Arts visuels : aborder la technique du lavis à l`école

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Arts visuels : aborder la technique du lavis à l`école
Aborder la technique du lavis à l’école
Une technique spécifique
Le terme de lavis recouvre aujourd’hui toute technique de peinture très mouillée,
très liquide.
Il s’agit de laver, de délaver une substance colorante d’une ou plusieurs couleurs
(encre de chine, aquarelle, brou de noix, encre sépia, pastel dilué…), l’eau servant
de diluant.
C’est en Extrême-Orient qu’est né le lavis, monochrome, le plus souvent à l’encre
de chine noire plus ou moins diluée à l’eau ce qui permettait des nuances
insoupçonnées sur le blanc du papier.
En Europe, les premiers lavis monochromes et les aquarelles polychromes sont
apparus au XVIème siècle, notamment à Venise.
Les différents types de lavis
 Utilisation de l’eau
- Diluer la couleur et l’appliquer sur papier sec, sans revenir en arrière.
- Mouiller le papier puis appliquer la couleur qui va se diluer.
- Poser la couleur sur papier sec et la retravailler avec un pinceau gorgé d’eau.
- Utiliser un papier absorbant pour éponger la couleur liquide sur le support.
Lavis et esquisse
Le dessin peut servir de motif de base. Le lavis, peint par-dessus, permet de
souligner certains aspects du dessin ou d’apporter du relief par le jeu d’ombre et de
lumière.
Inversement on peut aussi peindre les fonds en lavis, sur lesquels on dessine une
fois la peinture sèche.
La liberté du lavis
« Victor Hugo inventa une matière et des outils. A l’encre il mêla du café noir : c’est
que le café donne au ton une chaleur et une générosité exceptionnelles, il le vieillit,
il le colore. L’artiste se servait de plumes faussées ; c’est qu’elles crachent, c’est
qu’elles tracent ces linéaments capricieux et déterminent des accidents qui prêtent
au dessin des formes, une vie pittoresque et suggestive. Parfois il employait des
allumettes cassées, alors le trait devient généreux et large, il n’a plus rien des
maigreurs et des sécheresses d’une pointe rigide, plume ou crayon. Sur le dessin,
commencé par un détail infime, sans préparation d’ensemble, sans ébauche
préliminaire, Hugo versait largement l’encre et le café et travaillait dans cette nuit
mouvante qu’il répartissait à son gré, en tirant parti des hasards de la catastrophe. »
Henri Focillon, cité dans « Textes et documents pour la classe, n°43.
Propositions pour expérimenter en classe.
Inventer des ateliers en faisant varier les éléments suivants : état du support, état de
la matière utilisée pour mettre en couleurs, les outils, les gestes, la chronologie des
actions. (cf. tableau SMOG dernière page du document)
Et surtout :
Oser commencer.
Dire en faisant.
Prendre des photographies.
Prélever des échantillons.
Dire pour se souvenir.
Constituer un répertoire de traces.
Rechercher les variations possibles et relever les effets produits.
Accepter et provoquer le hasard.
Tenter d’obtenir les mêmes effets de façon consciente et contrôlée.
Enfin, à un moment, exiger la concrétisation d’une production en réutilisant ces
techniques en fonction d’un sens à donner.
(D’après Nicole Morin « Des techniques au service du sens »)
L’eau
La gestion de l’eau constitue une des difficultés de cette technique. La majorité des
enfants rencontreront des difficultés sur ce plan.
Eponges, bassines d’eau claire, essuie-tout seront à disposition pour absorber les
surplus d’eau.
Ce n’est peut-être que dans un second temps que l’éponge ou l’essuie-tout
pourront à leur tour servir d’outils.
Le support peut soit être humidifié à l’éponge avant l’application de la couleur, soit
être humidifié à l’aide du pinceau, soit être passé sous le robinet, soit trempé dans
une bassine.
On veillera à ce que chacun dispose de deux gobelets : un pour rincer l’outil, un
avec de l’eau pure pour humidifier le support et laver l’encre.
Laisser sécher sa production peut s’avérer utile, pour la reprendre plus tard et la
retravailler.
Le degré d’humidification du support a des incidences très importantes sur les
effets obtenus. Une observation attentive lors des ateliers suivie de mises en
commun permettra un affinement des compétences techniques.
On peut aussi suspendre des papiers gouachés sur un fil à l’extérieur par temps de
pluie et laisser la pluie « faire son œuvre ». Penser à poser de papiers de protection
au sol qui seront à leur tour « peints » par la pluie…
Les valeurs
Humidifier ou non la feuille à l’éponge ou au pinceau.
Pour obtenir différentes valeurs, passer un premier « jus » d’encre et d’eau (très
clair) sur la feuille. Ce premier « jus » constitue la valeur colorée la plus claire de la
production. On peut également choisir de réserver des parties blanches constituées
par le papier brut.
Absorber l’éventuel trop plein et laisser sécher (plus ou moins). Repasser une
deuxième couche un peu plus foncée en veillant à toujours réserver des blancs et
des zones de la première teinte. On peut répéter l’opération autant de fois qu’on le
souhaite jusqu’à obtention des noirs les plus soutenus.
Comme toujours en arts plastiques, cette technique classique peut être modifiée au
service d’une intention particulière et en fonction de l’âge des élèves.
Propositions pour composer des images
Dessiner en lavant ou en effaçant l’encre.
Si le support est en papier solide, on peut laver plusieurs fois les traces d’encre de
Chine. Attendre qu’elles sèchent un peu puis passer le support sous l’eau courante.
L’encre s’en va plus ou moins, fait des auréoles ou des marbrures.
Empreintes par pliage.
Sur un papier plutôt lisse, faire des taches d’encre ou de peinture diluée, au hasard
ou en les organisant consciemment, en anticipant le résultat. Plier le papier en 2. Le
déplier après avoir pressé du bout des doigts. Le hasard, plus ou moins aidé, a
produit des formes étranges que l’on peut, quand elles sont sèches, compléter
graphiquement au feutre ou au pinceau ou sur lesquelles on peut faire d’autres
impressions, en changeant l’orientation du pliage ou le nombre de plis…
Découpage/collage.
Demander aux élèves de découper ou déchirer des formes, des éléments, des
parties préférées dans les différent lavis. Puis les assembler pour composer une
nouvelle image, figurative ou non. Coller.
On peut aussi coller un des éléments sur un support blanc, de couleur, noir, de
papier kraft et demander aux élèves de continuer à fabriquer une image en utilisant
un feutre noir, des crayons de couleurs, de l’encre de chine, etc.
Dessiner.
Reprendre des essais de lavis et composer une image en utilisant le dessin ou le
graphisme :
- sans se préoccuper des tâches du fond
- en dessinant quelque chose en lien avec la ou les couleurs du support
- en dessinant, après observation des tâches, pour rendre visible à tous une forme
figurative, la tâche devenant arbre, personnage, collines, paysage, animal,
monstre…
On peut aussi photocopier un même lavis présentant des taches ou variations
intéressants et demander à tous les élèves de réagir graphiquement au feutre
d’écriture par exemple, avec une visée décorative ou figurative.
Dessiner avec des réserves.
Le principe est de protéger une partie du support avec un produit qui laisse une
trace imperméable qui va repousser les applications aqueuses : drawing-gum,
bougie, pastel à l’huile, craie à la cire. On peut aussi utiliser du ruban adhésif de
masquage de peintre en bâtiment.
Variations de traits.
Sur feuille imbibée d’eau, prendre un pinceau fin ou une tige de bois et réaliser un
dessin à l’encre. On voit alors se transformer le tracé initial : l’eau et l’encre
s’amalgament et donnent naissance à des formes diffuses. Plus le graphisme est fin,
plus les résultats sont insolites.
Mettre à sécher à plat (penser à intercaler une feuille de papier solide pour éviter
toute adhérence sur le support).
Puis, compléter le dessin au feutre d’écriture très fin, avec des encres colorées…
Sur lavis humide.
Sur un lavis encore humide, laisser tomber quelques gouttes d’eau. Observer les
effets produits, inventer différentes compositions en regroupant les gouttes, en les
espaçant, en les alignant, en les disposant en « petit chemin », en n’en laissant
tomber qu’une seule, à un endroit choisi, en fermant les yeux, etc.
Laisser sécher, reprendre au feutre fin ou simplement donner un titre.
Sur dessin.
Dessiner à l’encre et au pinceau (ou au porte-plume) un motif simple (personnage,
paysage, objet, arbre…) et laisser sécher.
Prendre un pinceau large, le tremper dans l’eau claire et repasser sur le dessin en
étalant bien cette eau. La couleur des traits du dessin va se répartir légèrement sur
ces zones, comme un voile monochrome.
Encres mélangées.
Bien mouiller la feuille de dessin, tremper un pinceau dans l’encre puis laisser
tomber quelques gouttes sur la feuille humide. Observer les résultats. Avant que la
feuille ne soit sèche, on peut poursuivre l’opération en rajoutant une autre couleur,
voire une troisième. Attention à ne pas mettre trop de couleurs qui, à force de
mélanges, donneraient une couleur « indéterminée ».
Tirer parti des accidents.
La difficulté de la gestion de l’eau peut entraîner des déchirures de feuilles. Ne pas
s’affoler… Selon le cas, continuer le travail ou « aggraver l’erreur » en continuant à
déchirer. Laisser sécher, coller sur un support noir ou de couleur en écartant la
brèche. Compléter sur le lavis en ajoutant des yeux et la déchirure devient gueule de
crocodile, sourire de monstre, etc.
En collant de tous petits morceaux de lavis déchirés, on peut évoquer une fourrure
d’animal, les feuilles d’un arbre, la surface de la mer…
Mise en valeur des froissages.
Froisser et plier un papier, le déplier et le défroisser. Passer de la craie grasse d’une
couleur pour révéler les reliefs, puis passer de l’encre de couleur.
Encre savonneuse.
Cette technique est un peu capricieuse. Mettre l’encre et un peu de produit vaisselle
dans une assiette, une barquette ou un bol. Faire des bulles en soufflant à l’aide de
pailles par exemple. Souffler dans le mélange jusqu’à ce que les bulles dépassent du
bol. Déposer une feuille sur le dessus du bol et l’enlever. Si tout se déroule comme
prévu, les bulles ont éclaté, imprimant des cercles colorés sur le papier.
Laisser sécher et éventuellement recommencer sur la même feuille avec une eau
savonneuse d’une autre couleur.
Encre et gros sel ou sel fin.
Verser le sel irrégulièrement ou selon des masses régulières sur l’encre encore
humide. Laisser sécher puis faire tomber le sel. Il aura absorbé l’encre là où il était
posé, ce qui aura délimité des taches claires plus ou moins grandes, plus ou moins
dispersées et créé des effets de matière.
Continuer en dessinant ou donner un titre.
Encre coulée ou soufflée.
Déposer des gouttes d’encre assez grosses sur le support avec un compte-gouttes,
une brosse, une seringue, un flacon percé…
Si le support est humide, les taches éloignées se rejoignent en mélangeant leurs
couleurs.
Si le support est sec, il faut aider à la diffusion des taches. Pour cela, on peut
soulever avec précaution un coin de la feuille et l’incliner dans la direction voulue ou
bien souffler dessus avec la bouche, une paille ou un tube de stylo. La naissance des
formes est influencée par la distance et l’angle d’inclinaison de la paille ; si on
souffle à l’horizontale, l’encre se disperse en arborescence, si on souffle à la
verticale, elle se disperse en rayonnant.
Si on froisse ou plie le papier avant de faire tomber les encres, on obtient d’autres
effets intéressants : les plis forment des canaux dans lesquels l’encre se concentre
donnant des teintes plus intenses.
Sur papier très mouillé, les auréoles sont plus grandes, plus floues. Sur papier
moins humide, l’encre se diffuse moins et produit des graphismes comme de fines
dentelles.
Diffusion sur colle.
Encoller généreusement le support avec de la colle à tapisserie. Faire des taches
d’encre ou de peinture très fluide. L’encre de Chine fait de très belles arabesques
avec la colle. On peut jouer avec la répartition et la densité des amas de colle vec
une raclette, un couteau à peindre ou un peigne qui laissera apparaître le support en
fonction des gestes de l’enfant.
« Faust et Méphisto » Paul Huet, XIXès
« Bridge » Pierre Alechinsky, 1994, encre et lavis.
Support
Sec
Humide
Très humide
+ ou – absorbant
+ ou – épais
Papier de différentes
épaisseurs
De différentes textures : lisse,
granuleux
Papier glacé, calque, rhodoïd…
Plié, déplié, froissé
Tendu sur un support dur
Posé sur un plan horizontal
Posé sur un plan vertical
Posé sur un plan incliné
De différents formats
De différentes formes
Déjà dessiné
Avec des écritures
Avec des tracés de craies
grasses
Vierge
Etc.
Matière
Encres + ou – diluées
1 ou plusieurs couleurs
Encre de chine
Aquarelle
Pigments naturels + eau et/ou
colle
Gouache diluée
Sanguines diluées
Fusain dilué
Pastels dilués
Feutres dilués
Colle à tapisserie teintée
Thé, café
Brou de noix
Ajouts de sel
Outil
Main, doigt (s)
Outils confectionnés
(manche+ éléments attachés)
Eponges
Pinceaux ronds, pointus,
Brosses de différentes tailles
Plumes
Tiges de bois fines ou pas
Coton tige
Vaporisateur
Petite cuillère
Seringue
Compte-gouttes
Brosses à dents
Bassine
Feuille d’essuie- tout
Geste
Appliquer
Mouiller
Remouiller
Rincer
Tracer
Balayer, étaler
Etirer
Souffler
Appuyer
Asperger
Arroser
Eclabousser
Passer sous l’eau du robinet
Faire couler
Faire goutter
Etirer
Verser
Tamponner
Etc.
Etc.
Etc.