Ces petits commerçants coopératifs

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Ces petits commerçants coopératifs
Métiers
Ces petits commerçants coopératifs
Boulangeries, disquaires, supermarché... Plus d’une cinquantaine de commerces
de détail sont sous statut Scop. Avec une forte présence dans la distribution
de produits biologiques et issus du commerce équitable.
E
lles ont pignon sur rue et pourtant
on les connaît peu. On y retrouve
une librairie papeterie, un vendeur
de cycles, deux disquaires, une boutique
de prêt-à-porter, des magasins d’équipement de la maison (chauffage, cuisines),
quelques boulangeries, une cohorte de
détaillants d’alimentation biologique, et
même un supermarché. Les Scop du commerce de détail dépassent la cinquantaine en France, si on y inclut les établissements de restauration.
Dans un univers marqué par un esprit
“d’indépendance”, pourquoi ces créateurs d’entreprise ont-ils choisi le statut
Scop ? Tout d’abord parce que leur projet relevait d’une création collective et
non individuelle. On voit souvent le petit
commerçant comme un entrepreneur individuel. Or, 60 % des commerces de détail ont des salariés, soit bien plus que la
moyenne des autres secteurs. Autre spécificité des petits commerces en Scop : la
part importante du commerce équitable,
de l’insertion ou de l’agriculture biologique. Le développement de ces nouveaux
secteurs devrait susciter une croissance des
Biocoop
Biocoop
une coopérative au service
de l’alimentation bio
Sur les 250 magasins Biocoop,
25 sont en Scop, principalement
dans l’ouest de la France.
22 • janvier / février 2006 Participer 615
Le Local
Commerce durable
Le Local, boutique de commerce équitable située dans le centre piétonnier de Grenoble, a été créé
en Scop car les fondateurs souhaitaient « la protection du statut de salarié ».
commerces de détail en Scop. D’autant
que ceux-ci sont faits pour durer. En
effet, comme dans n’importe quelle Scop,
un associé qui quitte l’entreprise ou arrive
en fin de carrière ne récupère que sa mise
de départ, soit le capital investi lors de la
création ou de son entrée. La revente globale du fonds de commerce, une opération “plus-value” qui permet souvent un
gain substantiel, est impossible avec un
statut coopératif. Une contrainte qui est
contrebalancée par un avantage important : lancer un commerce en Scop permet à ses créateurs de devenir salariés de
leur entreprise. Un atout de poids lorsque
l’on sait que les entrepreneurs individuels
ne cotisent pas aux Assedic et ne peuvent
donc percevoir d’indemnités chômage en
cas de disparition de l’activité.
Le recours au statut Scop est fréquent pour
le commerce d’alimentation biologique,
notamment au sein du réseau Biocoop.
Issus de groupements d’achats de consommateurs bio dans les années 70, les magasins ont des statuts très variés aujourd’hui :
associations, coopératives loi de 47, Scop,
SA ou SARL classiques. Au niveau national,
le réseau est piloté par une société anonyme coopérative détenue conjointement
par des groupements de producteurs et
les magasins du réseau. Elle fédère plus de
250 entreprises dans toute la France, dont
25 Scop, installées principalement dans
l’Ouest (Bretagne et Pays-de-la-Loire).
Pour en savoir plus : www.biocoop.fr
Le Jardin de poche
vente de matériel de jardinage
à Rennes (Ile-et-Vilaine)
LOÏC ABRASSART
Créé en 2001 sous forme de boutique associative « très militante », selon l’un de
ses fondateurs, Gaël Gendrot, Le Jardin de
poche s’est mué en Scop en juillet 2003.
Après le magasin de Rennes, deux autres
boutiques ont été créées, à Lorient et à
Guingamp. Les consommateurs viennent
s’y fournir en graines et petits matériels
pour cultiver chez eux tomates, plantes
aromatiques et autres herbes... « Le statut d’association était trop limité, nous
voulions passer à autre chose. La forme
coopérative permet de motiver tout le
monde et d’établir une relation de confiance entre les quatre personnes qui travaillent », confie Gaël Gendrot.
Le Jardin de poche :
4, rue Barthélémy-Pocquet, 35000 Rennes,
tél. : 02 99 33 71 54 ; 51, bd de la Marne,
22200 Guingamp, tél. : 02 96 44 24 57 ;
4, rue Colbert, 56100 Lorient,
tél. : 02 97 84 09 38.
Cycle’n Co
magasin de cycles
à Saint-André-de-Corcy (Ain)
vité commerciale et pas une association.
Mais on ne se sentait pas d’être indépendants et nous souhaitions la protection du statut de salarié. » Après deux
ans d’existence, avec la Socoden comme
actionnaire extérieur, il souhaite constituer un « collectif de sociétaires » avec
les personnes qui ont prêté de l’argent
pour faire démarrer le projet.
Le Local :
12, rue Brocherie, 38000 Grenoble,
tél. : 04 76 42 10 86.
Cycle’n Co
Tchai Walla
restaurant et salon de thé
à Die (Drôme)
Les fondateurs de Cycle’n Co sont allés voir
l’Union régionale des Scop de Rhône-Alpes
après le refus par les banques
de leur dossier de demande de prêt.
Ils sont deux frères, l’un avec une expérience en grande distribution, l’autre avec
une spécialisation cycles. Après un licenciement, ils cherchent à se mettre à leur
compte. Mais lorsqu’ils vont voir les banques, leur dossier de prêt est refusé sans
explication. Auprès de l’Union régionale
des Scop de Rhône-Alpes, ils trouvent une
oreille plus attentive et réussissent à créer
leur boutique. De nécessité, le statut Scop
est devenu intéressant à plusieurs égards :
intéressement, participation, statut de
salarié. Mais chacun a son magasin !
Cycle’n Co : ZI La Sure,
01390 Saint-André-de-Corcy,
tél. : 04 72 08 50 13 ;
615, rue d’Anse,
69400 Villefranche-sur-Saône,
tél. : 04 74 68 09 62.
Le Local,
magasin de commerce équitable
à Grenoble (Isère)
« Nous avons choisi le statut Scop d’abord
pour être cohérents avec la philosophie
de notre projet : partage du pouvoir
de décision, répartition des bénéfices,
principe de coopération... », raconte
Eric Lalanne-Cloute, le gérant du Local,
boutique grenobloise de produits issus
du commerce équitable. « Dès le départ,
en 2003, nous voulions créer une acti-
A l’origine de Tchai Walla, le projet de
plusieurs femmes de Die dont l’ambition
était de créer un lieu de vie qui associe
consommation de tisanes, de thés et de
jus de fruits et petite restauration végétarienne. Fondé sous forme associative,
le projet se professionnalise et se transforme en entreprise, car « nous avons
voulu en faire une source d’emploi », explique Véronique Montagne, gérante de
Tchai Walla. Nous voulions bien sûr être
à parts égales et qu’il n’y en ait pas une
qui décide pour les autres. » D’où le choix
Un seul supermarché en Scop
Au premier abord, le magasin Unico du Chatelard,
en S avoie , ne d i f fère en
rien des autres magasins
d e l a c h a î n e Sy s t è m e U
que l’on rencontre aux quatre coins de
France. Installé depuis 1981 dans un
petit village de quelque 600 habitants,
il a poursuivi depuis une existence sans
encombre. Son originalité ? Son statut
coopératif adopté en 1981 par les fondateurs du magasin, qui en fait la seule
moyenne surface de France organisée en
Scop. Quatre commerçants du canton
avaient choisi de s’associer pour le créer,
et le statut de coopérative de production répondait le mieux à leurs besoins.
Aujourd’hui encore, il permet à six des
quatorze salariés de bénéficier d’une
part d’intéressement, et de décider conjointement des orientations à prendre.
NICOLAS COCHARD
Dans son prochain numéro,
Participer présentera
les Scop du commerce de gros.
Tchai Walla
Métiers
De gauche à droite : Sophie-Dorothée
Bertoux, Véronique Montagne et Caroline
Dumas de Tchai Walla.
naturel du statut Scop, dont le restaurant
ne se cache pas : sur le menu, le client
peut lire quelques lignes qui expliquent
le statut coopératif.
Tchai Walla : 3, rue Treuil, 26150 Die,
tél. : 04 75 21 00 94.
Scop Monter Industrie
cuisines et salles de bain
à Nantes (Loire-Atlantique)
Transmettre un commerce à ses salariés ?
C’est possible ! Sans succession prévue, le
patron a transmis en 2002 son commerce
d’installation de cuisines et de salles de
bain à ses trois salariés, tout en restant
associé extérieur au capital de la nouvelle
entreprise. Une transmission en douceur
qui a permis de garder la confiance des
clients et de pérenniser l’activité.
Monter Industrie :
17, rue Firmin-Colas, 44100 Nantes,
tél. : 02 40 46 05 81.
Biogastell
magasin d’alimentation bio
à Plougastel (Finistère)
Avant Biogastell, magasin d’alimentation biologique fondé en 1992, Pierre
Le Guen avait déjà travaillé dans une
coopérative loi de 47 dans le domaine
du bio. « A la recherche d’un statut où
la responsabilité ne repose pas sur les
seuls consommateurs », il a monté une
Scop avec un autre associé-salarié et un
groupement de consommateurs de sa
commune, constitué comme associé extérieur. Biogastell compte aujourd’hui
quatre salariés-associés.
Biogastell : 8, place Jean-Fournier,
29470 Plougastel-Daoulas,
tél. : 02 98 04 27 02.
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