essais cliNiques

Transcription

essais cliNiques
N°16 l septembre-octobre 2013
Le magazine de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale
Cigarette électronique
Vapotage : quel usage ?
Alzheimer
Un défi sanitaire
essais cliniques
Pourquoi ils sont
incontournables
Horizon 2020
L’Europe de la recherche
©©François guénet/inserm
La recherche clinique est la
quintessence de la recherche
biomédicale puisqu’elle
représente l’aboutissement
de la recherche plus
fondamentale par sa mise
en application chez l’homme.
Les découvertes de la recherche fondamentale
constituent les fondations de la recherche
clinique qui démontre l’efficacité de nouveaux
traitements ou techniques et, inversement,
génère de nouvelles hypothèses. L’avenir de
la thérapeutique est lié à l’avancée de cette
recherche translationnelle. Cependant, le
délai est long (quinze à vingt ans) et assez peu
de découvertes en laboratoire aboutissent à
une application clinique. Cette recherche est
devenue une profession à part entière avec
ses métiers spécifiques, ses instances, ses
règles du jeu dictées, en particulier, par une
réglementation détaillée et inévitablement
contraignante. Aux côtés des CHU, l’Inserm
est au cœur du dispositif de cette recherche
clinique translationnelle illustrée par plusieurs
exemples dans ce numéro. Il dispose de tous les
outils nécessaires pour soutenir une recherche
clinique innovante et compétitive : les unités de
recherche, les centres d’investigation clinique,
des structures de valorisation (Inserm Transfert),
un lien institutionnel avec les associations de
patients grâce au GRAM (Groupe de réflexion
avec les Associations de malades) et le
pôle de Recherche clinique de l’ITMO Santé
publique, structure de soutien opérationnelle
spécifiquement dédiée aux projets et aux
investigateurs liés à l’Inserm. De plus, l’Institut
est largement ouvert sur l’Europe avec la
plateforme ECRIN (European Clinical Research
Infrastructure Network) et plus récemment
F-CRIN (French Clinical Research Infrastructure
Network) fondée par les Investissements d’avenir
et dédiée aux larges essais translationnels
académiques ou industriels.
Claire Lévy-Marchal et Sonia Guéguen
Responsable et responsable adjointe du pôle de Recherche clinique
Institut thématique multi-organisme Santé publique
SOMMAIRE
➜
➜
à la une
4 Alzheimer
Peut-on éviter une catastrophe
sanitaire ?
Découvertes
6 M
étabolisme
Comment le phosphate s’exporte
8 Imagerie cérébrale Suivez les fibres
10 Chirurgie Les gestes du futur
➜
Têtes chercheuses
14 Alexandra Henrion Caude
Une Fellow à la française
➜
REGARDS SUR Le MONDE
➜
Cliniquement vôtre
17 Cancer Le papillomavirus sous contrôle
18 Inégalités sociales de santé
Peut-on agir sur la nutrition ?
➜ Grand Angle
22 Essais cliniques
Pourquoi ils sont incontournables
➜
Médecine générale
34 Maladie rénale chronique
Les patients ont la parole
➜
Entreprendre
38 Concours de création d’entreprises
Des biotechs pleines d’avenir
➜
Opinions
40 C igarette électronique
Quand les certitudes partent en fumée
➜
Stratégies
➜
Bloc-Notes
42 Horizon 2020
Soyez acteurs de l’Europe de la recherche
44 Centre de ressources biologiques
Des échantillons pour tous
45 Atelier de réflexion prospective
L’obésité en ligne de mire
46 Pariscience
48 Claude Bernard - La méthode de la physiologie
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
3
à la une • Découvertes • Têtes chercheuses • regards sur le monde • Cliniquement vôtre • Grand Angle • Médecine générale • Entreprendre • Opinions • Stratégies • Bloc-Notes
➜
Alzheimer
Peut-on éviter une
catastrophe sanitaire ?
À la suite du bilan globalement positif du 3e plan Alzheimer,
le Président de la République, François Hollande, devrait
annoncer la mise en place du prochain lors de la journée
mondiale de la maladie d’Alzheimer, le 21 septembre.
Un renouvellement qui semble indispensable pour faire
face à la vague de malades annoncée pour les décennies
à venir. La recherche, quant à elle, se tient prête.
©©AJ PHOTO / BSIP
A
Des prévisions
alarmantes...
la recherche
se mobilise
LPlaques séniles
Dépôts anormaux de
bêta-amyloïdes dans le
cerveau, ces agrégats de
peptides sont un signe
caractéristique de la
maladie d’Alzheimer.
vec l’accumulation de plaques
séniles (L) dans
le cerveau et la dégénérescence des neurones
du cortex, la maladie
d’Alzheimer détériore
progressivement nos
­facultés cognitives – trous
de mémoire, problèmes
d’élocution et de coordination – qui conduisent
inexorablement à une
p er te d’autonomie.
Aujour­d’hui, elle touche
plus de 850 000 personnes en France, majoritairement
âgées de plus de 65 ans. Or, une récente étude dirigée
par Hélène Jacqmin-Gadda *, de l’Institut de santé
publique, d’épidémiologie et de développement (Isped)
à Bordeaux, prévoit une augmentation très importante
des cas d’Alzheimer d’ici à 2030 : plus 75 % pour la
population générale et jusqu’à 200 % pour les plus de
90 ans. En cause : le vieillissement de la population et
l’allongement de l’espérance de vie.
La piste génétique
☛Hélène
☛
Jacqmin-Gadda : unité 897
Inserm - Université de Bordeaux
☛Philippe
☛
Amouyel : unité 744 Inserm/
Institut Pasteur de Lille - Université Lille 2
Droit et Santé
☛☛Joël Ankri : Laboratoire universitaire Santé
Environnement Vieillissement (UFR des
sciences de la santé Simone-Veil) - Université
de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines
H. Jacqmin-Gadda et al. European
Journal of Epidemiology, 1er juin 2013 ;
28 (6) : 493-502
4●
Face à ce constat, « la mobilisation est globale et
­mondiale pour lutter contre Alzheimer », assure ­Philippe
­Amouyel *, directeur de la Fondation nationale de
coopération scientifique sur la maladie d­ ’Alzheimer
et les maladies apparentées, créée en 2008 pour coordonner les efforts de la recherche. À l’image du plan
­Alzheimer français (voir encadré), de nombreux
pays ont, en effet, lancé des initiatives similaires qui
touchent tous les aspects de la maladie : prise en charge,
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
traitement, recherche. D’énormes progrès ont ainsi été
réalisés ces dernières années dans le diagnostic et la
compréhension de cette maladie, notamment sur le rôle
du peptide bêta-amyloïde (Aß) dans l’apparition des
plaques séniles et celui de la protéine Tau (L) dans la
dégénérescence neurofibrillaire.
C’est l’enchaînement de ces événements, dans un
­processus appelé « cascade amyloïde », qui conduit à
la mort des neurones du cortex cérébral et à l’apparition
de la maladie. Pourtant, malgré ces avancées fondamentales, il n’existe toujours pas de traitement curatif pour
stopper cet engrenage fatal. La recherche sur la maladie
d’Alzheimer est-elle dans une impasse ? « Non, répond
Philippe Amouyel, de nombreuses pistes sont à l’étude,
notamment grâce à l’essor de la génétique. » Ainsi, depuis
2009, le consortium international IGAP (International
Genomics of Alzheimer’s Project) (L), animé par l’équipe
Inserm Santé publique et épidémiologie moléculaire des
maladies liées au vieillissement dirigée par le chercheur,
Plan Alzheimer 2008-2012 :
mission accomplie !
Ce plan, le 3e depuis 2000, a été lancé en
2008 sous l’égide de l’ancien Président de la
République, Nicolas Sarkozy. Il était organisé
autour de 47 mesures concrètes réparties
en trois grands axes : améliorer la qualité de
vie des malades et des aidants, connaître la
maladie pour mieux la combattre et mobiliser
la société sur cet enjeu de santé publique.
« Les trois quarts de ces mesures ont atteint
leur objectif, rapporte Joël Ankri qui, avec
l’aide de Christine van Broeckhoven, a évalué
à la une
➜
L
cohortes de population, telles
Protéine Tau
que Paquid, 3C, ­Memento, qui Naturellement présente
permettent de mieux connaître dans les neurones afin
l’histoire naturelle de la mala- de moduler la stabilité
cytosquelette des
die et de déterminer quelles du
axones. Dans le cas de
sont les personnes en danger. la maladie d’Alzheimer,
Leur financement est d’ailleurs l’accumulation anormale
l’une des recommandations du de protéines Tau, sous
rapport d’évaluation du plan forme d’agrégats de
filaments, entraîne une
Alzheimer 2008-2012 remis dégénérescence des
au gouvernement à la fin du neurones.
mois de juin par Christine van
Broeckhoven, professeur de
IGAP
génétique moléculaire à l’uniRegroupement de quatre
versité d’Anvers, spécialiste des consortiums spécialisés
maladies neurodégénératives, dans la recherche
et Joël Ankri *, gériatre et sur la génétique de la
professeur de santé publique. maladie d’Alzheimer
en France, GERAD
En matière de prise en charge, (EADI
au Royaume-Uni,
le
rapport
suggère
de
renforcer
ADGC et CHARGE aux
L'analyse des tissus cérébraux apporte de précieuses informations.
le dispositif actuel de soutien États-Unis) dont le but
a identifié une vingtaine de nouveaux gènes qui prédis- des aidants familiaux : assistance de professionnels, est de déterminer les
posent à cette pathologie. « Ces gènes représentent autant aides financières et formations. « Si l’aide à domicile est gènes responsables de
la maladie grâce aux
de nouvelles voies métaboliques (L) qui pourraient être la favorisée, cela permettra aux patients de rester chez eux données génétiques
cible de nouveaux traitements », précise-t-il.
et donc de respecter leur désir. Avec à la clé, un moindre recueillies auprès de plus
besoin en nouvelles structures d’hébergement », ­affirme de 40 000 personnes.
Un diagnostic le plus tôt possible
Joël Ankri.
Par ailleurs, d’autres travaux de l’Isped* ont montré que Un effort dans le
le déclin cognitif des patients commence plus de dix développement de
ans avant le stade clinique, ce qui pourrait expliquer la robotique et dans
l’échec de la recherche thérapeutique actuelle. « Les l’utilisation des nou­essais cliniques récents qui visaient à éliminer la protéine velles technologies
amyloïde chez des malades légèrement ou modérément permettrait aussi de
atteints par des voies immunologiques – vaccination soulager la prise en
curative – ont abouti à des résultats très décevants. Les charge de ces patients,
lésions de ces patients sont peut-être déjà irréversibles, notamment par leurs
explique Philippe Amouyel. De nos jours, le consensus proches, eux aussi
général suggère qu’il faut traiter le plus en amont ­possible, ­généralement assez
dix, voire vingt ans avant l’apparition des premiers âgés. Et bien sûr,
­symptômes. » Un des défis des prochaines années sera continuer à financer la
donc de diagnostiquer au plus tôt le risque d’Alzheimer. recherche afin de trouDes lieux de repos nécessaires pour les familles
D’où l’intérêt des études épidémiologiques de grandes ver une solution pour
et les aidants
enrayer l’engrenage du
déclin cognitif et limiter l’augmentation des cas cliniques.
Voie
le plan Alzheimer 2008-2012. En matière
« Si on parvient à faire reculer les premiers symptômes de
métabolique
de recherche, le bilan est aussi plutôt positif,
cinq années, on réduira de moitié le nombre de personnes
notamment dans les domaines de la génétique
Chaîne de réactions
atteintes d’Alzheimer puisque leur nombre double tous les
biochimiques dans
et de la recherche fondamentale. Le nombre de
cinq ans à partir de 65 ans », souligne Philippe Amouyel.
l’organisme, orchestrée
publications de qualité est en nette augmentation
par un ensemble
Bien qu’un traitement curatif ne soit pas encore
dans des journaux scientifiques reconnus. Mais il
d’enzymes
y a aussi quelques bémols, tout particulièrement
­disponible, l’effort de recherche est global, notamment
en termes de recherche dans les sciences
au niveau européen. L’Europe a, en effet, retenu la lutte
humaines et sociales qui, malgré des financements,
contre les maladies neurodégénératives, et la maladie
n’a pas été à la hauteur des attentes. »
d’Alzheimer en particulier, comme un des dix grands
Ce plan Alzheimer a été généralement bien
oir S&S n°11, Cliniquement
défis des prochaines décennies. Avec l’espoir d’éviter * Vvôtre, « Alzheimer :
perçu par les professionnels et les associations
Un déclin précoce », p. 20
Simon Pierrefixe
une catastrophe. n de malades. Il devrait donc logiquement être
L
reconduit par François Hollande, lors de la
journée mondiale 2013 de la maladie d’Alzheimer.
8
www.plan-alzheimer.gouv.fr
www.serimedis.inserm.fr
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
5
©©Richard DAMORET/REA
©©Inserm/Patrice Latron
L
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• à la une ➜
••
••
MEtabolisme
Comment le
phosphate s’exporte
LRétrovirus
Virus dont le génome est
constitué d’ARN : copié
en ADN, il s’insère dans
les gènes de la cellule
infectée.
LVirus xénotrope
Virus capable d’infecter
des cellules d’autres
espèces que celles
dans lesquelles il s’est
développé.
LADP, ATP
Adénosine diphosphate et
adénosine triphosphate
sont des nucléotides. La transformation de l’ATP
en ADP libère de l’énergie.
☛☛Jean-Luc Battini, Donatella
Giovannini, Marc Sitbon : UMR 5535
CNRS - Université de Montpellier 1 et 2
D. Giovannini et al. Cell Reports,
27 juin 2013 ; 3 (6) : 1866-73
©©IGMM/ Donatella Giovannini
Le phosphate joue un rôle fondamental
dans les cellules. Si les scientifiques
savaient comment il y entrait, ils ignoraient
comment il en sortait. Plus maintenant.
A
u départ était une hypothèse. À l­’arrivée,
l’identification d’une fonction fondamentale du cycle du phosphate, l’un des minéraux les plus abondants dans le corps humain.
Avec en développement possible, des applications thérapeutiques. L’hypothèse ? C’est celle
de l’équipe Rétrovirus, enveloppes et marqueurs
métaboliques, à l’Institut de génétique moléculaire de
­Montpellier. « Les rétrovirus (L) envahissent les cellules
par des récepteurs. Pour plusieurs familles de rétrovirus, ces portes d’entrée sont aussi des transporteurs de
nutriments, tels les acides aminés, les acides nucléiques
ou encore les vitamines », explique Marc S­ itbon *,
dernier co-auteur de l’étude, avec Jean-Luc Battini *,
tous deux directeurs de r­ echerche Inserm. C’est cette
­hypothèse qui les guide, d’autant plus qu’elle a été
confortée par leur découverte, faite dix ans plus tôt : le
transporteur du g­ lucose Glut1 est également un récepteur du rétrovirus HTLV, un des deux types de rétrovirus, avec le VIH, qui infectent l’homme.
Donatella Giovannini *, première auteure de l’étude,
s’est intéressée à XPR1, une molécule connue pour être
la porte d’entrée de rétrovirus de souris, les MLV xénotropes (L). Ces derniers, présents de façon stable dans le
XPR1
©©infographie : sandrine marchand
XRBD
Pi
XRBD, molécule de l’enveloppe du virus murin MLV, peut se fixer
sur le transporteur de phosphate XPR1 et bloquer la sortie du minéral
dont l'importance est capitale.
6●
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
Molécules exportatrices de phosphate (en vert)
dans des cellules rénales (noyaux en magenta)
génome des rongeurs, sont aussi capables d’infecter des
cellules humaines en culture. « La ­présence dans XPR1
d’un domaine particulier, SPX, nous a ­incités à explorer
son rôle dans la régulation du phosphate puisque, chez
les plantes et levures, il est associé à différents niveaux du
cycle de ce minéral », explique Jean-Luc Battini.
La porte de sortie découverte
Grâce à différentes expériences en culture cellulaire,
les chercheurs ont alors montré que la diminution de
XPR1 conduisait à une baisse de la sortie du phosphate
hors des cellules et qu’il suffisait de le réintroduire pour
rétablir l’équilibre. « Nous avons donc identifié le p­ remier
exportateur de phosphate, insiste Marc Sitbon. Si l’on
en soupçonnait l’existence, personne n’avait entrepris
jusqu’ici d’en chercher le responsable ! » De plus, l’équipe
a montré qu’une partie de l’enveloppe du virus murin,
celle qui se lie au récepteur pour faire pénétrer le matériel viral dans la cellule, était un bon inhibiteur de la
fonction d’exportation. Une découverte d’importance
tant le rôle du phosphate est capital. Ce constituant
majeur de la membrane des cellules intervient aussi
dans de nombreuses réactions enzymatiques, tandis
que sa liaison à l’ADP (L) pour former l’ATP (L) est
source d’énergie pour les cellules. Des dérèglements de
la concentration en phosphate sont, en effet, associés
à des maladies graves comme l’insuffisance rénale ou
des troubles de la calcification osseuse, l’ostéoporose
par exemple… Après ce premier résultat déterminant,
l’équipe continue à avancer. Prochaine étape : vérifier si
XPR1, exprimé dans toutes les cellules humaines, ainsi
que chez différentes espèces - du poisson-zèbre à la
drosophile - peut assurer, en plus de sa capacité exportatrice, un rôle encore plus important de régulateur du
phosphate. n Julie Coquart
découvertes
➜
Activité cérébrale
©©G. Mithieux et P. Besnard/Inserm
N
Variation du signal
de la bande alpha (%)
La conscience ne fonctionne
pas sur le principe du tout
ou rien. Elle comporte un
niveau partiel de perception
que Jonathan Levy * et
Juan R. Vidal * ont voulu
caractériser. Treize participants
ont visionné une série de
mots de longueur variable
exposés brièvement. Pour
chacun, ils devaient rapporter
le niveau de perception : dans
sa totalité (signification perçue)
ou partiellement (lettres
perçues). Pendant tout l’essai,
l’activité oscillatoire du cerveau
a été suivie par magnétoencéphalographie. Les
corrigé
©©Jonathan Levy/Inserm
L’alpha de la
perception
Conscience de la forme
Conscience de la signification
Valeur t
Temps (s)
chercheurs ont ensuite
Comparaison des oscillations corticales dans la bande alpha observées lors
de la perception complète (en vert) ou partielle (en rose) du mot « table »
analysé les bandes de
fréquences alpha, béta
de percevoir consciemment un
gauche. Cette observation,
et gamma du rythme
mot avant sa signification. V. M.
dans une région du cerveau
cérébral, caractéristiques
importante pour le traitement
d’un état de conscience ou
☛☛Jonathan Levy : unité 825 Inserm –
des mots pendant la lecture,
d’une activité particulière, et
Université Toulouse III-Paul-Sabatier,
Imagerie cérébrale et handicaps neurologiques
marque la transition entre un
leurs lieux d’émission. Fait
☛☛Juan R. Vidal : unité 1028 Inserm/CNRS/
niveau de conscience partiel et
remarquable : la suppression
Université Saint-Étienne-Jean-Monnet –
un niveau complet. Et ouvre une
du signal des fréquences alpha
Université Claude-Bernard Lyon 1,
Centre de recherche en neurosciences de Lyon
porte à de futures études pour
dans la partie postérieure
J. Levy et al. NeuroImage, septembre 2013 ; 78 : 33-45
déterminer s’il est possible
du cortex occipito-temporal
Quesaco ?
comme Néoglucogenèse
Certains organes (cerveau, muscles à l’effort,
œil...) ont besoin d’un
a p p ro v i s i o n n e m e n t
continu en glucose, le
« carburant » primaire
des cellules. Mais notre
alimentation l’apporte de
façon intermittente au
cours des repas et nos
réserves internes sont
limitées, ce qui est d’autant plus vrai en période
Marquage en rouge de
de jeûne. La solution
l'enzyme de la dernière étape
trouvée par le corps pour
de la néoglucogenèse dans la
maintenir stable cette
paroi intestinale de rat
disponibilité en glucose…
s’appelle la néogluco­
genèse. Il s’agit d’une voie métabolique capitale qui correspond à
la production endogène de glucose. Seuls le foie et, à une moindre
échelle, les reins et la paroi intestinale sont capables de l’induire.
Comment ? En utilisant des substances non glucidiques présentes
dans ces organes, notamment le pyruvate, mais aussi le glycérol
(issu des triglycérides lipidiques), qui sont transformées en glucose.
L’unité Inserm N
­ utrition et cerveau, dirigée par Gilles Mithieux *),
travaille sur ces mécanismes, en particulier au niveau intestinal. Un
de ses axes de recherche : comprendre les relations que la néoglucogenèse entretient avec le cerveau, via l’échange, entre autres, de
­signaux de satiété, régulateurs de la prise alimentaire. N. C.
☛☛Gilles Mithieux : unité 855 Inserm - Université Claude-Bernard Lyon 1
SLA
Les métabolites,
bons pour le diagnostic
Établir le diagnostic de la sclérose latérale
amyotrophique (SLA), une maladie neurodégénérative
débouchant sur la paralysie de l’ensemble des
muscles, demeure difficile. En cause : l’absence de
marqueurs biologiques associés. Face à ce constat,
Hélène Blasco *, de l’unité Imagerie et cerveau, à
Tours, a choisi l’approche métabolomique, qui permet
d’étudier l’ensemble
des métabolites (L)
présents dans un
Métabolite
échantillon biologique.
Composé organique issu du
Grâce à une technique
métabolisme (sucres, acides
de chromatographie
aminés, acides gras, etc.)
liquide (L) couplée à la
spectrométrie de masse à
Chromatographie
haute résolution (L), les
liquide
chercheurs ont analysé
Technique d’analyse des
les métabolites du liquide
composés d’un échantillon
céphalorachidien de
séparés grâce à la
patients et réussi, à plus
migration d’un liquide
de 80 %, à différencier
ceux atteints de SLA
Spectrométrie
des patients témoins.
de masse à haute
Des résultats prometteurs
résolution
pour le diagnostic futur
Technique d’analyse très
de la SLA. V. M.
L
L
L
fine pour identifier et
quantifier des molécules
grâce à leur masse et leur
structure chimique
☛Hélène
☛
Blasco : unité 930 Inserm –
Université François-Rabelais
H. Blasco et al. J. Proteome Res, 16 juillet 2013
(en ligne) doi : 10.1021/pr400376e/J. Proteome Res.
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
7
découvertes
➜
Cancer du sein
••
••
Imagerie cerebrale
Des nanocapsules contre
les « triples négatifs »
☛Anne-Laure
☛
Lainé : unité 1066 Inserm – Université d’Angers
A.–L. Lainé et al. Biomaterials, septembre 2013 ; 34 (28) : 6949-56
Suivez les fibres
©©With kind permission of Springer Science+Business Media/ Springer-Surgical & Radiologic Anatomy-DOI 10.1007/s00276-013-1156-7/
2013 Jun 27/Fig.2 /Corticospinal tract asymmetry and handedness in right- and left-handers by diffusion tensor tractography/
Romuald Seizeur, Elsa Magro, Sylvain Prima, Nicolas Wiest-Daesslé, Camille Maumet, Xavier Morandi- © Springer-Verlag France 2013
Caractérisés par l’absence concomitante au
niveau des cellules cancéreuses des récepteurs
aux œstrogènes, à la progestérone et au facteur
de croissance cellulaire HER2, les cancers du
sein « triples négatifs » sont particulièrement
agressifs. Insensibles aux traitements
actuels, ils nécessitent l’exploration de
voies thérapeutiques alternatives. Ainsi, le
tamoxifène, majoritairement utilisé contre les
cancers du sein hormono-dépendants, qui agit
via les récepteurs aux oestrogènes, semble
être inutile. Cependant, son association au
ferrocène, un composé organométallique, a
montré in vitro un effet sur la prolifération des
cellules cancéreuses. Anne-Laure Lainé *,
au sein de l’unité Micro- et nanomédecines
biomimétiques, a mis en évidence que l’injection
dans le péritoine de nanocapsules lipidiques
transportant le ferrocényl-tamoxifène
ralentissait le développement des tumeurs
chez des souris xénogreffées avec des cellules
cancéreuses mammaires d’origine humaine et
dépourvues de récepteurs aux oestrogènes.
Un premier essai in vivo plein
de promesses… V. M.
Ingénierie tissulaire
©©Julien Guerrero/Inserm
Reconstruire les tissus osseux
Cellules souches mésenchymateuses
(en vert) et cellules endothéliales
(en rouge) en co-culture à 24 h d’intervalle
Les bénéfices des cellules souches mésenchymateuses (L) dans la reconstruction des os
ont été démontrés. Mais une vascularisation
insuffisante après leur implantation conduisait
à des limitations en nutriments et à la mort
cellulaire. Julien ­
Guerrero *, au sein de
l’unité Bio­ingénierie tissulaire, a réalisé une coculture de cellules souches mésenchymateuses
­humaines et de cellules endothéliales dérivées
de cellules progénitrices (L) humaines dans
8●
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
••
••
une matrice poreuse à base de polysaccharides. Les inter­actions y semblent favorisées :
agrégation ­cellulaire et formation de canaux de
communication entre les cellules conduisant à
une activation de la différenciation des cellules
mésenchymateuses en tissu osseux. L’implantation de cette construction tissulaire p
­ endant
trois et huit mois chez des souris a révélé une
augmentation de la production du tissu osseux.
Une piste thérapeutique prometteuse. H. H.
☛☛Julien Guerrero : unité 1026 Inserm – Université de Bordeaux
J. Guerrero et al. Acta Biomateriala, septembre 2013 ; 9 (9) : 8200-13
LCellules souches mésenchymateuses
Cellules de la moelle osseuse pouvant donner
naissance à différents tissus du squelette
(os, cartilage et cellules graisseuses)
LCellules endothéliales progénitrices
Cellules capables de revasculariser un tissu
● Cancer
Faire bouger
les globules blancs
Diminuer les périodes d’aplasie (L)
après une chimiothérapie et
réduire ses effets secondaires
(fatigue, infections...) sont des
objectifs thérapeutiques actuels
en cancérologie. Alexandre
Boissonnas * s’est intéressé
aux mécanismes capables de
reconstituer des populations de
monocytes, un type particulier de
globules blancs, dans la moelle
osseuse. Avec ses collaborateurs,
il a étudié la mobilité de ces
cellules immunitaires à travers les
compartiments de la moelle, après
un traitement au cyclophosphamide,
un composé couramment utilisé
en chimiothérapie du cancer.
À l’aide d’imagerie en temps réel
chez des souris transgéniques, les
chercheurs ont montré que des
récepteurs particuliers présents
découvertes
➜
L
ors d’une maladie
neurologique ou d’une
­intervention chirurgicale, il
est primordial de connaître
la distribution des fibres
nerveuses qui contrôlent la
motricité afin de les préserver
au mieux. Ce que cherche à
faire Romuald Seizeur *
qui a réalisé cette image du
cerveau d’un droitier, en coupe
verticale et observée de face.
Comment peut-on savoir que le
cobaye écrit de la main droite ?
En considérant l’asymétrie des
zones colorées en rouge et
en bleu. Chacune représente
le faisceau de fibres de la
substance blanche (L), appelé
faisceau corticospinal (FCS), qui
assure la motricité volontaire.
Il en existe deux, qui débutent
dans le cortex de chaque
hémisphère et aboutissent aux
motoneurones chargés d’activer
les muscles ­correspondant
à l’ordre envoyé. Le FCS de
l’hémisphère gauche (à droite
sur l’image) est nettement
plus développé que celui de
l’hémisphère droit. Normal,
dites-vous, chacun sait que les
mouvements d’un côté du corps
sont contrôlés par l’hémisphère
opposé. Ainsi, il paraît évident
que la dominance de la main
droite entraîne une asymétrie au
profit de l’hémis­phère gauche.
La preuve
par le faisceau
Ce n’est pourtant pas toujours
le cas. De nombreuses études
en imagerie sur ce sujet
donnent des conclusions
hétérogènes. D’où l’intérêt
de la méthode employée ici,
la tractographie cérébrale,
qui combine l’imagerie par
résonance magnétique
(IRM) morphologique, l’IRM
fonctionnelle et celle
du tenseur de diffusion (L).
Les caractéristiques de chacune
permettent, en effet, de
réaliser une étude précise des
substances blanche et grise et
des zones ou faisceaux activés.
Les données sont ensuite
reconstruites, en se fondant
sur l’utilisation d’algorithmes,
pour obtenir une représentation
visuelle de la direction des
fibres. Outre l’intérêt pour la
connaissance fondamentale,
le chirurgien Romuald Seizeur,
qui a conduit l’étude, sous la
direction de Xavier Morandi,
dans l’unité « VisAGeS :
vision, action et gestion de
l’information en santé »,
rappelle l’importance de
localiser le FCS et de s’assurer
que la méthode utilisée reflète
l’observation clinique. « La
compréhension de sa localisation
in vivo et de sa fonction est un
élément majeur de la recherche
en anatomie mais également
en pathologie du système
nerveux central en raison des
conséquences de son atteinte,
comme le déficit moteur parfois
définitif. » Désormais, il poursuit
ses travaux sur les fibres
blanches, en s’intéressant à leur
modification éventuelle lors de
la vision en 3D, au sein de son
laboratoire, le Latim, à Brest. n
Julie Coquart
ubstance
LSblanche
Zone du cerveau
constituée d’axones,
les prolongements
cellulaires des
neurones
du tenseur
LIdeRMdiffusion
Technique d’imagerie
fondée sur la diffusion
des molécules d’eau
☛Romuald
☛
Seizeur : anciennement
à l’unité 746 Inserm /CNRS/Inria –
Université de Rennes 1, actuellement
à l’unité 1101 Inserm/Telecom
Bretagne – Université de Bretagne
occidentale, Laboratoire de traitement
de l’information médicale (latim)
R. Seizeur et al. Surgical and Radiologic
Anatomy, 27 juin 2013 (en ligne)
doi : 10.1007/s00276-013-1156-7
VIH
☛Alexandre
☛
Boissonnas : unité 945 Inserm –
Université Pierre-et-Marie-Curie, Immunité et infection
S. Jacquelin et al. Blood, 17 juin 2013 (en ligne)
doi : 10.1182/blood-2013-01-480749
LAplasie
Dysfonctionnement cellulaire
allant jusqu’à un arrêt du
développement.
LChimiokine
Petite protéine fonctionnant
par attraction chimique capable
d’activer les cellules du système
immunitaire.
Comment les particules virales sont séquestrées
©©Raphaël Gaudin et Philippe Benaroch/Institut Curie/Inserm
au niveau des monocytes, les
récepteurs à chimiokines (L) CCR2
et CX3CR1, jouent sur la mobilité de
ces cellules et donc leur répartition
dans l’organisme après traitement.
Moduler la mobilisation postchimiothérapie de ces cellules :
une nouvelle piste à explorer. V. M.
Les macrophages (L)
infectés par le
VIH stockent les
particules virales
- virions - dans des
compartiments
dédiés (les VCC) ,
dont la nature est
mal connue. Philippe
Benaroch *, de
l’unité Immunité
Macrophages infectés - protéine
et cancer, propose
virale en vert , microtubules
un modèle de la
en rouge, noyaux en violet
dynamique de leur
formation. Des
compartiments intracellulaires
formés à partir de la membrane
Macrophage
cellulaire préexistent dans les
Cellule du système
macrophages avant infection.
immunitaire chargée
d’absorber et de digérer Ils sont détournés par le VIH qui
les corps étrangers
les utilise comme plateforme
L
d’assemblage des nouveaux
virions qui y bourgeonnent et s’y
accumulent. Ses observations
indiquent également une perte
du pouvoir infectieux des virus
ainsi séquestrés, explicable par la
fragilité du VIH. Les VCCs évoluent
avec le temps, ils tendent, d’abord,
à perdre leur connexion avec la
membrane cellulaire, puis ils
seraient de nouveau transportés
vers cette même membrane au
moyen de moteurs moléculaires,
étape que la même équipe avait
déjà mise en évidence en 2012. Il
reste encore à éclaircir la manière
dont les virions sont sécrétés. H. H.
☛Philippe
☛
Benaroch : unité 932 Inserm/Institut Curie –
Université Paris-Descartes
R. Gaudin et al. J Cell Biol, 29 octobre 2012 ; 199 (3) : 467-79
R. Gaudin et al. Plos One, 29 juillet 2013 ; 8 (7) : e69450
doi : 10.1371/journal.pone.0069450
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
9
découvertes
➜
Chirurgie
Les gestes du futur
Le laboratoire d’excellence CAMI vient tout juste
de fêter son premier anniversaire. Sa raison d’être ?
Booster les résultats de toute intervention chirurgicale
en s’appuyant sur les dernières techniques de chirurgie
assistée par ordinateur. Comment y parvenir ?
En fédérant la recherche française dans ce domaine.
Présentation du labex et visite de trois des six laboratoires
fondateurs qui conçoivent la chirurgie de demain.
©©François guénet/inserm
«D
Philippe Cinquin,
directeur du
TIMC-IMAG et
Jocelyne Troccaz,
responsable de
l'équipe GMCAO
☛TIMC-Imag ☛
: UMR 5525 CNRS/
Université Grenoble 1, Techniques de
l’ingénierie médicale et de la complexité Informatique, mathématiques
et applications, Grenoble
☛Latim ☛
: unité 1101 Inserm/Université
de Bretagne occidentale – Telecom
Bretagne, Laboratoire de traitement
de l’information médicale, Brest
☛LTSI ☛ : unité 1099 Inserm/Université
Rennes 1, Laboratoire de traitement
du signal et de l’image, Rennes
10 ●
e quel ­service le neurochirurgie stéréotaxique, qui permet d’améliorer
patient va-t-il le guidage des instruments, à la fin des années 1980.
bénéficier ? » La réunion des six laboratoires a pour objectif de faciliter
C’est la ­question cen- les projets collaboratifs, même si « nous nous connaistrale que se posent sions tous, et qu’il existait déjà des projets bilatéraux,
les acteurs du labo- voire trilatéraux entre nous », soulignent Éric Stindel et
ratoire d’excellence Lotfi Senhadji, directeurs du Latim *, à Brest et du
(labex) CAMI, pour LTSI * à Rennes. « Par exemple, pour la mise au point
­C omputer ­a ssisted du système de navigation endovasculaire d’instruments
­medical ­intervention, traduction anglaise de l­ ’expression flexibles, l’aspect “ localisation magnétique ” avait été confié
« Gestes médico-chirurgicaux assistés par ordinateur à Grenoble tandis que nous nous occupions du guidage
(GMCAO) ». C’est en septembre 2012 que le coup par l’image, » explique Pascal Haigron, co-­responsable,
d’envoi de ce laboratoire virtuel a été lancé. Virtuel, car avec le radiothérapeute Renaud de Crevoisier, de l’équipe
il s’agit en réalité de la fédération, dans
« Images et modèles pour la planifiun cadre structurant, de six laboratoires,
cation et l’assistance chirurgicale et
“ Nous travaillons
dont deux de l’Inserm et quatre du CNRS.
thérapeutique » du LTSI, impliquée
L’objectif ? Unir leurs compétences et leurs en coordination étroite dans CAMI.
expériences. Avec une idée commune, avec les chirurgiens „
Une collaboration, aussi et surtout,
celle que les GMCAO n’ont pas encore dé­
s’est établie entre les concepteurs
ve­loppé tout leur potentiel, et que les malades et la santé et les utilisateurs. « Il ne s’agit pas de simples échanges
publique pourront tout autant bénéficier de leur trans- entre les chirurgiens et les chercheurs : certains chirurfert en pratique clinique. « Les laboratoires fondateurs giens sont membres à part entière du laboratoire », relève
du labex sont ceux qui ont déjà transféré d’une ­manière Lotfi Senhadji. Pour ces équipes, hors de question de
significative à la clinique leurs résultats de recherche, en concevoir et réaliser un beau gadget et de se débrouiller
particulier grâce à des start-up ou des contrats avec des pour qu’il rentre dans la salle d’opération. « Les chirurindustriels », précise Philippe Cinquin, directeur du giens viennent nous voir pour expliquer le problème qu’ils
laboratoire TIMC-IMAG * de Grenoble et porteur ­rencontrent, nous allons au bloc avec eux et, après des
de CAMI. Les GMCAO avaient été mis en œuvre à discussions approfondies, nous travaillons en coordina
Grenoble, notamment avec la conception d’un robot de tion étroite », insiste Philippe Cinquin.
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
découvertes
Sonia-Yuki Selmi,
ingénieure
de recherche,
finalise BiopSym,
le simulateur de
biopsie de prostate
sous échographie, qui permet aux
jeunes urologues
de s’entraîner à cet
acte chirurgical.
À partir de données
acquises sur de
vrais patients,
les chercheurs
ont mis au point
Céline Fouard,
responsable du
projet Robacus,
manipule le
robot d’aide à
la ponction de
tissus ou liquides
biologiques sous
scanner X ou IRM.
Celui-ci permet
de positionner
très précisément
l’aiguille à insérer
grâce aux images
fournies en temps
réel. L’originalité
de l’engin ? Elle
est multiple. Le
robot est capable
de mettre en
correspondance
son référentiel et
celui du patient,
sur lequel il est
©©reportage photo : François guénet/inserm

Au pied des Alpes, au TIMC-IMAG
cet environnement
de réalité virtuelle :
grâce à un système
de retour de force,
l’étudiant se trouve
placé en conditions
réelles quand il
manipule la sonde
échographique
virtuelle (en jaune
sur la photo),
sonde normalement
introduite dans
le rectum.
Le prototype sera
bientôt achevé.
••
••
Sandrine Voros, chercheuse Inserm en
imagerie médicale et Anthony Agustinos,
doctorant au TIMC-IMAG, manipulent ViKY®,
un robot porte-endoscope. Équipé d’un
système de commande par la voix et une
pédale, il libère les mains du chirurgien
pendant l’exploration abdominale.
De plus, le robot réagit de lui-même aux
images transmises et peut se déplacer de
façon autonome. ViKY® est commercialisé
par Endocontrol, une société issue d’un
transfert technologique du TIMC-IMAG.


M E d e c i n e d e d emai n
➜
posé directement.
Pour ne pas gêner
le fonctionnement
de l’appareil à
IRM, Robacus ne
contient pas de
pièces métalliques,
mais du plastique
et du kevlar, et
fonctionne avec
un moteur piézoélectrique.
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
11
découvertes
➜

©©reportage photo : François guénet/inserm
Aux portes de la Bretagne, au LTSI
Aurélien Duménil,
doctorant, développe des
améliorations pour le
programme d’assistance
peropératoire Angiovision
en collaboration avec la
société Therenva.
Sur l’écran de gauche :
une image en 3D
de l’aorte abdominale d’un
patient souffrant d’anévrisme.
Les données ont été acquises
avant l’opération.
Un logiciel permet de simuler
les déformations que subira
l’artère lors du passage
des instruments pendant
l’intervention. Cette image
est alors superposée, écran
de droite, sur l’image 2D
obtenue pendant l’opération :
elle permet d’assister
le chirurgien et l’aide à placer
l’endoprothèse correctement.
L e s e nj e u x d e « voir au-delà du visible », et c’est le deuxième enjeu
CAMI ? On en compte du labex. La machine permet en effet d’obtenir, en
cinq. En premier lieu : 18 secondes, une radiographie complète en 3D d’un
permettre au chirurgien patient par balayage de rayons X à basse dose. Et ce,
d’être mieux formé. Cela qu’il soit assis ou debout. Un « détail » d’importance
passe, par exemple, par quand il s’agit de concevoir des prothèses de hanches
l’élaboration de simula- qui doivent s’adapter à toutes les positions. Enfin, lors
teurs de gestes chirur- de l’opération, le chirurgien peut apprécier de bénéfigicaux. Comme celui cier d’une assistance dans la prise de décisions vitales,
développé au laboratoire le troisième enjeu. C’est ce que propose le robot ViKY®
grenoblois pour effectuer - conçu à TIMC-IMAG et commercialisé par une
une biopsie de la prosjeune pousse, ­Endocontrol
tate. « En pratique, le “ Le service
- qui offre une « troisième
chirurgien introduit médical rendu est
main » lors d’une exploration
une sonde échograde l’abdomen.
un élément décisif endoscopique
Lotfi Senhadji,
phique dans le rectum, puis il se représente dans sa
Isir * collabore également
directeur du LTSI
tête ce qu’il connaît de l’anatomie du patient pour pour convaincre
avec Endocontrol pour la
et Pascal Haigron,
les
décideurs
„
guider
ses
gestes.
Une
tumeur
possible,
repérée
par
conception de JAiMY®, un
co-responsable de
IRM avant l’examen, en 3D, n’est plus aussi évidente
autre instrument qui rend sa
l'équipe IMPACT
à retrouver avec des images échographiques en 2D. Il est dextérité au chirurgien de façon intuitive. Quant à
donc nécessaire que les étudiants s’entraînent », explique ­Robacus, développé en partenariat entre TIMC-IMAG
Jocelyne Troccaz, responsable de l’équipe GMCAO, et Lirmm *, qui aide à positionner une aiguille de
impliquée dans CAMI. Le système d’imagerie EOS biopsie, il permet au radiologue interventionnel d’être
Imaging, déjà utilisé au CHU de Brest, partenaire et plus précis, illustrant le quatrième enjeu : accéder à une
hébergeur du Latim, montre qu’il est aussi possible de dextérité augmentée, thème également au centre des

12 ●
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
découvertes
CAMI Carte d’identité
Naissance : septembre 2012
Financement : 7,5 millions
d’euros
Durée : 8 ans (renouvelable)
Personnels : 141
Villes : 6
Brest, Grenoble, Montpellier,
Paris, Rennes et Strasbourg
Laboratoires : 6
ICube, Isir, Latim, Lirmm, LTSI,
TIMC-Imag
8
••
••

Duc Long Hung NGuyen,
doctorant, s’intéresse à
l’insertion d’un cathéter
dans une structure
« fantôme » représentant
l’aorte abdominale (en
blanc, sous plexiglas).
Son objectif ? Atteindre
l’emplacement d’un
anévrisme. Il visualise sur
un écran la progression de
l’instrument - repéré par
localisation magnétique dans une représentation
de l’aorte d’un patient
acquise grâce à un scanner
à rayons X. L’intérêt en
pratique ? S’affranchir de
marqueurs extérieurs au
patient et privilégier les
informations sur sa structure
interne. Une technique
qui permet également de
réduire l’utilisation
de produits de contraste
lors de l’intervention.
cami-labex.fr
☛Isir ☛ : UMR 7222 CRNS/Université Pierre-et-Marie-Curie,
Institut des systèmes intelligents et de robotique, Paris
☛Lirmm ☛
: UMR 5506 CNRS/Université Montpellier 2, Laboratoire
d’informatique, de robotique et de microélectronique de Montpellier
☛ICube ☛
: UMR 7357 CNRS/Université de Strasbourg –
Insa Strasbourg – École nationale du génie de l’eau et
de l’environnement de Strasbourg, Laboratoire des sciences
de l’ingénieur, de l’informatique et de l’imagerie
©©reportage photo : François guénet/inserm
À la pointe de la Bretagne, au Latim
Éric Stindel,
directeur du Latim

activités d’ICube *
et d’Isir.
Le dernier défi n’est
pas le moindre, en
effet, tous les participants de CAMI ont à
cœur d’être capables
de mesurer le service médical rendu. « C’est un élément
décisif pour convaincre les décideurs que la technique
peut être diffusée en pratique courante. » Parmi les
­éléments à évaluer : le temps de l’intervention. « Mais
sa diminution n’est pas forcément le critère décisif,
pointe Éric Stindel. Il se peut que l’utilisation d’une
technologie d’assistance augmente la durée de l’opération. Si c’est au bénéfice d’une chirurgie moins invasive,
entraînant moins de séquelle, c’est positif. »
Les six laboratoires fondateurs de CAMI sont tous
étroitement associés à des équipes cliniques et à
des industriels, et les solutions conçues ont déjà
bénéficié à des dizaines de milliers de patients. Forts
de leur complémentarité disciplinaire - biologie,
sciences de l’ingénieur, informatique, traitement de
l’image… - ces chercheurs n’ont qu’une motivation :
Julie Coquart
l’intérêt du p­ atient. n Thomas Wentz, post-doctorant, et
Julien Bert, ingénieur de recherche,
font la démonstration de la hauterésolution d’une caméra à infrarouge
destinée à la radiothérapie. Pour cibler
une tumeur au niveau de la poitrine,
il est nécessaire que le collimateur
qui délivre les rayons suive les
mouvements respiratoires.
C’est là qu’intervient la caméra
« temps de vol » : grâce aux faisceaux
infrarouges qui sont envoyés et
réfléchis sur la surface du corps,
elle peut suivre en temps réel les
mouvements. Une base de données
d’images a auparavant permis
de corréler les déplacements en
profondeur à ceux observés en surface.
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
M E d e c i n e d e d emai n
➜
●
13
Têtes chercheuses • regards sur le monde • Cliniquement vôtre • Grand Angle • Médecine générale • Entreprendre • Opinions • Stratégies • Bloc-Notes
• à la une • découvertes ➜
Alexandra Henrion Caude
Une Fellow à la française
©©sandor welsh
Grâce à un parcours diversifié qui oscille entre travaux pointus en génétique
et valorisation technologique, Alexandra Henrion Caude* a décroché cette année
le titre prestigieux de Eisenhower Fellow. Avec à la clé, un séjour très particulier
aux États-Unis pour favoriser des rencontres et les échanges dans le pays.
Récit d’un marathon culturel et humain de l’autre côté de l’Atlantique…
Remise du
diplôme par Colin
Powell, président
de la Fondation
E
lle vient de terminer un périple de 17 500 kilomètres
aux États-Unis. Elle a fait escale dans une quinzaine de
villes et a rencontré 70 personnalités influentes. Qui ?
Alexandra Henrion Caude *, généticienne et spécialiste
des microARNs (L). Pourquoi ? Parce qu’elle a été l’un
des 22 lauréats 2013 – la seule Française - du prestigieux
­Eisenhower Fellowship (voir encadré) qui s­ électionne
chaque année des personnalités motivées, à fort potentiel
afin de leur permettre de soutenir un projet personnel et
de créer un réseau de relations internationales.
À travers ce programme, la chercheuse souhaitait
identifier des sources innovantes de financement de
la recherche, y compris dans un contexte de restriction. Pourquoi ce thème ? « Je préfère agir pour trouver
une solution plutôt que d’attendre d’être en difficulté.
Mais pour y répondre, il est indispensable de cerner les
liens, actuels et futurs, qui unissent science et société. »
Plus jeune, ses lectures des biographies d’Henri Pasteur
* Voir S&S n°4, Entreprendre
« MicroARNs – Des régulateurs
pleins d’avenir », p. 42
☛Alexandra
☛
Henrion Caude : unité 781
Inserm – Université Paris-Descartes,
Génétique et épigénétique des maladies
métaboliques, neurosensorielles et du
développement
☛Alec
☛ Jeffreys : Professeur de génétique
à l’université de Leicester en
­Grande-Bretagne (département Génétique)
☛Axel
☛ Kahn : Médecin généticien, directeur
de recherche Inserm, ex-directeur de
l’université Paris-Descartes (2008-2011)
••
••
dates-cles
1969 Naissance à Warwick (G.-B.)
1991 Programme Erasmus à Leicester
1997 Doctorat en génétique
à l’université Paris VII –
Prix de la Fondation Nestlé
1998 Post-doctorat à Harvard Medical
School à Boston
1999 Chargée de recherche Inserm,
au Children’s Hospital de Los Angeles
2002 Étude nationale sur
l’identification des polymorphismes de
gènes associés à la mucoviscidose
2012 Chef d’équipe à l’unité
Inserm 781, dirigée par Arnold Munnich
– Découverte de l’implication d’ARN non
codants dans des maladies génétiques
2013 Prix Eisenhower Fellowship
©©François guénet/inserm
14 ●
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
et d’Andy Warhol la convainquent que toute discipline
peut être réinventée. Chacun a, en effet, apporté un
éclairage qui a modifié son domaine. Elle poursuit ce
questionnement avec Alec Jeffreys *, le directeur de
son programme Erasmus à Leicester, et Axel Kahn *,
son directeur de thèse, qui l'ont « initiée à la pluralité des
voies qui lient notre science à la société, l’un, par sa découverte de l’empreinte génétique à partir d’une recherche
fondamentale, l’autre, par une préoccupation constante
de communication et d’éthique de nos recherches. »
Au-delà de ces rencontres déterminantes, la sélection
d’Alexandra Henrion Caude tient essentiellement à
la diversité thématique
et géographique de son
“ Je préfère
­p arcours. Après avoir
agir plutôt que
o btenu son doctorat
­
d’attendre d’être
de génétique en 1997 à
en difficulté „
l’université Paris VII, la
têtes chercheuses
➜
La Fondation Eisenhower Fellowship
©©François guénet/inserm
chercheuse opte pour une ­logique moléculaire pour
conduire sa ­carrière. Ainsi, elle s’éloigne du gène, dont
elle étudiait l­’allumage dans le foie en réponse au sucre,
pour s’intéresser à la signalisation de la transcription (L)
dans le cerveau en 1998 à la Harvard Medical School à
Boston. L’année s­ uivante, elle choisit d’appliquer ses
connaissances sur un autre organe, le poumon, au
Children’s Hospital de Los ­Angeles. En 2000, retour en
France où elle participe à la mise en œuvre d’un réseau
de recherche clinique sur les gènes modificateurs de la
mucoviscidose en créant la première unité mixte I­ nserm
(E213 devenue l’unité 719) à l’hôpital Trousseau, à Paris,
avec Annick Clément. Intriguée par le potentiel nouveau et prometteur des ARN non codants (L), elle
rejoint en 2007 l’unité Inserm 781 à l’hôpital Necker-­
Enfants ­malades, à Paris, et travaille en collaboration avec
­l’Institut I­ magine, un é­ tablissement de pointe en matière
de ­recherche ­médicale sur les ­maladies génétiques.
En 2012, elle devient chef d’équipe et démontre l’implication de ce type d’ARN dans des maladies génétiques,
avec, à la clé, trois dépôts de ­brevet avec Inserm Transfert.
La chercheuse dénote aussi par ses ­engagements
­personnels. Elle propose notamment une réflexion sur le
problème de la recherche sur l’embryon humain à travers
le site Internet Science en
conscience et des articles
dans la presse générale.
Autant d’éléments qui l’ont
distinguée lors des candidatures pour devenir une
Fellow.
Un titre qui l’a conduite à
parcourir les États-Unis
avec des étapes qui l’ont fortement marquée, comme la
­clinique de Cleveland. L’établissement allie une r­ echerche
de pointe à un véritable souci d’une prise en charge
plus globale des patients, notamment via l’art. Ainsi, ses
­couloirs font parfois penser à une salle d­ ’exposition ! Par
la suite, la chercheuse a fait une rencontre déterminante
avec Phillip Sharp. Prix Nobel de médecine, spécialiste de
l’ARN non codant, c’est aussi le père de la première biotech
financièrement indépendante au monde, B
­ iogen, productrice de protéines comme l’interféron en grande quantité.
Chercheurs, institutions de recherche, sociétés de capitalrisque, équipes de direction, marchés financiers, toutes
ces interactions permettent aux États-Unis l’émergence
d’un écosystème favorable aux biotechs, ces entreprises qui
exploitent la recherche à un niveau industriel. Enfin, à New
York, son échange avec Jonathan Cole, l’ancien recteur de
l’Université de Columbia lui « a appris qu’il suffit juste d’un
ou deux brevets pour faire l’histoire d’une université. »
En 1953, un groupe d’hommes d’affaires de Pennsylvanie décide
de créer un programme d’échanges entre les leaders du monde
entier pour l’anniversaire du président américain : ce fut le début
de la Eisenhower Fellowship, aujourd’hui réseau collaboratif de
2 000 Fellows dont l’ambition est de « rendre le monde meilleur ».
Durant sept semaines, des personnalités issues de tous les domaines
se rassemblent aux États-Unis où tout leur est offert. On leur remet
également la clé de la maison mère, très symbolique. Les Fellows
apprennent à se connaître et réfléchissent à diverses notions autour
du leadership, comme la manière de mettre en œuvre la vision
de chacun. Puis, ils se séparent pour
cinq semaines d’itinérance et de rencontres
www.efworld.org
à travers le pays autour de leur projet.
8
En l’occurrence, deux, dont l’invention par Gordon
Gould du laser, qui la fait prospérer depuis des années.
Tous ces exemples sont des modèles de réussite qui ont
permis à la chercheuse de dégager des solutions pour
financer la recherche. « Ce que j’ai appris là-bas, c’est la
façon d’associer les forces entre elles, plutôt que de privilégier la course à la technologie, par exemple, d’allier des
domaines tels que mécénat, patrimoine culturel et science
MicroARNs
pour mieux innover. » Autrement dit, en favorisant la
créativité par une interdisciplinarité, impliquant les Variété d’ARN non codant
acteurs de la société, au-delà
des scientifiques, il devient
“ J’ai appris
Transcription
possible d’ouvrir des voies de
Étape de la synthèse des
là-bas
recherche moins coûteuses.
qui produit un
à associer
Au terme de leur « tournée », protéines,
ARN à partir de l’ADN.
les Fellows 2013 se sont tous
les forces
­retrouvés une dernière semaine
entre elles „
pour faire le bilan et prévoir la
ARN non codant
suite. L’occasion de recevoir du ARN qui ne sera pas
président de la Fondation, Colin Powell, un diplôme et traduit en protéine. Il
un insigne. « L’aventure a une fin mais on est Fellow à vie ! est impliqué dans la
de l’expression
C’est pour cela que j’ai toujours la clef de la maison ; c’est une régulation
de gènes et dans des
reconnaissance et l’assurance d’un réseau mondial unique processus biologiques.
de 2 000 Fellows prêts à vous aider. »
Alexandra Henrion Caude a aujourd’hui repris sa blouse
Symposium
de chercheur à l’Institut Imagine et elle implique déjà
des frontières
de nouveaux acteurs dans ces travaux, comme les assomoléculaires
ciations de patients. « Enrichie par ce voyage et toutes Groupe de réflexion
ces rencontres, je souhaite être un émissaire actif de la où des scientifiques
recherche que nous faisons », conclut-elle. Invitée à reconnus issus de
différentes disciplines se
Séoul au prestigieux Symposium des frontières molé- réunissent pour discuter
culaires (L), elle exposera ses idées sur les orientations et analyser les progrès
de la science de demain en octobre. Le tour du monde scientifiques actuels.
continue donc pour Alexandra Henrion
www.inserm.fr
Caude, avec toujours cet objectif en tête :
www.institutimagine.org
améliorer et faire évoluer son domaine de
www.science-en-conscience.fr
recherche. n Fanny Pijaudier-Cabot
L
L
L
L
8
EN BREF
● Nicolas Manel * a reçu le prix
Acteria, décerné pour la première
fois par l’European Federation
of Immunological Societies.
Il récompense ses recherches sur
l’immunité innée chez l’homme et
ses interactions avec l’immunité
adaptative.
☛Nicolas
☛
Manel : unité 932 Inserm/Institut Curie –
Université Paris-Descartes, Immunité et cancer
● L’European Network to cure SLA
a récompensé Luc Dupuis * du
prix « jeune chercheur » pour ses
travaux sur la sclérose latérale
amyotrophique. Il est le premier
à avoir souligné le rôle central
d’anomalies du métabolisme dans
cette maladie.
☛Luc
☛ Dupuis : unité 1118 Inserm – Université de Strasbourg,
Mécanismes centraux et périphériques de la neurodégénérescence
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
15
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Allemagne-canada
Le cerveau humain en 3D
C’est une première mondiale : un cerveau humain
a été reconstitué en 3D ! Une équipe germanocanadienne, menée par Katrin Amunts du Centre
de recherche de Jülich en Allemagne, a découpé le
cerveau d’une femme de 65 ans en 7 404 tranches de
20 microns chacune et les a numérisées pour reconstituer
Big brain. Ce modèle, mis à la disposition de la communauté
scientifique, servira de cerveau de référence en anatomie.
Cerveau vu
en 3D
K. Amunts et al. Science, 21 juin 2013 ; 340 (6139) : 1472-5
AUSTRALIE
● Cancer du sein :
le gène de l’espoir
Près de 70 % des cancers du
sein présentent initialement
une croissance dépendante
des œstrogènes (L). Malgré
l'efficacité des anti-œstrogènes,
après quelques années,
certaines patientes développent
des métastases récidivantes
qui résistent aux traitements
hormonaux. Andrew Stone et ses
collaborateurs du Garvan Institute
en Australie ont démontré que
cette résistance s’accompagne
d’une perte de l’expression du gène
bcl-2. Ce facteur anti-apoptotique
permet normalement la survie
des cellules. Son extinction, par
hyperméthylation (L) de l’ADN,
rend donc les tumeurs sensibles
à la chimiothérapie. Autre bonne
nouvelle, l’hyperméthylation de
bcl-2 pourrait servir de
biomarqueur et permettre
de modifier la stratégie
thérapeutique au moment propice.
LŒstrogène
Hormone responsable du
développement et du maintien
des caractères sexuels féminins
LHyperméthylation
Augmentation du nombre
de groupements méthyle
sur un gène
LTissu adipeux brun
Ensemble de cellules
graisseuses dont la lyse
produit de l’énergie sous
forme de chaleur.
LAthérome
Épaississement progressif de
la paroi des artères par dépôt
de plaques de graisse
••
••
etats-unis
•
L’épigénétique dynamise
le cerveau
Une explication scientifique aux changements d’attitude
qui surviennent à l’adolescence serait possible ! L’équipe de
Richard Lister, du Salk Institute de La Jolla, vient de mettre
en évidence que le cortex préfrontal, au rôle essentiel dans
nos comportements et nos apprentissages, subit de profonds
changements jusqu’à la fin de l’adolescence. Tout au long du
développement, une reconfiguration des méthylations de l’ADN
- un mécanisme épigénétique - a lieu, modifiant l­’expression
des gènes et permettant la maturation du cerveau. Un nouvel
éclairage sur la plasticité cérébrale en jeu lors des apprentissages ! Les chercheurs souhaitent maintenant évaluer si des
altérations de ce puissant programme de contrôle, après la
naissance, pourraient être associées à des troubles psychiatriques, comme la schizophrénie ou l’autisme.
R. Lister et al. Science, 4 juillet 2013 (en ligne) doi : 10.1126/science.1237905
royaume-Uni
•
A. Stone et al. Mol Cancer, 16 juillet 2013 (en ligne)
doi : 10.1158/1535-7163.MCT-13-0012
©©Usha Chakravarthy
SuÈDE
● Maladies cardiovasculaires :
le froid augmente les risques….
Et l’équipe de Mei Dong du
Karolinska Institutet en Suède vient
de le démontrer. Chez les souris,
l’exposition au froid entraîne
la conversion du tissu adipeux
blanc en tissu adipeux brun (L).
L’activation de ce dernier, à l’origine
de la thermogenèse, entraîne la
formation d’athérome (L) qui finit
par obstruer les artères. Chez
l’homme adulte, la présence du
tissu adipeux brun n’a été mise
en évidence qu’en 2009. Si le
mécanisme se révèle être le même
que chez la souris, cette découverte
permettra de développer de
nouvelles approches pour la
prévention et le traitement des
maladies cardiovasculaires.
Un traitement efficace et
bon marché pour la DMLA
La dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA)
est la première cause de cécité après 50 ans. La
forme dite humide peut être bien traitée par des
anti-angio­
géniques qui bloquent l’apparition des
vaisseaux sanguins néfastes. L’un deux, le ranibizumab, est couramment utilisé mais coûte très cher.
L’équipe de Usha Chakravarthy, de l’Institut des
sciences cliniques de Belfast, a mené une étude
randomisée sur 610 patients britanniques pendant
Prolifération angiomateuse
deux ans pour comparer son efficacité à celle d’une
dans une rétine de malade
molécule dix fois moins
atteint de DMLA
chère : le bevacizumab, un
anti-cancéreux. Les r­ ésultats montrent que les deux molécules
NHS
ont la même action, des effets secondaires similaires et qu’un Le National Health
traitement régulier est préférable à des injections ponctuelles. Service est le système
L’utilisation du bevacizumab ferait économiser 84,5 millions de de santé publique
du Royaume-Uni.
livres (98 millions d’euros) par an au NHS (L).
L
U. Chakravarthy et al. The Lancet, 19 juillet 2013 (en ligne)
doi : 10.1016/S0140-6736(13)61501-9
M. Dong et al. Cell Metab, 21 juillet 2013 ; 18(1) : 118-29
16 ●
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
Rubrique réalisée par Natacha Bitton
Mohlberg H, Dickscheid T, Rousseau ME,
et al/ Science 2013; 340(6139):1472-5
Research Centre Juelich
©©Amunts, Zilles, Evans et al./
Le microtome
découpe le cerveau
en tranches
fines.
©©Amunts K, Lepage C, Borgeat L,
•
regards sur le monde
➜
••••
ETATS-UNIS
Cancer
Le papillomavirus
sous contrôle
Les infections par les papillomavirus
humains (HPV) de type 16 et 18 sont
associées à l’apparition du cancer du col de
l’utérus. Dès 2006, à l’instar de la France,
les autorités sanitaires américaines ont
Un geste qui fait diminuer de moitié
donc recommandé aux jeunes femmes la
la contamination par les HPV.
vaccination ciblée contre ces deux génotypes
de HPV. Elizabeth Unger et les chercheurs du Centre de prévention et de contrôle
des maladies d’Atlanta viennent de démontrer l’efficacité de cette prophylaxie. Ils ont
analysé les frottis cervico-vaginaux de plus de 8 000 femmes âgées de 14 à 59 ans,
collectés pour moitié entre 2003 et 2006, et pour l’autre après 2006. Résultat :
entre ces deux périodes, la contamination par les HPV a chuté de moitié dans la
classe d’âge des 14-19 ans, celle justement qui a pu bénéficier de la vaccination.
©©James Gathany/CDC
S&S : Et observe-t-on la même évolution dans la population française ?
J.-L. P. : Je n’ai pas connaissance encore
d’étude sur l’impact de la vaccination sur
l’infection à HPV ou l’apparition de lésions
précancéreuses. Quoi qu’il en soit, nous
ne devrions pas à ce jour observer d’effet
majeur en France dans la mesure où le taux
de couverture vaccinale reste très modeste.
En Franche-Comté par exemple, seulement
20 % de la population ciblée - les jeunes filles
de 14 ans - sont vaccinés.
L. E. Markowitz et al. The Journal of Infectious Diseases, 1er août 2013 ; 208 (3) : 385-93
Le point avec Jean-Luc Prétet
Maître de conférences et praticien-hospitalier en biologie cellulaire,
au Laboratoire de biologie cellulaire et moléculaire - CIC Biothérapie 506,
du CHRU de Besançon, et équipe d’accueil EA 3181 Carcinogenèse épithéliale :
facteurs prédictifs et pronostiques, de l’Université de Franche-Comté
Science&Santé : Ces travaux semblent
une preuve de l’utilité de la vaccination
contre le HPV. Qu’en pensez-vous?
Jean-Luc Prétet : Ils sont très encourageants. Remarquons toutefois qu’il ne s’agit
que de l’impact sur l’infection par les papillomavirus, qui sont des agents certes nécessaires mais pas suffisants au développement
d’une lésion précancéreuse ou d’un cancer
du col de l’utérus. Nous pouvons tout de
même penser que cela permettra de réduire,
à terme, le nombre de tumeurs.
S&S : Mais d’autres facteurs que la
vaccination - l’âge du premier rapport,
l’évolution éventuelle des pratiques...
- ne pourraient-ils pas expliquer le
résultat de cette étude ?
J.-L. P. : À priori non car les auteurs
indiquent que, globalement, les caractéristiques démographiques
S&S : Quelles retombées cette
et les comportements “ Le taux de
étude devrait-elle avoir en
sexuels des sujets étudiés couverture
termes de santé publique et de
sont identiques avant et
après la mise en place de vaccinale reste politique vaccinale dans notre
pays ?
la vaccination. modeste en
J.-L. P. : Cette étude fait écho à une
­Aucune diffé- France „
La vaccination, pour qui ?
autre, australienne, déjà publiée, qui
rence dans la
séroprévalence à l’herpès simplex a montré l’efficacité de cette vaccination sur
En France, les dernières
virus de type 2 (HSV2) dans ce le développement des condylomes externes,
recommandations officielles préconisent
la vaccination contre le papillomavirus
groupe d’âge avant et après vacci­ ces lésions génitales bénignes dues à certains
humain chez les jeunes filles de 12 ans
nation n’a été mise en évidence, virus HPV. De quoi convaincre les autoriet, en « rattrapage », jusqu’à 20 ans pour
ce qui dénote que l’exposition aux tés sanitaires françaises qu’une politique
celles n’ayant pas eu de rapports sexuels,
infections sexuellement transmis- vaccinale bien menée permet de réduire
ou au plus tard dans l’année suivant leur
sibles est similaire. Il s’agit donc l’infection par les HPV et donc très vraisempremier rapport. La vaccination nécessite
bien d’une protection spécifique blablement de réduire l’incidence des lésions
trois injections successives (0, 2 et 6 mois)
contre les infections à HPV qui est qui y sont associées. n
pour une protection optimale.
conférée par la vaccination.
Propos recueillis par Hélène Perrin
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
17
©©François guénet/inserm
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Inegalites sociales de sante
Peut-on agir
sur la nutrition ?
Le 27 juin 2013, les scientifiques de l’expertise
collective de l’Inserm « Inégalités sociales de santé
et nutrition », commanditée par la Direction générale
de la santé, révélaient une partie des résultats de leurs
travaux. Si certains constats semblent évidents, les
recommandations de politique de santé publique pour
réduire ces inégalités sont plus difficiles à formuler.
C
’est indéniable, l’espérance de vie en France
ne cesse de croître, au rythme quasi effréné
de trois mois par an. Ce qui l’est tout autant,
c’est que l’amélioration de la santé est plus importante pour les catégories sociales favorisées. « Les
inégalités sociales de santé (ISS) suivent un gradient social, quelles que soient les variables choisies
pour déterminer l’appartenance à une catégorie :
niveau d’étude, catégorie professionnelle, revenus…
Et non seulement elles ne diminuent pas, mais elles
sont aussi les plus élevées d’Europe occidentale »,
rappelle Thierry Lang *, membre du groupe
d’experts, é­ pidémiologiste à l'Inserm.
modestes, les critères sont surtout d’ordre économique.
Par ailleurs, les chercheurs ont pointé la complexité
du sujet de l’expertise, en rappelant que l’alimen­tation
Un repère identitaire
Quel rôle y joue donc la nutrition – qui regroupe ­imprègne profondément la vie d’un individu, au point
­alimentation et activité physique ? L’analyse de la de constituer une partie de son identité : le rôle social
­littérature existante a permis aux experts de faire des repas pris en commun, l’appartenance à une ­région
­ressortir quelques concepts généraux sur les liens qui détermine l’adoption d’un type de cuisine – le
entre ces ISS et la nutrition : ils confirment certaines ­régime méditerranéen n’a pas grand chose à voir avec
idées pressenties de façon empirique. En France, les celui du Nord… La nutrition n’est pas une composante
consommations alimentaires des
qu’on peut facilement isoler dans la vie
adultes qui se situent au niveau socio- “ Difficile encore
d’un individu.
économique le plus faible sont générac’est là que le bât blesse, lorsqu’il s’agit
de vérifier l’efficacité Et
lement moins favorables à la santé que
d’identifier les ­leviers sur lesquels agir
celles des personnes de plus haut niveau. des mesures prises „ et émettre des recommandations de
De même, plus un foyer dépense pour
santé publique. Les connaissances sont
son alimentation, plus celle-ci est équilibrée. Quant encore parcellaires car les ISS constituent un domaine
aux adultes de ­position socio-économique plus faible, de recherche relativement récent, comme le soulignait,
ils sont moins susceptibles de pratiquer une activité en 2000, le livre Les inégalités sociales de santé*, publié
physique de loisir. Autre constat, celui de la différen- par La ­Découverte et l’Inserm.
ciation sociale de la représentation de l’alimentation. « Surtout, rappelle Thierry Lang, il existe peu d’études
Dans les milieux favorisés, cette dernière est pensée ayant évalué l’efficacité de telle ou telle mesure de
sur le long terme et choisie en fonction d­ ’impératifs santé publique prise dans ce cadre. Sans cela, il est
diététiques. En revanche, dans les milieux plus ­difficile de vérifier le bien- fondé et les effets des actions
18 ●
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
Cliniquement vôtre
➜
Une expertise, 13 experts,
plus de 1 750 publications
« Chaque expertise commence par la définition de son périmètre
en concertation avec le commanditaire pour préciser les questions
auxquelles les experts devront répondre, rappelle MarieChristine Lecomte *, responsable du centre d’Expertise
collective de l’Inserm. Puis, un important travail de recherche
bibliographique permet de réunir les publications scientifiques sur
le sujet. Pour l’expertise sur les inégalités sociales de santé liées
à la nutrition, nous en avons identifié plus de 1 750. Le programme
scientifique de l’expertise est ensuite soumis pour validation à
l’institut thématique multi-organisme d’Aviesan concerné. Un
groupe d’experts est constitué (13 pour celle-ci) en veillant à une
approche multidisciplinaire (biologie, sociologie, économie…).
Plusieurs réunions permettent de débattre des analyses des
experts et des recommandations proposées par le groupe.»
Le centre d’Expertise collective coordonne l’ensemble de la
réalisation de la procédure
jusqu’à la publication du rapport final.
☛☛Marie-Christine Lecomte : Institut thématique Santé publique, pôle Expertise collective
8
www.inserm.fr
www.aviesan.fr
©©Illustration : icinori
qui visent l’ensemble de la population (étiquetage
­nutritionnel, politiques de taxation, régulation de
la publicité…), les évaluations restent partielles.
Celles-ci tendent néanmoins à montrer que ces
initiatives ont chacune des effets modestes, ce
qui implique de développer, de façon pérenne,
des politiques dans de multiples dimensions.
Il faut cependant prendre garde
mises en place. » Louis-Georges “ La question nutritionnelle aux p­ ossibles effets pervers. La
Soler *, économiste et respon- est multi-factorielle „
­suppression de la publicité pour un
sable de l’unité Inra Alimentation
produit, identifié comme négatif
et sciences sociales, à Ivry-surdu point de vue de la santé, peut se
Seine, souligne que « certains travaux essayent de traduire par une augmentation des ventes si les producrendre compte d’interventions effectuées auprès de teurs décident, en réaction, d’en baisser les prix. « Enfin,
populations particulières. Mais ce sont toujours des insiste Louis-Georges Soler, la question nutritionnelle
actions locales - comme dans une école au Canada ou est réellement multi-factorielle, puisque l’alimentation
dans un quartier particulier - dont le message n’est pas a un rôle important dans l’identité culturelle et sociale
robuste car toujours lié à un contexte très particulier. Il des individus. Modifier son alimentation, ou faire plus
est très difficile de généraliser les effets d’une multitude d’activité physique, implique des changements de style de
d’interventions locales. »
vie, où la santé n’est pas la seule à entrer en jeu. »
Est-ce à dire qu’on ne peut rien faire ? « Non », répondent
Des actions à évaluer
les experts. Le message est plutôt de prendre en compte
De plus, le cadre dans lequel une mesure s’est inscrite la complexité du sujet et de ne pas oublier de prévoir des
est très important, ont rappelé les experts. Pour une études d’efficacité des actions qui seront mises en œuvre.
même catégorie de population, l’accessibilité géogra- Dans un rapport paru en juin 2013, le Haut Conseil
phique aux supermarchés, un des paramètres pris en de la santé publique recommande des modifications
compte pour tester l’accès à une bonne alimentation, du système d’information sanitaire pour suivre les ISS
peut être très variable. En effet, l’étalement de deux villes et la mise en place d’une structure responsable de ce
peut être radicalement différent, comme par exemple, suivi dans l’ensemble des domaines liés à la santé, dont
­Barcelone, en Espagne, ramassée sur elle-même, et la nutrition. La balle est désormais dans le camp des
­Atlanta, aux États-Unis, très étendue. Quant aux actions politiques. n Julie Coquart
* Les inégalités
sociales de santé
A. Leclerc, D. Fassin,
H. Grandjean,
M. Kaminski, T. Lang
2000, La Découverte/
Inserm, 448 p.
☛Thierry
☛
Lang : unité 1027 Inserm –
Université Toulouse III - Paul-Sabatier,
Épidémiologie et analyses en santé
publiques : risques, maladies chroniques
et handicaps
☛Louis-Georges
☛
Soler : unité 1303
Inra, ALISS
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
19
Cliniquement vôtre
➜
Grossesse Les éthers de glycol sur la sellette
Composé stable,
résultat de la
transformation
biochimique
- le métabolisme d’une molécule initiale
Tabac et cannabis
sous les drapeaux
L’entrée dans l’armée est-elle un
facteur de risque dans la consommation de tabac ou de c­ annabis ?
« Non », répond A
­ urélie Mayet *
de l’unité Trouble du comportement alimentaire de l’adolescent,
qui a analysé les pratiques addictives de plus de 4 200 militaires de
l’armée française. La plupart des
usagers de tabac ou de ­cannabis
LPELAGIE
Perturbateurs
endocriniens : étude
longitudinale sur les
anomalies de la grossesse,
l’infertilité et l’enfance
oie de
LVsignalisation
Ensemble de mécanismes
de communication
qui régissent le
fonctionnement et
l’activité des cellules.
©©JEFF PACHOUD /AFP
☛Aurélie
☛
Mayet : unité 669 Inserm/Université Paris 11Paris Sud – Université Paris-Descartes
A. Mayet et al. Addict Behav, septembre 2013 ; 38 (9) : 2437-44
20 ●
allongement du délai
nécessaire à concevoir.
Ce métabolite,
ou son éther de
glycol « source »,
le phénoxyéthanol,
très présent dans les
produits cosmétiques,
est un suspect
plausible pour les
résultats observés.
Mais il peut être aussi
le marqueur d’autres
produits présents dans
les cosmétiques.
Le lien observé devra
être confirmé par
des études
prospectives. H. P.
☛Sylvaine
☛
Cordier : unité 1085 Inserm/
Université Antilles-Guyane/EHESS –
Université de Rennes 1, Institut de
recherche, santé, environnement et travail
R. Garlantezec et al. Environ Health
Perspect, 9 juillet 2013 (en ligne)
doi : 10.1289/ehp.1206103
LMétabolite
Addictologie
Leucémies
Une voie à bloquer
Le traitement classique des leucémies
Les cellules
tumorales
aiguës myéloïdes (LAM) s’accompagne de
(en rouge)
fréquentes rechutes. Les chercheurs du
envahissent
département d’immuno-­
hématologie de
le sang.
l’Institut Cochin développent des thérapies
­ciblées pour lutter contre l’activation anormale des voies de
signalisation (L) conférant aux cellules souches leurs capacités excessives de prolifération et de survie. Sophie Park * et
son équipe ont ainsi mené un essai clinique de phase Ib ­auprès
de 28 patients âgés de moins de 65 ans, pour étudier l’activité du RAD001, un médicament inhibiteur capable de bloquer
la voie de signalisation mTORC1, déjà utilisé contre le cancer
du sein. L’étude montre que le taux de rémission complète est
plus élevé lorsque la chimiothérapie est a
­ ssociée à RAD001.
« Le ciblage de la voie mTORC1 dans les LAM est ­possible et
peut être cliniquement intéressant », résume Sophie Park. H. P.
☛Sophie
☛
Park : unité 1016 Inserm/CNRS – Université Paris-Descartes
S. Park et al. Leukemia, juillet 2013 ; 27 (7) : 1479-86
©©BODENHAM/SPL/PHANIE
en consommaient depuis leur
adolescence, donc bien avant leur
entrée dans l’armée. Les militaires
ont, en revanche, une probabilité
d’initiation au cannabis avant le
tabac plus élevée que les civils, ce
qui pourrait traduire un goût pour
les conduites à risque plus marqué
H. P.
chez les futurs soldats. Sylvaine Cordier *
a dosé huit des
métabolites (L)
d’éthers de glycol
dans les urines de
519 femmes, en début
de grossesse, de la
cohorte PELAGIE (L),
Résultat : l’acide
phénoxyacétique était
le seul métabolite
associé avec un
Trachéotomie
Une ventilation mécanique pour bien dormir
Les patients
trachéotomisés
sont placés
sous assistance
respiratoire pendant la nuit, même s’ils
sont capables de respirer sans aide. Les
tests menés par Ferran Roche-Campo *
au sein de l’Institut Mondor de recherche
biomédicale légitiment cette pratique.
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
Chacun des 16 patients trachéotomisés
suivis a été appareillé une partie de la
nuit, et a passé le reste sans assistance.
Conclusion : la qualité du sommeil est
indépendante du mode de ventilation mais
les patients dorment plus longtemps sous
assistance respiratoire. H. P.
☛Ferran
☛
Roche-Campo : unité 955 Inserm - Université Paris-Est-Créteil-Val-de-Marne
F. Roche-Campo et al. Crit Care Med, juillet 2013 ; 41(7) : 1637- 44
©©Inserm
©©Fotolia
Des études menées
chez l’animal
suggèrent que
certains éthers de
glycol, présents
dans les encres,
cosmétiques et
produits de nettoyage,
affectent la fonction
ovarienne. Qu’en est-il
chez l’homme ? Pour
le savoir, l’équipe de
Cliniquement vôtre
➜
VIH
Des recommandations sans preuve ?
L
☛Philippe
☛
Van de Perre : unité 1058 Inserm - Université Montpellier 1,
Infection par le VIH et par agents à tropisme cutanéo-muqueux :
de la pathogenèse à la prévention
P. Van de Perre et al. BMJ, 20 juin 2013 (en ligne) doi : 10.1136/bmj.f3763
Éviter la
transmission
mère-enfant
du VIH :
quels conseils ?
©©HOANG DINH Nam /AFP
es recommandations
sanitaires f­ormulées par
les agences des Nations
unies (OMS, Unicef, Onusida) affectent ­généralement
la vie de m
­ illions de p­ ersonnes
dans le monde. Elles devraient
donc être fondées sur des
preuves scientifiques solides.
« Pourtant ce n’est pas toujours
le cas », selon P
­ hilippe Van
de Perre * et ses collègues
dans une analyse parue dans le
­British Medical Journal. ­Prenant
l’exemple de la prévention de
la transmission de la mère à
l’enfant du VIH, d­ estinée à éviter environ 400 000 nouvelles
infections pédiatriques chaque
année, les auteurs relèvent que,
dans les années 1980, les premières séries
de recommandations s’appuyaient sur les
résultats des essais c­ liniques pionniers de
l’époque. Puis, a suivi un glissement progressif vers des recommandations argumentées
par des extrapolations ou des simplifications parfois génératrices de conséquences
­néfastes sur la santé publique. Aujourd’hui,
les nouvelles recommandations de l’OMS,
qui visent à « éliminer » la transmission du
VIH de la mère à l’enfant, s’appuient sur
des principes d’équité d’accès aux soins, de
simplification d’organisation des services
de santé, des modèles mathématiques et
des avis d’experts, mais aucunement sur
les résultats de la recherche. Or, des essais
­cliniques sont en cours qui devraient bientôt
apporter des arguments formels en faveur
de certaines stratégies de prévention. Ce
déphasage entre les directives de l’OMS
et l’agenda international de la recherche
scientifique conduit à des effets pervers
potentiels alors que les services de santé des
pays à ressources limitées ont déjà du mal à
faire adopter des pratiques trop fréquemment modifiées par les recommandations
internationales « venues d’en haut ». K. P.
Transmission mère-enfant
L’administration
intraveineuse de
zidovudine est
prescrite depuis
1994 afin de limiter
la transmission du
VIH de la mère à
l’enfant au cours de
l’accouchement. Cette
perfusion ne serait
plus indispensable
selon les résultats
de l’étude menée par
Nelly Briand * et son
équipe sur la cohorte
périnatale française.
Sur les 11 338 femmes
étudiées, les résultats
ont montré que
chez celles pour
lesquelles la charge
virale est contrôlée
- 90 % des patientes –
une perfusion de
zidovudine pendant
le travail, associée
à une multithérapie
pendant la grossesse,
ne présente pas de
gain supplémentaire.
La zidovudine resterait
utile uniquement pour
les mères en échec
virologique. Mais
l’absence de perfusion
de zidovudine chez
ces femmes pourrait
toutefois être
compensée par un
traitement préventif
post-natal intensif chez
les nourrissons. K. P.
☛Nelly
☛
Briand : unité 1018 Inserm/Université
Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines Université Paris Sud 11, équipe Épidémiologie
du VIH et des IST
N. Briand et al. Clinical Infectious Diseases
Advance Access, 9 juillet 2013 (en ligne)
doi : 10.1093/cid/cit374
● Détresse respiratoire
Tous à plat ventre !
C’est une première !
Claude Guérin *, au sein
de l’unité Inserm CREATIS,
a montré que la position
ventrale allongée permet,
chez les patients atteints
d’un syndrome de détresse
respiratoire aiguë sévère, et
qui requièrent une assistance
respiratoire mécanique,
d’accroître leur pronostic
vital. Elle limiterait, en effet,
les contraintes mécaniques
imposées aux poumons
au cours de l’assistance
respiratoire et améliorerait
l’oxygénation sanguine. Les
résultats de l’étude menée
sur 466 patients répartis en
deux groupes (sur le dos/sur
le ventre) indiquent que la
mortalité à 28 et à 90 jours
est pratiquement divisée
par deux dans le groupe
« sur le ventre ».
Une étude directe vient
confirmer les conclusions
de méta-analyses menées
sur ce sujet. K. P.
☛Claude
☛
Guérin : unité 1044 Inserm/CNRS/
Université Lyon 1 Claude-Bernard - Insa de
Lyon, Centre de recherche en applications
et traitement de l’image pour la santé,
équipe Imagerie cœur-vaisseaux-poumons C. Guérin et al. N Engl J of Med,
6 juin 2013 ; 368 (23) : 2159-68
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
21
Grand Angle • Médecine générale • Entreprendre • Opinions • Stratégies • Bloc-Notes
• à la une • découvertes • Têtes chercheuses • regards sur le monde • Cliniquement vôtre ➜
essais
cliniques
Pourquoi ils sont
Installation
d’un volontaire sain
dans un appareil IRM
au centre d’investigation
clinique de Nancy
22 ●
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
Grand Angle
➜
incontournables
septembre - octobre 2012 ● N°10 ●
●
© Inserm/Patrice Latron
Chacun d’entre nous en a entendu ­parler.
Certains y voient des expériences médicales sur des cobayes humains, d’autres
un moyen de traiter des patients sans
plus aucun espoir. Or, les essais c­ liniques
sont beaucoup plus et bien mieux que
cela. Surveillés et contrôlés de près par les autorités sanitaires, ils constituent une étape essentielle entre le laboratoire et le malade. Ils permettent de valider ou invalider
une hypothèse scientifique issue de la recherche
­fondamentale. Avec pour résultat espéré la mise en place
de nouvelles stratégies thérapeutiques et de nouvelles
perspectives de recherche.
Plongée dans ce monde d’innovation et de connaissances.
23
Grand Angle
➜
É
LCellule souche
Cellule indifférenciée
qui a la capacité
de se spécialiser
via le processus de
différenciation cellulaire
et qui peut également se
maintenir par prolifération.
LEurordis
Alliance non gouvernementale pilotée par des
personnes malades, qui
regroupe 561 associations
de patients atteints
de maladies rares
dans 51 pays. * Voir S&S n°12, Têtes
chercheuses « Marina
Cavazzana-Calvo – Génie
des gènes », p. 14-15
**Voir S&S n°12, Stratégies
« Associations de malades
– Compagnons de route des
chercheurs », p. 45
☛Alain
☛
Fischer, Marina CavazzanaCalvo : unité 768 Inserm – Université
Paris-Descartes, Développement normal et
pathologique du système immunitaire, IFR
Necker-Enfants malades (IRNEM), CTB 502
(CIC-Biothérapies Necker-HEGP-Cochin)
☛☛François Faurisson : membre de la
Mission Inserm Associations, au sein du
département Information scientifique et
communication de l’Inserm
☛☛Yehezkel Ben-Ari : Fondateur et
directeur honoraire Inserm de l’Institut de
neurobiologie de la méditerranée (INMED),
unité 901 Inserm – Aix-Marseille Université
☛Éric
☛ Lemonnier : clinicien spécialiste,
CHRU de Brest
E. Lemonnier et al. Translational
Psychiatry, 11 décembre 2012 ; 2, e202
doi : 10.1038/tp.2012.124
8
24 ●
www.inserm.fr
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
©©François guénet/inserm
Le déficit immunitaire
combiné sévère lié à l’X
est une maladie due à un
défaut d’un gène porté
par le chromosome X,
qui prive l’organisme de
certains globules blancs :
les lymphocytes T et les
cellules tueuses NK.
©©AFP /François GUILLOT
LDICS-X
tape cruciale dans l’amélioration de la prise en
charge des patients, les essais cliniques, réglementairement encadrés en France par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé
(ANSM) et par les comités de protection des ­personnes
(CPP), permettent la mise au point de n
­ ouveaux
médicaments ou de traitements innovants. Un essai
a marqué les mémoires en avril 2000 : pour la toute
première fois, la thérapie génique a guéri des « enfantsbulles ». Ces résultats étaient le fruit d’un essai clinique
entrepris par une équipe de chercheurs, menée par
Alain Fischer *, immunologiste, et l­’hématologue
Marina Cavazzana-Calvo* *, coordonnatrice du
centre d’investigation clinique (CIC) en biothérapie
de ­l’hôpital NeckerEnfants malades de
Paris. Ils avaient
traité cinq enfants
souffrant d’un grave
déficit immunitaire,
le DICS-X (L), en
Les enfants
leur injectant un
souffrant de
gène « réparateur ».
déficiences
Ce traitement innoimmunitaires
vant avait nécessité
sont protégés par
le prélèvement de
des « bulles ».
cellules précurseurs
des cellules immuLes deux chercheurs
nitaires chez les les patients les plus gravement touchés et ceux qui ne
qui ont ouvert la voie
patients. En dehors pouvaient pas b­ énéficier de greffe de cellules souches. »
de la thérapie génique.
de l’organisme, un
virus porteur d’un gène capable de remplacer celui, Ce qu’ils sont…
défaillant, porté par les malades, avait infecté ces Ce succès spectaculaire n’est qu’un des aspects des essais
­cellules précurseurs. Puis, ces cellules génétiquement cliniques dont la définition est beaucoup plus large. Il
modifiées furent réintroduites dans la circulation de s’agit d’une étude scientifique réalisée sur l’être humain
l’enfant. V
­ erdict ? Après quelques mois, cette thérapie afin d’évaluer l’efficacité et la tolérance d’une nouvelle
avait remis la machinerie immunitaire en marche, méthode ou d’un traitement pour soigner ou améliorer
les stocks de lymphocytes et de
les conditions de vie des patients.
­cellules tueuses NK ­(Natural ­Killer)
champs d’action ne se limitent
“ Les essais cliniques sont Leurs
se constituèrent et les enfants
pas à la thérapie, des procédures de
purent enfin sortir de la « bulle » menés pour acquérir de
diagnostic ou de prévention sont
aussi passées au crible. Testés sur un
qui les protégeait de tout risque nouvelles connaissances „
échantillon limité de personnes, ils
d’infection. « Nos travaux ont fait
beaucoup parler d’eux car notre équipe a montré de constituent les étapes préalables à l’autorisation d’utilifaçon formelle qu’on pouvait soigner un déficit immu- sation de ces procédures à plus large
nitaire avec une telle thérapie », se souvient Marina échelle en pratique courante. « On se
­Cavazzana-Calvo. Or, à l’époque, seule une transplan­ méprend souvent sur leur but : les essais
tation de moelle ­osseuse pouvait guérir ces petits cliniques ne sont pas conçus pour offrir
malades. Mais l’opération était risquée car il fallait au un bénéfice individuel aux patients qui
préalable détruire toutes les cellules souches (L) de y participent. Ils sont avant tout menés
l’enfant pour les remplacer par celles d’un donneur dans une perspective d’évaluation, pour
compatible. Sans compter sur les chances très réduites acquérir de nouvelles connaissances.
de mettre la main sur celui-ci : un membre de la C’est pourquoi l’intérêt des partici­famille a les mêmes groupes tissulaires dans seulement pants, dans ce cadre d’expérimentation,
20 % des cas. « Plus le patient est atteint sévèrement doit être pris en compte, que ce soit en
et moins il y a de solutions possibles. Notre méthode termes de possibles bénéfices thérapeuinnovante o­ ffrait alors une autre chance pour l’enfant, tiques ou de limitations des risques »,
selon la chercheuse. Dans cet essai, nous avons inclus explique François F­ aurisson** *,
Grand Angle
➜
1947
Le code de Nuremberg
sur l’animal ou des cellules
Suite aux expérimentations menées
­humaines in vitro. En décembre
dans les camps durant la Seconde Guerre
dernier, Yehezkel B
­ en-Ari * et
mondiale, le Code de Nuremberg établit
Éric ­Lemonnier * ont publié
10 critères sur les conditions dans
lesquelles les expérimentations doivent
les résultats d’un essai clinique
être pratiquées pour être acceptables.
visant à évaluer l’intérêt d’un
diurétique dans le traitement de
l’autisme. Pendant trois mois, soixante enfants autistes,
Syndrome
dont certains souffrant du syndrome d’Asperger (L),
d’Asperger
ont reçu soit un placebo (L), soit un diurétique. Parmi
Trouble appartenant au
ceux ayant reçu le principe actif, les trois quarts ont spectre autistique qui
montré une diminution de la sévérité des troubles touche au développement
autistiques : ils participent mieux aux jeux proposés, et entraîne des difficultés
leur contact visuel et leur attention se sont améliorés. dans la communication et
Mais les résultats suggèrent aussi que ce traitement agit les interactions sociales.
différemment selon la sévérité des troubles. Il serait
Placebo
notamment plus efficace avec les enfants les moins
Médicament composé de
affectés. Afin d’en avoir le cœur net, les scientifiques substances neutres, sans
viennent de déposer une nouvelle demande d’autori- effet pharmacologique dans
sation pour réaliser un essai multicentrique au  la maladie considérée
L
ancien conseiller scientifique et médical de la fédération
européenne Eurordis (L). Ces essais sont menés soit
par l’industrie pharmaceutique et des laboratoires privés, soit par des organismes de recherche publique. En
France, nombreux sont les essais qui se déroulent au sein
de centres d’investigation clinique, structures publiques,
mises en place par l’Inserm et le ministère de la Santé,
entièrement dédiées à la recherche clinique (voir encadré).
À qui ils servent…
©©BSIP/Amelie Benoist
Sans essai clinique, pas de nouvelles méthodes de
­traitement mais pas de nouveau médicament non
plus. Car pour qu’une nouvelle molécule soit mise
sur le marché, il faut démontrer qu’elle est plus efficace que la molécule de référence couramment utilisée
pour traiter une maladie et qu’elle n’engendre pas plus
d’effets secondaires. Avant
d’être testée en e­ssais
­cliniques, la m
­ olécule est
développée lors d’expéri­
mentation ­préclinique,
Les autistes souffrant
du syndrome d'Asperger
ont le mieux bénéficié
du traitement avec
un diurétique lors
d’un essai clinique
mené par Yehezkel ­
Ben-Ari (à gauche).
Les centres
d’investigation
clinique (CIC)*
Le premier appel d’offres
pour la création de CIC a été
promulgué par Philippe Lazar,
alors directeur général de
l’Inserm, en 1992. Ce sont des
infrastructures de recherche
clinique dans lesquelles les
investigateurs, qu’ils soient
académiques ou industriels,
réalisent leurs projets de
recherche clinique et en santé.
Ces centres ont une double
tutelle : l’Inserm et la Direction
générale de l’offre de soins
(DGOS) du ministère de la
Santé. Leur particularité ?
Installés au cœur de centres
hospitaliers universitaires,
ils permettent l’accueil des
participants. Du matériel
technique d’investigation est
aussi disponible : local de
conditionnement et de stockage
des prélèvements, pièces de
travail et locaux techniques
dans une disposition adaptée
aux exigences d’une activité de
recherche clinique. La présence
de personnels soignants
et de recherche clinique
spécialement qualifiés est une
autre de leurs spécificités.
Les CIC permettent aussi de
©©Inserm/Patrice Latron
©©BSIP/Laurent
L
Exploration fonctionnelle
respiratoire pratiquée
au CIC de Nantes
former médecins, pharmaciens
et professionnels paramédicaux
à la recherche clinique et
en santé. Différents types
de CIC coexistent. Des CIC
plurithématiques s’intéressent
surtout aux études menées
sur de nouveaux médicaments
ou physiopathologiques. Les
CIC-Épidémiologie clinique
engagent des essais sur de
grandes cohortes et suivent
l’épidémiologie de certaines
maladies. Les CIC-Innovations
technologiques sont centrés
sur l’évaluation de biomatériaux
ou de dispositifs médicaux.
Les CIC-Biothérapies se
consacrent, eux, aux projets de
recherche en thérapie cellulaire
et génique, en immunothérapie
et en vaccinologie.
*Voir S&S n° 11, Stratégies « Centres
d’investigation clinique, 20 ans déjà »,
p. 42-43
8 www.inserm.fr
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
25
Grand Angle
➜
niveau e­ uropéen. Ce type d’essai,
qui se tient en même temps en différents lieux, permet d’éliminer les biais
expérimentaux liés à la géographie, au
Cellules souches
climat, à l’origine des populations étumésenchydiées... et aussi de recruter davantage
mateuses de patients. À la clé ? Une vision plus
Type de cellules capable
juste de la population pouvant être
de se différencier en de
nombreux autres types.
concernée par ce traitement, et donc
Elles constituent un tissu
l’obtention d’une autorisation de mise
de soutien chez l’embryon
sur le marché pour cette indication.
Formation d’os (en vert) et de moelle (en rouge)
mais sont présentes en très
Les essais cliniques évaluent par ­ailleurs
après implantation d’un mélange de cellules souches
faible quantité chez l’adulte.
humaines et de biomatériau (gris/blanc)
bien d’autres interventions que les médicaments. Ils testent aussi de ­nouvelles
Biomatériau
méthodes chirurgicales ou radiothérapeutiques. Besançon. Nous miniaturisons par exemple les tests de
Matériau compatible
avec l’organisme humain
Début 2013, un essai clinique en chirurgie orthopé- diagnostic afin de les rendre possibles “au lit du patient”.
ou animal, notamment
dique coordonné par l’Inserm a été autorisé. Mené dans Nous avons pour cela développé des biopuces. » Ces derd’intérêt médical
le cadre du projet Reborne (Régénération des défauts nières, de la taille d’une lame de microscope permettent
osseux utilisant de nouvelles approches d’ingénierie d’analyser le niveau d’expression de gènes particuliers
biomédicale) au CHU de Créteil et au CHRU de Tours, dans une cellule, un tissu, un organe donné. Et d’en
il s’intéresse à la réparation des os à partir de cellules déduire si tel virus, bactérie ou marqueur tumoral est
souches adultes. L’enjeu est d’ampleur puisque la moi- présent dans le prélèvement analysé. « Nous nous intétié des fractures ne cicatrisent pas seules et ont besoin ressons aussi aux technologies pour la neuropsychiatrie,
d’une reconstruction osseuse chirurgicale. En Europe, par exemple au développement de stimulateurs magnéun million de patients sont concernés. Les chercheurs tiques transcrâniens ***», continue Lionel Pazart.
***Voir S&S n°4, Cliniquement
vôtre « Stimulation
ont imaginé une nouvelle forme de chirurgie pour
cérébrale profonde », p. 18
­résoudre le problème. À ­partir d’un prélèvement de Ce qu’ils apportent à la recherche
☛Lionel
☛
Pazart : CIT 808-IT Besançon
moelle osseuse chez le patient, des cellules souches Mises au point de technologies, de nouveaux médicaments,
☛☛Jérôme Larghero : unité 940 Inserm ­mésenchymateuses (L) seront ­multipliées, puis associées de méthodes thérapeutiques innovantes pour le mieuxUniversité Paris 7 - Diderot, Département
à des granulés en c­ éramique de phosphate de calcium. Ce être du malade, les essais cliniques ont déjà quelques belles
de biothérapies cellulaires et tissulaires,
équipe Cibles moléculaires et voies de
­biomatériau (L) sera i­ mplanté au niveau de la fracture, cordes à leur arc. Mais il en est une que l’on soupçonne
signalisation intégrées des leucémies,
où il servira d’échafaudage et améliorera la prolifé­ration moins, leur place dans la ­recherche fondamentale, comme
CTB 501 (CIC-Biothérapie Saint-Louis)
☛Philippe
☛
Menasché, Michel Puceat : unité
des cellules souches. À terme, celles-ci devraient se le fait remarquer Jérôme L
­ arghero *, coordonnateur
633 Inserm/Université Évry-Val d’Essonne
d
­
ifférencier
en
cellules
osseuses
et
réparer
l’
o
s
fracturé.
du
CIC
de
biothérapies
de
l’hôpital Saint-Louis à Paris :
– Université Paris-Descartes, Thérapie
cellulaire en pathologie cardio-vasculaire
Même les nouvelles technologies sont
« Il y a un continuum entre la phase de
­passées au crible des essais cliniques.
­travail scientifique en amont et les essais
“ La recherche nourrit à ­proprement parler. La recherche les
« Nous
travaillons
sur
les
microtechno­
ansm.sante.fr
logies, décrit Lionel Pazart *, qui dirige les essais cliniques et
nourrit et inversement. » L’histoire des
www.reborne.org
le CIC en innovation technologique de inversement „
travaux qu’il mène est emblématique
de ces allers-­retours stimulants, propices à l’émergence de nouvelles connaissances. En 2000,
La biopuce : un mini labo
il a mis en place avec Philippe M
­ enasché * les premières
greffes de cellules pour traiter les insuffisances cardiaques.
1 Séparation
des cellules
5 Les brins d’ADN
À l’époque, on ne savait rien des cellules souches cardiaques
s’hybrident s’ils sont
présentes chez l’homme adulte, il fallait donc trouver une
complémentaires.
autre source pour réaliser des implantations cellulaires.
« Nous savions en revanche que les cellules des muscles
2 Extraction
de l'ADN
squelet­tiques avaient des propriétés contractiles. Celles-ci
sont certes différentes dans les cellules cardiaques, mais pourquoi ne pas les utiliser ? », relève Jérôme Larghero. À partir
des biopsies de muscles réa4 Mise en contact
6 Lecture de la
de l’ADN cible marqué
lisées chez les patients, les
biopuce par un
avec les sondes ADN scanner, sous lumière
chercheurs ont préparé des
de la biopuce
3 Marquage
ultraviolette
Jérôme Larghero dans
de l'ADN avec
greffons de cellules musune protéine
la salle de cryobiologie
fluorescente
culaires qu’ils ont injectés
où le sang de cordon
dans le myocarde, la partie ombilical, qui renferme
musculaire du cœur. « Mais
des cellules souches,
Voir S&S n°7, Grand Angle, p. 29
est stocké.
qu’on injectât un placebo,
L
L
©©infographie : philippe mouche
8
26 ●
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
©©P.Layrolle/Inserm U957

Grand Angle
➜
1964
400 millions ou 800 millions de cellules, cela n’améliorait C’est le cas de 20 des 30 projets conduits à l’hôpital
pas de façon significative la fonction c­ ardiaque, précise ­Robert-Debré, à Paris. « Depuis dix ans, par exemple, nous
le spécialiste. À ce stade, l’essai a donc été arrêté. Nous suivons une cohorte (L) d’un millier de personnes atteintes
avions deux options : stopper carrément nos recherches de drépanocytose (L). L’observation porte sur leur devenir
en la matière, ou réfléchir à d’autres solutions. » En 2006, clinique et sur l’impact des ­différentes recommandations de
les travaux sur les cellules souches embryonnaires com- prise en charge. L
­ ’objectif est de mieux connaître l’évolution
mencent cependant à faire parler d’eux. Du côté de la de ces ­patients et de s’assurer d’une prise en charge optirecherche fondamentale, un de leurs collègues, Michel male », expliquent Delphine Girard, chef de c­ linique au
Puceat *, est même parvenu à mettre au
CIC d’épidémiologie c­ linique de
point une m
­ éthode permettant de différen- “ Quelques patients
l’hôpital Robert-­Debré, et Rym
cier ces cellules vers la voie c­ ardiaque. Les ont accès à des molécules ­Boulkedid, chargée de recherche,
trois chercheurs r­ éunissent alors leurs comréférente qualité dans l’unité.
ou des méthodes
pétences et établissent un nouveau protocole.
Tous ces exemples d’essais
Autorisé en 2013, il prévoit l’implantation de nouvelles, disponibles
­cliniques académiques montrent
progéniteurs myocardiques, différenciés à des années après „
le dynamisme et la coopérapartir de cellules souches embryonnaires, qui
tion qu’ils peuvent instaurer
donneront des cellules musculaires cardiaques. Celles-ci au n
­ iveau national et l’intérêt, donc, de les mener en
seront appliquées, couplées à un biomatériau, tel un pan- France. « Ces études donnent à quelques patients un accès
sement, sur les régions où les cellules du myocarde ne se ­privilégié à des molécules ou des méthodes nouvelles très
contractent plus correctement.
prometteuses, qui ne seront disponibles sur le marché que
Les essais cliniques peuvent aussi prendre une autre forme, bien plus tard, souvent des années après », pointe Bruno
appelée non interventionnelle car elle ne modifie pas la François *, coordonnateur du CIC plurithématique
prise en charge médicale habituelle des patients. Il s’agit de Limoges. Entre le début d’un essai clinique et l’apparid’études observationnelles qui font appel à l’épidé­miologie. tion d’un médicament sur le marché, il peut s’écouler, en
effet, une dizaine d’années. Le partenariat et les travaux
collaboratifs réalisés entre les équipes de recherche et
les cliniciens permettent ainsi de faire progresser leurs
pratiques, et notamment d’améliorer la prise en charge
des patients. « Le recrutement est un point clé des essais
aujourd’hui », explique Faiez Zannad *, coordonnateur du CIC plurithématique de Nancy. « Des progrès ont
été faits, c’est toutefois encore insuffisant. Les limites ne sont
en fait pas posées par les patients, mais par les personnels et
les infrastructures. Les médecins, confrontés à la baisse des
effectifs, n’ont bien souvent plus le temps de se consacrer à
la recherche clinique, occupés qu’ils sont à réaliser des actes
de routine. Heureusement que les CIC "sanctuarisent" du
temps pour la recherche clinique ! »
©©Inserm/Patrice Latron
Ce qu’ils révèlent de la santé publique
Les domaines thérapeutiques au cœur desquels les
essais cliniques sont effectués reflètent les besoins
de santé ­publique. C’est par exemple le cas d’Ipergay,
« ­Intervention préventive de l’exposition aux risques avec
et pour les gays ». Cette étude, lancée en 2012 pour quatre
ans et soutenue par l’Agence nationale de recherches sur
le sida et les hépatites virales (ANRS), évalue l’efficacité
d’un traitement préventif contre le sida en France et au
Canada. Baptisée PreP, la « prophylaxie pré-exposition »
consiste à donner une association d’antirétroviraux (L) à
des personnes séronégatives exposées aux risques d’infection par le VIH. L’objectif ? Diminuer ces risques, via un
moyen additionnel à la palette d’outils préventifs déjà
proposés (préservatifs féminin et masculin, dépistage,
modification des comportements, etc.). Plusieurs résultats antérieurs laissent penser que la PreP pourrait être
une piste intéressante, étant donné que les antirétroviraux
sont utilisés avec succès depuis 1994 pour réduire 
La Déclaration
d’Helsinki
Ce texte,
régulièrement
actualisé, assoit les
principes éthiques
encadrant la
recherche médicale
menée sur des
êtres humains.
Il insiste
notamment sur
le protocole
expérimental,
qui doit être
approuvé par un
comité d’éthique
indépendant.
LCohorte
Ensemble d’individus
ayant vécu un même
événement au cours d’une
même période, et engagés
dans une même étude
épidémiologique
LDrépanocytose
Maladie héréditaire
caractérisée par
l’altération de
l’hémoglobine
LAntirétroviral
Classe de médicament
utilisé pour lutter contre
une catégorie particulière
de virus, les rétrovirus,
dont fait partie le VIH.
☛☛Bruno François : CIC-P 0801
Inserm/CHU de Limoges
☛☛Faiez Zannad : unité 1116 Inserm – Université
de Lorraine, Défaillance cardiovasculaire
aiguë et chronique, CIC 9501 Nancy
8
www.inserm.fr
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
27
Grand Angle
➜
En amont des essais cliniques...
La recherche fondamentale, en tout début du processus,
permet de mieux connaître une maladie : son histoire
naturelle, son fonctionnement, les cibles biologiques
sur lesquelles agir pour la traiter... La découverte d’une
molécule d’intérêt thérapeutique ouvre la voie vers le
médicament. Elle est soumise à une évaluation préclinique avec des tests sur des espèces animales, mais aussi
in vitro sur des cellules humaines en culture. Ces étapes,
indispensables, amènent à en savoir beaucoup plus sur
la ­molécule : mécanisme d’action, vitesse de diffusion,
transformation et élimination par l’organisme, estimation de la dose utile sans effet toxique chez l’homme…
Le promoteur
Laboratoire pharmaceutique, organisme de recherche,
établissement de soins ou personne physique (médecin
par exemple), à l’initiative de l’essai et responsable de
son lancement, sa gestion, de la
vérification de son financement
et de sa conformité légale.
Il confie la réalisation de
l’essai à l’investigateur.
L’investigateur
Médecin expérimenté qui dirige
et surveille la réalisation
de l’essai. Un essai
multicentrique, se déroulant
sur plusieurs sites, bénéficie
d’un investigateur par site.
L'ANSM donne
son autoristion
pour lancer
l'essai clinique
avec l'avis
favorable du CPP
Au cours d’un essai, les événements
et les effets indésirables graves sont
signalés à chaque étape par l’investigateur au promoteur, qui, lui-même,
les notifient à l’Agence nationale de
sécurité du médicament et des produits
de santé (ANSM). Le comité de protection
des personnes (CPP) de l’essai reçoit aussi
ces informations.
essais cliniques
Comment
ça marche ?
Entre dix et quinze ans ! C’est la durée nécessaire pour qu’une
molécule d’intérêt thérapeutique devienne un médicament.
Pour les dispositifs médicaux, tels que les implants cérébraux
ou les organes artificiels, le développement peut prendre
encore plus de temps... Les bonnes pratiques cliniques (BPC),
suivies et contrôlées tout au long des multiples étapes d’un essai
clinique, doivent garantir la qualité, la véracité des données
obtenues et le respect du droit des personnes y participant.
28 ●
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
Phase I
Sûreté – tolérance
Premier test chez l’homme,
sur un nombre restreint de
volontaires (entre 20 et 80) sains
ou malades. Le but ? Observer
l’évolution de la molécule ou
du produit dans l’organisme et
évaluer sa toxicité.
Grand Angle
➜
Le Comité de Protection
des Personnes
Phase IV
L’avis favorable d’un des 40 CPP français est
requis pour débuter un essai clinique.
Agréés par le ministre en
charge de la Santé, leur
composition (membres
de la société civile et
professionnels de
santé) doit garantir
CPP
leur indépendance.
ANSM
Pharmacovigilance
Après la commercialisation, surveillance
de l’utilisation du produit ou médicament
à long terme, dans les conditions
réelles. Des effets indésirables rares
ou des complications
tardives peuvent
être identifiés.
Le nouveau traitement
a démontré son efficacité
et ne présente pas
d’effet nocif grave : une
autorisation de mise sur
le marché est délivrée
Agence nationale de sécurité du
médicament et des produits de santé
Elle garantit la sécurité des médicaments et plus généralement des produits de santé à
usage humain - tout au long de leur cycle de vie,
depuis les essais initiaux jusqu’à la surveillance
après autorisation de mise sur le marché (AMM).
Phase II
Étude pilote
Objectif : déterminer la dose minimale
efficace du produit. Elle est administrée sur
des groupes de 100 à 300 volontaires malades
en vue d’identifier un bénéfice thérapeutique
et d’éventuels effets inattendus.
©©infographie : Philippe mouche
Phase III
Preuve d’efficacité
Évaluation comparative
de l’efficacité du produit, par
rapport soit à un placebo, soit à un
traitement de référence. Le nombre
de patients impliqués est important,
quelques centaines pour les cancers,
à des milliers pour des maladies
fréquentes comme l’hypertension. Étape
finale avant la mise sur le marché.

septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
29
Grand Angle
➜
L7 PCRD
e
Le 7 programme-cadre
est le programmecadre actuel de
l’Union européenne
pour la recherche
et le développement
technologique, géré par la
Commission européenne.
e
☛☛Bruno Spire : unité 921 Inserm/
IRD - Aix-Marseille Université, Sciences
économiques et sociales de la santé et
traitement de l’information médicale,
équipe Environnements, systèmes de
santé et maladies transmissibles
8
www.ipergay.fr
www.anrs.fr
©©AFP/Sergei SUPINSKY
Plus de
contaminations
au VIH chez les
gays que chez
les hétérosexuels
Ces recherches, menées
par l’équipe de Bruno
Spire * permettront
de dresser pour la première fois en France le
portrait de la population
des hommes ayant des
relations sexuelles avec des
hommes et transgenres :
profil des volontaires,
comportements sexuels
en particulier vis-à-vis du
préservatif, observance de
la prise de médicaments...
Au côté des virus, d’autres
pathogènes – l­es bactéries – constituent éga le risque de transmission du VIH de la mère à lement un enjeu de santé publique qui préoccupe les
l’enfant. Pourquoi Ipergay cible-t-il la population des médecins. Et pour intensifier la lutte contre les résistances
homosexuels ? Parce qu’elle préoccupe les chercheurs et qu’elles développent aux antibiotiques, ils peaufinent
cliniciens : en France, il y aurait près de 200 fois plus de de nouveaux projets. Lancé début 2013, dans le cadre
contaminations chez les gays que chez les hétérosexuels. de l’Innovative Medecine Initiative, un des instruments
du 7e PCRD (L), Combacte (Combatting
L’essai, qui envisage de recruter jusqu’à
1 900 personnes, est « randomisé » en “ Des recherches Bacterial Resistance in Europe) ambitionne
double-aveugle : un participant sur deux, pour mieux
de développer des essais cliniques pour
après tirage au sort, recevra le médicament connaître une
­faciliter l’enregistrement de nouveaux agents
et l’autre un placebo, sans que ni les patients
antibactériens. L’antibiothérapie est un vrai
ni les médecins ne sachent qui a reçu quoi. population
casse-tête : « Avec les bactéries, nous faisons
Tout au long de l’essai, les sciences sociales particulièrement face à des organismes vivants et ­adaptatifs»,
seront également mises à contribution. exposée „
pose Bruno François, coordonnateur de
Qui peut participer ? Des patients
sous traitement ou des personnes
non malades. Le recrutement se fait
chez le médecin, par voie d’affichage
ou par annonces, mais on peut aussi
se porter volontaire auprès des CIC
ou des sociétés pharmaceutiques.
Chaque étude possède des critères
d’inclusion, fondés sur l’âge, le sexe,
le type et le stade de la maladie,
les antécédents médicaux, les
maladies associées, qui garantissent
l’homogénéité des groupes, et donc
l’obtention de résultats fiables,
pertinents et robustes.
À quels essais ? Le site
www.notre-recherche-clinique.fr
localise les essais conduits en France,
d’après le Répertoire public des essais
cliniques de médicaments menés
par des promoteurs hospitaliers,
académiques et industriels.
Des répertoires internationaux
existent, Clinical Trials et My Clinical
30 ●
Trial Allocator. On peut
consulter aussi les
bases spécialisées
sur le cancer, via
l’Institut national
du cancer, ou sur les
maladies orphelines,
par Orphanet.
Est-on indemnisé ?
CIC de vaccinologie Cochin-Pasteur où se déroulent
L’indemnisation
des essais de phase I ou II (vaccins préventifs
des participants en
ou thérapeutiques)
compensation des
ne peut excéder 4 500 € sur douze mois
contraintes subies (prise
consécutifs. Les personnes se prêtant
du traitement, visites médicales,
à des recherches biomédicales sont
examens de suivi, hospitalisations…)
recensées dans un fichier national
est prévue par la loi : modalités et
confidentiel.
montants sont contrôlés par les
CPP. Elle n’est pas systématique
et est interdite pour les personnes
https://icrepec.ansm.sante.fr
vulnérables, comme les enfants, pour
http://clinicaltrials.gov
des questions éthiques. Participer à un
www.e-cancer.fr
essai ne peut pas devenir un « travail »,
www.orpha.net
la réglementation précise que
www.myclinicaltriallocator.com
le montant total des indemnités
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
8
©©REA /Patrick ALLARD
Essai clinique, mode d’emploi
Grand Angle
➜
1978
Le rapport Belmont
Combacte. Sans compter qu’étudier les résistances souligne Jacques ­D emotes,
Le Département de la santé, de l’éducation
­bactériennes n’est pas chose aisée. « Lorsqu’on s’intéresse de l’institut thématique Santé
et des services sociaux aux États-Unis
rédige le rapport Belmont, qui réitère
à un germe ultra-résistant par exemple, il est impossible publique, coordonnateur du
les principes éthiques et les lignes de
de recruter 1 000 patients, taille des cohortes généralement réseau Ecrin. Dans les faits,
conduite pour protéger les sujets humains
nécessaires en essai clinique. Comment s’y prend-on pour comment ça marche ? Ecrin
participant à une recherche clinique. Il fait
prouver l’efficacité d’un traitement contre une résistance s’appuie sur les réseaux présents
suite au scandale de l’essai Tuskegee, dans
qui ne touche que 10 personnes par an ? » Par ailleurs, une dans chaque pays, au sein duquel
lequel des Noirs-Américains s’étaient vu
des caractéristiques de la recherche en infectiologie est il y a un corres­pondant unique.
refuser de la pénicilline.
que les malades ne sont pas regroupés dans un service Pour faciliter le montage d’essais
dédié mais répartis dans ceux vers lesquels ils ont été multinationaux, celui-ci est
orientés (chirurgie, cardiologie, cancérologie…). « Des notamment chargé de lever les obstacles réglementaires,
réflexions sont à mener sur les protocoles. L’idée générale ­résultant d’une transposition divergente du droit eurode C
­ ombacte est de mettre au point des tests permettant péen au niveau national. Entre eux, les correspondants
de ­faciliter le diagnostic des patients, d’identifier les trai- résolvent aussi les contraintes liées aux systèmes de soin,
tements les plus adaptés et de surveiller la réponse théra- outils et infrastructures de recherche clinique, variables
peutique. En d’autres termes, de développer de nouveaux entre pays, ou encore au système de financement. D
­ epuis
standards plus efficaces en antiobiothérapie », explique-t-il. la mise en place du réseau en 2004, les ­résultats de deux
Le projet présente l’autre originaessais ont déjà été publiés et une
lité d’être financé à 50/50 par un “ Combacte permettra
vingtaine d’essais sont en cours. L’un,
partenariat public/privé. Une grande
baptisé Child Innovac, était porté par
partie de ce travail sera consacrée à de développer de nouveaux l’Inserm et concernait un essai de
la réalisation d’essais cliniques sur standards plus efficaces
phase I (voir infographie p. 2­ 8-29)
des médicaments anti-infectieux en antibiothérapie „
sur un nouveau vaccin recombien cours de développement par
nant contre la coqueluche mené
les ­sociétés pharmaceutiques impliquées. Le premier entre 2010 et 2011. Destiné aux enfants de la naissance à
d’entre eux : un antibiotique proposé par le laboratoire 6 mois, il a néanmoins été évalué chez des adultes volon­GlaxoSmithKline. « Scientifiquement, c’est intéressant. taires afin de tester sa tolérance et son efficacité. L’origiEn tant qu’académiques, nous sommes co-décisionnaires nalité ? L’essai a été mené en Suède, où la vaccination des
– établis­sement des protocoles, analyse des résultats, etc. – enfants a été interrompue dans les années 1980, disposant
sur les médicaments testés, le processus est ainsi bien plus ainsi d’une population d’adultes jeunes jamais exposés à
transparent. Après les récents scandales où des laboratoires Bordetella Pertussis, l’agent responsable de la coqueluche.
ont été montrés du doigt, c’est important », insiste Bruno Mais s­ urtout, il était proposé sous une forme intra-nasale,
François. D’un point de vue stratégique et économique, simple d’utilisation pour les tout-petits.
☛Laurent
☛
Abel : unité 980 Inserm –
c’est aussi une opportunité, Combacte permet de mettre
Université Paris-Descartes, Génétique
humaine des maladies infectieuses
en place un réseau d’expertise à travers l’Europe. Ainsi, Ils obéissent au droit
l’étude des biomarqueurs de prédisposition à l’infection Ce bouillonnement d’idées dans les essais cliniques
est partagée entre l’Inserm à Paris-Necker, avec Laurent s’exprime dans un cadre réglementaire et éthique,
www.imi.europa.eu
Abel * qui étudie l’hôte, et des équipes de Hanovre et respectueux des patients. En France, le droit des
www.ecrin.org
de Barcelone consacrées au pathogène. « Certains travaux participants et la protection des personnes 
seraient impossibles à mener sur un seul site », constate
Bruno François. « En plus d’améliorer nos capacités
d’études par la mutualisation des compétences, nous allons
éviter aussi des délocalisations de l’Europe vers l’Amérique
du Sud ou l’Asie du Sud-Est, des régions qui deviennent de
plus en plus dynamiques. »
8
Ils traversent les frontières
©©Inserm/Patrice Latron
Collaborer au niveau international, c’est aussi le credo
du réseau Ecrin (European Clinical Research Infra­
structures Network), dont l’objectif est de promouvoir
et faciliter les études cliniques multinationales à l’échelle
européenne. « Notre rôle est à la fois opérationnel – nous
sommes ­impliqués dans la conduite d’essais multinationaux – mais aussi structurant
– nous développons des outils
adaptés à l’échelle multinationale, Test de résistance
notamment pour traiter les don- des bactéries aux
nées ou pour gérer en ­commun »,
antibiotiques
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
31
Grand Angle
➜
©©Inserm/Patrice Latron
l’intelligibilité des informations écrites données
aux participants avant
leur inclusion dans une
étude. Ils épluchent les
Entretien avec
protocoles, qui décrivent
un patient
asthmatique
l’objectif, la conception, la
avant un test
méthode et l’organi­sation
respiratoire au
de la ­recherche, pour
CIC de Nantes
­s’assurer de la pertinence
de la recherche ainsi que
du caractère satisfaisant
de l’évaluation des bénéfices et des risques attendus. Ils s’assurent aussi du
­respect de la législation sur
la recherche en France.
Leur avis, enfin, est obligatoire pour démarrer
un essai. Au final, c’est
l’ANSM qui doit donner
son autorisation au lance ont été très ­clairement définis, avec la loi du ment de tout essai interventionnel. L’Agence évalue la
20 ­décembre 1988 relative à la protection des personnes sécurité et la qualité des produits utilisés au cours de la
qui se prêtent à des recherches biomédicales, dite loi recherche et vérifie par là que la sécurité des personnes
­Huriet-Sérusclat. Celle-ci a notamment instauré une est garantie. Responsable des systèmes de vigilance, dont
obligation d’information et de consentement éclairé dans la pharmacovigilance, l’ANSM doit sous 24 ou 48 heures,
le domaine des recherches réalisées sur l’être humain. Le selon les cas, être informée de tous les événements
médecin investigateur, qui réalise l’essai, doit ainsi infor- ­indésirables graves qui surviennent au cours d’un essai.
mer la personne se prêtant à la recherche
Pour sensibiliser un maxibiomédicale, patient ou volontaire sain, “ Pour bien collaborer,
mum de participants à leurs
« de façon loyale et exhaustive ». L’accent a les personnes doivent être
droits, Eurordis a développé
aussi été mis sur le caractère volontaire de
une solution : ­l’e-learning,
informées sur les aspects
la participation : toute p­ ersonne est libre
qui permet de tout ­savoir sur
de refuser ou d’accepter, de même que de cliniques et réglementaires la méthodologie, l’éthique ou
quitter l’essai à tout moment sans justifi- des recherches auxquelles
encore les statistiques liées
cation. Enfin, le consentement est donné elles participent „
aux essais cliniques. « Pour
par écrit. La loi Huriet impose é­ galement
pouvoir être actives dans leur
que toute recherche biomédicale doit comporter un collaboration avec les équipes scientifiques, les personnes
investigateur principal et un promoteur qui portent la doivent être plus armées en termes de connaissances, de
responsabilité pénale de l’étude régie par le Code de la vocabulaire, sur les aspects cliniques et réglementaires des
santé publique et dont les principes sont définis dans les recherches auxquelles eux ou leurs proches vont parti­
« bonnes pratiques cliniques ». À l’Inserm, l’activité de ciper », estime François Faurisson, qui a développé
promotion est assurée par le pôle de Recherche clinique ces tutoriels en ligne. En fin de chapitres, des quiz
de l’institut thématique Santé publique au sein d’Aviesan. ­permettent de faire le point sur ce qu’on a appris.
Sa mission est d’accompagner l’investigateur dans la mise L’Inserm a, quant à lui, mis en place en 2004 le Groupe
en conformité réglementaire de son projet en vue d’obte- de réflexion avec les associations de malades (GRAM),
nir les autorisations nécessaires auprès de l’ANSM et des « instauré dans un contexte où les associations de malades
comités de protection des personnes.
expriment de plus en plus le besoin de mieux comprendre
les recherches menées dans leur pathologie. Depuis dix
Ils sont encadrés
ans, l’information médicale a aussi pris toute sa place
Confrontés au jargon scientifique, les participants aux sur ­Internet », rappelle Bernadette Bréant, de la Mission
essais cliniques sont aidés par le travail de ces comités ­Inserm A
­ ssociations, structure de coordination opéra­répartis dans les différentes régions françaises. Ce sont des tionnelle qui s’appuie sur le GRAM. Depuis 2007, celui-ci
assemblées indépendantes des investigateurs et promo- a aussi constitué le Collège des relecteurs. Initialement
teurs, constituées à part égale de représentants du monde composé de 70 membres issus d’associations de malades,
médico-scientifique et de la société civile. Ils analysent il est consulté sur les essais menés par l’Inserm. « Le pôle
dans les moindres détails l’adéquation, l­’exhaustivité et de Recherche clinique de l’Institut nous envoie les protocoles
32 ●
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
Grand Angle
➜
2004
La loi française relative à la
le pôle de ­Recherche clinique
politique de santé publique
de l’Inserm et l’équipe investiElle transpose dans le droit français
gatrice partiront en s­ eptembre
les directives européennes émises afin
à la ­rencontre des autorités du
d’établir des règles communes dans
­Burkina Faso et des équipes
lesquelles un essai clinique doit se
dérouler. Elle renforce notamment le rôle
locales afin de vérifier les
du promoteur, la vigilance et la sécurité
­circuits logistiques de l’étude
des essais et instaure aussi la nécessité
(importation du ­vaccin, des
de l’aval d’un comité de protection des
échantillons…) et de prendre
personnes (CPP) et de l’Agence nationale
connaissance des procédures
de sécurité du médicament et des produits
réglementaires du pays.
de santé (ANSM) pour débuter un essai.
Des coopérations utiles, tant
l’actualité nous rappelle qu’en
la matière de graves abus ont parfois été commis. Une
commission d’enquête s’est ainsi ouverte outre-Rhin en
juin dernier : pendant les années 1980, des hôpitaux et des
cliniques ont expérimenté sur quelque 50 000 Allemands
de l’Est des médicaments développés en Allemagne de
Ils bénéficient aux patients
l’Ouest. Le tout à leur insu... Ce fut aussi le cas en 1996,
L’appui des deux pôles, Recherche clinique et Expertises dans l’état de Kano au Nigeria. Là, en pleine épidémie de
médicales, est aussi essentiel lorsque les essais s’étendent à méningite, le géant américain Pfizer avait testé un antid’autres pays. Des projets au montage complexe peuvent biotique sur des enfants. Onze en seraient morts, et des
voir le jour. Ainsi l’essai Bilhvax, mené au Sénégal et dont dizaines d’autres restés handicapés.
la phase III (voir infographie p. 28-29) est actuellement En matière d’essais cliniques, les bonnes nouvelles sont
en cours pour tester l’efficacité d’un vaccin thérapeutique malgré tout souvent la norme. Les délais nécessaires
chez des enfants atteints de bilharziose, infection parasi- à leur mise en place et leur tenue peuvent être certes
taire la plus répandue dans le monde. L’agent r­ esponsable, longs, et les questionnements éthiques complexes. Mais
un ver appelé schistosome ou bilharzie, peut entraîner les scientifiques sont parfois plus que r­ écompensés de
une forte anémie, des atteintes hépatiques ou rénales très leurs efforts : certains essais fonctionnent très bien, voire
sévères, des cancers du tractus uro­au-delà des résultats attendus et
génital. L’Inserm est le promoteur “ Nous travaillons avec
parfois sous-estimés dans le proto­
de cet essai, ­tandis que la société les relais locaux qui nous
cole de recherche où ils ont été
pharmaceutique E
­ urogentec pro- aident à comprendre et
définis. « Il se peut, alors, que ce ne
duit le vaccin et que l’ONG Espoir respecter les normes du pays „ soit pas très éthique de continuer :
pour la santé, ­plateforme logistique
le traitement évalué est de toute
et opérationnelle, à Saint-Louis ­(Sénégal), est l’investi­ ­évidence bien meilleur, mais les volontaires "contrôles"
gateur. « Quand les recherches se passent dans un état afri- n’en bénéficient pas », explique Faiez Zannad. C’est ce qui
cain par exemple, nous travaillons avec des relais locaux qui s’est passé avec l’essai Emphasis-HF, auquel a participé le
nous aident à comprendre et respecter les normes du pays », chercheur de Nancy. « Il s’agissait de tester une molécule,
ajoute Jean-Christophe Hébert. Autre exemple, pour la l’éplérénone, pour traiter les patients souffrant d’insuffimise en place d’une étude v­ accinale a­ nti-­paludisme, sance cardiaque. Très rapidement, ces effets bénéfiques
sont nettement apparus. Il
a fallu très vite contacter
tous les centres participant
à l’essai », décrit le spécialiste. Devant ces très bons
résultats, il a été proposé
aux patients « contrôles »,
qui ne recevaient jusquelà qu’un placebo, d’être
mis sous éplérénone F. Zannad et al. N Engl J Med.,
ou ­équivalent. Et l’essai
6 janvier 2011 ; 364 : 11-21
­clinique de se révéler dans
ce qu’il peut offrir de
www.aviesan.fr
meilleur : bénéficier
www.inserm.fr
à la science et aux
www.bilhvax.inserm.fr
n
patients.
Le GRAM accompagne les associations de malades dans leur recherche
www.eurordis.org
Alice Bomboy
d’information. (Debout, B. Bréant, 3e à gauche, et F. Faurisson, au centre)
©©Inserm/Etienne Begouen
et les notices d’informations et de consentement relatifs à
l’essai en prépa­ration. Deux relecteurs sont choisis parmi le
Collège, qui peuvent demander que ces documents soient
modifiés. Ils repèrent les passages où les données ne sont pas
claires, explicitent des termes scientifiques, v­ érifient si ce
qu’on demandera au patient est bien décrit lorsqu’on lui fera
des prises de sang ou passer un examen d’IRM par exemple.
Nos remarques sont renvoyées au pôle de Recherche c­ linique,
où elles sont prises en compte par les chefs de ­projet »,
dit-elle. L’Inserm dispose aussi depuis dix ans d’un pôle
d’Expertises médicales au sein de son département des
Affaires juridiques. « Il s’agit notamment de définir le cadre
juridique applicable aux différentes recherches menées à
l’Institut : comment informe-t-on les personnes, comment
recueille-t-on leur consentement, quelles sont les politiques
d’assurance mises en place ? », précise Jean-­Christophe
Hébert, directeur de ce département.
8
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
33
Médecine générale • Entreprendre • Opinions • Stratégies • Bloc-Notes
• à la une • découvertes • Têtes chercheuses • regards sur le monde • Cliniquement vôtre • Grand Angle ➜
••
••
Maladie renale chronique
Les patients ont la parole
Sans précédent, les premiers états généraux
français du rein qui se sont déroulés de
mars 2012 à juin 2013, avec la collaboration
d’Aviesan, ont rassemblé malades, médecins,
soignants et institutionnels. Cette démarche,
bel exemple de démocratie sanitaire, a permis
la réalisation d’une enquête sociologique
d’envergure qui met notamment en évidence
les inégalités d’accès aux traitements.
©©HPA-VOISIN/PHANIE
ilencieuse et méconnue, la
m aladie rénale chronique
­
(MRC)est dévastatrice en
­raison de ses effets tant sur la santé
que sur la vie quotidienne. « Ce qui
va, c’est que je respire, je vis. Ce qui ne va pas, c’est que Aujour­d’hui, selon le registre national du Réseau
je me trouve dans une situation de misère, à chercher à ­épidémiologie et information en néphrologie (Rein),
m’en sortir financièrement », confie un patient âgé de un peu plus de 70 000 patients seraient parvenus à ce
40 ans, greffé. Comme 8 650 autres personnes, forte- stade, dont 55 % sont dialysés et 45 % transplantés. « Ces
ment mobilisées par les a­ ssociations de malades et les ­maladies se traduisent pour ­certains par des épreuves vécues
fédérations ­hospitalières, il a répondu au questionnaire comme de véritables c­ alvaires, précise Christian ­Baudelot.
de l’enquête nationale menée par C
­ hristian Baudelot, Ces difficultés restent très i­ nsuffisamment prises en compte,
professeur émérite de sociologie à l’École normale ainsi que le coût ­social et ­humain qui leur est associé. » La
supérieure de Paris et chercheur au Centre Maurice- dialyse implique ainsi une « ­dépendance technique » à
Halbwachs (CNRS/EHESS/ENS).
la machine qui filtre le sang, durant
Avec ces milliers de témoignages, elle “ La greffe autorise un
quatre à cinq heures, plusieurs fois
pointe l’impact majeur de la maladie retour à une vraie liberté „ par semaine. « En pratique, la ­dialyse
rénale chronique sur toutes
reste très contraignante, indique
les dimensions de la vie des patients : affectives, ­Yvanie Caillé, ­présidente de l’association de malades
Les 5 stades de sévérité
familiales, professionnelles, relationnelles. Or, Renaloo et à l­’origine des états généraux.
de la maladie rénale
deux à trois millions de Français sont touchronique (MRC)
chés par la ­maladie tous stades confondus La greffe : pas pour tous
(voir schéma). D’origine multiple (géné- Une qualité de vie considérablement dégradée, mais
Nécessité d'un
MRC
tique, cardiovasculaire, diabète), la ce n’est pas tout. L’enquête sociologique interpelle aussi
traitement supplétif
terminale
maladie aboutit à la destruction des sur les fortes inégalités d’accès au traitement optimal
(dialyse
ou
reins. Conséquence : les déchets qu’est la greffe. Celle-ci améliore, en effet, l’espérance
ou greffe)
insuffisance rénale
Stade
terminale
issus de l’alimentation ou de de vie par rapport à la dialyse et autorise un « retour
l’organisme ne sont plus épu- à une vraie liberté », considère Yvanie Caillé, dialysée
MRC avec
rés et intoxi­quent le corps, puis greffée à 28 ans. Des disparités d’ordre régional déjà
baisse sévère
Stade
de la fonction rénale
ce qui peut conduire repérées par le registre Rein : la part de patients greffés
à la mort. D
­ ialyses approche par exemple les 55 % en Franche-Comté ou
MRC avec baisse modérée
en Pays-de-la-Loire, alors qu’elle tourne à peine autour
ou
transplantation
Stade
de la fonction rénale
p euvent a lors de 35 % dans le Nord-Pas-de-Calais ou en ProvenceMRC avec fonction
suppléer cette Alpes-Côte d’Azur. Une perte de chances selon l’endroit
rénale légèrement diminuée
Stade
insuffisance où l’on habite… ­Majorée par un autre facteur discriMRC avec
rénale dite minant : celui de ­l’accès à la liste nationale d’attente de
fonction rénale normale (ou augmentée)
Stade
te r m i n a l e. greffe. Pour les patients qui bénéficient d’une demande
1
2
34 ●
3
4
5
DIE
LA
MA
LA
DE
ION
UT
OL
ÉV
©©infographie : sandrine marchand
S
Le malade passe de longues
heures sous la dépendance
d’une machine.
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
médecine générale
➜
Les MRC à la loupe
D’où l’importance de développer une recherche inter­
ventionnelle qui consiste « à étudier une situation
sociale, l’expliquer pour pouvoir la modifier », souligne
Jean-Pierre Grünfeld, néphrologue et président du
conseil scientifique des états généraux du rein. Ainsi,
des outils de recherche en santé sont en construction.
La récente cohorte épidémiologique Constances, pilotée
par l’Inserm, l’université de Versailles-Saint-Quentinen-Yvelines et la Caisse nationale d’assurance maladie,
qui observe la santé de 200 000 personnes depuis 2012,
possède un volet « rénal ». Ce qui devrait permettre de
comprendre comment sont dépistés et suivis, en population générale, les patients atteints de maladie rénale.
Autre projet d’envergure : la cohorte CKD-Rein
­(Chronic Kidney Disease) vient de démarrer. Objectif :
améliorer les connaissances pour mieux prévenir et
ralentir la progression de la maladie rénale chronique.
©©RAJAU/PHANIE
Un greffon de
rein en phase de
revascularisation
Un accès inégal
à la greffe
de rein
Bretagne
11,1
Part des patients greffés
parmi ceux traités pour
une insuffisance chronique
terminale
< 25 %
25 - 40 %
Guadeloupe
57,6
Nord-Pas de Calais
17,9
Haute
Normandie
Basse
Normandie
Pays
de la Loire
Martinique
Picardie
Ile de
France
Centre
47 - 55 %
Délai médian d'attente
après inscription sur la liste
nationale pour une greffe rénale
Guyane
Française
Loraine
22,5
ChampagneArdenne
Alsace
Bourgogne
Poitou-Charentes
8,8
Limousin
Auvergne
40 - 47 %
Réunion
54
Aquitaine
Midi pyrénées
Franche
Comté
Rhône-Alpes
19,9
PACA
12,6
Languedoc
Roussillon
Corse
Le délai médian d'attente en France est de 20,7 mois
Source : Agence de la Biomédecine et Registre REIN, rapport annuel 2011
Car aujourd’hui encore, un tiers des patients est vu pour
la première fois au stade terminal, leurs reins déjà « hors
service ». ­Bénédicte Stengel *, chercheur ­Inserm
au Centre de recherche en épidémiologie et santé
des populations à Villejuif, c­ oordonne cette cohorte
multi­partenaire, avec l’Université Paris-Sud et l’appui
de l’Agence de la biomédecine. Elle estime « obtenir de
premiers résultats en 2015 ». Seront suivis 3 600 patients
soignés sur 46 sites de l’ensemble du territoire durant
cinq ans, avant et après démarrage de leur dialyse ou
greffe. « Les données obtenues et la biothèque ainsi constituée doivent apporter des réponses sur ce qui détermine
le développement de la maladie rénale, sa transition du
stade modéré, puis avancé au stade terminal, prévoit-elle.
Avec aussi une meilleure compréhension des inégalités
sociales et territoriales. » En bonus, « CKD-Rein sera
une plateforme de recherche ouverte aux informations
énédicte Stengel : unité 1018 Inserm/
accessibles sur demande », se réjouit Bénédicte Stengel. ☛☛BUniversité
Versailles–Saint-Quentin-enYvelines – Université Paris-Sud 11
Un signe p­ ositif pour l­’ensemble des parties prenantes,
qu’il s’agisse des ­patients, des ­soignants, des
www.constances.fr
chercheurs, des f­ édérations h
­ ospitalières et des
www.renaloo.com/e-g-r
institutionnels. n Nathalie Christophe
8
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
35
©©infographie : sandrine Marchand
d’inscription sur cette « liste », la durée d’attente effective varie d’environ 6 mois en Pays-de-la-Loire à 26 mois
en Haute-­Normandie et même davantage sur l’île de la
­Réunion. Ensuite, l’inscription faite, le délai médian avant
transplantation fluctue aussi considérablement - de 7 à
52 mois - en fonction de l’hôpital où elle aura lieu. Les
raisons ? Selon les conclusions des états généraux du rein,
hormis une forte prévalence de diabète ou d’obésité qui
sont des freins à la greffe, on constate une hétérogénéité
des pratiques médicales avec une capacité inégale de
prélèvement en local, une absence de recommandations
nationales sur les indications de transplantation et un
manque relatif d’expertise des professionnels de santé.
Un parcours semé d’embûches auquel s’ajoute une troisième forme de disparité : l’inégalité sociale d’accès aux
traitements. « Notre enquête montre que les personnes
dialysées sont moins diplômées que les personnes transplantées », constate Christian Baudelot. Comment
­l’expliquer ? « Deux facteurs interviennent : les catégories les plus instruites sont toujours mieux informées et
conseillées, on l’observe dans toutes les pathologies. Mais
dans le domaine de la néphrologie, les catégories populaires sont plus sujettes que les autres à des affections qui
sont aujourd’hui considérées comme des contre-indications à la greffe (diabète, obésité, cardiopathies vasculaires…) » Quoi qu’il en soit, environ 12 000 personnes
en France ont attendu un rein en 2011, seulement
3 000 d’entre elles ont été transplantées. Un état d’alerte !
Comme pour bien d’autres maladies chroniques (diabète,
maladies coronariennes…), les patients atteints d’insuffisance rénale ont un sentiment de privation de leur parole
et se sentent souvent abandonnés, malgré les progrès de
la médecine. « Mes douleurs, très invalidantes, ne sont pas
traitées et guère prises en compte par mes médecins. J’ai
l’impression que je ne pourrai jamais en sortir », déplore un
homme dialysé de 43 ans. « Durant mon parcours, j’aurais
souhaité rencontrer des personnes dans ma situation, car je
me suis sentie assez seule. Un suivi psychologique devrait
être obligatoire », suggère une femme greffée de 45 ans.
Médecine générale
➜
Régime méditerranéen
Un revers pour les os des personnes âgées
Les vertus accordées au
régime méditerranéen ne
semblent pas s’appliquer
à la santé des os des
personnes âgées. C’est ce
que révèle une étude menée
©©PASIEKA/SPL/PHANIE
LOstéoporose
Tête d’un
fémur atteint
d’ostéoporose
Maladie caractérisée par
une diminution de la masse
osseuse et une altération de
la structure interne du tissu
osseux
par Catherine Féart *
sur 1 482 personnes âgées
de 67 ans et plus. En effet,
une plus forte adhésion
à ce type d’alimentation
serait associée à un risque
supérieur de fracture
des trois principaux
endroits fragilisés par
l’ostéoporose (L), soit
la hanche, les poignets
et les vertèbres. Une
faible consommation de
produits laitiers ou un
apport important de fruits
pourrait en partie expliquer
ce résultat qui n’est pas
répliqué dans d’autres
cohortes. Une découverte
intéressante qui vient
relativiser les bienfaits
du régime. F. P.-C.
☛☛Catherine Féart : unité 897 Inserm Université de Bordeaux, Centre de recherche
Inserm Épidémiologie et biostatistique
C. Féart et al. Osteoporosis International, 20 juin
2013 (en ligne) doi : 10.1007/s00198-013-2421-7
Scores cliniques
Une étude menée par Marianne
Sarazin * sur 358 médecins
­généralistes membres du réseau
Sentinelles (L) décrit pour la ­première
fois le contexte d’utilisation des scores
cliniques. Ces outils de diagnostic ou
de pronostic sont obtenus en donnant
une valeur n
­ umérique à certains signes
­cliniques afin de déduire, par exemple,
l’intensité d’une maladie. Parmi les
plus utilisés, le test de Fagerström
pour mesurer la dépendance au tabac
et celui de Folstein pour évaluer
les fonctions cognitives. Surtout,
les scores cliniques seraient une
aide précieuse en cas de diagnostic
incertain ou lorsque les patients
sont des personnes âgées. Pourtant,
certains praticiens
sont encore
Réseau
réticents à
Sentinelles
les utiliser en
Système
de
raison d’une
surveillance
méconnaissance
national composé
du sujet. F. P.-C.
de médecins
L
☛☛Marianne Sarazin : unité 707
Inserm - Université Pierre-etMarie-Curie, Épidémiologie,
systèmes d’information,
modélisation
M. Sarazin et al. International
Journal of General Medicine,
26 juin 2013 ; 2013 (6) : 419-26
généralistes qui
constitue de grandes
bases de données
sur plusieurs
maladies à des fins
de veille sanitaire et
de recherche.
8 websenti.u707.jussieu.fr
36 ●
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
©©DURAND FLORENCE/SIPA
L’heure
de l’évaluation Restauration scolaire
Manger mieux pour moins cher,
c’est possible !
La France est un des seuls pays dans le monde à avoir adopté des normes diététiques
pour les repas scolaires. Celles-ci se fondent sur la fréquence de présentation des plats
servis au cours de 20 repas successifs. Ne pas proposer plus de quatre entrées constituées de produits gras durant cette période est un bon exemple pour préserver l’équilibre alimentaire des enfants. Afin d’évaluer combien va coûter l’application de ces
normes alimentaires désormais obligatoires dans les écoles primaires en France, Florent
Vieux * a mené l’enquête. L’analyse du prix de 120 séries de 20 repas publiées dans
des revues professionnelles a prouvé qu’améliorer leur qualité (fréquence, portions) n’a
pas augmenté leur coût car les normes recommandent des portions plus petites. Soit
une économie de 0,10 € par repas ! Prévenir l’obésité tout en contrôlant les dépenses :
ces nouvelles directives ont décidément tout pour plaire. F. P.-C.
☛☛Florent Vieux : unité 1062 Inserm/Inra - Université d’Aix-Marseille, Nutrition, obésité et risque thrombotique
F. Vieux et al. Journal of Nutrition Education and Behavior, 24 juin 2013 (en ligne) doi : 10.1016/j.jneb.2013.02.004
médecine générale
En France, depuis le printemps 2013,
les autorités sanitaires ont mis en place
un calendrier vaccinal simplifié. Pour
les nourrissons, deux primo-injections contre la diphtérie, le tétanos,
la poliomyélite et la coqueluche sont à présent préconisées, contre
trois précédemment. Avant son application, des généralistes et des
­pédiatres avaient participé, en 2012, à une enquête conduite par Thierry
­Blanchon *, Louise Rossignol * et leurs collaborateurs du réseau
Sentinelles. Une démarche novatrice en France. Résultats : les ­médecins
ont réagi favorablement au schéma vaccinal modifié, tout en exprimant
des réserves, comme la suspicion de préoccupations financières liées
au retrait d’une dose vaccinale, et des suggestions, comme le ­besoin de
campagnes institutionnelles plus fortes sur l’intérêt de la vaccination
ou encore l’élaboration de recommandations fiables, simples et accessibles. Des éléments utiles aux autorités de santé. N. C.
☛Thierry
☛
Blanchon, Louise Rossignol : unité 707 Inserm – Université Pierre-et-Marie-Curie Paris 6
K. Lungarde et al. BMC Family Practice, 19 juin 2013 (en ligne) doi : 10.1186/1471-2296-14-85
● Prévention
Les généralistes sont vaccinés
Parmi les médecins
généralistes, 77 %
se déclarent vaccinés
contre la grippe,
73 % contre l’hépatite B,
64 % contre la
coqueluche et 61 %
contre la grippe H1N1
(en 2009). Ces résultats,
issus d’une enquête
menée par Céline
Pulcini * du Sesstim
à Marseille, sur un
échantillon représentatif
de 1 431 généralistes
libéraux, indiquent une
couverture vaccinale de
ces professionnels plutôt
bonne, mais qui pourrait
être meilleure. En outre,
l’étude dévoile que le
fait de se faire vacciner
est souvent associé à un
volume élevé d’activité,
à une participation à
la formation médicale
continue ou à l’absence
d’utilisation - dans
la pratique médicale d’Internet. Pourvoyeuse
d’informations
contradictoires,
la Toile augmenterait
la perception du risque
vaccinal. N. C.
☛Céline
☛
Pulcini : unité 912 Inserm/
IRD –Aix-Marseille Université,
Sciences économiques et sociales
de la santé et traitement de
l'information médicale
C. Pulcini et al. Vaccine,
24 juin 2013 (en ligne)
doi : 10.1016/j.vaccine.2013.06.039
©©Patrick ALLARD/REA
Calendrier vaccinal
Les médecins donnent
leur avis
Dépistage du cancer du sein
Les inégalités sociales
font barrière
Le cancer du sein est
le plus fréquent chez la
femme. C’est pourquoi,
depuis 2004, un dépistage
gratuit est proposé tous
les deux ans aux femmes
entre 50 et 74 ans.
L’enquête du SIRS (Santé,
inégalités et ruptures
sociales) menée en 2010
par Claire Rondet *
a pourtant montré que
6,5 % des 784 femmes
interrogées dans la
zone métropolitaine
de Paris n’ont jamais
fait de mammographie.
Les raisons ? Un faible
niveau d’éducation et
des contacts sociaux peu
fréquents. De plus, les
femmes qui ne sont pas
pleinement assurées ont
trois fois plus de risque
de n’avoir jamais été
dépistées, découragées
par les éventuels tests
complémentaires pas
totalement gratuits. Il
apparaît essentiel que
ces données soient
prises en compte lors des
campagnes de dépistage
afin de réduire l’effet des
disparités sociales. F. P.-C.
☛Claire
☛
Rondet : unité 707 Inserm - Université
Pierre-et-Marie-Curie, Épidémiologie, systèmes
d’information, modélisation
C. Rondet et al. Preventive Medecine,
26 juin 2013 (en ligne)
doi : 10.1016/j.ypmed.2013.06.016
Médecine française
Les résidents britanniques apprécient
Comment les expatriés
d’outre-Manche vivant
en France perçoiventils notre médecine
générale ? Ils en sont
satisfaits, selon une
première enquête
sur 860 Britanniques,
réalisée par Nathalie
Pelletier-Fleury et
Marc Le Vaillant *
du Cermes3. Classée
en tête : la relation
médecin-patient qui
obtient plus de 80 %
d’avis excellents ou
très bons.
En revanche, la durée
passée dans la salle
d’attente est un point
faible avec seulement
40 % d’évaluation
excellente ou très
bonne. À noter : le
point vue des expatriés
varie selon la confiance
initiale qu’ils ont dans
le système de santé
britannique : moins ils
lui accordent de crédit,
mieux sera évaluée
la médecine générale
française ! N. C.
☛Nathalie
☛
Pelletier-Fleury,
Marc Le Vaillant : unité 988 Inserm/
CNRS/Université Paris-Descartes École des hautes études en sciences
sociales, Centre de recherche Médecine,
santé, santé mentale, société
N. Pelletier-Fleury, M. Le Vaillant. BMC
Health Serv Res, 18 juin 2013 ; 13 : 224
©©B. BOISSONNET / BSIP
©©LOBANOV/FOTOLIA
➜
Juste encore un effort sur le temps passé
en salle d’attente…
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
37
Entreprendre • Opinions • Stratégies • Bloc-Notes
• à la une • découvertes • Têtes chercheuses • regards sur le monde • Cliniquement vôtre • Grand Angle • Médecine générale ➜
••
••
Concours de creation
d entreprises
••
••
Des biotechs pleines d’avenir
Pour sa 15e édition, le concours national d’aide à
la création d’entreprises de technologies innovantes
a récompensé 175 projets, dont huit portés par des
chercheurs de l’Inserm. Qu’en attendent-ils ? Comment
se profile l’avenir de ces créateurs et de leur entreprise ?
Réponses avec trois d’entre eux.
LCellule iPS
Cellule adulte repro­
grammée en cellule souche
similaire à une cellule
souche embryonnaire
☛☛Brigitte Onteniente : unité 861 Inserm –
Université Évry-Val d’Essonne, I-Stem
☛☛Xavier Nissan : Centre d’étude des cellules
souches (CECS), Association française contre
les myopathies (AFM), I-Stem
☛☛Didier Letourneur : unité 698 Inserm/
Université Paris 13-Paris Nord – Université
Paris Diderot-Paris 7, Hémostase,
bio-ingénierie, immunopathologie et
remodelage cardiovasculaire
☛☛Marc Derive, Sébastien Gibot :
unité 1116 Inserm – Université de
Lorraine, Défaillance cardiovasculaire
aiguë et chronique
P
henocell, Immatis et Inotrem. Ces trois projets,
menés par des chercheurs Inserm et accompagnés par Inserm Transfert, ont reçu cette année
un sérieux coup de pouce grâce au concours national
d’aide à la création d’entreprise innovante du ministère
de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.
Le premier a été primé dans la catégorie « en
­émergence », qui concerne des projets encore en
phase de maturation et de validation technique,
­économique et juridique. Un sujet de fierté pour
sa présidente, B
­ rigitte O
­ nteniente *, de l’Institut
des cellules souches pour le traitement et l’étude des
­maladies monogéniques (­I-Stem) au Genopole® d’Évry.
« C’est la d­ euxième r­ écompense que notre projet reçoit
après celle de ­Challenge+
©©François guénet/inserm
“ Ce prix est
une deuxième
récompense, donc
une nouvelle
validation de
notre projet „
Brigitte Onteniente et Xavier Nissan
ont mis en œuvre Phenocell
38 ●
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
(le programme de soutien à la création d’entreprise de
HEC Paris), et donc une nouvelle validation de l’idée,
de son montage et de son plan de développement », se
félicite la chercheuse. Mis en œuvre avec son confrère
Xavier ­Nissan * à l­’I-Stem, Phenocell s’appuie sur la
technologie de la reprogrammation cellulaire pour créer
et produire des lignées de cellules souches pluripotentes
induites (iPS) (L), qui sont ensuite transformées en
modèles parfaits des mécanismes pathologiques des
maladies génétiques. Objectif : offrir aux chercheurs
des outils cellulaires qui répondent à leurs attentes dans
des ­domaines aussi variés que les études développementales, la modélisation pathologique, la découverte
de médicaments ou les analyses de toxicité. : « Ce prix
nous offre la possibilité de financer les études de marché,
la rédaction et la finalisation du business plan et des
aspects juridiques. Une façon d’assurer ces actions importantes que l’on met facilement au second plan par rapport
aux aspects technologiques », confie Brigitte Onteniente.
Des projets bien avancés
Déjà prix Émergence en 2012, Didier Letourneur *
et son projet Immatis (IMplantable MAtrix and TISsue)
sont à nouveau lauréats cette année, mais cette fois dans la
catégorie « création-développement ». Celle-ci récompense des projets plus avancés pour lesquels la phase
« preuve du concept » a déjà été réalisée et devient un
critère essentiel dans l’évaluation. Créé en février 2013,
Immatis est l’aboutissement d’un projet scientifique
mené depuis dix ans par Didier ­Letourneur et les
chercheurs du laboratoire de bio-ingénierie cardiovasculaire pour la thérapie et l’imagerie médicale
à Paris. Vouée au développement de biomatériaux
innovants pour la régénération tissulaire, la biotech
est née à la suite d’une longue étape de réflexion, avec
la collaboration de Catherine Le Visage et ­Mohamed
­Derkaoui, deux confrères du laboratoire. « Après la
phase de brevets et de validation chez l’animal, nous
avons recherché une ­société pour transférer la production,
raconte Didier Letourneur. Mais nous n’avons pas trouvé
d’entreprise qui ait les compétences nécessaires et qui couvre
les quatre domaines d’applications de nos biomatéraux »,
tels que des implants osseux et cutanés, le traitement
des maladies cardiovasculaires, des supports de culture
cellulaire en trois dimensions pour la recherche et la
pharmaco-­toxicologie. « Ce choix stratégique de p­ roduire
en créant une start up a été mené ensemble », précise
entreprendre
➜
©©François guénet/inserm
Promotion 2013 : 175 lauréats
Lancé en 1999 par le ministère de l’Enseignement supérieur
et de la Recherche, le concours national d’aide à la création
d’entreprises de technologies innovantes a contribué à créer plus
de 1 500 entreprises de technologies innovantes, et récompensé
plus de 2 700 lauréats. Indice de qualité de la sélection, le taux
de survie de ces biotechs jusqu’à aujourd’hui est très élevé,
près de 70 %. En outre, le concours a accordé, depuis sa création,
358 millions d’euros de subventions. En 2013, 175 lauréats ont été
sélectionnés parmi 897 candidatures reçues. Dans la catégorie
« création-développement », parmi 393 candidatures, 55 prix
ont été attribués. Après avoir établi la preuve du concept, ces
lauréats envisagent la création d’une entreprise à court terme.
La subvention reçue peut atteindre 450 000 euros. Dans la série
« en émergence », parmi 504 candidats, 120 lauréats ont été
choisis. Ces derniers reçoivent à titre personnel une subvention
allant jusqu’à 45 000 euros pour financer les études préalables
à la création de leur entreprise.
8 www.enseignementsup-recherche.gouv.fr
à nouveau lauréat avec
son projet Immatis
Jean-François Rax, en
charge de l’accompagnement des projets de création
­d’entreprise à Inserm Transfert. C’est l’incubateur Paris
BioTech Santé qui a mis en contact Didier Letourneur avec
Dominique Surun, médecin de formation, choisissant
ainsi de rejoindre l’aventure après vingt ans dans l’indus­
trie pharmaceutique. Devenue présidente ­d’Immatis, elle
souhaite commencer à produire dès la fin de l’année :
« C’est un point critique qui sera gardé en interne, d’autant
plus que le montant de la levée de fonds nécessaire pour les
premiers investissements semble être un objectif raisonnable
que nous espérons atteindre en octobre », souligne-t-elle.
Immatis se donne alors deux ans pour réussir une production pilote et valider l’efficacité d’un premier produit
chez l’homme. La seconde levée de fonds permettra alors
de lancer la commercialisation notamment aux États-­Unis
où se trouvent 70 % du marché.
Le passage obligé
des essais cliniques
Cette étape est encore très éloignée pour Inotrem, qui
n’envisage pas de commercialisation d’un premier produit
avant 2020. La biotech, lauréate elle aussi dans la catégorie « création-développement », travaille sur un candidat
médicament pour le traitement du choc septique (L).
« Le potentiel thérapeutique est démontré, reste à confirmer l’innocuité avant de passer aux essais sur l’homme »,
nuance Marc Derive * de la faculté de médecine de
Nancy, qui a créé l’entreprise avec son confrère Sébastien
Gibot *, professeur de réanimation médicale. Grâce
à Inserm Transfert et à sa filiale Inserm ­Transfert
Choc septique
­Initiative* dédiée à l’amorçage, ils ont été mis en
contact avec Jean-Jacques Garaud, directeur jusqu’en Défaillance du système
2012 de Roche R&D, aujourd’hui impliqué dans le cardiovasculaire, définie par
développement de plusieurs biotechs. Devenu prési- l’effondrement de la pression
artérielle et déclenchée par
dent d’Inotrem, ce dernier se consacre actuellement un agent infectieux
à la levée de fonds français et européens, en espérant
terminer d’ici la fin de l’année, pour ensuite réaliser, * Voir S&S n° 10, Entreprendre
« Inserm Transfert Initiative –
dès 2014, les essais précliniques du produit phare de
Le capital-risque au service
l’entreprise : le motrem, un médicament qui régule le
des biotechs », p. 38-39
système immunitaire. Et Jean-Jacques Garaud prévoit ** Voir Grand Angle, p. 22
déjà d’ici quatre ans, à la fin de la phase II des essais
cliniques** qui détermineront la dose optimale du médicament et ses éventuels effets indésirables, de recher“ Il reste à
cher un partenariat
confirmer
de production avec
l’industrie pharma­
l’innocuité
ceutique. Objectif
du candidat
auquel concourent,
médicament „
en fait, tous les
finan­cements : proposer le motrem sur
le marché, et donc
au patient, le plus
vite possible. « Une
part non négligeable
de fonds publics sont
accessibles en France,
conclut le président
d’Inotrem. Bien Marc Derive et
sûr, ces aides sont Sébastien Gibot
­complexes, et il faut Inotrem, pour le traitement
une réelle habileté du choc septique
pour faire germer les
projets dans ce sol fertile. » Habileté dont les trois
lauréats et leurs associés ne manquent pas, tant
www.istem.eu
pour la partie scientifique que pour la mise en
www.inserm-transfert.fr
chantier de leurs biotechs. n Brigitte Dyan
L
©©François guénet/inserm
Didier Letourneur
“ Nous n’avions
pas trouvé
de société pour
transférer la
production „
8
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
39
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• à la une • découvertes • Têtes chercheuses • regards sur le monde • Cliniquement vôtre • Grand Angle • Médecine générale • Entreprendre ➜
Cigarette
electronique
••
••
Depuis quelques mois, les mêmes questions brûlent
toutes les lèvres en Europe : quels sont les dangers de la
cigarette électronique ? Et peut-on l’identifier à un substitut
nicotinique, voire à un produit de sevrage, même
la recommander à certains fumeurs ?
©©François guénet
Quand les certitudes
partent en fumée
Ce qui fait débat
J
40 ●
Pier Vincenzo Piazza
©©François guénet/inserm
usqu’à l’été dernier, la cigarette
électronique flottait en France
dans un épais brouillard
juridique : le dispositif, qui peut ou
non contenir de la nicotine mais pas
de tabac, qui produit de la vapeur
mais pas de fumée, n’était pas assimilé
à un produit du tabac. Le quasimillion de consommateurs pouvait
ainsi « vapoter » librement, à tout âge
et en tous lieux sans se préoccuper
d’une possible accoutumance ou
dangerosité. Les autorités françaises
se sont donc saisies du sujet, avec, à la
clé, une législation qui promet d’être
plutôt stricte : après avoir soutenu
un rapport détaillé sur le sujet*,
le ministère de la Santé a annoncé
l’interdiction de la publicité pour
les e-cigarettes au moment où les
députés votaient celle de la vente aux
mineurs. Quant à la possibilité de
les bannir des lieux publics, à l’heure
où nous écrivons ces lignes, elle est
examinée par le Conseil d’État.
Cette régulation des risques
occultera-t-elle les avantages
probables de l’e-cigarette par rapport
à la cigarette ? Le manque de
certitudes scientifiques est flagrant.
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
Directeur du Neurocentre Magendie
(unité 862 Inserm/Université Bordeaux 1 –
Université de Bordeaux), responsable de l’équipe
Physiopathologie de l’addiction
L
a cigarette électronique est le meilleur produit de
substitution à la cigarette. Comme celle-ci, elle libère la
nicotine par la voie respiratoire. Son accès au cerveau et
son élimination sont donc très rapides. Cette caractéristique la rend très acceptable par les fumeurs : la rapidité
d’accès au cerveau détermine la sensation
On devrait
provoquée par une drogue. Les patchs,
encourager le passage eux, libèrent la nicotine de façon stable et
à l’e-cigarette „
prolongée, ce qui atténue le mal-être dû
au sevrage mais ne donne pas l’impression
d’avoir fumé. Mais alors, par sa similitude d’effets, ­l’e-cigarette comporte-telle des risques de dépendance ? Probablement, mais moins que la cigarette,
qui contient d’autres substances addictives.
Nous n’avons pas de traitement efficace du tabagisme, la rechute à six mois
est de 80 % ! Or, la nicotine seule fait moins de dégâts que les nombreux facteurs cancérigènes du tabac et de sa fumée. En termes de santé publique, le
passage des fumeurs à l’e-cigarette serait un progrès considérable que l’on
devrait encourager. Pourquoi stigmatiser les e-fumeurs dans des lieux publics où
l’alcool, drogue très néfaste, est autorisé ? De même, en interdisant aux mineurs
fumeurs de passer à l’e-cigarette, avons-nous le droit de les condamner à une
dépendance bien pire ? Le tabagisme est la première cause de maladie des pays
développés. Pour le combattre, notre société a le devoir d’abandonner le moralisme idéologique et de se tourner vers un pragmatisme fondé sur la logique.
opinions
➜
Bertrand Dautzenberg
Tabacologue, professeur de pneumologie, GHU Pitié-Salpêtrière,
UPMC Paris 6, président de l’Office français de prévention du tabagisme
©©François guénet/inserm
N ous
*Rapport et avis
d’experts sur
l’e-cigarette,
coordonné par
le professeur
Dautzenberg,
Office français
de prévention du
tabagisme, avec
le soutien de la
Direction générale
de la santé.
Mai 2013, 212 p.
8
www.oftaasso.fr
ne pouvons pas « vapoter » revient à rouler à 150 km/h dans le bon sens !
a­ ttendre que toutes les En quatre mois, la vente de cigarettes a chuté de 8 %
incertitudes scientifiques en France. Les e-cigarettes n’y sont pas pour rien.
soient levées avant de régle- Et pour cause, elles peuvent réduire la dépendance.
menter l’e-cigarette dont le Après plusieurs jours d’utilisation, beaucoup de
marché ne cesse de croître ­fumeurs prennent des doses nicotiniques plus faibles.
depuis deux ans. En l’état Certains optent pour des parfums éloignés du tabac
actuel de nos connaissances, et parviennent à se sevrer. Sur ces constats indiviil faut éviter
duels, le Parlement européen
qu’elle attire les jeunes vers le tabac,
propose d’assimiler l’e-cigarette
Le risque est infiniment à un médicament pouvant faciliter
par des campagnes de publicité, des
moins grand qu’avec
parfums attractifs ou un prix trop bas.
le sevrage. Au Royaume-Uni, elle
À l’inverse, l’e-cigarette intéresse les
est déjà remboursée dans le cadre
le tabac „
gros f­umeurs. Sans métaux lourds,
du système de soins. En France,
monoxyde de carbone ni substances cancérigènes les « vapoteurs » ont le sentiment de partager une
(nitrosamines et goudrons), elle est moins nocive que expérience, de former des communautés, et s’initient
la cigarette, même s’il reste la nicotine et des produits les uns les autres. Ils apprécient le conseil personirritants comme l'acétone, des phénols et de l'acide nalisé des vendeurs en boutique. Une certification
cyanhydrique. Le risque existe mais est infiniment ISO pourrait garantir la qualité des produits. Il faut
moins grand qu’avec le tabac : si fumer est aussi dan- renforcer ces aspects, grâce auxquels des fumeurs
gereux que de rouler à contresens sur l’autoroute, très dépendants peuvent un peu améliorer leur sort.
Yves Martinet
Il est difficile de dire si la cigarette
­ lectronique est dangereuse car il y a
é
une diversité de dispositifs, de ­contenus,
nicotiniques ou non, et de dosages, y
compris très forts, sur Internet. Elle est
sans doute moins nocive que la cigarette mais les risques pourraient apparaître très tard, comme pour l’amiante.
L’industrie du tabac veut la standardiser
pour en faire un produit de consommation régulière. Elle orientera donc vite
les « vapoteurs », adultes ou non, vers
des produits avec nicotine. Or, de toutes
les drogues, c’est la nicotine qui cause
la plus forte dépendance – un atout
commercial !
Les deux tiers des fumeurs souhaitent
arrêter et ils sont prêts à tout essayer.
Aucune étude à ce jour ne montre que
l’e-cigarette conduit au sevrage. Elle
permettra peut-être aux gros fumeurs
de réduire leur consommation mais celui qui
fume moins compense
en tirant plus fort et plus
longtemps sur la cigarette
et, au total, inhale autant
de produits toxiques. Cette
consommation modérée
de tabac fumé n’est donc
buralistes car ils
Aucune étude n’a encore ne respectent
pas efficace, on sait que le
montré que l’e-cigarette
risque morbide apparaît
pas l’interdiction
conduit au sevrage „
dès la première cigarette
de publicité ou
et ­augmente avec le temps.
de vente du tabac
L’interdiction dans les lieux publics est aux mineurs. Nous souhaitons qu’elle
justifiée. Outre le « vapotage » passif, ne soit vendue qu’en pharmacie. Tous
qui existe, elle indique que fumer, ou les produits nicotiniques pourraient
« vapoter », n’est pas un comportement alors être soit plus ou moins taxés, soit
anodin mais le signe d’une d
­ épendance. remboursés, selon les risques possibles
Le Conseil d’État tranchera. Mais, pour la santé et la dépendance qu’ils
pour le CNCT, l’e-cigarette ne doit pas provoquent ou aident à traiter.
­rester en vente libre, ni être confiée aux
Propos recueillis par Nicolas Rigaud
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
41
©©François guénet/inserm
Pneumologue, CHU de Nancy, président du Comité national
contre le tabagisme (CNCT)
Stratégies • Bloc-Notes
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Horizon 2020
Soyez acteurs
de l’Europe de la recherche
Le 7e programme-cadre européen de recherche
et développement (PCRD) s’achève. Bienvenue à
Horizon 2020 (H2020) qui lui succèdera le 1er janvier 2014.
Avec des nouveautés, des priorités redéfinies
et un mot d’ordre : simplification.
Guillaume Fusai,
au Comité de
Programme santé
L7 PCRD
e
Programme-cadre
actuel (2007-2013) de
l’Union européenne
pour la recherche
et le développement
technologique, géré par la
Commission européenne.
Principal objectif : la
construction de l’Espace
européen de la recherche.
LCIP
Il est principalement
destiné aux petites et
moyennes entreprises
et soutient l’innovation,
améliore l’accès au crédit
et fournit des services
d’appui en faveur des
entreprises dans les
régions.
LEIT
European Institute of
Innovation and Technology,
institut public européen
mis en place dans le but
de devenir un facilitateur
d’innovation en Europe.
42 ●
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
©©François guénet/inserm
«L
a période de transition entre le 7e PCRD (L) et le
nouveau programme-cadre Horizon 2020 est une
période clé pour l’Inserm comme pour toutes les
insti­tutions européennes de recherche qui ont inscrit
parmi leurs priorités une forte participation au programme-cadre européen de recherche et développement,
souligne Richard Salives *, responsable des relations
européennes de l’Inserm. Le succès de cette transition
constitue un enjeu majeur pour l’Institut ! »
L’Union européenne va injecter environ 70 milliards
d’euros de 2014 à 2020 pour la recherche et l’innovation
au travers d’Horizon 2020, plus simple et plus facile
d’accès. « L’objectif est de rendre plus attractif H2020 pour
les différents acteurs de la recherche, publics ou privés »,
précise Richard Salives. De plus, « Horizon 2020 va
­regrouper en un seul programme trois initiatives antérieures jusque-là séparées : le 7e PCRD, le programmecadre pour la compétitivité et l’innovation (CIP) (L)et la
contribution de l’Union à l’Institut
européen d’innovation et de techno- “ La France se positionne avec une aide particulière aux activités
logie (EIT) (L) », ajoute Guillaume de façon stratégique
d’innovation menée par des PME) ;
Fusai *, représentant du minis● se saisir de défis scientifiques en lien
tère de l’Enseignement supérieur et volontariste „
avec les besoins de la société (soutien
et de la Recherche au Comité de
aux projets collaboratifs européens
Programme santé. Trois en un : une fusion bienvenue en réseau) : le premier couvre le domaine « Santé,
pour élargir le panorama et la vision sur les enjeux à ­évolution démographique, bien-être », avec la m
­ édecine
venir. Des priorités ont d’ores et déjà été définies :
­personnalisée comme l’une des priorités affichées pour
● viser l’excellence scientifique quelle que soit la
ces prochaines années, et entre en résonance avec les
­thématique de recherche, avec l’octroi de financements recherches développées à l’Inserm. Parmi les autres
aux équipes de recherche dans le cadre du Conseil défis, des ­domaines tels que la sécurité alimentaire et
­européen de la recherche (ERC), des Actions Marie- l’agriculture durable, les sciences humaines...
Curie, des technologies futures et émergentes (FET) et
des infrastructures de recherche ;
Articuler les programmations
● accroître une forte participation du secteur privé de
nationale et européenne
la recherche en particulier dans les technologies géné- « Pour Horizon 2020, la France se positionne de manière
riques et émergentes, notamment les nanotechnologies stratégique et volontariste, explique Guillaume Fusai.
et les bio­technologies (soutien aux projets en réseau, Afin de permettre à la recherche française de mieux
stratégies
➜
Un projet ?
Des ressources
à l’Inserm
©©François guénet/inserm
Le montage de projets collaboratifs
coordonnés par l’Inserm bénéficie d’une
procédure originale s’appuyant sur
Inserm Transfert qui met au service des
scientifiques porteurs de projets son
expertise pour construire leur dossier de
candidature. Le PCN et les délégations
régionales de l’Inserm sont également à
leur disposition, qu’ils soient coordinateurs
ou partenaires, pour les accompagner
depuis le montage jusqu’au suivi du projet.
8 http://dircom.inserm.fr/europe
répondre aux grands défis scientifiques, “ L’Inserm est le premier de plus en plus important en
Richard Salives et
­économiques et sociétaux des décennies à
termes d’analyse stratégique,
Nacer Boubenna,
coordinateur
de
projets
venir, en particulier dans le domaine de
de programmation scientipour accompagner
la santé, nous devons favoriser les syner- collaboratifs „
fique et de mise en œuvre
les porteurs
de projets H2020
gies entre les programmes nationaux et les
opérationnelle de la recherche,
programmes européens. » Or, le constat actuel pour la le ­ministère de l’Enseignement supérieur et de la
France est sans appel : pour chaque euro abondé au ­Recherche a chargé l’Alliance nationale pour les
­budget R&D de l’Union européenne, seul 0,7 euro béné- sciences de la vie et de la santé (Aviesan) de constificie aux équipes françaises. Alors que pour certains tuer le nouveau Point de
pays, un euro alloué permet un retour d’un à trois euros. contact national (PCN)
calendrier 2013
Le diagnostic est posé : « Notre participation aux appels du défi « santé, évolution
à projets européens est insuffisante, regrette Guillaume ­d émographique, bien• Formations Inserm Horizon 2020
Fusai. Remobiliser les chercheurs devient une priorité ! » être ». « L’Inserm, en raison
- Montpellier : 22 octobre
Toutefois, ce constat est à nuancer. « Aujourd’hui, dans de sa visibilité européenne,
- Paris (délégations Paris 11 et 12) :
le domaine de la santé, l’Inserm est le premier coordina- s’est vu confier le pilotage de
25 octobre et 15 novembre
- Lyon : 25 novembre
teur et participant européen en termes de projets colla- ce PCN », souligne Richard
- Marseille : 2 décembre
boratifs et constitue l’une des institutions européennes Salives. Co-­piloté par le
-P
aris (délégation Paris 6) : 3 décembre
qui accueille le plus de lauréats financés par le Conseil ministère, il s’appuie sur
Toulouse : 5 décembre
européen de la recherche dans les sciences de la vie », un consortium regroupant
- Bordeaux : 9 décembre
tempère Richard Salives.
le CNRS, la Conférence
- Nantes : 11 décembre
des présidents d’université
- Lille : 17 décembre
Se former pour mieux participer
(CPU), BpiFrance, le CEA et
- Strasbourg : 18 décembre
Cette position européenne forte, l’Inserm souhaite la l’Institut Pasteur. Sa mission
-P
aris (délégations Paris 5 et 7) :
maintenir et même l’améliorer. Comment ? En poursui- est d’informer, de sensibiliser
20 décembre
vant un travail d’information auprès des scientifiques et les équipes sur les possibilités
• Lancement des premiers appels
des personnels d’accompagnement à la recherche. « Pour de financement et d’aider les
à projets européens Horizon 2020 :
anticiper, préparer au mieux et favoriser la ­participation porteurs de projets d’H2020.
20 décembre
des équipes Inserm au programme d’H2020, nous orga- Sa coordination, au service
nisons des sessions de formation d’une ­journée, ­ouvertes de l’ensemble de la commuà tous les personnels des structures Inserm, avec les délé- nauté scientifique française
☛
Salives : département
gations régionales (voir encadré). Celles-ci ont pour but, du domaine, incombera à Nacer Boubenna * qui ☛Richard
des Partenariats et des relations
d’une part, de recenser les opportunités scientifiques offertes aura la responsabilité de s’assurer de la diffusion des
extérieures, Inserm
par Horizon 2020 et, d’autre part, d’expliquer les modalités informations relatives au défi sociétal sur l’ensemble ☛☛Guillaume Fusai : Direction générale
pour la recherche et l’innovation,
financières et contractuelles liées à la mise en place des du territoire français. n Nathalie Christophe
ministère de l’Enseignement supérieur
projets européens à l’Inserm », précise-t-il.
et de la Recherche
☛Nacer
☛
Boubenna : chargé de mission
Et afin d’améliorer la participation de l’ensemble de
Relations européennes, département
www.horizon2020.gouv.fr
la communauté scientifique dans le paysage de la
des Partenariats et des relations
www.france-europe-innovation.fr
­recherche française où les ­alliances jouent un rôle
extérieures, Inserm
8
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
43
stratégies
➜
Centres de ressources biologiques
Des échantillons
pour tous
Bruno Clément,
directeur de l’unité Inserm Foie,
métabolisme et cancer à Rennes,
et membre du directoire du réseau
depuis sa création
©©François guénet/inserm
des demandes par un c­ omité scientifique. Par ailleurs, toutes les personnes
impliquées dans le réseau, aussi bien les
chercheurs que les centres collecteurs,
participent aux discussions d’attribution
des échantillons. Ce qui évite les discriminations. Les échantillons n’appartiennent
à personne et doivent être accessibles à
tous. Il était donc essentiel de proposer
un système équitable et transparent.
Le réseau des centres de ressources biologiques (CRB) Foie
vient de renouveler sa certification AFNOR NF S 96-900.
Un gage de rigueur scientifique, de sécurité et d’éthique,
qui vise à l’harmonisation des pratiques professionnelles.
L’occasion pour Bruno Clément * de revenir sur
sa naissance et son rôle dans le paysage scientifique.
S&S : Et avec une certification
AFNOR NF S 96-900 renouvelée en juin dernier.
Quelle importance pour le réseau ?
B. C. : Depuis trois ans, nous sommes engagés dans
une démarche d’assurance-qualité, aussi bien au niveau
des échantillons (stockage, prélèvement, congélation,
etc.) qu’en termes de qualité de l’information associée.
Le réseau a été le premier certifié NF S (norme française qui évalue la qualité des CRB). L’harmonisation
des procédures permet aujourd’hui d’optimiser l’exploitation s­ cientifique des échantillons aussi bien à des fins
de r­ echerche cognitive, que translationnelle ou clinique.
Science&Santé : Pouvez-vous nous raconter la
genèse de ce réseau CRB Foie ?
Bruno Clément : Les centres de recherche en hépato­logie S&S : Avec toutes ces années de recul, comment
(CHC) et l’Inserm sont à l’origine du CRB Foie qui a vu le jugez-vous son évolution ?
Épithélium
jour en 2002. Et il s’agit du tout premier réseau ­thématique B. C. : Depuis 2002, les choses ont bien changé.
créé en France ! Il s’inscrivait dans une politique nationale ­Récemment, une nouvelle version de la base de données
Tissu de revêtement
de toutes les surfaces
de reconnaissance des CRB. À ­travers la création de ces a été mise en ligne. Les items - histologiques, sériques,
externes (peau) et
réseaux, l’idée était de faciliter l’échange ­d’informations cliniques, etc. - sont un peu plus approfondis. Nous
internes (plèvre, péritoine,
et de matériels biologiques entre ­chercheurs, sur la avons élargi la base à d’autres types de cancer comme
paroi intestinale, etc.)
base de procédures standar­disées, aussi
les cholangio­carcinomes, des tumeurs
du corps, composé de
cellules étroitement
bien pour la collecte et la conservation “ Les échantillons
qui se d­ éveloppent dans l­’épithélium (L)
juxtaposées, sans
qui t­apissent les voies biliaires, et nous
des échantillons que pour l’annotation n’appartiennent
substance intercellulaire,
­commençons tout juste à y i­ nclure des échandes
données
(biologiques,
cliniques,
ni vaisseaux, ni fibres
à personne.
tillons en blocs de paraffine pour les études
histologiques, sériques, etc.). Aujour­
de génomique. Jusqu’à présent, nous n’avions
d’hui, le réseau CRB Foie réunit huit Ils doivent être
*L’AP-HP, avec les hôpitaux
accessibles
à
tous „
que du tissu congelé. Tous ces changements
centres
répartis
sur
tout
le
territoire*.
Beaujon, Paul-Brousse,
sont devenus indispensables pour faire face
Antoine-Béclère et HenriMondor, et les CHU
S&S :
Ne
serait-il
finalement
qu’un
intermédiaire
à
la
demande
croissante des chercheurs. Et avec l'infrasde Bordeaux, Grenoble,
entre les CRB et les laboratoires ?
tructure Biobanques, qui coordonne la constitution des
Nantes et Rennes
B. C. : Non, en réalité, le réseau coordonne à la fois la réseaux thématiques à l’échelle nationale, un portail
logistique des prélèvements et de leur conservation, la européen interconnecté devrait bientôt voir le jour et
☛☛Bruno Clément : unité 991 Inserm tenue prospective de la base de données et la mise à offrir aux chercheurs un accès facilité à l’ensemble des
Université Rennes 1
disposition du matériel biologique. échantillons disponibles en Europe. N’oublions pas que la
reseaucrbfoie.isped.u-bordeaux2.fr Il y a également une procédure validité des recherches dépend directement de la qualité
www.inserm.fr
­certifiée pour les d­ emandes d’échan- des échantillons biologiques et des données qui leur sont
www.biobanques.eu
tillons et un système de validation associées. n Propos recueillis par Karl Pouillot
L
8
44 ●
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
stratégies
➜
••
••
Atelier de reflexion prospective
L’obésité en ligne de mire
Dominique Langin *, responsable du laboratoire
de recherche sur les obésités à Toulouse, coordonne,
depuis un an, l’atelier de réflexion prospective
« Prospective et recherche sur les obésités »
(ARP-PROBS). Son objectif ? Miser sur une recherche
transdisciplinaire, en partenariat avec l’Europe.
LPrévalence
Nombre de cas
enregistrés à un temps T
Science&Santé : Comment est né cet atelier ?
Dominique Langin : Il a été mis en place en mai 2012
par l’Agence nationale de la recherche en partenariat avec
l’institut thématique multi-organisme Circulation, métabolisme, nutrition. Il s’inscrit dans le Plan obésité lancé en
2010 par le Président de la République avec les ministères
concernés face à l’augmentation de la prévalence (L) de
l’obésité en France. Un plan qui comporte, outre les axes
soins, prévention et vulnérabilité, celui de la recherche.
avons o­ rganisé une c­ onsultation nationale et proposé
une liste de dix t­hématiques (évènements p­ récoces et
origines développementales, complications de ­l’obésité,
prise en charge…) pour structurer les échanges et
­débats. Nous avons enfin identifié trois axes émergents à partir de l’état des lieux des thèmes de recherche
explorés : la « classification dynamique des obésités »,
puisqu’il y a, non pas une, mais des obésités avec des origines, des évolutions et des complications différentes ;
« de l’obésité aux maladies du tissu adipeux », ce qui
permet d’englober un plus grand nombre de ­pathologies
liées entre elles ; et enfin « les actions visant à modifier
les comportements », i­ nspirées
par les politiques publiques ou “ L'obésité
le ­secteur privé.
ne se réduit pas
à un problème
biomédical „
S&S : Avec un peu plus d’un an d’existence,
quelles sont les actions déjà menées ?
D. L. : D’abord, nous avons réalisé un recensement de
l’ensemble des laboratoires, toutes disciplines confon☛☛Dominique Langin : unité 1048 Inserm dues, impliqués dans les recherches sur les obésités
Université Toulouse III-Paul-Sabatier,
au niveau national, via la création d’un site Web et
Institut des maladies métaboliques et
cardiovasculaires
d’annuaires. Dans le domaine biomédical, il s’agissait
d’élargir ­l’inventaire réalisé par
l’Association française d’étude et
Qu’est-ce qu’un atelier
de recherche sur les obésités. Dans
de réflexion prospective ?
le secteur des sciences humaines et
Mises en place par l’ANR, ces structures
sociales, ce fut un travail de fourmi,
ont vocation à encourager des analyses
collectives et prospectives sur des thématiques
car les obésités ne constituent
émergentes à forts enjeux sociétaux et
­généralement pas leur thématique
scientifiques. Elles réunissent des chercheurs
principale. Parallèlement, nous
et des décideurs des secteurs public, privé
avons fait de la communication
et associatif, et permettent d’identifier de
pour faire connaître aux ­acteurs de
nouvelles questions pour la recherche dans
des domaines encore peu structurés. Enfin,
la recherche la ­démarche de l’ateces ateliers constituent généralement les
lier lors de ­colloques, comme le
prémices des programmations futures.
Congrès européen sur l’obésité en
8 www.agence-nationale-recherche.fr mai 2012. Ensuite, afin d’élaborer
un programme de ­recherche, nous
©©François guénet/inserm
S&S : Et en quoi consiste-t-il exactement ?
D. L. : L’atelier regroupe la communauté scientifique qui
travaille sur les obésités et, au-delà, sur la nutrition. Son
rôle est de faire l’état de l’art des recherches en France et
d’élaborer les futures pistes de travail. L’idée était aussi de
créer des passerelles entre les différentes disciplines, parce
que l’obésité ne se réduit pas à un problème biomédical.
Il faut prendre en compte ses composantes environ­
nementales, sociologiques, économiques…
S&S : Comment voyez-vous l’avenir ?
D. L. : L’Inserm a décidé de poursuivre cette ­initiative
avec pour mission de promouvoir la réponse aux
appels d’offres européens dans le contexte du
­programme-cadre européen Horizon 2020*. Nous
­souhaitons ­préparer au mieux le futur de la recherche en
France mais également, ce qui est fondamental, i­ nscrire
encore plus notre communauté dans la ­perspective
européenne. n
www.i2mc.inserm.fr
Propos recueillis
www.arp-probs.fr
par Stéphanie Arc
8
* Voir p. 42
www.aviesan.fr
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
45
Bloc-Notes
De l’infiniment grand à l’infiniment petit
©©MESR-DRRT Limousin ; Midi-Pyrénées
Chercheurs, enseignants, ingénieurs, techniciens, entreprises, associations, collectivités
territoriales, etc., des milliers de personnes participent au succès de la Fête de la science.
➜ À retrouver dans votre région du 9 au 13 octobre
8 www.fetedelascience.fr
À Paris, Sciences au Carré(e)*
proposera :
•u
n dispositif de réalité augmentée, pour une
immersion totale dans des scènes 3D
•d
e nombreux scientifiques à rencontrer
• des « objets mystères » à découvrir chaque jour
•d
es animations ludo-pédagogiques
pour petits et grands
• un espace « carré des bloggeurs » et le hashtag #SciO2 : tous connectés !
• des speed dating sur les métiers de la science pour les lycéens
* organisé par les principaux organismes de recherche ➜ 17-19 octobre
Place Carrée au Forum des Halles, Paris 1er
8 www.inserm.fr
Festival des sciences en Bretagne
Un rendez-vous pour en savoir un peu plus sur
ce qui se fait dans les laboratoires de recherche rennais
et ce qui s’y prépare pour demain.
➜ 6-20 octobre
••
••
••
••
evenement
8 www.espace-sciences.org
Première journée européenne de sensibilisation à l’arrêt cardiaque
Colloque scientifique, organisée par Xavier Jouven (unité Inserm 970, PARCC) et
Hazrije Mustafic (Centre d’expertise de la mort subite de l’adulte)
➜ 16 octobre - Auditorium de l'HEGP, Paris 15e
Pour le grand public : sensibilisation et formation aux gestes qui sauvent (Centre
d’expertise de la mort subite, Croix rouge, Sapeurs pompiers de Paris, Samu de Paris)
➜ 16 octobre, 15 heures – 17 h 30
Stades Charléty, Paris 13e et Le Gallo, Boulogne-Billancourt (92)
8
46 ●
http://parcc.inserm.fr
www.idf.inserm.fr
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
rencontre
Fête de la science
La Nuit
des chercheurs
Démonstration,
manipulation,
animation…
pour tout public !
festival
manifestations
• à la une • découvertes • Têtes chercheuses • regards sur le monde • Cliniquement vôtre • Grand Angle • Médecine générale • Entreprendre • Opinions • Stratégies ➜
Pariscience
Festival international
du film scientifique
Pariscience ouvrira ses portes
pour sa 9e édition du 3 au
8 ­octobre 2013 à Paris. Placé
sous le signe des mathématiques, il proposera une
­cinquantaine de films qui
aborderont toutes les thématiques scientifiques et techniques. Nicolas Gervasi *,
chercheur en neurosciences à
l’Institut du Fer-à-Moulin, et parrain, cette année, du
prix des lycéens du festival, nous parle de ce rôle qu’il
va endosser pour la première fois à la rentrée.
Science & Santé : Pourquoi avoir accepté d’être
parrain du prix des lycéens de Pariscience 2013 ?
Nicolas Gervasi : J’aime beaucoup enseigner mais je
n’ai pas encore eu l’occasion de communiquer directement avec le grand public. Pourtant, j’y pense souvent
car mon sujet d’étude, le striatum - petite structure
du cerveau impliquée dans la motivation de l’action
et ­modifiée dans la maladie de Parkinson ou la prise
abusive de drogues - donne lieu à de belles images explicites. On voit les neurones s’activer en temps réel et c’est
une excellente base de discussion. Quand Jean-Antoine
Girault, directeur de l’Institut du Fer- à-Moulin et président du comité scientifique d’Ile-de-France, est venu
bloc-notes
colloque
•• ••
•
••
•
En 2013, dans 14 villes
de France, la Nuit des
chercheurs entraîne
vers des mondes
inconnus... présentés
par des chercheurs
passionnés : infiniment
petit ou infiniment
grand, espaces
inconnus de notre
propre cerveau,
dernières explorations
en génétique... ou de la
matière noire de l’Univers,
ou encore découverte de
sociétés humaines préservées...
Binôme
Souris chaos
de Frédéric Sonntag après sa rencontre avec Daniela
Cota*, spécialiste de la physiopathologie de l’obésité.
Mise en lecture par la compagnie Le sens des mots
*Voir S&S n° 14, Bloc-notes p. 48
➜ 2 7 septembre
Représentation lors de la Nuit des chercheurs
Forum des arts et de la culture, Talence
8
www.aquitaine-poitou-charentes.inserm.fr
www.lessensdesmots.eu
➜ 27 septembre, dès 18 heures
8 www.nuitdeschercheurs-france.eu
Communiquer la science
par le débat
Objectif : susciter une réflexion
qui permettra aux organismes de
recherche de mieux dialoguer avec les
publics et aux citoyens, de comprendre
les enjeux des recherches pour devenir
acteurs du débat.
➜ 18 octobre
festival
theatre
➜
Centre d’information
scientifique, Institut Pasteur,
Paris 15e
Entrée libre sous réserve
d’inscription préalable
Scientilivre
L’Aventure humaine
Librairies, ateliers, conférences, expos…
invité d’honneur, Michel Serres
➜ 19-20
octobre
Centre des congrès Diagora, Labège
8 www.communication-publique.fr
8 www.deliresdencre.org
me voir pour me faire cette proposition, il m’a parlé de
l’échange avec des lycéens et de la perspective d’évoquer
ce que l’on fait dans notre laboratoire. J’ai accepté car
je pouvais enfin avoir du temps pour rencontrer des
jeunes, sortir du laboratoire et prendre du recul.
Nicolas Gervasi
Parrain du prix
des lycéens
©©François guénet/inserm
S&S : Rappelez-nous ce qu’est ce prix des lycéens
et quel rôle vous y jouerez ?
N. G. : Trois films sont sélectionnés par Pariscience
et soumis, à trois classes de lycéens qui en forment le
jury. À chaque projection, je serai accompagné d’un
réalisateur et nous irons à la
rencontre de ces adolescents à
“ Je vais enfin
l’issue de la séance. En amont
avoir du temps
du festival, dès la rentrée,
pour rencontrer nous allons nous réunir avec
des jeunes „
les enseignants afin de préparer ces débats. Je suis très
curieux de voir ce que les jeunes vont particulièrement
retenir des films qu’ils verront. Moi, je serai là pour
discuter avec eux, leur apporter des éclaircissements si
besoin est, leur donner les bases nécessaires pour qu’ils
puissent juger au mieux la qualité des films présentés, et
surtout essayer de transmettre ma passion de chercheur.
Ce qui, peut-être, donnera envie aux jeunes de faire des
études scientifiques ?
S&S : Sait-on ce que la sélection des films pour
le prix des lycéens nous réserve ?
N. G. : Cette année, trois films sont en compétition
pour ce prix et permettent d’aborder des thématiques
très variées : Nature invisible – plantes conquérantes,
Sur les traces de la mémoire et Résurrection.
­Attendons leur verdict ! n
Propos recueillis par Aude Védrines
8
➜ L es séances
auront lieu au
Muséum national
d’histoire
naturelle, à
l’Institut de
physique du
globe de Paris
et à l’université
Pierre-et-MarieCurie.
➜P
rojection des
films lauréats
à l’Institut de
physique du globe
de Paris lors de la
Fête de la science
le 12 octobre
☛Nicolas
☛
Gervasi : unité 839 Inserm/
Université Paris 7-Denis-Diderot –
UPMC, Neurotransmission et
signalisation
www.pariscience.fr
www.ifm-institute.fr
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
47
bloc-notes
••
••
● Santé en questions
L’insomnie met la santé en veille
Avec Joëlle Adrien, chercheur au Centre de recherche de l’Institut
du cerveau et de la moelle épinière (UPMC/Inserm UMRS975/
CNRS UMR 7225, Faculté de médecine Pitié-Salpêtrière, Paris)
et Isabelle Guy, praticien hospitalier, responsable de l’unité
Sommeil au Centre hospitalier de Belfort-Montbéliard
Livre
conferences
➜
Claude Bernard La méthode de la physiologie C
ette année 2013 marque le bicentenaire de la naissance de Claude Bernard,
le précurseur de la biologie moderne et de la méthode expérimentale.
Une rencontre organisée à l’École normale supérieure (ENS) de Paris,
et dont les actes sont aujourd’hui publiés, a permis de lui rendre hommage
et de replacer ses interrogations au cœur des avancées que connaît actuellement l’étude du vivant. Jean-Jacques Kupiec *, biologiste moléculaire,
­épistémologue Inserm au Centre Cavaillès et co-directeur de l’ouvrage, revient
pour nous sur cette journée d’étude, entre histoire et modernité.
➜ 1 7 octobre, à 19 heures à la Cité des sciences
et de l’industrie de Paris et en duplex de
l’amphithéâtre Sem-Numerica à Montbéliard
8 www.inserm.fr
● Les conférences 5 à 7 de Pasteur Lille
Flore intestinale, les flores du mal
avec Mathias Chamaillard (unité Inserm 1019/Lille 2)
➜ 15 octobre, 17 à 19 heures
Entrée gratuite (réservation obligatoire)
Campus de l’Institut Pasteur de Lille,
amphithéâtre René Buttiaux
La méthode de la
physiologie*
Sous la direction de
François Duchesneau,
Jean-Jacques Kupiec
et Michel Morange
8 www.pasteur-lille.fr
● L’épigénétique
avec Annick Harel-Belland (CNRS) et Edith Heard*, professeur
au Collège de France (Institut Curie/CNRS/Inserm)
*À lire dans S&S n° 6, Têtes chercheuses « Edith Heard - Donner
de la voix au silence », p. 14 et n° 11, Grand Angle « Épigénétique
- Comment se joue la partition du génome ? », p. 22-33
➜ 19 novembre
Institut Curie, salle Lacassagne, Paris 5e
[email protected]
©©Adrian Stähli/ Lichtblick Media Gmbh/ Berlin
Film
8 chercheurs_toujours.vjf.cnrs.fr
Ne m’oublie pas
Documentaire de David Sieveking (Allemagne)
Grand Prix de la Semaine de la Critique au Festival
International du Film de Locarno 2012
« … lorsque mon père s’est retrouvé avec
cette tâche titanesque d’avoir à prendre soin
de ma mère, atteinte de la maladie d’Alzheimer,
j’ai voulu aider… » dit le réalisateur pour
expliquer la genèse de ce film.
➜S
ortie en salles le 25 septembre (durée 1 h 28)
À l’occasion de la Journée mondiale de
la maladie d’Alzheimer le 21 septembre,
film disponible en vidéo à la demande
payante, en avant-première
(1 € par téléchargement reversé
aux associations d’aidants et pour
la recherche sur la maladie d’Alzheimer)
48 ●
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
Science & Santé : Qu’est-ce qui
vous a amené à vous intéresser à
Claude Bernard et à lui consacrer
une journée d’étude ?
Jean-Jacques Kupiec : Nous avons
organisé ce colloque le 22 ­janvier pour
juin 2013, Éditions Rue d’Ulm, 166 p.,12 €
célébrer le bicentenaire de la naissance
*Voir S&S n°15, Bloc-notes, p. 50
du fondateur de la méthode expérimentale en biologie et pour rendre hommage à l’actualité
de ses travaux. Je me suis étonné du peu d’évènements organisés à cette occasion, surtout si l’on compare à l’avalanche
de colloques, d’études et d’articles qui ont été consacrés à
Charles Darwin en 2009 pour célébrer les 150 ans de la
publication de De l’origine des espèces. Le livre proposé ici
rassemble les diffé­rentes contributions, entre biologie, histoire et philo­sophie, qui ont eu lieu ce jour-là. Elles permettent
de se déplacer dans la pensée de Claude Bernard, qui est
d’une remarquable modernité et d’une grande cohérence.
➜ Claude Bernard -
S&S : En quoi cet éminent savant du XIXe siècle
est-il moderne justement ?
J.-J. K. : Certaines présentations de la journée d’étude se
sont particulièrement penchées sur la question. Par exemple
Biologie des celle de Denis Noble, physiologiste venu d’­Oxford et président de l’Union internationale des sociétés de physiologie.
systèmes
Il est l’un des fondateurs de la biologie des systèmes (L) et
Domaine qui étudie
s’appuie
beaucoup sur les travaux de Claude Bernard. De
les relations et les
manière un peu schématique, jusqu’aux années 2000, on
interactions entre
différentes parties
analysait la biologie au niveau des molécules. Aujourd’hui,
de l’organisme
on revient à une vision plus globale des organismes que
(cellules, organites,
l’on considère de nouveau comme des systèmes. Dans son
gènes, protéines…),
article, Denis Noble montre que Claude Bernard avait justeafin de déterminer
ment cette représentation systémique de l’organisme et que
le fonctionnement
des systèmes
sa pensée est éminemment moderne et compatible avec la
biologiques dans
biologie des systèmes développée actuellement.
leur ensemble.
Un autre article, celui de François Pépin, philosophe, évoque
le concept de milieu intérieur inventé par Claude Bernard
à une époque où ce n’était pas si trivial et qui est devenu
l’un des fondements de la biologie moderne ! Il porte l’idée
☛☛Jean-Jacques Kupiec : Centre
Cavaillès, Centre international
que tout élément d’un être vivant subit l’influence de son
de recherches en philosophie,
environnement et fonctionne en conséquence. On retrouve
lettres, savoirs (USR 3308
ENS/CNRS)
là l’idée d’interaction de toutes les parties entre elles. C’est
L
bloc-notes
MEDIAS
➜
••
••
“ Au travers de cet ouvrage,
on se déplace dans la pensée
de Claude Bernard „
Les jeudis de l’actualité
un partenariat Inserm/Paris bibliothèques
Les cellules souches, une révolution ?
avec la participation de Sandrine Montgolfier,
juriste à l’UPEC (IRIS) et Hervé Chneiweiss,
président du comité d’éthique de l’Inserm
➜ 3 octobre, 19 heures
Bibliothèque Vandamme, Paris 14e
8 www.idf.inserm.fr
Café santé
ADN, superstar ou superflic ? Les citoyens
face à une molécule envahissante*
avec l’auteur, Catherine Bourgain (unité Inserm 988)
©©François guénet/inserm
Jean-Jacques Kupiec
lui rend un hommage justifié
Bibliothèque Hélène-Berr, Paris 12e
8 www.idf.inserm.fr
Rencontres CNRS Jeunes
« Sciences et citoyens »
Un rendez-vous annuel de réflexion et
d’échanges avec, cette année, 450 jeunes
européens et une centaine de chercheurs
de toutes disciplines
de Claude Bernard (1813-1878)
Conférences, expositions et
manifestations à Paris et Lyon
jusqu’au 7 décembre
➜ 18-20 octobre
Palais des congrès, Futuroscope
de Poitiers
Inscription et règlement
8 claudebernard2013.univ-lyon1.fr
8 www.cirphles.ens.fr/centre-cavailles
8 www.cnrs.fr/sciencesetcitoyens
Utopiales
Ce festival international de
science-fiction a pour thème,
cette année, l’architecture
de ­demain. L’Inserm et
le CEA proposeront une
exposition « interactive »,
Futuro Technos, où l’on
retrouvera des innovations
technologiques qui visent
à améliorer le quotidien,
à réparer ou augmenter
les capacités humaines.
©©Vincent Callebaut
S&S : Finalement, quelles
­découvertes majeures doit-on
à Claude Bernard ?
J.-J. K. : Celle du glycogène, la forme sous laquelle les
glucides sont stockés dans notre organisme, qui est s­ urtout
emmagasiné dans le foie et les muscles squelettiques et
dont on tire de l’énergie au besoin. Mais aussi celle de
la synthèse et la libération du glucose par le foie, l’analyse de l’effet de produits toxiques comme le curare sur
les muscles et les nerfs… Il a également écrit plusieurs
ouvrages théoriques fondamentaux, dont la célèbre Introduction à l’étude de la méthode expérimentale et les Leçons
sur les phénomènes de la vie communs aux animaux et
aux végétaux. Son originalité, finalement, c’est d’avoir fait
des découvertes expérimentales qu’il a doublées d’une
réflexion épistémologique et théorique encore d’actualité
pour penser le renouveau de la biologie aujourd’hui. n
Propos recueillis par Aude Védrines
Blog
➜ 17 octobre, 19 heures
➜B
icentenaire de la naissance
manifestation
ce concept qui a rendu possible la
méthode expérimentale hypothético-déductive : isoler un organe,
analyser toutes les influences reçues
par celui-ci et concevoir des dispositifs expérimentaux rationnels.
* Voir S&S n° 13, Bloc-notes p. 46, entretien
avec C. Bourgain
➜ 3 0 octobre-4 novembre
La Cité, Centre des Congrès
de Nantes
8 www.utopiales.org
Indésciences : n.f.
La nouvelle façon de vous parler de sciences
L’équipe d’Indésciences, constituée d’étudiants et soutenue par la FNEB (la Fédération des étudiants en sciences
exactes, naturelles et techniques), propose une revue
rigoureuse et accessible des actualités majeures dans le
monde des sciences fondamentales. Outre un blog, ils offrent une veille
scientifique sur les réseaux sociaux des évènements autour de la culture
scientifique et un podcast audio bientôt disponible.
➜ septembre 2013
8
www.indesciences.com
sur Twitter @indesciences et sur Facebook
septembre - octobre 2013 ● N° 16 ●
●
49
bloc-notes
➜
livres
➜ Être vivant : quelle aventure !
Louis-Marie Houdebine, ill. Yann Wehrling
août 2013, Le Pommier, coll. Les minipommes,
64 p., 8,90 €
➜ L’humain médicament
Aurélie Mahalatchimy, Emmanuelle Rial-Sebbag*
De la bactérie à l’homme, en passant par les dinosaures, une
explication de l’évolution destinée aux enfants de 9 à 12 ans.
juin 2013, Les éditions de la Maison des sciences
de l’homme, Quaderni n° 81, 124 p., 16 €
Cet ouvrage analyse comment les progrès de la science
conduisent à adapter le droit concernant les biotechnologies, en tenant compte des choix éthiques de la société.
* Voir S&S n° 10, Têtes chercheuses, « Emmanuelle Rial-Sabbag - Droit de recherche », p. 12-13
➜ Sciences, techniques et société
Christophe Bonneuil, Pierre-Benoît Joly
juin 2013, La Découverte, coll. Repères n° 620,
128 p., 10 €
Les sciences et les techniques ont transformé les modes de
vie, les relations de pouvoir, nos identités et nos imaginaires.
Comment analyser les liens complexes entre ce que l’on sait
du monde, ce que l’on souhaite y faire et la façon dont on le
gouverne ? Les auteurs, historien et sociologue des sciences (CNRS/EHESS),
d’une part, et économiste et sociologue (Inra), d’autre part, proposent un
panorama du champ « Sciences, techniques et société », très interdisciplinaire.
➜ Vie et mort des épidémies
Patrice Debré, Jean-Paul Gonzalez
juin 2013, Odile Jacob, 288 p., 23,90 €
Les auteurs retracent l’histoire des grandes épidémies
passées et démontrent que l’émergence de maladies
­infectieuses est un phénomène qui participe de la logique
même du vivant. Ils soulignent surtout que jamais nous
n’avons été aussi bien armés pour lutter contre elles.
➜ Conscience, mémoire et identité
Marie-Loup Eustache
L’auteur, philosophe, enseignante et chercheur Inserm,
s’est donné pour but de préciser les liens entre mémoire,
conscience et identité, en s’appuyant sur leurs aspects
philo­sophiques et sur les travaux actuels des neurosciences
­cognitives. Des cas pratiques sont proposés, notamment dans l’évaluation
et la prise en charge de patients ayant des troubles sévères de la mémoire.
➜ L’opinion publique et la science
À chacun son ignorance
Bernadette Bensaude-Vincent
août 2013, La Découverte Poche/Sciences humaines et
sociales, 240 p., 11 €
Catastrophe naturelle ou grave épidémie animale, un
expert est là pour éclairer l’opinion du public. D’un côté, il
y a ceux qui savent et, de l’autre, ceux qui ne savent pas et à
qui on demande seulement de croire à ce qu’on leur dit être vrai. L’auteur,
professeur d’histoire et de philosophie des sciences (Paris-X et EHESS),
retrace les moments forts de la confrontation entre science et public, qui
laisserait à penser que « la science a l’opinion qu’elle mérite ».
N°16
sptembre-octobre 2013
Abonnement gratuit, écrire à :
science-et-sante @ inserm.fr
50 ●
● N° 16 ● septembre - octobre 2013
août 2013, Belin/La Cité des sciences et de l’industrie,
coll. InfoGraphie, 80 p., 19 €
Cet ouvrage, avec la diversité des points de vue présentés, permet de se faire
son opinion sur l’assistance médicale à la procréation et sur les questions
de société que cette avancée médicale suscite.
➜ L’homme subconscient : le cerveau et ses erreurs
Yves Agid
septembre 2013, Robert Laffont, 288 p., 24 €
La subconscience, présente chez tous les animaux développés,
dont l’homme, dépend du fonctionnement de petites structures situées à la base du cerveau, les noyaux gris centraux.
Yves Agid, professeur de neurologie et de biologie cellulaire,
et son équipe ont mis au point de nouveaux traitements pour les personnes
qui souffrent de ces pathologies de la subconscience que sont, entre autres, les
maladies de Parkinson et d’Alzheimer.
➜ Médecine personnalisée
en cancérologie digestive
Vers un traitement à la carte
Olivier Bouché, Pierre Laurent-Puig
septembre 2013, Springer, 250 p., 29 €
juin 2013, Dunod, 216 p., 23 €
Directeur de la publication
Pr André Syrota
Directeur de la rédaction
Arnaud Benedetti
Rédacteur en chef
Yann Cornillier
Secrétaire de rédaction
Maryse Cournut
Chef de rubrique Julie Coquart
➜ La procréation assistée ?
Comprendre vite et mieux
Lise Barnéoud, préface de Pierre Jouannet,
ancien responsable du service de biologie de la
reproduction à l’hôpital Cochin
Proposer le bon traitement au bon patient au bon ­moment,
tel est le nouvel enjeu en cancérologie digestive. Une trentaine d’auteurs se sont associés pour proposer un ouvrage présentant la
médecine personnalisée dans ces types de cancer, selon l’âge, la fonction
rénale ou l’imagerie fonctionnelle mais aussi selon la pharmacocinétique, la
pharmacogénétique, la pharmacogénomique et les signatures moléculaires.
➜ Histoire du CNRS de 1939 à nos jours :
une ambition nationale pour la science
Denis Guthleben,
préface André Kaspi, Comité pour l’histoire
du CNRS
octobre 2013, Armand Colin poche, 560 p., 20 €
Depuis sa naissance, en 1939, c’est tout un pan de la science
française qui s’y est construit. Au fil de 70 ans d’histoire, le CNRS apparaît
ainsi tel qu’il est, et tel qu’il a toujours été : un laboratoire du mouvement
perpétuel. Entre réussites et espoirs, mais aussi débats et déboires, recherche
et politique de la recherche n’ont jamais cessé d’être remises sur la paillasse.
Journaliste Nathalie Christophe
Assistante d’édition
Coralie Baud
Ont collaboré à ce numéro
Stéphanie Arc, Natacha Bitton,
Alice Bomboy, Brigitte Dyan,
Halima Hadi, Véronique Méder,
Pascal Nguyên, Hélène Perrin,
Simon Pierrefixe,
Rubrique réalisée par Maryse Cournut
Fanny Pijaudier-Cabot,
Karl Pouillot, Nicolas Rigaud,
Aude Védrines
Conception graphique
et direction artistique
Ghislaine Salmon-Legagneur
Iconographie
Cécile Depot
Consultante projet
Françoise Harrois-Monin
Crédit de couverture
Illustration :
Stéphane Kiehl
Impression
Groupe Burlat
N° ISSN : 2119-9051
© VINCENT CALLEBAUT ARCHITECTURES / V. JONCHERAY
NANTES
UTOPIALES
DU 30 OCTOBRE AU 4 NOVEMBRE 2013 / LA CITE, LE CENTRE DES CONGRES DE NANTES
DU 24 septembre AU 1er decembre / le lieu unique
- Simone et Lucien Kroll : une architecture habitéee scienceetsante.indd 1
30/07/2013 16:31:11
101, rue de Tolbiac
75654 Paris Cedex 13
www.inserm.fr