L`histoire de la famille O`Reilly

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L`histoire de la famille O`Reilly
L’histoire de la famille O’Reilly
Il y a très longtemps, à l’époque où peut-être ton arrière, arrière, arrière-grand-mère avait
le même âge que toi, il y avait une nouvelle famille qui vivait dans une maison de la
charmante petite ville de Victoria.
C’était dans les années 1860 et 1870 et cette maison, c’était la maison Point Ellice. On
peut la visiter aujourd’hui et même se promener à l’intérieur. Aujourd’hui, ce n’est plus
une maison neuve comme jadis. C’est l’une des plus vieilles maisons qui se trouvent dans
l’un des quartiers les plus bruyants et les plus grouillants de Victoria, qui est devenue une
grande ville.
Quand on regarde la maison vieillotte d’aujourd’hui, avec ses murs un peu bombés et ses
odeurs de bois ancien, il est difficile d’imaginer qu’une petite fille qui s’appelait Kathleen
y jouait aux billes avec ses frères. Viens, entrons dans son monde…
Avant de te parler de Kathleen et de sa vie de petite fille, il serait intéressant de
comprendre comment elle est arrivée à la maison Point Ellice. Pourquoi vis-tu où tu vis
maintenant? C’est probablement parce que tes parents l’ont décidé.
La maman et le papa de Kathleen ne venaient pas du Canada. À l’époque, la plupart des
personnes qui vivaient dans la petite ville de Victoria venaient du Royaume-Uni (qui
comprenait l’Angleterre, le pays de Galles et l’Écosse) ou de l’Irlande, qui était propriété
britannique. La Colombie-Britannique était une colonie britannique. Cela veut dire
qu’elle ne faisait pas encore partie du Canada. C’était un pays sauvage, où il n’y avait pas
beaucoup de monde, mais pour ceux qui avaient du courage et de la détermination, la
Colombie-Britannique était une terre remplie de possibilités.
Son père s’appelait Peter O’Reilly. C’était un Irlandais et il était venu pour travailler
comme commissaire de l’or en Colombie-Britannique. Cela veut dire qu’il s’occupait de
la façon dont l’or serait perçu. Il avait travaillé pour la police en Irlande. Il a donc eu
rapidement d’autres responsabilités plus importantes et a été notamment juge de paix.
Même si son travail l’amenait à voyager dans toute la province, il venait souvent à
Victoria, où il était invité à dîner à la « maison Fairfield ». C’était la maison où vivait Sir
Joseph Trutch. Monsieur Trutch était un homme très important du milieu de la politique
de la Colombie-Britannique à l’époque.
La sœur de monsieur Trutch, Caroline, venait tout juste d’arriver à Victoria lorsque Peter
O’Reilly est arrivé pour dîner. À Victoria, il y avait beaucoup plus d’hommes que de
femmes et il était rare de trouver une femme aussi jolie et intelligente qui n’était pas
mariée. Peter O’Reilly n’a pu s’empêcher de remarquer une femme aussi charmante. Ils
ont décidé de se marier en 1863.
Au cours des premières années où ils étaient ensemble, leur vie était partagée entre trois
villes : Victoria, Yale et New Westminster. C’est au cours de cette période qu’est né
Frank, le grand frère de Kathleen.
Mais alors, qu’en est-il de Kathleen?
Assez rapidement, Caroline est devenue enceinte de Kathleen. Mais comme tu le sais,
s’occuper de bébés et de jeunes enfants, c’est beaucoup de travail. Caroline voulait
arrêter de voyager d’une ville à l’autre et s’installer à Victoria afin que sa mère, qui vivait
à la maison Fairfield de la famille Trutch, puisse donner un coup de main à la jeune
famille.
Alors en 1867, ils ont déménagé dans une petite maison qui avait été construite six ans
plus tôt et qui faisait partie d’une immense ferme qui s’étendait de la Gorge Waterway
jusqu’au secteur de Hillside. Cette maison a été le début de ce qu’est devenue la maison
Point Ellice aujourd’hui, car de nouvelles pièces y ont été ajoutées au fur et à mesure que
la famille a grandi. La maison a alors commencé à ressembler aux maisons auxquelles
Peter O’Reilly était habitué en Irlande.
Lors de ta visite aujourd’hui, tu remarqueras des choses telles que de grandes fenêtres en
saillie, du papier peint plein de petits motifs et un foyer dans chaque chambre. Tu peux
avancer sur le porche et commencer à utiliser ton imagination : tu peux fermer les yeux et
au lieu de voir des vieilles carcasses de voitures des parcs de ferraille environnants, tu
peux t’imaginer qu’il y avait une petite route tranquille qui s’appelait la rue Pleasant, et
c’était comme son nom l’inique, une rue très agréable avec plusieurs belles demeures le
long de la voie navigable Selkirk. Les animaux sauvages et les enfants entraient et
sortaient de l’eau, et jouaient sur les rives boueuses. Aujourd’hui, le pont de la rue Bay,
qui surplombe la maison de Point Ellice, fait une toile de fond plutôt terne avec le bruit
incessant de la circulation et des camions lourds. Mai si tu pouvais imaginer que tu vis
dans les années 1870, tu aurais de la chance si tu pouvais entendre le tramway sur le pont
ou le bruit des sabots d’un cheval tirant une voiture.
Peut-être que tu entendrais aussi un bébé qui pleure. C’est peut-être Kathleen…
Kathleen est née le 31 décembre 1867. Son nom complet est Charlotte Kathleen O’Reilly,
mais on la surnommait aussi Kitty ou Pussy, parce que c’était plus court. Elle est née
dans la maison de Point Ellice parce qu’autrefois les bébés naissaient dans les maisons.
Pour aider à l’accouchement, une femme de la communauté qui avait assisté à beaucoup
de naissances, et parfois un médecin, venait donner un coup de main. Six ans après la
naissance de Kathleen, son frère Arthur Jack O’Reilly est né et deux ans après, elle a eu
une petite sœur qui s’appelait Mary Augusta et que l’on surnommait Pop.
Alors, que faisaient les enfants toute la journée dans ce temps-là?
Kathleen vivait à l’époque victorienne. Cela veut dire qu’elle vivait au temps où la reine
Victoria était la reine de l’Angleterre, de 1837 à 1901. Donc, la maison Point Ellice était
une maison victorienne et les gens qui vivaient à la fin des années 1800 étaient des
victoriens. À l’époque victorienne, les gens croyaient que les enfants devaient « être vus,
mais pas entendus ». On apprenait donc aux enfants à être très polis et à se conduire
correctement.
Essaie de penser au nombre de jouets que tu possèdes. Tu en as peut-être 100, 200 ou
même plus (si tu comptes toutes les petites voitures, les animaux en peluche, les jeux, les
jeux vidéo, les poupées et les jeux d’artisanat). Essaie maintenant de penser au nombre de
livres que tu as. Tu en as peut-être plus de 50. À l’époque victorienne, les enfants étaient
loin d’avoir le même nombre de jouets ou de livres, même les enfants de familles aisées
comme les O’Reilly.
Les jouets de qualité, comme les poupées coûteuses avec des têtes en cire ou les boîtes à
surprise dont on tourne la manivelle et d’où sort une petite marionnette, venaient
d’Europe. Toutefois, avec un peu d’imagination, d’aide et de talent, on pouvait fabriquer
beaucoup de jouets. Les enfants jouaient avec des billes en argile ou en porcelaine. Avec
du bois, on sculptait des petits bateaux, des jeux d’échecs ou des chevaux à bascule. Bien
des jouets étaient tout simplement des objets récupérés : des cerceaux de baril, que l’on
pouvait lancer ou faire rouler, ou de vieux fers à cheval. Les enfants pouvaient aller à la
pêche, se promener dans la campagne ou jouer à des jeux d’adultes comme les cartes ou
le croquet. Souvent, un simple jouet et un peu d’imagination suffisaient à les rendre
heureux. Il n’y avait pas de télé, de Nintendo ou de poupées qui parlent. Il y avait très peu
de livres pour enfants autres que des bibles et les histoires apprenaient surtout aux enfants
à être polis et leur expliquaient toutes les choses terribles qui arrivaient aux enfants qui
étaient impolis!
Seuls les enfants de familles aisées pouvaient aller à l’école. Un professeur pouvait venir
à la maison ou ils pouvaient aller dans une école. Les matières que l’on jugeait
importantes dans ce temps-là étaient la calligraphie et l’écriture. Les petites filles
apprenaient aussi la couture et la cuisine. Savoir comment organiser la maison était très
important pour les femmes de cette époque, car il était rare qu’elles travaillent à
l’extérieur de la maison, surtout si elles venaient d’une famille riche. Mais elles devaient
savoir comment avoir une maison parfaite, organiser de belles fêtes et écrire des lettres
intéressantes! Lorsqu’elles se mariaient, les femmes quittaient habituellement la maison
de leur père pour habiter dans celle de leur mari. Elles n’avaient donc pas à assurer leur
subsistance et à gagner leur propre argent.
Les garçons profitaient d’une meilleure éducation globale, qui comprenait de la
géographie, des sciences et des notions de droit. Cela les préparait à occuper des emplois
dans un monde où de nouvelles machines et de nouveaux types d’énergie voyaient le
jour, et où on explorait de nouveaux pays pour en faire des colonies. Souvent, on
envoyait les garçons « au pays », en Grande-Bretagne, afin qu’ils reçoivent une bonne
éducation. Les deux frères de Kathleen ont reçu leur éducation en Angleterre.
À l’âge de 7 ans, Kathleen avait un professeur qui venait à la maison pour lui enseigner et
pour enseigner à Pop, sa jeune sœur, un enseignant qui se rend dans la maison des enfants
pour leur enseigner s’appelle un tuteur. À 10 ans, Kathleen a commencé à aller à l’école à
Victoria. Toutefois, contrairement à plusieurs élèves, elle ne vivait pas à l’école, en
pension. On la reconduisait à l’école tous les matins, dans une voiture tirée par des
chevaux. À l’âge de 16 ans, elle est allée à l’école en Angleterre.
Elle regardait et elle apprenait de sa maman…
Caroline (la maman de Kathleen) se chargeait de tout ce qui concerne la maison. En ce
temps-là, avoir la charge d’une maison était un travail beaucoup plus exigeant
qu’aujourd’hui. En 1867, lorsque les O’Reilly ont déménagé dans la maison Point Ellice,
il n’y avait pas d’électricité ou de gaz pour faire fonctionner les appareils auxquels nous
sommes habitués tels que l’aspirateur, le lave-vaisselle, la cuisinière, le réfrigérateur ou la
machine à laver. Tout devait être fait à la main et garder une maison propre et chaude
exigeait des heures de travail chaque jour. La lumière provenait de lampes qu’il fallait
régulièrement remplir d’huile. Quelqu’un devait transporter le charbon dans un panier de
la cave à charbon, le briser en morceaux, alimenter les foyers partout dans la maison pour
garder les pièces au chaud et faire fonctionner aussi la cuisinière pour faire cuire les
aliments. Les aliments ne pouvaient pas être gardés au froid quand il faisait chaud, mais il
y avait un garde-manger dans la partie nord de la maison. On lavait les vêtements à la
main et de gros fers étaient mis à chauffer sur le poêle pour presser les vêtements.
Mais la fin des années 1800 était aussi une période de changements, car de nouveaux
types d’énergie étaient découverts et de nouvelles machines étaient inventées. Au lieu
d’un balai traditionnel, un nouvel appareil appelé balayeur de plancher Crescent était
utilisé et une machine à coudre actionnée à la main permettait d’avoir un coup de main
pour les travaux de couture. L’électricité est arrivée dans les années 1890, de même que
des appareils électriques très simples.
Mais les O’Reilly étaient une famille très bien nantie. Cela veut dire qu’ils pouvaient
embaucher des personnes pour les aider dans la maison. Aujourd’hui, certaines familles
peuvent embaucher une femme de ménage ou une bonne d’enfants. Mais dans les années
1800, il était courant pour les familles qui avaient plus d’argent d’avoir des serviteurs. Ils
recevaient un petit salaire et étaient logés et nourris. Les serviteurs dormaient et
mangeaient habituellement dans une partie qui leur était réservée afin de ne pas se mêler
aux activités de leurs maîtres. Dans une famille gentille et attentionnée, le serviteur se
sentait aimé et apprécié. Toutefois, dans certaines situations, les besoins et les désirs d’un
serviteur étaient considérés comme sans importance et ils n’étaient pas très bien traités.
En ce temps-là, il y avait un « système de classes ». Ce système fait en sorte que certaines
personnes se sentent meilleures que les autres parce qu’elles ont plus d’argent, qu’elles
peuvent mieux parler une langue, ont une meilleure éducation ou sont d’une race
différente. Aujourd’hui, les Canadiens sont fiers de traiter tous les types de personnes sur
un pied d’égalité. On appelle cela le respect des droits de l'homme.
Les O’Reilly traitaient bien leurs serviteurs. Ils avaient un employé de maison qui
recevait 10 dollars par mois en 1875. Ils avaient aussi une bonne et un jardinier. Il y a une
porte capitonnée dans la maison des O’Reilly. Elle sépare la maison en deux. D’un côté il
y a la cuisine, l’arrière-cuisine et l’office, où travaillent les serviteurs. C’est de l’autre
côté que vivent les O’Reilly. Sous cette porte se trouve une série de clochettes reliées à
des fils qui vont dans chaque pièce. Chaque clochette a un son différent et quand les
serviteurs entendaient l’une d’elles, ils savaient que c’était celle d’une pièce en
particulier. Il y a aussi une entrée séparée pour les serviteurs et un coin séparé du grenier
où ils dormaient.
Les serviteurs aidaient à la préparation de repas, servaient le souper, faisaient le ménage,
transportaient le charbon, époussetaient, faisaient du rangement, remplissaient la
baignoire, ciraient les chaussures, lavaient et repassaient les vêtements et le linge de
maison, faisaient le beurre, lavaient la vaisselle, polissaient l’argenterie, alimentaient les
feux dans les cheminées et donnaient un coup de main à une foule d’autres tâches au
besoin. À l’époque victorienne, tenir maison exigeait beaucoup plus de travail et en plus,
la maison des familles riches devait toujours être parfaitement propre et prêt à recevoir
des invités au besoin.
Caroline était elle aussi bien occupée. Elle organisait le travail des serviteurs, planifiait
les menus, achetait les aliments, faisait les confitures et les conserves, s’occupait de ses
enfants, préparait des arrangements floraux et organisait des soupers et des événements
sociaux. Plusieurs de ces tâches peuvent se faire beaucoup plus vite de nos jours… Mais
imagine ce qu’il fallait faire pour envoyer une invitation à des amis lorsqu’il n’y avait pas
de poste, pas de téléphone, pas de voiture ni d’ordinateur! Il fallait écrire une lettre pour
chaque personne et faire livrer chacune de ces invitations par voiture à cheval ou par
messager à bicyclette.
La maladie dans la maison…
Mary Augusta, la petite sœur de Kathleen, que la famille avait plaisamment surnommée
« Pop », a souffert durant toute son enfance. Aujourd’hui, les médecins disposent de
toutes sortes de moyens pour trouver de quelles maladies souffrent les gens. Ils peuvent
faire des tests sanguins, des radiographies, des tests à ultrasons et discuter des cas avec
d’autres médecins de partout dans le monde par téléphone ou par Internet. Aujourd’hui, il
y a aussi toutes sortes de moyens de soigner les gens très malades, par exemple des
antibiotiques, des interventions chirurgicales compliquées, de la chimiothérapie, des
transfusions sanguines et des médicaments spéciaux. À l’époque victorienne, on ne savait
pas vraiment comment guérir les maladies. Des notions que nous considérons comme
élémentaires en matière de santé n’étaient pas encore découvertes. Par exemple, les
médecins ne s’étaient pas encore rendu compte que les rhumes ou les infections
pouvaient être contagieux. Plusieurs personnes mouraient de maladies.
Le médecin de Pop était le docteur Helmcken. C’était un médecin pionnier, avec un gros
coffre rempli de flacons de médicaments qui pouvaient parfois aider, surtout pour
soulager la douleur. C’était un médecin bien apprécié à Victoria, qui arrivait à cheval –
son cheval s’appelait Julia – pour aider les gens du mieux qu’il pouvait.
Il semble que déjà, à trois ans, Pop souffrait de terribles maux de dos. Elle avait aussi des
« convulsions ». Sa famille et son médecin l’aidaient du mieux qu’ils pouvaient, mais à
l’âge de sept ans, son état de santé a empiré et elle souffrait continuellement. Même la
lumière du jour lui était insupportable. C’était très triste pour tous ceux et celles qui
connaissaient Pop, car ils ne pouvaient rien faire pour la guérir et elle est morte le
6 novembre 1876.
Kathleen a continué de grandir et de vivre une vie heureuse et quelques années plus tard,
elle devint une jeune femme prête à profiter pleinement de la vie…
Les jeunes femmes de familles aisées avaient le temps de s’amuser. Kathleen aimait
beaucoup les beaux vêtements et adorait recevoir. Elle visitait ses amies, dont Jessie
Dunsmuir, au château Craigdarroch. Ensemble, elles montaient à cheval, dessinaient,
jouaient au croquet et papotaient aussi sans doute un peu.
Kathleen suivait des cours de musique, de danse et d’équitation. Elle a dessiné et peint de
forts jolis tableaux que tu peux voir en visitant la maison Point Ellice. Kathleen jouait de
la harpe, un instrument qui lui avait été donné par sans grand-mère, Lady Trutch. Il
arrivait que Caroline joue de la harpe pendant que sa mère, Caroline, jouait au piano et
chantait pour divertir ses invités.
De nos jours, quand on veut écouter de la musique, on peut ouvrir la radio ou écouter un
disque compact. À l’époque victorienne, toute la musique était jouée en direct. Cela veut
dire que pour écouter de la musique, il fallait que quelqu’un en joue, car rien ne pouvait
être enregistré. Il était courant que les filles apprennent la musique dans le cadre de leur
éducation, car elles pouvaient ainsi offrir aux autres le plaisir d’écouter de la musique.
Kathleen aimait aussi aller à l’opéra.
De même, si tu veux garder un souvenir d’une fête, d’une personne en particulier ou d’un
beau paysage, tu vas probablement prendre une photo. Or, si la photographie était un
processus très nouveau et compliqué que seules certaines personnes connaissaient, que se
passerait-il? Comment pourrais-tu immortaliser quelque chose de précieux pour toi? À
l’époque victorienne, avoir un talent artistique était extrêmement précieux, parce que cela
permettait de garder une image des choses qui étaient importantes pour toi.
Kathleen aimait aussi la lecture, la broderie, le croquet, le tennis, le golf, le patinage, les
pique-niques et le jardinage et une fois qu’elle a eu 19 ans, elle a commencé à faire de la
bicyclette.
Quels types d’activité les frères de Kathleen appréciaient-ils?
Les jeunes hommes de familles aisées, à l’époque victorienne, se préparaient à faire
carrière. Ils allaient à l’école, puis occupaient un emploi. Comme c’étaient des garçons,
Jack et Frank sont allés à l’école en Angleterre. Une grande part de leur vie ne s’est pas
déroulée à Victoria.
Il semble que tout allait moins vite à cette époque. Aujourd’hui, si on doit aller en
Angleterre, on s’assure d’y aller en avion. Mais à l’époque victorienne, les avions
n’étaient pas encore inventés. Les gens devaient traverser l’océan sur de grands bateaux
qui prenaient des semaines à faire le voyage. Aujourd’hui, si tu veux aller chez un ami
qui habite à tels kilomètres, ton père ou ta mère peuvent t’y conduire en 5 à 10 minutes.
Mais à cette époque, il fallait attacher un cheval à une voiture et s’y asseoir pendant plus
d’une heure pour se rendre à la maison d’un ami. On ne pouvait pas aller à plusieurs
endroits en une seule journée. Cela veut donc dire que les victoriens vivaient à un rythme
plus lent, avaient plus de temps pour lire, pour écrire des lettres et pour des soirées où ils
se réunissaient.
Plusieurs jeunes hommes aimaient pratiquer une variété de sports comme le tennis, le
golf, le patinage, le polo, le soccer et le rugby. Jack, le frère de Kathleen, était
particulièrement fort au croquet, et a même remporté un championnat dans cette
discipline à Vancouver. Il aimait aussi la pêche, la chasse, les pique-niques, le théâtre et
le jardinage en serre. Frank aimait beaucoup la navigation.
Le père de Kathleen venait d’Irlande et sa mère venait d’Angleterre. Cela veut dire qu’ils
étaient tous les deux un peu britanniques, car l’Angleterre faisait partie de la GrandeBretagne et l’Irlande aussi. La Colombie-Britannique était une colonie de la GrandeBretagne et même si c’était un territoire rempli de possibilités, elle était aussi perçue
comme un peu sauvage et assez peu civilisée. Les gens qui avaient assez d’argent pour y
construire la maison qu’ils voulaient essayaient habituellement de copier les maisons qui
se trouvaient en Grande-Bretagne.
La nourriture, la musique, les meubles, les vêtements et les loisirs étaient très semblables
à ce qu’il y avait au « vieux pays », en Angleterre. Ce n’est pas surprenant, puisque
Victoria était une ville encore toute nouvelle et que les gens qui y vivaient venaient tout
du « vieux pays », sauf les Autochtones, qui y étaient depuis des milliers d’années.
Mais ce n’est pas tous les nouveaux arrivants qui tentaient de copier la Grande-Bretagne.
Ceux qui venaient d’arriver et n’avaient pas beaucoup d’argent devaient tirer de la nature
et de la faune ce qu’il leur fallait pour survivre. Les gens qui avaient moins d’argent
vivaient dans des maisons en bois rond, chassaient et cultivaient ce qu’ils mangeaient,
allaient très peu à l’école – s’ils y allaient – et fabriquaient leurs propres meubles et leurs
propres jouets.
Les O’Reilly pouvaient se permettre de copier la Grande-Bretagne. Et ils se rendaient en
Angleterre pour faire des achats afin d’être à la mode autant que possible. La plupart de
leurs meubles ont été apportés sur place en 1883. Le papier peint, les ustensiles de
cuisine, l’argenterie, les décorations, le piano, les livres, les vêtements et les jouets des
enfants étaient achetés en Angleterre. Les enfants O’Reilly sont allés à l’école en
Angleterre, car on pensait que les écoles anglaises étaient les meilleures.
Jeune femme, Kathleen se rendait en Angleterre régulièrement. Au lieu d’y demeurer
quelques semaines, comme la plupart des familles le font aujourd’hui, elle y restait plus
d’un an. C’est lors d’une occasion spéciale là-bas qu’elle a été « présentée » en Irlande…
En 1897, Kathleen a été « présentée » au lord et à la comtesse Cadogan dans la ville de
Dublin, en Irlande. Cela veut dire qu’on lui a présenté un groupe de personnes riches et
très importantes en Irlande et que cela était un grand honneur. Pour l’occasion, elle devait
s’habiller avec le plus d’élégance possible et être aussi charmante et polie qu’elle le
pouvait. Elle portait une robe de bal blanche avec une doublure d’un vert délicat, parée de
grands lys et de nœuds de ruban verts et blancs. Elle portait aussi un superbe bouquet.
Kathleen était une belle femme et était très intéressante. Plusieurs hommes l’avaient
remarquée et venaient la visiter à la maison Point Ellice. Deux d’entre eux s’intéressaient
particulièrement à elle…
L’un de ces hommes était le capitaine Robert Scott. Son nom est bien connu aujourd’hui
car c’était un célèbre explorateur de l’Antarctique. Avant ses expéditions dans
l’Antarctique, il faisait partie de la marine britannique et a envoyé plusieurs lettres à
Kathleen. Il a peut-être voulu se marier avec elle, mais pour une raison que l’on ignore,
cela ne s’est jamais fait. Il a épousé une autre femme, et est mort de froid dans une
terrible tempête lors d’un de ses voyages en Antarctique.
Il y avait aussi un officier de la marine royale nommé Henry Stanhope, qui rendait visite
à Kathleen et à sa famille à la maison Point Ellice. Il semble qu’il a été grandement
impressionné par Kathleen, et que ce sentiment était peut-être partagé par la jeune
femme. Toutefois, lorsqu’ils sont allés un jour en promenade et que Henry lui a demandé
de l’épouser, elle a refusé, ce qui a surpris sa famille. Dans une lettre envoyée à son père
qui était en voyage, elle explique que l’idée de partager sa vie avec une personne qu’elle
ne connaissait pas très bien lui faisait peur : « Je ne veux pas me marier, j’aime être ici
avec vous tous et je crois que personne au monde ne peut profiter d’une maison où l’on
est aussi heureux et d’une vie aussi remplie de bonheur que la mienne. »
La vie heureuse de Kathleen se poursuivit…
Kathleen ne s’est jamais mariée. Elle a continué de vivre dans la maison qu’elle aimait.
Elle aidait sa mère lorsqu’elle recevait des invités et faisait quelques corvées légères
telles que la préparation des confitures ou la confection d’arrangements floraux. Elle
allait avec sa mère dans d’élégantes réceptions à Government House et se rendait dans
d’autres fêtes avec ses amies.
Lorsque sa mère est décédée, elle est devenue « maîtresse » de la maison et a continué
d’aimer s’occuper de la maison et de profiter de ses passe-temps préférés comme la
lecture, l’écriture de lettres, le croquet, la broderie, la harpe et le jardinage. Elle adorait sa
maison.
Aujourd’hui, elle est enterrée au cimetière Ross Bay, à Victoria. Mais le monde de
Kathleen est toujours avec nous. La maison Point Ellice est ouverte aux visiteurs afin que
tu puisses voir à quoi ressemblait la vie à l’époque victorienne et si tu ne peux pas la
visiter en personne, souhaitons que cette page Web te permette quand même de profiter
d’une petite visite que Kathleen n’aurait sans doute jamais imaginé pouvoir un jour se
réaliser!
Maintenant, je me demande bien ce que Kathleen a prévu pour le souper…