Le gouvernement veut rassurer sur le rapport de situation comparée
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Le gouvernement veut rassurer sur le rapport de situation comparée
Le gouvernement veut rassurer sur le rapport de situation comparée femmes hommes 12/05/2015 Le projet de loi sur le dialogue social remplace l'obligation de réaliser pour le comité d'entreprise un rapport de situation comparée entre femmes et hommes par des indicateurs chiffrés. Un changement qui mécontente les syndicats, les associations féministes et le Conseil supérieur à l'égalité. Hier soir, le gouvernement a annoncé qu'il modifierait son texte. Afin d'inciter les entreprises à réduire les inégalités professionnelles entre femmes et hommes, le code du travail contraint actuellement l'employeur à présenter pour avis au comité d'entreprise une analyse précise des écarts de salaire et du déroulement de carrière entre hommes et femmes. Ce rapport doit s'accompagner d'un plan d'action visant à résorber les inégalités. Dans les entreprises de moins de 300 personnes, cet ensemble est rattaché au rapport sur la situation économique (article L. 2323-47). A partir de 300 salariés, il s'agit d'un rapport spécifique "sur la situation comparée des conditions générales d'emploi et de formation des femmes et des hommes dans l'entreprise" (article L. 2323-57). Dans les deux cas, la loi cadre les éléments que doivent comporter le rapport et le plan d'action. L'inquiétude du Conseil à l'égalité Cela sera-il toujours le cas demain si le projet de loi relatif au dialogue social est voté en l'état ? Dans un courrier adressé le 6 mai à François Rebsamen, le ministre du travail, la présidente du Haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes, Danielle Bousquet, s'alarme des conséquences du projet : "L'obligation de produire un rapport de situation comparée sur la situation des femmes et des hommes au sein de l'entreprise est, en l'état du texte, supprimée pour être remplacée par une "information" en comité d'entreprise à partir de la base de données unique dont nous espérions que les données seront systématiquement sexuées". Et la présidente du Haut conseil d'ajouter : "Symboliquement, l'impact négatif serait fort. Cela constituerait la suppression d'un outil crucial pour l'entreprise afin de rendre visibles les inégalités femmes-hommes et servir d'appui à un plan volontariste". Les associations féministes soulignent de leur côté que cet outil a été introduit par la loi Roudy de 1983, Yvette Roudy faisant d'ailleurs partie des signataires d'une pétition demandant la modification du projet de loi sur ce point (lire ici). Des informations moins détaillées dans la loi En l'état actuel du projet de loi, l'information-consultation sur l'égalité professionnelle entre femmes et hommes est incorporée dans l'une des trois grandes consultations annuelles, celle portant sur la politique sociale de l'entreprise (article L. 2323-15). Sur ce thème, l'information que l'employeur devra donner au CE est ainsi définie dans le projet de loi : il s'agit "d'informations et des indicateurs chiffrés sur la situation comparée des femmes et des hommes au sein de l'entreprise, comportant notamment le plan d'action qu'il établit pour assurer l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, et qu'il dépose auprès de l'administration" (article L. 2323-17). C'est moins précis et détaillé que ne le prévoyaient les articles L. 2323-47 et 57 qui sont supprimés par le projet. Un décret devrait préciser le contenu des informations que l'employeur mettra à disposition du CE dans la base de données économiques et sociales.Les syndicats ont jugé cette solution insatisfaisante hier à l'occasion d'une réunion du Conseil supérieur à l'égalité professionnelle. Le gouvernement va modifier son texte Ces critiques ont conduit le gouvernement à annoncer hier soir qu'il proposerait un amendement lors du débat parlementaire. Cet amendement, indiquent les ministres du travail, des affaires sociales et des droits des femmes, précisera que "la base de données unique comprendra obligatoirement une rubrique spécifique à l'analyse de situation comparée des femmes et des hommes". En outre, promet le gouvernement, "le contenu du rapport de situation comparée (RSC) tel qu'il est défini par la loi du 4 août 2014 et donc toutes les données du RSC seront intégralement mentionnées dans la loi". Il n'y aura donc, promet le gouvernement, "aucune perte d'information par rapport à la situation actuelle", ces éléments devenant de plus disponibles en permanence en étant intégrés à la base de données économiques et sociales. Une négociation au rabais ? Une autre inquiétude des associations féministes et du Conseil supérieur de l'égalité porte sur le devenir des négociations sur l'égalité professionnelle. Rappelons que c'est seulement la loi du 4 août 2014 qui a fait de ce thème une négociation unique et entière (lire notre article). Avec le projet de loi sur le dialogue social, cette négociation fera partie du nouveau bloc de négociation sur la qualité de vie au travail (lire notre article). Le Conseil supérieur craint qu'il ne s'agisse d'une "négociation fourre-tout" devant aborder l'articulation vie personnelle vie professionnelle, l'exercice du droit d'expression ou l'insertion des travailleurs handicapés. "Il n'est plus mentionné que la négociation doit s'appuyer sur l'analyse des informations et des indicateurs chiffrés recueillis en matière de situation comparée entre les femmes et les hommes. Il n'existe plus de lien entre l'exercice visant à diagnostiquer et à analyser la situation dans l'entreprise et celui de la négociation", déplore l'avis du Conseil supérieur, qui reprend sur ce point les critiques syndicales. L'annonce du gouvernement devrait donc entraîner la réécriture de cette partie du projet. En effet, le nouvel article L. 2242-8 sur la négociation s'avère moins précis que l'actuel article L 2242-5. La sanction confirmée mais... Autre sujet de préoccupation : que devient la pénalité de 1% de la masse salariale visant les entreprises n'ayant pas négocié d'accord ou établi de plan unilatéral pour l'égalité professionnelle ? L'article L 2242--1 qui prévoit aujourd'hui cette sanction deviendrait l'article L. 2242-9 : elle sera donc maintenue, le gouvernement l'a rappelé hier. Mais en l'état actuel du projet, cet article ne fera plus référence aux rapports accompagnant le plan d'action prévus par les articles L. 23323-47 et L. 2323-57, car ces articles sont supprimés au profit d'une référence aux indicateurs chiffrés de la situation comparée des femmes et des hommes (article L.2323-17). Là encore, s'il veut rassurer, le gouvernement devra amender son texte. Enfin, le relèvement du seuil rendant obligatoire dans un CE la commission pour l'égalité professionnelle, de 200 à 300 salariés, suscite aussi les critiques. Bernard Domergue Source URL: http://www.actuel-rh.fr/content/le-gouvernement-veut-rassurer-sur-le-rapport-de-situation-comparee-femm es-hommes