La bande à Drogba : Génération maudite

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La bande à Drogba : Génération maudite
La bande à Drogba : Génération maudite ?
Écrit par L'Observateur Paalga
Mardi, 14 Février 2012 09:27 -
Rideaux. La vingt-huitième coupe d’Afrique des nations (CAN) de football qui se jouait depuis le
21 janvier 2012 au Gabon et en Guinée-Equatoriale s’est terminée le dimanche 12 février sur
une victoire de la Zambie, qui est venue à bout de la Côte d'Ivoire à l'issue de l'insoutenable
épreuve des tirs au but (7-6) ; les deux équipes, dans un match plutôt fermé où l'enjeu, selon la
formule consacrée, a quelque peu tué le jeu, n'ayant pu se départager au terme du temps
réglementaire et des prolongations.
Les réputés gros bras (Cameroun, Egypte, Nigeria et Algérie) de la scène footballistique
africaine n’ayant pu se qualifier pour cette édition, la bande à Didier Drogba, à côté d’autres
candidats tels les Sénégalais ou les Ghanéens, apparaissait pourtant comme l’un des
superfavoris de cette épreuve, que l’on disait, à tort, dévaluée. On sait ce qu’il est advenu des
«Lions de la Teranga», une constellation hétéroclite de vedettes sans âme, éliminée dès le
premier tour, et des «Black Stars», qui n’auront pas vraiment été à la hauteur de leur réputation
et qui ont fini par tomber en demi-finales face à de surprenants (?) Zambiens.
Dame Coupe, disent les chroniqueurs sportifs, est souvent capricieuse, et il faut reconnaître
que ce coup-ci, elle se sera encore fait particulièrement désirer par le meilleur de ses
prétendants, en tout cas sur le papier. Les Eléphants de Côte d'Ivoire, puisque c'est d'eux qu'il
s'agit, sont parvenus en finale, ne l’oublions pas, sans encaisser le moindre but. Il faut le faire !
Pour une formation volontiers portée vers l’attaque, le moins qu’on puisse dire est qu’elle a
appris à assurer ses arrières. Pour mémoire, dans l’histoire, vieille de 55 ans de cette
compétition, il faut remonter à Sénégal 92 avec (déjà) la Côte d’Ivoire de Yéo Martial et à Mali
2002 avec le Cameroun pour voir une telle performance, qui n'est jamais le fait du hasard. A
coup sûr, c’est le résultat combiné du talent, de l’effort et de la rigueur dans tous les
compartiments du jeu.
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Voilà des enfants qui sont nés avec une boule de cuir dans les pieds comme d’autres arrivent
au monde une cuillère d’argent dans la bouche, mais qui étaient convaincus d’être au sommet
avant d’avoir gravi la première marche. Ils arrivaient, de ce fait, à la CAN enflés d’orgueil, sûrs
de leur supériorité et après avoir sablé le champagne à Abidjan. Or le talent n’est rien sans le
travail et… l’humilité, qui est quand même la marque des grands : voyez les Zidane, Messi,
Platini, Pelé, Eto’o…
C’est d’abord cette morgue, cet ennemi intérieur, que les protégés de Zahoui ont dû vaincre
avant de défaire leurs adversaires successifs, et on les aura vus plus appliqués et plus
modestes, ne regardant jamais de haut leurs vis-à-vis. Les Eléphants, version 2012, avaient
beau dire qu'ils étaient partis pour chercher la coupe, ils se sont toujours bien gardés de vendre
la peau de l’ours avant de l’avoir tué, et c’est une belle leçon de modestie qu’ils ont administrée
à eux-mêmes. Cerise sur le gâteau ivoirien, ce qui n’était qu’un amas de stars roulant sur l’or et
aux ego parfois surdimensionnés a, au fil des ans, formé une équipe au vrai sens du terme, un
groupe, voire une famille après avoir subi le contrecoup des vicissitudes politiques qui ont
secoué leur pays ces dix dernières années ; au point que pour certains, la courbe
ethno-régionale et même religieuse, qui a dessiné des lignes de clivage dans la société
ivoirienne, avait également gagné le onze national.
Hélas, cette victoire sur eux-mêmes dans la bataille de la modestie n'aura pas été suffisante
pour décrocher la lune lors de l'ultime rencontre, puisqu'ils ont buté sur des Chipolopolos
outsiders de charme qui ont su contenir et faire déjouer leurs adversaires, cela, d'autant plus
crânement qu'ils n'étaient pas donné vainqueurs et que gagner aurait été un bonus pour eux.
La peur de perdre et ses corrollaires que sont la pression et la crispation étaient, à l'évidence,
dans le camp ivoirien.
A dire vrai, Chris Katongo et ses coéquipiers, qui gravissent pour la première fois le toit de
l'Afrique footballistique, méritent leur couronne, mais on est malheureux pour cette génération
Drogba, talentueuse mais qui n’y parvient jamais, chutant en 2006, 2008 et 2010
respectivement en finale, en demi-finales et en quarts ; presque toujours à la porte des étoiles.
Et on a bien peur que ce fût sa dernière chance sur les stades, dans la mesure où ils ne sont
plus tout à fait jeunes, à commencer par le capitaine, qui affiche 34 ans au compteur. Faut-il
donc se résoudre à croire que cette génération Drogba, pour exceptionnelle qu'elle soit, doit
être maudite et qu'il est écrit quelque part qu'elle ne brandira jamais le trophée continental ?
En fait, on est d'autant plus malheureux pour eux qu'au-delà de la performance sportive, les
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retombées politiques auraient été immenses pour une Côte d’Ivoire qui se relève lentement
mais sûrement des profondes brûlures de son histoire récente. Et le sport en général, le football
en particulier, étant un facteur de rapprochement entre les hommes, nul doute que cette coupe
aurait contribué à cicatriser plus rapidement la plaie encore béante et aurait été un ferment de
la délicate œuvre de reconstruction humaine entreprise depuis des mois. Drogba n'est-il
d'ailleurs pas membre de la Commission "dialogue-vérité-réconciliation", que préside Charles
Konan Banny ? Mais le coach Hervé Renard et ses poulains en ont décidé autrement, au
grand dam d'Alassane Dramane Ouattara, qui n'a pu contenir son chagrin dimanche soir au
stade de l'Amitié de Libreville.
Ousséni Ilboudo
L'observateur paalga
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