigneur d’accueillir notre frère dans la Ville Habitable, la Jérusalem céleste. Nous savons que le Seigneur nous prépare une table où, un jour, nous serons ses invités d’honneur. Mais demandons aussi au Seigneur dans notre prière commune qu’il nous garde fidèle et généreux tout au long de notre pèlerinage terrestre. Marchons en sa présence et laissons-nous guider par le Bon Pasteur, lui qui a dit : « Moi, je suis venu pour qu’on ait la vie et qu’on l’ait surabondante ».