Etat de la bacilloscopie à deux mois et résultat final subséquent du

Transcription

Etat de la bacilloscopie à deux mois et résultat final subséquent du
INT J TUBERC LUNG DIS 3 (11): 1047-1049
© 1999 IUATLD
Correspondance
Etat de la bacilloscopie à deux mois et résultat final
subséquent du traitement chez les nouveaux patients atteints
d'une tuberculose pulmonaire à bacilloscopie positive
NOUS SOUHAITERIONS participer au débat en
cours au sujet de la valeur d'un examen
bacilloscopique à 2 mois chez les patients traités
pour une tuberculose pulmonaire (TBP) à
bacilloscopie positive. A l'occasion d'une initiative
de recherche opérationnelle couvrant l'ensemble du
Malawi en 1999, nous avons visité 23 hôpitaux de
district ou de missions dans les régions du nord, du
centre et du sud du pays. Dans ces hôpitaux, tous
les nouveaux patients atteints de TBP à
bacilloscopie positive sont traités par une phase
initiale intensive de 2 mois comportant
quotidiennement la streptomycine, la rifampicine,
l'isoniazide et l'ethambutol (SRHE), administrés
sous supervision à l'hôpital et par une phase de
continuation de 6 mois comportant HE administrés
quotidiennement au domicile et sans supervision.
Les frottis d'expectoration sont examinés à 2 mois
et chez les patients où ils restent positifs, la phase
initiale est prolongée. Des frottis répétés sont
examinés à des intervalles d'une semaine et dès
qu'ils s'avèrent négatifs, le patient est placé sous
phase
de
continuation.
Si
les
frottis
d'expectorations sont encore positifs à 3 mois, les
patients sont placés en phase de continuation quel
que soit le résultat du frottis.
Dans les 23 hôpitaux, les registres TB ont été
examinés pour les patients enregistrés entre le 1er
janvier et le 31 décembre 1997. On a recueilli les
informations suivantes : 1) nombre total de nouveaux patients enregistrés pour TBP à bacilloscopie positive et nombre de patients dont la
bacilloscopie est encore positive à 2 mois ; 2)chez
les patients à bacilloscopie positive à 2 mois, état
du frottis des expectorations à la fin de la période
prolongée de phase intensive du traitement, état du
frottis à 5 mois et résultat final du traitement selon
les définitions standardisées.1
Lorsque ce fut possible, les cartes de traitement
ont été recueillies pour déterminer la longueur de
la phase initiale intensive prolongée de traitement.
Pour chaque patient dont les expectorations étaient
positives à 2 mois (patient-index), on a examiné le
registre TB pour chercher les nouveaux patients
consécutifs à bacilloscopie positive localisés
immédiatement en dessous du patient-index. Les
deux patients les plus proches dans le registre dont
la bacilloscopie était négative à 2 mois et qu’il était
possible d’apparier pour le sexe et l'âge (à 5 ans
près) avec le patient-index ont été considérés
comme contrôles. L'état du frottis d'expectoration à
5 mois et le résultat final du traitement ont été
déterminés pour chaque patient-contrôle. Des
comparaisons entre les cas index et contrôle ont été
menées grâce au test exact de Fisher bilatéral. Les
risques relatifs (RR), leurs intervalles de confiance
à 95% (IC95%) et les valeurs de P ont été calculés
lorsque cela était approprié.
Il y a eu 3638 nouveaux patients atteints de
TBP à bacilloscopie positive, dont 119 s'avérèrent
positifs à 2 mois (patients-index). Parmi les
patients-index, il y avait 63 hommes et 56 femmes
avec un âge moyen (DS) de 37 (14) ans. Tous ont
bénéficié d'une phase initiale intensive prolongée
de traitement, quoique la longueur exacte de celleci n'ait pu être déterminée que chez 21 patients.
Parmi ceux-ci, huit avaient reçu 4 semaines
supplémentaires, deux entre 2 et 3 semaines et 11
avaient reçu un supplément de 2 semaines ou
moins. A la fin de la phase initiale prolongée, 117
patients-index avaient une bacilloscopie négative
et deux étaient encore positifs à l'examen direct.
Il y a eu 237 patients-contrôle (pour un des
patients-index, il n'y eu qu'un contrôle au lieu de
deux), 125 hommes et 112 femmes dont l'âge
moyen fut de 37 (14) ans. L'état du frottis à 5 mois
et le résultat final du traitement à 8 mois pour les
patients-index et pour les patients-contrôle sont
repris dans le Tableau. A 5 mois, il y a eu
significativement plus de patients-index que de
patients-contrôle dont la
bacilloscopie était
positive (2/37, RR=2,19 ; IC95%=1,34-3,58 ;
P<0,05). Pour le résultat final du traitement, on a
noté un plus grand nombre d'échecs du traitement
pour les patients-index (9/119) que pour les
patients-contrôle (3/237 ; RR = 2,35 ; IC95% :
1,63-3,37 ; P<0.05). Pour ce qui concerne les
autres résultats finaux du traitement, on n'a pas
noté de différences entre les deux groupes. Les
deux patients dont l'expectoration ne s'était pas
négativée à 3 mois restèrent des échecs du
traitement à la fin de celui-ci. Chez les patients qui
[Traduction de la correspondance : "Sputum smear status at two months and subsequent treatment outcome in new
patients with smear-positive pulmonary tuberculosis." Int J Tuberc Lung Dis 1999; 3 (11):1047-1049.]
2
The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease
Tableau Bacilloscopies à 5 mois et résultat final du
traitement chez les nouveaux patients atteints de
tuberculose pulmonaire à bacilloscopie positive en
relation avec l'état de négativation du frottis à 2 mois
Nombre
Etat du frottis à 2 mois
Patients
Patients
Index
contrôle
(frottis +)
(frottis -)
n (%)
n (%)
119
237
Frottis d'expectoration à 5 mois
Frottis positifs
5 (4)
Frottis négatifs
94 (79.)
Frottis non effectué
20 (17.)
2 (1)
192 (81)
43 (18)
Résultat du traitement final à 8 mois
Guérison
85 (71.)
Traitement terminé
2 (2)
Décès
10 (8)
Echec
9 (8)
Défaillance
7 (6)
Transfert
6 (5)
182 (77)
1
36 (15)
3 (1)
9 (4)
6 (3)
s'avérèrent des échecs du traitement, l'on ne
dispose pas de données sur la longueur de la
prolongation de la phase initiale car les cartes de
traitement n'ont pas été retrouvées.
Cette étude rétrospective montre que dans les
conditions de routine du programme au Malawi,
les patients dont la bacilloscopie était positive à 2
mois et dont la phase initiale de traitement avait été
prolongée ont un risque accru d'échec du
traitement à 5 mois et à 8 mois. Cette étude connaît
les mêmes limites que toutes les études
rétrospectives et d'autre part, on n'a pas apparié les
patients-index et les patients-contrôle en fonction
de leur statut sérologique VIH. Toutefois, les
résultats sont similaires à ceux obtenus en Chine2
et en concordance avec ceux obtenus en
Azerbaijan.3 On considère actuellement,4 en se
basant sur les données provenant de l'ère antérieure
au VIH à Hong Kong,5 qu'il est sage de prolonger
l'utilisation de la rifampicine lorsque le patient a
encore une bacilloscopie positive à 2 mois, ce qui
permet de réduire le risque d'échec du traitement.
Notre étude ne suffit pas à confirmer ou à réfuter
cette opinion, puisque tous les patients ont eu une
prolongation de leur traitement initial. Néanmoins,
une prolongation de la phase initiale intensive du
traitement (entre 1 et 4 semaines) chez les patients
qui ont encore une bacilloscopie positive à 2 mois
reste associée à un risque accru d'échec du
traitement par comparaison aux patients dont la
bacilloscopie était négative à 2 mois.
L'examen du frottis d'expectoration à 2 mois
s'avère donc un outil utile, mais entraîne des
problèmes logistiques. En raison de l'augmentation
énorme des cas de TB au cours de la dernière
décennie, le Programme National de Lutte contre
la TB au Malawi a été forcé de prendre en
considération une décentralisation de la
supervision de la phase initiale du traitement dans
les centres de santé et dans la collectivité. Nous
menons des essais- pilote de décentralisation dans
cinq districts, et comme c'est le cas à Pietersberg
en Afrique du Sud,6 nous n'obtenons qu'avec de
grandes difficultés les résultats des bacilloscopies
des expectorations à 2 mois dans les centres de
santé, en temps utile pour prendre une décision
concernant l'extension ou non de la phase initiale
du traitement. Comme nos collègues SudAfricains, nous nous demandons aussi ce qui
prouve que la prolongation de la phase initiale
intensive pendant un mois s'accompagne d'une
amélioration du résultat final. La preuve n'est pas
facile à trouver. Wilkinson et coll.7 suggèrent qu'il
n'est pas nécessaire de modifier le traitement
lorsque la bacilloscopie reste positive à 2 mois :
toutefois les régimes de traitement TB utilisés à
Hlabisa7 sont si différents de ceux utilisés ailleurs
en Afrique, qu'il n'est pas possible d'extrapoler
leurs résultats avec un degré quelconque de
sécurité. Un essai contrôlé randomisé ou une
recherche opérationnelle bien conduite s'imposent
pour essayer de répondre à cette question et les
suggestions provenant de Levy et Feng-Zeng8 sont
une étape utile dans cette direction.
F.M.L. SALANIPONI
J.J. CHRISTENSEN
F. GAUSI
J.J. KWANJANA
A.D. HARRIES*
National Tuberculosis Control Programme
Ministry of Health and Population
P O Box 30377
Lilongwe, Malawi
* C/O British High Commission
P O Box 30042,
Lilongwe 3,
MALAWI
Références
1
2
3
4
World Health Organization. Treatment of Tuberculosis.
Guidelines for national programmes.
2nd ed.
WHO/TB/97.220. Geneva : WHO, 1997.
Feng- zeng Z, Levy M H, Sumin W. Sputum microscopy
results at two and three months predict outcome of
tuberculosis treatment. Int J Tuberc Lung Dis 1997; 1:
570-572.
Coninx R, Mathieu C, Debacker M, et al. First-line
tuberculosis therapy and drug-resistant Mycobacterium
tuberculosis in prisons. Lancet 1999; 353: 969-973.
Trebucq A, Rieder H L. Two excellent management tools
for national tuberculosis programmes: history of prior
Correspondance
5
6
treatment and sputum status at two months. Int J Tuberc
Lung Dis 1998; 2: 184-186.
Hong Kong Chest Service/British Medical Research
Council. Controlled trial of 4 three times weekly regimens
and a daily regimen all given for 6 months for pulmonary
tuberculosis. Second report: the results up to 24 months.
Tubercle 1982; 63: 89-98.
Barker R D, Millard F J C. Two excellent management
7
8
3
tools for national tuberculosis programmes. Int J Tuberc
Lung Dis 1999; 3: 454-455.
Wilkinson D, Bechan S, Connolly C, Standing E, Short G
M. Should we take a history of prior treatment, and check
sputum status at 2-3 months when treating patients for
tuberculosis? Int J Tuberc Lung Dis 1998; 2: 52-55.
Levy M, Feng-Zeng Z. Sputum microscopy at 2 and 3
months. Int J Tuberc Lung Dis 1998; 2: 862-863.