LES VINS BLANCS DE LOIRE MARCHES
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LES VINS BLANCS DE LOIRE MARCHES
COLLOQUE VITICOLE ET OENOLOGIQUE Dans le cadre du 27ème Salon SIVAL Parc des Expositions ANGERS - France LES VINS BLANCS DE LOIRE MARCHES, OPTIMISATION AROMATIQUE ET ITINERAIRES D’ELABORATION Mercredi 16 janvier 2013 1 2 Colloque Viticole et Œnologique 16 janvier 2013 Parc des Expositions d’Angers Dans le cadre du 27ème Salon SIVAL 2013 Organisation et Renseignements : Institut Français de la Vigne et du Vin Pôle Val de Loire-Centre 42 rue Georges Morel - BP 60057 49071 BEAUCOUZE CEDEX Tél : +33 (0)2 41 39 98 55 Fax : +33 (0)2 41 22 56 76 www.vignevin.com Mail : [email protected] Angers Expo Congrès Parc des Expositions Route de Paris 49044 ANGERS CEDEX 01 Tél : +33 (0)2 41 93 40 40 Fax : +33 (0)2 41 93 40 50 Mail : [email protected] 3 Les vins blancs de Loire Marchés, optimisation aromatique et itinéraires d’élaboration Contexte, techniques et approches économiques Le Val de Loire, 3ième vignoble d’appellation, est le premier producteur de vins blancs d’appellation avec 1,1 millions d’hectolitresreprésentant 43 % de sa production totale de vins d’appellation. Derrière ces chiffres, les Appellations présentent des produits diversifiés et des dynamiques de production et de commercialisation différentes, contribuant ainsi à la grande notoriété du vignoble du Val de Loire. Cette édition 2013 du colloque Euroviti, organisé par l’Institut Français de la Vigne et du Vin (IFV) dans le cadre du SIVAL, abordera les aspects économiques et techniques de cette production de vins blancs d’appellation. La première partie de la conférence sera ainsi consacrée à la présentation des chiffres clés de la production et de la commercialisation, avec un focus sur la place des vins blancs de Loire sur le marché anglais. Le colloque se poursuivra ensuite sur les aspects techniques de la production des vins blancs de melon, chenin et sauvignon, en insistant notamment sur la gestion de la qualité aromatique et en abordant différents itinéraires d’élaboration en fonction du style de produit recherché. Ce colloque Euroviti, rendez-vous habituel du début d’année proposé par l’IFV et le SIVAL, sera donc l’occasion d’échanger entre acteurs de la filière viticole autour de la commercialisation des vins blancs secs de Loire et de leurs itinéraires de vinification. 4 PRÉSENTATION GÉNÉRALE ------------------------------------------------------------------------------- 9 h 00- 13 h 00 Les vins blancs de Loire Marchés, optimisation aromatique et itinéraires d’élaboration Animation : Remi Guérin-Schneider, IFV 09h00 : Accueil 09h30 : Introduction: Jean-Martin Dutour, Président d’InterLoire 09h40 : Marchés des vins blancs de Loire Quelle place pour les vins blancs de Loire dans le marché national et international ? Parts de marché, positionnement prix, concurrence, tendances de consommation, évolutions. (Fanny Gillet, InterLoire) Evolution et tendance du marché des vins blancs au Royaume Uni, place des vins de Loire. (Jean-Philippe Perrouty, Wine intelligence France) Questions : 10 mn 10h35 : Maitrise de la qualité aromatique des vins blancs Traitement préfermentaire des moûts et qualité aromatique des vins blancs, cas des cépages melon B et sauvignon en Val de Loire (Frédéric Charrier, IFV et Pascal Poupault, IFV) Nutrition azotée et levure : un levier pour piloter les profils (Remi Guérin-Schneider, IFV) -------------------------------------------------------------------------------- 11h00 : PAUSE Apports de la thermovinification sur l’expression aromatique des vins blancs (Laurence Guerin, IFV) Questions : 10mn 12h00 : Itinéraires d’élaboration des vins blancs Optimiser l’élaboration des vins blancs secs de chenin en Val de Loire (Philippe Chrétien, IFV) Comparaison de deux itinéraires d’élaboration de vins de sauvignon. Evaluation technicoéconomique. (Joëlle Beguin, IFV) Mise en bouteille et conservation. (Remi Guérin-Schneider, IFV) Questions : 10mn 13h00 fin du colloque 5 SOMMAIRE Les vins blancs de Loire Marchés, optimisation aromatique et itinéraires d’élaboration Introduction Jean-Martin Dutour, Président d’InterLoire o P: 7 Marchés des vins blancs de Loire Quelle place pour les vins blancs de Loire dans le marché national et international ? Parts de marché, positionnement prix, concurrence, tendances de consommation, évolutions Fanny Gillet, InterLoire P: 9 Evolution et tendance du marché des vins blancs au Royaume Uni, place des vins de Loire Jean-Philippe Perrouty, Wine intelligence France o P : 17 Maitrise de la qualité aromatique des vins blancs Traitement préfermentaire des moûts et qualité aromatique des vins blancs, cas des cépages melon B et sauvignon en Val de Loire Frédéric Charrier, IFV et Pascal Poupault, IFV P : 19 Nutrition azotée et levure : un levier pour piloter les profils Remi Guérin-Schneider, IFV P : 23 Apports de la thermovinification sur l’expression aromatique des vins blancs Laurence Guerin, IFV o P : 28 Itinéraires d’élaboration des vins blancs Optimiser l’élaboration des vins blancs secs de chenin en Val de Loire Philippe Chrétien, IFV P : 34 Comparaison de deux itinéraires d’élaboration de vins de sauvignon. Evaluation technicoéconomique. Joëlle Beguin, IFV P : 39 Mise en bouteille et conservation Remi Guérin-Schneider, IFV P : 46 6 INTRODUCTION JEAN-MARTIN DUTOUR PRESIDENT D’INTERLOIRE 7 LES VINS BLANCS DE LOIRE MARCHES, OPTIMISATION AROMATIQUE ET ITINERAIRES D’ELABORATION 8 Quelle place pour les vins blancs de Loire dans le marché national et international ? Parts de marché, positionnement prix, concurrence, tendance de consommation, évolution. Fanny Gillet, Responsable du service Economie et Etudes d’InterLoire 12 rue Etienne Pallu BP 61921 37019 TOURS cedex 1 Tél : 02.47.60.55.08 Mail : [email protected] www.vinsdeloire.fr Résumé : Le Val de Loire, 3ème vignoble d’appellation, est le premier producteur français de vins blancs d’appellation. La France concentre les ¾ des ventes. En particulier, en grande distribution, les vins blancs de Loire sont leaders avec 31% de parts de marché volume au sein des AOP blancs en 2012. La consommation de vin est de plus en plus occasionnelle et privilégie la qualité ; elle est stable pour les blancs. Le vin se consomme principalement pour les grandes occasions et au cours de diners ou déjeuners entre amis ou en famille. Les vins blancs d’appellation, à l’image des vins tranquilles dans leur ensemble, sont consommés essentiellement par les personnes de plus de 50 ans. Les moins de 35 ans, les plus aisés, les Franciliens et les habitants de l’Est de la France sur-consomment les vins blancs d’appellation. A l’export, les vins blancs de Loire détiennent 21% de parts de marché volume au sein des AOP blancs. Après plusieurs années de recul, les vins blancs de Loire retrouvent en 2012 le chemin de la croissance au Royaume-Uni et en Belgique. Le marché nord-américain a plus que doublé sa demande en vins blancs de Loire en 5 ans. Les concurrents n°1 des vins blancs de Loire sont eux-mêmes, notamment en France. L’univers de concurrence secondaire renferme les autres vins blancs français d’appellation. En entrée de gamme du marché, les IGP et les vins sans IG sont dominateurs. Mots clés : France, export, consommation, blanc, Loire 9 Introduction Le Val de Loire, 3ème vignoble d’appellation, est le premier producteur français de vins blancs d’appellation. Les différentes appellations, toutes monocépages, présentent des produits diversifiés, d’un point de vue organoleptique, mais également au niveau de leur commercialisation (marchés, circuits, positionnement prix), contribuant ainsi à la richesse du vignoble. L’analyse du marché des vins blancs de Loire traitera du poids du vignoble en France et à l’export, de sa consommation, de sa concurrence et dégagera les tendances observées sur les 10 dernières années. Quelles sont les parts de marché volume des vins blancs de Loire ? Au sein du vignoble de Loire : En 10 ans, la récolte de vins blancs d’appellation de Loire s’est amoindrie de 30%, passant de 1,5 million d’hectolitres à un peu plus de 1 million. La réduction du vignoble nantais explique cette évolution. Toutefois, la production de vins blancs reste dominante dansle vignoble. 52% 44% 43% en 2002 en 2007 en 2011 (Poids des vins blancs au sein des volumes récoltés des vins de Loire) 10 appellations représentent plus de 90% des volumes de production de vins blancs (en 2002 comme en 2011). 2002 2007 2011 Evolution des volumes Muscadet 51% 47% 42% Sancerre 8% 12% 13% Touraine 8% 9% 11% Pouilly-Fumé 4% 6% 7% Coteaux du Layon 4% 3% 5% Vouvray 4% 4% 4% Gros Plant 10% 7% 4% Anjou 3% 2% 2% Menetou Salon 1% 1% 2% Saumur 2% 1% 2% + = + = + = Les 10 principales appellations de vins blancs de Loire produites : l’évolution de leurs parts de marché volume 10 En France : Les ¾ des volumes commercialisés le sont en France, principalement dans les hypermarchés et supermarchés et en restauration. estimations d'InterLoire * ventes au domaine, cavistes, hard discount, supérettes, etc. Les circuits de distribution des vins blancs de Loire d'appellation (campagne 2011-2012) En grande distribution, les vins blancs de Loire sont leaders avec 31% de parts de marché volume au sein des AOP en 2012 (23% en valeur). 38% 36% 31% en 2003 en 2008 en 2012 (Poids des vins blancs de Loire au sein des ventes en volumes en grande distribution des AOP blancs) Plus spécifiquement, le muscadet est leader des appellations de vin blanc dans les tranches de prix inférieures à 4€ le col. InterLoire ne dispose pas d’infos chiffrées précises sur les autres circuits en France. A l’étranger : Environ ¼ des volumes commercialisés est exporté. Les blancs représentent 59% des vins de Loire exportés, couleur dominée par sancerre, muscadet, pouilly-fumé, touraine et vouvray. Au sein des appellations françaises de vins blancs, le vignoble de Loire, 2ème en volume derrière la Bourgogne, détient 21% de parts de marché. 21% 19% 21% en 2003 en 2008 en 2012 (Poids des vins blancs de Loire au sein des exportations en volumes des AOP blancs) 11 Rang Pays 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Royaume-Uni Etats-Unis Belgique Canada Allemagne Pays-Bas Japon Australie Danemark Irlande Top 10 Top 140 Répartition des volumes Parts de marché volume au sein des AOP blancs 26% 23% 12% 7% 7% 6% 4% 2% 2% 2% 90% 100% 26% 32% 20% 25% 21% 17% 12% 42% 14% 23% 23% 21% Les 10 principales destinations pour les vins blancs de Loire à l'export en 2012 et la part de marché des vins de Loire au sein des appellations françaises de vins blancs Cette part de marché est supérieure dans les pays anglo-saxons tels que le Royaume-Uni, les Etats-Unis, le Canada, l’Australie (où les vins de Loire sont leaders des appellations) et l’Irlande. Qui sont les consommateurs des vins blancs de Loire ? Qui consomme des vins blancs d’appellation en France ? o 53% des ménages français achètent des vins blancs d’appellation pour leur consommation à domicile (en grande surface, dans un magasin de proximité, chez un caviste, au domaine…) o Ils en achètent en moyenne 4 fois par an. o Un peu plus de 8 bouteilles est acheté en moyenne chaque année par un ménage français. o 65% des volumes sont achetés par des femmes. o Comme pour les vins tranquilles, les 2/3 de la consommation se font par des personnes de plus de 50 ans. En particulier, 6 bouteilles sur 10 sont consommées par des retraités. o Les différences significatives entre les consommateurs de vins tranquilles et les consommateurs de vins blancs d’appellation sont au niveau : Des moins de 35 ans, sur-consommateurs de vins blancs d’appellation. De plus, ce sont eux qui achètent le plus cher leurs vins blancs d’appellation. Des catégories socio-professionnelles les plus favorisées (professions intellectuelles supérieures, cadres…) qui consomment plus de vins blancs d’appellation que la moyenne. Des Franciliens et des habitants de l’Est de la France qui sur-consomment les vins blancs d’appellation. Quels sont les profils des consommateurs de vins blancs d’appellation de Loire ? o 16% des ménages français ont acheté des vins blancs de Loire à moins de 3€ le col, soit 4 200 000 ménages environ. o Les vins blancs de Loire vendus entre 3€ et 5€ ont été achetés par 2 400 000 ménages en 2011. o 1 300 000 ménages se sont procurés des blancs de Loire à plus de 5€. o Les consommateurs de vins blancs de Loire vendus à moins de 3€ sont, comparativement aux consommateurs de vins blancs d’appellation: 12 o Moins aisés, Plus ruraux, Plus résidants de l’ouest de la France. Les consommateurs de vins blancs de Loire vendus à plus de 3€ sont, comparativement aux consommateurs de vins blancs d’appellation: Plus aisés, Plus urbains, Plus résidants de l’ouest de la France, mais également de la région parisienne et du centre-ouest de la France, Surconsommateurs du coté des retraités et les cadres, Surconsommateurs du coté des plus de 65 ans mais également des moins de 35 ans. Le muscadet est l’appellation de Loire la plus consommée en France (1/3 des consommateurs en 2010). En parallèle, son taux de notoriété est l’un des plus élevés de France. Quelles sont les tendances de consommation en France ? La consommation de vin a baissé de 15% en 10 ans, ce qui représente 15 bouteilles par an et par habitant en moins. En 2010, chaque Français a consommé en moyenne 60 bouteilles de vin. Près de 4 Français sur 10 ne consomment pas de vin. La consommation de vin est de plus en plus occasionnelle et privilégie la qualité. Elle a lieu le plus souvent le week end. Consommateurs réguliers Consommateurs occasionnels fréquents Consommateurs occasionnels rares Non consommateurs 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010 51 42 30 28 24 21 17 11 12 12 17 18 16 17 19 21 25 24 26 25 28 19 26 33 31 33 38 38 Evolution de la fréquence individuelle de consommation du vin en France 13 Pour 60% des Français, le vin se consomme pour les grandes occasions. Le vin est davantage consommé au cours de diners/déjeuners entre amis ou en famille qu’au cours de repas ordinaires. Les Français sont de moins en moins attirés par les vins rouges et la quantité consommée baisse (mais le rouge reste la couleur la plus consommée en France). Les rosés recrutent des consommateurs ; la consommation de blancs est stable. En grande distribution, les ventes de vins tranquilles à plus de 5€ le col se développent. La moitié des volumes vendus le sont à moins de 3€ le col ; elles se tassent. Le Bag-in-Box® séduit de plus en plus de consommateurs ; le nombre de références augmente. Le parc des cavistes grandit. En 2010, un ménage sur 4 a fréquenté le réseau, plébiscité pour le choix des vins et les conseils dans l’acte d’achat. En 2010, 4 ménages sur 10 ont acheté du vin dans les domaines viticoles. Les éléments forts de la fréquentation des caves sont la connaissance des vins et les explications qui peuvent être apportées, le contact avec le producteur et la possibilité de déguster. Au restaurant, les vins au verre sont de plus en plus proposés. Le concept des bars à vin prend de l’ampleur avec une clientèle plutôt féminine en recherche de lieux plus conviviaux que les bars et restaurants, de vins de qualité, sortants des sentiers battus. Dans quels pays la demande pour les blancs de Loire est soutenue? 2 bouteilles de vin blanc de Loire sur 3 passant la frontière sont à destination du Royaume-Uni, des EtatsUnis et de la Belgique. Après plusieurs années de recul, les vins blancs de Loire retrouvent en 2012 le chemin de la croissance au Royaume-Uni et en Belgique. Le marché nord-américain a plus que doublé sa demande en vins blancs de Loire en 5 ans. tendance 2012: +12% tendance 2012: +8% 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 USA 39 729 37 046 36 884 41 126 43 083 47 755 42 561 48 820 46 404 51 698 Canada 16 536 11 522 12 718 10 032 13 258 13 657 15 738 17 055 13 724 16 099 Evolution des exportations des vins blancs de Loire en volume vers les USA et le Canada 14 Les exportations vers le Japon ont également doublé en 5 ans. Avec des volumes moindres, la demande augmente en Australie, au Danemark, aux Pays-Bas, aux Emirats Arabes Unis, en Irlande, en Norvège, en Suède et en Suisse. Quelle est la concurrence des vins blancs de Loire ? En grande distribution : o Pour les bouteilles de moins de 2,50€, les vins IGP et sans IG dominent le marché. Il s’agit de l’univers de concurrence de certains muscadets et gros-plants. o Au-delà de 2,50€le col, les concurrents sont des vins d’appellation. A moins de 4€, les vins de Loire dominent, au-delà, ce sont les alsaces et les bourgognes. o Au Royaume-Uni, pour le touraine, les sauvignons néo-zélandais, leaders du marché, sont les concurrents n°1. De manière générale, les autres vignobles français d’appellation concurrencent les vins de Loire (Alsace, Bordeaux, Bourgogne dont Chablis). La concurrence n°1 est à l’intérieur du bassin viticole ligérien, entre appellations. Conclusion Ce qu’il faut retenir : Le vignoble de Loire est, en volume, pour ses vins blancs d’appellation : N°1 en France par sa production, N°1 en grande distribution française, N°2 à l’export Son poids le rend incontournable sur les marchés majeurs et matures en France et à l’export. Et après ? En France, les consommateurs sont en recherche de contact et de proximité pour se réassurer dans l’univers complexe du vin. Le vin, consommé de plus en plus occasionnellement, est source de convivialité et le vignoble de Loire a des atouts à mettre en avant dans ce contexte là, pour des moments de consommation désacralisés. La croissance du réseau des cavistes, l’apparition récente du concept de bars à vins et la structuration de l’oenotourisme ont un lien. De plus, les consommateurs sont en recherche de qualité et de vins les valorisant, notamment chez les plus jeunes qui surconsomment les vins blancs d’appellation par rapport à leurs ainés. Les ventes des vins tranquilles à plus de 5€ en grande distribution se développent au détriment des entrées de gamme. A l’export, 4 marchés sont incontournables pour les vins blancs de Loire : les Etats-Unis et le Canada où la demande ne cesse d’augmenter, le Royaume-Uni et la Belgique, marchés historiques du vignoble, respectivement n°1 et n°3 en volume, sur lesquels les exportations repartent à la hausse en 2012. Références bibliographiques Sources des données disponibles à InterLoire : Douanes françaises pour la production et le commerce extérieur SymphonyIRIGroup pour la grande distribution (panels de distributeurs) KantarWorldpanel pour la consommation à domicile (panels de consommateurs) FranceAgrimer pour les tendances de consommation en France (étude quinquennale de la consommation de vin en France) Etudes menées par InterLoire : « Etude d’image des vins de Loire en France » (Audirep, 2010) « Baromètre de notoriété en France » (IPSOS, 2006) 15 « Bars à vins français : état d’esprit, activité, perspectives et perception des vins de Loire » (IPSOS, 2012, pour le compte du Salon des vins de Loire) Illustrations Tab 1 : Les 10 principales appellations de vins blancs de Loire produites : l’évolution de leurs parts de marché volume Graphe 1 : Les circuits de distribution des vins blancs de Loire d'appellation (campagne 2011-2012) Tab 2 : Les 10 principales destinations pour les vins blancs de Loire à l'export en 2012 et la part de marché des vins de Loire au sein des appellations françaises de vins blancs Graphe 2 : Evolution de la fréquence individuelle de consommation du vin en France Graphe 3 : Evolution des exportations des vins blancs de Loire en volume vers les USA et le Canada 16 Evolution et tendance du marché des vins blancs au Royaume Uni, place des vins de Loire Jean-Philippe PERROUTY Wine Intelligence France Voir diaporama de présentation 17 MAITRISE DE LA QUALITE AROMATIQUE DES VINS BLANCS 18 Maitrise de la qualité aromatique des vins blancs Traitement préfermentaire des moûts et qualité aromatique des vins blancs, cas des cépages melon B. et sauvignon en Val de Loire Frédéric CHARRIER1, Pascal POUPAULT2, Bertrand Daulny3, Rémi Guérin-Schneider4 et Aurélie Roland5 1 Institut Français de la Vigne et du Vin, Château de la Frémoire, 44 120 Vertou Institut Français de la Vigne et du Vin, 46 avenue Gustave Eiffel, 37 100 Tours 3 Sicavac, 8 route de Chavignol, 18 300 Sancerre 4 Institut Français de la Vigne et du Vin et UMT Qualinov, 2 place Viala, 34 060 Montpellier 5 Nyséos, 2 place Viala, 34 060 Montpellier 2 Mots clé : Sauvignon blanc, Melon B., traitement pré-fermentaire, thiols variétaux, arômes Le Sauvignon B. et le Melon B. sont deux cépages dont les vins contiennent des thiols variétaux (Peyros des Gachons, 2000 ; Tominagaet al., 2000 ; Schneider, 2001). Ces composés sont caractéristiques de l’arôme des vins du premier, contribuent significativement à la complexité de celui du second. Il s’agit du 3-mercaptohexanol (3MH) et de son acétate (3MHA) aux odeurs d’agrumes et de fruits exotiques. Un troisième composé, la 4-méthyl-4-mercaptopentanone (4MMP) à l’odeur de buis, participe également fortement à l’arôme des vins de Sauvignon. Tous sont générés dans le vin par l’activité enzymatique de la levure durant la fermentation alcoolique à partir de précurseurs présents dans les moûts sous forme de S-conjugués à la cystéine (Cys3MH et Cys4MMP) ou au glutathion (G3MH et G4MMP). Outre les facteurs liés à l’activité fermentaire proprement dite, (souche de levure, nutrition azotée, température, …), le déroulement des opérations pré-fermentaires sont susceptibles d’influer au final sur les teneurs en ces composés et donc l’expression olfactive des vins. La macération pelliculaire La quantité de précurseurs de thiols variétaux dans la baie de raisins diffère entre les cépages Melon B. et Sauvignon B. Mais dans les deux cas, ils sont majoritairement localisés dans la pellicule (Figure 1). En conséquence, la macération pelliculaire avant pressurage, en favorisant le passage dans le jus des composés de la pellicule, est un procédé susceptible d’augmenter le potentiel aromatique des moûts des deux cépages. Des expérimentations confirment la plus grande quantité de thiols variétaux dans les vins issus de macération pelliculaire. Cependant, cette pratique accroit également les teneurs en polyphénols dans les moûts et les vins. Or, il a été démontré que ces substances jouaient un rôle négatif sur la stabilité des thiols volatils dans les vins au cours de la conservation (Nikolantonakiet al., 2010). En pratique, il convient donc de trouver un juste équilibre dans la mise en œuvre de la macération pelliculaire (durée, action mécanique sur la vendange, protection contre l’oxydation) pour maximiser les effets recherchés tout en limitant ceux néfastes. Un traitement du moût par collage peut s’avérer utile pour abaisser les quantités de polyphénols extraites. Répartitions moyennes des précurseurs de thiols dans la baie de Melon B. Répartitions moyennes des précurseurs de thiols dans la baie de Sauvignon Blanc Pulpe Pulpe Pellicule Pellicule 0,00 5,00 10,00 Concentration (µg/kg) Cys3MH G3MH G4MMP 15,00 0,00 20,00 40,00 60,00 80,00 Concentration (µg/kg) Cys3MH G3MH G4MMP Figure 1 : Localisation des précurseurs de thiols dans les baies de Melon B. et de Sauvignon B. (moyenne des concentrations relevées pour un échantillon de 400 baies prélevées sur trois parcelles différentes)Source : Roland et al., 2010 19 Le pressurage Dès la rupture de l’intégrité de la baie et la libération du jus désormais au contact de l’oxygène, les mécanismes d’oxydation enzymatique s’enclenchent (Moutounetet al., 1990). Visuellement, le moût brunît plus ou moins intensément (Rigaud et al., 1990). De part leur constitution propre en acides phénols et en glutathion, la sensibilité des cépages à l’oxydation diffère (Cheynieret al., 1989). Ainsi, dans des conditions similaires, le moût de Melon B, riche en acides hydroxycinnamiques et relativement pauvre en glutathion, brunît plus intensément que celui de Sauvignon B. (Roland et al., 2010). Dans les conditions physico-chimiques du moût, les précurseurs de thiols variétaux connus sont stables et non affectés directement par ces phénomènes. Au contraire, une voie de synthèse de G3MH en présence d’oxygène a été récemment mise en évidence (Roland, 2010). Son impact final sur les vins est d’autant plus significatif que les baies sont initialement pauvres en précurseurs de thiols (cas du cépage Melon B. au contraire de celui du Sauvignon B.). Pour autant, ceci n’explique pas pourquoi les observations de terrain démontrent généralement qu’une protection soignée contre l’oxydation est favorable à la production de vins blancs riches en thiols variétaux. Des expériences à l’échelle pilote (pressoir prototype traitant 80 kg de vendange), ont été conduites pour apprécier l’effet d’une exposition à l’oxygène lors de l’extraction des jus sur la qualité finale des vins et leur richesse en thiols volatils. Il en ressort qu’en absence de protection, c'est-à-dire sans ajout d’antioxydant (sulfites), les vins sont plus pauvres en thiols. Par contre, dans les conditions expérimentales retenues, inerter durant l’extraction des jus en plus d’un apport approprié de sulfites, procédé efficace pour limiter les phénomènes d’oxydation si l’on en juge par la couleur moins jaune des moûts et la préservation de certaines espèces chimiques, s’est avéré être sans conséquence sur la teneur en thiols volatils dans les vins (Figure 3). Ces résultats ont été confirmés à l’échelle industrielle sur cépage Melon B. Le pressurage sous gaz inerte n’a pas permis de produire dans ce cas des vins significativement différents de ceux issus de vendanges pressées classiquement (Figure 4). Melon B. : 3MH + 3MHA nmol/L Eq 3MH 3 2 1 0 Essai 1 Essai 2 Essai 3 2010 2011 Absence protection nmol/L Eq 3MH Sauvignon B. : 3MH + 3MHA SO2 SO2 + inertage Sauvignon B. : 4MMP ng/L 4 80 2 40 0 Essai 4 0 Essai 1 Essai 2 2010 Essai 3 2011 Touraine Absence protection Essai 4 Essai 1 2010 2010 Sancerre SO2 SO2 + inertage Essai 2 Essai 3 2011 Touraine Absence protection Essai 4 2010 Sancerre SO2 SO2 + inertage Figure 3 : Effet du niveau de protection contre l’oxydation lors de l’extraction des jus sur les teneurs en thiols variétaux dans les vins ; Expérimentations à l’échelle pilote sur Melon B. et Sauvignon B.Source : Essais IFV 2010 et 2011, Sicavac 2010 20 Par ailleurs, la localisation des précurseurs de thiols n’étant pas uniforme dans la baie de raisins, il est aisé d’imaginer que le passage de ces composés dans le moût lors du pressurage évolue au cours du temps. Ainsi, quelques travaux montrent que les moûts de fins de presse sont plus riches en précurseurs de thiols que ceux de goutte ou de début de presse, les vins correspondant étant également plus riches en thiols volatils (Roland, 2010). Mais parallèlement, les quantités de polyphénols (flavanols) augmentent au fur et à mesure de l’extraction, avec les mêmes conséquences potentielles que celles décrites précédemment pour la macération pelliculaire. La sélection des jus, et l’adaptation de l’itinéraire technologique à chaque fraction, constitue donc surement un moyen d’optimiser les quantités de thiols dans les vins. Des travaux sont en cours pour préciser ce point. La stabulation liquide à froid Cette technique consiste à maintenir le moût sur ses bourbes (après avoir éliminé les plus grossières) à basse température (< 5°C) pendant plusieurs jours voire semaines, à l’abri de l’air (cuve pleine). Un débourbage est ensuite opéré avant fermentation alcoolique. Bien que les mécanismes n’aient pas été véritablement élucidés, les expériences montrent qu’un tel procédé conduit à des vins de Melon B. et de Sauvignon B. plus riches en thiols variétaux. Sauvignon B. : 3MH + 3MHA Melon B. : 3MH + 3MHA nmol/L Eq 3MH nmol/L Eq 3MH 40 20 1 20 10 0 0 0 Essai1 Essai 2 2003 Témoin Essai 3 Essai 4 Essai1 Essai 2 Essai1 Témoin Stabulation liquide froid Essai 2 2010 2010 2004 Stabulation liquide froid Sauvignon B. : 4MMP ng/L 1 Témoin Stabulation liquide froid Figure : Effet de la stabulation liquide à froid sur les teneurs en thiols variétaux dans les vins de Melon B. et Sauvignon B. Source : Essais IFV 2003 et 2004, Sicavac 2010 Perspectives Si les conditions pré-fermentaires ont bien une influence sur la teneur en thiols volatils des vins de Melon B. et Sauvignon B., il importe de rappeler qu’il ne s’agit que d’une étape dans la révélation de ces composés d’arômes. De nombreux autres paramètres viticoles (composition de la baie) et œnologique (conditions de fermentation alcoolique) sont au moins aussi importants pour produire des vins riches en ces composés d’arômes. De récents travaux confirment qu’en l’état des connaissances, la relation entre la quantité de précurseurs connus dans les moûts à ce jour et celle de thiols volatils dans les vins n’est pas aussi simple qu’imaginée dans un premier temps (Pinu et al, 2012). Le sujet est complexe : des différences existent selon les cépages, mais également les provenances (différences par exemple entre les Sauvignon B. récoltés en Touraine et en Sancerrois), les situations de cave. Ceci explique que des résultats d’apparence contradictoire sont susceptibles d’être enregistrés ici ou là. Sur le plan technologique, les expérimentations se poursuivent en Val de Loire sur les deux cépages retenus comme modèle d’étude, le Sauvignon B. et le Melon B. L’objectif est de valider des itinéraires technologiques adaptés aux potentialités des vendanges, mais également à l’objectif produit. 21 Remerciements Ces travaux ont été réalisés avec le soutien financier de France Agrimer, d’Interloire et du Bureau Interprofessionnel des Vins du Centre. Référence bibliographiques Cheynier V., Souquet J.M. et Moutounet M., 1989. Glutathione content and glutathione to hydrpxycinnamic acid ration in Vitisvinifera Grapes and musts. Am. J. Enol. Vitic., 40(4), 320-324. Moutounet M., Rigaud J., Souquet J.M. et Cheynier V., 1990. Influence de quelques paramètres sur l’oxydation des moûts de raisin ; Interprétations technologiques. R. F. Oe., 124, 32-38. Nikolantonaki M. and Darriet P., 2011.Direct effect of flavan-3ols on Sauvignon blnac wines varietal aroma evolution. Actes du9ème Symposium d’Oenologie de Bordeaux, juin 2011. 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Vitic.,51(2), 178-181. 22 Nutrition azotée et levure : un levier pour piloter les profils Rémi Guérin-Schneider Denis Caboulet1, Amélie Roy1, Marie Agnès Ducasse1, Philippe Cottereau2, Dominique Solanet2, Laurent Dagan3, Anthony Sivano4, Anne Ortiz-Julien4 et Rémi Schneider1, 3 1 Institut Français de la Vigne et du Vin, UMT Qualinov, Domaine de Pech-Rouge, 11430 GRUISSAN 2 Institut Français de la Vigne et du Vin Domaine de Donadille, 30230 RODILHAN 3 Nyséos, 2 place Viala, 34 060 MONTPELLIER 4 Société Lallemand, Parc d'Activité Font Grasse19, Rue des Briquetiers, 31700 BLAGNAC Mots clefs : Azote, fermentation, arômes, thiols variétaux, diméthylsulfure L’azote des moûts est un élément essentiel pour que les levures puissent achever la fermentation. Cet élément participe en effet au métabolisme de la levure et permet la synthèse de biomasse ainsi que celle des enzymes et transporteurs membranaires nécessaires au fonctionnement de la levure. Il conditionne ainsi à la fois la cinétique et l’achèvement de la fermentation, et différents niveaux de carence ont été mis en évidence selon la concentration en sucres de départ (Sablayrolles et al., 1996). A côté de ces aspects, le métabolisme de l’azote, et notamment celui des acides aminés, engendre la formation de composés d’arômes abondant qui participent à la matrice aromatique du vin : alcools supérieurs et par voie de conséquence de leurs acétates. Le métabolisme levurien interfère également avec la révélation ou la préservation de certains précurseurs d’arôme de nature aminés (précurseurs cystéinylés de thiols variétaux et précurseur du diméthylsulfure), et la composition azotée du moût peut ainsi modifier le profil aromatique du vin. 23 Les composés d’arôme issus directement du métabolisme azoté Les alcools supérieurs Le métabolisme des acides aminés (anabolisme et catabolisme) par la levure entraine la formation d’alcools dits supérieurs (nombre de carbones supérieurs à 2). Ces composés sont abondants dans le vin (de 400 à 500 mg/l au total) comme dans toutes les boissons fermentées et la plupart des boissons distillées. Dans le vin ils sont largement dominés par les 2- et 3-méthylbutanol, le propanol, le 2-méthylpropanol, le butanol, le pentanol, le 2-phényléthanol, le méthylthiopropanol (méthionol) le tyrosol et le tryptophol(Baumes, 1998). On considère qu’au-delà de 1 g/l au total ces composés à l’exception notoire du 2-phényléthanol, constituent un défaut d’arôme, alors qu’aux teneurs optimales de 400 à 500 mg/l, ils auraient un effet positif (Etiévant, 1991). Leur formation, liée au métabolisme azoté, est fortement influencée par la composition azotée du moût. Le catabolisme des acides aminés par la levure entraine la formation, par décarboxylation puis réduction, des acides α-cétoniques issus de la transamination des acides aminés. L’anabolisme de ces mêmes acides aminés entraîne aussi la formation d’acides α-cétoniques à partir des sucres. La régulation de ce métabolisme est très complexe et il apparaît que la composition en azote des moûts est essentielle. De manière macroscopique, une carence azotée entraine l’accumulation d’acides α-cétoniques et donc des alcools supérieurs correspondants, tandis que la présence en quantité importante d’acides aminés provoque la retro inhibition de la voie anabolique, donc la diminution des alcools supérieurs issus de cette voie, mais l’activation de la voie catabolique de formation. La production des alcools supérieurs est variable selon les souches de levures, et plus précisément selon leur profil d’utilisation des acides aminées et de leur demande en azote totale. Cependant, il semble que les différences soient faibles en l’absence de carence azotée (Jiranek et al., 1995). Enfin il apparaît que de nombreux facteurs qui concourent à une vitesse de fermentation élevée sont favorables à la production de ces alcools : éléments de croissance, turbidité élevée, aération du moût, température de fermentation élevée, pH élevé, pression en gaz carbonique forte, mais l’interaction de ces différents facteurs reste difficile à appréhender Les esters Ces composés constituent la deuxième classe de composés en abondance. Si les alcools supérieurs sont plus à considérer comme défavorables à l’arôme des vins, les esters éthyliques ou les acétates d’alcools supérieurs, constituent eux la majeure partie du tampon aromatique des vins tel que défini par (Ferreira, 2012). Ils apportent ce que les technologues appellent la note vineuse, issue de leur interaction entre eux, sachant qu’individuellement ils apportent plus des notes fruitées allant des fruits à chair blanche aux fruits rouges en passant par la banane ou l’ananas. De ces deux familles, les acétates sont les composés qui sont le plus à relier au métabolisme azoté (Baumes, 1998) dans la mesure où ils sont formés par la levure par acétylation des alcools supérieurs précédemment décrits (via l’acétyl-Scoenzyme A). Cependant la biogénèse des esters éthyliques d’acides gras implique aussi la présence acyl-S-coenzyme A, dont la production est régulée essentiellement par le métabolisme lipidique mais aussi par le métabolisme azoté. En termes de régulation, il semble que pour les acétates se soit plus la disponibilité des alcools supérieurs que celle de l’acétyl-S-coenzyme A qui soit prépondérante. Par contre, l’activité de l’acétyltransférase reste primordiale, ce qui explique la variabilité entre souches de levure observées en conditions œnologiques. Pour les esters éthyliques d’acides gras en revanche, c’est bien l’acyl-S-coenzyme A qui est le facteur essentiel, et les conditions qui diminuent la vitesse de fermentation, semblent favoriser celle des acides gras et de leurs esters éthyliques : anaérobiose stricte, faible turbidité, abaissement de la température. 24 Les composés d’arôme dont la formation est régulée par le métabolisme azoté Il s’agit essentiellement des thiols variétaux et du diméthylsulfure. Les thiols variétaux Les premiers sont issus de manière prépondérante de précurseurs cystéinylés ou glutathionylés. Caractéristiques des vins blancs de Sauvignon (Dubourdieu et al., 2009), ils se retrouvent dans les vins de nombreux autres cépages auxquels ils confèrent leur notes spécifiques d’agrumes ou de fruits de la passion quand ils sont en quantité suffisantes (cas des vins de Colombard par exemple) ou au fruité desquels ils apportent de la fraîcheur à plus faibles concentrations (cas des vins de Melon B par exemple). Les précurseurs à leur origine sont des dérivés d’acides aminés ou de peptides. Ils sont transportés dans la levure et c’est en son sein qu’a lieu la réaction de clivage via l’activité C-S lyase de la levure. La régulation des transporteurs des acides aminés et du glutathion, au moins en partie responsables du transport dans la cellule des précurseurs de thiols variétaux de thiols, interfère de ce fait avec la biosynthèse des thiols variétaux, et il a notamment été montré que la répression catabolique de l’azote sur la biosynthèse des transporteurs d’acides aminés de type Gap entraine une libération moindre de thiols variétaux dans les vins (Subileau et al., 2008). Le diméthylsulfure Le diméthylsulfure est un puissant exhausteur du fruité ou conférant à plus forte concentration des notes de sous-bois et de truffe qui sont l’apanage du bouquet réducteur de certains vins rouges mais aussi de liquoreux (Segurel et al., 2004; Escudero et al., 2007). Le précurseur majoritaire du diméthylsulfure des vins en bouteille est un dérivé d’acide aminé encore une fois, la S-méthylméthionine (SMM ; (Loscos et al., 2008), dont le clivage au cours de la conservation des vins, génère le diméthylsulfure. Ce composé est présent dans les raisins et les moûts de nombreux cépages, mais l’on observe une perte lors de l’étape de fermentation. Une des explications avancée est son assimilation par la levure comme source d’azote, et l’on comprend ainsi le rôle de la composition azotée du moût ainsi que de la demande en azote des levures dans la préservation de la SMM dans les vins fin FA. Application en œnologie Modulation du profil des esters par l’ajout d’azote Au vu des liens qui existe entre métabolisme de l’azote et production d’esters fermentaires, les premiers essais de modulation du profil aromatique par l’ajout d’azote ont porté sur ce type d’arôme. Si l’on se réfère aux travaux les plus récents (Charrier et al., 2007), il apparaît que l’ajout d’azote à la vigne par pulvérisation foliaire, pratique préconisée nous le verrons dans le cas des thiols variétaux, n’est pas en mesure de modifier profondément et systématiquement la quantité d’esters éthyliques, en revanche, les acétates d’alcools supérieurs voient par ce type de technique leur teneur augmenter de 50 à 100%. La comparaison de ce type d’application d’azote avec l’ajout de sels ammoniacaux au chai (pour une même teneur en azote assimilable à la fin) montre également que ces derniers sont moins efficaces, puisque l’augmentation des acétates n’excède jamais 50%. Ces études donnent des résultats intéressant dans une première approche mais ne prennent pas en compte l’effet éventuel d’une demande en azote différentes des souches de levures, et de la possibilité de corriger la composition en azote des moûts par l’utilisation de nutriment azotés organiques, riches en acides aminés. Cela a fait l’objet d’un travail récent mené en partenariat avec la société Lallemand à la fois sur Sauvignon, Vermentino et Mourvèdre rosé. Il ressort de manière globale que les ajouts de nutriments azotés sur des moûts non carencés (autour de 150 mg Nass./l) sont d’autant plus efficaces sur les acétates d’alcools supérieurs que la levure possède intrinsèquement de plus faibles besoins en azote et que l’azote organique aminé est privilégié. 25 Azote et valorisation du potentiel aromatique Deux potentiels ont fait l’objet d’étude dans ce cas, il s’agit du potentiel en thiols variétaux et du potentiel en diméthylsulfure. Cet intérêt est justifié par la nature aminée des précurseurs en question, qu’il s’agisse des S-conjugués à la cystéine pour les thiols ou de la S-méthylméthionine pour le DMS. Le cas des thiols variétaux est encore le plus documenté, et dans le processus de production, le statut azoté de la vigne est le premier point à regarder. Si l’amendement au sol qui, en absence de contrainte hydrique, permet une plus grande biosynthèse des précurseurs de cystéinylés de thiols dans les baies (Choné et al., 2006), les essais plus récents de pulvérisation foliaire d’urée ont donné des résultats encore plus intéressants (Charrier et al., 2007). En effet, ce traitement, positionné après véraison, et éventuellement combiné à la pulvérisation de soufre élémentaire permet de tripler voire de quintupler les teneurs en thiols variétaux dans les vins, sans augmentation de rendement, de vigueur ou de problème de pourriture grise sur les raisins. Cette augmentation est plus à mettre à l’actif d’une meilleure conversion des précurseurs de thiols en thiols qu’à l’augmentation des teneurs en précurseurs dans les baies identifiée par (Lacroux et al., 2008), en l’état actuel de nos connaissances. En vinification, il a été démontré que l’ammonium en excès en début de fermentation limitait la libération des thiols variétaux par la levure (Subileau et al., 2008). L’explication de ce phénomène réside dans la répression catabolique par l’ammonium de la synthèse des transporteurs d’acide aminées chez la levure en fermentation, qui limite également l’entrée des précurseurs de thiols de type cystéinylés, et par voie de conséquence leur conversion intracellulaire en thiols volatils. Cette observation a été faite en laboratoire mais également à l’échelle pilote et a débouché sur la mise en place de stratégie de nutrition azotée en fermentation privilégiant des ajouts d’azote aminé en début de fermentation et d’ammonium plus tardifs. De la même manière que dans le cas des acétates d’alcools supérieurs, il apparait aussi que ce soit le couple levure/nutriment qu’il faille raisonner, en tenant compte de la demande en azote de la levure utilisée pour adapter la nutrition azotée dans un objectif de pilotage du profil produit. Pour le potentiel en DMS, il apparaît que sa dégradation est importante en fermentation, vraisemblablement par métabolisation de la S-méthylméthionine par la levure. L’utilisation conjointe de souche faible demandeuse en azote et de complémentation azotée pouvait limiter cette dernière. Des essais menés, il ressort qu’une telle stratégie permet de préserver le double de potentiel en DMS dans les vins en fin de fermentation alcoolique, et ainsi de favoriser une libération de DMS au cours de la conservation en bouteille à une teneur intéressante plus rapidement. Références bibliographiques Baumes R. 1998. Les constituants volatils du stade fermentaire. In: Flanzy, C., editor). 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FEMS Yeast Res. 8:771-780. 27 Apports de la thermovinification sur l’expression aromatique des vins blancs Laurence GUERIN IFVPôle Val de Loire-Centre 46 avenue Gustave Eiffel - 37100 Tours Tél : 02 47 88 24 20 [email protected] Intérêts de la thermovinification appliquée aux cépages et/ou raisins blancs Résumé : Le chauffage de la vendange a été initialement développé pour la vinification en rouge, pour notamment répondre à trois objectifs : dégradation de la laccase, meilleure extraction polyphénolique et optimisation de la cuverie. Aujourd’hui, l’objectif est de pouvoir l’appliquer à la vinification en blanc. A partir des faibles références qui existent, il est possible d’énoncer que l’intérêt sur les raisins altérés est conforté par rapport aux résultats acquis sur raisins rouges, cependant, l’intérêt sur raisins sains est encore à mettre en évidence. Mots-clés : chauffage de la vendange, vinification en blanc, raisins altérés, raisins sains. 28 Introduction De nombreux travaux expérimentaux ont été réalisés dans les années 1970 sur les vinifications des vendanges chauffées ou thermo-traitées (raisins destinés à la vinification en rouge). Actuellement, selon les professionnels de la filière, les différentes méthodes de vinification des vendanges thermotraitées, permettent de diversifier la qualité des vins et de les adapter aux attentes du marché. En France, plus de 200 caves ont accès à ces technologies, ce qui représente plusieurs millions d’hectolitres. Une des raisons du succès de cette technologie, est due à l’élimination de la laccase, présente dans les vendanges altérées. L’autre avantage majeur concerne la réduction des besoins en cuverie de fermentation, par l’élimination immédiate de toute la masse solide (Boulet et Escudier, 1988 ; Desseigne et Grenier, 1998). Aujourd’hui, ces technologies ne concernent pas uniquement les raisins destinés à la vinification en rouge et/ou des raisins de « second niveau » (état sanitaire altéré et/ou dilué) mais l’ensemble des gammes de qualité de raisin. Qu’est-ce que la thermovinification ? Classiquement, le procédé consiste, après éraflage et foulage de la vendange partiellement égouttée, à chauffer la vendange à 70-75°C pendant un laps de temps très court (30 à 40 min.), à la pressurer, à la refroidir et à la vinifier en phase liquide après clarification. Depuis plusieurs années, de nombreuses alternatives ont été proposées, mais exclusivement dans le cadre des vinifications en rouge : - Macération préfermentaire à chaud (MPC) suivie d’un pressurage direct - Macération préfermentaire à chaud (MPC) avec macération fermentaire - Flash-détente Pourquoi pratiquer la thermovinification sur raisins blancs ? Historiquement, le chauffage de la vendange a été appliqué dans le cadre de la vinification en rouge, afin d’extraire les polyphénols, dénaturer les enzymes d’altération et détruire les arômes végétaux du raisin (Roujou de Boubée, 2000) Que peut-on en attendre dans le cadre de la vinification en blanc ? Sur raisins altérées Les essais conduits à ce jour et qui ont fait l’objet d’articles et/ou des comptes rendus ont été mis en œuvre dans deux cas de figures : a) Vendanges altérées par Botrytis A nouveau et comme relaté dans l’introduction, cet effet de la thermovinification a déjà été montré très largement dans le cadre de la vinification en rouge, cependant, qu’en est-il sur les blancs ? Des essais récents ont été conduits par l’IFV Sud-Ouest sur deux cépages blancs : Colombard et Loin de l’œil. L’objectif initial était de transposer les techniques de chauffage (réalisées en absence d’oxygène) sur de la vendange blanche botrytisée. Les modalités mises en place sur 3 millésimes (de 2006 à 2008) sont les suivantes : Facteur Niveau Description - 0% Taux de Botrytis 2 - 50% 3 (2006) - Niveau turbidité : 50 Ŕ 500 et > 1000 NTU Débourbage 2 (2007) - Avant et après chauffage 3 (2006) - 70°C à 0h / 1h / 5h Chauffe 2 (2007-2008) - Pas de chauffe /3h à 70°C 0 (2006) - Pas de traitements 2 (2007) - Pas de traitements / Bento-caséinate Traitement débourbage 4 (2008) - Pas de traitements / Bento-caséinate / PVPP / Noir animal 29 Les principaux résultats sont les suivants : - - Le chauffage des moûts n’apporte pas de modifications physico-chimiques significatives, mais entraîne une augmentation de l’amertume des vins (augmentation de l’extraction polyphénolique) et ceci de façon proportionnelle au niveau de turbidité Sur le plan organoleptique, le chauffage des moûts botrytisés permet un gain qualitatif indéniable, à condition que la montée en température soit significativement rapide pour limiter l’effet de l’activité laccase L’ajout de bento-caséinate ou de PVPP au moment du débourbage des moûts chauffés, permet d’éliminer une partie des polyphénols extraits, donc de l’amertume du vin. Le débourbage avant chauffage permet dans la plupart des cas de limiter l’extraction polyphénolique, mais présente peu d’intérêt. b) Vendanges altérées par la géosmine Dans le cas très particulier de vendanges altérées et présentant des concentrations importantes en géosmine, le principe de la thermovinification a été appliqué (Guérin et al, 2011). Deux applications ont été réalisées, une en laboratoire et l’autre sur site industriel. Dans le premier cas, il est montré que la température permet une dégradation de la géosmine jusqu’à 90%, pouvant éventuellement être accentuée par une évaporation. Il a été montré également que l’augmentation de la température (40°C à 68°C pendant 7h30) favorise la dégradation de la géosmine jusqu’à un taux de 85%. Dans le deuxième cas, il a été choisi de faire la mise en œuvre suivante (Figure 1) : Figure 1 : Schéma opératoire du traitement thermique sur moût blanc de Folle Blanche avec indication des prélèvements pour dosage de géosmine 400 350 [géosmine] (ng/l) 300 250 200 150 100 50 0 Refroidissement par évaporation Stade 1 Stade 2 Refroidissement par échangeur Stade 3 Stade 4 Les essais ont été concluants, compte-tenu des résultats présentés dans la figure 2. 30 Figure 2 : Evolution des teneurs en géosmine en fonction des stades du process de traitement thermique sur moût blanc de Folle Blanche Sur raisins sains Même si cela est évoqué dans le vignoble, les références techniques sont peu nombreuses, voire inexistantes. Cependant, en complément des travaux réalisés par l’IFV Sud-Ouest, la modalité 0% Botrytis permet d’apporter des éléments. 31 Sur les deux cépages étudiés, la réponse est différente d’un point de vue organoleptique : - - Pour le cépage Loin de l’œil, le chauffage de la vendange permet une augmentation de la production d’esters, d’alcools supérieurs et d’acides, au cours de la fermentation alcoolique, ce qui se traduit par un gain qualitatif indéniable. Par ailleurs, un débourbage après chauffage, permet généralement une plus grande extraction de composés aromatiques. Pour le cépage Colombard, le chauffage du moût entraîne une forte diminution des notes thiolées et n’a aucune répercussion sur la perception des notes terpéniques. Conclusions Ce qu’il faut retenir La thermovinification est utilisée depuis les années 70 et, jusqu’à ce jour, exclusivement dans le cadre des vinifications en rouge. Dans le cadre de la vinification en blanc, à ce jour, quelques résultats sur raisins altérés montrent l’intérêt de la technique, cependant, sur raisins sains, le profil produit à obtenir est à raisonner au-préalable. Et après ? Des références techniques sont en cours d’acquisition sur Sauvignon pour le millésime 2012, en faisant varier les niveaux de turbidité, températures et durées. En 2013, des essais seront réitérés sur Sauvignon et nouvellement sur Melon. Remerciements : F. Davaux (IFV Sud-Ouest) Références bibliographiques Boulet J-C., Escudier J-L., 1988. Œnologie, fondements scientifiques et technologiques. Partie 17 : Vinifications en rouge. p.797-805. Flanzy coordination, Tech et Doc Lavoisier. Desseigne J-M., Grenier P., 1998. Chauffage de la vendange et arômes fruités. Entretiens Viti-vinicoles Rhône Méditerranée. p.20-22. Comptes Rendus d’Activité Technique IFV, 2006, 2007, 2008. Roujou de Boubée D. 2000. Recherches sur la 2-méthoxy-3-isobutylpyrazine dans les raisins et les vins : approches analytique, biologique et agronomique. Thèse Doctorat Université Bordeaux II. Guérin L., Guyot F., Pascal-Lagarde C., De Bucy S., Effet de la température sur les teneurs en géosmine des moûts, Revue des œnologues (RO), Janvier 2011, N°138. 32 ITINERAIRES D’ELABORATION DES VINS BLANCS 33 Optimiser l’élaboration des vins blancs secs de chenin en Val de Loire Philippe Chrétien IFVPôle Val de Loire-Centre 42 rue Georges Morel BP 60057 49070 BEAUCOUZE tél : 33 (0)2 41 39 98 [email protected] Travaux réalisés en collaboration avec C. Grelier (IFV pôle Val de Loire) Résumé Depuis 2010, et jusqu'en 2013, l'IFV d'Angers et le Syndicat des producteurs d'Anjou blanc travaillent à l'optimisation d'itinéraires de vinification de vins blancs secs de chenin de style différents. Le principe consiste à comparer, en grand volume avec des caves partenaires, un itinéraire de vinification optimisé - qui cherche à répondre à un objectif d'amélioration de la qualité ou de diminution des charges - à un itinéraire usuel. Pour les deux styles de vins étudiés, à savoir un style fruité friand d'entrée ou de milieu de gamme et un style de garde haut de gamme, les résultats obtenus sont prometteurs. Mots clés Vins blancs secs, chenin, itinéraires œnologiques, valorisation 34 Introduction L’IFV d’Angers travail actuellement, en collaboration avec le Syndicat des Producteurs d’Anjou Blancs, sur l’optimisation des itinéraires d’élaboration des vins blancs secs issus du cépage Chenin. Le chenin, en Anjou, donne naissance à deux grands types de vins très différents. Le premier que l’on peut qualifier de « friand et fruité » qui doit être élaboré au moindre coût pour une question de rentabilité, nécessite une parfaite maîtrise technologique et la possibilité de gérer des cuvées de volumes importants. Le second, davantage orienté vers « l’expression et la particularité, la garde », nécessite quant à lui une matière première plus concentrée et des opérations de vinification et d’élevage appropriées (tri, MPF, micro-oxygénation par exemple) Une meilleure adéquation entre produits et consommation, alliée à la diminution des volumes de vins de qualité insuffisante (chacun dans leur type) permettraient d’améliorer la notoriété des AOC concernées sur les plans national et international, mais aussi de procurer aux producteurs une rémunération plus juste, les cours étant moins influencés par la sous qualité. L’étude, qui doit se poursuivre sur le prochain millésime, consiste à comparer deux itinéraires de vinification à partir d’une même vendange. Cette comparaison est répétée sur plusieurs sites et des matières premières différentes. Les itinéraires optimisés sont définis pour chaque situation dans un objectif précis, en collaboration avec le viticulteur. L’optimisation est soit économique en abaissant les coûts de production (suppression d’opérations et/ou d’intrants) soit technique pour améliorer l’aspect qualitatif des vins (ajout d’opérations). Dans les deux cas, les vins des modalités « usuelles » et « optimisées » sont comparées au niveau économique (différence de coût) et qualitatif (dégustation, positionnement dans la segmentation) afin de juger de l’impact de chaque essai sur le potentiel de valorisation. Dans l’objectif d’optimisation économique, le vin ne doit pas descendre de gamme et dans l’optimisation qualitative il doit monter en gamme pour que les charges supplémentaires soient compensées par un prix de vente supérieur. Les vins « de garde » de la première année d’essai et ceux de style « printemps » de la deuxième année, ont été dégustés au printemps 2012. Que donne l’optimisation qualitative des vins de printemps 2011 ? Site CESB Différences entre les modalités usuelles et optimisées : Opérations en plus pour l’itinéraire optimisé : Macération pré-fermentaire à froid, levures différentes, FML par coinoculation. Analyses au moment de la dégustation TAP/TAV Sucres Ré. Usuel Optimisé 12,11 12,17 0,8 0,9 AT 3,5 4,1 pH 3,32 3,27 AV 0,57 0,59 SO2L SO2T 8 69 9 80 Les vins sont très proches au niveau analytique. 35 Dégustation des vins CESB - Vins de printemps - 2011 Intensité Olfactive Qualité globale 9,00 CESB OPTIMISE CESB USUEL Note Fruitée 8,00 Qualité couleur Maturité du Fruit 7,00 6,00 Intensité couleur 5,00 Note Florale 4,00 Le vin issu de l’itinéraire optimisé est mieux apprécié par les dégustateurs essentiellement en bouche avec une plus longue persistance aromatique et une meilleure qualité. 3,00 Qualité gustative 2,00 Dans une moindre mesure, l’itinéraire optimisé est également préféré au nez. Note Végétale 1,00 0,00 Persistance Aromatique Note Fermentaire Pour la note globale, l’itinéraire usuel est logiquement en retrait. Complexité Olfactive Amertume Qualité Olfactive Alcool-Chaleur Gras Significatif au seuil de 8% Acidité On remarquera également que l’écart entre les niveaux d’acidités est perçu par les dégustateurs. Sucrosité Site MAC Différences entre les modalités usuelles et optimisées : Opérations en plus pour l’itinéraire optimisé : enzymage, débourbage plus serré, levurage. Analyses au moment de la dégustation Usuel Optimisé TAP/TAV Sucres Ré. 14,6 14,39 3,1 2,9 AT 5,1 5,3 pH 3,29 3,25 AV 0,34 0,41 SO2L 7 9 SO2T 89 92 Peu d’écart entre les vins, en particulier pour le SO2 libre, ce qui donne de bonnes conditions de dégustation. Dégustation des vins MAC - Vins de printemps - 2011 Intensité Olfactive Qualité Globale Qualité de la Couleu 9,00 Note Fruitée 8,00 MAC USUEL 2011 Maturité du Fruit 7,00 Avec des arômes moins végétaux, la modalité optimisée est mieux appréciée au nez par les dégustateurs. Le vin optimisé semble présenter un peu plus de fruité au nez et des fruits plus mûrs, mais l’écart reste faible entre les deux vins, même sur le jugement qualitatif global. MAC OPTIMISE 2011 6,00 Intensité de la Couleur 5,00 Note Florale 4,00 3,00 Qualité Gustative 2,00 Note Végétale 1,00 0,00 Persistance Aromatique Note Fermentaire Complexité Olfactive Amertume Qualité Olfactive Alcool-Chaleur Gras Significatif au seuil de 5% Acidité Sucrosité Site MB Différences entre les modalités usuelles et optimisées : Opérations en plus pour l’itinéraire optimisé : stabulation à froid, réincorporation de lies après 1 mois (travail des lies séparé). Analyses au moment de la dégustation Usuel Optimisé TAP/TAV Sucres Ré. 12,46 12,53 1,5 1,4 AT 5 3,7 pH 3,14 3,25 AV 0,42 0,53 SO2L 18 18 SO2T 79 67 On constate ici une différence assez nette sur l’acidité avec la modalité usuelle plus acide (AT et pH) Dégustation des vins 36 MB - Vins de printemps - 2011 MB USUEL 2011 Intensité Olfactive Qualité Globale 9,00 8,00 Qualité de la Couleur MB OPTIMISE 2011 Note Fruitée Maturité du Fruit 7,00 6,00 Intensité de la Couleur 5,00 Note Florale 4,00 3,00 Qualité Gustative 2,00 Note Végétale 1,00 0,00 Persistance Aromatique Note Fermentaire Le vin optimisé est mieux noté sur l’ensemble des critères. C’est surtout le cas au niveau du nez pour la note florale la complexité et naturellement, la qualité olfactive. On notera également la perception acide supérieure de la modalité usuelle. Complexité Olfactive Amertume Qualité Olfactive Alcool-Chaleur Gras Significatif au seuil de 5% Significatif au seuil de 10% Acidité Sucrosité L’optimisation économique des vins de garde 2010 est-elle intéressante ? Site MB Différences entre les modalités usuelles et optimisées : La modalité usuelle est élevée en barrique. La modalité optimisée au niveau économique, est élevée en cuve avec une micro-oxygénation. Analyses au moment de la dégustation Usuel barriques + cuve Usuel barriques él. Long Optimisé µOx TAP/TAV Sucres Ré. 14,8 2 14,85 2,1 14,08 2,3 AT 3,35 3,4 3,4 pH 3,32 3,32 3,37 AV 0,53 0,57 0,37 SO2L 15 17 20 SO2T 123 108 100 Les vins sont proches sur l’ensemble des analyses. Seul un SO2 libre légèrement supérieur pourrait pénaliser la modalité élevée en cuve et micro-oxygénée. Dégustation des vins MB - Vins de garde - 2010 Qualité Globale Qualité de la Couleur MB USUEL 2010 Intensité Olfactive 9,00 MB USUEL LONG 2010 Note Fruitée 8,00 MB OPTIMISE µOx 2010 Maturité du Fruit 7,00 6,00 Intensité de la Couleur 5,00 Note Florale 4,00 3,00 Qualité Gustative Note Végétale 2,00 1,00 0,00 Persistance Aromatique Note Fermentaire Complexité Olfactive Amertume AlcoolChaleur Bien que moins long en bouche, le vin de l’itinéraire optimisé, c'est-àdire élevé en cuve et micro-oxygéné, révèle des notes fruitées beaucoup plus intenses que les vins élevés en barriques. Le nez est plus apprécié, sans que l’écart soit très significatif. En bouche, la cuvée optimisée est perçu moins alcooleuse et au niveau de la qualité globale, l’élevage en cuve et micro-oxygénation est préféré à l’élevage en barriques. Qualité Olfactive Gras Acidité Sucrosité Significatif au seuil de 5% Significatif au seuil de 10% VINS DE GARDE 2011 Site CHO Différences entre les modalités usuelles et optimisées : Opérations en plus pour l’itinéraire optimisé : Macération pré-fermentaire à froid avec inertage, levures différentes. Un premier prélèvement a été effectué à ce stade avec un élevage qui se poursuit à la cave expérimentale. Les deux vins, usuel et optimisé, ont ensuite été entonnés et poursuivent leur élevage en barriques. Dégustation : les quatre vins issus de cet essai, seront dégustés au printemps 2013. Site MB 37 Différences entre les modalités usuelles et optimisées : Barriques (usuel) vs copeaux (optimisé). L’objectif est d’observer si les qualités organoleptiques du vin issu d’un itinéraire plus économique restent dans le même niveau de segmentation que l’itinéraire usuel, plus coûteux incluant l’élevage en barrique. Dégustation : les vins seront dégustés au printemps 2013 Comment les vins d’essais sont positionnés dans la segmentation ? Quelques metteurs en marché sont sollicités pour déguster les vins à l’aveugle, se prononcer sur le niveau de valorisation potentiel de chaque vin en les positionnant dans la segmentation du marché. MODALITES PREMIER PRIX CESB USUEL 2011 PRINTEMPS CESB OPTIMISE 2011 PRINTEMPS MAC USUEL 2011 PRINTEMPS MAC OPTIMISE 2011 PRINTEMPS MB USUEL 2011 PRINTEMPS MB OPTIMISE 2011 PRINTEMPS MB USUEL BARRIQUES + CUVE 2010 GARDE MB USUEL BARRIQUES LONG 2010 GARDE MB OPTIMISE CUVE µOx 2010 GARDE Négociants-acheteurs : INTERMEDIAIRE 2 3 1 3 1 2 2 1 3 1 2 HAUT de GAMME 2 3 3 1 2 1 3 1 1 3 1 (11/05/2012) 1 2 (06/2012) 2 3 2 3 2 3 (08/08/2012) Le positionnement des vins d’essais par trois acheteurs, renforce sur plusieurs essais, les résultats de la dégustation par le jury de professionnels et techniciens. C’est le cas pour les sites MAC et MB, pour les vins de printemps 2011. Dans ces essais, on observe sans ambigüité la supériorité qualitative des cuvées optimisées. Concernant l’essai « vin de printemps 2011 » sur le site CESB, les acheteurs sont partagés. La dégustation par le jury au printemps 2012, avait nettement fait ressortir les qualités de la cuvée optimisée par rapport à la cuvée usuelle. Au niveau des vins de garde, les acheteurs ont une nette préférence pour les vins élevés en barriques (itinéraire usuel). Lors de la dégustation au printemps 2012, si la cuvée élevée en cuve avec une micro-oxygénation était en retrait au niveau de l’intensité olfactive et de la persistance aromatique en bouche, elle était néanmoins mieux appréciée au nez pour ses notes fruitées plus présentes. Au niveau global, les élevages en barriques étaient même rétrogradés. Il est difficile de savoir avec certitude si l’objectif de réduire les coûts de production sans changer le positionnement dans la segmentation est atteint. Il semble en effet que les produits affichent une différence de style prononcée et que le positionnement dans la segmentation soit très influencé par la présence des notes aromatiques boisées. L’essai n’est pas terminé Ces premiers résultats sont déjà intéressants, mais il est nécessaire de poursuivre avec le millésime 2012. Nous avons besoin de confirmer l’évolution qualitative observée grâce à l’optimisation des itinéraires des vins de printemps. Pour les vins de garde, la cuvée « usuelle » élevée en cuve et micro-oxygénée sera toujours comparée à l’élevage en barriques, mais elle bénéficiera en plus, de l’ajout de morceaux de bois pendant la fermentation alcoolique. Les évaluations et comparaisons économiques sont en cours et seront confrontées aux potentiels de valorisation. 38 Comparaison de deux Itinéraires d’élaboration de vins de sauvignon Evaluation technico-économique Joëlle BEGUIN,Laurence Guérin IFVPôle Val de Loire-Centre 46 avenue Gustave Eiffel - 37100 Tours Tél : 02 47 88 24 20 [email protected] Résumé : L’Institut Français de le Vigne et du Vin (IFV) décide en 2009 de mettre au point une méthodologie innovante d’évaluation globale des itinéraires d’élaboration en fonction d’un type de vin défini (objectif produit) afin d’en faciliter le choix par les vinificateurs. C’est dans ce cadre que l’IFV Tours travaille sur la comparaison de deux itinéraires d’élaboration de vins blancs de Sauvignon, dans le but, d’une part, de contribuer à la validation de l’outil d’évaluation et d’autre part, d’acquérir des références pour la Touraine sur ce type de vin . A titre d’exemple, les résultats du millésime 2009 sont présentés. Ils montrent que la méthodologie mise en place permet effectivement de comparer de façon précise les deux itinéraires de vinification dits « Usuel » et « Optimisé », du stade raisin au stade vin conditionné. Ils mettent également en évidence que les deux vins obtenus sont différents des points de vue analytique et sensoriel et qu’il existe un écart de leur coût de production essentiellement dû aux intrants et à la régulation thermique. Mots clés : Itinéraires d’élaboration, coût de production, outil d’aide à la décision, vins blancs, Sauvignon 39 Introduction : La conjoncture actuelle de la filière vitivinicole, dans le contexte d’une concurrence mondiale, impose la production de vins adaptés au marché. Les vins produits doivent être en phase avec le goût des consommateurs, assurer le revenu des producteur dans le cadre d’une filière durable Dès 2007, l’IFV met en place un programme intitulé « Itinéraires régionaux d’élaboration des vins blancs, rouges et rosés », réalisé dans plusieurs régions viticoles françaises dont le Val de Loire, sur plusieurs millésimes. Une méthodologie commune est alors mise en place en collaboration avec des experts des différents domaines concernés pour avoir une vision intégrale des avantages et inconvénients des différents itinéraires d’élaboration dans leur globalité (de la récolte au conditionnement), sur les plans technique, économique, environnemental, et bien évidemment sur le profil du produit final. L’objectif ultime du programme est l’élaboration d’un outil d’aide à la décision (OAD) permettant une évaluation et une optimisation des pratiques selon le type de produit à atteindre et le transfert d’une méthodologie d’évaluation des itinéraires. Cet outil devra être simple d’utilisation et fournir aux professionnels de la filière vitivinicole les moyens d’accroître la compétitivité de leurs vins sur les marchés nationaux et internationaux. En Touraine, depuis quelques années la production des vins de Sauvignon est en expansion mais les producteurs expriment leurs difficultés à orienter le type de vins à produire, à s’adapter aux caractéristiques des raisins variant selon les millésimes et à cibler le niveau de maturité à rechercher. C’est dans ce contexte que l’IFV Tours travaille depuis 2009 à comparer un vin dit « Usuel » à un vin dit « Optimisé » pour lequel est recherchée une expression aromatique accrue, en particulier des thiols variétaux. Quelle est la méthodologie adoptée ? La méthode consiste à comparer 2 (ou plusieurs) itinéraires de vinification appliqués à une même récolte initiale de l’exploitation dont : - Un itinéraire dit « Usuel », habituellement réalisé - Un itinéraire dit « Optimisé » d’un point de vue technique le plus souvent, permettant une meilleure exploitation du potentiel du raisin. L’optimisation peut également être d’ordre économique (en adoptant un itinéraire limitant les coûts de production) ou environnemental (en optant pour des techniques diminuant les sources de pollution). Ces itinéraires sont évalués à l’aide de 3 fichiers Excel qui permettent, de la façon la plus complète possible, de recueillir les données et indicateurs de l’essai, du stade de la récolte à celui du conditionnement. Ces données sont ensuite traitées automatiquement afin de générer des graphiques et des tableaux de résultats synthétiques pour les volets suivants : - Evaluation technique qui décrit, du stade raisin (qualité de la vendange) au stade vin fini, chaque opération unitaire à l’aide de menus déroulants et s’appuie sur des critères analytiques (physicochimiques, aromatiques) et sensoriels, évalués par un jury, un mois après le conditionnement. - Evaluation économique qui nécessite dans un premier temps le recueil d’informations propres à l’exploitation (salaires, prix de l’électricité, matériel …) et dans un deuxième temps, la collecte, par stade, des données concernant chaque opération. Un coût « direct » est calculé, c’est-à-dire, ne comprenant que les charges directement imputables aux facteurs de production mis en œuvre dans l’opération considérée. - Evaluation environnementale qui comprend 4 paramètres : consommation d’eau, rejets solides ou liquides (eau de lavage, lies, bourbes, marcs … etc.), consommation énergétique (électricité, gasoil, gaz … etc.), émission de gaz (à effet de serre) devant aboutir à la réalisation d’un bilan carbone®. Quels sont les résultats d’un cas concret ? Les résultats présentés correspondent à la comparaison de 2 itinéraires d’élaboration de vins de Sauvignon de Touraine Ŕ millésime 2009, vinifiés dans le chai expérimental du LEPA d’Amboise : - Un itinéraire « usuel » - Un itinéraire « Optimisé » pour aboutir à un vin plus aromatique globalement et plus riche en thiols 40 1) Volet technique Date Nom du produit Dose/T°C Fréquence (/jour) et durée (min.) OPTIMISE Date Nom du produit Dose/T°C Fréquence (/jour) et durée (min.) Récolte mécanique 21-sept.-09 1x /jour et 56 min Récolte mécanique 21-sept.-09 1x /jour et 56 min 21-sept.-09 1x /jour et 23 min Réception de la vendange 21-sept.-09 1x /jour et 23 min Tri de la vendange 21-sept.-09 1x /jour et 15 min Tri de la vendange 21-sept.-09 Pressurage direct 21-sept.-09 CO2 1x /jour et 150 min Pressurage direct 21-sept.-09 CO2 Enzymage 21-sept.-09 Enzym'amplitude 2g/hL 1x /jour et 3 min Enzymage 21-sept.-09 Enzym'amplitude 2g /hL 1x /jour et 3 min Sulfitage 21-sept.-09 Sulfisol 10% 3g/hL 1x /jour et 3 min Sulfitage 21-sept.-09 Sulfisol 10% 3g/hL 1x /jour et 3 min Protection oxydation 21-sept.-09 Carboglace 3g/kg 3x /jour et 1 min Protection oxydation 21-sept.-09 Carboglace 3g/kg Débourbage statique naturel 21-sept.-09 1x /jour et 1080 min Débourbage statique naturel 21-sept.-09 Levurage 22-sept.-09 1x /jour et 33 min Stabulation à froid 22-sept.-09 Aligal 1 Levurage 28-sept.-09 Excellence FTH Régulation thermique 22-sept.-09 1x /jour et 30 min Régulation thermique 28-sept.-09 Levuline ALS 20g/hL 1x /jour et 15 min 1x /jour et 150 min 3x /jour et 1 min 1x /jour et 1080 min Stabulation de 6 jours et Aligal1 2x /jours 20g/hL 1x /jour et 33 min 1x /jour et 30 min Ajout d'activateurs 26-sept.-09 Phosphate diammonique et Thiamine Ajout d'activateurs 26-sept.-09 Fermaid E 15g/hL 1x /jour et 3 min Ajout d'activateurs 1-oct.-09 Phosphate diammonique et Thiamine 7,5g/hL 8g/hL 2x /jour et 21,5 min Ajout d'activateurs 1-oct.-09 Fermaid E 15g/hL 1x /jopur et 3 min 1x /jour et 3 min Cliquage 1-oct.-09 Aligal 3 8g/ hL 2x/jour et 21,5 min 1x /jour et 21,5 min Ajout d'activateurs 2-oct.-09 Fermaid E 1x /jour et 20 min Ajout d'intrants 2-oct.-09 Optiw hite 35g/hL 1x /jour et 3 min Ajout d'intrants 4-oct.-09 Bioarom 30g/hL Soutirage 7-oct.-09 Cliquage 26-sept.-09 Aligal 3 Ajout d'activateurs 29-sept.-09 Fermaid E Aligal 3 Cliquage 1-oct.-09 Soutirage 7-oct.-09 Sulfitage 7-oct.-09 Soutirage 19-janv.-10 Stabilisation par ajouts d'intrants 19-janv.-10 7,5g/hL 1x /jour et 3 min Ajout d'activateurs 28-sept.-09 Genesis Native 30g/hL 1x /jour et 10 min 1x /jour et 3 min 8g/hL Sulfisol 10% 3g/hL Miracolle 16g/hL 1x /jour et 3 min 1x /jour et 3 min 1x /jour et 3 min 1x /jour et 20 min Sulfitage 7-oct.-09 Sulfisol 10% 3g /hL 1x /jour et 3 min 1x/jour et 30 min Enzymage 15-oct.-09 AR 2000 2g/hL 1x /jour et 3 min 1x/jour et 15 min Soutirage 19-janv.-10 Miracolle 16g/hL 1x/jour et 15 min Soutirage 28-janv.-10 1x/jour et 30 min Stabilisation par ajouts d'intrants 19-janv.-10 Filtration par filtre à alluvionnage 28-janv.-10 1x/jour et 1h10 min Soutirage 28-janv.-10 1x/jour et 30 min Soutirage 22-févr.-10 1x/jour et 30 min Filtration par filtre à alluvionnage 28-janv.-10 1x/jour et 1h10 min Stabilisation par ajouts d'intrants 22-févr.-10 Kyocell liquide 20cL/hL Soutirage 22-févr.-10 Sulfitage 22-févr.-10 Sulfisol 10% 2,5g/hL Stabilisation par ajouts d'intrants 22-févr.-10 Kyocell liquide 20cL/hL Filtration par filtre à alluvionnage 22-févr.-10 Sulfisol 10% 2,5g/hL Sulfisol 10% 0,5g/hL Mise en BIB Elevage USUEL Réception de la vendange Opérations fermentaires (FA) Opérations préfermentaires Le tableau 1 présente les données des deux modalités, telles qu’elles sont saisies dans le fichier Excel « Volet technique ». Les opérations ou ajouts indiqués en rouge sont réalisés uniquement sur l’itinéraire « Optimisé ». Sulfitage 23-févr.-10 Tirage 23-févr.-10 1x/jour et 1h10 min Sulfisol 10% 0,5g/hL Sulfitage 22-févr.-10 Filtration par filtre à alluvionnage 22-févr.-10 1x/jour et 10 min Sulfitage 23-févr.-10 1x/jour et 6h Tirage 23-févr.-10 1x/jour et 30 min 1x/jour et 1h10 min 1x/jour et 10 min 1x/jour et 6h Sur vins finis, les analyses révèlent des acidités totale et volatile plus basses sur le vin Optimisé que sur le vin Usuel, un pH plus élevé et une DO420 légèrement plus basse. Le tableau 2 donne les résultats de dosages des molécules aromatiques. Globalement, leurs concentrations sont plus élevées sur l’itinéraire Optimisé que sur l’Usuel (la seule exception concerne l’acétate d’hexyle Ŕ poire-banane). La concentration en thiols, 3MH (3mercaptohexanol) conférant au vin les odeurs de pamplemousse Ŕ agrumes Ŕ fruits exotiques, est légèrement plus élevée, c’est le cas pour les autres molécules typiques des arômes fruités, bonbon anglais, fruité-doux, agrumes, floraux, fruités… dans des proportions faibles parfois, mais qui ajoutées les unes aux autres induisent des différences à la dégustation. Thiols Esters/alcools supérieurs 3MH ac3MH acétate d'isoamyle hexanoate d'éthyle acétate d'hexyle octanoate d'éthyle décanoate d'éthyle b-phenylethyl acétate 2-phényléthanol ng/L ng/L (µg/L) (µg/L) (µg/L) (µg/L) (µg/L) (µg/L) (µg/L) USUEL 184 nd 1481 964 342 1270 540 2018 2,02 OPTIMISE 229 nd 1642 1076 288 1613 587 2699 2,70 41 Le tableau 3 montre que sur les 13 critères évalués, 5 sont jugés significativement différents (seuil α = 5%) : la note agrume, la complexité des odeurs, l’équilibre, l’intensité des arômes (retro-nasal) et la persistance. Pour ces 5 critères et la qualité globale (significativité : 7%) la note obtenue par le vin Optimisé est supérieure à celle du vin Usuel. La figure 1 visualise les écarts constatés entre les deux vins à la dégustation. Critères Intensité olfactive Note végétale Fraîcheur Agrumes Fruité Note florale Complexité des odeurs Acidité Equilibre Amertume Intensité des arômes Persistance Qualité globale Itinéraire Usuel Itinéraire Optimisé Significativité (Seuil 5%) 5,4 3,7 4,4 2,7 4,5 3,3 4,3 5,3 4 3,6 4,1 3,7 4,5 5,9 4 5,1 4,7 5,4 3,5 5,6 4,9 6,5 2,7 5,9 6,2 6,1 41 72 21 3 27 62 4 51 <1 21 <1 <1 7 2) Volet économique Le but principal est de calculer le coût d’élaboration de ces 2 vins blancs de Sauvignon. C’est dans ce volet qu’apparait tout l’intérêt de développer l’outil informatique, qui permet non seulement de calculer automatiquement les coûts de production d’un itinéraire complet, mais aussi d’avoir une vision des coûts par étape (préfermentaire, fermentaire …etc.) et par poste (Energie, main d’œuvre, etc.…). A titre d’exemple, le tableau 4 est extrait du « logiciel » et montre l’ensemble des données saisies pour le stade « préfermentaire » de l’itinéraire Usuel. Grâce à ces données, ainsi qu’à d’autres plus générales (prix du m³ d’eau, du KW d’électricité, salaires,…etc.), saisies dans un autre tableau, le coût de cet itinéraire, à ce stade, est calculé. La même chose est réalisée pour toutes les étapes des deux itinéraires, ce qui permet au final d’obtenir les tableaux 5 et 6 qui sont les bilans comparatifs globaux des deux modalités. 42 Préfermentaire Stade: Type d'tinéraire: Iti USUEL Date : Tâches Se rendre sur la parcelle et retour Transport du raisin Utilisation machine Nettoyage et rangement du matériel Réception_de_la_vendange_ Réception_de_la_vendange_ Opérations Récolte_mécanique_ Vol de vin traité (hl) : Préparation du matériel Préparation du matériel Préparation du matériel Transfert de la vendange (tapis, vis…) Transfert de la vendange (tapis, vis…) Transfert de la vendange (tapis, vis…) Nettoyage et rangement du matériel Nettoyage et rangement du matériel Retour 13 Main d'œuvre (identification opérateurs) Répétitions tâches (nbre) 1 Chef de culture 1 1 MO (min) Prestataire Matériel Puiss (kW/h) Conso ( l/h) 25 Tps d'utilis (min) Volume traité (hl) 0 13 Produits Dose utilisée (g ou ml/hl) Multigrap 40 Conso en eau (l) 6 Machine à vendanger Saisonnier 1 6 Tracteur 5 6 13 Chef de culture 56 Location Machine Location à vendanger Machine à vendanger 25 53 13 1 Chef de culture 70 Machine à vendanger 25 55 13 1 Maître de chai Saisonnier 1 Saisonnier 2 3 Pompe N°10 0 13 1 Maître de chai Saisonnier 1 Saisonnier 2 7 0 13 1 Maître de chai 3 3 13 1 Maître de chai Saisonnier 1 Saisonnier 2 7 Location Benne Vibrante Benne Vibrante 7 13 1 Maître de chai Saisonnier 1 Saisonnier 2 8 Sauterelle 5 8 13 1 Maître de chai 2 Pompe N°10 12 2 13 1 Maître de chai 6 Sauterelle 5 5 13 Oxigrap 10 35 1 Maître de chai 2 Benne Vibrante 1 13 Oxigrap 10 17 12 Delta T°C 3 650 15 Maître de chai Pressurage_ Inertage Enzymage Inertage Maître de chai Préparation du matériel Ajout de l'agent protecteur 2 Maître de chai 0,5 Bonbonne CO2 2 Maître de chai 0,25 Bonbonne CO2 1 Maître de chai 1 13 13 Gaz Carbonique 1 13 Enzym'amplit ude Maître de chai 0,5 13 2 Maître de chai 0,5 13 2 Maître de chai 0,25 13 2 Maître de chai 0,5 13 1 Maître de chai 5 Pressoir 40 hL 1 Maître de chai 75 Pressoir 40 hL Transfert 1 Maître de chai 7 Nettoyage et rangement du matériel 1 Maître de chai 34,5 Prépartion/Aj out de la solution d'enzymes Nettoyage/ra ngement du matériel Préparation du matériel Ajout de l'agent protecteur Nettoyage et rangement du matériel Préparation du matériel Pressurage 0,25 2 0,26 1,50 Carbo-glace 273 13 15 75 3 13 13 Gaz Carbonique 13 Oxigrap 23 20 510 Débourbage_statique_naturel Sulfitage_ Maître de chai Préparation du SO2 Sulfitage (dose de SO2 apportée) Nettoyage et rangement du matériel Préparation du matériel Transfert du moût Nettoyage et rangement du matériel Nettoyage et rangement du matériel 1 Maître de chai 0,33 13 Sulfisol 10% 1 Maître de chai 0,15 13 Sulfisol 10% 1 Maître de chai 2,42 13 1 Maître de chai 13 Fenwick 1 Maître de chai 40 Pompe N°8 1 Maître de chai 11 Pompe N°8 1 Maître de chai 1,5 Fenwick 2 13 4 40 13 4 3 13 13 3 TERIXNM Plus Bio Gaz Carbonique 49 Oxigrap 20 Multigrap 10 Analyses_œnologiques Soutirage_Transfert_ Traitement_des_bourbes_ Maître de chai Préparation du matériel Transferts des bourbes Nettoyage et rangement du matériel 1 Maître de chai 1,5 1 Maître de chai 3,3 Pompe N°8 4 1 13 13 1 Maître de chai 1 Pompe N°8 4 1 13 10 Maître de chai Maître de chai Préparation du matériel Pompage du jus Récupération des bourbes Nettoyage et rangement du matériel Prélèvement de l'échantillon 1 Maître de chai 6 1 Maître de chai 19 Pompe N°8 4 20 13 1 Maître de chai 4 Pompe N°8 4 2 13 1 Maître de chai 6 13 1 Maître de chai 2 13 42 43 Au final, le coût d’1hL d’une vinification de type Usuel est de 78,80 € et celui d’une vinification type Optimisé est de 81,27 €. L’écart est donc de presque 2,50 €/hL, soit environ 3%, ce qui n’est pas négligeable. Pour les deux vins, le stade le plus couteux est le conditionnement, à cause, entre autres, de la location de l’appareil de mise en BIB (prestation), des prix des fournitures saisis dans le poste « intrants » (poches, cartons) et de la préparation du vin (filtration), au regard des faibles volumes mis en BIB au chai du lycée. Les figures 2 et 3 représentent respectivement les coûts par stade d’élaboration et les coûts par poste, des deux itinéraires. Itinéraire OPTIMISE (€/hl vin produit) Eau Energie Main d'œuvre Intrants Prestations T°C Pré-fermentaire 0,99 2,24 7,77 2,40 13,57 1,28 28,26 € Fermentaire 0,03 0,00 4,12 3,58 6,67 0,18 14,58 € Elevage 0,04 0,03 2,00 0,34 0,00 0,00 2,41 € Mise en BIB 0,06 0,03 2,33 25,80 7,82 0,00 36,03 € 28,05 1,46 81,27 € STADES TOTAL 1,12 € 2,30 € 16,21 € 32,14 € TOTAL 81,27 € TOTAL Itinéraire USUEL (€/hl vin produit) Eau Energie Main d'œuvre Intrants Prestations T°C Pré-fermentaire 1,00 2,25 7,87 2,39 13,57 0,00 27,08 € Fermentaire 0,00 0,01 5,37 1,15 6,67 0,26 13,47 € Elevage 0,02 0,03 1,97 0,24 0,00 0,00 2,26 € Mise en BIB 0,01 0,03 2,33 25,80 7,82 0,00 35,99 € STADES TOTAL 1,04 € 2,32 € 17,54 € 29,58 € 28,05 € TOTAL 0,26 € TOTAL 78,80 € 78,80 € 44 Ce qu’il faut retenir : La méthodologie et l’outil utilisés ont permis d’évaluer et comparer les 2 itinéraires de vinification des points de vue technique et économique L’objectif d’un point de vue technique est atteint : l’itinéraire optimisé a permis d’aboutir à un vin plus aromatique, plus apprécié du jury L’évaluation économique permet de constater que le coût de production de l’itinéraire optimisé est supérieur à celui de l’itinéraire usuel, en phase préfermentaire, à cause de la stabulation à froid (énergie) et en phase fermentaire à cause du coût des intrants Le volet économique permet également de voir que la phase de la mise en BIB est particulièrement couteuse Et après : Il faudra réunir les 3 fichiers existants en un seul outil pour éviter les saisies multiples des informations communes aux trois volets de l’évaluation. Il faut rendre l’outil plus simple d’utilisation pour qu’il soit accessible à tous les acteurs de la filière Il faudra enrichir la base de données pour avoir le maximum de références techniques nouvelles par objectif produit et valider des itinéraires de façon globale ou par opération unitaire. C’est à cette condition que l’outil deviendra un véritable OAD Il faudra particulièrement s’appliquer à renseigner le volet environnemental pour lequel on manque de références Remerciements : Nous remercions Interloire et FranceAgrimer pour leur aide financière. Nous sommes très reconnaissants au Lycée Viticole d’Amboise (Domaine de La Gabillière) de nous avoir permis de réaliser ces essais dans son chai et de s’être si fortement impliqué dans ce programme. Références bibliographiques : Anneraud C., Baudouin Y., Crachereau JC., Vinsonneau E. (2011). Itinéraires d’élaboration des vins, les évaluer pour les faire évoluer. Union Girondine n°1080. pp49-52. Baudouin Y., Vinsonneau E. (2010). Optimisation des itinéraires de vinification : de nouveaux critères de choix. Les rencontres viticoles d’Aquitaine 2010. Henimann G. (2010). Itinéraires d’élaboration des vins : évaluation technique, économique et environnementale. Mémoire de fin d’étude ESA d’Angers. 158p. Kerner S., Rochard J. (2009). Consommation d’énergie et effet de serre, 2ème partie : démarches et outils. IN : Revue des œnologues n°130. Pp62-64. 45 Mise en bouteille et conservation Rémi Guérin-Schneider IFV et UMT Qualinov, 2 place Viala, 34 060 Montpellier Mots clefs : oxydation, arômes, thiols variétaux, conservation, mise en bouteille La qualité aromatique des vins blancs est un déterminant majeur de choix pour les consommateurs. Les évolutions des goûts des consommateurs et de leur pratique de consommation ont orienté les vins vers des profils organoleptiques faciles à appréhender, où l’arôme doit être marqué et très reconnaissable. Dans le cas des vins blancs plus particulièrement, on assiste depuis plus de 10 ans a un engouement des marché vers des profils très fruités et frais, souvent caractéristiques de la présence de molécules comme les thiols variétaux. Il est notoire que ces types de profils, obtenus souvent par des vinifications de type « réducteurs » pour limiter la dégradation des composés volatils formés, restent sensibles aux conditions de stockage après fermentation, d’embouteillage et de conservation ensuite. Il convient donc de mieux comprendre les mécanismes en jeu et pour pouvoir raisonner certaines pratiques œnologiques dans l’objectif d’une meilleure préservation du profil obtenu. 46 Les mécanismes moléculaires mis en jeu La perte aromatique Le mécanisme de perte aromatique des vins, et plus particulièrement des vins blancs est une observation ancienne. Les premiers travaux qui ont tenté d’apporter des explications à cette observation ont dans un premier temps porté sur les esters fermentaires. En effet ces composés sont synthétisés par la levure en quantité très abondante, au-delà de leur taux d’équilibre dans le milieu. Lorsque la réaction d’estérification, catalysée en quelque sorte par la levure, s’arrête, c’est à dire en fin de fermentation alcoolique, ces composés ont donc tendance à s’hydrolyser par retour à l’équilibre. Ceci est vrai pour les esters éthyliques d’acides gras linéaires, mais le phénomène est lent. Pour les acétates d’alcool supérieurs, le phénomène est beaucoup plus rapide, bien qu’il dépende de la structure de chaque composé et du pH du vin (Ramey et al., 1980; Garofolo et al., 1994). Il faut cependant noter que certains esters ont un comportement inverse : les esters éthyliques ramifiés. Ces derniers sont en effet produits en fermentation à des teneurs en deçà de l’équilibre chimique comme démontré par (DiazMaroto et al., 2005) si bien qu’après fermentation, leurs teneurs continuent d’augmenter par estérification chimique. L’impact de ce mécanisme sur l’arôme des vins n’est pas connu en détail mais les seuils de détection de ces composés étant faibles, et les notes olfactives qu’ils apportent rappelant les fruits rouges (Pineau et al., 2009) , il n’est pas exclu que ce mécanisme contribue à maintenir les notes fruités dans vins plus longtemps. Schéma de dégradation des thiols variétaux dans les vins En terme réactionnel, les thiols sont des composés qui peuvent facilement s’oxyder dans les vins pour donner des disulfures (Mestres et al., 1999). Ainsi, la présence dans le milieu d’un oxydant comme l’oxygène, conduit à la formation de disulfures dont la liaison S-S (65 kcal.mol-1) est très stable. L’oxygène peut agir directement (via une réaction de Fenton générant des radicaux libre), et l’on observe la formation de disulfure, dont le seuil de détection est généralement plus fort, ce qui entraîne une perte d’intensité aromatique. La dégradation des thiols, peut également être le résultat d’une addition électrophile de quinones, issues de l’oxydation de polyphénols sous l’action de l’oxygène ou de cation métalliques comme le Fe3+. Ainsi le schéma réactionnel proposé (Nikolantonaki et al., 2009) est le suivant (figure 1). 2 RSH Fe 2+ Fe 3+ Fe O2 HO_O* H RSSR + H + H HO + 2O 2+ Fe 3+ 2 RSH HO* OH H + RSSR + H O* H OH OH O* OH 2O O ra d ica l se m i q u in o n e OH O Fe O OH + O Fe 3+ OH O Fe OH 2+ + RSH q u in o n e SR o xid a tio n d u ca té ch o l p a r le F e 3+ Figure 1 : Dégradation des thiols au cours du stockage des vins, réactions chimiques mises en jeu 47 Cette réaction n’est pas spécifique des thiols variétaux, bien qu’il soit vraisemblable que les cinétiques d’addition et d’oxydation soient dépendantes des structures chimiques impliquées. Il faut par ailleurs noter que si l’oxydation des thiols en disulfure est une réaction réversible en fonction du potentiel redox du vin, l’addition sur les quinones elle ne l’est pas, et on assiste donc à une perte irréversible de ces molécules. Comment limiter la perte aromatique Limitation des phénomènes d’hydrolyse des composés fermentaires Deux paramètres peuvent permettre de limiter leur hydrolyse : le pH et la température. L’hydrolyse des acétates est favorisée par des pH élevés, ainsi le contrôle dans les vins peut contribuer à limiter leur dégradation. Malgré l’amplitude limitée des pH en œnologie ce levier n’est pas à négliger car entre pH 2,95 et 3,58 les vitesses sont multipliées d’hydrolyse sont multipliées par 5 (celles des esters éthyliques, par 2 à 3 ; (Ramey et al., 1980). L’autre paramètre est la température qui permet de ralentir la réaction d’hydrolyse. A titre d’exemple, la vitesse d’hydrolyse de l’acétate d’isoamyle diminue d’un facteur 4 entre 21°C et 4°C (Marais et al., 1980). Cela nécessite bien évidement des capacités en frigories importantes, notamment lors de la période printanière et estivale. Une autre option choisie par quelques structures de production est la fermentation en différé. Au delà des problèmes fiscaux que cela peut engendrer, il faut cependant noter qu’il reste plus simple de conserver un vin à basse température sans déviation notamment microbienne, qu’un moût qui nécessite des installations particulières (flash pasteurisation, conservation en cuve sous pression, températures plus basses encore). A notre connaissance aucune étude avantage/coût n’a été réalisée pour raisonner ce choix stratégique fortement impactant. Limitation des phénomènes d’oxydation des composés de type thiols Du mécanisme décrit précédemment (figure 1) il ressort plusieurs leviers pour limiter la diminution des thiols dans les vins. Le premier consiste bien évidemment à limiter la dissolution d’oxygène, depuis la fin de la fermentation alcoolique jusqu’à la bouteille. Cela peut passer par un élevage des vins sur lies dont il a été démontré que qu’elles entrainaient la consommation rapide d’oxygène (Salmon et al., 2000) et étaient responsables de teneurs plus élevées en thiols après élevage (Schneider, 2001). Les conditions d’embouteillage et la limitation de l’OTR des obturateurs sont également des facteurs d’impacts, comme souligné par de nombreux auteurs (Lopes et al., 2006; Skouroumounis et al., 2005; Ugliano et al., 2012; Wirth et al., 2010). Ces observations expliquent le succès des capsules vis fortement étanches à l’oxygène dans le conditionnement des vins à profil thiol. Cependant, d’autres paramètres de composition du vin sont tout aussi important que l’oxygène, et ceux d’autant plus qu’il a été démontré récemment que la réaction majoritaire expliquant la perte de thiols variétaux au cours de la conservation était leur addition sur les quinones d’ortho diphénols. On peut noter dans un premier lieu le niveau de SO2, la teneur en polyphénols, mais également celle en métaux tels que le Fe2+. La protection par le SO2 reste primordiale ; il permet en effet permet d’une part de limiter les réactions de fenton à l’origine de l’oxydation des thiols en disulfure, mais également de limiter l’oxydation des ortho diphénols en quinones, ou de réduire ces dernières si elles sont déjà présentes. D’autres antioxydants peuvent être envisagés, mais le plus souvent en combinaison avec le SO2, comme dans le cas de l’acide ascorbique, agissant par réduction des quinones. Cependant les produits de dégradation de l’acide ascorbique sont des pro-oxydants et la présence de SO2 est donc essentielle si l’on veut éviter des phénomènes d’oxydation ultérieurs. L’ajout de glutathion est également proposé qui protègerait la dégradation des thiols par addition compétitive sur les quinones dans le vin (LavigneCruège et al., 2003).Cependant les données contradictoires dans la littérature doivent nous amener à une certaines prudence quant à l’efficacité systématique de ce produit (non autorisé encore). Pour les polyphénols, il apparaît donc important de limiter leur teneur dans les vins blancs, ce qui est fait empiriquement depuis longtemps. La qualité de la matière première ainsi que les conditions de pressurages et le fractionnement des jus sont des étapes à maîtriser. Les raisins dont les conditions de culture ont entrainé des teneurs en polyphénols plus importantes sont les moins adaptés. Il convient aussi de bien séparer les jus de fin de presse, qui malgré leur teneur en précurseurs de thiol plus importantes (Roland et al., 2010) sont aussi ceux qui présentent des IPT plus forts. Un traitement particulier de ces fractions peut être envisagé pour essayer de valoriser ce potentiel aromatique en fermentation. 48 Il faut noter que des conditions de pressurage limitant fortement les réactions d’oxydation, préservent dans les moûts et les vins des teneurs en espèces polyphénoliques oxydables plus importantes (Roland, 2010) qui constituent une sorte de bombe à retardement. Dans ces situations, la vigilance par rapport à l’oxygène ne doit jamais être relâchée depuis la fin de fermentation alcoolique jusqu’à la mise en bouteille. A cette étape, un collage des moûts peut aussi être envisagé qui peut permettre selon l’adjuvant choisi de limiter la charge polyphénolique ainsi que certains métaux (cas de la PVPP-PVI). Favoriser l’émergence d’exhausteur du fruité Dernière possibilité pour pallier la perte du fruité des vins lors de leur stockage ; favoriser la genèse de composés connus pour être des exhausteurs du fruité, comme la β-damascénone (Pineau et al., 2007) et le diméthylsulfure (Segurel et al., 2004). L’hypothèse, encore à démontrer, est que leur apparition progressive au cours du stockage des vins, notamment en bouteille pourrait permettre d’intensifier les notes fruitées alors même que les quantités de composés fermentaires diminuent. Le rôle de ces composés dans les vins est surtout bien documenté dans les vins rouges (Segurel et al., 2004; Escudero et al., 2007; Pineau et al., 2007) ; il convient d’engager des études dans les vins rosés et les vins afin de déterminer précisément les seuils d’exhaustion et ainsi par la suite raisonner les technologies viticoles et œnologiques pour assurer leur présence dans les vins, notamment en se basant sur des stratégie d’assemblage, tant il apparaît que les conditions d’accumulation de leur précurseurs dans les raisins sont plutôt défavorables à celle de la production de vins au profil fruité frais (Dagan et al., 2012). Références bibliographiques Dagan L & Schneider R. 2012. Le sulfure de diméthyle : quels moyens pour gérer ses teneurs dans les vins en bouteille ? L'arômes des Vins. Toulouse / Zaragoza. p. 7-10. Diaz-Maroto MC, Schneider R & Baumes R. 2005. Formation Pathways of Ethyl Esters of Branched Short-Chain Fatty Acids during Wine Aging. 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