ALOUETTE290(434.5 Ko)

Transcription

◗ SOMMAIRE
ACTUALITÉ DE L’ÉGLISE UNIVERSELLE
◗ Extraits des discours du pape François à Cuba et aux Etats-Unis | Pape François .................................................................................................. 3
DOSSIER :
FEMMES DE FOI POUR LE MONDE
◗ Devenir « disciples missionnaires » à la suite de Thérèse d’Avila
◗
Père François-Régis Wilhélem ............................................................................................................................................................................................................................... 5
◗ Thérèse, une femme pour notre temps ?
◗
Marianne Alary-Gilbert ................................................................................................................................................................................................................................................ 8
◗ En quoi Teresa peut-elle me parler ?
◗
Dominique Davin ............................................................................................................................................................................................................................................................ 10
◗ Florence Nightingale, « la Dame à la Lampe »
◗
Joanna Bogle ....................................................................................................................................................................................................................................................................... 12
◗ Témoignage ................................................................................................................................................................................................................................................................................................. 15
◗ Geneviève de Gaulle Anthonioz : une femme de Bonne Volonté
◗
Laurent de Gaulle ............................................................................................................................................................................................................................................................ 16
◗ Les années cachées de Marthe Robin
◗
Sophie Guex ........................................................................................................................................................................................................................................................................... 20
◗ Qui est mon prochain ? | Père Georges Finet ....................................................................................................................................................................................................... 26
GRÂCES ET FAVEURS obtenues par l’intercession de Marthe Robin ............................................................................................................. 28
DE TOUTES NATIONS
◗ Au Foyer de Trinité, à la Martinique :
◗ Les 50 ans du Foyer - Engagement de Marie-Gabrielle Vilocy ................................................................................................................................................... 33
◗ Au Foyer de Segbohoué, au Bénin :
◗ Engagements de Gisèle Zinsou et Hélène Nouwodjro......................................................................................................................................................................... 37
◗ Au Foyer de Ñaña, au Pérou :
◗ 30 ème anniversaire de la fondation du Foyer
◗ 25 ème anniversaire de la fondation de l’école du Foyer «Santa Rosa de Lima». ................................................................................................... 42
◗ Au Foyer des « Dents-du-Midi » à Bex, en Suisse :
◗ Les 45 ans du Foyer de Charité ............................................................................................................................................................................................................................................ 44
PROGRAMME DE RETRAITES SPIRITUELLES Novembre - Décembre 2015, Janvier 2016 ................... 46
NOUVELLES FAMILIALES .................................................................................................................................................................................................................................... 48
Photo de couverture : Sculpture de Maria de Faykod – Chemin de croix des malades à Lourdes
« La foi
n’éloigne pas du monde
et ne reste pas étrangère
à l’engagement concret
de nos contemporains »
Pape François - Lumen Fidei (n° 51)
◗ DOSSIER…
FEMMES DE FOI
POUR LE MONDE
« L’ÉGLISE REND GRÂCE POUR TOUS LES CHARISMES
DONT L’ESPRIT SAINT A DOTÉ LES FEMMES
DANS L’HISTOIRE DU PEUPLE DE DIEU,
POUR TOUTES LES VICTOIRES REMPORTÉES
GRÂCE À LEUR FOI,
À LEUR ESPÉRANCE ET À LEUR AMOUR :
ELLE REND GRÂCE POUR TOUS LES FRUITS
DE LA SAINTETÉ FÉMININE».
Saint Jean Paul II – Mulieris dignitatem (n. 31)
Sculpture de Maria de Faykod – Chemin de croix des malades à Lourdes
◗ DOSSIER | FEMMES DE FOI POUR LE MONDE
À LA SUITE DE THÉRÈSE D’AVILA
DEVENIR «DISCIPLES MISSIONNAIRES»
1515-1582
Père François-Régis Wilhélem
Prêtre de l’Institut Notre-Dame de Vie,
professeur de théologie morale et de spiritualité au «Studium Notre-Dame de Vie» (France).
Théologien auprès des Évêques français pour le Renouveau charismatique (2000 - 2013)
Depuis 2013, auprès de « Fraternité Pentecôte »,
Alliance nationale des groupes de prière charismatiques (non rattachés à des Communautés).
L
a vie de Thérèse de Jésus montre magnifiquement comment son engagement total à la
suite du Christ, particulièrement à travers la vie
d’oraison, l’a conduite à se lancer également dans
l’audacieuse aventure de la réforme du Carmel et
à collaborer ainsi à la mission de l’Église. Saint JeanPaul II soulignait en ce sens que « l’axe de la vie de
Thérèse, comme projection de son amour pour le
Christ, ce fut l’Église. [Elle] «sentit l’Église», vécut
«la passion pour l’Église»…» (1/11/1982). Les dernières
paroles de la carmélite : «Je suis fille de l’Église !»
résument admirablement cette passion. À sa suite,
le pape François relève comment Thérèse, par sa
réforme, a pris en charge les problèmes de l’Église
et de la société de son temps1. C’est ainsi que tout
l’enseignement de la première femme Docteur de
l’Église porte cette marque ecclésiale et apostolique et encourage le chrétien à s’engager à son
tour sur le chemin de l’oraison et de l’action pour
le Royaume.
Un saint « n’arrive jamais seul au ciel »
Pour Thérèse, suivre la voie de l’oraison, c’est
prendre en même temps «une ferme détermination très déterminée (una grande y muy determinada determinación)»2 d’y rester fidèle quoi qu’il
en coûte. C’est la condition pour parvenir à boire
gratuitement «l’eau vive» de la contemplation. La
Madre constate en effet : «Je m’émerveille de voir
combien il importe, dans cette voie, d’entreprendre
vaillamment de grandes choses ; quand elle manquerait de force dans l’immédiat, l’âme prend son
envol et monte très haut, même si, comme l’oiselet au maigre plumage, elle fatigue, et ralentit».
Les «grandes choses» ne sont rien d’autre que la
sainteté et la fécondité ecclésiale qui en découle,
quel que soit l’état de vie. Thérèse est convaincue,
en effet, que celui qui s’engage de façon décidée
à la suite du Christ «n’arrive jamais seul au ciel»,
mais «y emmène beaucoup de gens (mucha gente)
L’ALOUETTE N°290-291 | OCTOBRE 2015 - 5
derrière lui»3. Une telle conviction est réaffirmée
plusieurs fois dans ses écrits. Pour elle, à la base
de départ, il est donc essentiel « de ne pas minimiser» les grands désirs que le Seigneur lui-même
inscrit dans le cœur. En effet, explique-t-elle, si les
saints ne s’étaient jamais déterminés à aspirer à
un tel idéal, «et peu à peu, à se mettre à l’œuvre,
ils n’auraient pas atteint un état si élevé ». Une
attitude constante d’humilité vérifiera l’authenticité de ces désirs, car le Seigneur «veut des âmes
courageuses, (...) à condition qu’elles vivent dans
l’humilité, sans nulle confiance en elles-mêmes».
Il ne s’agit donc pas de cacher «sa lâcheté sous
de l’humilité4», mais de s’appuyer totalement sur
Dieu, comprenant que nous ne trouverons pas la
force en nous5. De fait, plus la vie spirituelle s’approfondira, plus la connaissance de notre faiblesse
grandira. Cette loi paradoxale, mais réaliste, de la
croissance spirituelle est clairement énoncée par
Thérèse : «La notion que Dieu nous donne de notre
impuissance à rien faire de bien par nous-mêmes,
d’autant plus que ses faveurs sont plus grandes, est
bien connue»6.
Pour la carmélite, le chemin de l’oraison est ouvert
à tous. Il permet de fonder toute activité, tout engagement, sur une rencontre, un «échange d’amitié» 7
constant avec le Seigneur. C’est ainsi que l’itinéraire
thérésien aide les baptisés à devenir vraiment «disciples missionnaires» (Pape François).
«Marthe et Marie doivent offrir ensemble l’hospitalité au Seigneur»
Les écrits de la carmélite, notamment le livre de sa
Vie et celui des Demeures, montrent comment la
croissance dans la vie de prière suscite un développement de l’esprit apostolique. Des premières aux
septièmes demeures grandit progressivement une
docilité foncière à l’Esprit, source d’harmonie et de
fécondité réciproque entre prière et action8.
Thérèse d’Avila – José de Ribera, dit lo Spagnoletto
Pour illustrer cela, Thérèse reprend à son compte
les figures évangéliques de Marthe et Marie, la première symbolisant traditionnellement l’action et
la seconde la contemplation. Elle écrit que c’est
«ensemble» que les deux sœurs sont appelées à
«offrir l’hospitalité au Seigneur9» . L’une et l’autre,
en effet, doivent «nourrir» le Seigneur – et se nourrir de lui - en accomplissant la volonté du Père à travers la réalisation de leur vocation propre. L’opposition apparente entre le charisme des deux sœurs
se résout dans leur union à Dieu, car, alors, «dans
la vie active et qui semble extérieure, l’intérieur
agit»10. Action et contemplation se compénètrent
et se fécondent mutuellement dans l’amour : Marie
est aussi Marthe, Marthe est aussi Marie. Thérèse
montre comment le dynamisme même de la vie
dans l’Esprit (ou vie mystique) conduit toujours aux
6 - L’ALOUETTE N°290-291 | OCTOBRE 2015
«œuvres (obras)»11. De fait, tout au long de son existence, la Madre a eu l’occasion de vérifier maintes
fois qu’ «une seule personne tout-à-fait parfaite,
bouillante d’amour vrai pour Dieu» est «plus utile
que beaucoup de tièdes» et qu’ «un seul homme
parfait sera plus efficace que plusieurs hommes
imparfaits»12.
n
1) Lettre à l’évêque d’Avila, du 15/10/2014.
2) Chemin de perfection (abréviation CP) 21/2/436.
(Les citations sont tirées de la traduction de M. Auclair : Thérèse d’Avila,
Œuvres complètes, DDB., 1964).
3) V 11/4/70. / 4) Vie (abréviation V) 13/2/81. / 5) Cf. V 13/3/82.
6) V 15/14/103.
7) L'oraison est «un commerce (un échange) d'amitié où on s'entretient
souvent et intimement avec Celui dont nous savons qu'il nous aime»,
V 8/5/56.
8) Sur cette thématique, nous renvoyons à nos ouvrages : Dieu dans
l’action. La mystique apostolique selon Thérèse d’Avila, collection Centre
Notre-Dame de Vie, série Spiritualité n°8, Ed. du Carmel, Venasque,
1992 ; Agir dans l’Esprit… à la suite de Thérèse d’Avila, Ed. du Jubilé,
Paris, 2007.
9) 7e Dem. 4/12/1036.
10) Pensées sur l’amour de Dieu. 7/3/602
11) Ce terme étant entendu ici au sens large de réponse généreuse
aux appels de la grâce.
12) Relation 3/334 et CP (manuscrit de l’Escorial, traduction de J. Poitrey,
Cerf, 1981), 3/5/30.
PA R O L E S
« La sainte écrivaine et maîtresse
de prière fut dans le même temps
fondatrice et missionnaire
sur les routes de l’Espagne.
Son expérience mystique
ne la sépara pas du monde
ni des préoccupations des gens.
Au contraire, elle lui donna
un nouvel élan et courage
pour son action et les devoirs
quotidiens, parce que
«le Seigneur se trouve»
même «au milieu des marmites»
(Fondations 5,8).
Message du pape François
pour le 5e centenaire de sainte Thérèse d’Avila – 15 octobre 2014
LES ANNÉES CACHÉES
DE MARTHE ROBIN
Sophie Guex,
membre de Foyer (1)
En lien avec le thème de ce numéro «Femmes de
foi pour le monde», nous publions cet article qui
montre comment Marthe Robin a eu soif de se
nourrir, par ses lectures, de récits de personnes
généreuses et héroïques, et de développer sa foi à
travers des ouvrages de spiritualité.
M
arthe Robin ne cesse pas de nous étonner...
Simple rurale de France, elle a rencontré des
personnalités très diverses, parmi lesquelles bon
nombre d’intellectuels, de théologiens, de scientifiques... Ceux-ci venaient la consulter, et elle était
capable de converser avec eux, de les rejoindre et
même de les éclairer... Est-ce uniquement un fruit de
la grâce ? En réalité, cette grâce s’enracine dans les
années cachées de Marthe.
MARTHE ET SES LECTURES...
Nous avons l’habitude de lire que Marthe Robin
avait souvent manqué l’école en raison de sa mauvaise santé, et qu’elle n’avait pas pu passer son certificat, étant malade ce jour-là. Pourtant, ceux qui
l’avaient connue enfant ont souligné qu’elle était
d’une intelligence vive, curieuse de nature, «bouillonnante de questions».
Ce portrait succinct peut aujourd’hui être complété et
approfondi grâce aux découvertes récentes sur la jeunesse de Marthe, dans les années 1926 – 1928. Cette
période de la vie de Marthe est relativement bien
documentée : quelques lettres et trois cahiers «de jeunesse», dans lesquels Marthe a recopié des poésies,
des pensées ou des citations qui lui parlaient. A cette
Louise de Bettignies (1880 - 1918)
Marie-Léonie Vanhoutte (1898 - 1967)
époque, Marthe est une jeune fille de 24-26 ans qui a
déjà derrière elle de longues années de lutte contre
une maladie qui la handicape douloureusement,
mais elle arrive encore à lire et à écrire. Sa famille lui
apporte des livres de la bibliothèque paroissiale, et
aussi plusieurs ouvrages de la bibliothèque laïque du
village. Quelques personnes lui prêtent des livres, en
particulier Mme Delatour, une jeune femme, soignée
comme elle pour des rhumatismes, à Saint-Péray en
Ardèche. L’expérience de la maladie lie d’amitié les
deux jeunes femmes. Mme Delatour, dotée d’une
jolie plume, est issue d’un milieu cultivé. Elle prêtera à
Marthe des livres qu’elle lui enverra par la poste.
Les ouvrages que Marthe cite dans ses lettres et
les poèmes ou citations qu’elle a recopiés dans ses
trois «cahiers de jeunesse», nous permettent d’entre-
voir ses goûts, vers l’âge de 25 ans :
Marthe aime les descriptions de régions, de pays.
Elle est visuelle, et la perspective de perdre progressivement la vue décuple sans doute cette acuité.
Les livres d’histoire contemporaine la passionnent,
en particulier les récits de personnes généreuses
qui ont donné leur vie : Jean Duplessis de Grénedan,
commandant du dirigeable Dixmude, détruit en mer
par un orage en 1923 ; l’aventure de Louise de Bettignies et Marie-Léonie Vanhoutte, qui avaient créé un
réseau de renseignements pour le compte des alliés
pendant la première guerre mondiale, risquant ainsi
leur vie pour leur pays. Les lignes que Marthe écrit à
son amie, Mme Delatour, après avoir lu La guerre des
femmes, d’Antoine Redier, sont vibrantes d’émotion :
«Merci de votre délicate intention de me transmettre
‘‘La guerre des femmes’’. Je l’ai lu […] il vaut la peine
d’être connu. Il est vraiment poignant. Comme nous
devons nous incliner devant ces vaillantes Françaises,
nos sœurs, qui ont vraiment tout bravé ! Que ces récits
m’ont fait pleurer ! Merci aussi de me dire que Léonie
Vanhoutte a reçu la légion d’honneur. Dans le livre, on
parle de sa décoration, de la médaille militaire. C’était
vraiment trop peu ce qu’on avait fait pour elle.»
Marthe, comme nous, lisait des textes qui la rejoignaient dans ce qu’elle vivait, qui l’aidaient à donner
un sens, une orientation à sa vie. Rappelons qu’à
cette époque, Marthe était seule sur le plan spirituel :
le curé de la paroisse venait rarement la visiter et ses
amies se comptaient sur les doigts d’une main.
Mais les livres que Marthe préfère sont des romans
qui – dit-elle – ont «un sens profond», tels ceux de
Pierre l’Ermite, un curé de Paris, qui en a fait un beau
travail d’évangélisation, ou d’autres, comme Sur la
branche, de Mme Pierre de Coulevain, qui présente
les réflexions d’une femme qui a tout perdu, mais
qui choisit de tirer parti de sa situation pour regarder la vie autrement... Une destinée brisée, mais
assumée… Marthe, dont l’avenir avait été brisé par
l’irruption de la maladie, pouvait s’y retrouver.
Les romans que Marthe lit, et les poésies qu’elle
recopie à cette époque, abordent presque toujours
le thème de la souffrance, du combat de la vie, de
la ténacité et du courage dans les épreuves. Il n’est
pas difficile de comprendre comment ont résonné
en elle ces vers de Louisa Siefert, qu’elle a recopiés 2 :
« Oui, souviens-toi de vivre ; oui, malgré la tempête.
Ne t’abandonne pas, ne courbe pas la tête,
Résiste, espère et crois ! »
UN GRAND DÉSIR D’OUVRIR
SON HORIZON INTELLECTUEL
ET SPIRITUEL
Nous ne sommes pas au bout de nos surprises… En
parcourant ces petits cahiers et ces lettres de jeu-
nesse, nous avons dénombré plus d’une cinquantaine d’auteurs ou d’œuvres cités par Marthe ! C’est
énorme, compte-tenu du contexte de vie qui était
le sien : Marthe n’habitait pas la ville - où il est plus
facile de trouver des livres - et ses parents n’étaient
pas instituteurs, mais agriculteurs… En plus, Marthe lisait en étant malade, en souffrant des yeux, de
la tête, de l’estomac… Il fallait vraiment le vouloir !
Nous découvrons chez elle une belle curiosité et un
grand appétit d’ouvrir son horizon intellectuel et
spirituel, d’approfondir sa pensée, sa réflexion.
Mais, pour autant, Marthe n’était pas une universitaire… Ses lectures avaient un objectif bien particulier. Un exemple va l’illustrer :
Dans un des cahiers, nous avons trouvé quelques
paragraphes d’un article de la revue française, La
vie spirituelle sur la spiritualité de Louis de Blois, un
bénédictin du XVIIème siècle. Une source étonnante
pour cette jeune rurale… Un examen plus précis
de ce que Marthe a relevé dans son carnet montre
qu’elle a choisi des passages qui traitent de l’humilité et de l’union au Christ, en simplifiant parfois la
formulation, et qu’elle ne cite pas seulement Louis
de Blois, mais aussi l’article qui présente sa spiritualité. Marthe ne fait pas un travail universitaire sur
Louis de Blois, mais elle se concentre sur des pensées qui lui parlent, qui la nourrissent.
Un autre détail ajuste encore notre compréhension
des lectures de Marthe : la cinquantaine d’auteurs,
qu’elle cite ou mentionne dans ces cahiers de jeunesse, sont presque toujours des auteurs mineurs : ni
Péguy, ni Verlaine, ni Francis Jammes. Pourquoi ?
Probablement parce que Marthe a connu les
œuvres qu’elle cite par le biais de revues populaires,
plus que par des recueils de poésie. Marthe ne lit
pas des auteurs, mais des poèmes qui lui parlent,
qui la rejoignent dans son propre vécu. Elle mentionne par exemple un poème de Jean Richepin :
«Premier départ»… Ce petit poème très émouvant
est tiré de La chanson des gueux, œuvre qui valut à
son auteur de faire quelques jours de prison, pour la
violence et la grossièreté de certains de ses propos !
Et Marthe a continué ainsi, tout au long de sa vie. Tant
qu’elle a pu lire elle-même, elle a lu. Et quand elle n’a
plus pu lire, à cause de l’évolution de sa maladie, elle
a demandé qu’on lui fasse la lecture : les encycliques
qui paraissaient, tel ou tel livre de théologie, de spiritualité, mais aussi des articles de revues comme
Science et Vie, Paris Match, Sélection du Reader’s Digest,
Reflets… La semaine de sa mort, en février 1981, âgée
de 79 ans, alors qu’elle était bien affaiblie par une
bronchite, on lui lisait l’encyclique de Jean-Paul II sur
La Miséricorde divine (parue en décembre 1980 !), et
le livre d’Eloi Leclerc, Sagesse d’un pauvre, sur saint
François d’Assise.
COMMENT MARTHE
INTÈGRE SES LECTURES
ET EN FAIT SON BIEN PROPRE
Cette culture de paroissienne, mais de paroissienne
exceptionnelle, assure à la jeune Marthe le soutien
de sa vie spirituelle et lui donne les mots pour l’exprimer. Cela transparaît dans sa manière d’écrire,
car Marthe s’inspire de ce qu’elle a lu. Mais, ne rédigeant pas pour être publiée, elle retient et reformule ce qui, dans ses lectures, l’aide à comprendre
ce qu’elle vit.
PA R O L E S
« Il faut étudier, réfléchir pour se faire des convictions, des idées sûres »
Marthe Robin, Journal. 25 janvier 1931
Par exemple, dans la couverture d’un des cahiers de
jeunesse de Marthe, on trouve la page d’une revue
citant un poème de Louis Veuillot, où le poète pose
un regard sur sa vie passée :
«Quant à ma vie, elle fut douce […]
Dans ma lutte laborieuse, la foi soutint mon cœur charmé
Ce fut donc une vie heureuse, puisque enfin j’ai toujours aimé.»
… et, à l’intérieur de son cahier, Marthe l’a recopié,
avec quelques variantes :
«Quant à ma vie, elle est très douce […]
Dans la lutte laborieuse, l’amour soutient mon cœur
charmé
Ma vie est donc vraiment heureuse, puisque j’aime
et… je suis aimée.»
Cette démarche qui est personnelle à Marthe se
confirmera quand, suivant le conseil des Capucins
de la mission paroissiale de 1928, elle étendra ses
lectures à des auteurs plus mystiques, qui l’aideront
à comprendre ce qu’elle vit, dont nous avons des
réminiscences dans son Journal (Gemma Galgani,
Véronique Giuliani, Consummata, Madeleine Semer)…
Pour conclure, il est vrai que Marthe n’a pas passé
son certificat. Mais, en ne disant que cela, on court
le risque de réduire son portrait en une ébauche
trop simpliste. Le Seigneur a doté Marthe de grâces
particulières de lucidité, de clairvoyance, dont font
état de nombreux témoignages, mais ces grâces
sont tombées dans une humanité bien préparée :
Marthe avait travaillé pour approfondir sa foi et
sa connaissance des réalités spirituelles, avec les
moyens dont elle disposait, notamment ses lectures. Elle a pratiqué ce qu’elle écrira un jour dans
son Journal : «Il faut étudier, réfléchir pour se faire des
convictions, des idées sûres.» (Journal, 25 janvier 1931). Quel
bel exemple pour notre temps !
n
(1) Sophie Guex, co-éditeur, avec le père Jacques Bernard et
Marie-Thérèse Gille, du « Journal de Marthe » et des « Passions
de Marthe Robin », aux Editions Foyer de Charité.
(2) Extraits du poème Vivere memento.
PA R O L E S
Il ne faut pas vouloir une vérité à notre mesure,
c’est-à-dire à notre façon de voir, de juger, de comprendre.
N’ayons pas cette foi mesquine, étroite, banale qui paralyse nos énergies,
nos dispositions surnaturelles et met en danger la foi des autres.
Notre foi doit être simple et claire, pieuse et intelligente.
Il faut étudier, réfléchir pour se faire des convictions, des idées sûres,
se donner la peine d’aller jusqu’au fond de soi-même,
de ses croyances.
Connaissant bien notre religion, nous l’aimerons davantage,
parce que nous en comprendrons toute la beauté
et nous saurons la défendre si on l’attaque devant nous.
C’est notre vie tout entière qui doit prouver la sublimité de notre religion.
Laissons-nous posséder et pénétrer de la vérité par la Vérité
qui nous dépasse de si haut.
Elle n’est pas de nous, elle est pour nous ; allons à elle.
Marthe Robin, 25 janvier 1931
◗ PAROLES | PÈRE GEORGES FINET
QUI EST MON PROCHAIN ?
Père Georges Finet
CETTE QUESTION A ÉTÉ POSÉE À JÉSUS :
«ET QUI EST MON PROCHAIN ?»
Et vous savez qu’à ce moment-là Jésus a répondu par
la parabole du Bon Samaritain, Luc, ch. 10, 29 à 37.
C
’est extrêmement important de méditer la qualité de cette parabole.
«Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho et
il tomba au milieu de brigands qui, après l’avoir dépouillé et roué de coups, s’en allèrent, le laissant à
demi mort. Un prêtre, par hasard, descendait par ce
chemin ; il le vit, prit l’autre côté de la route et passa.
Pareillement, un lévite, survenant en ce lieu, le vit, prit
l’autre côté de la route et passa.
Mais un Samaritain, qui était en voyage, arriva près
de lui, le vit et fut touché de compassion. Il s’approcha, banda ses plaies, y versant de l’huile et du vin,
puis le chargea sur sa propre monture, le conduisit à
l’hôtellerie et prit soin de lui. Le lendemain, il tira deux
deniers, les donna à l’hôtelier en disant : Aie soin de
lui, et ce que tu auras dépensé en plus, c’est moi qui
le paierai lors de mon retour. Lequel de ces trois, à ton
avis, s’est montré le prochain de l’homme tombé aux
mains des brigands ?»
Il répondit : «Celui-là qui a pratiqué la miséricorde à
son égard». Et Jésus lui dit : «Va, et toi aussi, fais de
même».
Comprenez bien le sens de cette parabole. D’abord,
vous situez bien l’endroit : cette route qui descend
de Jérusalem à Jéricho, qui traverse le fameux désert de Juda, pendant 12 kilomètres, pour arriver à
Jéricho. C’est là que se situe, dans ce lieu très désertique, cette parabole et c’est là que cet homme est
attaqué par les brigands. En premier lieu arrive un
prêtre, très Ancien Testament, qui ne s’arrête pas.
Qu’a-t-il dû se dire ? «Oh, si je m’arrête, quel sera
l’inconvénient pour moi ?» Qu’aurait il dû se dire ?
«Si je ne m’arrête pas, quel sera l’inconvénient
pour ce pauvre blessé que je ne soignerai pas?». Il
a regardé par rapport à lui et non par rapport au
blessé. C’est très éclairant : il ne faut pas regarder
les choses par rapport à nous, mais par rapport à
l’autre. Vous voyez donc son attitude.
◗ PAROLES | PÈRE GEORGES FINET
Par contre, tout de suite après, arrive un lévite. C’est
un séminariste, très Ancien Testament et qui, également, le vit et passa en se disant : «Oh, si je m’arrête,
je risque bien d’arriver en retard au séminaire» ou
quelque chose comme ça...» Et il passe.
7 - Le lendemain, il tire deux deniers et les donne
à l’hôtelier ;
8 - En disant : «Prends soin de lui» ;
9 - «Tout ce que tu auras dépensé en plus, c’est moi qui
le paierai lors de mon retour».
Arrive enfin un Samaritain. Notez bien la situation : les
Samaritains sont les ennemis héréditaires des Juifs.
Jésus met en face l’un de l’autre deux hommes qui
sont ennemis héréditaires. Le Samaritain fut touché
de compassion et s’arrêta.
Il fait neuf choses. Voilà la réponse de Jésus. Il va
jusqu’au bout de la charité. Ce n’est pas toujours facile. Non seulement il va jusqu’au bout de la charité, mais cela dépasse les limites. Car ce qu’il y a de
caractéristique dans cette parabole, c’est qu’il n’y a
pas de limites : tout ce que tu auras dépensé (je ne
te donne pas de limites), c’est moi qui le paierai lors
de mon retour.
JÉSUS RÉPOND À LA QUESTION :
«QUI EST MON PROCHAIN ?»
Comptons un peu sur nos doigts ce qu’il a fait :
1 - Il s’approche ;
2 - Il bande ses plaies ;
3 - Il verse de l’huile et du vin ;
4 - Il le charge sur sa propre monture ;
5 - Il le conduit à l’hôtellerie ;
6 - Il prend soin de lui ;
Souvent notre charité va simplement aux 5/9e, voire
aux 6/9e ; mais quant à aller aux 9/9e, c’est-à-dire totalement, c’est extrêmement difficile, c’est très exigeant. Celui qui a donné sa Vie et son Sang pour
nous peut nous donner cette leçon d’exigence.
Cela va jusqu’au bout de la charité chrétienne. C’est
très exigeant ! Et c’est facile à enseigner, mais pas
toujours facile à pratiquer. Extrait d’une conférence - 1978 n
◗ RETRAITES SPIRITUELLES
NOVEMBRE, DÉCEMBRE 2015, JANVIER 2016
◗ = Retraites fondamentales ◗ = Retraites d’approfondissement
◗ = Retraites «randonnées»
UNE HALTE POUR LE CŒUR ET L’ESPRIT. J’AI BESOIN D’UNE PAUSE, JE CHERCHE LE CALME, LA PAIX INTÉRIEURE. J’AI DES
DÉCISIONS IMPORTANTES À PRENDRE. JE VOUDRAIS DÉPOSER UN FARDEAU. JE DÉSIRE ME RESSOURCER, AVANCER DANS MA
QUÊTE SPIRITUELLE. J’AIMERAIS FAIRE L’EXPÉRIENCE DE LA PRÉSENCE DE DIEU, APPRENDRE À PRIER. JE SOUHAITE DÉCOUVRIR LA RELIGION CHRÉTIENNE, APPROFONDIR LES FONDEMENTS DE LA FOI CATHOLIQUE, MÉDITER LA BIBLE…
n NOVEMBRE 2015
◗ Du 1er au 7 novembre
22 Tressaint
Père Joël Guibert
Vivre le Notre Père
◗ Du 2 au 5 novembre
B – 4900 Spa Nivezé – Belgique
Père Jean-Marc de Terwangne
et membres de Tressaint et Spa
Suivre Jésus avec Saint Pierre
Enfants et jeunes
51 – Baye
Père François-Jérôme Leroy
Nombreux les bienheureux
qui n’ont jamais fait parler d’eux !
Retraite
avec proposition d’exercices Vittoz
Père Patrick Bonte
Renouveler ma rencontre personnelle
avec Jésus Christ
13 – Sufferchoix
Père Bernard Maitte
Le Christ a aimé l’Église,
Il s’est livré pour Elle
26 – Châteauneuf-de-Galaure
Père Godefroy Delaplace
N’ayez pas peur ! Ouvrez toutes grandes
les portes au Christ… (avec saint Jean-Paul II)
73 – Naves
Père Bruno de Belloy
A l’école de Thérèse de Lisieux
06 – Roquefort-les-Pins
Père Gustave Sodogas
La vie en abondance : un regard
sur le plan d’amour de Dieu pour nous
et pour le monde
78 – Poissy
Père Bruno Charnin
Ecouter et suivre Jésus dans les Évangiles
47 – Lacépède
Père Dominique Bostyn
La Trinité, voilà notre demeure !
Force, sagesse et tendresse dans les bras
du Père…
Introduction
possible à la méthode Vittoz
74 – La Flatière
Père Pierre Descouvemont
«Tout petit devant toi, me voici, Seigneur»
77 Combs-la-Ville
Père Alain Bandelier
Avec saint Paul, accueillir
et annoncer l’Évangile
Père Jean-Marc de Terwangne
En Avent ! Un temps pour accueillir
que Dieu se fasse Homme
◗ Du 30 novembre au 6 décembre
74 – La Flatière
Père Hubert-Marie Chalmandrier
L’Espérance qui ne déçoit pas
◗ Du 30 novembre au 6 décembre
51 – Baye
«Avec sainte Hildegarde retrouvons
l’harmonie du corps, de l’âme et de
l’esprit»
Monodiète à l’épeautre
n DÉCEMBRE 2015
◗ Du 6 au 12 décembre
22 – Tressaint
Père Bruno de Belloy
Avec Marie, entre combats,
joies et repos, comment faire
de notre vie une offrande agréable
à Dieu ?
◗ RETRAITES SPIRITUELLES
73 – Naves
Père Emmanuel Faure
O Marie, Mère immaculée,
tu accueilles nos vies blessées
Virginie Glémot
Marthe Robin : «Je ne suis qu’un rappel !»
51 – Baye
Père Joël Guibert
Lorsque ma croix devient paix et vie
47 – Lacépède
Il a habité parmi nous… Il y demeure !
Odile Schneider-Maunoury
«Dieu habite-t-il vraiment avec les
hommes sur la terre ?» (1 Rois 8)
Abbé Philippe Degand
Noël, Dieu vient : sourire de Dieu
62 – Courset
Père Laurent Boucly
Dieu ne se lasse pas de donner son amour
47 – Lacépède
«Je suis le Bon Pasteur», dit Jésus
97 – Tampon – La Réunion
Père Henri Canden
«Il a habité parmi nous !» Jn 1,11
◗ Du 26 décembre au 1er janvier 2016
78 – Poissy
Père Bruno Charnin
Le mystère de la Nativité du Christ ; la place
de chacun dans le plan de Dieu : Marie,
Joseph, les anges, les bergers et les mages.
77 – Combs-la-Ville
Père Alain Bandelier
«Ma lumière et mon salut,
c’est le Seigneur !»
CH – Bex – Suisse
Père René Fracheboud
Quand l’Amour prend visage…
73 – Naves
Père Guy Sionneau
«Ils se réjouirons d’une très grande joie»
Retraite avec ski et raquettes
13 – Sufferchoix
Père Lucien Cotte
« Et le Verbe s’est fait chair »
22 – Tressaint
Père Hervé Gosselin
Bonne Nouvelle ! Grande joie !
74 – La Flatière
Père Jean-François Hüe
« Que Ma joie soit en vous » (Jn 15, 11)
Retraite réservée
principalement aux 18-35 ans
51 – Baye
et la famille du Foyer
La sainte famille est vraiment formidable !
L’ALOUETTE N°290-291 | OCTOBRE 2015- 47
97220 Trinité – Martinique
Père Emmanuel Aine
Un monde nouveau est en train de naître,
ne le voyez-vous pas ?
26 – Châteauneuf-de-Galaure
Père Bernard Michon
La symphonie du salut
n JANVIER 2016
◗ Du 17 au 23 janvier 2016
62 – Courset
Père Jean-Luc Garin
Retraite pour les prêtres
avec les diocèses de Lille, Arras, Cambrai
◗ Du 18 au 24 janvier 2016
74 – La Flatière
Père Pierre Hanosset
«Nous avons reconnu l’Amour
et nous y avons cru» (1 Jn 4, 16)
◗ 24 au 30 janvier 2016
78 – Poissy
Père Guillaume-M. Protais
Une Parole qui transforme notre vie
◗ 25 au 31 janvier 2016
47 – Lacépède
Père Michel Martin Prével
Parcours Tobie et Sara
Pour couples
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