Vol. 6, N°31, Juin/Juillet 2008

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Vol. 6, N°31, Juin/Juillet 2008
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Actualité bimestrielle du droit des religions
Responsable : SEBASTIEN LHERBIER-LEVY
Sommaire détaillé page suivante
Au sommaire notamment…
EDITORIAL
Mensonge de
l’épouse sur
sa virginité
et nullité du
mariage
Par Sébastien Lherbier-Levy
CourEDH
DÉCISION SUR LA RECEVABILITÉ, requête
no 15585/06, 4 mars 2008, Fatima EL
MORSLI contre la France
Port du voile et contrôle de sécurité
Conseil de la concurrence
Décision n° 08-D-09 du 6 mai 2008 relative
à des pratiques mises en oeuvre dans le secteur
des pompes funèbres à Lyon et dans son
agglomération
VOL.6
N°31 Juin / Juillet 2008
ACTUALITE
Dérives sectaires: guide pratique destiné aux
collectivités territoriales
Signature du premier contrat d'association entre
l'Etat et un lycée musulman
JURISPRUDENCE
Tribunal administratif de Marseille
22 avril 2008
ASSOCIATION DIOCESAINE DE
L'ARCHIDIOCESE D'AIX-EN-PROVENCE et
autre
Refus légitime du maire de mettre fin aux visites
organisées sur le toit-terrasse d’une église, non
affecté au culte, sans l’accord préalable du
ministre du culte
Tribunal Administratif de Strasbourg
14 avril 2008, M. Metin K.
Refus d’autorisation d’exploiter une licence de
IVème catégorie pour un établissement situé à
90 mètres d’un lieu de culte musulman
Conseil d'Etat, 27 juin 2008, Mme M.
Une pratique radicale de la religion est
incompatible avec l’acquisition de la nationalité
française
© La lettre du droit des religions n°31 juin / juillet 2008
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SOMMAIRE
N°31
Juin / Juillet 2008
EDITORIAL
p.008
Mensonge de l’épouse sur sa virginité et nullité du mariage
Par Sébastien Lherbier-Levy
ACTUALITE EN BREF Mai 2008
p.011
• Quelques recommandations de la Commission Bouchard-Taylor
• Photo de La Cène: Michel Lafon condamné à payer 175.000 euros supplémentaires
• Les juges danois ne doivent porter aucun signe religieux
• La France critiquée à l'ONU pour la loi de 2004 sur la laïcité
• Le TA de Bastia suspend la construction d'un lieu de culte pour les témoins de Jéhovah
• Une commune peut-elle exploiter sans accord du ministre du culte, l'accès au toit de l'église ?
jugement du TA de Marseille
• La Mosquée de Paris refuse de participer aux élections des CRCM du Grand Est
• Le Premier ministre danois réservé sur le port du foulard par des juges
• Séisme de Marmara , "sanction divine": la Turquie condamnée par la CEDH
ACTUALITE EN BREF Juin 2008
p.015
• Dérives sectaires: guide pratique destiné aux collectivités territoriales
• Un musulman fait retirer un crucifix dans une clinique catholique de Grenoble.
• Gîte fermé à des femmes voilées: procès en appel renvoyé à septembre
• Australie: polémique sur le coût des JMJ en présence du pape
• Danemark: Caricatures de Mahomet, des musulmans déboutés en appel
• Tournoi interdit aux hommes annulé: le maire a pris "la bonne décision" (Laporte)
• Polémique autour de l'annulation d'un tournoi de basket réservé aux femmes
• Polémique sur la religion d'un candidat à un poste d'expert onusien
• Signature du premier contrat d'association entre l'Etat et un lycée musulman
• La critique de la charia en question devant le Conseil des droits de l'homme (ONU)
• Grande-Bretagne: recours d'une adolescente pour pouvoir porter un bracelet sikh à l'école
• Roumanie: les symboles religieux restent dans les écoles (Cour suprême)
• Turquie: un amendement sur le port du foulard à l'Université annulé
• Fondation Elahi : l'action pour diffamation contre M.Aeschliman jugée irrecevable
• Le TGI de Lille annule un mariage sur requête d’un mari de confession musulmane trompé sur la
virginité de sa femme
• Litige sur les bâtiments d'une mosquée à Montreuil: le recteur débouté
• Mosquée de Belfort: annulation du bail signé avec l'association musulmane
PARLEMENT EUROPEEN Questions
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p.024
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PARLEMENT EUROPEEN Activités
•
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p.026
Asma Jahangir : établir des ponts entre les communautés 23-06-2008 - 07:06
Asma Jahangir : « Donner la parole à l’immense majorité qui veut vivre dans la diversité »
Relations extérieures - 23-06-2008 - 16:56
La Turquie doit accélérer ses réformes 26-05-2008 - 06:05
ASSEMBLEE NATIONALE Question écrites Mai 2008
p.032
•Question N° : 8331 de M. Villain François-Xavier(Députés n'appartenant à aucun groupe - Nord)
•Question N° : 17560 de Mme Zimmermann Marie-Jo(Union pour un Mouvement Populaire Moselle)
• Question N° : 21443 de M. Morisset Jean-Marie(Union pour un Mouvement Populaire - DeuxSèvres)
•Question N° : 23380 de M. Saint-Léger Francis(Union pour un Mouvement Populaire - Lozère)
•Question N° : 16493 de M. Grellier Jean(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - DeuxSèvres)
• Question N° : 11070 de M. Remiller Jacques(Union pour un Mouvement Populaire - Isère)
• Question N° : 23116 de M. Raoult Éric(Union pour un Mouvement Populaire - Seine-Saint-Denis)
• Question N° : 17914 de M. Gaubert Jean(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Côtesd'Armor)
•Question N° : 6296 de M. Raoult Éric(Union pour un Mouvement Populaire - Seine-Saint-Denis)
•Question N° : 15864 de M. Liebgott Michel(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Moselle)
•Question N° : 17050 de M. Roy Patrick(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Nord) QE
•Question N° : 22206 de Mme Zimmermann Marie-Jo(Union pour un Mouvement Populaire Moselle)
•Question N° : 22019 de M. Perrut Bernard(Union pour un Mouvement Populaire - Rhône) QE
•Question N° : 15145 de Mme Bousquet Danielle(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche Côtes-d'Armor)
•Question N° : 23856 de M. Poisson Jean-Frédéric(Union pour un Mouvement Populaire - Yvelines)
•Question N° : 23657 de Mme Zimmermann Marie-Jo(Union pour un Mouvement Populaire Moselle)
ASSEMBLEE NATIONALE Question écrites Juin 2008
p.041
•Question N° : 24179 de M. Perez Jean-Claude(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Aude)
•Question N° : 24331 de M. Degauchy Lucien(Union pour un Mouvement Populaire - Oise)
•Question N° : 24242 de M. Vanneste Christian(Union pour un Mouvement Populaire - Nord)
•Question N° : 24868 de M. Jung Armand(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Bas-Rhin)
•Question N° : 24673 de M. Dupont-Aignan Nicolas(Députés n'appartenant à aucun groupe Essonne)
•Question N° : 24670 de M. Lesterlin Bernard(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Allier)
•Question N° : 25416 de M. Mourrut Étienne(Union pour un Mouvement Populaire - Gard)
•Question N° : 25219 de M. Cuvillier Frédéric(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Pas-deCalais)
•Question N° : 25340 de M. Dord Dominique(Union pour un Mouvement Populaire - Savoie)
•Question N° : 25256 de M. Vampa Marc(Nouveau Centre - Eure)
•Question N° : 3406 de Mme Poletti Bérengère(Union pour un Mouvement Populaire - Ardennes)
•Question N° : 25863 de M. Perrut Bernard(Union pour un Mouvement Populaire - Rhône)
•Question N° : 25817 de M. Rouquet René(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Val-deMarne)
•Question N° : 25789 de M. Juanico Régis(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Loire)
•Question N° : 25764
de M. Bartolone Claude(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche Seine-Saint-Denis)
SENAT Questions écrites
p.049
• Principe de laïcité au sein des écoles, Question écrite n° 04761 de M. Yves Détraigne (Marne UC-UDF)
• Conformité au droit local du subventionnement par une commune d'une association religieuse
oeuvrant sur le territoire communal, Question écrite n° 04483 de M. Jean Louis Masson (Moselle © La lettre du droit des religions n°31 juin / juillet 2008
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NI)
• Annulation d'un mariage à Lille en violation manifeste de la législation, Question écrite n° 04697
de M. Gérard Delfau (Hérault - RDSE)
REGLEMENTATION
p.051
• Loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit
communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations EXTRAIT
• Circulaire n° NOR/INT/A/08/00038/C du ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des
collectivités territoriales du 19 FEVRIER 2008, relative à la Police des lieux de sépulture :
Aménagement des cimetières - Regroupements confessionnels des sépultures
• Circulaire n° 2008/002 du 21 avril 2008 relative à l’utilisation des édifices de culte appartenant à
l’État à des fins non cultuelles.
ASSEMBLEE NATIONALE Propositions de loi
p.064
• ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 TREIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 29 avril 2008. PROPOSITION DE LOI
CONSTITUTIONNELLE visant à interdire à un parti politique de se réclamer d’une
religion ou d’une ethnie
• ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 TREIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 7 février 2008. PROPOSITION DE LOI
visant à promouvoir la laïcité dans la République
SENAT
p.077
Séance du 18 juin 2008 (compte rendu intégral des débats) Projet de loi constitutionnelle de
modernisation des institutions de la Ve République
CONSEIL DE LA CONCURRENCE
p.085
Décision n° 08-D-09 du 6 mai 2008 relative à des pratiques mises en oeuvre dans le secteur des
pompes funèbres à Lyon et dans son agglomération
JURISPRUDENCE ADMINITRATIVE
p.129
Tribunal administratif de Nantes, ord. Ref., N°08201, 18 janvier 2008, L'ASSOCIATION
SPIRITUELLE DE L'EGLISE SCIENTOLOGIE DU CENTRE OUEST
Pour justifier sa demande tendant à ce que l’arrêté du maire d’Angers soit suspendu,
l'ASSOCIATION SPIRITUELLE DE L'EGLISE SCIENTOLOGIE DU CENTRE OUEST fait valoir que cet
arrêté lui interdit totalement d’exercer la liberté religieuse et qu’il y a urgence à faire cesser cette
situation ; qu’il ressort toutefois des pièces du dossier que le dit arrêté a fait l’objet d’un affichage
régulier en mairie depuis le 6 novembre 2007 ; que ce n’est que le 18 janvier 2008, soit plus de
deux mois après l’affichage que l’association requérante a saisi le tribunal d’une demande en
référé ; que, dans ces conditions l’urgence ne peut être considérée comme établie; que, par suite,
la requête de L’ASSOCIATION SPIRITUELLE DE SCIENTOLOGIE DU CENTRE OUEST doit être
rejetée.
Tribunal administratif de Melun, n°0504859/5 et n° 0603837/5, 25 janvier 2008, Mme
Marie-Henriette E.
Le motif de l’exclusion temporaire de fonctions de Mme E. pour une durée de six mois résulte, non
pas de son appartenance à l’église adventiste du 7ème jour, mais de sa volonté persistante de ne
pas assurer son service le samedi et, ainsi, de ne pas se conformer à la nouvelle organisation du
travail mise en œuvre dans son service fin décembre 2004 ; que, dès lors, Mme E. ne peut
utilement, pour contester la légalité de la décision attaquée, invoquer le principe de la liberté de
conscience inscrit dans la Constitution, ni la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, ni la
convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme, ni les dispositions de l’article 1er de
la loi du 9 décembre 1905, ni celles de l’article 6 de la loi du 13 juillet 1983 modifiée précitée, ni
faire valoir l’absence de trouble à l’ordre public résultant de ses absences du service le samedi.
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Tribunal Administratif de Strasbourg, n° 0404876, 14 avril 2008, M. Metin K.
Il ressort des pièces du dossier qu’un lieu de culte musulman existe depuis 1978 au 41 rue (…) à
Mulhouse ; que l’établissement « Mélissa » pour lequel M. K. a sollicité une autorisation
d’exploitation d’une licence de IVème catégorie, situé au 26 rue (…), se trouve à 90 mètres de ce
lieu de culte ; que les dispositions précitées excluent toute application du Concordat de 1802,
nonobstant la circonstance que celui-ci soit applicable en Alsace-Moselle ; que, dès lors, M. K. n’est
pas fondé à soutenir que c’est à tort que le sous-préfet de Mulhouse lui a refusé l’autorisation
d’exploiter une licence de IVème catégorie pour son établissement.
Tribunal Administratif de Bastia, ord. Ref., n°0800412, 2 mai 2008, M. et Mme Nicolas
P.
et autres
Suspension de l’exécution de l’arrêté en date du 23 janvier 2007, par lequel le maire de la
commune de Lucciana a accordé un permis de construire à l’association des témoins de
Jéhovah dans la mesure où les moyens tirés de la méconnaissance de l’article 4 de la loi n° 2000321 du 12 avril 2000 modifiée, du 7° de l’article R. 421-2 du code de l’urbanisme alors en vigueur,
relatif à la notice permettant d'apprécier l'impact visuel du projet, du II de l’arrêté du 1er août
2006 pris pour l’application de l’article R. 111-19-2 du code de la construction et de l’habitation et
relatif à la largeur minimale des portes principales des locaux pouvant recevoir cent personnes ou
plus et de l’insuffisance des emplacements réservés au stationnement sont de nature à faire naître
un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée.
Tribunal Administratif de Nice, n°0404982, 6 mai 2008, ASSOCIATION « CENTRE
CHRETIEN SOUFFLE NOUVEAU »
Le préfet n’établit pas que l’association n’a pas exclusivement pour objet l’exercice d’un culte,
qu’elle mène d’autres activités que celles en relation avec cet objet et que certaines de ses
activités pourraient porter atteinte à l’ordre public ; que, dans ces conditions, l’association
requérante est fondée à demander l’annulation tant de l’arrêté préfectoral du 26 mai 2004, que de
la décision par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a implicitement rejeté son recours gracieux .
Tribunal administratif de Marseille, n°0502887, 22 avril 2008, ASSOCIATION
DIOCESAINE DE L'ARCHIDIOCESE D'AIX-EN-PROVENCE et autre
Refus du maire de mettre fin aux visites organisées sur le toit-terrasse de l’église des SaintesMaries de la Mer. La commune des Saintes-Maries de la Mer a ouvert au public depuis 1963 le toitterrasse de l’église forteresse, dont la gestion de cette activité à caractère touristique a été
confiée, dans le cadre d’une délégation de service public, à une société d’économie mixte, et
auquel les visiteurs accèdent par une tour extérieure au moyen d’un escalier indépendant
dépourvu de toute communication avec les parties de l’église effectivement affectées au culte ;
qu’ainsi, en refusant implicitement de mettre un terme à l’organisation des visites dans la partie de
l’édifice non affectée à l’exercice du culte et dont l’utilisation ne nécessitait pas de ce fait l’accord
préalable du ministre du culte, le maire des Saintes-Maries de la Mer n’a pas méconnu les
prescriptions sus-rappelées et n’a, par suite, pas entaché sa décision d’illégalité.
Tribunal administratif de Melun, n°0700177/5, 26 mars 2008, M. Daljit S.
Le sous-turban sikh, bien que d’une dimension plus modeste que le turban traditionnel et de
couleur sombre, ne peut être qualifié de signe discret ; que, dans ce contexte, l’interdiction légale
pouvait être régulièrement opposée à l’élève dès lors qu’en persistant à porter de façon
permanente le sous-turban, et en refusant d’y renoncer, il adoptait une tenue le faisant
reconnaître immédiatement comme appartenant à la religion sikhe, et cela sans que
l’administration n’ait à s’interroger sur la volonté de l’intéressé d’adopter une attitude de
revendication de sa croyance, ni à établir que son attitude était de nature à troubler l’ordre public ;
qu’il s’ensuit qu’en confirmant la sanction disciplinaire contestée le recteur de l’académie de Créteil
a légalement tiré les conséquences de la violation par Jasmeet S. de l’article L. 141-5-1 du code de
l’éducation.
Tribunal administratif de Lyon, n°0602346 et 0602383, 15 mai 2008, M. Jean-Claude
D., FEDERATION ARDECHOISE DE LIBRE PENSEE
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Les associations cultuelles ne peuvent, sous quelque forme que ce soit, recevoir des subventions
de l'Etat, des départements et des communes ; que l’association arabo-musulmane de Tournonsur-Rhône, dont le but est notamment d’édifier un édifice à caractère cultuel sur le territoire de la
commune est une association cultuelle, au sens des dispositions précitées ; que la mise à
disposition des parcelles litigieuses pour un loyer annuel d’un euro, manifestement inférieur au
prix du marché, constitue une subvention prohibée
Cour administrative d’appel de Lyon, n°05LY01218, 10 juin 2008, Consorts I.
Invoquant ses convictions religieux pour s’opposer durant près de 30 minutes à toute présence
masculine dans la salle d’accouchement, notamment des médecins obstétriciens et anesthésistes
et de l’interne de garde, malgré les demandes instantes de ces derniers, le requérant a ainsi fait
obstacle aux examens nécessaires qui auraient permis de constater la survenue d’une anoxie
fœtale et de prévenir, par une césarienne prophylactique, les graves complications neurologiques
dont a été victime le jeune M. ; qu’en ne faisant pas appel immédiatement aux forces de police
pour expulser M. I., l’hôpital n’a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité ;
qu’ainsi l’état de l’enfant est totalement imputable à l’attitude de M. I. et M. et Mme I. ne peuvent
rechercher la responsabilité pour faute ou sans faute du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse.
Cour administrative d’appel de Versailles, n° 06VE01149, 14 avril 2008, Mme
Jacqueline H.
Les refus réitérés de Mme H. d’obéir à l’ordre de retirer sa coiffe, qu'elle se borne à justifier par
des considérations d'hygiène, étaient constitutifs d’une faute de nature à justifier une sanction
disciplinaire.
CE, ord. Ref., n° 315631, 6 mai 2008, M. Mouhamed B.
La fermeture d’un lieu de prière dans une résidence du CROUS fréquenté par des étudiants
musulmans, justifiée par des motifs de sécurité, ne porte aucune atteinte manifestement illégale
aux libertés fondamentales de culte et de réunion, le Conseil d'État souligne que lors des débats
au cours de l’audience publique, l’administration s’est montrée disposée à examiner avec
l’association requérante les conditions dans lesquelles une convention pourrait être conclue pour
qu’elle dispose de locaux permettant aux étudiants de pratiquer leur culte. De ces intentions de
trouver une solution au litige, le Conseil d'État déduit que le dossier ne fait pas ressortir d’atteinte
grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale qu’il y aurait urgence à faire cesser.
Conseil d'Etat, n°286798, 27 juin 2008, Mme M.
Si Mme M. possède une bonne maîtrise de la langue française, elle a cependant adopté une
pratique radicale de sa religion, incompatible avec les valeurs essentielles de la communauté
française, et notamment avec le principe d’égalité des sexes ; qu’ainsi, elle ne remplit pas la
condition d’assimilation posée par l’article 21-4 du code civil ; que, par conséquent, le
gouvernement a pu légalement fonder sur ce motif une opposition à l’acquisition par mariage de la
nationalité française de Mme M.
JURISPRUDENCE JUDICIAIRE
p.173
Cour de cassation, chambre criminelle, 15 avril 2008, N° de pourvoi: 07-86909
La distance séparant l’église paroissiale et le débit de boissons est de 17,70 mètres. Une telle
distance est si manifestement inférieure à celle fixée par l’arrêté préfectoral, qu’aucune
contestation fondée sur une éventuelle imprécision du plan ne saurait avoir d’incidence sur l’issue
du présent litige.
Cour de cassation, chambre criminelle, 26 mars 2008, N° de pourvoi: 06-87838
La diffamation visant une personne ne peut rejaillir sur une autre que dans la mesure où les
imputations diffamatoires lui sont étendues, fût-ce de manière déguisée ou dubitative, ou par voie
d’insinuation. Tel n’est pas le cas à l’égard du maire d’une commune lorsque les propos par lui
incriminés rendent compte de l’inauguration par ses soins du parvis d’une cathédrale dédié à un
pape, mais ne comportent que des critiques visant les positions attribuées à ce dernier dans le
domaine de la contraception et leurs lourdes répercussions en termes de santé publique
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Cour de cassation, chambre criminelle, 6 mai 2008, N° de pourvoi: 07-82251
Francis Y..., maire-adjoint chargé de la communication de la ville d’Asnières, a été poursuivi pour
diffamation envers des particuliers, à la suite de l’expédition par voie postale, en novembre 2003,
aux résidents de la commune d’Asnières, d’un document mettant en cause la fondation Ostad Elahi
- éthique et solidarité humaine et Farhad X... ; que le tribunal correctionnel a condamné le
prévenu pour deux des passages poursuivis.
Pour relaxer le prévenu au bénéfice de la bonne foi, l’arrêt a notamment pris en compte, au titre
du sérieux de l’enquête, les informations contenues dans le rapport déclassifié de la direction
centrale des renseignements généraux daté du 7 septembre 2006, et dans celui de la mission
interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES) qui indique, en
première page, “faire le point à la date du 20 septembre 2006, sur les éléments recueillis depuis le
mois de novembre 2005” ;
EN statuant ainsi, alors que ces documents étaient postérieurs à la diffusion du tract litigieux, la
cour d’appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé.
Cour de cassation, chambre criminelle, 17 juin 2008, N° de pourvoi: 07-86330
La communauté chrétienne des Béthélites et plusieurs associations locales pour le culte des
témoins de Jéhovah ont fait citer Catherine Y..., devant le tribunal correctionnel, du chef de
diffamation publique envers des particuliers, en raison de propos publiés dans la presse ; que le
tribunal a relaxé la prévenue et débouté les parties civiles ; qu’ appel a été interjeté par ces
dernières. Attendu qu’ à l’ audience des débats tenue le 30 mai 2007, la prévenue a excipé de la
prescription de l’ action des parties civiles poursuivantes, en faisant valoir que plus de trois mois s’
étaient écoulés entre leur déclaration d’ appel formée le 31 octobre 2006 et la citation délivrée à la
prévenue, à la requête du ministère public, le 15 mai 2007 ; Attendu que, pour écarter cette
exception, l’ arrêt retient que la signification à la prévenue, par actes d’ huissier des 24 janvier et
23 avril 2007, des conclusions et demandes que les parties civiles entendaient formuler au soutien
de leur appel, constitue une manifestation non équivoque de leur part d’ interrompre la
prescription et de leur volonté de poursuivre l’ action en diffamation engagée ; Mais attendu qu’
en conférant un effet interruptif de prescription à des conclusions, la cour d’ appel a méconnu le
principe ci- dessus énoncé ; D’ où il suit que la cassation est encourue ; qu’ elle aura lieu sans
renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d’ appliquer directement la règle de droit et de
mettre fin au litige, ainsi que le permet l’ article L. 411-3 du code de l’ organisation judiciaire.
CourEDH
p.190
BLBLIOGRAPHIE
p.195
INDEX
p.198
CourEDH, TROISIÈME SECTION, DÉCISION SUR LA RECEVABILITÉ, requête no
15585/06, 4 mars 2008, Fatima EL MORSLI contre la France
L’obligation de retirer son voile à des fins de contrôle de sécurité était nécessairement très limitée
dans le temps. Par ailleurs, quant à la proposition faite par l’intéressée de retirer son voile
uniquement en présence d’une femme, à supposer que les autorités consulaires aient été saisies
de cette question, le fait pour ces dernières de ne pas avoir chargé un agent féminin de procéder
à l’identification de la requérante n’excède pas la marge d’appréciation de l’Etat en la matière. La
Cour conclut que la requérante n’a ainsi pas subi une atteinte disproportionnée dans l’exercice de
son droit à la liberté de religion.
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EDITORIAL
Par Sébastien Lherbier-Levy
Mensonge de l’épouse sur sa virginité et nullité du mariage
Le Tribunal de Grande Instance (TGI) de Lille a rendu le 1er avril 2008, un jugement1 pour le moins
controversé. En l’espèce, le requérant, que les médias et non le jugement, ont présenté comme étant de
confession musulmane, demandait la nullité de son mariage après que son épouse lui ait avoué avoir menti
sur sa virginité. Les juges lillois ont ainsi accédé à sa requête, retenant qu’« en l’occurrence, (l’épouse)
acquiesçant à la demande de nullité fondée sur un mensonge relatif à sa virginité, il s’en déduit que cette
qualité avait bien été perçue par elle comme une qualité essentielle déterminante du consentement de [son
mari] au mariage projeté ; dans ces conditions, il convient de faire droit à la demande de nullité du mariage
pour erreur sur les qualités essentielles du conjoint ». Une large part de l’opinion publique en a conclu, un
peu hâtivement peut-être, que cette décision revenait purement et simplement à interdire aux femmes non
vierges de se marier. Cette inquiétude a été relayée récemment par deux parlementaires. Ainsi, par une
question écrite2, le sénateur Delfau a attiré l’attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice
« sur la violation manifeste de la législation française concernant le statut de la femme dans notre société
par le jugement du tribunal de grande instance de Lille », s’inquiétant du fait que « l'arrêt de Lille, s'il était
confirmé, ouvrirait la voie à une régression intolérable de la place de la femme dans notre pays.» M. le
député Rouquet3 quant à lui s’est étonné que le code civil ait pu fonder une telle décision, qualifiée de
« désastreuse jurisprudence » enfermant encore davantage les jeunes filles et les femmes. L’article 180,
alinéa 2 du Code civil qui organise la nullité du mariage dispose depuis 1975 que « S’il y a eu erreur dans la
personne, ou sur des qualités essentielles de la personne, l’autre époux peut demander la nullité du
mariage ». Il revient aux tribunaux de déterminer quelles sont les qualités si essentielles (par opposition à
celles seulement accessoires) au mariage pour que l'erreur sur l'une d'elles puisse entraîner la nullité du
mariage. Pour qu'il y ait annulation du mariage, il faut encore que cette erreur ait été déterminante, c'est-àdire que la « victime » de l'erreur n'eût jamais donné son consentement si elle avait connu l'existence de
cette qualité substantielle à ses yeux. Comment déterminer ce caractère essentiel ? Pour être prise en
considération, la qualité de la personne doit être essentielle en vue du mariage. Il s'agit donc d'apprécier la
qualité de la personne eu égard à l'institution du mariage. C’est ce qu’a retenu le TGI de Lille en 1962 :
“Cette erreur doit être appréciée dans tous les cas eu égard aux fins propres du mariage telles qu'elles sont
définies par la loi ou résultent des principes moraux généralement admis”.4 Autrement dit, les qualités de la
personne doivent être essentielles pour la victime mais aussi…pour la « conscience populaire »5. S’agissant
de la victime, la preuve peut résulter du comportement du conjoint après la découverte de l'erreur. Dans
l’espèce qui nous intéresse, l’épouse a reconnu sans difficulté sa manœuvre dolosive, sachant l’importance
que sa virginité représentait pour son époux. Cette seule circonstance semble avoir motivé la décision du
TGI qui a prononcé l’annulation du mariage à l’aune d’un critère subjectif, élevant la virginité au rang de
qualité « essentielle »…. de l’époux. En ne prenant pas en compte la part d’objectivité, reflet des « principes
moraux » de l’époque, le TGI a regardé le mariage comme un simple contrat. A l’évidence, pour la
« conscience populaire », la virginité de la femme n'est pas (plus) une qualité essentielle en 2008.
Convenons qu’en présence de tant de subjectivité, c'est le divorce plus que la nullité de l’union qui doit être
demandé par l'époux qui s'est ou a été trompé. Par ordonnance en date du 19 juin 2008, la cour d’appel de
Douai6 a prononcé l’arrêt de l’exécution provisoire du jugement. L’affaire sera examinée en appel le 22
septembre 2008.
1
Recueil Dalloz du 22 mai 2008, n° 20, p. 1389 ; Philippe Malaurie, professeur émérite à l'université Panthéon-Assas
(Paris II), « Mensonge sur la virginité et nullité de mariage », JCP Edition Générale n° 26, 25 Juin 2008, actualité 440 ;
François Terré, membre de l'Institut, Le libre choix du conjoint, Edition Générale n° 26, 25 Juin 2008, actualité 439 ; JCP
G 2008, II, 10122, note G. Raoul-Cormeil.
2
Sénat Question écrite n° 04697 de M. Gérard (Hérault - RDSE), publiée dans le JO Sénat du 05/06/2008 - page 1091
3
Assemblée Nationale, 13ème législature, 30 juin 2008, Question N° : 25817 de M. Rouquet René Question publiée au
JO le : 24/06/2008 page : 5328
4
TGI Lille, 17 mai 1962 : D. 1962, sommaire p. 10.
5
Philippe Malaurie, professeur émérite à l'université Panthéon-Assas (Paris II), « Mensonge sur la virginité et nullité de
mariage », JCP Edition Générale n° 26, 25 Juin 2008, actualité 440
6
Cour d’appel de Douai, n° 95/8, ord. réf., 19 juin 2008
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TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE
de Lille,
1er avril 2008
n° 07-08458
LE TRIBUNAL : - Exposé des faits et de la procédure : - X..., de nationalité française, s'est marié avec Y... le
8 juillet 2006 à [...]. Par acte du 26 juillet 2006, il a fait assigner Y... devant le tribunal de céans, arguant
avoir été trompé sur les qualités essentielles de sa conjointe. L'affaire a fait l'objet d'une radiation le 4
septembre 2007 pour défaut de diligences des parties, avant d'être réenrôlée à la demande de X...
Prétentions des parties : - Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 31 octobre 2007, X...
sollicite : l’annulation du mariage sur le fondement de l'article 180 du code civil, que chacune des parties
supporte ses propres dépens. Il indique qu'alors qu'il avait contracté mariage avec Y... après que cette
dernière lui a été présentée comme célibataire et chaste, il a découvert qu'il n'en était rien la nuit même des
noces. Y... lui aurait alors avoué une liaison antérieure et aurait quitté le domicile conjugal. Estimant dans
ces conditions que la vie matrimoniale a commencé par un mensonge, lequel est contraire à la confiance
réciproque entre époux pourtant essentielle dans le cadre de l'union conjugale, il demande l' annulation du
mariage.
Selon ses dernières écritures signifiées le 4 septembre 2007, Y... demande au tribunal de : lui donner acte
de son acquiescement à la demande de nullité formée par X..., dire que chacune des parties supportera la
charge de ses propres dépens, ordonner l'exécution provisoire du jugement.
La procédure de mise en état a été clôturée par ordonnance du 8 janvier 2008. Après avoir reçu
communication de l'affaire, le Ministère public a visé la procédure le 26 octobre 2007 et a déclaré s'en
rapporter à justice.
Sur ce :
- Attendu qu'aux termes de l'alinéa 2 de l'article 180 du code civil, s'il y a eu erreur dans la personne, ou sur
des qualités essentielles de la personne, l'autre époux peut demander la nullité du mariage ; que, par
ailleurs, l'article 181 - dans sa rédaction issue de la loi du 4 avril 2006 applicable à la cause - précise qu'une
telle demande n'est plus recevable à l'issue d'un délai de cinq ans à compter du mariage ou depuis que
l'époux a acquis sa pleine liberté ou que l'erreur a été par lui reconnue ;
- Attendu qu'il convient en premier lieu de constater qu'en l'occurrence, l'assignation a été délivrée avant
l'expiration d'un délai de cinq années suivant la célébration du mariage et la découverte de l'erreur ; que
l'action en annulation du mariage s'avère dès lors recevable ;
- Attendu qu'en second lieu il importe de rappeler que l'erreur sur les qualités essentielles du conjoint
suppose non seulement de démontrer que le demandeur a conclu le mariage sous l'empire d'une erreur
objective, mais également qu'une telle erreur était déterminante de son consentement ;
Attendu qu'en l'occurrence, Y... acquiesçant à la demande de nullité fondée sur un mensonge relatif à sa
virginité, il s'en déduit que cette qualité avait bien été perçue par elle comme une qualité essentielle
déterminante du consentement de X... au mariage projeté ; que dans ces conditions, il convient de faire
droit à la demande de nullité du mariage pour erreur sur les qualités essentielles du conjoint ;
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Sur les dépens : - Attendu que conformément à l'accord des parties, chacune conservera à sa charge les
dépens qu'elle a exposés dans le cadre de la présente instance ;
Sur la demande d'exécution provisoire :
- Attendu que les parties s'accordant pour voir prononcer l' annulation de leur mariage, l'exécution
provisoire du jugement sera ordonnée ainsi que l'a requis Y... ;
Par ces motifs, le tribunal, statuant en audience publique, contradictoirement et en premier ressort, après
communication de l'affaire au ministère public, prononce l' annulation du mariage célébré le 8 juillet 2006 à
[...] (acte n° 50) entre X... et Y..., ordonne la transcription du présent jugement en marge de l'acte de
naissance des parties et de l'acte de mariage [...].
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Actualité en bref
Mai 2008
ÕÕÕ
25 mai 2008
Quelques recommandations de la Commission Bouchard-Taylor
ÕÕÕ
-Mettre sur pied un comité d'enquête indépendant pour faire la lumière sur les pratiques des
ordres professionnels en matière de reconnaissance des diplômes.
-Que l'Etat adopte une loi ou un énoncé pour établir l'interculturalisme comme modèle devant
présider aux rapports interculturels au Québec.
-Que le gouvernement adopte un Livre blanc sur la laïcité définissant ses principes.
-Qu'il soit interdit aux policiers, juges, procureurs de la Couronne et gardiens de prison de porter
des signes religieux.
-Qu'il soit permis aux enseignants, fonctionnaires et professionnels de la santé de porter des
signes religieux.
-Que le crucifix au-dessus du siège du président de l'Assemblée nationale soit retiré.
-Que les conseils municipaux abandonnent la récitation de la prière.
-Que l'Etat intensifie ses efforts de régionalisation de l'immigration.
-Que l'Etat intensifie ses efforts en matière de francisation et d'intégration des immigrants.
-Que l'Etat octroie plus de moyens à la Commission des droits de la personne et au Conseil des
relations interculturelles.
-Que la Commission des droits de la personne produise un guide établissant des repères pratique
à l'intention des gestionnaires.
20 mai 2008
Photo de La Cène: Michel Lafon condamné à payer 175.000 euros supplémentaires
L'éditeur Michel Lafon, qui avait été condamné à verser quelque 30.000 euros de dommagesintérêts à Brigitte Niedermair pour avoir utilisé sur un ouvrage sa célèbre photo inspirée de La
Cène, a été condamné à lui verser 175.000 euros supplémentaires pour avoir tardé à retirer la
couverture contrefaisante.
Le 5 octobre, la 3e chambre civile du tribunal de grande instance de Paris avait estimé qu'en
faisant figurer cette photo, intitulée "L'Ultima Cena", sans l'accord de son auteur, en couverture
de l'autobiographie du créateur François Girbaud "Ma peau - Street & Rock Couture", Michel Lafon
avait "porté atteinte au droit patrimonial et au droit moral" de Mme Niedermair.
Le tribunal avait alors interdit à la société Michel Lafon "la poursuite de ces agissements sous
astreinte de 150 euros par infraction et par jour de retard".
Constatant, plusieurs mois après, que la couverture litigieuse restait à la vente sur sept sites
internet, comme fnac.com, alapage.com ou encore michel-lafon.fr, la photographe a de nouveau
assigné l'éditeur.
Dans un jugement rendu le 9 mai, les magistrats de la 3e chambre ont estimé que la société
n'aurait pas dû continuer à proposer à la vente l'ouvrage revêtu de la couverture litigieuse et l'a
condamnée à payer à Brigitte Niedermair 174.750 euros au titre de l'astreinte qui avait été
ordonnée le 5 octobre.
La photo en question, utilisée en mars 2005 pour vanter la collection été de Marithé et François
Girbaud, représentait une libre interprétation de La Cène de Léonard de Vinci (1498), évocation
du dernier repas du Christ avant sa mort, dans laquelle les apôtres, comme le personnage de
Jésus, sont des femmes habillées de vêtements de la marque.
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ÕÕÕ
Un seul homme apparaissait dans la publicité, situé à la droite du Christ, torse nu et enlacé par le
bras d'une des femmes.
La photographie avait soulevé une vive polémique et avait été interdite, après un recours déposé
par les instances catholiques. Cette décision avait été confirmée en appel.
Mais en novembre 2006, la Cour de cassation avait finalement estimé que la publicité ne
constituait pas une injure aux catholiques.
15 mai 2008
Les juges danois ne doivent porter aucun signe religieux
ÕÕÕ
Les juges au Danemark ne doivent porter ni le foulard islamique ni tout autre symbole religieux
comme la croix chrétienne, la calotte juive ou le turban sikh, a déclaré mercredi la ministre
danoise de la Justice Lene Espersen à l'issue d'une réunion gouvernementale.
Mme Espersen a annoncé que le gouvernement allait présenter un projet de loi en ce sens à
l'automne au parlement.
"Nous avons décidé d'interdire le port des symboles religieux ou politiques lorsqu'on est
magistrat, car un juge doit être neutre et impartial" sur le plan vestimentaire dans les salles
d'audience, a-t-elle expliqué devant la presse.
Cette annonce fait suite à une résurgence ces trois dernières semaines du débat sur le foulard
islamique dont le port a été autorisé en décembre par l'administration des tribunaux danois bien
que le pays ne compte aucune juge de confession musulmane.
La décision de cette administration, un organisme indépendant, ne peut être cassée que par une
loi du parlement.
14 mai 2008
La France critiquée à l'ONU pour la loi de 2004 sur la laïcité
ÕÕÕ
La loi française interdisant à l'école le port de signes religieux, dont le foulard islamique a été la
cible de nombreuses critiques mercredi devant le Conseil des droits de l'Homme, qui procédait à
l'examen périodique de la situation en France.
Le Haut commissariat aux droits de l'Homme a rappelé dans son rapport devant le Conseil que le
rapporteur spécial de l'ONU pour la liberté de religion avait critiqué la législation française en
estimant qu'elle avait conduit "à la stigmatisation du foulard islamique et provoqué l'intolérance
religieuse contre les femmes qui le portent en dehors de l'école, à l'université ou sur leur lieu de
travail". L'ambassadeur de France pour les droits de l'Homme, François Zimeray, s'est déclaré
"surpris par l'impact symbolique" de la loi interdisant à l'école "les signes religieux ostensibles".
Cette loi entrée en vigueur en 2004 "a en fait contribué à l'apaisement" des tensions nées de la
polémique sur le port du foulard islamique à l'école, a-t-il assuré.
"Je me suis rendu compte que le concept français de laïcité n'est pas compris et a besoin d'être
expliqué sans relâche", a commenté le diplomate devant des journalistes.
13 mai 2008
Le TA de Bastia suspend la construction d'un lieu de culte pour les témoins de
Jéhovah
ÕÕÕ
Le juge des référés du tribunal administratif (TA) de Bastia a ordonné aujourd'hui la suspension
de la construction d'une salle de réunion destinée à accueillir des Témoins de Jéhovah, à Lucciana
(Haute-Corse).
Le permis de construire d'une bâtisse de 170m2, susceptible de recevoir une centaine de
personnes, avait été accordé le 23 janvier 2007.
Les habitants d'un lotissement voisin, regroupés en collectif, ont demandé au TA la suspension du
permis, soutenant notamment que la notice jointe au dossier ne permettait pas "d'apprécier
l'impact visuel du bâtiment envisagé".
7 mai 2008
Une commune peut-elle exploiter sans accord du ministre du culte, l'accès au toit de
l'église ? jugement du TA de Marseille
Le tribunal administratif de Marseille a rejeté la requête du curé des Saintes-Maries-de-la-Mer qui
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ÕÕÕ
souhaitait la fin de l'exploitation touristique par la commune de l'accès au toit de l'église de la
ville, construite au XIIe siècle.
Le curé Thierry-François de Vrégille a aussitôt annoncé sa décision de faire appel.
Le litige entre le prêtre et le maire des Saintes-Maries-de-la-Mer, remonte au début des années
2000. Le curé s'irrite depuis cette date des "troubles" occasionnés par les visites --de plus en plus
nombreuses-- de touristes sur le toit de l'édifice qui surplombe la mer et offre une des plus belles
vues sur la Camargue.
Environ 100.000 personnes y montent chaque année pour deux euros, sommes reversées à une
société mixte mandatée par la commune.
Le tribunal administratif n'a pas suivi les conclusions du commissaire du gouvernement PierreYves Gonneau qui, à l'audience le 1er avril, avait rappelé que la loi de séparation de l'église et de
l'Etat dispose que si la propriété de l'église revient à la commune, celle-ci ne peut organiser
l'accès des touristes au toit "sans l'accord du desservant", c'est-à-dire le curé.
Dans son jugement, le tribunal a au contraire considéré que "la commune a ouvert depuis 1963 le
toit-terrasse de l'église forteresse" et que "la gestion de cette activité à caractère touristique a été
confiée, dans le cadre d'une délégation de service public, à une société d'économie mixte". Le
tribunal observe que "les visiteurs accèdent au toit par un escalier indépendant dépourvu de toute
communication avec les parties de l'église affectées au culte" et que "le maire des Saintes-Maries
n'a pas entaché sa décision d'illégalité".
2 mai 2008
La Mosquée de Paris refuse de participer aux élections des CRCM du Grand Est
ÕÕÕ
La Fédération régionale de la Grande Mosquée de Paris (FRGMP) du Grand Est, qui chapeaute
quatre régions, a annoncé mercredi son "retrait définitif" des élections aux Conseils régionaux du
culte musulman (CRCM) dont elle conteste le mode de scrutin qu'elle juge "anti-démocratique".
Les 53 lieux de culte affiliés à la Fédération régionale en Alsace, Lorraine, Champagne-Ardennes
et Franche-Comté ne participeront pas aux élections des CRCM le 8 juin prochain. Le même jour
doivent également se tenir les élections du Conseil français du culte musulman (CFCM), instance
représentative des musulmans de France. La Fédération régionale de la Grande Mosquée de Paris
du Grand Est compte 53 lieux de cultes en Alsace, Lorraine, Champagne-Ardennes et FrancheComté. Elle regroupe environ 20.000 fidèles.
1er mai 2008
Le Premier ministre danois réservé sur le port du foulard par des juges
ÕÕÕ
Le Premier ministre danois Anders Fogh Rasmussen a émis de fortes réserves mardi quant au
port du foulard islamique par des juges dans les tribunaux, comme l'a autorisé récemment
l'Administration des tribunaux danois.
"Nous devons nous assurer que les tribunaux sont indépendants (...) et pour nous il est très, très
important que les juges soient non seulement neutres mais se comportent aussi de manière
neutre dans les salles d'audience", a-t-il affirmé au cours d'un point de presse à Copenhague.
"Il est essentiel, en entrant dans la salle du tribunal, d'avoir la certitude que le magistrat qui va
vous juger est neutre et se comporte ainsi", a poursuivi le dirigeant danois.
Le gouvernement libéral-conservateur "va examiner de près la décision de l'Administration des
tribunaux danois (...) et prendra position à ce sujet dans un avenir proche", a-t-il précisé.
M. Rasmussen a souligné que l'Administration des tribunaux danois était "un organe indépendant"
dont "les décisions ne peuvent être cassées par le ministre de la Justice, mais par le seul
parlement".
1er mai 2008
Séisme de Marmara , "sanction divine": la Turquie condamnée par la CEDH
Imputer le séisme meurtrier de Marmara à une "sanction divine" frise l'obscurantisme mais n'est
pas une incitation à la haine, a estimé mardi la Cour européenne des droits de l'homme.
Mehmet Kutlular, propriétaire du quotidien Yeni Asya avait organisé peu après le séisme du 17
août 1999 une commémoration de la mort du fondateur de l'école islamique "Nurcu", à la
mosquée de Kocatepe, à Ankara.
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Il avait distribué aux fidèles un supplément de son journal, affirmant que le séisme qui a tué
environ 20.000 personnes était une "sanction divine" en raison "des pressions des militaires
contre la religion" et "de l'ingratitude du peuple envers Dieu".
Il fut condamné le 9 mai 2000 à deux ans de prison par la Cour de sûreté pour avoir tenu des
propos de haine dans le supplément de son journal puis dans ses discours.
Le directeur du journal a obtenu de la CEDH la condamnation de la Turquie pour une violation de
sa liberté d'expression ainsi qu'une somme de 5.000 euros pour préjudice moral.
En donnant une signification religieuse à une catastrophe naturelle et en évoquant un lien avec
l'attitude de la population à l'égard du gouvernement, "le discours est de nature à insuffler
intolérance et obscurantisme", observe la Cour européenne dans son arrêt.
Mais "si choquants et offensants qu'ils puissent être", les propos du requérant "n'incitent pas à la
violence et ne sont pas de nature à fomenter la haine contre les personnes qui ne sont pas
membres de sa communauté religieuse, selon les juges de Strasbourg.
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Actualité en bref
Juin 2008
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24 juin 2008
Dérives sectaires: guide pratique destiné aux collectivités territoriales
ÕÕÕ
La Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) a
publié mardi un guide pratique destiné aux agents des collectivités territoriales pour les aider à
déceler le risque sectaire et à y faire face.
Ce guide de quelque 150 pages rappelle d'emblée le "principe fondamental" de la liberté de
pensée, de conscience et de religion. Il explique ensuite le mécanisme de la dérive sectaire
(séduction, mise en état de sujétion, isolement) et décrit les possibles dérives dans les divers
domaines relevant des compétences des collectivités territoriales (culture, éducation, ordre public,
cultes...).
Pour chaque domaine, il donne les outils juridiques, pour protéger les éventuelles victimes, étayer
toute décision et ne pas risquer de poursuites judiciaires de la part de mouvements ou
associations visés.
L'objet du guide, résume le président de la Miviludes, Jean-Michel Roulet, est de "donner des
recettes pour se défendre, alerter sur les dangers, informer sur la jurisprudence". Son but est
d'aider les fonctionnaires à protéger les éventuelles victimes mais aussi à éviter de consacrer de
l'argent public à des activités susceptibles de dérives sectaires.
Il est destiné aux maires, aux associations de formation de fonctionnaires et aux agents des
collectivités locales de plus de 10.000 habitants.
Ce document est publié en association avec l'AMF (Association des maires de France). Il est
disponible à partir du 24 juin sur le site de la Miviludes, en librairie ou auprès de la
Documentation française (18 euros).
La Miviludes publie chaque année son rapport d'activité et produit régulièrement des guides
thématiques; les derniers concernaient le satanisme et le risque sectaire en entreprise. Le
prochain sera consacré à l'éducation à domicile.
La publication de ce guide a été saluée par le député des Ardennes, Philippe Vuilque, président du
Groupe d'études sur les sectes de l'Assemblée nationale.
Dans un communiqué, il remarque que "concilier respect des libertés fondamentales et lutte
contre le risque sectaire n'est pas chose aisée pour des collectivités territoriales souvent
confrontées à la censure des tribunaux judiciaires et administratifs". "Ce guide, estime-t-il,
apportera des réponses concrètes et précises à des élus et fonctionnaires territoriaux souvent
démunis face au risque de dérives sectaires".
24 juin 2008
Un musulman fait retirer un crucifix dans une clinique catholique de Grenoble.
Un musulman a obtenu après l'avoir exigé de façon véhémente le retrait d'un crucifix accroché au
mur de la chambre de sa fille soignée dans une clinique catholique de Bourgoin-Jallieu (Isère), a
indiqué le Dauphiné libéré dans son édition de mercredi.
Lundi en fin d'après midi, à la clinique Saint-Vincent de Paul, le père d'une petite fille, qui venait
de subir une intervention chirurgicale programmée, a demandé que le personnel décroche un
crucifix de la chambre de sa fille.
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ÕÕÕ
"Pendant près d'un quart d'heure, le père en présence de son épouse s'est emporté verbalement,
exigeant que le crucifix soit décroché", a raconté un témoin, cité par le Dauphiné libéré.
Le personnel de l'établissement a finalement cédé à cette exigence.
La direction de la clinique a exprimé son étonnement.
La directrice de la clinique a déclaré au Dauphiné libéré que cette demande était "surprenante de
la part d'une famille qui a choisi librement notre établissement".
"Quand les gens choisissent d'être soignés dans notre établissement (...) ils savent qu'ils sont
dans une maternité catholique", a-t-elle ajouté.
"Ceci n'est nullement caché: c'est d'ailleurs parfaitement inscrit à l'entrée de l'établissement tout
comme dans le livret d'accueil. Les petites soeurs des maternités catholiques évoluent en
vêtement religieux dans les services", a ajouté la directrice.
Tout en soulignant que le crucifix est "nullement ostentatoire, très sobre", elle a néanmoins
approuvé l'attitude de l'aide soignante qui a mis un terme à l'incident.
La présidente du conseil d'administration de la clinique a évoqué d'autres incidents de ce type
dans d'autres établissements gérés par des religieux.
Cette affaire devrait être évoquée au prochain comité d'éthique de l'Alliance des maternités
catholiques qui rassemble religieuses, personnalités civiles, philosophes, juristes et médecins.
24 juin 2008
Gîte fermé à des femmes voilées: procès en appel renvoyé à septembre
La cour d'appel de Nancy a renvoyé au mercredi 3 septembre l'audition d'une propriétaire d'un
gîte vosgien qui avait refoulé une cliente et sa mère parce qu'elles portaient le voile.
Le renvoi a été accordé à Me Alexandre Varaut, l'avocat de l'accusée qui a argué de son
indisponibilité en raison d'engagements pris à Paris.
En octobre 2007, sa cliente avait été condamnée à quatre mois de prison avec sursis et 1.000
euros d'amende par le tribunal correctionnel d'Epinal pour avoir refusé en août 2006 l'accès à son
gîte de Julienrupt (Vosges) à la plaignante et à sa mère, qui ne voulaient pas ôter leur voile
comme elle le leur avait demandé.
Poursuivie pour discrimination en raison de la religion, l'origine ou la race, la propriétaire du gîte
s'était défendue en assimilant le voile à "un instrument de soumission et d'oppression de la
femme", qu'elle ne souhaitait pas voir porter dans les parties communes de son établissement.
20 juin 2008
Australie: polémique sur le coût des JMJ en présence du pape
Une polémique a émergé jeudi en Australie sur le coût des Journées mondiales de la Jeunesse
(JMJ), qui se tiendront le mois prochain à Sydney, en présence du pape Benoît XVI.
Ces cinq jours de célébrations de la jeunesse catholique mondiale ont été présentés en Australie
comme un événement très porteur pour l'économie de l'Etat de Nouvelles-Galles-du-Sud, avec
125.000 visiteurs à la clé, qui culmineront à 500.000 pour la messe papale le 20 juillet.
Une polémique est cependant apparue depuis que le gouvernement de Nouvelles-Galles-du-Sud a
débloqué 110 millions de dollars (103,5 mls USD) pour l'accueil de cet évènement, arguant que
les JMJ allaient injecter en retour 150 millions dans l'économie locale.
Les calculs officiels ont cependant été mis en doute par les détracteurs de cette contribution, qui
ont protesté contre l'octroi d'une telle somme à une organisation religieuse représentant environ
26% de la population.
Selon des information de la presse, l'Eglise catholique n'aurait apporté qu'entre 10 et 15 millions
de dollars, mais les organisateurs ont refusé de donner des chiffres officiels.
Lee Rhiannon, députée Vert, a affirmé que moins d'un mois avant les JMJ le gouvernement de
Nouvelles-Galles-du-Sud n'avait pas encore finalisé tous les arrangements financiers, laissant
selon elle la note aux contribuables, en cas d'explosion des coûts.
Les hôteliers de Sydney font aussi grise mine. Sally Fielke, directeur de l'Association hôtelière
australienne, a indiqué que les gérants d'hôtels avaient été contraints de baisser leurs tarifs,
parce que l'afflux de pèlerins annoncé n'était pas au rendez-vous, avec un écart de 30%.
Les autorités de Nouvelle-Galles-du-Sud ont de leur côté affirmé que les re tombées économiques
des JMJ seraient conformes aux prévisions.
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20 juin 2008
Danemark: Caricatures de Mahomet, des musulmans déboutés en appel
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La justice danoise a rejeté jeudi la plainte de sept associations musulmanes au Danemark qui
avaient intenté un procès à deux responsables du quotidien danois Jyllands-Posten pour leur
publication en septembre 2005 de douze caricatures controversées de Mahomet.
Ces associations ont été déboutées par la Cour d'appel qui a confirmé le verdict d'octobre 2006
du tribunal d'Aarhus (centre), siège du journal, selon un communiqué judiciaire.
Les juges de la Cour d'appel ont estimé que ces dessins ne portaient pas atteinte à l'honneur des
croyants et ne constituaient pas une expression de mépris envers les musulmans, comme
l'affirmaient les associations plaignantes.
Celles-ci considéraient ces dessins comme "offensants et injurieux", car "représentant le prophète
comme belliqueux et criminel, établissant un lien clair entre Mahomet, la guerre et le terrorisme".
L'une des douze caricatures, qui a fait scandale dans le monde musulman, montrait Mahomet la
tête recouverte d'un turban en forme de bombe à la mèche allumée.
Le président du tribunal, Peter Lilholt, a souligné que la justice ne pouvait "restreindre la liberté
d'expression", et qu'elle pouvait intervenir uniquement si, conformément à la Convention
européenne des droits de l'homme, cette liberté d'expression portait atteinte à "la sécurité
nationale, l'intégrité territoriale ou la sécurité publique" d'un Etat.
La cour a également estimé que le dessin du prophète enturbanné, était "de caractère satirique"
et "ne référait pas aux musulmans en général ni aux associations (plaignantes) ou à leurs
membres".
Le tribunal a rappelé "que des actes terroristes ont été commis au nom de l'islam, et qu'il n'est
pas illégal que ces actes fassent l'objet d'une représentation satirique".
20 juin 2008
Tournoi interdit aux hommes annulé: le maire a pris "la bonne décision" (Laporte)
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Le secrétaire d'Etat aux sports, Bernard Laporte, a estimé jeudi que Serge Poinsot, maire de
Vigneux-sur-Seine (Essonne), avait pris "la bonne décision" en refusant de prêter un gymnase
municipal pour un tournoi de basket féminin auquel les hommes auraient été interdits d'assister.
M. Laporte s'est rendu à Vigneux pour "soutenir et accompagner le maire dans sa décision" après
la polémique qui a éclaté à la suite de l'annulation d'un tournoi féminin, qui devait être organisé
le 29 juin par une association musulmane de la ville. S'exprimant devant la presse, il s'est dit
"rassuré" que l'intention de son président n'ait pas été d'exclure les hommes.
"Que ce soit un tournoi de sport féminin me ravit (...) mais qu'on exclue une catégorie, c'est-àdire les hommes (...) dans un lieu public ça c'est contraire aux lois de la République", a déclaré M.
Laporte, qui a expliqué n'avoir "pas l'impression" que la laïcité est attaquée dans le sport.
"Tout le monde a fait amende honorable, c'est peut-être une erreur de communication, et je
l'espère. On n'accepterait pas que ce soit autrement", a ajouté le secrétaire d'Etat.
Le président de l'association culturelle des Musulmans de Vigneux, Ezdine Ould Mohamed, a
quant à lui assuré que le mention litigieuse figurant sur les tracts résultait d'une "erreur de
communication" en interne.
"On ne peut pas interdire à quiconque de venir", a-t-il expliqué assurant que cette affaire était
"loin de l'idée de communautarisme". "Ca n'a rien à voir avec tout ça", a-t-il poursuivi.
20 juin 2008
Polémique autour de l'annulation d'un tournoi de basket réservé aux femmes
Une polémique a éclaté jeudi autour de l'annulation d'un tournoi de basket-ball féminin, qui devait
être organisé par une association musulmane dans un gymnase municipal de Vigneux-sur-Seine
(Essonne) et dont l'accès devait être réservé aux femmes, dans un contexte politique local tendu.
L'affaire a pris une telle ampleur que le secrétaire d'Etat aux Sports, Bernard Laporte, a décidé de
se rendre sur place jeudi vers 16H30 pour rencontrer, selon son entourage, les protagonistes.
© La lettre du droit des religions n°31 juin / juillet 2008
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L'association culturelle des musulmans de Vigneux (ACMV) avait déposé le 30 mai une demande
auprès de la mairie pour pouvoir disposer d'un gymnase municipal le 29 juin, mais sans préciser
que l'accès serait interdit aux hommes, selon le maire de Vigneux, Serge Poinsot. Celui-ci a
affirmé n'avoir été informé de cette disposition, pour lui "discriminatoire", que le 11 juin. Il a
alors, de ce fait, refusé de mettre à disposition cet équipement public, et rencontré les
organisateurs afin de leur expliquer son refus.
Il y avait "une erreur de casting", selon M. Poinsot.
Ezdine Ould Mohamed, président de l'ACMV, évoque lui un problème de communication au sein
de son association, la mention "entrée du gymnase strictement réservée aux femmes" ayant,
selon lui, été rajoutée par la suite sur les tracts annonçant la manifestation par une secrétaire
chargée de l'organisation de ce tournoi "intermosquées".
"On respect les lois de ce pays, on les connaît très bien", a-t-il ajouté.
Patrice Finel, conseiller municipal d'opposition, accuse, lui, M. Poinsot de n'avoir annulé la mise à
disposition du gymnase que lorsque le Parisien, qui révèle l'affaire jeudi, s'y est intéressé.
"Ce serait passé inaperçu, le tournoi aurait eu lieu, point!", a-t-il estimé. Pour lui, ce tournoi
constituait un "renvoi d'ascenseur", envers la communauté musulmane après la réélection du
maire.
M. Poinsot dément ces allégations jugeant que son opposant "essaie de monter quelque chose",
mais que cette affaire est "une tempête dans un verre d'eau".
Outre sa dimension sportive, ce tournoi devait également permettre de collecter des fonds pour le
Comité de bienfaisance et de secours aux Palestiniens (CBSP) afin d'aider des orphelins.
19 juin 2008
Polémique sur la religion d'un candidat à un poste d'expert onusien
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Le Guatémala a protesté mercredi contre les enquêtes menées sur les croyances religieuses du
candidat guatémaltèque à un poste d'expert du Conseil des droits de l'homme de l'ONU qui s'est
heurté à l'opposition de l'Egypte au nom du groupe africain.
L'ambassadeur du Guatémala, M. Carlos Ramiro Martínez Alvarado, a protesté devant le Conseil
des droits de l'homme contre "la polémique, les spéculations et les préjugés autour de l'origine et
les croyances" de M. Frank La Rue Lewy, candidat au poste de Rapporteur spécial sur la liberté
d'opinion et d'expression.
"Nous savons qu'il y a eu une campagne de désinformation (...). On a enquêté pour savoir s'il
était un haut fonctionnaire du gouvernement (guatémaltèque), s'il était juif, s'il était catholique,
s'il était de droite ou de gauche", a dénoncé le diplomate.
Après une suspension de séance houleuse, M. Frank La Rue Lewy a finalement été accepté
mercredi soir par le Conseil des droits de l'homme.
Les critiques du représentant du Guatémala interviennent alors que le Conseil des droits de
l'homme est secoué par une polémique sur l'exigence de pays musulmans, conduits par l'Egypte,
de ne pas émettre de jugements sur les législations fondées sur la charia (loi musulmane).
17 juin 2008
Signature du premier contrat d'association entre l'Etat et un lycée musulman
Le lycée musulman Averroès qui fonctionne à Lille depuis 5 ans a signé un contrat d'association
avec l'Etat, du type de ceux qui lie ce dernier à la plupart des établissements catholiques.
Confirmant des informations du quotidien La Croix, le directeur adjoint du lycée Makhlouf
Mamèche a précisé que ce premier contrat d'association avec un lycée musulman avait été remis
lundi après signature à la préfecture. Celle-ci a confirmé sa prochaine officialisation.
Le rectorat a précisé de son côté qu'une commission académique avait rendu un avis favorable à
ce contrat.
"Cela constituera un soulagement pour nous grâce à la prise en charge financière de l'équipe
pédagogique par l'Etat alors que le recrutement de professeurs certifiés sera désormais facilité
par le rectorat", a déclaré M. Mamèche.
Il a souligné que les conditions mises par l'Etat - ouverture aux élèves de toutes confessions,
contrôle pédagogique des enseignants, respect du programme d'enseignement - n'avaient posé
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"aucun problème puisque nous les avons appliquées depuis l'ouverture de l'établissement en
2003".
"Nous ne posons jamais la question de la religion aux élèves ou professeurs, c'est une affaire
personnelle, tout comme nous ne demandons jamais à une jeune fille pourquoi elle porte ou ne
porte pas le voile". Le lycée, selon M. Mamèche, se distingue par sa référence aux "valeurs
musulmanes : goût de l'effort et du savoir, respect des autres".
Le cours d'éthique religieuse est facultatif et l'arabe peut tenir lieu de 2ème ou 3ème langue.
Le lycée qui avait ouvert ses portes en 2003 avec 16 élèves, en a actuellement 90. Il a eu l'an
dernier un taux de réussite au baccalauréat de 86%, supérieur à la moyenne nationale. Les frais
de scolarité resteront fixés à 750 euros par an.
Le seul établissement musulman à avoir jusqu'ici un contrat d'association avec l'Etat était une
école primaire de Saint-Denis-de-la-Réunion.
17 juin 2008
La critique de la charia en question devant le Conseil des droits de l'homme (ONU)
ÕÕÕ
Le droit de critiquer la charia (loi musulmane) et le sort des femmes dans les pays qui l'appliquent
a été l'occasion d'une vive escarmouche entre pays musulmans et occidentaux devant le Conseil
des droits de l'homme de l'ONU réuni à Genève.
La passe d'armes s'est conclue lundi soir par une déclaration du président du Conseil,
l'ambassadeur roumain Doru Romulus Costea, qui a intimé l'ordre au représentant de deux ONG
de s'abtenir de tout jugement de valeur sur une croyance ou une loi religieuse.
Les foudres de l'Egypte, du Pakistan et de l'Iran s'étaient auparavant abattues sur un orateur
lisant une déclaration conjointe des ONG Association for World Education (AWE) et International
Humanist and Ethical Union (IHEU) qui dénonçait la lapidation des femmes adultères et le
mariage des filles dès l'âge de 9 ans, pratiqués dans les pays "qui appliquent la charia".
L'orateur des ONG, M. David Littman, a été interrompu par plus d'une quinzaine d'interventions
furibondes et le débat a dû être suspendu pendant plus d'une demi-heure.
"L'Islam ne sera pas crucifié devant ce Conseil", a vitupéré le représentant de l'Egypte Amr
Roshdy en menaçant de demander un vote du Conseil des droits de l'homme pour faire taire le
trublion accusé d'islamophobie.
Le président Costea a alors suspendu la séance. A la reprise, M. Costea a assuré que le Conseil
des droits de l'homme "n'est pas préparé à discuter à fond des questions religieuses: en
conséquence, nous ne devons pas le faire".
"Je promets que la prochaine fois que l'orateur émettra un jugement de valeur sur une croyance
religieuse, loi ou document (religieux), je l'interromprai et donnerai la parole à l'orateur suivant",
a prévenu le président du Conseil des droits de l'homme.
Pourtant, "le Conseil des droits de l'homme est tout à fait qualifié pour évoquer la liberté de
religion et de conviction", estime-t-on mardi dans les milieux diplomatiques européens un peu
interloqués.
Le temps de parole des ONG devant le Conseil est déjà réduit à la portion congrue et "il convient
de ne pas limiter davantage leur expression tant qu'elles n'appellent pas à la haine raciale et
religieuse", a confié un diplomate européen.
17 juin 2008
Grande-Bretagne: recours d'une adolescente pour pouvoir porter un bracelet sikh à
l'école
La Haute cour de Londres a débuté mardi l'examen du recours d'une adolescente britannique de
14 ans s'estimant victime de discrimination après avoir été expulsée de son école car elle portait
un bracelet symbolisant sa religion sikhe.
Sarika Singh a été expulsée en novembre 2007 de l'école pour filles d'Aberdare (sud du Pays de
Galles) car elle refusait de retirer son bracelet d'acier sikh, ou Kara. L'établissement scolaire
n'autorise aucun bijou, sauf montres et clous d'oreilles non fantaisistes.
En février, l'adolescente a intégré une école voisine qui autorise le port du Kara mais, selon sa
mère Sinita, 38 ans, elle a pâti de ce changement en cours d'année et du stress généré alors
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qu'elle préparait son GCSE (équivalent du Brevet des collèges).
L'examen de cette affaire par la Haute Cour devrait durer trois jours.
13 juin 2008
Roumanie: les symboles religieux restent dans les écoles (Cour suprême)
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Les symboles religieux peuvent rester présents dans les écoles roumaines, selon une décision de
la Cour suprême, qui a répondu ainsi positivement à un appel du ministère de l'Education (MECT)
et d'une coalition d'ONG.
La Cour a admis mercredi le recours déposé par le ministère et 150 organisations groupées sous
le nom de "Coalition pour le respect du sentiment religieux", à l'encontre d'une recommandation
faite en novembre 2006 par le Conseil anti-discrimination (CNCD) auprès du MECT, de "respecter
le caractère laïque de l'Etat" et de limiter la présence des symboles religieux dans les écoles.
Le CNCD avait invité ainsi le ministère à demander aux directeurs d'écoles d'afficher les symboles
religieux uniquement pendant les cours de religion ou dans les espaces destinés à l'instruction
religieuse.
La recommandation avait été aussitôt dénoncée par l'Eglise orthodoxe, majoritaire en Roumanie,
et par le MECT, mais la Cour d'appel de Bucarest avait tranché en faveur du CNCD.
La demande du conseil était intervenue à la suite d'une plainte déposée par un professeur de
philosophie, pour qui la présence de symboles religieux --orthodoxes pour la plupart-- dans les
classes et les halls de l'école fréquentée par sa fille représentait une "forme de discrimination
envers les élèves agnostiques ou appartenant à une autre confession".
Cette plainte s'était inscrite dans la campagne d'une ONG, qui dénonçait les services religieux
célébrés dans les écoles, notamment à l'occasion de la rentrée, ainsi que le "caractère quasiobligatoire" du catéchisme dans le cursus scolaire.
La décision de la Cour suprême est définitive.
9 juin 2008
COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME
418
9.6.2008
Communiqué du Greffier
AUDIENCES EN JUIN 2008
La Cour européenne des droits de l’homme tiendra l'audience suivante :
Mardi 17 juin 2008 : 9 heures
Audience de chambre sur la recevabilité et le fond
L'Église orthodoxe autocéphale de Pologne c. Pologne (no 31994/03)
La requérante, l'Église orthodoxe autocéphale de Pologne (Polski Autokefaliczny Kościół
Prawosławny), est établie à Varsovie. Elle constitue le deuxième groupement religieux en
Pologne, après l'Église catholique, en termes de nombre de fidèles.
L’Eglise requérante détient et administre 24 temples de culte, au sujet desquels un conflit
l’oppose à l'Église catholique de rite byzantino-ukrainien (Kosciół Katolicki obrządku bizantyńskoukraińskiego).
L’affaire concerne les griefs de la requérante relatifs à la propriété des 24 immeubles litigieux.
En février 2002, la requérante demanda à la Cour constitutionnelle d'examiner la compatibilité
avec la Constitution de plusieurs dispositions de la loi du 4 juillet 1991 sur les rapports entre l'État
polonais et l'Église orthodoxe autocéphale de Pologne. Cette loi prévoyait notamment l’acquisition
par l’Eglise des immeubles qui, au moment de l’entrée en vigueur de la loi, se trouvaient en sa
possession. Elle introduisait cependant une exception concernant les immeubles qui étaient
détenus par l’Eglise requérante et qui dans le passé étaient la propriété de l’Eglise catholique de
rite byzantino-ukrainien. Selon la loi, l’acquisition de la propriété des biens en cause devait faire
l’objet d’une loi spéciale, laquelle ne fut jamais adoptée. Devant la Cour constitutionnelle, l’Eglise
requérante allégua notamment le non respect des principes constitutionnels tels que l'état de
droit, l'égalité entre les églises et les associations de culte, l'égalité devant la loi et l'égalité de la
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protection de la propriété de tous les citoyens.
Le 2 avril 2003, la Cour constitutionnelle rejeta le recours de l'intéressée, rappelant notamment
que le processus de la régularisation de la question des biens des églises et communautés
religieuses avait débuté en 1989, avec la loi sur les rapports entre l'État et l'Église catholique. En
ce qui concerne l'Église requérante, la Cour constitutionnelle, se référant aux travaux
préparatoires de la loi, releva que le projet de départ ne prévoyait aucune exception à l'octroi du
droit de propriété. La proposition de réserver la question fut présentée par le Sénat et retenue au
moment du vote final. En juillet 2003, la Cour constitutionnelle refusa de rouvrir la procédure.
Invoquant les articles 6 (droit à un procès équitable), 9 (droit à la liberté de pensée, de
conscience et de religion) et 13 (droit à un recours effectif), la requérante se plaint de la décision
du 2 avril 2003 qui, selon elle, porte atteinte au droit des adhérents de l'Église orthodoxe
autocéphale de pratiquer leur religion d'une manière paisible. L’intéressée allègue que la
possession d'un des temples lui a été enlevée au profit de l'Église catholique, qui en acquit la
propriété par usucapion, et dénonce une situation d'insécurité juridique quant au statut des 24
immeubles litigieux. Sur le terrain des articles 14 (interdiction de la discrimination) et 1 du
Protocole n° 1 (protection de la propriété), la requérante allègue que le droit au respect de la
propriété d'autres groupements religieux a été garanti d'une manière complète, alors qu'elle ne
bénéficierait que d'une garantie restreinte quant aux biens en sa possession. Elle dénonce le fait
que la propriété des biens de culte de l'Église catholique lui a été octroyée en vertu de la loi sur
les rapports entre l'État et l'Église catholique, alors que la loi de même nature sur les rapports
entre l'État et l'Église orthodoxe autocéphale subordonne l'octroi de la propriété à l'adoption d'une
loi spéciale.
5 juin 2008
Turquie: un amendement sur le port du foulard à l'Université annulé
ÕÕÕ
La Cour constitutionnelle a annoncé avoir annulé jeudi un amendement du parti islamoconservateur au pouvoir en Turquie autorisant le port du foulard islamique dans les universités du
pays, jugeant qu'il est contraire à la laïcité.
Les 11 juges de la Cour se sont prononcés contre l'amendement estimant qu'il enfreignait les
dispositions de la loi fondamentale mentionnant le caractère laïc de la République de Turquie et
qui sont non-amendables, souligne le communiqué.
Le verdict de la Cour constitue le pire scénario pour le Parti de la justice et du développement
(AKP, issu de la mouvance islamiste), au pouvoir, qui a fait passer l'amendement en février. Car
ce scénario pourrait préfigurer une dissolution de cette formation qui a divisé la société turque en
autorisant le port du voile dans les facultés au grand dam du camps laïc.
Les mêmes juges doivent se prononcer dans les mois à venir sur une procédure séparée, celle sur
une interdiction de l'AKP, au pouvoir depuis 2002, pour activités contraires à la laïcité.
L'amendement sur le port du voile islamique sur les campus est l'un des principaux arguments du
procureur de la Cour de cassation qui a réclamé l'interdiction de l'AKP et le bannissement de
politique pour cinq ans pour 71 de ses membres, dont le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan.
2 juin 2008
Fondation Elahi : l'action pour diffamation contre M.Aeschliman jugée irrecevable
La cour d'appel de Versailles a estimé que l'action en diffamation intentée par une réalisatrice TV
à l'encontre de Manuel Aeschlimann, ex-député maire UMP d'Asnières (Hauts-de-Seine) et de son
ancien premier adjoint était irrecevable.
La plainte avait fait suite à la distribution par la mairie d'Asnières, en mars 2007, de 40.000
exemplaires d'un dépliant de quatre pages sur la fondation Ostad Elahi, placée sous l'observation
de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes).
Le dépliant distribué aux Asniérois, titré "La Miviludes donne raison à la mairie d'Asnières", citait
nommément des associations et des personnes, dont la réalisatrice de télé Marion Sarraut,
comme faisant partie de la "nébuleuse", un terme utilisé par la Miviludes.
Dans son arrêt, la cour d'appel a estimé qu'"aucun élément ne permet d'affirmer que
M.Aeschliman et M.Caillet ont eu comme intention d'atteindre personnellement Marion Sarraut
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(...) l'objectif visé étant clairement la fondation Elahi (...) dont les pratiques sont dénoncées
comme sectaires, avec l'appui d'un rapport de la Milivudes".
La cour d'appel a, par conséquent, infirmé le jugement du TGI de Nanterre qui, le 20 novembre
2007, avait condamné Charles Caillet, ancien adjoint au maire délégué notamment à la
communication, à 3.000 euros d'amende et à verser 5.000 euros de dommages et intérêts et
4.000 euros de frais de procédure à la réalisatrice Marion Sarraut pour diffamation publique.
La diffamation n'avait pas été jugée établie pour M. Aeschlimann.
Mme Marion Sarraut s'est pourvue en cassation, a précisé cette source.
1er juin 2008
Le TGI de Lille annule un mariage sur requête d’un mari de confession musulmane
trompé sur la virginité de sa femme
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Le tribunal de grande instance de Lille a annulé, dans un jugement rendu le 1er avril 2008, un
mariage au titre de l'erreur commise sur les qualités essentielles.
Le plaignant de confession musulmane aurait appris que sa jeune épouse n’était plus vierge.
C’est le mensonge qui motive la décision du juge, ce n’est pas la question de la virginité", a
déclaré Philippe Lemaire, le procureur de la République de Lille, pour répondre à la polémique
suscitée par ce verdict.
1er juin 2008
Litige sur les bâtiments d'une mosquée à Montreuil: le recteur débouté
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Le tribunal de Bobigny a débouté le recteur d'une mosquée à Montreuil (Seine-Saint-Denis) qui
voulait contraindre la propriétaire des lieux à lui vendre les locaux, considérant qu'une promesse
de vente signée entre eux était "caduque", selon l'avocat de la propriétaire.
A l'origine, Mohammed Taïfour, président du "centre cultuel et culturel musulman" ouvert en 1995
rue Edouard-Vaillant, et Marie-Louise Duport, sa propriétaire, étaient d'accord pour la transaction.
Une première promesse de vente avait été signée en 1996, une autre en 2000.
Mais la vente avait été contrecarrée à chaque fois par les velléités de préemption de la mairie, et
de son ex-maire Jean-Pierre Brard (app-PCF), notoirement opposé au projet de M. Taïfour.
La mairie avait invoqué son droit de préemption, sans le faire suivre d'effet, jusqu'à y renoncer
complètement en 2004. Dès lors, pour M. Taïfour, les barrages à la vente étaient levés et la
dernière promesse de vente devait s'appliquer même si Mme Duport ne le souhaitait plus.
"Le tribunal a considéré la promesse caduque, déboute Mohammed Taïfour de toutes ses
demandes et le condamne à verser 2.500 euros", a précisé Me Léon Cohen en faisant état du
jugement de la 6e chambre civile daté du 22 mai.
1er juin 2008
Mosquée de Belfort: annulation du bail signé avec l'association musulmane
Le tribunal administratif de Besançon a annulé le bail accordé en 2006 par la Ville de Belfort à une
association musulmane pour la construction d'une mosquée dans le périmètre historique du
château.
"Cette décision ne remet absolument pas en cause la construction de la mosquée qui sera
inaugurée, nous l'espérons, début septembre, au début du Ramadan", a indiqué le directeur du
cabinet du maire, Alain Letailleur.
Dans son jugement du 15 mai, le tribunal administratif estime que le conseil municipal n'a pas été
informé suffisamment des conditions dans lesquelles le loyer de ce terrain municipal avait été
fixé.
Le tribunal a donc ordonné l'annulation de la délibération municipale du 17 mars 2006 autorisant
le maire d'alors, Jean-Pierre Chevènement (MDC), à signer un bail emphytéotique avec le Comité
des musulmans du Territoire de Belfort pour la construction de la mosquée.
La Ville de Belfort a en outre été condamnée à verser 1.000 euros aux six conseillers municipaux,
en application du code de justice administrative.
Le tribunal avait été saisi par Christophe Grudler, conseiller général et conseiller municipal
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d'opposition de Belfort, et ses cinq collègues du groupe municipal DVD "Un Nouveau Souffle pour
Belfort" qui s'opposaient à la construction de la mosquée" au nom de la défense du patrimoine
historique", alors qu'ils demandaient l'inscription des fortifications de Vauban de Belfort au
patrimoine mondial de l'UNESCO, a indiqué M. Grudler.
"Il nous paraissait en particulier inadmissible que la Ville de Belfort ait fixé le loyer du terrain
d'environ 50 ares à 200 euros par an, ce qui s'assimile pour nous à une subvention déguisée, en
infraction avec la loi de 1905 qui interdit toute subvention publique à une association cultuelle",
explique-t-il.
"Nous restons sereins et continuons les travaux, déjà bien avancés, pour inaugurer la mosquée le
1er septembre 2008, premier jour du Ramadan", a indiqué à l'AFP Saïd Meftah, porte-parole du
Comité musulman du Territoire de Belfort.
La Ville de Belfort a précisé qu'elle ne ferait pas appel, "a priori", et qu'elle allait prendre une
nouvelle délibération dans cette affaire.
M. Grudler a pour sa part réaffirmé que son combat ne visait pas un lieu de culte musulman, mais
la préservation de l'intégrité des fortifications de Belfort.
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Parlement européen
Questions
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10 mai 2008
QUESTION ÉCRITE posée par Cristiana Muscardini (UEN) à la Commission
QUESTION ÉCRITE E-2691/08
posée par Cristiana Muscardini (UEN)
à la Commission
Objet: UE: Les imams interdisent aux femmes de participer aux funérailles de conjoints
et d'amis
La Commission:
1. Est-elle au courant de l’aggravation de la situation des femmes musulmanes en Europe sous
l’effet d’un groupe d’intégristes qui, tandis qu’ils prévalent sur les nombreux modérés et trouvent
des connivences dans l’acquiescement de la magistrature de certains États membres, sont en train
de violer, de fait, les droits humains les plus élémentaires?
2. Est-elle au courant des récents articles publiés dans les quotidiens, parmi lesquels, en Italie,
«Libero» et «Il Giornale», qui dénoncent certains imams qui interdisent aux femmes de participer
aux funérailles de leur conjoint, les isolent à la maison, les obligent à supporter la polygamie,
justifient et, dans de nombreux cas, réalisent l’épouvantable crime des mutilations génitales
féminines?
3. Est-elle au courant qu’il n’existe pas, en dépit des demandes répétées, notamment de la part de
la soussignée, d’étude sur la polygamie en Europe et sur la condition des femmes immigrées de
religion musulmane?
4. N’estime-t-elle pas qu’elle devrait soutenir le rapport sur la lutte contre les mutilations génitales
féminines qui m’a été attribué par la commission FEMM du Parlement européen?
5. A-t-elle l’intention de promouvoir rapidement une étude sur la polygamie et sur la condition des
femmes et de présenter au Conseil une demande d’intervention des États membres afin d’éviter
que des abus ne soient commis à l’égard des femmes musulmanes et de s’assurer que les droits
humains et civils, conformément aux lois de nos pays, soient respectés, en soulignant que l’usage
de la burqa et des voiles qui couvrent l’ensemble du visage et empêchent ainsi d’identifier ces
femmes ne peut être autorisé au sein de l’Union?
7 mai 2008
QUESTION ÉCRITE posée par Philip Claeys (NI) à la Commission
QUESTION ÉCRITE E-2813/08
posée par Philip Claeys (NI)
à la Commission
Objet: Déclarations du grand Mufti de Bosnie à une conférence des dirigeants religieux
à Bruxelles
Lors de la récente conférence des dirigeants religieux organisée par la Commission européenne à
Bruxelles, le grand Mufti de Bosnie a déclaré que l'Europe doit prouver son ouverture à l'islam en
accueillant la Turquie en son sein. Les critères de Copenhague paraissaient d'intérêt secondaire à
cet égard.
La Commission estime-t-elle que le caractère musulman de la Turquie constitue un argument en soi
pour accueillir ce pays dans l'Union européenne?
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Le grand Mufti a en outre plaidé contre le droit à la liberté d'expression en cas d'"insultes" à l'égard
du prophète Mahomet. Quelle a été la réponse du président de la Commission à ces allégations?
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Parlement européen
Activités
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Asma Jahangir : établir des ponts entre les communautés
23-06-2008 - 07:06
Asma Jahangir : « Donner la parole à l’immense majorité qui veut vivre dans la
diversité »
Relations extérieures - 23-06-2008 - 16:56
La Turquie doit accélérer ses réformes
26-05-2008 - 06:05
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Asma Jahangir : établir des ponts entre les communautés
23-06-2008 - 07:06
Dans le cadre des débats sur le dialogue interculturel, les députés ont reçu l'avocate pakistanaise
des droits de l'homme, Asma Jahangir, Rapporteur des Nations Unies sur la liberté de religion ou de
conviction. Elle a insisté pour que le terme "dialogue interculturel" soit compris dans un sens large,
rassemblant à la fois des perspectives religieuses et non religieuses et incluant un dialogue à tous
les niveaux. Elle s'est également opposée à toute incrimination de "diffamation des religions".
Asma Jahangir a été accueillie mercredi par la Vice-Présidente du Parlement, Rodi Kratsa-Tsagaropoulou (PPEDE,°EL), pour qui "cette intervention contribuera à diffuser le message du Parlement en vue de favoriser le libre
dialogue et la compréhension mutuelle". Elle a également cité l'article 18 de la Déclaration universelle des Droits
de l'Homme, qui sous-tend le travail d'Asma Jahangir: "Toute personne a le droit à la liberté de pensée, de
conscience et de religion; ce droit comprend la liberté de changer de religion ou de conviction, et la liberté, seul
ou en communauté, en public ou en privé, de manifester sa religion ou conviction dans l'enseignement, les
pratiques, le culte et l'accomplissement des rites".
Asma Jahangir Jilani, née en 1952 à Lahore dans une famille militante, est l'une des fondatrices de la
commission des Droits de l'homme du Pakistan. En 1980, elle a formé, avec sa sœur et d'autres militants, le
premier cabinet d'avocats tenu par des femmes au Pakistan. En 1998, elle a été nommée Rapporteur spécial sur
les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires auprès de la commission des Droits de l'Homme des
Nations unies. Depuis 2004, elle est Rapporteur spécial des Nations Unies sur la liberté de religion ou de
conviction. Lors de son intervention, elle a soulevé quatre questions relatives aux "quoi, pourquoi, qui,
comment?" du dialogue interculturel.
Dialoguer dans la diversité
"Le terme «interculturel» inclut-il aussi le dialogue "interreligieux"?" s'est-elle interrogée d'emblée, ajoutant que
les tensions "intra-religieuses" devaient également être prises en compte. Et "qu'en est-il du dialogue entre
déistes, non-déistes et athées?" Tous les croyants sont protégés en vertu des lois internationales des droits de
l'homme ainsi que par le droit de ne pas professer de religion. Par conséquent, "ces dimensions devraient
également être inclues dans les initiatives de dialogue interculturel", a-t-elle estimé.
Ainsi, le "dialogue interculturel" pourrait être considéré comme un terme complet, incluant les divers aspects
mentionnés ci-dessus: le dialogue interreligieux et intra-religieux, également lorsqu'ils impliquent des athées et
non-croyants. Plus important encore, le gouvernement et la société civile ont un rôle à jouer dans la création
d'un environnement où les personnes de différentes religions et croyances peuvent interagir sans effort. De ce
fait, le concept de dialogue interculturel doit être élargi.
Dialoguer pour prévenir les conflits
"Je suis convaincue que le maintien d'un dialogue interculturel est de la plus haute importance afin de surmonter
les attitudes sectaires et intransigeantes, et afin de renforcer la tolérance religieuse dans le monde entier", a-t-
elle affirmé. En dehors de l'éducation, le dialogue interreligieux constitue l'un des principaux moyens de prévenir
les conflits et les violations de la liberté de religion ou de conviction.
"Il ya toujours eu des personnes qui ont essayé de prouver que leur culture, leur religion ou leur langue était
supérieure à celle de leurs voisins", a-t-elle ajouté, soulignant la possibilité qu'offrent les religions de partager
des valeurs morales qui pourraient permettre de parvenir à une compréhension commune, et au respect. Citant
quelques exemples de réussite du dialogue interculturel en Israël, en Palestine, et en Irlande du Nord, elle a
déploré que "ces efforts font rarement les gros titres dans les médias - à la différence de violences
interreligieuses".
Dialoguer à tous les niveaux
© La lettre du droit des religions n°31 juin / juillet 2008
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Bien qu'elle considère que les réunions de chefs religieux soient essentielles, Asma Jahangir Jilani estime que "le
dialogue interreligieux aux niveaux de base devrait également être encouragé et entretenu". Le dialogue
interculturel devrait inclure également des croyants objectifs au sujet de leur foi, des athées et croyants nondéistes, ainsi que des membres des minorités religieuses. Le point de vue des femmes, qui ont tendance à être
marginalisées dans les grands événements du dialogue interreligieux, doit également être pris en compte. Il
serait également utile, selon elle, de réunir des personnes partageant la même foi, mais avec des opinions
diverses, ou des artistes, qui ont la capacité "d'établir des ponts entre les communautés".
Il existe, selon Asma Jahangir Jilani, différents niveaux de dialogue interculturel: les organisations internationales
et régionales, de même que les ONG, peuvent jouer un rôle dans la facilitation de plates-formes pour le dialogue
interculturel. De même, elle a souligné l'utilité de bonnes initiatives aux niveaux mondial, régional, national et
également local.
Elle a également salué la "plate-forme parfaite pour le dialogue interculturel et interreligieux" que constituent les
programmes de l'UE d'apprentissage tout au long de la vie, tels Comenius, Erasmus, Leonardo Da Vinci ou
Grundtvig. L'éducation, a-t-elle affirmé, est essentielle "car elle permet aux gens de se familiariser avec d'autres
religions et croyances", tout comme la famille, au sein de laquelle l'ouverture d'esprit peut être entravée ou
nourrie.
Mieux vaut une "guerre des mots" qu'une guerre tout court
"Le dialogue doit-il exclure la possibilité de critiquer les principes des autres religions?" s'est-elle interrogée. En
guise de réponse aux applaudissements de l'Assemblée, elle a estimé que, dans un véritable dialogue, "les
interlocuteurs devraient avoir la possibilité d'être d'accord ou non".
Et d'ajouter: "Je crois fermement qu'il serait erroné de poursuivre l'approche de la protection des religions en soi
plutôt que des individus ou des groupes de croyants. En de nombreuses occasions, j'ai exprimé des inquiétudes
par rapport au fait qu'incriminer la "diffamation des religions" peut être contre-productive, car elle peut créer
une atmosphère d'intolérance et de peur, voire même augmenter les chances d'un retour de bâton. Plus encore,
les accusations de "diffamation des religions pourraient décourager les critiques légitimes ou la recherche
relative aux pratiques et aux lois qui semblent violer les droits de l'homme, et qui devraient être sanctionnées
par la religion".
En guise de conclusion, Asma Jahangir a déclaré que les "valeurs devraient servir de pont entre les différentes
religions et croyances", ce qui "pourrait, en fin de compte, conduire à un renforcement des droits de l'homme
universels".
Asma Jahangir prendra part à un débat avec les députés jeudi, lors d'une réunion du sous-commission sur les
Droits de l'Homme du Parlement européen.
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Asma Jahangir : « Donner la parole à l’immense majorité qui veut vivre dans la diversité »
Relations extérieures - 23-06-2008 - 16:56
Asma Jahangir était au Parlement européen mercredi 18 juin.
Sa tâche est vaste : l’avocate pakistanaise Asma Jahangir est aussi Rapporteur spécial de l’ONU sur la liberté de
religion et de conviction. La semaine dernière, elle s’est adressée aux députés européens dans le cadre de
l’Année européenne du Dialogue Interculturel. Nous l’avons rencontrée à cette occasion, elle qui se dit
résolument optimiste.
Le terme « dialogue interculturel » sonne très académique. Que signifie-t-il concrètement et pourquoi est-il si
important ?
« Il ne faut pas avoir une approche académique du terme, mais activiste. Promouvoir le dialogue interculturel,
c’est ouvrir l’espace à des voix différentes et des modes de vie alternatifs. Ce n’est pas seulement en parler,
mais interagir, créer un environnement où vous interagissez naturellement avec les autres, plutôt que de
ghettoïser les gens en fonction de leur race et de leur religion. »
« Lorsque les gens pressentent qu’ils ne seront pas entendus ou compris, ils s’expriment par la violence. Voilà
pourquoi l’interaction est essentielle pour empêcher la violence.
L’Europe, comme la communauté internationale, doit clairement envoyer le message que la violence ne sera pas
impunie -en particulier aux gouvernements qui offrent cette impunité aux auteurs de violences commises « au
nom de la religion ». L’Europe est une région démocratique et elle peut montrer comment il est possible
d’approfondir cette démocratie en étant simplement pluraliste. »
Quel est le facteur le plus important pour promouvoir cette ouverture : l’éducation et la famille, les organisations
internationales, les médias ?
« Tous sont importants. Les médias ont rarement joué un rôle négatif. La culture elle aussi permet de valoriser
le dialogue : en Inde, les films au cinéma ont fait beaucoup pour l’harmonie interculturelle. A travers l’éducation,
les gens se forgent une personnalité : elle aussi est importante, tout comme la famille. Il faut empêcher les
familles et les communautés d’imposer des restrictions au-delà desquelles les échanges avec autrui deviennent
impossibles. Les mariages arrangés, par exemple, existent encore et sont souvent un tabou, même dans des
sociétés soi-disant civilisées. Il faut aussi que les politiciens soient ouverts et discutent ouvertement de tout. La
dignité des êtres humains doit résider au cœur de toutes les libertés -que ce soit la liberté religieuse, la liberté
d’expression ou la liberté de ne pas être exploité.
Vous avez cité Boutros Boutros-Ghali : « Nous sommes, tous et en même temps, les mêmes et différents »…
« J’ai travaillé par le passé avec les couches les plus défavorisées de la société : pour elles, leur dignité est aussi
importante que celle des plus privilégiés. Lorsqu’on humilie quelqu’un, quelque soit sa couleur de peau ou sa
religion, les sentiments en retour sont universels. En ce sens, nous sommes tous les mêmes. Mais nous pouvons
être différents dans nos croyances, nos approches de la vie, notre vie spirituelle. Voilà le sens de cette phrase :
nous sommes les mêmes sous de nombreux aspects, mais aussi différents.
L’Europe est une région du monde très privilégiée et ses citoyens ont beaucoup de compétences : c’est à eux
d’être les maîtres des dirigeants politiques, pas le contraire. Les citoyens ordinaires doivent montrer la direction,
mettre en avant le bon modèle, même s’il implique des positions impopulaires. Les citoyens européens ont
davantage le pouvoir d’agir qu’ailleurs. »
Les médias montrent souvent davantage les conflits que l’harmonie : comment les convaincre du contraire ?
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« Les médias montrent aux gens ce que les gens veulent voir ! S’il y a un conflit dans un dialogue, c’est ce que
les médias vont montrer. Si ce dialogue est ennuyant, ils ne le montreront pas. Mais si le travail des gens est
créatif, alors les médias, en général, s’en font l’écho. »
Etes-vous optimiste quant à l’avenir du dialogue entre les cultures ?
« Oui je suis optimiste, parce que partout où je suis allée, j’ai vu que l’immense majorité des gens souhaite vivre
dans la diversité. Trop souvent, c’est une petite minorité qui prend les autres en otage. Voilà pourquoi, lorsque
les gouvernements et les faiseurs d’opinion publique établissent leurs stratégies, ils doivent donner la parole à
l’immense majorité qui s’oppose à la violence, aux discriminations et aux persécutions religieuses. »
REF.: 20080623STO32401
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La Turquie doit accélérer ses réformes
26-05-2008 - 06:05
Extrait
Les députés encouragent la Turquie à "transformer les priorités et les délais établis en plans de
réforme", dans leur dernier rapport sur les progrès réalisés par ce pays. Adopté mercredi à une
large majorité, le rapport salue plusieurs initiatives législatives prises récemment tout en
soulignant la nécessité d'accélérer le rythme des réformes.
Les négociations d'adhésion avec la Turquie ont été ouvertes le 3 octobre 2005, point de départ d'un processus
d'adhésion de longue haleine à l'issue encore ouverte. La Turquie s'est engagée à entreprendre des réformes, à
entretenir de bonnes relations de voisinage et à intégrer progressivement l'acquis communautaire.
Le rapport d'initiative de Ria Oomen-Ruijten (PPE-DE, NL), adopté à une large majorité par 467 voix pour, 62
voix contre et 61 abstentions, se "félicite de l'engagement pris par le Premier Ministre Erdogan de faire de 2008
l'année des réformes" et "presse le gouvernement turc de tenir ses promesses" à cet égard. Soulignant que "la
modernisation est avant tout dans l'intérêt de la Turquie", il relève aussi que "de nouveaux retards affecteront
sensiblement le rythme des négociations".
(…)
Religions
Le gouvernement turc est invité à respecter, dans le contexte des réformes, le pluralisme et la diversité ''dans
une Turquie laïque et démocratique''. Suite à la mesure positive que constitue l'adoption de la loi sur les
fondations, le gouvernement turc devrait donner suite aux engagements qu'il a pris quant à la liberté de religion
en établissant un cadre juridique permettant à toutes les communautés religieuses de fonctionner ''sans
contraintes excessives'', en particulier pour ce qui concerne leur statut juridique, la formation du clergé, l'élection
de la hiérarchie, l'éducation religieuse et la construction de lieux de culte.
La Commission devrait, selon les députés, analyser la question de savoir si cette loi résout toutes les questions
auxquelles sont confrontées les communautés religieuses non musulmanes pour ce qui concerne la gestion et
l'acquisition de biens immeubles, y compris les biens confisqués vendus à des tiers par le gouvernement de la
Turquie.
Par ailleurs, les députés sont préoccupés par ''l'hostilité témoignée avec force'' dans certains secteurs de la
société à l'égard des minorités et par les actes de violence motivés par des considérations politiques et
religieuses. Les autorités turques sont invitées à mener une enquête approfondie sur l'assassinat de Hrant Dink
et de trois chrétiens à Malatya, ''de même que sur tous les autres cas de violence motivés par des considérations
politiques, religieuses ou raciales''.
(…)
© La lettre du droit des religions n°31 juin / juillet 2008
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Assemblée Nationale
Questions écrites
13ème législature
Mai 2008
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Question N° : 8331 de M. Villain François-Xavier(Députés n'appartenant à aucun
groupe - Nord) QE
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère attributaire : Premier ministre
Question publiée au JO le : 23/10/2007 page : 6415
Réponse publiée au JO le : 20/05/2008 page : 4187
Rubrique : ésotérisme
Tête d'analyse : sectes
Analyse : commission d'enquête. rapport. conclusions
Texte de la QUESTION : M. François-Xavier Villain attire l'attention de M. le Premier ministre sur
le rapport n° 3507 remis au Gouvernement au nom de la commission d'enquête relative à
l'influence des mouvements à caractère sectaire et aux conséquences de leurs pratiques sur la
santé physique et mentale des mineurs. Ledit rapport propose d'inciter les conseils généraux à
mettre en place des formations au fait sectaire en direction des personnels de leurs services
sociaux, en charge des procédures d'agrément des assistants familiaux ou des adoptants. Aussi, il
lui serait agréable de connaître la position du Gouvernement quant à cette proposition, d'une part
et, dans quel délai il compte la mettre en oeuvre, d'autre part.
Texte de la REPONSE : Les risques de dérives sectaires constituent un motif de préoccupation
pour le Gouvernement. Ceux-ci ne relèvent effectivement plus seulement de la sphère religieuse
mais se développent également dans des secteurs plus diversifiés concernant l'ensemble du tissu
social. Dans ce contexte, le Premier ministre a eu l'occasion de réaffirmer la nécessité
d'appréhender ce phénomène dans le cadre interministériel spécifique et de rappeler ainsi l'intérêt
s'attachant au maintien de la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives
sectaires. Il a également souligné la nécessité de renforcer l'efficacité de cette politique de
vigilance qui ne saurait se limiter à la seule démarche de prévention. C'est dans cette perspective
que vient d'être confiée à M. Georges Fenech, magistrat et ancien président de la commission
d'enquêtes sur les sectes et les mineurs, une mission d'évaluation des dispositifs judiciaires relatifs
à la lutte contre les dérives sectaires concernant les auteurs des dérives et leurs victimes. Il lui
appartiendra notamment de dresser un bilan de l'application de la loi « About-Picard » de juin
2001, d'analyser la formation des magistrats et leur sensibilisation aux dérives sectaires, ainsi que
le rôle des associations.
Question N° : 17560 de Mme Zimmermann Marie-Jo(Union pour un Mouvement
Populaire - Moselle) QE
Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Ministère attributaire : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Question publiée au JO le : 26/02/2008 page : 1545
Réponse publiée au JO le : 20/05/2008 page : 4230
Rubrique : cultes
Tête d'analyse : Alsace-Moselle
Analyse : cloches et clochers. entretien. compétences
Texte de la QUESTION : Mme Marie-Jo Zimmermann attire l'attention de Mme la ministre de
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l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur le cas d'une commune d'Alsace-Moselle
où les cloches servent à la fois aux sonneries civiles et aux sonneries religieuses. Elle souhaiterait
qu'elle lui indique si, dans cette hypothèse, l'entretien des cloches et du clocher doit être assuré
par le conseil de fabrique ou par la commune. En cas de partage, elle souhaiterait savoir sur quels
critères le partage de compétences est effectué.
Texte de la REPONSE : Cette question étant formulée exactement dans les mêmes termes que
celle du sénateur Masson en date du 21 février 2008, elle appelle la même réponse. Bien que
l'utilisation des cloches des églises à des fins civiles soit prévue par l'article 48 de la loi du 18
germinal an X, le décret du 30 décembre 1809 concernant les fabriques des églises n'a pas institué
de conditions particulières de financement de leur entretien. Selon un avis du Conseil d'État de
1888, les cloches deviennent biens immeubles par destination dès leur installation dans le clocher.
Il en résulte que leur entretien incombe au conseil de fabrique en application de l'article 37 (3°) du
décret susvisé qui met à la charge du budget de la fabrique les travaux d'embellissement,
entretien, réparations, grosses réparations et reconstruction de l'église. Dès lors, les communes ne
peuvent être contraintes à participer au financement qu'à titre subsidiaire en cas d'insuffisance des
ressources de l'établissement public du culte.
Question N° : 21443 de M. Morisset Jean-Marie(Union pour un Mouvement Populaire Deux-Sèvres) QE
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère attributaire : Premier ministre
Question publiée au JO le : 22/04/2008 page : 3348
Réponse publiée au JO le : 20/05/2008 page : 4187
Rubrique : ésotérisme
Tête d'analyse : mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires
Analyse : fonctionnement. bilan et perspectives
Texte de la QUESTION : M. Jean-Marie Morisset attire l'attention de M. le Premier ministre sur
l'avenir de la Mission de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes). Cette mission
est notamment chargée d'observer et d'analyser le phénomène des mouvements à caractère
sectaire dont les agissements sont attentatoires aux droits de l'homme et aux libertés
fondamentales ; de favoriser, dans le respect des libertés publiques, la coordination de l'action
préventive et répressive des pouvoirs publics à l'encontre de ces agissements ; de développer
l'échange des informations entre les services publics sur les pratiques administratives dans le
domaine de la lutte contre les dérives sectaires ; et de contribuer à l'information et à la formation
des agents publics dans ce domaine. En présentant le rapport 2007 de la Miviludes son président,
Jean-Michel Roulet, a estimé qu'il fallait "revoir, à la lumière de l'évolution du paysage sectaire, ses
attributions : il faut lui donner les moyens d'aller plus loin dans l'investigation et multiplier les
formations des fonctionnaires d'État et des collectivités locales". Aussi, il lui demande de bien
vouloir lui préciser ses intentions en la matière et les mesures qui pourraient être envisagées afin
de soutenir et renforcer l'action de la Miviludes.
Texte de la REPONSE : Les risques de dérives sectaires constituent un motif de préoccupation
pour le Gouvernement. Ceux-ci ne relèvent effectivement plus seulement de la sphère religieuse
mais se développent également dans des secteurs plus diversifiés concernant l'ensemble du tissu
social. Dans ce contexte, le Premier ministre a eu l'occasion de réaffirmer la nécessité
d'appréhender ce phénomène dans le cadre interministériel spécifique et de rappeler ainsi l'intérêt
s'attachant au maintien de la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives
sectaires. Il a également souligné la nécessité de renforcer l'efficacité de cette politique de
vigilance qui ne saurait se limiter à la seule démarche de prévention. C'est dans cette perspective
que vient d'être confiée à M. Georges Fenech, magistrat et ancien président de la commission
d'enquêtes sur les sectes et les mineurs, une mission d'évaluation des dispositifs judiciaires relatifs
à la lutte contre les dérives sectaires concernant les auteurs des dérives et leurs victimes. Il lui
appartiendra notamment de dresser un bilan de l'application de la loi « About-Picard » de juin
2001, d'analyser la formation des magistrats et leur sensibilisation aux dérives sectaires, ainsi que
le rôle des associations.
Question N° : 23380 de M. Saint-Léger Francis(Union pour un Mouvement Populaire -
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Lozère) QE
Ministère interrogé : Culture et communication
Ministère attributaire : Culture et communication
Question publiée au JO le : 20/05/2008 page : 4115
Rubrique : patrimoine culturel
Tête d'analyse : protection
Analyse : édifices religieux
Texte de la QUESTION : M. Francis Saint-Léger attire l'attention de Mme la ministre de la culture
et de la communication sur la dégradation graduelle d'une certain nombre d'édifices religieux. Un
certain nombre de monuments à l'intérêt architectural et historique remarquables sont menacés de
ruine. Il désire connaître les mesures qu'elle entend prendre dans ce domaine.
Question N° : 16493 de M. Grellier Jean(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche Deux-Sèvres) QE
Ministère interrogé : Relations avec le Parlement
Ministère attributaire : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Question publiée au JO le : 12/02/2008 page : 1117
Réponse publiée au JO le : 20/05/2008 page : 4230
Date de changement d'attribution : 11/03/2008
Rubrique : ésotérisme
Tête d'analyse : sectes
Analyse : lutte et prévention
Texte de la QUESTION : M. Jean Grellier alerte M. le secrétaire d'État chargé des relations avec
le Parlement sur les publications récemment reçues par les parlementaires relatives à la
psychiatrie. Il y a quelques semaines, une brochure luxueuse, agrémentée de surcroît d'un DVD
édifiant quant au diagnostic sur les "mérites " de la pratique de la psychiatrie, était transmise à
tous les députés. Lecture faite des mentions légales de ce document, il apparaît qu'il émane de
l'Église de scientologie. Selon le rapport parlementaire n° 2468, l'Église de scientologie est
identifiée de manière indéniable comme un mouvement sectaire. Les sectes peuvent donc
librement faire oeuvre de prosélytisme jusque dans nos institutions où les principes de laïcité et de
rationalisme éclairé conditionnent nos principes républicains. Il lui demande donc de bien vouloir lui
expliquer sa position quant à ce qui semble être pour le moins un paradoxe extrêmement gênant.
Texte de la REPONSE : Le droit positif ignore la notion de secte à laquelle n'est attachée aucune
conséquence juridique. Cette absence de définition résulte de la conception française de la laïcité,
qui trouve son fondement dans l'article 10 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen
disposant que « nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur
manifestation ne trouble pas l'ordre public institué par la loi », et qui pose ainsi clairement le
principe de la neutralité de l'État à l'égard des opinions religieuses. C'est pourquoi tout courant de
pensée peut librement s'exprimer, tant qu'il agit dans le cadre de la loi. Néanmoins, si la
République assure la liberté de conscience et garantit le libre exercice des cultes, elle réprime les
dérives constatées dans certains groupements qui peuvent, en l'état actuel de notre droit, tomber
d'ores et déjà sous le coup de multiples qualifications pénales. L'intitulé de la « mission de vigilance
et de lutte contre les dérives sectaires » créée par décret le 28 novembre 2002 résume la
conception des pouvoirs publics en la matière ; cette même conception a sous-tendu l'élaboration
de la loi n° 2001-504 du 12 juin 2001 visant à renforcer la prévention et la répression des
mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales.
Question N° : 11070 de M. Remiller Jacques(Union pour un Mouvement Populaire Isère) QE
Ministère interrogé : Justice
Ministère attributaire : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Question publiée au JO le : 20/11/2007 page : 7201
Réponse publiée au JO le : 20/05/2008 page : 4228
Date de changement d'attribution : 01/01/2008
Rubrique : cultes
Tête d'analyse : culte musulman
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Analyse : infiltration. islamistes radicaux. lutte et prévention
Texte de la QUESTION : M. Jacques Remiller appelle l'attention de Mme la garde des sceaux,
ministre de la justice, sur la protection d'associations musulmanes influentes dont bénéficient dixsept imams pourtant sous le coup d'un arrêté ministériel d'expulsion pour des prêches radicaux ou
des comportements susceptibles d'attenter à la sécurité du territoire. Le futur imam de la grande
mosquée de Créteil, qui devrait être terminée au premier trimestre 2008, est « connu pour son
engagement au profit de l'idéologie salafiste » et aurait prononcé depuis son arrivée en France en
1999 toute une série de prêches « soutenant les moudjahidins et fustigeant Israël et les États-Unis
» selon des rapports de police auxquels Le Figaro a eu accès. Or cet imam est soutenu par la
Mosquée de Paris et par l'union des organisations islamiques de France (UOIF). Il souhaite par
conséquent connaître son sentiment sur cette question.
Texte de la REPONSE : Les mesures d'expulsion de prédicateurs tenant des prêches radicaux
répondent à une procédure définie aux articles L. 521-2 et suivants du code de l'entrée et du
séjour des étrangers et du droit d'asile, permettant de concilier le respect des droits fondamentaux
et la protection de l'ordre public. Ce dispositif, auquel participent plusieurs services de
renseignement, est placé sous l'autorité de l'unité de coordination de lutte anti-terroriste (UCLAT)
de la direction générale de la police nationale. Au mois de novembre 2007, une proposition
d'expulsion d'imam radical était en cours d'examen, non dix-sept comme indiqué dans la question
parlementaire. S'agissant de l'imam de la mosquée de Créteil, sa situation en novembre 2007 était
en cours d'examen au regard d'une mesure d'expulsion proposée à son encontre en raison de ses
propos radicaux. L'intéressé ayant introduit un recours devant le Conseil d'État contre un refus
d'acquisition de la nationalité française, la procédure a été suspendue dans l'attente de la décision
du Conseil d'État. La haute juridiction administrative ayant rejeté la demande du requérant, la
procédure d'expulsion a repris. La protection de la part d'associations musulmanes dont
bénéficieraient certains prédicateurs à l'encontre desquels pourraient être prononcées des mesures
d'expulsion est, de façon très générale, de pure forme. Ainsi, des organismes religieux reconnus
comme la GMP (Grande Mosquée de Paris) et l'UOIF (Union des organisations islamiques de
France) assurent de leur soutien des personnes de confession musulmane au seul motif qu'elles
exercent des fonctions religieuses, sans considération de critères qualitatifs. En tout état de cause,
leur attitude n'influence en rien l'action publique. Au total, deux imams radicaux ont été expulsés
en 2007 et deux procédures d'expulsion de prédicateurs radicaux sont en cours d'examen en
2008.
Question N° : 23116 de M. Raoult Éric(Union pour un Mouvement Populaire - SeineSaint-Denis) QE
Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Ministère attributaire : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Question publiée au JO le : 20/05/2008 page : 4141
Rubrique : cultes
Tête d'analyse : culte musulman
Analyse : instance représentative
Texte de la QUESTION : M. Éric Raoult attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de
l'outre-mer et des collectivités territoriales sur le devenir du Conseil français du culte musulman. En
effet, cette instance représentative du culte musulman dans notre pays, avait été envisagée sous
plusieurs gouvernements et mise en place par le président de la République, alors ministre de
l'intérieur. Le CFCM a représenté un très grand espoir notamment par l'esprit d'entente et de
concorde qu'il s'était fixé lors de son lancement en décembre 2002. Les différentes communautés
qui y étaient représentées y avaient gardé leur identité, souvent certes en étroit contact avec
certains pays d'origine. Il semblerait malheureusement que le travail de fond de recherches et
d'études, comme des prises de position sur certains dossiers particulièrement importants pour la
communauté musulmane de France sont restés « en plan », suscitant une déception croissante
(construction de mosquées, carrés musulmans dans les cimetières, formation des imams,
organisation des fêtes religieuses, nomination des aumôniers dans les hôpitaux, les prisons,
collèges et lycées...). Désormais cette communauté s'interroge sur l'utilité du CFCM, d'autant plus
que ses dirigeants et ses membres n'ont cessé de polémiquer entre eux, sur des sujets qui
n'étaient pas toujours religieux. Il conviendrait donc de revaloriser l'image extérieure du CFCM et
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d'y faire taire tous les antagonismes dans l'avenir et notamment certaines ingérences de pays
étrangers ayant de nombreux ressortissants immigrés en France. Il lui demande donc de lui
préciser la position du Gouvernement sur ce dossier.
Question N° : 17914 de M. Gaubert Jean(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche Côtes-d'Armor) QE
Ministère interrogé : Justice
Ministère attributaire : Justice
Question publiée au JO le : 26/02/2008 page : 1549
Réponse publiée au JO le : 06/05/2008 page : 3856
Rubrique : système pénitentiaire
Tête d'analyse : établissements
Analyse : aumôneries. moyens
Texte de la QUESTION : M. Jean Gaubert attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre
de la justice, sur la situation des aumôniers dans les prisons françaises. En effet, pendant la
détention, le principe de la liberté religieuse doit être respecté, chaque détenu doit pouvoir
satisfaire aux exigences de sa vie religieuse, morale ou spirituelle. Ce sont les aumôniers et
auxiliaires bénévoles d'aumônerie qui célèbrent les offices, administrent les sacrements et
apportent aux détenus le secours et l'apaisement de leur religion. Mais les aumôniers manquent de
moyens. Il lui demande donc d'indiquer à la représentation, nationale quels moyens matériels le
Gouvernement entend donner aux aumôniers afin de favoriser l'émergence de visiteurs de toutes
obédience et permettre un apaisement de la situation dans des prisons malheureusement très
surpeuplées.
Texte de la REPONSE : La garde des sceaux, ministre de la justice, informe l'honorable
parlementaire qu'une attention particulière est portée à la liberté de pratiquer une religion et de
recevoir une assistance spirituelle en prison. La liberté religieuse dans le contexte de la détention
est bien ressentie comme une source d'apaisement par l'administration pénitentiaire et même audelà, comme un droit des personnes détenues. Dans ce sens, le projet de loi pénitentiaire
permettra à la représentation nationale de reconnaître formellement le principe de la liberté
religieuse des personnes détenues. Les budgets relatifs aux dépenses cultuelles n'ont cessé de
croître ces dernières années, ainsi la dotation 2005 s'est élevée à 1 413 457 EUR, celle de 2006 à 1
607 181 EUR, celle de 2007 à 1 757 563 EUR, tandis que la dotation 2008 atteindra 2 106 487
EUR. Cette progression budgétaire peut encore apparaître comme insuffisante, mais elle n'en
constitue pas moins un réel effort pour une administration dont on connaît l'ampleur des charges.
Par ailleurs, l'administration pénitentiaire a produit des efforts d'organisation et d'aménagement
pour faciliter l'exercice des aumôniers. Ainsi des formations d'appui et d'accueil des nouveaux
aumôniers sont mises en place dans les directions interrégionales des services pénitentiaires pour
permettre aux aumôniers de tous les cultes d'avoir des repères clarifiés sur leur exercice en milieu
pénitentiaire. La réglementation relative à l'exercice du culte musulman a été définie. En effet,
celui-ci, du fait d'une implantation récente en milieu pénitentiaire nécessitait des aménagements
(objets de culte autorisés en prison, port des vêtements religieux, organisation des prières
collectives et des fêtes religieuses, utilisation des tapis de prières, etc.). Des correspondants pour
les cultes ont été désignés au sein des directions interrégionales pour permettre une plus grande
dynamique et faciliter le relais avec l'administration pénitentiaire pour' les aumôniers régionaux. La
concertation a été accrue avec les aumôniers nationaux sur la gestion et la répartition de leurs
ressources : ceux-ci sont régulièrement consultés par le directeur de l'administration pénitentiaire
sur cette question et sur celle de l'exercice du culte en détention. De plus, le statut des aumôniers
rémunérés a été modernisé. Enfin, en termes d'égalité d'accès au culte de leur choix pour les
personnes détenues, l'administration pénitentiaire poursuit le rééquilibrage nécessaire en direction
du culte musulman.
Question N° : 6296 de M. Raoult Éric(Union pour un Mouvement Populaire - SeineSaint-Denis) QE
Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Ministère attributaire : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Question publiée au JO le : 09/10/2007 page : 6074
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Réponse publiée au JO le : 06/05/2008 page : 3844
Rubrique : ésotérisme
Tête d'analyse : sectes
Analyse : lutte et prévention
Texte de la QUESTION : M. Éric Raoult attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de
l'outre-mer et des collectivités territoriales sur le contenu proche du racisme de certaines dérives
sectaires. En effet, le « racisme naturel » qui se trouve banalisé dans les préceptes de l'Association
française de l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours mérite d'être soulevé. Au-delà de
ces doctrines qui peuvent s'avérer racistes, un autre problème sur une question d'archives. Les
Archives nationales françaises semblent avoir un accord avec ce pseudo, mouvement religieux. Cet
accord sous la forme d'un arrêté ministériel du 28 septembre 1987, semble donner toute l'attitude
à une extension de l'Église (la société de généalogie Salt Lake City) pour effectuer le micro-filmage
de tous les registres paroissiaux et d'état civil français. Dès lors, il semblerait que cette « Église »
puisse avoir en sa possession le plus grand stock dans le monde de fiches d'état civil, mais
personne ne connaît vraiment leurs véritables objectifs. Aucun contrôle effectif de l'usage de ces
micros-filmages n'est véritablement effectué : tout ceci se passant dans la plus totale opacité. Dès
lors, une question peut véritablement se poser : comment un État laïc et républicain comme la
France peut continuer à confier à un mouvement religieux, parfois contesté dans les pays où il est
présent et actif, les registres paroissiaux et d'état civil, mémoire de notre pays. Il lui demande donc
de lui préciser sa position sur cette question.
Texte de la REPONSE : Le 28 octobre 1960, la direction générale des Archives de France et la
société généalogique de Salt Lake City émanant de l'Église de Jésus-Christ des Saints des derniers
jours, ont signé un accord permettant le microfilmage des registres paroissiaux et d'état civil par
ladite société. Saisie sur un projet d'avenant à ce protocole, la commission nationale de
l'informatique et des libertés a émis un avis favorable au projet sous réserve de certaines
modifications qu'elle a formulées dans sa délibération n° 87-44 du 28 avril 1987. Elle a tenu
compte du fait que le microfilmage ne portait que sur des registres de plus de cent ans d'âge, qu'il
a pour finalité d'identifier les ancêtres des membres de l'Église de Jésus-Christ des Saints des
derniers jours, que les données relatives à l'origine ethnique, aux causes du décès, aux opinions
religieuses et aux professions ne sont pas mémorisées, que la durée de l'accord est fixé à cinq ans
renouvelables et qu'il prévoit la possibilité, pour les autorités françaises, de le résilier
unilatéralement dans le cas où l'une de ses dispositions ne serait pas respectée par le
cocontractant. Par ailleurs, une liste comportant la nature des recherches engagées à partir
d'informations collectées dans les archives françaises est annuellement transmise à la Direction des
Archives de France pour contrôle.
Question N° : 15864 de M. Liebgott Michel(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
- Moselle) QE
Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Ministère attributaire : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Question publiée au JO le : 05/02/2008 page : 922
Réponse publiée au JO le : 06/05/2008 page : 3847
Rubrique : cultes
Tête d'analyse : financement
Analyse : subventions. réglementation
Texte de la QUESTION : M. Michel Liebgott alerte Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer
et des collectivités territoriales sur le projet prêté au chef de l'État de réformer la loi de 1905
portant sur la séparation de l'Église et de l'État. De laïcité positive lors d'une visite pontificale mise
à profit pour vanter les mérites soit disant supérieurs du curé ou du pasteur face à l'instituteur,
fondés sur une transcendance dont ce dernier serait démuni, en passant par Riyad où les valeurs
religieuses sont mises en avant avec la même verve par le président d'une République laïque, le
chef de l'État préparerait à présent, selon les déclarations de sa directrice de cabinet, une refonte
de la loi de 1905. Ses principaux objectifs seraient « d'élargir la notion d'association cultuelle ».
Derrière cette avenante sémantique se dissimule en fait la volonté, à laquelle le président de la
République a souvent fait allusion, de rétablir le financement public des religions en leur accordant
un statut qui autorise les subventions de l'État et des dons et legs déductibles des impôts, donc
© La lettre du droit des religions n°31 juin / juillet 2008
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puisés dans la richesse de la nation. Il suffit pour s'en convaincre de considérer l'accueil
bienveillant réservé en son temps par M. Sarkozy, alors ministre de l'intérieur et donc en charge
des cultes, à l'église de la scientologie, à travers son pape hollywoodien qu'est l'acteur Tom Cruise,
alors même que cette organisation est reconnue comme étant sectaire. Dès lors se glisseront dans
la brèche, témoins de Jéhovah, associations islamistes fondamentalistes et autres sectes dont les
méthodes de décérébration ne sont que trop connues et dénoncées par ceux et celles qui ont eu la
force et la chance de s'en émanciper. Il lui demande donc, en sa qualité de ministre des cultes, de
bien prendre la mesure des conséquences d'une telle réforme qui dans les faits mettrait à bas les
fondements de la loi de 1905 ainsi que notre pacte républicain et laïc, en alertant la présidence de
la République sur les risques ainsi encourus par notre pays.
Texte de la REPONSE : La loi du 9 décembre 1905 relative à la séparation des Églises et de l'État
a déjà été modifiée à treize reprises pour l'adapter aux évolutions de la société, qui n'ont pas
manqué depuis sa publication. Il n'est pas envisagé de procéder à une nouvelle révision.
Question N° : 17050 de M. Roy Patrick(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche Nord) QE
Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Ministère attributaire : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Question publiée au JO le : 19/02/2008 page : 1340
Réponse publiée au JO le : 06/05/2008 page : 3848
Rubrique : ésotérisme
Tête d'analyse : Église de scientologie
Analyse : revendications. pertinence
Texte de la QUESTION : M. Patrick Roy attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de
l'outre-mer et des collectivités territoriales sur la demande tout à fait scandaleuse de l'Église de
scientologie qui souhaite que ses membres bénéficient de la liberté de conscience reconnue dans la
Constitution. Dans un communiqué diffusé mardi 12 février 2008, l'Église de scientologie s'estime
victime de "violations de la loi de 1905" sur la séparation des Églises et de l'État. Elle demande que
ses membres bénéficient de la liberté de conscience reconnue dans la Constitution. Il souhaite
connaître la réponse qui sera faite à cette organisation.
Texte de la REPONSE : L'article 10 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen
disposant que « nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur
manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi », l'article 9 de la Convention
européenne des droits de l'homme précisant que « toute personne a droit à la liberté de pensée,
de conscience et de religion » et l'article 1er de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation
des Églises et de l'État, disposant que la République assure la liberté de conscience, il en résulte
que les adeptes français de l'Église de scientologie jouissent comme tout citoyen des droits garantis
par ces textes.
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Question N° : 22206 de Mme Zimmermann Marie-Jo(Union pour un Mouvement
Populaire - Moselle) QE
Ministère interrogé : Économie, industrie et emploi
Ministère attributaire : Économie, industrie et emploi
Question publiée au JO le : 29/04/2008 page : 3596
Rubrique : TVA
Tête d'analyse : taux
Analyse : pompes funèbres
Texte de la QUESTION : Mme Marie-Jo Zimmermann attire l'attention de Mme la ministre de
l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur le fait que dans la plupart des pays européens, les frais
d'obsèques bénéficient d'un taux de TVA réduit, ce qui correspond d'ailleurs à une directive de
l'Union européenne. Elle souhaiterait qu'il lui indique pour quelle raison les pouvoirs publics
persistent à refuser d'assujettir la plupart des prestations funéraires à un taux réduit de TVA
d'autant qu'en cas de décès, les familles sont souvent confrontées à des difficultés matérielles
importantes.
Question N° : 22019 de M. Perrut Bernard(Union pour un Mouvement Populaire -
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Rhône) QE
Ministère interrogé : Culture et communication
Ministère attributaire : Culture et communication
Question publiée au JO le : 29/04/2008 page : 3579
Rubrique : patrimoine culturel
Tête d'analyse : églises rurales
Analyse : conservation. aides de l'État
Texte de la QUESTION : M. Bernard Perrut attire l'attention de Mme la ministre de la culture et
de la communication sur les difficultés rencontrées par les communes, notamment dans le milieu
rural, pour assurer le bon état du patrimoine architectural et historique dont elles ont la charge
sans avoir les moyens financiers nécessaires. En particulier, des églises ou des édifices religieux
divers sont menacés de destruction surtout lorsqu'ils ne sont plus affectés à ce service auprès de la
population. Il lui demande quelles mesures peuvent être prises pour aider à assurer la restauration
d'un patrimoine parfois très ancien qui est un élément de l'histoire de notre pays.
Question N° : 15145 de Mme Bousquet Danielle(Socialiste, radical, citoyen et divers
gauche - Côtes-d'Armor) QE
Ministère interrogé : Justice
Ministère attributaire : Justice
Question publiée au JO le : 22/01/2008 page : 450
Réponse publiée au JO le : 29/04/2008 page : 3667
Rubrique : système pénitentiaire
Tête d'analyse : établissements
Analyse : aumôniers. effectifs de personnel
Texte de la QUESTION : Mme Danielle Bousquet attire l'attention de Mme la garde des sceaux,
ministre de la justice, sur la situation des aumôniers dans les prisons françaises. En effet, la
population carcérale augmente de façon alarmante. Au 1er novembre 2007, 61 763 personnes
étaient incarcérées en France, soit une augmentation de 1,1 % par rapport au mois précédent.
Mais aucune création de poste d'aumôniers dans les prisons ne semble envisagée. Pourtant, les
aumôniers des prisons inscrivent leur action dans le cadre de la loi du 9 décembre 1905 qui
dispose, dans son premier article, que la République garantit le libre exercice des cultes. La liberté
de recevoir une assistance spirituelle et de pratiquer une religion pour les détenus qui le souhaitent
est donc une expression majeure de la liberté de conscience. Les aumôniers représentent, par leur
présence et leur travail, un espace de spiritualité, loin des dérives prosélytes et radicales
incontrôlées. Elle lui demande donc d'indiquer à la représentation nationale quelles mesures le
Gouvernement entend prendre pour les aumôniers dans les prisons, afin d'y favoriser une pratique
religieuse tolérante et s'inscrivant dans les lois de la République.
Texte de la REPONSE : La garde des sceaux, ministre de la justice, informe l'honorable
parlementaire qu'une attention particulière est portée à la liberté de pratiquer une religion et de
recevoir une assistance spirituelle en prison. Cette dimension a été prise en compte par un
ensemble de mesures d'aménagement de l'exercice du culte prises par l'administration pénitentiaire
: formations d'appui et d'accueil des nouveaux aumôniers mises en place dans les directions
interrégionales pour permettre aux aumôniers de tous les cultes d'avoir des repères clarifiés sur
leur exercice en milieu pénitentiaire ; réglementation de l'exercice du culte musulman. En effet,
celui-ci, du fait d'une implantation plus récente en milieu pénitentiaire nécessitait des
aménagements (objets de culte autorisés en prison, port des vêtements religieux, organisation des
prières collectives et des fêtes religieuses, utilisation des tapis de prières...) ; désignation de
correspondants pour les cultes en directions interrégionales, pour permettre une plus grande
dynamique et faciliter le relais avec l'administration pour les aumôniers régionaux ; concertation
accrue avec les aumôniers nationaux sur la gestion et la répartition de leurs ressources : ceux-ci
sont régulièrement consultés sur cette question et sur celle de l'exercice du culte en détention par
le directeur de l'administration pénitentiaire ; modernisation du statut des aumôniers rémunérés.
En outre, comme l'honorable parlementaire l'indique, la mise en place de l'exercice des cultes en
milieu pénitentiaire résulte directement de la loi de séparation des églises et de l'État de 1905, et
du deuxième alinéa de l'article 2 de cette loi : « Pourront, toutefois, être inscrites auxdits budgets
les dépenses relatives à des services d'aumônerie et destinées à assurer le libre exercice des cultes
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dans les établissements publics tels que lycées, collèges, écoles, hospices, asiles et prisons ».
L'administration pénitentiaire doit donc permettre l'exercice du culte des personnes qui lui sont
confiées par la justice. L'action de l'administration doit toutefois s'inscrire dans le respect des
grands principes de neutralité et d'égalité. Deux dispositifs répondent à cette exigence : un recueil
des demandes cultuelles des personnes détenues, recueil totalement anonyme, qui permet de
corréler le recrutement des aumôniers aux besoins exprimés par les personnes détenues. Ce
dispositif permettra progressivement de mieux répartir les ressources d'aumônerie. À cet égard, un
amendement parlementaire a été voté lors des débats sur le budget de la justice 2008, et sa
répartition a permis de mieux équilibrer le recrutement d'aumôniers au profit du culte musulman,
encore déficitaire dans les établissements pénitentiaires : la mise en place de salles polycultuelles
en détention dont l'objectif est d'offrir à tous les cultes sans distinction un lieu de célébration des
offices, dans des conditions identiques de respect et d'accès pour personnes détenues. Ce lieu,
identifié et aménagé, permet aux aumôniers des différents cultes de répartir l'usage de la salle
polycultuelle en accord avec le chef d'établissement. En outre, l'utilisation d'un local partagé entre
les différentes religions invite la population pénale à ne pas vivre le fait religieux en termes de
rivalité des religions entre elles, mais de respect réciproque de la liberté de conscience et de
religion auquel chacun a droit. Enfin, le projet de loi pénitentiaire permettra à la représentation
nationale de reconnaître formellement le principe de la liberté de culte des personnes détenues.
Question N° : 23856 de M. Poisson Jean-Frédéric(Union pour un Mouvement Populaire
- Yvelines) QE
Ministère interrogé : Affaires étrangères et européennes
Ministère attributaire : Affaires étrangères et européennes
Question publiée au JO le : 27/05/2008 page : 4304
Rubrique : politique extérieure
Tête d'analyse : Koweït
Analyse : liberté de culte
Texte de la QUESTION : M. Jean-Frédéric Poisson interroge M. le ministre des affaires
étrangères et européennes sur la liberté religieuse au Koweït. En effet, les dernières élections
législatives dans ce pays ont reconduit la majorité islamique. Proche des mouvements salafistes,
cette majorité prône l'application de la charia. Il souhaiterait connaître la situation des minorités
religieuses dans ce pays, notamment chrétienne et juive, ainsi que les intentions du Gouvernement
français en vue de préserver cette liberté naturelle et fondamentale.
Question N° : 23657 de Mme Zimmermann Marie-Jo(Union pour un Mouvement
Populaire - Moselle) QE
Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Ministère attributaire : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Question publiée au JO le : 27/05/2008 page : 4336
Rubrique : cultes
Tête d'analyse : Alsace-Moselle
Analyse : financement. subventions. réglementation
Texte de la QUESTION : Mme Marie-Jo Zimmermann demande à Mme la ministre de l'intérieur,
de l'outre-mer et des collectivités territoriales de lui indiquer si en droit local d'Alsace-Moselle les
communes ont le droit de subventionner des activités religieuses d'une part dans le cas où il s'agit
d'un culte reconnu et d'autre part dans le cas où il s'agit d'un culte non reconnu. À la lumière de
l'arrêt du 6 mars 2008 de la cour administrative d'appel de Nancy (commune de Soultz) elle
souhaiterait notamment savoir si le versement de subvention par une commune à une association
religieuse oeuvrant sur le territoire de la commune est conforme au droit local.
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Assemblée Nationale
Questions écrites
13ème législature
Juin 2008
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Question N° : 24179 de M. Perez Jean-Claude(Socialiste, radical, citoyen et divers
gauche - Aude) QE
Ministère interrogé : Éducation nationale
Ministère attributaire : Éducation nationale
Question publiée au JO le : 03/06/2008 page : 4588
Rubrique : enseignement
Tête d'analyse : réglementation
Analyse : loi n° 2004-228 du 15 mars 2004. application
Texte de la QUESTION : M. Jean-Claude Perez attire l'attention de M. le ministre de l'éducation
nationale sur l'application de la loi du 15 mars 2004 encadrant le port de signes ou tenues
manifestant une appartenance religieuse dans les écoles. En application du principe de laïcité, la loi
n° 2004-228 du 14 mars 2004 interdit, dans les écoles collèges et lycées publics, le port, par les
élèves, de signes ou de tenues manifestant ostensiblement une appartenance religieuse. Elle vise à
préserver l'école publique des revendications identitaires et communautaires qui ne cessent de se
développer. Ce texte, dont les modalités d'application sont précisées par la circulaire du 18 mai
2004, permet de garantir l'égalité des élèves à l'école et de promouvoir une fraternité ouverte à
tous dans le respect des valeurs de la République. Toutefois, dans sa délibération du 14 mai 2007,
la haute autorité de lutte contre les discriminations (HALDE) a donné raison à des parents d'élèves
qui s'étaient vu refuser la possibilité d'accompagner des activités pédagogiques parce qu'ils
arboraient un voile islamique. Il estime pour sa part que ne pas faire la distinction entre les
différentes situations où des parents d'élèves sont en lien avec l'école est une erreur source de
conflits et en tranchant, comme elle l'a fait, la HALDE prend le risque d'ouvrir un brèche dans
laquelle d'autres obscurantismes pourront s'engouffrer dans un avenir proche. Il lui rappelle donc
que la vocation première de la HALDE, dont le rôle ne doit absolument pas être remis en cause, est
de protéger les citoyens de toutes formes de discrimination, mais n'a ni autorité ni agrément pour
se substituer au pouvoir juridictionnel, et qui a, dans le cas présent, commis une erreur manifeste
au regard de la circulaire d'application publiée au Bulletin officiel de l'éducation nationale (2004-84)
qui exclut explicitement toute manifestation d'appartenance religieuse par « les agents contribuant
au service public de l'éducation, quels que soient leur fonction et leur statut ». L'école, institution
fondamentale de la République, doit rester le lieu premier du « vivre ensemble » et préserver une
liberté de conscience naissante hors des appartenances ethniques ou religieuses. C'est pourquoi, il
lui demande de prendre des dispositions pour renforcer le principe de laïcité et de neutralité au
sein de l'institution scolaire en éditant une nouvelle circulaire renforçant la portée de la loi du 15
mars 2004 afin d'éviter toutes formes de contentieux futurs.
Question N° : 24331 de M. Degauchy Lucien(Union pour un Mouvement Populaire Oise) QE
Ministère interrogé : Culture et communication
Ministère attributaire : Culture et communication
Question publiée au JO le : 03/06/2008 page : 4572
Rubrique : patrimoine culturel
Tête d'analyse : églises rurales
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Analyse : conservation. aides de l'État
Texte de la QUESTION : M. Lucien Degauchy attire l'attention de Mme la ministre de la culture
et de la communication sur la dégradation et l'état de délabrement avancé des édifices religieux
par manque de moyens financiers. Conséquence de la loi de 1905 sur la séparation de l'Église et de
l'État, il n'en reste pas moins que ces édifices représentent un intérêt touristique, architectural et
historique important. Dès lors, il lui demande ce qu'il est envisagé afin de sauvegarder ces
monuments, que les communes rurales, pour des raisons budgétaires, ne peuvent entretenir, s'ils
ne bénéficient pas de mesure de protection.
Question N° : 24242 de M. Vanneste Christian(Union pour un Mouvement Populaire Nord) QE
Ministère interrogé : Immigration, intégration, identité nationale et développement solidaire
Ministère attributaire : Immigration, intégration, identité nationale et développement solidaire
Question publiée au JO le : 03/06/2008 page : 4595
Rubrique : famille
Tête d'analyse : mariage
Analyse : certificat de coutume. mentions. validité
Texte de la QUESTION : M. Christian Vanneste attire l'attention de M. le ministre de
l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire sur la situation
des Français non musulmans souhaitant se marier en France avec une marocaine musulmane.
Dans les pièces demandées par la mairie du lieu de résidence du futur époux, figure notamment un
certificat de coutume, délivré par le consulat du Maroc. Or, ce certificat stipule que "le mariage est
prohibé entre une musulmane et un non musulman". Ainsi, un Français voit son mariage
conditionné par une exigence de conversion à une religion, alors que la France est un pays laïc,
comme le rappelle l'article 1er de la Constitution de 1958. Il souhaiterait donc connaître son avis en
la matière.
Question N° : 24868 de M. Jung Armand(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche Bas-Rhin) QE
Ministère interrogé : Affaires étrangères et européennes
Ministère attributaire : Affaires étrangères et européennes
Question publiée au JO le : 10/06/2008 page : 4794
Rubrique : politique extérieure
Tête d'analyse : Algérie
Analyse : liberté de culte
Texte de la QUESTION : M. Armand Jung attire l'attention de M. le ministre des affaires
étrangères et européennes sur la situation préoccupante des chrétiens en Algérie. Suite à la loi du
28 février 2006 (ordonnance 06-03) qui réglemente les cultes non musulmans en Algérie, des
églises ont été fermées, des citoyens ont été arrêtés pour possession de littérature chrétienne et
des condamnations à la prison ferme et à payer de fortes amendes ont été prononcées. Au cours
des dernières années, l'Algérie a développé des partenariats dans différents domaines avec la
France, et plus largement avec l'Union européenne. L'Algérie est également membre de l'ONU et
signataire de la déclaration universelle des droits de l'Homme. L'Algérie remet pourtant en cause la
liberté de conscience et de religion en accroissant la répression à l'égard des chrétiens. Il souhaite
obtenir davantage d'informations sur la position de la France sur ce point précis.
Question N° : 24673 de M. Dupont-Aignan Nicolas(Députés n'appartenant à aucun
groupe - Essonne) QE
Ministère interrogé : Éducation nationale
Ministère attributaire : Éducation nationale
Question publiée au JO le : 10/06/2008 page : 4824
Rubrique : enseignement
Tête d'analyse : réglementation
Analyse : loi n° 2004-228 du 15 mars 2004. application. bilan
Texte de la QUESTION : M. Nicolas Dupont-Aignan appelle l'attention de M. le ministre de
l'éducation nationale sur l'intérêt de publier un texte réglementaire ou une circulaire pour rappeler
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aux enseignants, aux parents d'élèves, et plus généralement à tous les intervenants de la
communauté éducative, le caractère opposable de la loi n° 2004-228 du 15 mars 2004, encadrant,
en application du principe de laïcité, le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance
religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics. En effet, la circulaire du 18 mai 2004 vise à
préciser les conditions d'application de la loi précitée, mais ne s'adresse qu'aux seuls élèves. Or, à
la suite d'une décision prise par la HALDE en mai 2007, ayant donné raison à des parents
accompagnateurs d'une sortie scolaire, qui souhaitaient arborer un voile islamique, il apparaît
indispensable de rappeler que la loi sur la laïcité et la neutralité dans le cadre scolaire ne s'applique
pas seulement aux seuls élèves, mais à tous ceux qui, à quelque titre que ce soit, interviennent
auprès d'eux dans un cadre scolaire. La circulaire n° 99-136 du 21 septembre 1999 relative à
l'organisation des sorties scolaires, étant antérieure à la loi du 15 mars 2004, il apparaît logique
qu'un nouveau texte, de même portée, soit pris pour gérer ce même contexte depuis l'entrée en
application de cette nouvelle loi. Par ailleurs, il n'est pas légitime de faire reposer sur les seuls
chefs d'établissement la responsabilité d'apprécier les situations où la loi du 15 mars 2004 est
enfreinte. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir mettre à l'étude la rédaction d'un texte
réglementaire ou d'une nouvelle circulaire pour assurer l'application des dispositions législatives
relatives à l'interdiction des signes religieux à l'école.
Question N° : 24670 de M. Lesterlin Bernard(Socialiste, radical, citoyen et divers
gauche - Allier) QE
Ministère interrogé : Éducation nationale
Ministère attributaire : Éducation nationale
Question publiée au JO le : 10/06/2008 page : 4824
Rubrique : enseignement
Tête d'analyse : parents d'élèves
Analyse : laïcité. respect
Texte de la QUESTION : M. Bernard Lesterlin attire l'attention de M. le ministre de l'éducation
nationale sur les récentes décisions de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour
l'égalité cautionnant le port de signes religieux pour les parents d'élèves accompagnateurs lors de
sorties scolaires. La HALDE a donné raison à des mères d'élèves qui s'étaient vu refuser la
possibilité d'accompagner des activités pédagogiques parce qu'elles arboraient un voile islamique.
Ces décisions mettent directement en cause le principe de laïcité et la mission de l'école publique.
Il lui demande de prendre les mesures nécessaires au respect la loi du 15 mars 2004 et de veiller
au strict respect des principes de laïcité et de neutralité pour toute personne participant à
l'encadrement d'activités scolaires dans le service public.
Question N° : 25416 de M. Mourrut Étienne(Union pour un Mouvement Populaire Gard) QE
Ministère interrogé : Affaires étrangères et droits de l'homme
Ministère attributaire : Affaires étrangères et droits de l'homme
Question publiée au JO le : 17/06/2008 page : 4979
Rubrique : politique extérieure
Tête d'analyse : Algérie
Analyse : liberté de culte
Texte de la QUESTION : M. Étienne Mourrut attire l'attention de Mme la secrétaire d'État
chargée des affaires étrangères et des droits de l'homme sur les atteintes à la liberté religieuse en
Algérie. Depuis l'adoption de la loi du 28 février 2006 réglementant les cultes non musulman,
l'Algérie est le théâtre d'atteintes nombreuses à l'encontre des libertés religieuses des minorités.
Fermeture de lieux de culte, expulsions de dignitaires, adeptes traqués ; tel semble être le sort des
minorités religieuses. Pourtant, l'Algérie est membre des Nations Unies et par la même signataire
de la déclaration universelle des droits de l'homme qui garantit en sont article 18 la liberté
religieuse. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui indiquer la position de la France sur le sujet et si
la France ou l'Europe envisagent de se servir de leur partenariat avec l'Algérie pour faire levier afin
de permettre une libre expression des minorités religieuses.
Question N° : 25219 de M. Cuvillier Frédéric(Socialiste, radical, citoyen et divers
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gauche - Pas-de-Calais) QE
Ministère interrogé : Éducation nationale
Ministère attributaire : Éducation nationale
Question publiée au JO le : 17/06/2008 page : 5011
Rubrique : enseignement
Tête d'analyse : parents d'élèves
Analyse : laïcité. respect
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Texte de la QUESTION : M. Frédéric Cuvillier attire l'attention de M. le ministre de l'éducation
nationale sur les difficultés relatives à l'application du principe de laïcité, en vertu de la loi du 15
mars 2004, concernant notamment les parents accompagnateurs de sorties scolaires. En mai 2007,
la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (HALDE) a donné raison à des
mères d'élèves qui s'étaient vu refuser la possibilité d'accompagner des activités pédagogiques
parce qu'elles étaient voilées, et ce en dépit de ce que préconise la circulaire d'application de la loi
de mars 2004 qui exclut toute manifestation d'appartenance religieuse « par les agents contribuant
au service public de l'éducation, quels que soient leur fonction et statut ». Une telle décision est
donc venue remettre gravement en cause le devoir de réserve et de stricte neutralité qui vise à
protéger les élèves de toute propagande et à préserver une liberté de conscience naissante. Alors
que le principe républicain de laïcité ne saurait ainsi être remis en question, il souhaiterait savoir ce
qu'il entend faire pour qu'à l'avenir, toute décision allant à l'encontre du principe même de laïcité
ne puisse se reproduire.
Question N° : 25340 de M. Dord Dominique(Union pour un Mouvement Populaire Savoie) QE
Ministère interrogé : Budget, comptes publics et fonction publique
Ministère attributaire : Budget, comptes publics et fonction publique
Question publiée au JO le : 17/06/2008 page : 4987
Rubrique : impôt sur le revenu
Tête d'analyse : réductions d'impôt
Analyse : dons à des associations. champ d'application
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Texte de la QUESTION : M. Dominique Dord appelle l'attention de M. le ministre du budget, des
comptes publics et de la fonction publique sur les difficultés de certaines associations au regard du
dispositif du mécénat prévu aux articles 200 et 238 bis du Code général des impôts. Sauf cas
particuliers, peuvent en effet émettre de reçus fiscaux au profit de leurs donateurs les associations
ou organismes sans but lucratif exerçant une activité d'intérêt général et ayant un caractère
philanthropique, éducatif, social, humanitaire, familial, culturel. Certaines associations, exerçant
pourtant de toute évidence des activités présentant l'un des caractères précités se voient refuser la
possibilité d'émettre des reçus fiscaux au seul motif que leurs activités présentent une dimension
religieuse. Pourtant, la dimension religieuse d'une activité culturelle comme la promotion de l'art
sacré par exemple ne saurait lui retirer, de ce seul fait, son caractère culturel et d'intérêt général.
Les débats parlementaires pour la loi du 1er août 2003 ont réaffirmé que ce texte relatif au
mécénat «a vocation à être entendu de façon large». Il lui demande donc de bien vouloir lui
confirmer que le caractère confessionnel ou la dimension religieuse d'une activité n'est pas, à lui
seul, exclusif de l'intérêt général et de l'un ou l'autre des caractères visés aux articles 200 et 238
bis du Code général des impôts.
Question N° : 25256 de M. Vampa Marc(Nouveau Centre - Eure) QE
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère attributaire : Premier ministre
Question publiée au JO le : 17/06/2008 page : 4977
Rubrique : ésotérisme
Tête d'analyse : mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires
Analyse : fonctionnement. bilan et perspectives
Texte de la QUESTION : M. Marc Vampa attire l'attention de M. le Premier ministre sur la
Miviludes, dont l'action s'apparente à une véritable mission de service public auprès de nos
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concitoyens. Sa vigilance constante sur les agissements sectaires et son rôle dans la coordination
des actions de prévention sont essentiels et incontournables pour lutter contre un phénomène qui,
potentiellement, peut menacer toutes les familles. Tout affaiblissement de la Miviludes serait une
victoire pour les sectes. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui indiquer sa position sur ce dossier
de manière à rassurer les organismes d'aide aux victimes et les familles, quant au maintien de la
Miviludes.
Question N° : 3406 de Mme Poletti Bérengère(Union pour un Mouvement Populaire Ardennes) QE
Ministère interrogé : Justice
Ministère attributaire : Justice
Question publiée au JO le : 14/08/2007 page : 5232
Réponse publiée au JO le : 17/06/2008 page : 5221
Rubrique : ésotérisme
Tête d'analyse : sectes
Analyse : commission d'enquête. rapport. conclusions
Texte de la QUESTION : Mme Bérengère Poletti attire l'attention de Mme la garde des sceaux,
ministre de la justice, sur le rapport n° 3507 remis au Gouvernement au nom de la commission
d'enquête relative à l'influence des mouvements à caractère sectaire et aux conséquences de leurs
pratiques sur la santé physique et mentale des mineurs. Ledit rapport propose de permettre aux
grands-parents d'un enfant de saisir directement le juge des enfants lorsque la santé, la sécurité ou
la moralité de cet enfant sont en danger. En effet, dans ces hypothèses, l'article 375 du code civil
permet à chacun des parents, au tuteur, au mineur ou au ministère public de demander au juge
des enfants d'ordonner des mesures éducatives pour le bien de l'enfant. Les grands-parents,
lorsqu'ils constatent une situation de danger dans l'éducation donnée à leurs petits-enfants,
peuvent en saisir le procureur de la République qui pourra décider de saisir le juge des enfants. Or,
le plus souvent, les dérives sectaires s'exerçant sur les enfants doivent être rapidement contrées. Il
paraît donc nécessaire de modifier l'article précité, afin de favoriser l'action des grands-parents,
inquiets des conditions de vie de leurs petits-enfants. Aussi il lui serait agréable de connaître la
position du Gouvernement quant à cette proposition, d'une part, et dans quel délai il compte la
mettre en oeuvre, d'autre part.
Texte de la REPONSE : L'honorable parlementaire a bien voulu appeler l'attention de Mme la
garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation des mineurs en danger du fait de dérives
sectaires et sur l'opportunité de permettre à leurs grands-parents de saisir directement le juge des
enfants lorsque la santé, la sécurité ou la moralité de l'enfant sont en danger. Cette préconisation,
présentée sous forme d'amendement à la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection
de l'enfance, a fait l'objet d'un avis défavorable de la part du Gouvernement, qui a considéré que
les grands-parents disposent d'ores et déjà de moyens d'action importants. En effet, lorsque
l'appartenance des parents à une secte entraîne une rupture avec les grands-parents, ces derniers
peuvent saisir le juge aux affaires familiales pour faire valoir le droit aux relations personnelles avec
l'enfant que leur confère l'article 371-4 du code civil, qui dispose : « L'enfant a le droit d'entretenir
des relations personnelles avec ses ascendants. » Cette disposition a d'ailleurs été renforcée par
ladite loi qui a ajouté un alinéa 2 indiquant que « seul l'intérêt de l'enfant peut faire obstacle à
l'exercice de ce droit ». Par ailleurs, la liste des personnes autorisées à saisir directement le juge
des enfants, fixée par l'article 375 du code civil, correspond à la liste des personnes susceptibles de
devenir parties à la procédure d'assistance éducative. En effet, cette procédure porte sur les
modalités d'exercice de l'autorité parentale et a donc vocation à s'appliquer en priorité aux
personnes titulaires de l'autorité parentale : les parents, le tuteur ; ou directement concernées par
ses modalités d'exercice ; le mineur, la personne ou le service auquel il est confié. L'ensemble de
ces personnes sont, à ce titre, habilitées à saisir directement le juge. Pour toutes les autres
personnes, le procureur de la République constitue l'autorité auprès de laquelle le signalement
judiciaire doit être porté, ce qui lui permet d'opérer pleinement son rôle de filtre et d'orienter au
mieux la procédure en fonction des éléments qui y sont contenus. En effet, s'agissant de mineurs
pris en charge dans des organisations à caractère sectaire, le procureur de la République peut faire
choix, par priorité, de diligenter une enquête pénale, outre la saisine du juge des enfants et, en cas
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d'urgence avérée, de retirer un mineur de son milieu naturel pour assurer sa protection physique et
psychique immédiate. De plus, il peut estimer que la situation portée à sa connaissance ne procède
pas d'une intervention judiciaire en protection de l'enfance, mais davantage de l'intervention
administrative et envisager ainsi de saisir les services du Conseil général. La saisine du juge des
enfants par les grands-parents, même à l'égard de mineurs concernés par des dérives sectaires,
n'apparaît donc pas constituer la seule réponse possible. En outre, l'article 375 du code civil dispose
également que le juge des enfants pourra, à titre exceptionnel, se saisir d'office. Cette disposition
est susceptible de trouver application lorsque des grands-parents informent directement le juge des
enfants d'une situation de danger grave et imminent à laquelle leurs petits-enfants se trouvent
confrontés. Le dernier rapport de la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les
dérives sectaires rappelle les éléments essentiels de ce dispositif qui paraît en l'état répondre de
manière adaptée aux préoccupations manifestées par l'honorable parlementaire.
Question N° : 25863 de M. Perrut Bernard(Union pour un Mouvement Populaire Rhône) QE
Ministère interrogé : Budget, comptes publics et fonction publique
Ministère attributaire : Budget, comptes publics et fonction publique
Question publiée au JO le : 24/06/2008 page : 5294
Rubrique : impôt sur le revenu
Tête d'analyse : réductions d'impôt
Analyse : dons à des associations. champ d'application
Texte de la QUESTION : M. Bernard Perrut appelle l'attention de M. le ministre du budget, des
comptes publics et de la fonction publique sur les difficultés de certaines associations au regard du
dispositif du mécénat prévu aux articles 200 et 238 bis du code général des impôts. Sauf cas
particuliers (tel que celui des associations cultuelles au sens strict), peuvent en effet émettre des
reçus fiscaux au profit de leurs donateurs les associations ou organismes sans but lucratif exerçant
une activité d'intérêt général et ayant un caractère philanthropique, éducatif, social, humanitaire,
familial, culturel, etc. Certaines associations, exerçant pourtant de toute évidence des activités
présentant l'un des caractères précités, se voient cependant refuser (dans le cadre de la procédure
de rescrit prévue à l'article L. 80-C du livre des procédures fiscales) la possibilité d'émettre des
reçus fiscaux au seul motif (alors même qu'elles n'ont pas pour objet l'exercice d'un culte) que
leurs activités présentent une dimension religieuse. Pourtant, il a toujours été précisé, et les débats
parlementaires de 1987 (loi du 23 juillet 1987) ou de 2003 (loi du 1er août 2003) comme les
réponses de ses prédécesseurs à cette occasion en font foi, que ce texte relatif au mécénat « a
vocation à être entendu de façon large » ou encore, « est de portée générale ». Ainsi, la dimension
religieuse d'une activité culturelle (la promotion de l'art sacré par exemple) ne saurait lui retirer, de
ce seul fait, son caractère culturel et d'intérêt général ; si l'on se réfère notamment à la définition
donnée par l'UNESCO, « la culture doit être considérée comme l'ensemble des traits distinctifs
spirituels et matériels, intellectuels et affectifs qui caractérisent une société ou un groupe social ;
elle englobe, outre les arts et les lettres, les modes de vie, les façons de vivre ensemble, les
systèmes de valeur, les traditions et les croyances » (Déclaration universelle sur la diversité
culturelle - 16 novembre 2001). De même, dans un avis non rapporté du 15 mai 1962 (sections
réunies des finances et de l'intérieur), le Conseil d'État précisait que « des oeuvres ou organismes à
caractère confessionnel peuvent satisfaire à ces critères [d'intérêt général, et de caractère
philanthropique, éducatif, scientifique, social ou familial] » ; ou encore que « les associations
cultuelles, les associations diocésaines et diverses sociétés civiles, en répondant à un intérêt
général, peuvent présenter nettement [sic], en raison des activités qu'ils exercent, un caractère
philanthropique, éducatif ou social ». Le Conseil d'État a ensuite rappelé récemment cette position
très clairement en précisant que des « activités ou des équipements dépendants des cultes »
peuvent présenter un intérêt général (Conseil d'État, 16 mars 2005, ministre de l'outre-mer). Il lui
demande de bien vouloir lui confirmer que le caractère confessionnel ou la dimension religieuse
d'une activité n'est pas, à elle seule, exclusive de l'intérêt général et de l'un ou l'autre des
caractères visés aux articles 200 et 238 bis du code général des impôts.
Question N° : 25817 de M. Rouquet René(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
- Val-de-Marne) QE
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Ministère interrogé : Justice
Ministère attributaire : Justice
Question publiée au JO le : 24/06/2008 page : 5328
Rubrique : famille
Tête d'analyse : mariage
Analyse : annulation. réglementation
Texte de la QUESTION : M. René Rouquet attire l'attention de Mme la garde des sceaux,
ministre de la justice, sur la décision par le tribunal de grande instance de Lille de l'annulation d'un
mariage «pour erreur sur les qualités essentielles» de la conjointe, car celle-ci avait menti sur sa
virginité. L'annonce de cette décision est très largement ressentie comme un précédent dangereux
car la République, en tant qu'elle est laïque, n'a jamais considéré, ni dans son esprit ni dans sa
lettre, que la virginité pouvait être une «qualité essentielle» d'une citoyenne qui veut librement
s'engager dans le mariage. Ce précédent se double d'une régression grave, qui ne peut que
conforter certains fondamentalistes, dans leur combat archaïque contre le droit et la dignité
humaine. Aussi, soucieux de connaître son sentiment face à cette décision de justice qui bafoue le
droit des femmes à disposer de leur corps et qui, plus encore, bafoue les principes de laïcité en
soumettant les lois de la République au droit coutumier, il la remercie de bien vouloir lui préciser
les mesures qu'elle entend mettre en oeuvre pour éviter qu'à l'avenir, de tels jugements ne
puissent plus porter atteinte au principe constitutionnel d'égalité entre les hommes et les femmes
et de non-discrimination, car si le code civil a pu fonder une telle décision, il semble désormais
urgent qu'une proposition de loi puisse être rapidement inscrite à l'ordre du jour du Parlement,
avant qu'elle ne serve de désastreuse jurisprudence pour enfermer encore davantage les jeunes
filles et les femmes.
Question N° : 25789 de M. Juanico Régis(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche Loire) QE
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère attributaire : Premier ministre
Question publiée au JO le : 24/06/2008 page : 5286
Rubrique : ésotérisme
Tête d'analyse : mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires
Analyse : fonctionnement. bilan et perspectives
Texte de la QUESTION : M. Régis Juanico attire l'attention de M. le Premier ministre sur
l'importance du travail accompli par la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les
dérives sectaires (Miviludes). À l'heure où le Gouvernement envisage un aménagement de la loi sur
la laïcité de 1905, en le justifiant au nom de l'évolution de la société, l'inquiétude est forte. En
effet, l'éventuelle modification de la loi du 9 décembre 19 05 permettrait à ces groupes d'acquérir
une certaine honorabilité auprès des citoyens, sans ignorer l'aspect fiscal : dispense d'impôts
locaux, droits aux legs et donations entre autres. La Miviludes dans ce domaine a un rôle
d'organisation officielle qui coordonne les actions des différents partenaires, organismes d'État et
associations. Au regard du fléau que représentent les sectes et les dérives sectaires dans beaucoup
de secteurs, comme la santé, la formation professionnelle, les actions humanitaires, sportives,
éducatives et culturelles, il lui demande s'il entend réaffirmer le rôle de la Miviludes dans ses
attributions d prévention, d'information, d'organisation et de coordination.
Question N° : 25764 de M. Bartolone Claude(Socialiste, radical, citoyen et divers
gauche - Seine-Saint-Denis) QE
Ministère interrogé : Éducation nationale
Ministère attributaire : Éducation nationale
Question publiée au JO le : 24/06/2008 page : 5315
Rubrique : enseignement
Tête d'analyse : parents d'élèves
Analyse : laïcité. respect
Texte de la QUESTION : M. Claude Bartolone attire l'attention de M. le ministre de l'éducation
nationale sur les difficultés posées par l'application du principe de laïcité, notamment dans le cadre
de l'accompagnement des sorties scolaires. Des parents d'élèves, qui arboraient un signe religieux,
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se sont vus refuser il y a quelques mois leur participation à l'encadrement d'activités éducatives.
Saisie par une association et plusieurs parents d'élèves, la haute autorité de lutte contre les
discriminations et pour l'égalité (HALDE) a considéré que cette exclusion constituait une
discrimination fondée sur la religion ou les convictions. Elle a recommandé aux conseils d'école de
« revoir les règlements intérieurs applicables et/ou leur interprétation de manière à respecter le
principe de non-discrimination religieuse dans la participation des parents à la vie de l'école ». Des
parents participant à l'encadrement d'activités d'éducation avec des élèves deviennent dans les
faits de véritables auxiliaires éducatifs. Dès lors, ils devraient être soumis aux règles appliquées aux
enseignants et personnels de l'éducation nationale depuis plus d'un siècle. La circulaire
d'application de la loi n° 2004-228 du 15 mars 2004 encadrant, en application du principe de
laïcité, le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles,
collèges et lycées publics, avait pourtant déjà précisé que « les agents contribuant au service public
de l'éducation, quels que soient leur fonction et leur statut, sont soumis à un strict devoir de
neutralité qui leur interdit le port de tout signe d'appartenance religieuse, même discret ». Il lui
demande de lui indiquer ce que le Gouvernement entend faire pour que toute personne participant
à l'encadrement d'activités scolaires dans le service public respecte à l'avenir les principes de laïcité
et de stricte neutralité.
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Sénat
Questions écrites
13ème législature
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Principe de laïcité au sein des écoles
Question écrite n° 04761 de M. Yves Détraigne (Marne - UC-UDF)
publiée dans le JO Sénat du 12/06/2008 - page 1148
M. Yves Détraigne attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur l'application du
principe de laïcité issu de la loi 2004-228 du 15 mars 2004. Cette loi interdit, dans les écoles, collèges
et lycées publics, le port, par les élèves, de signes ou de tenues manifestant ostensiblement une
appartenance religieuse. Elle vise ainsi à préserver l'école publique des revendications identitaires et
communautaires qui se développent. Ce texte, qui garantit l'égalité des élèves à l'école dans le respect
des valeurs de la République, ne s'applique apparemment pas aux parents accompagnateurs de
sorties scolaires.
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Considérant qu'il serait contraire à l'esprit de la Loi que le port des signes religieux ostensibles soit
interdit aux enfants et aux personnels enseignants, qui se doivent de respecter un devoir de réserve et
une stricte neutralité, mais que les parents n'aient pas à respecter ces principes lorsqu'ils participent à
la vie scolaire, il lui demande de bien vouloir lui préciser de quelle manière il entend faire appliquer la
loi du 15 mars 2004.
Conformité au droit local du subventionnement par une commune d'une association
religieuse oeuvrant sur le territoire communal
Question écrite n° 04483 de M. Jean Louis Masson (Moselle - NI) publiée dans le JO Sénat du
22/05/2008 - page 993
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M. Jean Louis Masson demande à Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités
territoriales de lui indiquer si en droit local d'Alsace-Moselle les communes ont le droit de
subventionner des activités religieuses d'une part dans le cas où il s'agit d'un culte reconnu et d'autre
part dans le cas où il s'agit d'un culte non reconnu. A la lumière de l'arrêt du 6 mars 2008 de la Cour
administrative d'appel de Nancy (commune de Soultz), il souhaiterait notamment savoir si le
versement de subvention par une commune à une association religieuse oeuvrant sur le territoire de la
commune est conforme au droit local.
Annulation d'un mariage à Lille en violation manifeste de la législation
Question écrite n° 04697 de M. Gérard Delfau (Hérault - RDSE)
publiée dans le JO Sénat du 05/06/2008 - page 1091
M. Gérard Delfau attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur la violation
manifeste de la législation française concernant le statut de la femme dans notre société par le
jugement du tribunal de grande instance de Lille prononçant l'annulation d'un mariage à la demande
du mari qui se plaignait d'avoir été trompé par sa future épouse sur son état de virginité avant leur
union.
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En effet, faut-il le rappeler, le pouvoir judiciaire n'est pas souverain et son indépendance doit
s'exprimer dans le cadre strict de la loi. Or, qui peut nier que les femmes ont dû livrer un dur combat
pour obtenir l'égalité en matière de sexualité ? Cette conquête leur fut âprement disputée. La notion
de « libération sexuelle » de mai 68, le vote des lois sur la contraception et l'interruption volontaire de
grossesse en sont les principales étapes. Ce sont ces acquis que remet implicitement en question le
jugement de Lille, aujourd'hui pour une minorité de femmes élevées dans la confession musulmane et
qui se trouveraient discriminées, demain, n'en doutons pas, pour l'ensemble du sexe féminin.
Par ailleurs, chacun sait que cet interdit sur les relations sexuelles des femmes – et elles seules –
avant le mariage est directement issu d'une religion, en l'occurrence une conception rétrograde de
l'islam. Or, depuis la loi de séparation des églises et de l'État, en 1905, aucune religion ne peut dicter
ses normes morales ou ses modes d'organisation aux citoyens par l'intermédiaire d'une institution de
la République.
En rendant leur arrêt, les magistrats de Lille ont gravement contrevenu au principe de laïcité, qui a été
inscrit dans la Constitution. Enfin, ne devaient-ils pas orienter le couple vers la procédure adéquate en
cas de désaccord grave, le divorce ? Une autre conquête sociale, qui fut si longtemps refusée aux
femmes...
Bien loin d'être un dérapage mineur, une petite « erreur de jugement», l'arrêt de Lille, s'il était
confirmé, ouvrirait la voie à une régression intolérable de la place de la femme dans notre pays. Il
mettrait en danger la paix civile que nous devons à un siècle de laïcité. C'est pourquoi, il lui demande
ce qu'elle pense faire devant une telle situation.
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REGLEMENTATION
Loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit
communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations
EXTRAIT
Circulaire n° NOR/INT/A/08/00038/C du ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des
collectivités territoriales du 19 FEVRIER 2008, relative à la Police des lieux de
sépulture : Aménagement des cimetières - Regroupements confessionnels des
sépultures
Circulaire n° 2008/002 du 21 avril 2008 relative à l’utilisation des édifices de culte
appartenant à l’État à des fins non cultuelles.
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JORF n°0123 du 28 mai 2008 page 8801
texte n° 1
LOI n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit
communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations
NOR: MTSX0769280L
L'Assemblée nationale et le Sénat ont adopté,
Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :
EXTRAIT
Article 1
Constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement de son appartenance ou de sa
non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race, sa religion, ses convictions, son âge, son
handicap, son orientation sexuelle ou son sexe, une personne est traitée de manière moins favorable qu'une
autre ne l'est, ne l'a été ou ne l'aura été dans une situation comparable.
Constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais
susceptible d'entraîner, pour l'un des motifs mentionnés au premier alinéa, un désavantage particulier pour des
personnes par rapport à d'autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit
objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires et
appropriés.
La discrimination inclut :
1° Tout agissement lié à l'un des motifs mentionnés au premier alinéa et tout agissement à connotation sexuelle,
subis par une personne et ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un
environnement hostile, dégradant, humiliant ou offensant ;
2° Le fait d'enjoindre à quiconque d'adopter un comportement prohibé par l'article 2.
Article 2
Sans préjudice de l'application des autres règles assurant le respect du principe d'égalité :
1° Toute discrimination directe ou indirecte fondée sur l'appartenance ou la non-appartenance, vraie ou
supposée, à une ethnie ou une race est interdite en matière de protection sociale, de santé, d'avantages
sociaux, d'éducation, d'accès aux biens et services ou de fourniture de biens et services ;
2° Toute discrimination directe ou indirecte fondée sur le sexe, l'appartenance ou la non-appartenance, vraie ou
supposée, à une ethnie ou une race, la religion ou les convictions, le handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle est
interdite en matière d'affiliation et d'engagement dans une organisation syndicale ou professionnelle, y compris
d'avantages procurés par elle, d'accès à l'emploi, d'emploi, de formation professionnelle et de travail, y compris
de travail indépendant ou non salarié, ainsi que de conditions de travail et de promotion professionnelle.
Ce principe ne fait pas obstacle aux différences de traitement fondées sur les motifs visés à l'alinéa précédent
lorsqu'elles répondent à une exigence professionnelle essentielle et déterminante et pour autant que l'objectif
soit légitime et l'exigence proportionnée ;
3° Toute discrimination directe ou indirecte est interdite en raison de la grossesse ou de la maternité, y compris
du congé de maternité.
Ce principe ne fait pas obstacle aux mesures prises en faveur des femmes pour ces mêmes motifs ;
4° Toute discrimination directe ou indirecte fondée sur le sexe est interdite en matière d'accès aux biens et
services et de fourniture de biens et services.
Ce principe ne fait pas obstacle :
? à ce que soient faites des différences selon le sexe lorsque la fourniture de biens et services exclusivement ou
essentiellement destinés aux personnes de sexe masculin ou de sexe féminin est justifiée par un but légitime et
que les moyens de parvenir à ce but sont nécessaires et appropriés ;
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? au calcul des primes et à l'attribution des prestations d'assurance dans les conditions prévues par l'article L.
111-7 du code des assurances ;
? à l'organisation d'enseignements par regroupement des élèves en fonction de leur sexe.
Article 3
Aucune personne ayant témoigné de bonne foi d'un agissement discriminatoire ou l'ayant relaté ne peut être
traitée défavorablement de ce fait.
Aucune décision défavorable à une personne ne peut être fondée sur sa soumission ou son refus de se
soumettre à une discrimination prohibée par l'article 2.
Article 4
Toute personne qui s'estime victime d'une discrimination directe ou indirecte présente devant la juridiction
compétente les faits qui permettent d'en présumer l'existence. Au vu de ces éléments, il appartient à la partie
défenderesse de prouver que la mesure en cause est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute
discrimination.
Le présent article ne s'applique pas devant les juridictions pénales.
Article 5
I. - Les articles 1er à 4 et 7 à 10 s'appliquent à toutes les personnes publiques ou privées, y compris celles
exerçant une activité professionnelle indépendante.
II. - Ils s'entendent sans préjudice des dispositions et conditions relatives à l'admission et au séjour des
ressortissants des pays non membres de l'Union européenne et des apatrides.
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MINISTERE DE L'INTERIEUR,DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES
Secrétariat général
DIRECTION DE LA MODERNISATION ET DE L’ACTION TERRITORIALE SOUS-DIRECTION DES AFFAIRES
POLITIQUES ET DE LA VIE ASSOCIATIVE BUREAU CENTRAL DES CULTES
19 FEVRIER 2008
La ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales
à
Mesdames et Messieurs les préfets
Monsieur le préfet de police
NOR/INT/A/08/00038/C
OBJET: Police des lieux de sépulture : Aménagement des cimetières - Regroupements
confessionnels des sépultures
Mon attention est régulièrement appelée par les maires, les représentants des cultes, voire les
particuliers, sur les difficultés rencontrées à l’occasion du décès d'une personne dont la famille, ou un proche,
souhaite qu’elle soit inhumée selon les règles ou les usages définis par sa religion, ceux-ci n'étant pas toujours
compatibles avec les dispositions législatives et réglementaires, ou lorsque des conflits s'élèvent entre les
membres d'une famille sur les modalités des funérailles, le lieu et les modes de sépulture. Aussi, me semble-t-il
nécessaire de rappeler aux maires les éléments essentiels du droit concernant la police des funérailles et des
cimetières en développant plus particulièrement les questions liées aux demandes de regroupement
confessionnels des sépultures.
Tel est l’objet de la présente circulaire qui annule et remplace les circulaires des 28 novembre 1975 et
14 février 1991.
1 - Rappel du cadre juridique
1.1 – Principe de liberté accordé aux défunts et aux familles
Selon l'article 3 de la loi du 15 novembre 1887, « tout majeur ou mineur émancipé, en état de tester,
peut régler les conditions de ses funérailles, notamment en ce qui concerne le caractère civil ou religieux à leur
donner et le mode de sépulture ». Les funérailles doivent donc se dérouler conformément aux vœux du défunt.
Une simple déclaration signée suffit. Lorsque le défunt n’a exprimé aucune volonté concernant ses
funérailles, il appartient au juge, en cas de mésentente au sein de la famille, de déterminer la personne la plus
apte à interpréter et à exécuter les volontés du défunt. Ainsi, si le maire a connaissance d’un désaccord sur le
choix des funérailles (caractère civil ou religieux, inhumation ou crémation, mode de sépulture), il ne doit
prendre aucune décision, celle-ci relevant de la compétence du juge civil.
En cas de violation des volontés du défunt, de sévères peines sont prévues par le code pénal (articles
433-21-1 et 433-22).
1.2 - Principe de neutralité
• Lors des funérailles
Depuis la loi 15 novembre 1887, la famille a toute liberté pour donner aux funérailles un caractère civil
ou religieux. Quand le maire, ou à défaut le préfet, pourvoit luimême aux funérailles en cas d’urgence, si aucun
proche ne s'est manifesté, il ne doit faire prévaloir aucun culte ou croyance (article L. 2213-7 du CGCT).
• Dans les cimetières
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La loi du 14 novembre 1881, dite « sur la liberté des funérailles », a posé le principe de nondiscrimination dans les cimetières, et supprimé l’obligation de prévoir une partie du cimetière, ou un lieu
d’inhumation spécifique, pour chaque culte. Ce principe de neutralité des cimetières a été confirmé par la loi du
9 décembre 1905 concernant la séparation des églises et de l’Etat.
Les cimetières sont des lieux publics civils, où toute marque de reconnaissance des différentes
confessions est prohibée dans les parties communes. Seules les tombes peuvent faire apparaître des signes
particuliers propres à la religion du défunt.
Le Conseil d’Etat a ainsi considéré qu’un maire ne peut limiter pour des raisons d’ordre esthétique, le
type de monuments ou de plantations que peuvent placer sur les tombes les personnes titulaires d’une
concession (CE, 11 mars 1983, Commune de Bures-sur-Yvette).
1.3 - Les modes et lieux de sépulture
En fonction de la volonté du défunt ou de sa famille, le maire donne son autorisation pour
l’inhumation ou la crémation du corps de la personne décédée.
• Inhumation dans le cimetière communal
L’article L. 2223-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit que chaque commune
doit consacrer à l’inhumation des morts un ou plusieurs terrains spécialement aménagés à cet effet. Lorsque des
communes appartiennent à une communauté urbaine, celle-ci exerce de plein droit, au lieu et place des
communes membres, les compétences relatives à la création et à l’extension des cimetières créés, et aux
crématoriums (article L. 5215-20 du CGCT). Par ailleurs, aucune disposition n’interdit aux communes qui le
souhaitent de créer un cimetière intercommunal et d’en confier la gestion au syndicat intercommunal ou à la
communauté de communes.
L’article L. 2223-3 du CGCT énonce les catégories de personnes ayant droit à une sépulture dans un
cimetière d’une commune :
-les personnes décédées sur son territoire, quel que soit leur domicile ;
-les personnes domiciliées sur son territoire, alors même qu'elles seraient décédées dans une autre
commune ;
-les personnes non domiciliées dans la commune mais qui y ont droit à une sépulture de famille. Les
maires sont légitimes à refuser une demande si l'attache avec la commune n'est pas prouvée, en particulier dans
le cadre d'une demande formulée pour une inhumation dans un espace confessionnel.
o Inhumation en terrain commun
Si le défunt n’a pas pris de concession de son vivant ou ne dispose pas de place dans la concession
familiale et si la famille ne souhaite pas obtenir une concession pour l’inhumation du défunt, celui-ci est inhumé
en terrain commun dans sa commune de résidence ou dans sa commune de décès. La commune a l’obligation
de fournir, gratuitement, un emplacement de sépulture pour l’inhumation de ce défunt.
o Inhumation dans une concession
L’article L. 2223-13 du CGCT prévoit que, lorsque l’étendue des cimetières le permet, il peut être
concédé des terrains aux personnes qui désirent y fonder leur sépulture, celle de leurs enfants ou successeurs.
L’instauration d’un régime de concessions funéraires n’est donc pas obligatoire pour les communes.
Lorsqu'une commune met en place un régime de concessions funéraires, toute personne appartenant
à l’une des catégories énumérées à l’article L. 2223-3 du CGCT précité peut présenter une demande d’attribution
d’une concession. Il existe quatre types de concession définies en fonction de leur durée : les concessions
temporaires (pour 15 ans au plus), trentenaires, cinquantenaires et perpétuelles (Article L. 2223-14 du CGCT).
Les concessions centenaires ont été supprimées par l’ordonnance du 5 janvier 1959. Une commune n’est pas
tenue de mettre en place toutes les catégories de concessions légalement autorisées.
Lorsque la sépulture est laissée à l’abandon pendant une période de 30 années, le maire peut
constater cet état d’abandon par procès verbal et, après avoir suivi la procédure décrite aux articles R.2223-12 à
R.2223-23, saisir le conseil municipal qui se prononce sur la reprise de la concession. Le terrain ayant fait l’objet
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d’une reprise de concession peut, après exhumation des restes des personnes inhumées et enlèvement des
monuments et emblèmes funéraires, faire l’objet d’un nouveau contrat de concession.
La limitation de la durée des concessions imposée par la raréfaction des terrains dans certaines
communes présente une difficulté aux personnes de confession juive ou musulmane qui n’acceptent pas la
translation des corps et donc le fait de ne pouvoir disposer que d’une concession à durée déterminée. Les
dispositions législatives et réglementaires relatives à l’attribution d’une concession perpétuelle - attribution qui
n’est pas un droit pour les familles, contrairement au droit à sépulture - ne peuvent être remises en cause.
Il existe toutefois un droit au renouvellement des concessions non perpétuelles, droit qui concerne
tous les titulaires de concession ou leurs ayants droits (article L. 2223-15 du CGCT). Cette disposition peut être
utilement rappelée aux familles et aux communautés concernées. Par le renouvellement des concessions, elles
peuvent bénéficier d’effets identiques à ceux d’une concession perpétuelle, avec l’avantage d’un paiement
échelonné par période correspondant à la durée de la concession.
o Ossuaire
Dans les cimetières où se trouvent des concessions reprises, le maire doit, par arrêté, créer un
ossuaire destiné à recevoir les restes des personnes qui se trouvaient dans les concessions reprises.
• Inhumation hors cimetières
En vertu des dispositions de l’article L. 2223-9 du CGCT, « toute personne peut être enterrée sur une
propriété particulière pourvu que cette propriété soit hors de l’enceinte des villes et des bourgs et à la distance
prescrite ».
L’inhumation dans une propriété particulière nécessite l’autorisation du préfet du département où est
située la propriété, après vérification que les formalités prescrites à l’article R. 2213-17 du CGCT (constat du
décès par l’officier d’état civil) et aux articles 78 et suivants du code civil (relatifs à l’acte de décès) ont été
accomplies et après avis d’un hydrogéologue agréé.
• Crémation
Un nombre de plus en plus important de personnes souhaitent recourir à la crémation.
Cependant, les principes confessionnels des personnes de confession juive ou musulmane interdisent
formellement cette pratique.
Seul le maire de la commune du lieu du décès ou, s’il y a eu transport du corps, du lieu de la mise en
bière, peut autoriser la crémation. Vous appellerez l'attention des maires sur la très grande prudence qu'il
convient d'observer lorsqu'un désaccord apparaît entre les proches du défunt, les uns demandant la crémation
et les autres l'inhumation. Si le maire a un doute sur les dernières volontés du défunt, il doit saisir, sans délai, le
procureur de la République qui décidera de la suite qu'il convient de donner.
L’article L. 2223-40 du CGCT prévoit que les communes ou les établissements publics de coopération
intercommunale sont seuls compétents pour créer et gérer, directement ou par voie de gestion déléguée, les
crématoriums et les sites cinéraires destinés au dépôt ou à l'inhumation des urnes ou à la dispersion des
cendres.
Les sites cinéraires inclus dans le périmètre d'un cimetière doivent être gérés directement.
Toute création ou extension des crématoriums ne peut avoir lieu sans l'autorisation préalable du
représentant de l'Etat dans le département.
Toutefois, lorsque des communes appartiennent à une communauté urbaine, celle-ci exerce de plein
droit, au lieu et place des communes membres, les compétences relatives à la création, l'extension et la
translation des cimetières et sites cinéraires hors de l'emprise des cimetières ainsi qu'à la création et à
l'extension des crématoriums (article L. 5215-20 du CGCT).
L’article R. 2223-9 du CGCT prévoit la possibilité, pour une commune, de décider l'affectation de tout
ou partie d'un cimetière au dépôt des urnes et à la dispersion des cendres des corps ayant fait l'objet d'une
crémation.
Le législateur n’a pas fait obligation aux communes d’aménager des équipements cinéraires dans
leurs cimetières. Compte tenu du développement de la pratique crématiste constaté ces dernières années, il est
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souhaitable que les communes puissent offrir aux familles qui le désirent un emplacement dans le cimetière
permettant de conserver les urnes, ou un site de dispersion des cendres clairement identifié, permettant aux
familles de s’y recueillir.
En ce qui concerne la destination des cendres du défunt après la crémation du corps, il convient de
rappeler aux maires que les dispositions réglementaires figurant à l’article R.2213-39 du CGCT ont été modifiées
par le décret du 12 mars 2007. Désormais la destination des cendres est le cimetière ou le site cinéraire de la
commune où se présente la personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles sauf si le défunt a exprimé sa
volonté que l'urne contenant ses cendres soit déposée ou inhumée dans une propriété privée ou que ses cendres
soient dispersées en pleine nature.
Le dépôt ou l'inhumation de l'urne ou la dispersion des cendres dans un cimetière ou dans un site
cinéraire sont effectués après autorisation du maire. En revanche, le dépôt ou l'inhumation ou la dispersion des
cendres dans une propriété privée ne nécessite qu'une déclaration auprès du maire de la commune du lieu de
dépôt, d'inhumation de l'urne ou de la dispersion des cendres.
Lorsqu'il est mis fin au dépôt ou à l'inhumation de l'urne dans une propriété privée, la personne qui en
est dépositaire doit se conformer aux dispositions du deuxième alinéa de l'article R. 2213-39 afin que l'urne soit
déposée ou inhumée dans un cimetière.
2 – Les pouvoirs de police du maire
Le maire est à la fois officier de l’état civil (CGCT, art L. 2122-32) et officier de police judiciaire (CGCT,
art L. 2122-31) ; il assure le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publique au titre de ses pouvoirs de
police municipale (CGCT, art L. 2212-2).
En cas de carence du maire dans le cadre de ses pouvoirs de police municipale, le préfet peut faire
usage de son pouvoir de substitution, conformément aux dispositions de l’article L. 2215-1 du CGCT.
Le maire assure la police des funérailles et des cimetières (CGCT, art L. 2213-8). Il pourvoit d'urgence
à ce que toute personne décédée soit ensevelie et inhumée décemment, sans distinction de culte ni de croyance
(art L; 2213-7 du CGCT). Il est particulièrement compétent dans les domaines suivants :
-le maintien de l’ordre et de la décence dans les cimetières (art L. 2213-9), -l’autorisation de transport
des personnes décédées (art L. 2213-9 et R.2213-21), -l’autorisation de dépôt temporaire (art R.
2213-29) -les inhumations (art L. 2213-9 et R. 2213-31), -les exhumations (art L. 2213-9 et R. 221340), -la surveillance des lieux de sépulture (Art L. 2213-10), -la fixation des vacations pour les
opérations de surveillance (art L. 2213-15) -la crémation (art R. 2213-34, R. 2213-37, R. 2213-39)
Pour les actes ordinaires, le maire peut également agir en qualité d’exécutif de la commune comme le
prévoit l’article L. 2122-21 du CGCT.
Mais il peut agir également en qualité de délégataire du conseil municipal lorsqu’il « prononce la
délivrance et la reprise des concessions dans les cimetières » (CGCT, art
L. 2122-22-8°). Dans ce dernier cas, le maire doit avoir reçu une délégation expresse du conseil municipal et le
conseil municipal ne peut intervenir sur des décisions individuelles concernant la délivrance ou la reprise des
concessions tant que la délégation subsiste.
En revanche, la délégation ne peut avoir une portée générale fixant les règles générales de délivrance
et de reprises de concessions qui demeurent de la compétence du conseil municipal.
Le législateur a attribué au conseil municipal la compétence relative à la création, l’agrandissement et
la translation des cimetières, à l’exception des cimetières situés dans les communes urbaines et à l’intérieur des
périmètres d’agglomération à moins de 35 mètres des habitations pour lesquels le préfet est chargé de délivrer
l’autorisation de création, d’agrandissement ou de translation (CGCT, art L. 2223-1).
La jurisprudence relative aux pouvoirs du maire ou du conseil municipal en matière de cimetières est
abondante. Aussi convient-il de rappeler aux maires le cadre dans lequel ils peuvent intervenir et les domaines
dans lesquels ils doivent nécessairement obtenir une délibération du conseil municipal.
Le Conseil d’Etat distingue deux types d’actes :
-les actes de gestion des cimetières qui relèvent généralement de la compétence
du conseil municipal, (CE, 20 janvier 1984, association consistoriale israélite de
Marseille c/ Me Rouquette),
-et les actes de police des cimetières, que le législateur a confiés au maire et à lui
seul.
Toutefois, le partage des compétences est parfois délicat. Ainsi dans l’affaire Cauchoix (CE, 20 févier
1946), le Conseil d’Etat a estimé que le conseil municipal a empiété sur la compétence du maire en décidant
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l’élagage complet des rosiers et autres plantes, cette opération étant qualifiée, dans cette affaire, de mesure de
police.
En matière d’autorisation d’inhumer dans le cimetière communal, le maire a compétence liée : il est
tenu d’accorder une sépulture aux personnes décédées sur son territoire, quel que soit leur domicile, aux
personnes domiciliées sur son territoire, même si elles sont décédées dans une autre commune, et aux
personnes non domiciliées dans la commune mais qui ont droit à une sépulture de famille (article L. 2223-3 du
CGCT). En revanche, le maire peut refuser l’inhumation dans le cimetière communal si la situation du défunt ne
correspond pas à l’un des cas précités.
S’agissant de l’attribution des concessions, le maire a plus de latitude. Il peut refuser l’attribution d’une
concession à un particulier, notamment, sur les fondements suivants :
-un manque de place dans le cimetière (article L. 2223.13 du CGCT);
-un défaut de justification du droit à sépulture prévu à l’article 2223-3 du CGCT
(CE, 16 novembre 1992, M. Locre / commune de Concevreux) ;
-des contraintes résultant d’un plan d’aménagement du cimetière (CE, 26 octobre
1994, Mlle Arii).
En revanche, il commet un excès de pouvoir s’il refuse, par exemple, de délivrer une concession alors
que la place nécessaire est suffisante ou au motif que le demandeur souhaitait y faire inhumer un membre de sa
famille qui ne pouvait prétendre au droit à sépulture sur le territoire de la commune (CE, 25 mai 1990, commune
de Cergy / Duval-Bertin).
3 - Les regroupements confessionnels des sépultures
3.1 - Les cimetières privés confessionnels
Par dérogation au droit commun (inhumation dans les cimetières communaux), il existe encore
quelques cimetières confessionnels privés, survivance du passé.
Ainsi, les consistoires israélites ont conservé la propriété des cimetières dont ils disposaient avant
l’entrée en vigueur du décret du 23 prairial an XII, le décret du 10 février 1806 déclarant certaines dispositions
du décret précité non applicables aux personnes de confession israélite et les autorisant à conserver leurs
cimetières privés gérés par des associations cultuelles. Il existe également, pour les mêmes raisons, quelques
cimetières protestants privés. Leur légalité a été confirmée par le Conseil d’Etat (CE, 13 mai 1964, Eberstarck).
En revanche, il n'est plus possible de créer de nouveaux cimetières privés ou d'agrandir ceux qui existent (CA
er
Aix, 1 février 1971, Sr Rouquette/Association cultuelle israélite de Marseille).
Les autorisations d’inhumer dans un cimetière confessionnel sont délivrées par le préfet,
conformément aux dispositions de l’article R. 2213-32 concernant les inhumations dans une propriété privée.
Elles ne sont délivrées que dans la mesure des emplacements disponibles.
Le maire exerce son pouvoir de police, dans ces cimetières privés, à l’égard des sépultures dont il
assure la surveillance, mais le règlement interne du cimetière relève de la compétence du culte concerné,
notamment pour la délivrance d’un emplacement, l’agencement des sépultures, le droit d’accès.
3.2 – les regroupements confessionnels de sépulture
Aux termes de l’article L. 2212-2 du CGCT concernant les pouvoirs généraux de police du maire, ce
dernier a la charge d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques dans sa commune.
L’article L.2213-9 du CGCT précise que les pouvoirs de police du maire concernant le transport des personnes
décédées, le maintien de l’ordre, la décence dans les cimetières, les inhumations et les exhumations doivent être
accomplis « sans qu’il soit permis d’établir des distinctions ou des prescriptions particulières à raison des
croyances ou du culte du défunt ou des circonstances qui ont accompagné sa mort ».
Il convient de signaler que les associations cultuelles sont de plus en plus nombreuses à faire part du
dilemme auquel sont confrontées les familles, qui ont à choisir entre le renvoi du corps dans le pays d’origine,
considéré comme trop onéreux par certaines d’entre elles, et l’inhumation du défunt en France, sachant que les
règles propres à son culte (orientation des tombes, durée illimitée des sépultures, etc.) peuvent ne pas être
satisfaites. Si le principe de laïcité des lieux publics, en particulier des cimetières, doit être clairement affirmé, il
apparaît souhaitable, par souci d’intégration des familles issues de l’immigration, de favoriser l’inhumation de
leurs proches sur le territoire français.
Le maire a en effet la possibilité de déterminer l’emplacement affecté à chaque tombe (CE, 21 janvier
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1925, Vales) et donc de rassembler les sépultures de personnes de même confession, sous réserve que les
principes de neutralité des parties publiques du cimetière et de liberté de choix de sépulture de la famille soient
respectés.
Tel est le sens des deux circulaires qui vous ont été préalablement adressées en 1975 et 1991 et sur
lesquelles je souhaite à nouveau appeler votre attention, car le développement d’espaces confessionnels me
paraît être la solution à privilégier pour résoudre les difficultés qui me sont le plus souvent signalées.
Pour répondre favorablement aux familles souhaitant que leurs défunts reposent auprès de
coreligionnaires, je vous demande d’encourager les maires à favoriser, en fonction des demandes, l'existence
d'espaces regroupant les défunts de même confession, en prenant soin de respecter le principe de neutralité des
parties communes du cimetière ainsi que le principe de liberté de croyance individuelle.
A cet effet, vous leur rappellerez les principes et les recommandations particulières suivantes :
La décision d’aménager des espaces ou carrés confessionnels dans le cimetière communal ou d’accepter
l’inhumation d’un défunt ne résidant pas dans la commune appartient au maire et à lui seul ; il s’agit d’un de ses
pouvoirs propres et il ne vous appartient pas de vous substituer à lui pour prendre cette décision qui, si elle peut
paraître souhaitable, ne présente toutefois qu’un caractère facultatif. Le maire a toute latitude pour apprécier
l’opportunité de créer ou non un espace confessionnel.
Le maire doit veiller à ce que les parties publiques du cimetière ne comportent aucun signe distinctif de
nature confessionnelle. L’espace confessionnel ne doit pas être isolé des autres parties du cimetière par une
séparation matérielle de quelque nature qu’elle soit, conformément à la loi du 14 novembre 1881.
• Toute personne ayant droit à une sépulture dans le cimetière de la commune, au sens de l’article L.
2223-3 du CGCT, doit pouvoir s’y faire inhumer quelle que soit sa religion et sans contrainte. Dans la mesure où
il existe un espace confessionnel, il revient à la famille ou, à défaut, à un proche de faire la demande expresse
de l’inhumation du défunt dans cet espace, le maire n’ayant pas à décider, de sa propre initiative, le lieu de
sépulture en fonction de la confession supposée du défunt, ni de vérifier la qualité confessionnelle du défunt
auprès d’une autorité religieuse ou de tout autre personne susceptible de le renseigner sur l’appartenance
religieuse du défunt. Il se limitera à enregistrer le vœu du défunt ou la demande de la famille ou de la personne
habilitée à régler les funérailles.
Dans l’arrêt du 5 juillet 1993, affaire Darmon, le tribunal administratif de Grenoble a, ainsi, considéré que
le maire ne pouvait se fonder exclusivement sur la circonstance que les autorités consistoriales déniaient
l’appartenance à la confession israélite de la personne décédée, qui souhaitait se faire enterrer près de son
défunt mari, pour refuser une concession funéraire dans le « carré juif » d’un cimetière communal.
La famille du défunt décide librement de l’emplacement d’une éventuelle stèle sur la sépulture ou de
l’aspect extérieur de celle-ci, en individualisant la sépulture par la pose de plaque funéraire, de signes ou
emblèmes religieux, sous la seule réserve que le parti pris ne soit pas choquant pour les autres familles ayant
une tombe dans le cimetière et susceptible de provoquer des troubles à l’ordre public.
Il peut ainsi arriver qu’une personne ne partageant pas la confession d'un précédent défunt ait
explicitement souhaité se faire enterrer aux côtés d’un proche, ou que sa famille ait estimé conforme aux vœux
du défunt de l’inhumer au sein d’un espace confessionnel près d’un parent ou d'un proche ou dans un caveau
familial inséré dans un espace confessionnel. Il pourra être indiqué au maire que, pour respecter le souhait du
défunt ou des familles, il serait souhaitable de faire droit à la demande d'inhumation dans l'espace confessionnel
en évitant de dénaturer cet espace. Il convient de souligner toutefois qu’un accommodement raisonnable en la
matière suppose de ne pas apposer sur la sépulture du défunt un signe ou emblème religieux qui dénaturerait
l'espace et pourrait heurter certaines familles. L’article R2223-8 du CGCT prévoit qu’aucune inscription ne peut
être placée sur les pierres tumulaires ou monuments funéraires sans avoir été préalablement soumise à
l’approbation du maire. Celui-ci peut, en effet, s’opposer au projet d’inscription funéraire, sur le fondement de
ses pouvoirs de police visant à assurer l’ordre public et la décence dans le cimetière.
L’ensemble des règles et prescriptions en matière d’hygiène et de salubrité, notamment celles relatives à
la conservation des corps et à leur mise en bière doivent être strictement respectées ; l’inhumation directement
en pleine terre et sans cercueil ne peut être acceptée (article R. 2213-15 du CGCT).
Lorsqu’une commune reprend, dans les conditions fixées par le code général des collectivités
territoriales, l’emplacement d’une sépulture en terrain commun ou celui d’une concession privée, les restes des
corps exhumés doivent être déposés à l’ossuaire communal. Les communes dotées d’un espace confessionnel
dans leur cimetière devront être invitées à créer, autant que faire se peut, un ossuaire réservé aux restes des
défunts de même confession.
4 – La police des cimetières en Alsace-Moselle
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La loi du 14 novembre 1881, qui a posé l'interdiction d'établir une séparation dans les cimetières
communaux à raison de la différence des cultes ainsi que de créer ou d'agrandir des cimetières confessionnels,
n'est pas applicable aux départements d'Alsace-Moselle. Les dispositions de l'article 15 du décret du 23 prairial
an XII (codifiées à l'article L2542-12 du code général des collectivités territoriales), précisant que "dans les
communes où l'on professe plusieurs cultes, chaque culte a un lieu d'inhumation particulier", ont été maintenues
dans les départements du Bas-Rhin, Haut-Rhin et Moselle.
Selon la jurisprudence administrative, ces dispositions, visant à prévenir les troubles à l'ordre public
dans les cimetières, ne présentent pas un caractère obligatoire. Il appartient au maire, chargé de la police
municipale, de décider, en fonction de la situation locale, de l'organisation du cimetière communal, de
l'instauration de cimetières confessionnels séparés ou de divisions confessionnelles au sein du cimetière. Dans
les faits, de nombreux maires ont choisi, en accord avec les autorités religieuses, d'interconfessionnaliser les
cimetières.
Les divisions confessionnelles qui existent, conformément à l'article L2542-12 du code général des
collectivités territoriales, ne s'appliquent qu'aux seuls cultes reconnus. Mais, en Alsace-Moselle, les maires
peuvent également user des pouvoirs qu'ils détiennent en matière de police des funérailles et des cimetières et
en particulier du pouvoir de fixer, l'endroit affecté à chaque tombe, après avoir pris connaissance de l'intention
précédemment exprimée par le défunt, ou manifestée par la personne ayant qualité pour pourvoir aux
funérailles. Ils peuvent ainsi mettre en place, si le besoin s'en fait sentir et si la situation locale le permet, des
espaces confessionnels pour les cultes non reconnus, sous réserve que la neutralité du cimetière soit préservée
dans les parties publiques et que cet espace ne soit pas isolé du cimetière communal.
* ***
Je vous serais obligé de bien vouloir porter ces instructions à la connaissance des maires de votre
département et me tenir informée, sous le présent timbre, des difficultés que ceux-ci pourraient rencontrer dans
la mise en oeuvre de cette circulaire.
Michèle ALLIOT-MARIE
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Circulaire n° 2008/002 du 21 avril 2008 relative à l’utilisation des édifices de culte appartenant à
l’État à des fins non cultuelles.
La ministre de l’Intérieur, de l’Outre-Mer et des Collectivités territoriales, La ministre de la Culture et de la
Communication, à Mesdames et messieurs les préfets de région (direction régionale des affaires culturelles)
Mesdames et messieurs les préfets de département (service départemental de l’architecture et du patrimoine)
L’État est propriétaire de quatre-vingt sept cathédrales ainsi que de la basilique Saint-Nazaire à Carcassonne et
de l’église Saint-Julien à Tours. Ces édifices ont été confiés au ministère chargé de la culture, leur gestion
domaniale étant assurée par le Centre des monuments nationaux aux termes de la convention du 10 avril 1998.
En vertu de l’article 13 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des églises et de l’État :
« Les édifices servant à l’exercice public du culte, ainsi que les objets mobiliers les garnissant, seront laissés
gratuitement à la disposition des établissements publics du culte, puis des associations appelées à les remplacer
auxquelles les biens de ces établissements auront été attribués (...) ». Il résulte de ces dispositions que ces
édifices font l’objet d’une affectation cultuelle exclusive : d’autres activités, notamment culturelles, n’y sont
possibles que dans la mesure où elles sont compatibles avec les exigences de l’affectation cultuelle, que seul le
desservant, dont l’accord préalable est obligatoirement requis, est à même d’apprécier, sous le contrôle du juge.
La présente circulaire a pour objet d’exposer, pour ces quatre-vingt-neuf bâtiments, les responsabilités et les
rôles respectifs des affectataires cultuels, des architectes des Bâtiments de France et du Centre des monuments
nationaux, à l’occasion de leur utilisation pour des manifestations ou activités qui, sans être cultuelles, sont
compatibles avec leur affectation cultuelle. Les principes ici rappelés ont, par ailleurs, vocation à inspirer la
pratique suivie pour les édifices cultuels appartenant à des collectivités territoriales.
1. Modalités d’autorisation de l’utilisation de l’édifice
Le premier alinéa de l’article L. 2124-31 du Code général de la propriété des personnes publiques dispose que :
« Lorsque la visite de parties d’édifices affectés au culte, notamment de celles où sont exposés des objets
mobiliers classés ou inscrits, justifie des modalités particulières d’organisation, leur accès est subordonné à
l’accord de l'affectataire. Il en va de même en cas d’utilisation de ces édifices pour des activités compatibles avec
l’affectation cultuelle. L’accord précise les conditions et les modalités de cet accès ou de cette utilisation ».
Il résulte de ces dispositions que toute utilisation ou occupation non cultuelle de l’édifice doit cumulativement
recueillir :
-l’accord préalable donné par le desservant auquel il appartient, seul, d’apprécier la compatibilité des activités
envisagées avec l’affectation cultuelle de l’édifice ;
-l’autorisation de l’État, propriétaire qui s’assure de la compatibilité de ces activités avec les prescriptions de
sécurité et de sûreté et les nécessités liées à la préservation et à la conservation des monuments historiques.
Le Centre des monuments nationaux, gestionnaire des édifices pour le compte de l’État, instruit la demande
d’utilisation que lui transmet l’architecte des Bâtiments de France, conservateur de l’édifice. À cette occasion, il
recueille, auprès des autorités disposant d’un pouvoir de police générale ou spéciale, les avis ou autorisations
éventuellement requis compte tenu de l’activité envisagée.
2. Recettes susceptibles d’être perçues
L’article 13 déjà cité de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des églises et de l’État impose
l’accès libre et gratuit aux édifices pour l’exercice du culte auquel ils sont affectés.
Le nouvel article L. 2124-31 du Code général de la propriété des personnes publiques donne une base légale à la
perception de droits d’entrée pour des manifestations se déroulant dans les édifices ou pour la visite des parties
de ces monument qui font l’objet d’aménagements spéciaux et cela quel que soit le propriétaire du bâtiment
(État ou collectivité territoriale).
Ces dispositions couvrent aussi bien la redevance perçue sur les tiers utilisant l’édifice pour une manifestation
culturelle, comme l’organisateur d’un concert ou d’une exposition, que les droits d’entrée perçus directement sur
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les visiteurs lorsqu’ils souhaitent accéder à une partie de l’édifice qui a fait l’objet d’un aménagement spécial,
pour le visiter ou admirer les objets qu’elle contient et qui y sont exposés.
En revanche, elles ne couvrent ni les droits perçus par l’organisateur d’un concert ou d’une exposition temporaire
auprès du public, qui paye pour assister à ce concert ou visiter l’exposition, ni les recettes des comptoirs de
vente. Ces droits constituent un prix, qui ne relève que de la relation entre l’organisateur de la manifestation ou
l’exploitant du comptoir et ses clients.
L’article L. 2124-31 précise le caractère facultatif de la redevance, ainsi que la possibilité d’en partager le produit
entre l’affectataire et la collectivité propriétaire
3. Responsabilités respectives en matière de sécurité et de sûreté
En vertu de l’arrêté interministériel du 15 septembre 2006 relatif à la protection contre les risques d’incendie et
de panique dans les établissements recevant du public relevant du ministère chargé de la culture (JO n° 225 du
28 septembre 2006, p. 14246), l’architecte des Bâtiments de France, qui est le conservateur de l’édifice, est le
référent en matière de sécurité pour tous les travaux et aménagements divers ainsi que pour toutes les
manifestations ayant lieu dans la cathédrale. C’est lui qui délivre un avis sur le respect des normes de sécurité
pour toutes les manifestations ou activités exceptionnelles, quelle que soit leur nature, qui s’y déroulent.
Afin de faciliter la gestion du dossier d’autorisation vous conseillerez au desservant, s’il est d’accord avec le
principe d’une manifestation et qu’il est saisi en premier par l’organisateur de celle-ci, de le diriger vers
l’architecte des Bâtiments de France qui délivrera l’avis sur la compatibilité avec les règles de sécurité.
Sous l’autorité de l’architecte des Bâtiments de France, celui qui utilise l’édifice est considéré comme responsable
de la sécurité pour l’activité qu’il y organise ou exploite. Il appartient ainsi à celui qui utilise l’édifice à des fins
non cultuelles de veiller à ce que son activité soit conforme aux prescriptions générales de sécurité et au
règlement interne de sécurité propre à chaque édifice.
Les conservateurs sont tenus de rédiger un tel règlement interne après concertation avec le desservant. Ce
document doit regrouper les dispositions réglementaires en vigueur, le schéma directeur pluriannuel
d’amélioration de la sécurité incendie, le cahier des charges d’exploitation et le registre de sécurité de l’édifice.
La sûreté des édifices, notamment la protection contre le vol, fait l’objet d’une responsabilité partagée entre
l’architecte des Bâtiments de France, conservateur de l’édifice, et le desservant. Aucun texte général ne régit les
modalités de la mise en sûreté des édifices. Il est souhaitable que celle-ci fasse l’objet d’une concertation locale
portant notamment sur les objets suivants : établissement d’un organigramme des clés en fonction des besoins
de chacun, installation d’une armoire à clés hermétique, formalisation de l’ouverture et de la fermeture de
l’édifice, formalisation de l’éclairage intérieur.
Un vade-mecum sur la mise en sûreté vous sera adressé et pourra être adapté, en fonction des particularités de
chaque édifice, par le conservateur et le desservant, le cas échéant en liaison avec le chargé de mission pour la
sûreté à la direction chargée de l’architecture et du patrimoine au ministère de la Culture et de la
Communication.
En tant que de besoin des réunions pourront être organisées à votre demande entre les architectes des
Bâtiments de France et les desservants, afin d’examiner toute question pratique relative à la mise en sûreté de
tel ou tel édifice.
Plus généralement, les chargés de la sécurité et de la sûreté à la direction chargée de l’architecture et du
patrimoine au ministère de la Culture et de la Communication se tiennent à votre disposition pour vous apporter
tous éléments utiles.
La ministre de l’Intérieur, de l’Outre-Mer
et des Collectivités territoriales,
Michèle Alliot-Marie
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La ministre de la Culture et de la Communication,
Christine Albanel
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Assemblée Nationale
PROPOSITIONS DE LOI
ÕÕÕ
ÕÕÕ
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
TREIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 29 avril 2008.
PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE
visant à interdire à un parti politique de se réclamer d’une religion ou d’une ethnie
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
TREIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 7 février 2008.
PROPOSITION DE LOI
visant à promouvoir la laïcité dans la République
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N° 843
_____
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
TREIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 29 avril 2008.
PROPOSITION DE LOI
CONSTITUTIONNELLE
visant à interdire à un parti politique de se réclamer
d’une religion ou d’une ethnie,
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la
République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
PRÉSENTÉE
PAR M. Jacques MYARD,
député.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Le communautarisme, c’est-à-dire la défense des intérêts spécifiques ou la recherche de droits particuliers
pour un groupe ethnique ou religieux, se développe malheureusement dans la société française sur le
terreau des difficultés liées à l’intégration. Ce phénomène est potentiellement dangereux, il peut à terme
menacer directement l’indivisibilité de la République. Or le principe de laïcité a depuis longtemps fait ses
preuves comme le meilleur garant de la cohésion nationale et du respect des droits individuels, en plaçant
clairement la religion dans la sphère strictement privée. Ainsi, les activités religieuses jouissent d’une liberté
totale, garantie par la loi, dès lors qu’elles ne sont pas un enjeu « en soi » du débat public.
Toutefois depuis quelque temps, certains groupes religieux cherchent à remettre en cause cette séparation
bien ancrée dans la tradition républicaine en faisant campagne directement au nom d’une religion, comme
on l’a vu aux dernières élections municipales de Strasbourg.
Des partis politiques se réclamant ouvertement d’une religion ont ainsi fait leur apparition, s’adressant de
façon discriminatoire à une fraction de la population en fonction de son origine ethnique ou de son
appartenance religieuse. Il s’agit là d’une grave dérive, qui derrière la liberté d’opinion, n’a d’autre but que
de remettre en cause les fondements mêmes du pacte républicain.
Ces groupes profitent actuellement de l’absence de définition claire du parti politique dans la loi, simple
association loi de 1901 qui « se forme et exerce son activité librement » conformément à l’article 4 de la
Constitution. Ainsi, toute association religieuse a la possibilité de s’appeler « parti » et d’avoir une activité
politique en prenant part au débat public et en présentant des candidats aux élections.
La participation aux élections est la seule particularité des partis politiques qui les distinguent d’une
association ordinaire. Il suivent alors les dispositions des articles 7 à 11-9 de la loi du 11 mars 1988 sur le
financement de la vie politique. L’article 11-4 prévoit, notamment, que les partis et groupements politiques
© La lettre du droit des religions n°31 juin / juillet 2008
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sont les seules personnes morales à pouvoir déroger à l’interdiction de toute participation directe ou
indirecte au financement des campagnes électorales. En outre, ils peuvent bénéficier du financement public
à concurrence de leur participation et de leurs résultats aux élections législatives. Pour bénéficier de ces
dispositions, il leur suffit de constituer une association de financement, laquelle doit recevoir l’agrément de la
Commission nationale des comptes de campagne, sous la seule réserve de « la limitation de son objet social
au financement d’un parti politique » (article 11-1). La loi du 11 mars 1988 ne limite la constitution d’un
parti politique que par son mode de gestion.
Les seules limitations aux valeurs ou aux références idéologiques auxquelles les partis politiques peuvent se
référer sont celles énoncées à l’article 4 de la Constitution : « Ils doivent respecter les principes de la
souveraineté nationale et de la démocratie ». En outre, ils peuvent être dissous comme toute association «
formée en vue d’une cause ou d’un objet illicite, contraire aux lois, aux bonnes mœurs, ou qui aurait pour
but de porter atteinte à l’intégrité du territoire national et à la forme républicaine du gouvernement » (article
3 de la loi du 1er juillet 1901). La nullité est prononcée soit par décret en Conseil des ministres
conformément à l’article 1er de la loi du 10 janvier 1936, soit par le tribunal de grande instance qui peut être
saisi par tout intéressé ou par le ministère public conformément à l’article 7 de la loi du 1er juillet 1901.
Une loi qui viendrait compléter la loi du 1er juillet 1901 ou bien la loi du 1er mars 1988 en introduisant une
interdiction spécifique aux partis politiques de se référer à une religion serait ainsi contraire à l’article 4 de la
Constitution. En outre, elle apparaîtrait difficile à mettre en œuvre, tant la frontière entre une association
ordinaire et un parti politique est mouvante : certains groupuscules ne présentent pas de candidats aux
élections mais interviennent dans le débat politique.
Aussi, l’interdiction de toute référence religieuse ou ethnique dans un parti politique doit être une norme
constitutionnelle destinée à compléter l’article 4. De surcroît, une telle norme renforcerait légitimement le
principe de laïcité, fondement même de notre vouloir vivre ensemble.
Telles sont les raisons de la proposition de loi qu’il vous est demandé, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir
adopter.
PROPOSITION DE LOI
Article unique
L’alinéa 1er de l’article 4 de la Constitution du 4 octobre 1958 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ils ne peuvent se réclamer d’aucune ethnie ni d’aucune religion. »
© La lettre du droit des religions n°31 juin / juillet 2008
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N° 710
_____
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
TREIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 7 février 2008.
PROPOSITION DE LOI
visant à promouvoir la laïcité dans la République,
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la
République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
PRÉSENTÉE
PAR MM. Jean GLAVANY, Yves DURAND, Jean-Marc AYRAULT, François HOLLANDE, Gérard CHARASSE,
Christian BATAILLE, Pierre BOURGUIGNON, Mme Annick LEPETIT, M. Henri EMMANUELLI, Mme Marylise
LEBRANCHU, MM. Manuel VALLS, Michel MÉNARD, Mmes Frédérique MASSAT, Sandrine MAZETIER, MM.
Philippe TOURTELIER, Jean-Paul BACQUET, Dominique BAERT, Jean-Pierre BALLIGAND, Gérard BAPT,
Claude BARTOLONE, Jacques BASCOU, Mme Gisèle BIÉMOURET, MM. Serge BLISKO, Patrick BLOCHE, Daniel
BOISSERIE, Mme Marie-Odile BOUILLE, M. Christophe BOUILLON, Mme Monique BOULESTIN, M. François
BROTTES, Mme Danielle BOUSQUET, MM. Alain CACHEUX, Jérôme CAHUZAC, Thierry CARCENAC, Mme
Martine CARRILLON-COUVREUR, MM. Bernard CAZENEUVE, Guy CHAMBEFORT, Jean-Paul CHANTEGUET,
Alain CLAEYS, Jean-Michel CLÉMENT, Mme Marie-Françoise CLERGEAU, MM. Gilles COCQUEMPOT, Pierre
COHEN, Mmes Catherine COUTELLE, Pascale CROZON, Claude DARCIAUX, MM. Michel DEBET, Pascal
DEGUILHEM, Mme Michèle DELAUNAY, MM. Guy DELCOURT, Michel DELEBARRE, Bernard DEROSIER, Marc
DOLEZ, René DOSIÈRE, Tony DREYFUS, Jean-Pierre DUFAU, William DUMAS, Mme Laurence DUMONT, M.
Jean-Paul DUPRÉ, Mme Odette DURIEZ, MM. Olivier DUSSOPT, Christian ECKERT, Mme Martine FAURE, M.
Hervé FÉRON, Mme Geneviève FIORASO, M. Michel FRANÇAIX, Mme Geneviève GAILLARD, M. Jean
GAUBERT, Mme Catherine GÉNISSON, MM. Joël GIRAUD, Daniel GOLDBERG, Jean GRELLIER, David HABIB,
Mmes Danièle HOFFMAN-RISPAL, Sandrine HUREL, M. Christian HUTIN, Mmes Monique IBORRA, Françoise
IMBERT, MM. Michel ISSINDOU, Serge JANQUIN, Henri JIBRAYEL, Régis JUANICO, Jean-Pierre KUCHEIDA,
François LAMY, Jean LAUNAY, Jean-Yves LE BOUILLONNEC, Gilbert LE BRIS, Jean-Yves LE DÉAUT, Mme
Annick LE LOCH, MM. Patrick LEBRETON, Michel LEFAIT, Patrick LEMASLE, Jean-claude LEROY, Bernard
LESTERLIN, Michel LIEBGOTT, Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, MM. François LONCLE, Jean MALLOT,
Louis-Joseph MANSCOUR, Mme Marie-Lou MARCEL, MM. Jean-René MARSAC, Philippe MARTIN, Mme
Martine MARTINEL, MM. Gilbert MATHON, Didier MATHUS, Kléber MESQUIDA, Jean MICHEL, Didier
MIGAUD, Pierre MOSCOVICI, Philippe NAUCHE, Alain NÉRI, Mmes Marie-Renée OGET, Françoise OLIVIERCOUPEAU, MM. Michel PAJON, Christian PAUL, Jean-Luc PÉRAT, Jean-Claude PEREZ, Mmes Marie-Françoise
PÉROL-DUMONT, Sylvia PINEL, Martine PINVILLE, MM. Philippe PLISSON, François PUPPONI, Mme Catherine
QUÉRÉ, M. Dominique RAIMBOURG, Mmes Marie-Line REYNAUD, Chantal ROBIN-RODRIGO, MM. Alain
RODET, Marcel ROGEMONT, Bernard ROMAN, René ROUQUET, Patrick ROY, Michel SAINTE-MARIE, Michel
SAPIN, Mme Odile SAUGUES, MM. Christophe SIRUGUE, Pascal TERRASSE, Mme Marisol TOURAINE, MM.
Jean-Jacques URVOAS, Daniel VAILLANT, Michel VAUZELLE, Michel VERGNIER, André VÉZINHET, Alain
VIDALIES, Jean-Michel VILLAUMÉ et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche (1)
et apparentés (2),
députés.
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___________________________
(1) Ce groupe est composé de : Mmes Patricia Adam, Sylvie Andrieux, MM. Jean-Marc Ayrault, Jean-Paul
Bacquet, Dominique Baert, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, Claude Bartolone, Jacques Bascou, Christian
Bataille, Mme Delphine Batho, M. Jean-Louis Bianco, Mme Gisèle Biemouret, MM. Serge Blisko, Patrick
Bloche, Daniel Boisserie, Maxime Bono, Jean-Michel Boucheron, Mme Marie-Odile Bouillé, M. Christophe
Bouillon, Mme Monique Boulestin, M. Pierre Bourguignon, Mme Danielle Bousquet, MM. François Brottes,
Alain Cacheux, Jérôme Cahuzac, Jean-Christophe Cambadélis, Thierry Carcenac, Christophe Caresche, Mme
Martine Carrillon-Couvreur,
MM. Laurent Cathala, Bernard Cazeneuve, Jean-Paul Chanteguet, Alain Claeys, Jean-Michel Clément, Mme
Marie-Françoise Clergeau, MM. Gilles Cocquempot, Pierre Cohen, Mmes Catherine Coutelle, Pascale Crozon,
M. Frédéric Cuvillier, Mme Claude Darciaux, MM. Michel Debet, Pascal Deguilhem, Mme Michèle Delaunay,
MM. Guy Delcourt, Michel Delebarre, Bernard Derosier, Michel Destot, Marc Dolez, Julien Dray, Tony
Dreyfus, Jean-Pierre Dufau, William Dumas, Jean-Louis Dumont, Mme Laurence Dumont, MM. Jean-Paul
Dupré, Yves Durand, Mme Odette Duriez, MM. Philippe Duron, Olivier Dussopt, Christian Eckert, Henri
Emmanuelli, Mme Corinne Erhel, MM. Laurent Fabius, Albert Facon, Mme Martine Faure, M. Hervé Féron,
Mmes Aurélie Filippetti, Geneviève Fioraso, M. Pierre Forgues, Mme Valérie Fourneyron, MM. Michel
Françaix, Jean-Claude Fruteau, Jean-Louis Gagnaire, Mme Geneviève Gaillard, MM. Guillaume Garot, Jean
Gaubert, Mme Catherine Génisson, MM. Jean-Patrick Gille, Jean Glavany, Daniel Goldberg, Gaëtan Gorce,
Mme Pascale Got, MM. Marc Goua, Jean Grellier, Mme Élisabeth Guigou, M. David Habib, Mme Danièle
Hoffman-Rispal, M. François Hollande, Mmes Sandrine Hurel, Monique Iborra, M. Jean-Louis Idiart, Mme
Françoise Imbert, MM. Michel Issindou, Éric Jalton, Serge Janquin, Henri Jibrayel, Régis Juanico, Armand
Jung, Mme Marietta Karamanli, M. Jean-Pierre Kucheida, Mme Conchita Lacuey, MM. Jérôme Lambert,
François Lamy, Jack Lang, Jean Launay, Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Marylise Lebranchu, MM. Patrick
Lebreton, Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Déaut, Michel Lefait, Jean-Marie Le Guen, Mme Annick Le Loch, M.
Patrick Lemasle, Mmes Catherine Lemorton, Annick Lepetit, MM. Bruno Le Roux, Jean-Claude Leroy, Bernard
Lesterlin, Michel Liebgott, Mme Martine Lignières-Cassou, MM. François Loncle, Victorin Lurel, Jean Mallot,
Louis-Joseph Manscour, Mmes Jacqueline Maquet, Marie-Lou Marcel, MM. Jean-René Marsac, Philippe
Martin, Mmes Martine Martinel, Frédérique Massat, MM. Gilbert Mathon, Didier Mathus, Mme Sandrine
Mazetier, MM. Michel Ménard, Kléber Mesquida, Jean Michel, Didier Migaud, Arnaud Montebourg, Pierre
Moscovici, Pierre-Alain Muet, Philippe Nauche, Henri Nayrou, Alain Néri, Mmes Marie-Renée Oget, Françoise
Olivier-Coupeau, M. Michel Pajon, Mme George Pau-Langevin, MM. Christian Paul, Germinal Peiro, Jean-Luc
Pérat, Jean-Claude Perez, Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, MM. Philippe Plisson, François Pupponi, Mme
Catherine Quéré, MM. Jean-Jack Queyranne, Dominique Raimbourg, Mme Marie-Line Reynaud, MM. Alain
Rodet, Bernard Roman, René Rouquet, Alain Rousset, Patrick Roy, Michel Sainte-Marie, Michel Sapin, Mme
Odile Saugues, MM. Christophe Sirugue, Pascal Terrasse, Jean-Louis Touraine, Mme Marisol Touraine, MM.
Philippe Tourtelier, Jean-Jacques Urvoas, Daniel Vaillant, Jacques Valax, Mme Françoise Vallet, MM. André
Vallini, Manuel Valls, Michel Vauzelle, Michel Vergnier, André Vézinhet, Alain Vidalies, Jean-Michel Villaumé,
Jean-Claude Viollet et Philippe Vuilque.
(2) Mme Chantal Berthelot, MM. Guy Chambefort, Gérard Charasse, René Dosière, Paul Giacobbi, Mme
Annick Girardin, MM. Joël Giraud, Christian Hutin, Serge Letchimy, Albert Likuvalu, Mmes Jeanny Marc,
Dominique Orliac, Sylvia Pinel, Martine Pinville, M. Simon Renucci, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Marcel
Rogemont et Mme Christiane Taubira.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Il y a trois ans, en 2005, la République a commémoré le centenaire de la loi du 9 décembre 1905 dite « loi
de séparation des églises et de l’État ».
Cette grande loi est à la fois :
– une loi de liberté puisqu’elle protège une liberté individuelle fondamentale qui est la liberté de conscience ;
© La lettre du droit des religions n°31 juin / juillet 2008
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– une loi d’égalité puisqu’elle place toutes les convictions spirituelles sur un pied d’égalité : croyants des
divers cultes, humanistes athées ou agnostiques jouissent des mêmes droits ;
– une loi de fraternité puisqu’elle constitue le fondement du « vivre ensemble » dans la République avec
toutes nos différences, dans le respect de nos différences, mais sans jamais que l’une de ces différences ne
dicte sa loi aux autres.
Cette loi participe à la définition de la laïcité, qui est non seulement un combat permanent non pas contre
les religions mais contre les intégrismes, pour le libre arbitre, l’esprit critique et l’esprit de rationalité, mais
qui est aussi l’idéal d’un monde commun à tous au-delà de nos différences.
Cette commémoration a montré la permanence de la valeur de laïcité, qui a toujours besoin d’être explicitée,
concrétisée, traduite dans les faits et diffusée.
Près de trois ans après cette commémoration, le débat sur la laïcité vient de subir, coup sur coup, plusieurs
coups de boutoir de la part du Président de la République qui, d’abord à l’université de Constantine lors de
son voyage en Algérie le 5 décembre 2007, puis dans son discours du Latran lors de son voyage au Vatican
le 20 décembre 2007 et, enfin, en Arabie Saoudite en janvier 2008, a tenu des propos qui viennent
clairement en violation de plusieurs principes républicains et constitutionnels.
Oui, nous osons le dire, violation de la Constitution quand le Président, qui devrait être le Président de tous
les Français, se prononce en tant que chrétien, au nom des chrétiens, et non pas « au nom du peuple
français ».
Négationnisme d’une grande partie de notre histoire quand, au lieu de citer les « racines chrétiennes de la
France » – ce que nul ne contestera –, il ose évoquer « les racines essentiellement chrétiennes » qui
raisonnent comme une insulte pour tous ceux qui, athées ou agnostiques, inventeurs de la philosophie des
Lumières ou de la Déclaration des droits de l’homme de 1789, humanistes de tous bords, n’en ont pas moins
fait la France.
Négationnisme qui fait, a posteriori, de la lecture de la lettre de Guy Môquet dans les écoles, une opération
politicienne aussitôt oubliée. Ce jeune résistant communiste ne bravait-il pas la mort au nom d’une
espérance nommée « liberté » ?
Négationnisme de notre histoire quand il présente cette grande loi républicaine de 1905 comme une loi de
violence (et même de « fanatisme » !...) sans un mot sur les drames épouvantables provoqués pour
l’humanité par les fanatismes religieux des croisades au 11 septembre 2001 en passant par les guerres de
religion et la Saint-Barthélemy.... Faut-il aussi rappeler qu’hier comme aujourd’hui de nombreuses femmes
subissent des contraintes intolérables fondées sur une conception intransigeante de la religion, une
conception selon laquelle la loi de Dieu prévaut sur la loi républicaine, une conception qui, quelles que soient
les religions selon les époques, oblige les femmes à se conformer pour être tolérées.
Violation de la loi de 1905 de « séparation des églises et de l’État » puisque le Président de la République
s’accapare le droit de hiérarchiser les options spirituelles, allant même jusqu’à accorder un privilège et une
supériorité spirituels au curé sur l’instituteur !
Oui, ces discours sont inquiétants, menaçants. Tout indique qu’il va falloir, à nouveau, défendre la laïcité
contre ces menaces. Nous, socialistes, ne délaisserons pas ce combat.
Un combat qui ne doit pas être laissé à ceux qui, de fait, n’ont qu’une obsession : revenir en arrière,
remettre en cause ce grand pilier du pacte républicain. Il en va ainsi de ceux qui veulent remettre en cause
la loi de 1905 ou bien qui plaident que le religieux vienne en aide à la République quand celle-ci n’assume
plus sa mission dans nos banlieues.
© La lettre du droit des religions n°31 juin / juillet 2008
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Ce combat doit être mené par les laïcs, ceux qui veulent que cette belle valeur ne soit pas seulement
défendue mais d’abord et avant tout promue. Pour cela, plutôt que d’en rester à des théories parfois un peu
abstraites, c’est à eux de traduire la laïcité au quotidien dans des propositions concrètes.
Tel est le but de la présente proposition de loi qui comporte trois titres regroupant, pour chacun, un certain
nombre de ces propositions concrètes :
– la laïcité dans la société ;
– la laïcité dans les services publics ;
– la laïcité à l’école.
I. La laïcité dans la société
L’article 1er crée un « Observatoire national de la laïcité ». Placé auprès du Premier ministre, composé
d’universitaires, de chercheurs, d’historiens, philosophes, sociologues, cet Observatoire aurait pour mission
d’alimenter le débat public en travaux de recherche sur la laïcité, de rendre des avis – sur saisie du
Gouvernement, du Parlement ou sur autosaisine – sur les problèmes d’actualité soulevés par l’application du
principe de laïcité et de répondre aux interrogations des particuliers sur le contenu exact de ce principe.
Si l’on se réfère au travail réalisé publiquement par la « commission Stasi » en 2003, cet Observatoire serait
une « commission Stasi permanente » ou bien une transposition au niveau de l’État de ce que le Parti
socialiste a mis en place depuis quelques années avec son « Université permanente de la laïcité ».
L’article 2 propose que l’Observatoire national de la laïcité élabore une « Charte de la laïcité ».
Cette Charte retrace l’histoire du principe de laïcité et, surtout, présente les conséquences concrètes qu’il
entraîne pour l’organisation de la société et sur le contenu de la citoyenneté. Cette Charte ferait l’objet de
prestations de serment solennelles en mairie lors de l’accès à la majorité et de l’accès à la nationalité
française. Une fois élaborée, il appartiendra au pouvoir exécutif et/ou au pouvoir législatif, qui seuls peuvent
fixer l’ordre du jour des assemblées parlementaires, de soumettre cette Charte à l’approbation du Parlement.
L’article 3 traite du statut particulier d’Alsace-Moselle. La réaffirmation de la laïcité se conjugue mal avec ce
statut. Dans l’attente de son abrogation pure et simple, qui pour être souhaitable, risquerait d’être mal
comprise si elle n’était pas effectuée de façon progressive et expliquée, un aménagement paraît nécessaire.
On doit, notamment, assurer la population que ne seraient pas affectés les droits sociaux dont elle bénéficie,
et qui servent trop souvent de prétexte au maintien du concordat, alors qu’ils ne lui sont pas liés
juridiquement.
La pratique actuelle qui oblige les parents à effectuer une demande spécifique pour que leurs enfants soient
dispensés de l’enseignement religieux, pourrait être modifiée. Il suffirait qu’un formulaire soit remis en début
d’année scolaire aux parents afin qu’ils répondent positivement ou négativement à cette offre de cours. De
même, l’enseignement de la religion musulmane doit être proposé aux élèves, au même titre que celui des
autres religions.
Dans le même esprit, il est souhaitable que, dès maintenant, soient enlevés les symboles religieux apposés
dans les établissements scolaires publics, selon un processus soucieux de ne pas heurter, accompagné
d’explications indiquant que ce n’est pas faire violence à la référence religieuse que de considérer qu’elle
n’engage que certains croyants, et ne doit donc pas s’imposer dans des lieux qui accueillent d’autres types
de croyants, ainsi que des athées et des agnostiques.
L’article 4 instaure un service civique obligatoire qui relève de l’application vivante du principe de laïcité. Ce
principe fonde le « vivre ensemble » dans la République, dans le respect de nos différences, sans jamais que
l’une ne dicte sa loi aux autres. Le service civique obligatoire de 6 mois, pour tous les jeunes garçons et
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toutes les jeunes filles, rétablira le nécessaire brassage social, la confrontation aux différences et
l’apprentissage de la citoyenneté faite de droits et de devoirs.
Ce service civique serait consacré à des missions d’intérêt général dans les domaines suivants :
accompagnement scolaire, aide aux personnes âgées, actions humanitaires, actions en faveur de
l’environnement. Il pourrait se dérouler au sein de l’éducation nationale, des hôpitaux, des maisons de
retraite, des associations agréées à cette fin, de l’armée, de la police ou des services d’incendie et secours,
en France ou dans les pays en voie de développement, afin que ces jeunes garçons et ces jeunes filles
consacrent une période de leur vie à rendre des services d’utilité collective.
L’article 5 renforce les pouvoirs de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et les exclusions
(HALDE). L’application du principe de laïcité, respect des différences, est indissociable de la lutte contre les
discriminations. Il est proposé que la HALDE statue de façon publique sur les faits portés à sa connaissance
et puisse interroger toute personne physique et morale de droit privé, comme c’est le cas actuellement, mais
aussi de droit public.
L’article 6 prévoit que dans les entreprises, après négociation entre les partenaires sociaux, les chefs
d’entreprise puissent réglementer les tenues vestimentaires et le port de signes religieux, pour des
impératifs tenant à la sécurité, aux contacts avec la clientèle, à la paix sociale à l’intérieur de l’entreprise.
L’article 7 permet de faire une place aux humanismes, athée et agnostique, comme option spirituelle à part
entière. Les grandes religions bénéficient d’une retransmission télévisée régulière. Il paraît opportun de
proposer à ces différentes opinions un créneau horaire équivalent, à l’instar de la pratique courante en
Belgique.
L’article 8 permet de prendre en compte les exigences religieuses en matière funéraire. La laïcité ne peut
servir d’alibi aux autorités municipales pour refuser que des tombes soient orientées dans les cimetières. Il
est souhaitable que le ministère de l’intérieur invite au respect des convictions religieuses, notamment à
l’occasion de l’expiration des concessions funéraires. En liaison avec les responsables religieux, la
récupération des concessions doit se faire dans le respect des exigences confessionnelles, avec un
aménagement des ossuaires adapté. Les collectivités pourraient se doter de comités d’éthique afin de
permettre un dialogue avec les différentes communautés religieuses, et de régler les difficultés susceptibles
de se poser.
II. La laïcité dans les services publics
Les articles 9 et 10 traitent de l’application du principe de laïcité à l’hôpital. En mars 2002, le législateur a
attribué aux malades des droits fondamentaux pour une véritable démocratie sanitaire. Cette avancée
législative doit être accompagnée de l’affirmation pour les malades du respect des principes de laïcité. À
l’hôpital, personne ne doit refuser d’être pris en charge par tel ou tel membre du personnel soignant en
invoquant notamment des raisons religieuses. Il est indispensable de définir les obligations des patients à
l’égard des agents qui interviennent dans les établissements de soins. Le respect des obligations sanitaires,
des règles indispensables au bon fonctionnement du service public, doit être complété par l’interdiction de
récuser un agent.
L’article 11 traite de l’obligation de réserve des fonctionnaires. Depuis le début du XXe siècle, la
jurisprudence constante du Conseil d’État impose aux agents publics la plus stricte neutralité. Elle n’a,
jusqu’à présent, jamais fait l’objet d’une consécration législative. Il serait opportun de transcrire dans le
statut général des trois fonctions publiques le respect de la neutralité du service auquel sont tenus les
fonctionnaires et les agents non titulaires de l’État, des collectivités territoriales et de leurs établissements
publics. Le texte d’application de cet article devra prévoir en particulier dans quelles limites les fonctionnaires
d’autorité peuvent porter leur tenue officielle dans les cérémonies religieuses.
La loi de 1905 précise que « la République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte », c’està-dire, concrètement, que tous les cultes doivent être placés sur un plan d’égalité. Or, tel n’est pas le cas.
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Dans de nombreux domaines, les cultes et les humanismes athée et agnostique ne sont pas représentés de
la même façon au sein des services publics.
L’article 12 propose que soit généralisée, en particulier dans les hôpitaux et les prisons, la présence de lieux
permettant la reconnaissance et l’exercice de l’ensemble des opinions philosophiques et religieuses.
L’article 13 met en œuvre la même disposition pour l’armée.
III. La laïcité à l’école
Dans le système éducatif, nous proposons un certain nombre de mesures concrètes afin que la pédagogie de
la laïcité soit vécue au quotidien par les élèves. Pour cela, il faut commencer par mieux former les
enseignants à la laïcité. C’est ainsi que l’article 14 propose que dans les IUFM deux modules d’enseignement,
l’un sur la philosophie de la laïcité et les valeurs de la République, l’autre sur l’enseignement du fait religieux
et la déontologie laïque, soient proposés et généralisés pour l’ensemble des maîtres, en formation initiale et
continue.
Il faut ensuite initier les élèves. L’article 15 propose que ces enseignements soient intégrés dans les
programmes obligatoires d’enseignement des premier et second degrés, en même temps que devra y figurer
un enseignement des « humanités » (connaissance des mythologies fondatrices du monde grec, latin et
oriental, des humanismes de la Renaissance, du siècle classique, des Lumières...). L’initiation à de telles
approches doit se garder en effet de tout privilège accordé à un type de croyance, comme de tout
ethnocentrisme.
L’article 16 prévoit que tout établissement scolaire doit comporter sur son fronton la devise de la République
: « Liberté, égalité, fraternité ».
Des élèves ne peuvent être systématiquement dispensés d’aller en cours pour des raisons religieuses. Les
dispenses de cours pour éviter d’aller à la piscine ou au gymnase sont trop souvent indûment accordées.
Pour mettre fin à ces certificats de complaisance, l’article 17 prévoit que les dispenses médicales doivent être
impérativement délivrées par la médecine scolaire ou, à défaut, par des médecins agréés par l’État.
Le préambule de la Constitution de 1946 consacre le principe selon lequel « l’organisation de l’enseignement
public, gratuit et obligatoire à tous les degrés, est un devoir de l’État ». Or, force est de constater que cette
obligation constitutionnelle n’est pas totalement respectée. En effet, dans certaines communes rurales, les
familles sont contraintes de scolariser leurs enfants dans des établissements privés sous contrat
d’association, du fait de l’absence d’école publique.
Il faut donc rappeler clairement, qu’à terme, l’objectif général d’un État laïque authentique doit être de
remédier à de telles carences en développant un réseau d’écoles publiques maillant tout le territoire national
et permettant à toutes les familles qui le souhaitent d’y scolariser leurs enfants. Il importe, en l’occurrence,
de considérer que l’école n’est pas un service public comme les autres et que l’instruction laïque, prévue par
Condorcet pour fonder la citoyenneté éclairée, n’est pas une « prestation » comme une autre. Le caractère
public et laïque de l’école de la République n’est pas une simple option facultative, mais une exigence à
laquelle on ne saurait renoncer.
Le rapport de la commission Stasi pointait la carence de l’État en matière d’offre d’enseignement public dans
de trop nombreuses communes, et appelait un effort pour y remédier. C’est pourquoi les socialistes
proposent un plan pluriannuel de résorption de ce déficit. À cette fin, en dérogation des lois de
décentralisation, l’État prend en charge le financement de la construction des écoles publiques dans les
communes.
L’article 18 définit les modalités d’intervention de l’État en complétant le premier alinéa de l’article L. 212-2
du code de l’éducation. L’État se substitue ainsi à la commune afin de résorber le déséquilibre en matière
d’écoles publiques.
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Enfin, l’article 19 propose l’abrogation de l’article 89 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux
libertés et responsabilités locales qui impose aux communes de financer les écoles privées sous contrat
d’association pour les enfants des familles résidantes de ces communes. Cet article a ouvert la voie à une
remise en cause fondamentale des équilibres de financement entre les écoles publiques et les
établissements privés d’enseignement.
PROPOSITION DE LOI
TITRE IER
LA LAÏCITÉ DANS LA SOCIÉTÉ
Article 1er
Il est créé un Observatoire national de la laïcité, organisme rattaché au Premier ministre, ayant pour mission
de promouvoir le principe de laïcité, notamment le respect de la diversité des options spirituelles et des
confessions de chacun et la garantie de la liberté de conscience.
La composition de l’Observatoire national de la laïcité est fixée par décret en Conseil des ministres.
Article 2
L’Observatoire national de la laïcité prévu à l’article 1er propose une Charte de la laïcité définissant les droits
et les obligations de chacun.
Cette Charte de la laïcité prendra la forme d’un document qui sera remis individuellement lors de la remise
de la carte d’électeur, la formation initiale des agents du service public, la rentrée des classes des élèves de
l’enseignement secondaire, la signature d’un contrat d’accueil ou l’acquisition de la nationalité française.
Ce document, sous forme d’affiche, sera apposé dans les lieux publics concernés.
Article 3
Le 13° de l’article 7 de la loi du 1er juin 1924 est complété par les mots : « sous réserve des aménagements
au statut scolaire local en vigueur dans les établissements scolaires du premier degré dans les départements
du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, portant en particulier sur le régime de l’enseignement religieux,
qui seront fixés par décret en Conseil des ministres. »
Article 4
Il est créé un service civique pour tous les jeunes Français, filles et garçons. Les jeunes de nationalité
étrangère et résidant régulièrement sur le territoire français pourront y participer sur la base du volontariat.
Ce service est consacré à des missions d’intérêt général. Il est effectué entre dix-huit et vingt-cinq ans pour
une durée obligatoire de six mois.
Il comporte deux périodes consacrées, l’une, à un stage théorique et, l’autre, à une mise en pratique, qui
sera l’occasion de confronter à la réalité les apprentissages de base fournis au cours du stage théorique.
Cette période ouvre droit, dans des conditions définies par décret, à validation des acquis de l’expérience
professionnelle et au versement d’une indemnité.
Le service civique peut s’effectuer notamment dans les domaines suivants : action humanitaire, coopération,
solidarité nationale, prévention de l’exclusion, éducation, environnement, sécurité civile.
Article 5
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La loi n° 2004-1486 du 30 décembre 2004 portant création de la Haute Autorité de lutte contre les
discriminations et pour l’égalité est ainsi modifiée :
1° Avant le dernier alinéa de l’article 2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le collège statue publiquement. »
2° Dans le deuxième alinéa de l’article 5, les mots : « de droit privé » sont supprimés.
Article 6
Dans les deux mois qui suivent la promulgation de la présente loi seront ouvertes des négociations
interprofessionnelles afin de garantir l’application des principes guidant la mission de l’Observatoire national
de la laïcité au sein des entreprises, en veillant à leur compatibilité avec les règles relatives à l’hygiène et la
sécurité sur les lieux de travail.
Article 7
Le premier alinéa de l’article 13 de la loi n° 86–1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de
communication est complétée par les mots : « et celles qui traitent du sujet philosophique et religieux ».
Article 8
Les communes veillent au bon entretien des terrains de sépulture dans les cimetières et des monuments
funéraires dans le respect des convictions exprimées et de la liberté de conscience, notamment à l’expiration
des concessions funéraires.
TITRE II
LA LAÏCITÉ DANS LES SERVICES PUBLICS
Article 9
L’article L. 1110-3 du code de la santé publique est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Elle ne peut récuser les agents qui l’accueille ou lui dispense les soins. »
Article 10
Le deuxième alinéa de l’article L. 1112-2 du code de la santé publique est complété par une phrase ainsi
rédigée :
« Les patients sont informés qu’ils ne peuvent récuser les agents qui les accueillent ou leur dispensent les
soins. »
Article 11
Après le premier alinéa de l’article 6 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des
fonctionnaires, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les fonctionnaires sont tenus à l’obligation de réserve. La nature et l’étendue de cette obligation sont
notamment fonction de la place du fonctionnaire dans la hiérarchie de l’administration dont il est membre.
Le juge administratif apprécie les limites au droit d’expression ainsi apportées aux fonctionnaires. »
Article 12
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L’exercice de l’ensemble des opinions philosophiques et religieuses est reconnu et assuré dans les
établissements publics tels que les écoles, collèges, lycées, hôpitaux et prisons.
Article 13
L’article L. 4121-2 du code de la défense est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Des moyens spécifiques permettent la reconnaissance et l’exercice de l’ensemble des opinions
philosophiques et religieuses. »
TITRE III
LA LAÏCITÉ À L’ÉCOLE
Article 14
Après l’article L. 721-1 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 721-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 721-1-1. – Les instituts universitaires de formation des maîtres proposent, dans le cadre de la
formation professionnelle initiale et continue, l’enseignement de la philosophie de la laïcité, des valeurs de la
République et du fait religieux. »
Article 15
Après l’article L. 312-15 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 312-15-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 312-15-1. – L’enseignement de la philosophie de la laïcité et des valeurs de la République, du fait
religieux et de son histoire doit être organisé et est inclus dans les programmes d’enseignement des premier
et second degrés. »
Article 16
La devise de la République doit être apposée sur la façade de tout établissement scolaire.
Article 17
Après l’article L. 131-8 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 131-8-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 131-8-1. – Les dispenses pour les cours d’éducation physique et sportive sont délivrées uniquement
par les médecins scolaires ou par les médecins agréés par l’éducation nationale. »
Article 18
Après l’article L. 212-2 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 212-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 212-2-1. – L’État prend en charge le financement de la construction des écoles élémentaires
publiques pour assurer le respect des conditions du premier alinéa de l’article L. 212-2. »
Article 19
L’article 89 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales est abrogé.
Article 20
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Les charges résultant de l’application de la présente loi sont compensées pour l’État par la création à due
concurrence d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Les charges résultant de l’application de la présente loi sont compensées pour les collectivités territoriales
par une majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement, pour l’État, par la création
d’une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs prévus par les articles 575 et 575 A du code général des
impôts.
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Sénat
ÕÕÕ
Séance du 18 juin 2008 (compte rendu intégral des débats)
Projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République
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Sénat
Séance du 18 juin 2008 (compte rendu intégral des débats)
Projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République
Première lecture
M. Gérard Delfau. Aux termes de l’article 1er de la Constitution, « La France est une République indivisible,
laïque, démocratique et sociale. » Après cette affirmation, est déclinée l’application de ces principes : « Elle
assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle
respecte toutes les croyances. »
Nous proposons, à la suite de cette dernière phrase, d’ajouter les mots : « Elle permet l’application du
principe fondamental – je pourrais faire l’économie de ce dernier terme – de laïcité reconnu par les lois de la
République. »
Pourquoi faisons-nous cette proposition d’enrichissement du texte ?
M. Patrice Gélard . Cela n’enrichit rien du tout !
M. Gérard Delfau. Il nous semble qu’il y a urgence à rappeler ce principe républicain, alors qu’un certain
nombre de déclarations, de manifestations ou de projets inquiètent des républicains, qu’ils soient de droite
ou de gauche, quant à l’effectivité de la séparation des églises et de l’État, fondement du principe de laïcité
depuis 1905.
J’ai ici une liste très longue, mais je me limiterai à l’essentiel, monsieur le président. Certaines déclarations,
intéressantes, d’ailleurs, par leur cheminement, du Président de la République à Ryad, à Rome, à Paris, en
fin et en début d’année, nous ont alertés : y aurait-il, ici ou là, la tentation de revenir sur la loi de 1905 ?
Mme Annie David. La laïcité dans les écoles, par exemple !
M. Gérard Delfau. La commission Machelon a été chargée par le ministre de l’intérieur en 2005, année du
centenaire de la loi de 1905, de réfléchir à une éventuelle révision de la loi de 1905. Ses conclusions sont
toujours dans les cartons et peuvent resurgir à tout moment.
Vous me direz sans doute que ces problèmes ne doivent pas être évoqués lors d’une révision de la
Constitution et vous me renverrez à la loi organique. Mais, justement, c’est pour prévenir tout risque en la
matière ! Un certain nombre de déclarations nous font craindre que des représentants des cultes> puissent,
à l’occasion d’une modification du Conseil économique et social, entrer dans cette institution républicaine. Il
y aurait alors rupture avec le principe de séparation des églises et de l’État !
Voilà pourquoi, madame la ministre, ayant lu la réponse que vous avez faite à l’Assemblée nationale à mes
collègues radicaux de gauche, je ne puis me contenter de ce que vous leur avez dit.
La première phrase de l’article 1er affirme le caractère laïc de la République. Je souhaite soit que nous
complétions cet article, soit, à tout le moins, que vous preniez <devant la Haute Assemblée un certain
nombre d’engagements, notamment sur la question très précise de l’entrée de représentants des cultes au
Conseil économique et social>.
le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je note, tout d’abord, que notre collègue parle de laïcité positive et
négative.
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M. Gérard Delfau. C’est pour le récuser ! Je n’ai pas prononcé ces mots !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Ils figurent dans l’objet de votre amendement ! Je ne connais que la
laïcité, qui est reconnue par les lois de la République.
Vous avez des questions à poser au garde des sceaux et il ne m’appartient pas d’y répondre. (M. Gérard
Delfau. s’exclame.) J’ai choisi d’être parlementaire, et j’en suis heureux !
La laïcité est déjà affirmée dans la première et dans l’avant-dernière phrase de l’article 1er ; la répétition est
inutile.
Par ailleurs, je vous rappelle qu’il n’est pas souhaitable de constitutionnaliser certaines lois, les champs
constitutionnel et législatif devant rester distincts. Cela risquerait d’introduire une totale confusion dans la
Constitution.
Je comprends parfaitement que vous ayez saisi cette occasion pour poser un certain nombre de questions
ou évoquer diverses déclarations. Mais, en ce qui nous concerne, il est parfaitement clair, et depuis
longtemps, au moins depuis 1958, et l’on pourrait remonter jusqu’à la loi de 1905, qu’il n’y a rien à changer
à tout cela. Pourquoi préciser les choses à partir du moment où elles sont parfaitement claires ?
Je vous rappelle aussi que le respect de ces principes fait l’objet d’un contrôle : le rôle du Conseil
constitutionnel est de veiller à la conformité des lois à ces principes, et l’application de celles-ci est sous le
contrôle des tribunaux, auxquels, me semble-t-il, on peut faire confiance.
M. Gérard Delfau. Justement !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Si vous ne faites pas confiance à l’autorité judiciaire, c’est un autre
problème ! On en reparlera plus tard, sans doute en fin de semaine !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Monsieur Delfau, comme vous le savez, la laïcité a fait son entrée
dans notre droit positif avec la Constitution de la IVe République. C’est la disposition selon laquelle la France
est une République indivisible, laïque et sociale.
La Constitution de 1958 reprend cette formule. Elle la met particulièrement en valeur, puisqu’elle lui réserve
le premier alinéa de son article 1er. Faut-il aller plus loin et ajouter, comme vous le suggérez, une phrase
indiquant qu’« elle permet l’application du principe fondamental de laïcité reconnu par les lois de la
République » ?
Soyez assuré que le Gouvernement partage totalement votre volonté d’assurer un ancrage constitutionnel
particulièrement fort au principe de laïcité. Il s’agit de l’un des piliers de notre République, et vous avez eu
raison, d’ailleurs, de rappeler les discours du Président de la République, qui, ainsi qu’il le répète souvent,
est très attaché à la laïcité.
La laïcité, c’est <le respect de l’exercice des cultes>, ce n’est pas <l’interdiction des cultes>.
La référence que vous proposez et qui vise à donner un socle constitutionnel à la loi du 9 décembre 2005
n’est pas nécessaire. Comme vient de le dire M. le rapporteur, le champ constitutionnel et celui de la loi
doivent être distincts.
L’amendement communiste introduisant la notion de laïcité dans notre texte constitutionnel a été voté à
l’unanimité en 1946.
Or ses auteurs ont été parfaitement limpides sur leurs intentions, puisqu’à leurs yeux, et je vous cite les
propos qui ont été tenus à l’époque, « Il était nécessaire que la laïcité de l’État, qui se traduit par la
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séparation des églises et de l’État et le principe que l’État ne reconnaît et ne protège <aucun culte ni aucune
religion, soit inscrite dans la Constitution>. Le silence sur ce point ne pourrait être compris que comme un
abandon d’une des conquêtes les plus importantes des Républicains. »
Voilà ce qui a motivé l’adoption à l’unanimité de cet amendement.
Il paraît difficile d’être plus clair sur les liens intimes qui existent entre notre principe républicain de laïcité et
la loi de 1905 sur la séparation des églises et de l’État. Je crains même que la précision que vous proposez
ne contribue à alimenter l’idée que ce lien entre le principe de laïcité et la loi de 1905 n’irait pas
nécessairement de soi.
Retenir votre amendement, ce serait, d’une certaine façon, se sentir obligé d’inscrire dans la Constitution un
principe fondamental reconnu pratiquement par toutes les lois de la République. Or le Conseil constitutionnel
n’évoque, en principe, cette notion qu’en cas de silence d’un texte constitutionnel. Je crois que tel n’est pas
l’objectif que vous visez, compte tenu de la manière dont vous avez exposé votre amendement.
J’ajoute que la jurisprudence du Conseil constitutionnel n’est pas en retrait, puisque, dans sa décision du 19
novembre 2004, le Conseil constitutionnel n’a pas hésité à conférer une portée particulièrement forte aux
dispositions de l’article 1er de notre Constitution.
De même, à l’article 3 sur l’égalité des citoyens devant la loi, il a insisté sur le fait que la laïcité interdisait le
communautarisme, défini comme la reconnaissance de droits collectifs à des groupes religieux.
Au-delà de ces considérations juridiques, je voudrais également répondre à une préoccupation que traduit
l’objet de votre amendement : vous évoquez la nécessité de donner une définition précise et intangible de la
notion de laïcité, qui ne doit pas être à géométrie variable.
Je partage avec vous l’idée que la laïcité ne doit pas être instrumentalisée de façon partisane. Elle fait partie
de notre héritage républicain commun. Nous serons donc attentifs à sa défense, dans toutes ses dimensions.
Afin de dissiper toute ambigüité et être parfaitement claire sur le sujet, je tiens à redire solennellement dans
cet hémicycle l’attachement du Gouvernement aux principes qui fondent la loi de 1905. Le Président de la
République a réaffirmé qu’ils conservaient toute leur actualité.
Sous le bénéfice de ces considérations, je vous demande, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer votre
amendement. À défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
S’agissant de la représentation des courants spirituels au sein du Conseil économique et social, il est indiqué,
dans l’exposé des motifs du projet de loi : « Ces mesures préfigurent une vaste réforme de la composition
du Conseil – nous en reparlerons quand viendra le débat sur la composition du CES – qui devra faire
davantage de place - ainsi que le président de la République l’a dit lui-même – aux organisations non
gouvernementales, aux jeunes, notamment aux étudiants, et le cas échéant aux grands courants spirituels.
»
Je vous renvoie donc à la réponse contenue dans l’exposé des motifs du projet de loi, et aux déclarations
constantes du Président de la République pour qui le Conseil économique et social représente les forces
vives de la nation, dont font partie les courants spirituels.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. On peut évidemment discuter indéfiniment sur la question de savoir s’il faut compléter
ou non l’article 1er de la Constitution. C’est la question que soulève l’amendement n° 381 rectifié, qui vient
d’être présenté par M. Delfau.
Je voudrais simplement dire, madame le garde des sceaux, que répéter sans cesse la même chose n’est pas
inutile tant les menaces les plus sournoises pèsent constamment sur la laïcité, et tant les pouvoirs publics
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ont quelquefois tendance à « mollir », alors qu’il faudrait être ferme, pour des raisons diverses et variées,
manifestations de banlieues, manifestations ici ou là, pressions diverses, etc.
Je ne parle pas simplement des incertitudes qui entourent <les problèmes de construction sur fonds publics
de lieux de culte, où, là, les textes> sont plus ou moins <soumis à des appréciations variables, ou des
subventions à certains cultes>, qui ne vont pas toutes devant le tribunal administratif.
J’ajouterai que, par rapport à la loi de 1905, le problème posé aujourd’hui n’est pas seulement celui du
<culte catholique> ; je dirai même que ce n’est plus vraiment celui du <culte catholique>, car il s’agit <en
fait d’autres cultes>.
Madame le garde des sceaux, dans votre réponse, et je vous en remercie et vous en félicite, vous avez, à
deux reprises, donné le titre exact de la loi de 1905 : « Séparation des églises et de l’État ».
Il serait utile que le Premier ministre adresse une circulaire à l’ensemble des services publics et des
fonctionnaires placés sous son autorité ainsi qu’aux membres du Gouvernement, afin que soit reprise
l’habitude de parler de la séparation « des églises et de l’État ». Il importe <de ne pas donner le sentiment à
nos interlocuteurs, à de nombreuses reprises, qu’un seul culte> est <visé, le culte catholique>. En effet, la
loi de 1905 ne visait pas que <le culte catholique>, elle visait <aussi l’ensemble des cultes>, puisqu’elle
prenait la suite, pour l’abroger, du concordat de Napoléon Ier, mais c’est une autre histoire !
Donc, outre que j’ai été heureux de relever cette précision dans vos propos, je souhaite que l’expression se
généralise beaucoup plus. Je suis toujours choqué quand j’entends un ministre, un préfet, une autorité de la
République, évoquer la séparation de l’église et de l’État, quand il s’agit des églises, et celle à laquelle on
pense quand on parle de la séparation de l’église et de l’État n’est pas celle qui, aujourd’hui, même si elle n’a
renoncé à rien, menace le plus la République dans certaines circonstances.
M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari.
Mme Bariza Khiari. Cet amendement, il y a un an, n’aurait pas attiré spécialement mon attention. Mais,
depuis une année, nous avons relevé un faisceau d’indices, tels que le discours de Riyad ou les propos tenus
lors du discours de Latran quant à la supériorité du curé sur l’instituteur pour la transmission des valeurs, qui
sont préoccupants pour la laïcité
Le toilettage envisagé de la loi de séparation des églises et de l’État nous préoccupe et nous amène à penser
qu’il y aurait un projet de civilisation en marge de notre projet républicain.
C’est la raison pour laquelle je voterai l’amendement n° 381 rectifié.
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau.
M. Gérard Delfau. J’aurais pu, madame le garde des sceaux, retirer cet amendement, qui serait ainsi devenu
un amendement d’appel, mais je ne le ferai pas pour deux raisons.
D’abord, M. le président-rapporteur de la commission des lois, ayant sans doute écouté un peu distraitement
mes propos,…
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Pas du tout !
M. Gérard Delfau. … m’a prêté une conception de la laïcité qui est rigoureusement celle que je récuse,
puisque je ne parle, à ma modeste place, contrairement au Président de la République, que de « principe de
laïcité », et surtout pas de « laïcité positive » !
Par ailleurs, vous venez de confirmer, madame le garde des sceaux, qu’au sommet de l’État, aujourd’hui, est
<prônée l’idée, combattue par nombre de républicains, dont M. Dechartre, d’ouvrir le Conseil économique et
social aux forces représentant les cultes et les églises ès qualités>. Si tel était le cas, la réaction serait vive
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et large dans l’opinion publique, car cela signifierait que l’on a commencé à revenir sur la loi de 1905 ! (M.
Guy Fischer applaudit.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 381 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 162, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les
membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le troisième alinéa de l'article 3 de la Constitution, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le mode de scrutin proportionnel assure une juste représentation du peuple. »
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous proposons, par cet amendement, d’inscrire dans la Constitution le
principe même du mode de scrutin proportionnel pour la mise en œuvre du suffrage universel. Nous
suggérons d’indiquer que c’est ce mode de scrutin qui permet une juste représentation du peuple.
Bien entendu, la disposition présentée ne préjuge pas des modalités d’application aux différentes élections
se déroulant dans notre pays.
Chacun connaît ici les atouts de la proportionnelle en matière démocratique, même s’il ne veut pas les
entendre : la proportionnelle, c’est la garantie du pluralisme, c’est la garantie de la parité entre les femmes
et les hommes, c’est la garantie du renouvellement des générations et d’un recul de la notabilisation et du
clientélisme, c’est, enfin, la garantie d’une juste photographie de l’état politique du pays, d’une collectivité
territoriale à un moment donné de son histoire.
Cette question de l’instauration de la proportionnelle est donc centrale.
Comment envisager de moderniser les institutions - c’est l’objectif affiché de ce projet de loi - sans chercher
à améliorer la représentativité des assemblées - je pense en particulier au Parlement -, alors que tous les
observateurs notent le décalage entre leur composition et la réalité politique et sociologique du pays ?
Cette évidence de la proportionnelle n’a échappé à personne, puisque le Président de la République luimême avait avancé l’idée d’une mise en œuvre de celle-ci, certes très minimaliste.
À plusieurs reprises, lors de la campagne de l’élection présidentielle, au lendemain de celle-ci, à l’occasion de
son discours d’Épinal, ou encore dans les différentes lettres de mission adressées à MM. Balladur et Fillon
pour l’élaboration de la présente révision, le candidat Nicolas Sarkozy d’abord, puis le Président de la
République, a demandé l’instauration d’une dose de proportionnelle.
Dans sa lettre du 12 novembre au Premier ministre, il lui demandait de réfléchir à l’application de la
proportionnelle soit au Sénat, soit à l’Assemblée nationale. D’ailleurs, des voix se sont élevées au sein de
l’UMP, par exemple celle de M. Devedjian, pour préconiser la modification des modes de scrutin en ce sens.
Améliorer la représentativité du Parlement relève vraiment de l’urgence. Le débat auquel a donné lieu
l’examen de la proposition de loi du groupe socialiste relative aux conditions de l’élection des sénateurs, les
discussions au sein de la commission des lois et celles que nous avons en permanence dans cet hémicycle,
démontrent tous les jours la nécessité de revoir nos modes de scrutin : dire que la proportionnelle est le
meilleur moyen de représenter le peuple est une bonne façon de le faire ! (M. Jean Desessard applaudit.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
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M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. On a indiqué à plusieurs reprises, ces dernières semaines, que les
modes de scrutin ne relevaient pas de la Constitution. Je vous le confirme.
Par conséquent, j’émets un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Les modes de scrutin ne relèvent pas de la Constitution ; nous en
avons longuement débattu à l’Assemblée nationale et lors de mon audition par la commission des lois du
Sénat. La Constitution fixe les grands principes : elle prévoit, notamment, que le suffrage est toujours
universel, égal et secret, le reste relevant de la loi organique et des lois électorales.
Au-delà, il n’y a aucune raison de considérer que le scrutin proportionnel doit être la règle. Le scrutin
uninominal a aussi ses avantages : il permet de voter pour une personne et non pour une étiquette
politique, il assure une proximité plus grande entre l’élu et ses électeurs, ainsi qu’une meilleure
représentation des territoires.
M. Patrice Gélard. Absolument !
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Les Verts vont voter l’amendement présenté par le groupe CRC, car ils estiment que la
représentation proportionnelle permet de représenter la diversité des opinions. (Exclamations sur les travées
de l’UMP.) Mes chers collègues, les écologistes sont obligés d’engager des négociations à n’en plus finir avec
les grands partis pour être représentés ! C’est parfois très difficile, en particulier pour les prochaines
élections ! (Sourires.)
Aujourd’hui, nous ne sommes plus dans un contexte de bipolarisation ! La pluralité d’opinions et d’analyses
dans notre société est une réalité, et la sensibilité écologiste qui émerge doit être représentée aussi bien à
l’Assemblée nationale qu’au Sénat.
Par ailleurs, on nous dit qu’une assemblée élue à la proportionnelle n’est pas gérable. Enfin, soyons sérieux !
En Allemagne, les députés sont élus à la proportionnelle, et je ne vois pas en quoi le système allemand
serait plus critiquable que le système français.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. La moitié seulement !
M. Jean Desessard. La moitié des députés sont élus sur des listes, mais le résultat final respecte la
représentation proportionnelle intégrale.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Non !
M. Jean Desessard. En France, les instances régionales et municipales sont élues en partie à la
proportionnelle : je n’ai jamais entendu de critiques sur le fonctionnement de ces assemblées ! On peut dire
que tel président ne fait pas grand-chose (Exclamations sur les travées de l’UMP.), …
M. Henri de Raincourt. Des noms !
M. Jean Desessard. … ou encore que tel groupe politique n’est pas assez actif, certes ! (Nouvelles
exclamations sur les mêmes travées.) Mais personne ne critique le fonctionnement ou le mode d’élection à la
proportionnelle de ces assemblées.
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Enfin, je suis tout à fait d’accord avec l’explication donnée par le groupe CRC, selon laquelle la
représentation proportionnelle permet la représentation de la diversité de la société.
Je vous citerai un exemple ! J’ai étudié la représentation des femmes dans notre assemblée : celle-ci compte
17,6 % de femmes ; mais lorsque les départements votent à la proportionnelle, les femmes représentent 24
% des élus ; et lorsque le mode de scrutin est uninominal, la proportion de femmes élues est seulement de
3%!
La proportionnelle permet la représentation des femmes, elle permet la représentation des minorités, …
M. Henri de Raincourt. Les femmes ne sont pas une minorité !
M. Jean Desessard. …ce qui n’est pas le cas du mode de scrutin uninominal, système standard qui favorise
l’homme blanc de 55 ans appartenant aux classes moyennes.
La représentation générale de la société est donc assurée par la représentation proportionnelle !
M. le président. La parole est à M. Hugues Portelli.
M. Hugues Portelli. Nos collègues communistes sont constants dans leur position, car ils ont toujours
défendu la représentation proportionnelle lorsqu’ils étaient dans l’opposition.
Je tiens cependant à rappeler que, dans tous les pays où ils sont parvenus au pouvoir, l’une des premières
mesures qu’ils ont prises a été de supprimer immédiatement la proportionnelle ! (Rires et applaudissements
sur les travées de l’UMP. –Protestations sur les travées du groupe CRC.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Où ça ?
M. Dominique Braye. Ils ne sont pas près de prendre le pouvoir chez nous, avec 1,9 % des voix ! (Nouvelles
protestations sur les travées du groupe CRC.)
Mme Annie David. Qu’est-ce que cela signifie ?
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je ne suis pas sûre d’avoir saisi la remarque de M. Portelli, mais si j’ai bien
compris son allusion, je doute qu’il apprécierait que je lui demande ce que font ses amis dans tel ou tel pays
!
M. Dominique Braye. Mais si, demandez-le !
M. Josselin de Rohan. Dans quel pays ?
M. le président. Je vous en prie, mes chers collègues !
Je mets aux voix l'amendement n° 162.
(L'amendement n'est pas adopté.)
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Conseil de la concurrence
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Conseil de la concurrence
Décision n° 08-D-09 du 6 mai 2008 relative à des pratiques mises en oeuvre dans le
secteur des pompes funèbres à Lyon et dans son agglomération
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Décision n° 08-D-09 du 6 mai 2008 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des
pompes funèbres à Lyon et dans son agglomération
Le Conseil de la concurrence (section IV),
Vu la lettre du 26 juillet 2002, enregistrée sous le numéro 02/0069 F, par laquelle la SARL Pompes funèbres
Viollet a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en œuvre dans le secteur des pompes
funèbres à Lyon et dans son agglomération ;
Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence ;
Vu les observations présentées par la ville de Lyon pour la régie municipale des pompes funèbres, la société
OGF, le centre hospitalier Saint-Joseph Saint-Luc, la clinique mutualiste Eugène André, la clinique de la
Sauvegarde, la polyclinique Pasteur, la clinique du Grand Large, la clinique La Roseraie, la polyclinique des
Minguettes, le centre hospitalier Le Vinatier, ainsi que par le commissaire du Gouvernement ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Le rapporteur, le rapporteur général adjoint, le commissaire du Gouvernement, les sociétés Viollet et OGF, la
ville de Lyon, le Syndicat intercommunal des pompes funèbres de l’agglomération lyonnaise, le centre
hospitalier Saint-Joseph Saint-Luc, la clinique de la Sauvegarde, la polyclinique Pasteur, entendus lors de la
séance du 19 février 2008, la clinique mutualiste DE Lyon – Clinique Eugène André, la clinique du Grand
Large, la clinique La Roseraie, la polyclinique des Minguettes et le centre hospitalier Le Vinatier ayant été
régulièrement convoqués ;
Adopte la décision suivante :
I. Constatations
A. LA PROCÉDURE
1. Dans sa saisine, la société Viollet estime que la société OGF et la régie municipale des pompes funèbres
de Lyon ont mis en œuvre des pratiques susceptibles de fausser le jeu de la concurrence dans le secteur des
pompes funèbres à Lyon et dans son agglomération.
2. Elle soupçonne en particulier la mairie de Lyon, gestionnaire du centre funéraire municipal, et la société
OGF de se partager le marché des pompes funèbres de la communauté urbaine. Selon elle, OGF ne vient
pas attaquer la position dominante de la régie municipale à Lyon intra muros. En contrepartie, cette
entreprise aurait bénéficié de facilités administratives pour implanter des chambres funéraires dans toute
l’agglomération et aurait, par l’intermédiaire de sa filiale de transport la CGPF, reçu de la ville l’exclusivité du
transport des corps avant mise en bière en provenance des hôpitaux situés à Lyon et dans la proche
banlieue. Elle estime enfin que tant la régie municipale que la société OGF ont mis en place des conditions
de transport et d’accueil des défunts dans leurs chambres funéraires qui captent la demande des familles
pour l’organisation des obsèques.
3. Le 5 juin 2003, une demande d'enquête dont les orientations ont été définies par le rapporteur a été
envoyée au directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Le
rapport d'enquête de la direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression
des fraudes du Rhône a été adressé au Conseil le 27 février 2004.
4. Au vu des éléments recueillis, une notification de griefs a été envoyée le 5 avril 2007 à la régie municipale
des pompes funèbres de la ville de Lyon, à la société OGF ainsi qu’au centre hospitalier Saint-Joseph SaintLuc, à la clinique mutualiste Eugène André, à la clinique de la Sauvegarde, à la polyclinique Pasteur, à la
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clinique de Grand Large, à la clinique La Roseraie, à la polyclinique des Minguettes et au centre hospitalier
Le Vinatier.
5. Dans son mémoire adressé le 15 novembre 2007 en réponse au rapport communiqué à toutes les parties
le 17 septembre 2007, la société Viollet a produit des témoignages de familles attestant que les
établissements de santé concernés par la présente procédure ont procédé sans leur autorisation au transfert
des corps de leurs proches décédés dans la chambre funéraire de la régie municipale ou d’OGF. Ces
témoignages portent sur trois décès en 2001 à la clinique mutualiste Eugène André, un décès en 2004 au
centre hospitalier Saint Joseph Saint Luc, deux décès en 2001 et 2004 à l’hôpital Le Vinatier, un décès en
2004 à la clinique du Grand Large. Elle a cité le cas de la fille d’une personne décédée dans ce dernier
établissement en septembre 2007 à laquelle le personnel soignant n’a pas été en mesure de donner les
coordonnées d’une société de pompes funèbres autre que OGF. Elle a présenté également des
photographies prises en décembre 2005 par un huissier de justice montrant, selon elle, un agencement
extérieur des locaux des chambres funéraires de Lyon, Saint Priest et Vénissieux destiné à capter le choix
des familles pour l’organisation des obsèques. Enfin, elle a reproché à la ville de Lyon d’avoir organisé le
transport systématique à la chambre funéraire de la régie municipale des personnes décédées sur la voie
publique ou pour une cause inconnue et qui font l’objet d’une autopsie à l’Institut médico-légal.
B. LE SECTEUR ET LES ENTREPRISES EN CAUSE
1. LE SERVICE DES POMPES FUNÈBRES
6. Le service des pompes funèbres comprend le service intérieur, le service extérieur et les services des
prestations libres.
7. Le service intérieur est rendu à l’intérieur des édifices religieux et relève du service des cultes.
8. Le service extérieur des pompes funèbres était une mission de service public qui, en application de la loi
du 28 décembre 1904, relevait de la compétence exclusive des communes. L’article L. 362-6 du code des
communes dressait la liste limitative des prestations comprises dans la mission : le transport des corps après
la mise en bière, la fourniture des corbillards, des cercueils, des tentures extérieures des maisons
mortuaires, les voitures de deuil ainsi que les fournitures et le personnel nécessaires aux inhumations,
exhumations et crémations. Depuis la loi n° 93-23 du 8 janvier 1993, le service extérieur des pompes
funèbres constitue un service public industriel et commercial. Il comporte diverses prestations limitativement
énumérées à l’article L. 2223-19 du code général des collectivités territoriales (CGCT). Relèvent ainsi du
service extérieur : « le transport des corps avant et après la mise en bière ; l’organisation des obsèques, les
soins de conservation ; la fourniture des housses, des cercueils et de leurs accessoires intérieurs et
extérieurs ainsi que des urnes cinéraires ; la fourniture des tentures extérieures des maisons mortuaires
(disposition abrogée par l’ordonnance n° 2005-855 du 28 juillet 2005) ; la gestion et l’utilisation des
chambres funéraires ; la fourniture des corbillards et des voitures de deuil ; la fourniture de personnel et des
objets et prestations nécessaires aux obsèques, inhumations, exhumations et crémations, à l’exception des
plaques funéraires, emblèmes religieux, fleurs, travaux divers d’imprimerie et de la marbrerie funéraire. » La
loi n° 93-23 du 8 janvier 1993 a par ailleurs mis fin au monopole conféré aux communes dans le domaine
funéraire. Désormais, le service extérieur des pompes funèbres peut être assuré non seulement par les
communes ou leurs délégataires mais aussi par toute entreprise ou association bénéficiaire d’une habilitation
délivrée par le représentant de l’État dans le département en application des dispositions de l’article L. 222323 du CGCT.
9. Les prestations libres dépendent de la seule initiative des familles des défunts. Elles correspondent, par
exemple, à la mise en bière, à la fourniture de fleurs, aux travaux de marbrerie ou encore à l’entretien des
tombes.
2. LE RÉGIME JURIDIQUE DES CHAMBRES FUNÉRAIRES
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a) La création des chambres funéraires
10. Les chambres funéraires sont des locaux composés en général de casiers réfrigérés de dépôt, de salles
de soins aux corps et de salons accessibles aux proches des défunts pour se recueillir. Elles ont commencé à
se développer en France à partir des années 60 et ont été régies dans un premier temps par un décret du 2
janvier 1968 qui disposait que toute personne décédée hors de son domicile pouvait être transportée à la
chambre funéraire la plus proche, à la demande de celui chez qui le décès a eu lieu.
11. L’article L. 2223-38 dispose aujourd’hui que « les chambres funéraires ont pour objet de recevoir, avant
l’inhumation ou la crémation, le corps des personnes décédées ». La loi n° 93-23 du 8 janvier 1993 a inclus
la gestion et l’utilisation des chambres funéraires dans le service extérieur des pompes funèbres (article L.
2223-19 CGCT). Elles peuvent donc être gérées aussi bien par une collectivité publique que par une entité
de droit privé dûment habilitée.
12. Selon l’article R. 2223-74 du CGCT, « la création ou l’extension d’une chambre funéraire est autorisée
par le préfet (…). L’autorisation ne peut être refusée qu’en cas d’atteinte à l’ordre public ou de danger pour
la salubrité publique ».
13. La chambre funéraire doit répondre à un certain nombre de prescriptions techniques fixées aux articles
R. 2223-80 et suivants du CGCT.
14. Les chambres funéraires se distinguent des chambres mortuaires. Ces dernières sont des équipements
hospitaliers permettant le dépôt et le séjour du corps d’une personne décédée dans l’établissement. Elles ne
font pas partie du service extérieur des pompes funèbres. Les établissements de santé publics ou privés qui
enregistrent au moins 200 décès par an doivent disposer d’une chambre mortuaire (articles L. 2223-39 et R.
2223-90 CGCT).
b) Le transport des défunts dans les chambres funéraires
15. Aux termes de l’article R. 2223-76 du CGCT, « l’admission en chambre funéraire intervient dans un délai
de 24 heures à compter du décès. Le délai est porté à 48 heures lorsque le corps a subi les soins de
conservation prévus à l’article R. 2213-2. Elle a lieu sur demande écrite : - soit de toute personne qui a
qualité pour pourvoir aux funérailles et justifie de son état civil et de son domicile ; - soit de la personne
chez qui le décès a eu lieu, à condition qu’elle atteste par écrit qu’il lui a été impossible de joindre ou de
trouver l’une des personnes ayant qualité pour pourvoir aux funérailles ; - soit du directeur de
l’établissement, dans le cas de décès dans un établissement de santé public ou privé qui n’entre pas dans la
catégorie de ceux devant disposer obligatoirement d’une chambre mortuaire conformément à l’article L.
2223-39, sous la condition qu’il atteste par écrit qu’il lui a été impossible de joindre ou de retrouver dans un
délai de 10 heures à compter du décès l’une des personnes ayant qualité pour pourvoir aux funérailles ».
16. L’article R. 2223-79 du CGCT indique que « lorsque le transfert à une chambre funéraire du corps d’une
personne décédée dans un établissement de santé public ou privé, qui n’entre pas dans la catégorie de ceux
devant disposer obligatoirement d’une chambre mortuaire conformément à l’article L. 2223-39, a été opéré à
la demande du directeur de l’établissement, les frais résultant du transport à la chambre funéraire sont à la
charge de l’établissement ainsi que les frais de séjour durant les trois premiers jours suivant l’admission ».
17. Enfin, l’article L. 2223-43 du même code précise que : « Les établissements publics et privés qui
assurent le transport de corps avant mise en bière et le transfert de corps vers une chambre funéraire
doivent être titulaires de l’habilitation prévue à l’article L. 2223-23. »
18. Le Conseil d’État, dans un avis n° 357 297 du 24 mars 1995, a estimé que l’article L. 363-2 du code des
communes qui autorise les établissements de santé publics ou privés à assurer le transport des corps avant
mise en bière dans une chambre funéraire, devait être interprété strictement, c’est-à-dire comme permettant
seulement à ces établissements d’assurer un tel transport mais non de conclure des conventions pour les
faire effectuer par des opérateurs funéraires. Il a ajouté qu’une telle convention était possible dans le seul
cas où le directeur de l’établissement n’a pas pu joindre la famille dans un délai de 10 heures après le décès
: « Toutefois une telle convention, passée avec un ou plusieurs opérateurs, est possible pour assurer le
transport du corps dans les cas, et seulement dans les cas, où l’admission en chambre funéraire est
demandée par le directeur d’un établissement dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article R.
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361-37 du code des communes ».
c) La gestion des chambres funéraires
19. Un opérateur de pompes funèbres possédant une chambre funéraire détient par rapport aux autres
opérateurs un atout concurrentiel qui résulte notamment de la proximité immédiate de la chambre funéraire
de ses locaux commerciaux. Il est en effet le premier à rencontrer les familles des défunts et ainsi à pouvoir
leur proposer ses services pour l’organisation des obsèques.
20. Pour éviter que la concurrence ne soit faussée par la détention de cette structure, la loi n° 93-23 du 8
janvier 1993 a mis à la charge du gestionnaire de la chambre funéraire une série d’obligations. L’article L.
2223-38 du CGCT prévoit ainsi que les chambres funéraires doivent se situer dans des locaux distincts de
ceux où le gestionnaire offre éventuellement les autres prestations énumérées par l’article L. 2223-19 du
CGCT. Dans le même sens, l’article R. 2223-71 du CGCT indique que « la liste des régies, entreprises et
associations et de leurs établissements, doit être affichée dans les locaux d’accueil des chambres funéraires,
des chambres mortuaires et des crématorium et y être disponible. Elle est établie par le préfet du
département où sont situées ces installations (…). Elle est mise à jour chaque année ». Le législateur a
clairement affiché sa volonté que les personnes devant pourvoir aux obsèques puissent librement choisir
l’opérateur chargé d’effectuer les prestations autres que le séjour en chambre funéraire.
3. LE SECTEUR DES POMPES À LYON ET DANS LA « COURLY » (COMMUNAUTÉ URBAINE
DE LYON)
a) Les opérateurs sur le marché
21. La liste préfectorale des établissements agréés à la date du 22 août 2003 pour l’organisation des
funérailles figurant ci-après concerne l’arrondissement de Lyon, soit la ville de Lyon et la moitié sud du
département du Rhône.
Nom des établissements organisant des funérailles
22. Le secteur comporte dix chambres funéraires : une à Lyon et une à Villeurbanne gérées à l’époque des faits
par des régies municipales, six appartenant à OGF situées à Caluire-et-Cuire, Ecully, Neuville-sur-Saône,
Saint-Genis Laval, Vénissieux et Saint-Priest et deux gérées par la SAUR à Bron et à Rilleux-la-Pape.
La régie municipale des pompes funèbres de Lyon
23. Les pompes funèbres municipales de Lyon comptent deux établissements, dont le principal est situé
ème
dans le 8
arrondissement de Lyon.
24. La régie gère la seule chambre funéraire de Lyon située 177, avenue Berthelot.
25. Le chiffre d’affaires de la régie a progressé entre 2000 et 2002 : de 5,7 millions d’euros en 2000 et 2001
à 6,6 millions d’euros en 2002.
26. Par délibérations du conseil municipal des 27 octobre et 15 novembre 2005, la ville de Lyon a décidé
d’adhérer avec la ville de Villeurbanne à un syndicat intercommunal créé aux fins de gérer leurs services
funéraires. Dénommé Pompes funèbres intercommunales de l’agglomération lyonnaise (PFIAL), ce syndicat,
er
qui a son siège dans les locaux de l’ancienne régie de la ville de Lyon, a débuté son activité le 1 janvier
2006 et assure la continuité économique et fonctionnelle de cette dernière au nom de laquelle il a produit un
mémoire en réponse au rapport.
La SA OGF
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27. Après avoir appartenu à la Lyonnaise des eaux, les sociétés du groupe OGF sont passées en 1995 sous
le contrôle de la SCI (Services Corporation International), leader mondial des services funéraires. En 1998,
toutes les sociétés régionales du groupe ont fusionné pour constituer la SA OGF. Un accord a été conclu en
2004 par le fonds d’investissement américain Vestar capital partners pour l’acquisition du capital d’OGF.
28. La SA OGF exploite son activité de pompes funèbres sous la dénomination commerciale de Pompes
Funèbres Générales ou PFG. Dans la suite de la présente décision, pour la clarté de l’exposé, il sera fait
référence à « OGF-PFG »
29. Le groupe OGF-PFG exploite les marques nationales PFG (533 agences), Roblot (48 agences), Henri de
Borniol, Funespace et plus de 180 enseignes régionales. Il gère sur le territoire national 340 chambres
funéraires. En 2002, il a réalisé près de 135 000 obsèques et un chiffre d’affaires supérieur à 500 millions
d’euros. Au regard du nombre total de décès (500 000), la part de marché du groupe au niveau national
avoisine les 25 %.
30. Sur le territoire de La Courly, OGF-PFG compte 17 établissements et deux chambres funéraires : l’une
située à Saint-Priest, l’autre à Vénissieux. Elle détient également des clefs de la chambre funéraire de Lyon,
dont elle disposait d’abord par l’intermédiaire de sa filiale CGPF qui assurait le transport de défunts jusqu’au
site, puis directement lorsqu’elle a repris les activités de sa filiale. Dans cette zone, son chiffre d’affaires a
progressé de 8,8 millions d’euros en 2000 à 10,8 millions d’euros en 2002.
Les autres opérateurs
31. Parmi les autres opérateurs présents dans la Courly, on compte :
- la SA pompes funèbres Roc’Eclerc, entreprise franchisée de Michel Leclerc. Elle est implantée à Bron,
Pierre-Bénite et Lyon depuis février 2003. Son chiffre d’affaires a progressé entre 2000 et 2002, passant de
2,5 millions d’euros en 2000 à 2,6 millions d’euros en 2001 et 2,9 millions d’euros en 2002.
- Les pompes funèbres Rozier qui disposent de deux établissements situés, l’un à proximité de l’hôpital
Édouard Herriot, l’autre en face du bâtiment des pompes funèbres municipales. Le chiffre d’affaires, après
avoir baissé de 9 % en 2002 (passant de 1,55 à 1,41 millions d’euros) est remonté à 1,52 millions d’euros
en 2003.
- Les pompes funèbres Pinault qui exploitent deux bureaux commerciaux, l’un dans le Rhône à Rillieux-laPape, l’autre à Miribel dans l’Ain, commune limitrophe. Le chiffre d’affaires de ses deux bureaux est en
progression régulière depuis 2000.
- Les pompes funèbres Viollet qui ont deux établissements, l’un à Meyzieu, l’autre à Saint-Priest. Le chiffre
d’affaires global est en légère baisse entre 2000 et 2002, passant de 502 630 euros pour 15 mois (octobre
2000 à décembre 2001) à 473 915 euros pour 2002.
- Les pompes funèbres du Rhône qui sont situées au centre ville de Villeurbanne. Leur chiffre d’affaires de
2001 et 2002 a baissé par rapport à celui de 2000 (0,85 contre 0,92 million d’euros).
b) Le nombre de décès enregistrés dans les communes de Lyon, Vénissieux et Saint-Priest
Décès enregistrés à Lyon
32. Le tableau suivant recense les décès survenus sur la commune de Lyon et enregistrés à l’état civil :
Décès enregistrés à Vénissieux
33. Le tableau suivant recense les décès enregistrées à Vénissieux :
Les décès au domicile comprennent les décès survenus dans les maisons de retraite si le défunt y résidait
depuis plus de trois mois. Le registre des entrées de la chambre funéraire de Vénissieux permet de localiser
les lieux de décès des défunts en établissement de soins ou de séjour :
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Décès enregistrés à Saint Priest
34. Le tableau suivant recense les décès enregistrés à Saint-Priest :
Le registre des entrées de la chambre funéraire de Saint-Priest indique que les origines des décès sont
partagées entre les domiciles et le principal établissement de soins, à savoir la polyclinique Pasteur.
Part des personnes décédées à Vénissieux et Saint-Priest transportées dans les
chambres funéraires des deux villes
c) Part de marché des principaux opérateurs
Parts de marché concernant l’organisation des obsèques sur la Courly
35. A partir des informations recueillies par les enquêteurs auprès des opérateurs de pompes funèbres (cote
120), il a été possible de dresser le tableau suivant qui indique la part des principaux opérateurs dans
l’organisation des obsèques des personnes décédées sur l’ensemble de la Courly :
Parts de marché concernant l’organisation des obsèques à Lyon
36. Pour les personnes décédées à Lyon, la part des principaux opérateurs dans l’organisation des obsèques
calculée en pourcentage des décès, a évolué selon les chiffres présentés dans le tableau suivant :
Part d’OGF-PFG dans le transport des corps des personnes décédées dans les hôpitaux
de la Courly
37. Le tableau suivant montre que la CGPF, filiale du groupe OGF-PFG, réalise entre 63 et 100 % selon les
cas des enlèvements des corps des personnes décédées dans les établissements de santé de Lyon et de son
agglomération et qui sont transportées au funérarium municipal ou dans les chambres funéraires d’OGFPFG.
Parts de marché concernant l’organisation des obsèques des personnes transportées au
funérarium de la ville de Lyon
38. Le tableau suivant présente le nombre d’obsèques réalisées par la régie municipale et par les principales
entreprises pour les défunts qui ont séjourné au funérarium et dont les obsèques ont été organisées à partir
de ce même lieu :
La part de la régie municipale est de l’ordre de 70 % et celle d’OGF-PFG de l’ordre de 15 %.
Part de marché d’OGF-PFG dans l’organisation des obsèques des habitants de Vénissieux
et de Saint-Priest
39. OGF-PFG est le seul opérateur de pompes funèbres installé à Vénissieux. Le tableau suivant montre que
l’entreprise détient une part dominante dans l’organisation des obsèques des personnes dont le décès y est
enregistré.
40. Deux opérateurs de pompes funèbres sont implantés à Saint-Priest : OGF-PFG et Viollet.
Part de marché d’OGF-PFG dans l’organisation des obsèques des personnes transportées
dans les chambres funéraires de Vénissieux et Saint-Priest
41. Le tableau suivant présente le pourcentage des convois pris en charge par le groupe OGF-PFG pour les
défunts qui ont été transportées au funérarium de Vénissieux (cote 159).
42. Le dépouillement du registre des entrées au funérarium de Saint-Priest (cotes 1224-1282) ne permet pas
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de chiffrer la part des entreprises dans les convois des personnes qui y ont été déposées. Toutefois, l’agence
OGF-PFG de Saint-Priest organise sur cette période 139 convois funéraires en moyenne pour un nombre
d’admissions à la chambre funéraire de 42,5 % en moyenne.
C. LES PRATIQUES EXAMINÉES
43. Trois séries de faits ont été analysés :
- la mise en œuvre d’accords entre, d’une part, la régie municipale des pompes funèbres de Lyon ou
OGF-PFG et, d’autre part, certains établissements de santé pour organiser le transfert de personnes
décédées en leur sein vers les chambres funéraires gérées par ces entreprises ;
- des pratiques susceptibles d’engendrer la confusion entre l’activité de gestionnaire de chambre
funéraire et l’activité d’opérateur d’obsèques à Lyon, Vénissieux et Saint-Priest ;
- enfin, l’existence d’un partage général du marché des obsèques à Lyon et dans l’agglomération
entre la régie municipale des pompes funèbres de Lyon et OGF-PFG.
1. LES CONDITIONS DE TRANSFERT DES DÉFUNTS DANS LES CHAMBRES FUNÉRAIRES
44. Sont concernés les établissements ne disposant pas de chambre mortuaire dans leurs locaux.
a) Transfert en chambre funéraire des corps des personnes décédées dans les
établissements de santé de la ville de Lyon
45. Les documents recueillis auprès des établissements de santé comprennent d’une part des conventions
signées avec des sociétés de pompes funèbres et des règlements d’admission pour le transfert des corps au
funérarium, d’autre part des notices remises aux familles des défunts ou à destination des services
hospitaliers pour expliquer la procédure à suivre, notamment en vue du transfert des corps organisé en
application de ces conventions.
Le centre hospitalier Saint-Joseph Saint-Luc
46. Cet établissement est né de la fusion des hôpitaux Saint-Joseph et Saint-Luc. Depuis 1993, la chambre
mortuaire de l’ancien hôpital Saint-Joseph n’était plus utilisée. Le nouvel établissement utilisait alors la
chambre funéraire municipale bien qu’il dénombre plus de 200 décès par an.
Le règlement d’admission au centre funéraire municipal
er
47. Une note des services municipaux de pompes funèbres du 1 avril 1994, rédigée à l’intention du centre
hospitalier (cotes 2248-2250), précise les conditions d’admission des corps au funérarium municipal et
indique qu’elles sont « opposables aux personnes décédées ». Elle indique aussi : « Sont également
mentionnées les précisions indispensables à une bonne information des familles et au meilleur accueil dans
nos services. »
48. Dans la partie consacrée au transfert au centre funéraire, ce règlement d’admission indique : « Lorsque
le dépôt d’un corps est demandé par la famille, elle supporte l’intégralité des frais afférents au transfert et
au séjour au centre funéraire. Ils sont normalement intégrés à la facture des funérailles.
Dans les autres cas, l’hôpital prend au minimum en charge les frais de transport du corps ainsi que la
première journée du dépôt au centre funéraire. »
49. Le dispositif prévu a été appliqué au moins jusqu’au 14 avril 2003, date à laquelle le centre hospitalier a mis en
service sa nouvelle chambre mortuaire.
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50. Son directeur adjoint a déclaré le 5 septembre 2003 : « Lorsqu’un décès survenait dans notre établissement
avant le 14 avril 2003, le corps restait entre deux et dix heures dans la chambre avant d’être transféré au
funérarium de la ville de Lyon par la CGPF. En dehors des formalités administratives, les familles n’avaient
aucun document à signer relatif à un quelconque accord de transfert de corps vers la chambre funéraire de
la ville de Lyon. »
L’information des familles
51. Dans une note à destination des familles, le directeur général de l’hôpital explique dans une phrase en
caractères gras que l’établissement a passé une convention avec le funérarium de la ville de Lyon et
l’explique par l’obligation pour l’établissement d’y faire transférer les défunts les nuits, dimanches et jours
fériés. Il précise que, sauf souhait particulier, ce sont les services du funérarium de la ville de Lyon qui sont
sollicités (cote 2244).
La part des obsèques réalisées par la régie
52. A partir des dossiers de mise en bière au funérarium (cotes 349-416), l’enquêteur a calculé la part de la
régie municipale dans l’organisation des obsèques des personnes transportées de cet établissement vers la
chambre funéraire municipale.
53. Il a été constaté que la régie municipale a organisé entre 1999 et 2003 plus de 75 % des obsèques de
ces défunts alors que cette part est de 17 % pour l’hôpital Édouard Herriot et 17 % pour l’hôpital de la Croix
Rousse, qui disposent d’une chambre mortuaire.
La clinique Eugène André dite aussi clinique Trarieux ou clinique mutualiste
Les circonstances du recours à la chambre funéraire et de l’intervention la société CGPF
54. Le dépôt mortuaire de cet établissement a fermé en mai 2001. Dans la mesure où ne pesait pas sur lui
d’obligation d’avoir une telle installation, l’établissement a cherché une solution extérieure. Le directeur de la
clinique a ainsi justifié son choix de la chambre funéraire municipale : « Nous sommes allés nous renseigner
auprès de la chambre funéraire de Lyon afin d’offrir aux familles une prestation équivalente. La chambre
funéraire de Lyon a été choisie par rapport à d’autres parce que nous sommes sur la ville de Lyon. En terme
de formalité administrative, c’était ce qui était le plus facile. »
55. Aucune convention ne figure dans le dossier. On trouve cependant des fiches précisant les conditions de
transfert des corps associant la seule société CGFP à cette procédure. Le directeur de la clinique a déclaré :
« Nous avons traité avec le funérarium et de facto nous avons reçu communication des numéros de
téléphone de la société CGPF pour faire le transfert avant inhumation. »
La procédure de transfert en cas de décès
56. Une procédure écrite de prise en charge des décès a été définie pour les services de la clinique (cotes
2253-2256). Au chapitre « Prise en charge administrative et accueil et information des proches », il est
prévu :
« Pages 3/4 - Chapitre 2 - Prise en charge administrative : (…) Lorsque les documents administratifs sont
renseignés et remplis, le bureau des décès appelle la C.G.P.F. (Compagnie générale des pompes funèbres) Service des transferts - (annexe 6). Le transfert interviendra dans l’heure qui suit l’appel. (…) Un document
attestant du transfert est remis par l’agent des C.G.P.F. à l’infirmière du service. La nuit, le défunt est
maintenu dans sa chambre, fenêtres et radiateurs fermés, sur une table réfrigérée pendant 2 à 10 heures,
sauf si le certificat de décès est signé. Dans ce cas, le corps peut être transféré au funérarium quelle que
soit l’heure.
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Page 4/4 - Chapitre 4 - Accueil et information des proches (cf. annexes 1 - 1bis) : A l’arrivée, le soignant du
secteur
- accueille et accompagne les proches auprès du défunt s’ils le désirent
- informe ceux-ci :
o du fonctionnement du funérarium (cf. annexe 6),
o de la possibilité :
d’appeler un ministre du culte
d’obtenir un rendez-vous avec le médecin référant. »
57. Dans la fiche de gestion des décès (cote 2258) est indiqué que : « L’agent du bureau des décès signe
l’autorisation d’admission en chambre funéraire et le remet à la CGPF. »
La préparation de ce document
58. Dans une lettre au directeur de la clinique (cote 2273), l’adjoint délégué au maire de Lyon a expliqué les
conditions dans lesquelles a été préparé l’accueil des personnes décédées :
« Madame le Directeur,
La réorganisation de vos services vous conduit à envisager de confier au Centre funéraire de la ville de Lyon
l’accueil des malades décédés dans votre établissement.
Dans cette perspective, vous avez évoqué avec M. X..., directeur des Services funéraires municipaux et Mme
Y..., chef du Service municipal des Pompes funèbres, les conditions dans lesquelles les familles ou vousmêmes pourriez faire déposer les corps avant mise en bière. »
59. Le directeur de la clinique a pour sa part déclaré : « A la question de savoir pourquoi nous avons établi une
fourchette de deux à dix heures pour la garde du corps des défunts, Madame Z... ne peut m’apporter une
réponse précise. Madame Z... a travaillé avec Madame Y... du funérarium de la ville de Lyon, elle a obtenu
des informations réglementaires de sa part concernant cet objet. » (cote 2283).
60. Il a par ailleurs reconnu lui-même le manque de neutralité de la procédure en vigueur dans son établissement
en disant à l’enquêteur « A l’éclairage des éléments que vous me communiquez, il me paraît indispensable
de revoir notre procédure formalisée».
La clinique de la Sauvegarde
61. La clinique n’a pas de chambre mortuaire.
62. Aucune convention écrite avec un opérateur n’a été fournie, mais la clinique propose systématiquement
aux familles, à la suite d’un accord au moins tacite avec la régie municipale confirmée par la déclaration
d’une responsable le 3 décembre 2003 (cotes 2315-2317), de faire transférer les défunts au funérarium
municipal. Entre 1999 et 2002, la régie municipale a organisé 71 % des obsèques des personnes qui ont
séjourné au funérarium en provenance de la clinique.
63. Des factures de la CGPF recueillies dans cet établissement (cotes 2324-2343) montrent que cette société
assurait l’essentiel du transport des personnes décédées dans l’établissement.
64. La notice interne à la clinique (cotes 2285-2289) explique les formalités administratives à accomplir en
cas de décès et présente le transfert au funérarium municipal comme la solution la plus naturelle :
« 1. Le plus simple et le plus rapide pour tous :
- le médecin remplit, signe et tamponne le certificat de décès et la demande d’admission en chambre
funéraire.
- Prévenir la société de thanatopraxie pour le transport du corps au :
04 78 01 98 05, 24h/24, en priorité
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er
06 87 72 63 14, si pas d’interlocuteur au 1 numéro
- le corps sera transporté au :
Centre funéraire municipal
177 avenue Berthelot
69007 Lyon
Tél. : 04 72 76 08 18
Ouvert aux familles : du lundi au vendredi 8h/17h30
samedi 9h/14h
dimanche 10h : 12h
Il faut expliquer à la famille que la clinique ne dispose pas de chambre funéraire sur place, et que le défunt
sera transporté aux frais de la clinique et durant 24 h gratuitement. Il faut leur dire que toutes les
démarches (de rapatriement à domicile, de funérailles, …) peuvent se faire depuis la chambre funéraire (cf.
formulaire pour connaître les prestations). »
« 2. Si la famille veut absolument rapatrier le corps directement sans passer par la chambre
funéraire :
- le médecin + un membre de la famille + le directeur ou cadre infirmier doivent remplir la demande
d’autorisation de transport de corps avant mise en bière (les trois signatures sont nécessaires) ;
- toujours remplir le certificat de décès ;
- contacter le service de pompes funèbres désiré par la famille. Celui-ci se mettra en rapport avec le
commissariat afin de poser les scellés qui permettront de transporter le corps ;
- la famille doit se munir du livret de famille et aller faire la déclaration de décès à :
ème
mairie du 9 arrondissement
9 place du marché
69009 Lyon
Tél. : 04 72 19 81 81
De 8h30 à 16h30
Dans certains cas, les services de pompes funèbres choisis par la famille s’en occupent. »
65. La clinique met par ailleurs à la disposition des familles un dépliant des services funéraires municipaux
présentant sans les distinguer les prestations commerciales offertes au centre funéraire municipal et les
activités règlementaires de ces services (cotes 2297-2300).
Le témoignage des familles
66. Le responsable des pompes funèbres Rozier a évoqué le cas d’une personne décédée à l’hôpital Saint
Joseph : « J’ai à vous communiquer le cas personnel de l’enlèvement de ma belle-mère décédée à l’hôpital
Saint-Joseph le 10 décembre 2002 au service de réanimation. J’avais programmé de l’emmener à la chambre
funéraire de Bron parce que nous voulions y faire une crémation avec une cérémonie religieuse là-bas. Je
suis allé voir l’infirmière pour obtenir le certificat de décès. Elle n’a pas voulu me confier un des trois
exemplaires du certificat de décès. Elle a appelé son chef de service, la surveillante générale, qui a dit que
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cela n’était pas la procédure habituelle, que le corps devait aller obligatoirement au 177 avenue Berthelot et
que le certificat de décès devait suivre dans son intégralité. Je suis descendu dans le nouveau bureau des
entrées et une dame m’a expliqué que le corps était amené au 177 avenue Berthelot et que j’aille là-bas et
qu’ils s’occuperaient de tout. » (Cote 516).
67. La société Viollet, dans son mémoire du 15 novembre 2007 en réponse au rapport, avance plusieurs
attestations de familles rédigées entre 2001 et 2006, à savoir celles de M. A..., Mme B... et Mme C... pour
des proches décédés à la clinique mutualiste, de Mme D... pour un proche décédé à la clinique Eugène
André, de Mme E... pour un proche décédé à l’hôpital Saint-Joseph-Saint Luc, de Mme F... et M. G... pour
des proches décédés à la clinique de la Sauvegarde, qui attestent que ces défunts ont été transportés à la
chambre funéraire de la ville de Lyon sans l’accord des familles pourtant présentes au moment du décès.
b) Le transfert en chambre funéraire des personnes décédées dans les établissements de
santé de Saint-Priest
La polyclinique Pasteur
La convention d’admission des défunts au funérarium de Saint-Priest
68. La polyclinique Pasteur a signé une convention le 13 novembre 2000 avec OGF-PFG (cotes 2390-2391)
pour le transfert des défunts au funérarium de Saint-Priest. Dans une lettre du 8 novembre 2000 au
président directeur général de la polyclinique, les PFG précisent : « notre offre ne concerne pas le transfert
exécuté à la demande des familles qui demeurent entièrement libres de demander le transport de leur
défunt, à leurs frais, vers une chambre funéraire de leur choix par l’entreprise de leur choix. » (cote 2392).
69. Concernant la demande d’autorisation de transport et la demande d’admission en chambre funéraire, la
directrice-adjointe de la polyclinique Pasteur a déclaré : « Bien que ces documents soient à l’en-tête des
PFG, la demande d’autorisation de transfert avant mise en bière est utilisée également par ceux qui
demandent un transfert ailleurs et par un autre opérateur de pompes funèbres. Je m’engage, dans un souci
de neutralité, à refaire ces documents et supprimer les références à un opérateur.
Je vous remets, à votre demande, la copie d’une facture émanant des PFG relative au paiement des frais de
transfert de corps et d’admission en chambre funéraire. J’ignorais, jusqu’à votre première venue, que nous
payions de telles prestations. » (cotes 2348-2350).
70. L’analyse des factures de transport des corps établies par les PFG en 2002 pour la clinique Pasteur (cotes
1303-1306) montre que les 22 personnes décédées cette année là ont été transportées au funérarium de
Saint-Priest. Les mêmes constatations peuvent être faites pour les années antérieures au vu des fiches
d’admission remises aux enquêteurs par OGF (cotes 1314-1414).
Les réunions de janvier et février 1996 entre OGF-PFG et la clinique Pasteur
71. Un compte-rendu d’entretiens qui ont eu lieu entre le responsable OGF-PFG de Saint-Priest et la clinique
Pasteur pour la préparation de la convention, rédigé par un employé de la clinique, a été remis aux
enquêteurs par cet établissement. Il se présente ainsi :
Informer la famille
Les PFG n’appellent jamais la famille pendant les 3 jours de garde car cette pratique pourrait être qualifiée
de racolage. C’est à la clinique de donner les coordonnées des PFG. Nous avons donc intérêt à faire le plus
rapidement possible.
Transfert du corps
Les PFG demandent à la famille ou à la clinique de signer une demande d’admission en chambre funéraire …
Les PFG nous conseillent donc de signer systématiquement nous même ce document sans en parler à la
famille, en expliquant que nous n’avons pas de morgue et que donc tous les corps vont aux PFG de SaintPriest. Quelques exemplaires de cet imprimé seront laissés dans chaque service concerné …
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Prix
Convenu le 30 janvier 1996
« Monsieur H… souligne que nous sommes dans l’illégalité si les membres du personnel de la clinique
conseillent aux familles de faire transporter le corps aux PFG de Saint-Priest à leur charge.
Monsieur H… est d’accord pour que rien ne soit facturé à la clinique si la famille poursuit avec les PFG de
Saint-Priest. Mais pour la forme, elles devront nous facturer quelque chose pour la totalité des opérations. Le
montant global de la facturation sera négocié semestriellement en fonction du nombre de familles ayant
poursuivi avec eux.
Monsieur H… attend de connaître votre position et nous fera parvenir un projet de convention. Il me remet
d’ores et déjà un modèle (ci-joint).
Convenu le 21 février 1996 :
Essai de 3 mois (ou 5 décès) pendant lesquels rien ne sera facturé, ni aux familles, ni à la clinique. Un point
sera alors fait.
Si environ 75 % des familles poursuivent avec les PFG, la facturation sera fictive » (cote 2381).
72. Il ressort de ces négociations que, dans le cadre de la convention signée entre les PFG et la clinique Pasteur, la
société PFG proposait de ne pas facturer à la clinique le prix du transport et de séjour au funérarium si un
nombre suffisant de familles la chargeaient par la suite d’organiser les obsèques.
L’information des familles
73. La procédure à suivre en cas de décès à la polyclinique Pasteur (cotes 2354-2355) souligne à plusieurs
reprises que les familles sont libres de contacter l’opérateur de pompes funèbres de leur choix. Néanmoins, il
ressort de ce document que les formalités à suivre par les familles sont beaucoup plus lourdes que si elles
recourent directement aux PFG :
« Si la famille choisit de transporter le corps avant mise en bière, il faut y joindre le BON DE TRANSPORT
avant mise en bière. Il doit être signé par le médecin.
Bon de transport avant mise en bière (fourni par les PFG)
Il est signé par la Direction (PDG), le médecin et la famille.
Il autorise le transport du corps par un transporteur agréé.
Le médecin doit cocher ‘Autorisation de transport sans mise en bière’
6. Les choix possibles des familles
Dans chaque service, le cadre infirmier tient la liste des chambres funéraires et les numéros de téléphone
des Pompes Funèbres à la disposition des familles (Voir Annexe 1 - pages 12 à 19).
Expliquer à la famille que la Polyclinique ne possède pas de chambre funéraire.
Ils ont le choix entre la morgue dans la chambre funéraire de Pompes Funèbres de Saint-Priest, des Pompes
Funèbres de leur choix ou le transport à domicile.
Si le choix est Pompes Funèbres de Saint-Priest (ils sont joignables à tout moment) :
Heures de bureau : 8h30/ 12h00 et 14h00 / 17h15
Fax : 04 78 20 10 88 - Mme I…
En dehors des heures d’ouverture : 24h/24
nuits et jours fériés
au 06.82.83.52.49
En cas de problèmes importants : domicile de M. J…
Directeur du secteur du Grand Lyon
04 72 90 95 25 »
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La clinique du Grand Large
La convention signée avec OGF-PFG
74. La clinique du Grand Large, située à Décines-Charpieu, ne gère plus de chambre mortuaire depuis avril
2003. Une convention a été signée avec PFG le 31 mars 2003 (2494-2495). La clinique remet aux familles
des défunts un document sur lequel il est indiqué : « La direction de la clinique du Grand Large vous informe
qu’elle ne dispose pas de chambre mortuaire dans l’établissement. Elle a confié à la société des pompes
funèbres générales de Décines, 87, avenue Jean Jaurès, le transfert du corps et son dépôt à la maison
funéraire de Saint-Priest, 26, rue de l’Égalité pendant trois jours à la charge financière de la clinique. Vous
restez totalement libre de choisir l’entreprise funéraire qui vous convient pour les modalités des obsèques.
Nous tenons à votre disposition une liste des entreprises habilitées dans le domaine funéraire (Préfecture du
er
Rhône, Direction de la Réglementation, 1 bureau, Règlement général) » (cote 2490).
L’information des familles
75. La notice de la clinique du Grand Large présente ainsi la rubrique - Informations des proches- : « Si la
famille opte pour le transfert à la charge de la clinique :
Contacter PFG : 04 78 49 11 41
PFG se charge de toute l’organisation des démarches nécessaires pour le transfert du corps. Le corps de la
personne défunte est transféré à la Chambre Funéraire de Saint-Priest 26, rue de l’égalité pendant trois jours
à la charge financière de la clinique …
3.1.2. LA FAMILLE NE DÉSIRE PAS UNE PRISE EN CHARGE PAR LA CLINIQUE :
En plus des documents cités en chapitre 2. Faire remplir par le plus proche parent le document Mairie «
Demande de transport de corps avant mise en bière ». La famille s’engage alors à prendre en charge les
frais de transfert, l’admission et le séjour du défunt dans la chambre funéraire de leur choix. Exemple
Annexe 5 » (cote 2484).
c) Le transfert en chambre funéraire des corps des personnes décédées dans les
établissements de santé de Vénissieux
La clinique de la Roseraie
La convention signée avec la SRT
76. La clinique de la Roseraie a signé le 11 septembre 1992 une convention avec la Société rhodanienne de
thanatopraxie (SRT), entreprise de laquelle OGF-PFG détenait alors 31 % du capital (cotes 2402-2405).
Celle-ci stipule que la clinique s’engage à assurer le transfert de toute personne décédée à la clinique de la
Roseraie vers le funérarium de Vénissieux. Pour cela, la clinique doit prévenir la famille du défunt par
téléphone et convenir, soit de l’heure d’arrivée à la clinique dans les 2 heures, soit de l’heure de la visite au
funérarium de Vénissieux et appeler la SRT qui s’engage à transférer le corps au funérarium de Vénissieux
dans l’heure qui suit l’appel. Cette convention était renouvelable par tacite reconduction, sauf dénonciation
trois mois avant l’échéance. En 1998, la CGPF a succédé pour cette prestation à la SRT, sans que la
convention signée avec la clinique de la Roseraie ne soit dénoncée.
L’information des familles
77. Dans cette convention, il est convenu que :
« A) La famille doit être prévenue du décès par téléphone, il est alors convenu :
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- soit de son arrivée à la Clinique Mutualiste de la Roseraie dans les 2 heures,
- soit de l’heure de sa visite au Funérarium de Vénissieux.
B) Lorsque les proches du défunt souhaitent venir à la Clinique Mutualiste de la Roseraie, il convient
de leur laisser au maximum le laps de temps de deux heures, puis d’avertir le transporteur dès leur
départ de l’établissement. »
78. S’agissant du transport de corps sans cercueil hors la chambre funéraire de Vénissieux, il est toutefois
précisé :
« M) Du fait que le Funérarium devient la morgue de la Clinique Mutualiste de la Roseraie, les familles
auront la possibilité, si elles le souhaitent, de faire transporter le corps au domicile du défunt ou vers la
Chambre Funéraire de leur choix, par le transporteur de leur choix.
N) Dans ce cas, la demande d’autorisation de transport réglementaire sera établie comme par le passé par le
Directeur de la Clinique et le Médecin Chef, sur le modèle d’imprimé utilisé jusqu’à présent.
O) Ce second transport sera à la charge de la famille.
P) Les transports de corps avant mise en bière pour un domicile ou une chambre funéraire se feront après
admission au Funérarium. Dans ce cas, les frais sont à la charge de la famille. »
79. Cette rédaction laisse penser qu’un premier transport doit nécessairement être dirigé vers le funérarium de
Vénissieux et ce n’est que si les familles souhaitent s’adresser à une autre chambre funéraire qu’elles
pourront, à leur frais, exercer leur choix.
Les conditions d’application de la convention
80. L’examen de sept demandes d’enlèvement de corps émanant de la clinique de la Roseraie montre que
les délais entre l’heure du décès et l’heure d’enlèvement varient entre 1 heure et 5 h. Les informations
communiquées par la clinique montrent aussi que la quasi totalité des 61 personnes décédées à la clinique
entre 1999 et 2002 ont été transportées au funérarium.
81. Par ailleurs, la société Viollet a produit le témoignage de M. K… qui a déclaré : « Ma maman est décédée
le 7 avril à 21 h 35 à la clinique La Roseraie de Vénissieux. Sans mon autorisation, son corps a été transféré
à la CF de Vénissieux alors que nous avions décidé avec ma famille de nous retrouver à la CF de Bron. (…)
Ensuite, ma famille et moi-même avons souhaité voir notre maman et les pompes funèbres générales nous
ont forcé à signer un bon de commande pour nous facturer les frais … nous avons refusé. Suite à ce refus,
la veille du décès, les pompes funèbres Viollet que nous avons mandatées pour l’organisation des obsèques
de notre mère, nous ont prévenus que les pompes funèbres générales refuseraient l’ouverture de la
chambre funéraire sans le bon signé par nos soins. Le commissariat de Vénissieux a été prévenu de cette
tentative par les P.F.G. de nous forcer la main pour que l’on réserve un salon et grâce à leur intervention
nous avons quand même pu à l’heure prévue quitter la chambre funéraire de Vénissieux pour nous rendre à
l’Eglise de St-Priest » (cotes 560-561).
La clinique des Minguettes
La convention signée avec la SRT
82. La clinique des Minguettes a signé une convention le 7 septembre 1992 avec la SRT (cotes 2433-2436)
semblable à celle signée par la clinique de la Roseraie. Figure aussi dans les pièces du dossier une autre
convention d’admission des corps à la chambre funéraire avec l’entête des PFG datée du 25 septembre 2003
(cotes 2429-2430).
83. En 1998, la CGPF a aussi succédé à la SRT pour la prestation, sans que la convention signée avec la
clinique des Minguettes soit devenue caduque.
84. Aucun transfert relatif aux trente-trois dossiers examinés n’a eu lieu dans un délai supérieur à 6 heures
et deux ont eu lieu avant le délai des deux heures rappelé dans le protocole. Deux tableaux présentés dans
le rapport administratif d’enquête sur la base des demandes d’enlèvement des corps de la part de cette
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clinique et de la clinique de la Roseraie montrent que les délais d’enlèvement des corps sont toujours
inférieurs à 10 heures (cotes 165-166).
85. La clinique des Minguettes a enregistré 222 décès entre 1999 et 2002. Le dépouillement des factures de
la CGPF adressées à la polyclinique fait apparaître que 194 corps ont été transportés au funérarium de
Vénissieux représentant 87 % des personnes décédées. En 2002, la clinique a enregistré 59 décès et tous
les corps ont été transportés au funérarium de Vénissieux.
L’information des familles
86. Dans la procédure à suivre en cas de décès, diffusée le 3 juin 2002 (cotes 2410-2413), l’établissement
indique que « la société Rhodanienne de thanatopraxie a signé une convention avec la Polyclinique des
Minguettes, le 7 septembre 1992, convention renouvelable par tacite reconduction. Cette convention est
déposée dans le bureau du directeur de la clinique ».
87. Le titre du chapitre consacré au transport porte explicitement la mention : « POMPES FUNEBRES
GENERALES. »
88. Il est précisé que les familles qui n’auraient pu se rendre au chevet du défunt dans les locaux de
l’établissement de santé pourront se rendre à la chambre funéraire de Vénissieux :
« I) Les familles qui n’auraient pas pu se présenter à la Polyclinique des Minguettes avant le transport
pourront se rendre au Funérarium de Vénissieux selon les horaires d’ouverture.
HEURES D’OUVERTURE DES SALONS FUNÉRAIRES
Du lundi au Vendredi de 7 heures à 19 heures
Le Samedi de 9 heures à 14 heures
Dimanche et Jours fériés S’adresser à l’Agent de Permanence. »
89. Le document insiste sur le fait que les frais de transport sont assurés par la polyclinique :
« Les frais de transport sans cercueil vers le Funérarium sont pris en charge par la Polyclinique. »
90. La seule alternative est présentée comme suit :
« Transport au domicile
• La famille a la possibilité de choisir le transporteur de son choix, les frais seront à sa charge.
• En cas de transfert immédiat sur une autre commune ou un autre département, la famille doit
impérativement remplir le formulaire ˝ demande d’autorisation de transport de corps avant la mise en bière
˝, joint en annexe.
• Elle devra se munir de ˝la demande de transport réglementaire ˝, signée par le Directeur de la
Clinique et par le médecin ».
Le centre hospitalier Le Vinatier
Le marché passé avec les PFG
91. Le centre hospitalier Le Vinatier possédait jusqu’en 1998 une chambre mortuaire. Le terrain sur lequel
elle se trouvait a été vendu aux hospices civils de Lyon pour la construction d’un nouvel hôpital. Le directeur
adjoint du Vinatier a indiqué « la suppression de ce service nous a conduit à poursuivre le service rendu aux
familles en recherchant après mise en concurrence un prestataire de services susceptible de se substituer à
la chambre mortuaire » (cotes 2467-2468).
92. La centre hospitalier Le Vinatier a lancé un appel d’offres et a retenu l’offre des PFG tout en exprimant
son regret de n’avoir pu choisir le GIE Rozier :
« 3. Enfin, la capacité de pression du Centre Le Vinatier sera certainement plus grande en cas de
complication vis-à-vis d’une structure locale comme le GIE Rozier plutôt que vis-à-vis d’une structure
multinationale comme le CISE puisque cette dernière va prochainement passer sous le contrôle des PFG euxmêmes appartenant au géant américain des Pompes Funèbres » (cotes 2473-2475).
Les modalités de transfert des corps
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93. La note de procédure interne relative aux décès indique que « le Centre hospitalier Le Vinatier ne
er
disposant plus de funérarium à partir du 1 novembre 1998, les Pompes Funèbres Générales interviendront
deux heures après le décès sur le site du CH Le Vinatier et assureront le transport des corps vers la chambre
funéraire de Vénissieux, 45 chemin de Feyzin. Si les familles en font la demande, les corps peuvent être
transportés par les Pompes Funèbres Générales vers une autre chambre à condition que le départ ait lieu
impérativement deux heures après le décès. » (Cotes 2449-2465).
L’information des familles sur le rôle des PFG
94. La note précitée destinée au service des soins de l’établissement précise ainsi les conditions
d’intervention de cette société dans un dispositif dont la mise en œuvre relève pourtant de sa responsabilité
:
« L’UNITÉ DE SOINS
- (…)
- informe la direction des services de soins infirmiers
- informe les Pompes funèbres générale, au n° 04.78.54.68.31 (24 h/24) (7 j/7) pour le transport du
corps vers la chambre funéraire (voir pages 8 et 9)
annonce : le service médical où a eu lieu le décès
le nom de la personne décédée
l’heure du décès
l’heure à laquelle le corps pourra être transporté (2 H après le décès)
- applique la procédure de transport du corps sans mise en bière vers la chambre funéraire de Vénissieux
(voir page 8)
- si la famille le demande, applique la procédure du transport de corps vers une chambre funéraire autre que
celle de Vénissieux (voir page 9)
- remet le certificat de décès signé par le médecin qui constate le décès aux Pompes funèbres générales
- transmet une copie du certificat de décès au bureau des entrées
- Prend contact avec la famille
o l’informe du décès
o l’informe du transport du défunt vers la chambre funéraire de Vénissieux, 45 chemin de
Feyzin
lui demande la filiation du défunt
lui communique l’heure prévue du transport
si nécessaire lui demande des vêtements
lui conseille de prendre contact avec le bureau des entrées
lui indique les conditions financières : frais de transport + 3 jours en chambre funéraire à
la charge du CH Vinatier. Au-delà de 3 jours, la chambre funéraire est à la charge de la
famille). »
o
o
o
o
o
95. Elle explicite le rôle d’OGF-PFG de la manière suivante :
POMPES FUNÈBRES GÉNÉRALES
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Les pompes funèbres générales :
- interviennent dans les 2 heures après le décès
- font procéder au CH Vinatier à la mise en place d’un bracelet d’identification par un officier de police
judiciaire
- contactent la mairie pour obtenir l’autorisation du transport de corps sans mise en bière au moyen de
l’imprimé prévu à cet effet
- placent le corps dans une housse biodégradable spéciale qu’ils fournissent. En cas de contagion,
procèdent à la mise en bière immédiate soit en cercueil simple, soit en cercueil hermétique selon le type
de maladie. Les Pompes funèbres générales n’ont pas le droit en cas de contagion de transporter le
corps sans cercueil.
- transportent le corps vers la chambre funéraire de Vénissieux
ou
- transportent le corps vers une autre chambre funéraire si la famille le souhaite, à condition que le
transport ait lieu impérativement 2 heures après le décès.
ème
- Si le transport a lieu plus de 2 heures après le décès, il faut envisager un 2
transport de corps sans
mise en bière. Dans ce cas, les Pompes funèbres générales s’occupent des démarches administratives
auprès de la mairie et tous les frais incombent à la famille.
CHAMBRE FUNERAIRE
A la chambre funéraire, les Pompes funèbres générales assurent :
- la présentation des corps aux familles 24 H/24, 7 j/7
- le respect de toutes les religions. »
96. Par ailleurs, dans la notice d’information élaborée par le centre hospitalier le 7 février 2000, on peut lire :
« Quel que soit le jour du décès et quelle que soit l’heure, dans tous les cas appeler les PFG au 04 78 54 68
31 qui contacteront eux-mêmes :
la Maison funéraire
45 chemin de Feyzin
69200 Vénissieux
ou le Parc cimetière communautaire [chambre funéraire à Bron]
161 boulevard de l’université
69500 Bron » (cotes 2477-2478).
L’effet de ces dispositions
97. Le dépouillement des listes des personnes décédées dans l’établissement montre que 97 corps ont été
transportées par la CGPF sur les 124 décès intervenus en 2001 et 2002. Le directeur de la SRT a déclaré aux
enquêteurs : « La CGPF a pris toute la clientèle des établissements de santé comme les cliniques et les
hôpitaux qui ne disposent pas de chambres mortuaires. Si auparavant, nous faisions des transports à partir
de ces établissements, c’était uniquement en tant que sous-traitant des PFG ou de CGPF » (cotes 2605-
2607).
98. Le dirigeant de la société Lao à enseigne Roc’Eclerc a déclaré aux enquêteurs : « Les conventions tacites
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ou écrites entre les établissements de santé et indirectement PFG font que malgré ma position
géographique, je n’organise plus aucun convoi pour des décès ayant eu lieu à la clinique Eugène André et au
Vinatier. A l’inverse, depuis l’ouverture de la chambre mortuaire de la clinique Saint-Joseph et Saint-Luc,
j’organise des funérailles de façon régulière » (cotes 205-207).
d) Les conditions d’admission des corps dans les chambres funéraires de Saint-Priest et
Vénissieux
L’absence de signature des demandes de transfert
99. L’examen des dossiers d’admission aux funérarium de Saint-Priest et Vénissieux montre que les
établissements sanitaires signent préalablement au décès les imprimés demandant le transport du corps vers
la chambre funéraire détenue par PFG ou signent les demandes d’admission en chambre funéraire
postérieurement à l’admission effective. C’est le cas pour la clinique du Grand Large et la clinique Pasteur
pour lesquelles le rapport d’enquête, confirmant cette pratique, fait état de 17 dossiers d’admission entre
1999 et 2002 qui, soit ne sont pas signés, soit ont été signés à l’avance par les directeurs d’établissement.
100. Par ailleurs, un document fourni par la CGPF relatif aux établissements de santé de Vénissieux et
intitulé « Demande de transfert de corps à chambre funéraire » ne prévoit que la signature du directeur de
l’établissement et non de la personne ayant qualité pour pourvoir aux funérailles.
101. Enfin, les dossiers d’admission des corps des défunts provenant du Vinatier ne sont signés ni par un
responsable d’établissement ni par une personne ayant qualité pour pourvoir aux obsèques.
Le témoignage des familles
102. La société saisissante a produit, dans son mémoire en réponse au rapport, plusieurs témoignages de
familles qui s’échelonnent de 2001 à 2007, à savoir ceux de Mme L… et Mme M… pour des proches décédés
au Vinatier, de Mme N…, Mme O… et Mme P… pour des proche décédés à la clinique du Grand Large, qui
montrent les difficultés rencontrées dans les services de ces établissements pour faire transporter leurs
défunts dans des chambres funéraires autres que celles de Vénissieux et Saint-Priest.
2. L’ORGANISATION DES SERVICES FUNÉRAIRES
a) À Lyon
103. Lyon ne dispose que d’une chambre funéraire gérée par la régie municipale.
L’accès des opérateurs de pompes funèbres à la chambre funéraire municipale de Lyon
104. Le directeur de la régie municipale a déclaré : « Actuellement, l’entreprise CGPF dispose d’une clé lui
permettant d’accéder à la chambre funéraire quand le funérarium est fermé. CGPF dispose d’une clé depuis
1992, date de la création de la chambre funéraire. Lorsqu’il m’a été demandé de délivrer une clé [à d’autres
opérateurs], j’ai refusé car j’estime qu’il y a trop de risques à laisser plusieurs personnes avoir accès à la
chambre funéraire. Il n’est d’ailleurs pas possible d’imaginer faire une permanence de nuit pour une raison
de charges » (cotes 342-346).
105. Dans le même sens, le dirigeant de la société Rozier a indiqué : « les clés de la chambre funéraire sont
confiées essentiellement à leur prestataire CGPF. J’ai également une clé qui nous avait été confiée à l’époque
par Mme Q… responsable des services funéraires avant M. X.... Je m’en sers une à deux fois par an. Je ne
fais pas de transport de nuit car la législation relative au transfert avant mise en bière des corps est
complexe dans les démarches. Je constate que le fait pour la CGPF de posséder toutes les clés de toutes les
chambres funéraires fausse le marché des réquisitions de nuit ou de décès sur la voie publique. Cela interdit
l’arrivée de nouveaux entrants. » (cotes 515-519). Les pompes funèbres Viollet ont confirmé cet état de fait
: « Par exemple, j’ai eu à plusieurs reprises l’occasion de demander en vain l’accès à la chambre funéraire
Berthelot de nuit alors que CGPF a cette possibilité. » (Cotes 534-535).
106. Deux autres opérateurs de pompes funèbres ont également déploré cette situation. Le gérant de la Sarl
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Pompes Funèbres du Rhône, a déclaré : « En dehors des heures ouvrables, il est impossible d’accéder à la
chambre funéraire de Lyon sauf à posséder une clé que seules CGPF et Pompes Funèbres Rozier possèdent.
La nuit, nous sommes obligés de faire sous-traiter le transfert des corps par CGPF. En dehors du fait que
cela peut nous faciliter le service, je conteste le fait d’être obligé de sous-traiter avec un concurrent alors
qu’il serait possible d’imaginer une rotation avec d’autres confrères. » (Cotes 660-662.) Le gérant de la Sarl
Pinault, a ajouté : « Nous rencontrons des difficultés d’accès la nuit au centre funéraire de la ville de Lyon,
avenue Berthelot. Dans ces cas, comme il ne nous est pas possible de transférer les corps hors de la
commune la nuit, nous sommes dans l’impossibilité de faire le transfert. Les familles se retournent alors vers
le seul autre opérateur qui peut assurer le transport du corps : la CGPF. Cette pratique nous fait passer pour
une entreprise incapable d’assurer un début de prestation et tend à nous exclure du marché des obsèques
aux yeux des familles. » (Cotes 529-531).
La présentation des services funéraires par la ville de Lyon
107. La régie municipale de Lyon se présente selon les cas sous plusieurs appellations : services funéraires
municipaux, centre funéraire, centre funéraire de la ville de Lyon ou pompes funèbres municipales.
108. L’appellation « services funéraires municipaux-centre funéraire » est utilisée dans les dépliants
présentés dans les locaux d’accueil de la régie avenue Berthelot (cotes 496-507). L’appellation « pompes
funèbres municipales » se trouve dans les annuaires de France Télécom, les publicités des pages jaunes
reprenant la mention « service municipal des pompes funèbres » (cotes 2651 et 2680).
109. Il a été vu au paragraphe 65 que les établissements de soins diffusent les dépliants publicitaires du
service municipal des pompes funèbres qui présentent sans les distinguer les activités administratives
relatives à la réglementation funéraire, à la gestion des cimetières, à la délivrance des autorisations
nécessaires aux obsèques et les activités industrielles et commerciales relatives à l’organisation des
funérailles.
110. Par ailleurs, le modèle de mandat signé par les familles qui veulent confier à la régie municipale
l’organisation des obsèques de leur proche est présenté sous le titre « Services Funéraires Municipaux » et
donne comme adresse « Ville de Lyon. Centre Funéraire Municipal.» (cotes 320-321).
La configuration des locaux
111. Les locaux sont décrits dans un procès-verbal de visite dressé par l’enquêteur (cotes 2712-2718).
112. S’agissant d’une part du côté du bâtiment accessible en voiture, il observe :
« Un premier panneau affiché de façon très visible sur le côté de l’aile du bâtiment principal porte les
indications suivantes :
Il est fait une distinction entre les salons funéraires, la salle de cérémonies et les services des pompes
funèbres ainsi que les services administratifs. Si le visiteur veut accéder aux salons funéraires, il emprunte
un tunnel piétonnier sous l’aile du bâtiment principal qui aboutit dans la cour au niveau du 177 de l’avenue
Berthelot. Si le visiteur veut aller au service de la réglementation, il suit un circuit sur la gauche qui longe
l’arrière du bâtiment principal. Un hall d’accueil avec trois entrées porte, au-dessus de chacune d’elles, les
mentions suivantes :
Dans ce hall, une table basse et dix fauteuils sont les mobiliers présents avec quelques plantes d’ornements.
Un fléchage au-dessus de l’ascenseur, seule possibilité d’accès à partir du hall, reprend les mentions du
dessus des trois portes. Sur la table basse, un écriteau en carton mentionne :
‘Service funéraire municipal - 177 avenue Berthelot - 69007 Lyon
Chambre et salons funéraires
Accès par le parking côté avenue Berthelot’ » (cote 2715).
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113. S’agissant d’autre part de l’accès direct par le boulevard Berthelot, celui-ci ne peut s’effectuer que par un
passage dans le local de la chambre funéraire située aux numéros 177 et 179 de ce boulevard. Cet accès est
présenté de la façon suivante :
« Un premier panneau, visible sur la gauche, qui ne porte pas les armoiries de la ville de Lyon, indique les
mentions suivantes :
Ce panneau est placé juste à la sortie du tunnel piétonnier qui passe sous le bâtiment. Dès l’entrée dans la
cour, on visualise aisément l’entrée vers les salons funéraires qui sont bien identifiés par un panneau audessus de la porte centrale du bâtiment principal :
Accueil
Salons funéraires
Salle de cérémonies » (cote 2716).
114. L’enquêteur décrit également l’intérieur du local affecté à la chambre funéraire :
« La cour possède également un bâtiment sur la droite (qui sert de salon de détente) qui porte encore
d’anciens panneaux d’indication qui n’ont pas été enlevés et qui peuvent faire naître une certaine ambiguïté
puisqu’ils orientent le visiteur vers le centre de la cour avec les mentions suivantes :
L’accueil de la chambre funéraire se présente de la façon suivante :
- Dans un hall, l’accueil est matérialisé par un bureau avec un téléphone et un chevalet sur lequel est
mentionné le nom du défunt et le numéro du salon où il peut être visité. Sur le bureau, un écriteau
indique : « Durant l’absence momentanée de notre hôtesse, nous vous remercions de bien vouloir
sonner. Un assistant viendra vous conseiller. La sonnette est située à votre gauche.
- Sur la droite et sur la gauche, deux portes donnent accès à des couloirs qui desservent les salons
funéraires.
- Un escalier sur la droite mène à l’accueil du premier étage. Un écriteau suspendu indique : « services
administratifs ».
- Un ascenseur, à droite de l’entrée, permet de se rendre à l’étage.
- Enfin, face à l’entrée, une porte, au fond du hall d’accueil, mène à un couloir de service réservé aux
employés de l’établissement. » (cote 2717).
115. Cette description fait apparaître d’une part que la chambre funéraire ne dispose pas d’une entrée
séparée, d’autre part que la chambre communique avec les services commerciaux de la régie et qu’enfin
cette activité commerciale et la partie administrative des services municipaux relative aux cimetières et aux
concessions ne sont pas clairement distinguées à l’étage du bâtiment. Les plans du bâtiment (cotes 347-348)
ainsi que la notice de présentation du centre remise par la régie (cotes 2297-2300) confirment que les
activités commerciales et les activités purement administratives de la régie municipale ne sont pas
clairement distinguées dans la signalisation externe et interne.
116. Cette configuration matérielle, source de confusion, est confirmée par plusieurs déclarations. La société
Rozier a déclaré : « les certificats de décès sont systématiquement montés au service de la réglementation,
obligeant les familles à monter à l’étage.
L’escalier et l’ascenseur à l’accueil de la chambre funéraire ne permettent pas de distinguer les entrées
distinctes entre la chambre funéraire et les services commerciaux. » (cotes 515-519).
117. De même, la Sarl pompes funèbres Pinault a affirmé : « J’estime qu’il existe une confusion au centre funéraire
Berthelot entre la chambre funéraire et les services de pompes funèbres. Elle naît de la pratique qui consiste
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à amener les documents à l’étage, au service réglementation. Une fois la famille dans la nécessité de
récupérer les documents, elle est accueillie à l’étage par un conseiller funéraire. La captation est discrète
mais efficace.
A Lyon, lorsque les familles font une déclaration de décès dans les mairies d’arrondissement, l’employé
municipal remet aux familles un document à destination du service de la réglementation de la ville de Lyon
afin d’aller y retirer le permis d’inhumer. Le service de la réglementation est naturellement centralisé avenue
Berthelot. » (cotes 529-531).
118. Ces déclarations montrent également que toutes les familles ayant déclaré un décès à Lyon doivent venir au
centre funéraire au moins pour retirer le permis d’inhumer auprès du service de la réglementation.
Les numéros de téléphone
119. Dans les pages jaunes de l’annuaire téléphonique (cote 2680), la rubrique chambre funéraire ou
funérarium est englobée dans les autres activités de pompes funèbres avec un seul numéro d’appel le 04 72
76 08 18. Ce même numéro est repris dans les pages blanches de cet annuaire et dans la publicité qui
l’accompagne (cote 2651).
120. Tous les autres supports d’information du public disponibles reprennent ce même numéro et
notamment les sites internet de France Télécom (cotes 2699-2709).
121. Il n’est donc pas possible pour les familles d’avoir le numéro spécifique de la chambre funéraire alors
que celui-ci - le 04 72 76 08 44 - existe mais n’est pas diffusé par la régie. Une notice adressée par la mairie
de Lyon à une clinique pour l’informer des conditions d’accès à la chambre funéraire n’indique pas davantage
ce numéro mais celui des pompes funèbres municipales (cote 2278).
122. Dans sa déclaration aux enquêteurs, le directeur de la régie municipale a pourtant confirmé que la
chambre funéraire est dotée d’un numéro d’appel propre :
« Vous m’interrogez sur l’accueil téléphonique de la standardiste qui délivre le même message quel que soit
l’origine de l’appel et qui est : « Servies funéraires municipaux - Bonjour ! ». Nous disposons d’une ligne
téléphonique distincte pour la chambre funéraire. Au standard, la personne n’a pas de consigne particulière,
elle délivre un message neutre qui associe tous les services du centre (réglementaire, pompes funèbres et
chambre funéraire). Techniquement, je confirme qu’elle peut visualiser l’origine de l’appel. » (cote 344).
123. L’absence de communication du numéro de téléphone spécifique à la chambre funéraire, rapprochée de
l’indication systématique sur tous les supports d’information d’un seul numéro couvrant les activités
commerciales, administratives et de gestionnaire de la chambre funéraire, n’est pas de nature à éclairer les
familles sur la distinction entre les prestations concurrentielles de la régie municipale et le service public
administratif lié aux décès.
b) À Saint-Priest
L’organisation des locaux
124. L’enquête montre que la chambre funéraire et les locaux commerciaux sont bien séparés à l’intérieur du
bâtiment (cotes 2723-2724). Dans un arrêt du 25 septembre 2003, la troisième chambre civile de la cour
d’appel de Lyon a confirmé le jugement du tribunal de commerce de Lyon en date du 18 mars 2002 sur la
situation du funérarium, en jugeant :
« que le bâtiment construit en 1997 est pourvu de deux entrées séparées aménagées sur une façade
rectiligne et distantes entre elles d’une dizaine de mètres ; que les deux entrées font l’objet d’une
signalétique claire, d’une part, « maison funéraire » et d’autre part « pompes funèbres » ; que les deux
locaux ne communiquant pas entre eux ainsi qu’il en résulte également du plan des locaux, (…) ; que
l’agencement des locaux tant dans leur configuration physique que dans leur aspect et leur signalétique ne
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réalise pas l’amalgame entre les deux activités différenciées exercées par la SA OGF qui n’a pas eu en vue
de créer une confusion pour capter la clientèle qui venait dans sa chambre funéraire ;
attendu que l’annuaire téléphonique pour la commune considérée de Saint-Priest comporte logiquement à la
rubrique pompes funèbres générales et au nom de la SA OGF les diverses lignes téléphoniques attribuées
pour les activités distinctes exploitées : « pompes funèbres et marbrerie » et « maison funéraire » ;
qu’aucun grief ne peut être fait à la société SA OGF dans la présentation de ses activités dans l’annuaire
téléphonique ;
attendu que les attestations versées au débat par la SARL Pompes funèbres VIOLLET ne révèlent pas la
réalité d’agissement déloyaux imputables à la SA OGF mais dénoncent plutôt des dysfonctionnements :
retard dans l’ouverture de la chambre funéraire de la SA OGF lors de la levée des corps, décisions de
transferts de corps dans la chambre funéraire de la SA OGF prises par des établissements hospitaliers sans
respecter la volonté des familles ou les consulter …, sans que ces agissements soient directement
imputables à la SA OGF ; … » (cotes 548-552).
125. Le constat réalisé par l’enquêteur qui s’est rendu sur place le 9 septembre 2003 donne les précisions
suivantes : « La façade qui donne sur la rue forme un angle qui crée un renfoncement ouvrant sur l’entrée
du cimetière. L’arête de l’angle porte une enseigne commerciale drapeau avec le logo des FPG. » (cote
2723).
126. La société Viollet, dans son mémoire en réponse au rapport, apporte le témoignage d’une famille pour un
proche décédé en 2002 qui fait apparaître qu’elle a dû aller chercher le code d’accès de la chambre funéraire
au bureau commercial d’OGF-PFG.
Les numéros de téléphone
127. Dans les pages blanches de l’annuaire du département du Rhône Édition 2000, le numéro de téléphone
de la chambre funéraire apparaît à la lettre « P » de Pompes funèbres générales - PFG. L’indication est ainsi
libellée :
« POMPES FUNÈBRES GÉNÉRALES (PFG)
Marbrerie-Déplacement à dom 24/24
26 r Égalité 04 78 20 10 88
Maison funéraire 04 78 20 99 41
POMPES FUNÈBRES GÉNÉRALES
26 r Égalité 04 78 20 10 88 » (cote 2663).
128. Les pages jaunes de l’annuaire de France Télécom Édition 2002 ne mentionnent pas l’existence d’une
chambre funéraire sur la commune de Saint-Priest. Cependant, OGF publie une page entière de publicité
présentant ses diverses prestations, au rang desquelles figure la maison funéraire.
c) À Vénissieux
L’organisation des locaux
129. La chambre funéraire de Vénissieux date de 1998. Elle se situe en face du nouveau cimetière
communal, 45 chemin de Feyzin. Le procès-verbal de visite de l’enquêteur qui s’est rendu sur place le 9
septembre 2003 montre que la chambre funéraire se situe exactement à l’arrière du local commercial des
PFG, lui-même séparé de la rue par un grand parc de stationnement. Le bâtiment est ainsi présenté (cotes
2726-2729) : « Le bâtiment dans lequel est construite la chambre funéraire est situé devant un important
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parking qui fait face au cimetière communal. La façade qui est visible de la place est celle du bâtiment
commercial à l’enseigne des Pompes Funèbres Générales. La partie consacrée à la chambre funéraire n’est
pas visible de la place, elle est placée derrière le local commercial et pour y accéder il faut passer un
portillon métallique fermé avec un digicode. L’accès au parking de la chambre funéraire est également fermé
aux heures d’ouverture. »
130. A l’entrée, si au-dessus du digicode une affiche indique que le code d’accès peut être obtenu par
l’entreprise de pompes funèbres de son choix, l’enquêteur a déclaré : « Le 9 septembre 2003, l’accès au
parking était cependant ouvert et nous y avons stationné. Nous avons voulu accéder directement à la
chambre funéraire mais celle-ci était fermée et nécessitait la connaissance d’un code d’ouverture. Nous
avons donc dû nous rendre au local commercial pour obtenir la possibilité de procéder à la visite des locaux.
»
131. Le saisissant a produit le témoignage d’une famille qui, à l’occasion du décès d’un proche en 2004, a
rencontré des difficultés pour obtenir l’ouverture du funérarium en début d’après-midi et n’a pas pu rester
sur place après 17 heures alors que l’heure de fermeture est fixée à 17 heures 30.
Les numéros de téléphone
132. Les numéros de téléphone des PFG sur Vénissieux sont présentés dans les annuaires pages blanches et
pages jaunes 2002 de la même façon que la commune de Saint-Priest.
3. LES RÔLES DE LA RÉGIE MUNICIPALE ET D’OGF-PFG DANS LES OPÉRATIONS
FUNÉRAIRES À LYON ET DANS SON AGGLOMÉRATION
a) Les chambres funéraires
133. La régie municipale gère la seule chambre funéraire de Lyon et OGF- PFG gère la plupart des chambres
funéraires de la banlieue lyonnaise, notamment celles de Vénissieux et de Saint-Priest mais aussi celles de
Caluire-et-Cuire, Écully, Neuville-sur-Saône et Saint-Genis-Laval. Malgré la volonté affichée depuis 1998
d’OGF-PFG de créer une chambre funéraire à Lyon, ce projet n’a jamais abouti. Cette société a expliqué
cette situation par des raisons administratives liées aux contraintes de l’enquête « commodo et in commodo
» et aux exigences de la ville en matière de parking.
134. Il a été également constaté que l’hôpital Saint-Joseph Saint Luc ne respectait pas les dispositions
réglementaires lui imposant d’avoir une chambre mortuaire et de ce fait se reportait sur la chambre
funéraire du boulevard Berthelot à Lyon. Les services funéraires de la ville de Lyon n’ignoraient pas cet état
de fait et ne sont apparemment pas intervenus pour faire appliquer l’article L. 2223-39 du CGCT qui impose
l’existence d’une telle installation. Une lettre du directeur général de ce centre hospitalier du 21 décembre
1998 (cotes 2246-2247) montre que ce sont les services funéraires municipaux qui ont proposé à cet
établissement comme à la clinique mutualiste d’utiliser les services de la CGPF.
b) L’attribution à la CGPF du marché du transport des corps avant mise en bière
135. La société CGPF a finalement été intégrée dans le groupe OGF-PFG. Le marché du transport vers le
funérarium de la ville de Lyon pour le compte de la régie municipale lui a été attribué pour une longue
période par la ville de Lyon. Il apparaît que la régie, en refusant la clé de cette installation aux autres
opérateurs que la CGPF, interdisait en fait aux familles qui devaient faire transporter un corps à un moment
où la chambre funéraire était fermée, à savoir la nuit ou les samedi et dimanche après-midi, de choisir un
autre opérateur que la CGPF.
c) La stabilité des parts de marché
136. Il ressort du tableau présenté au paragraphe 36 que la part de marché des différents opérateurs sur la
ville de Lyon ne connaît pas d’évolution très notable entre 1999 et 2002.
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D. LES GRIEFS NOTIFIÉS
137. Au vu de l’ensemble des éléments présentés ci-dessus, les griefs suivants ont été notifiés sur le
fondement des articles L. 420-1 et L. 420-2 du Code de commerce :
«
- (…) à la régie municipale des pompes funèbres de la ville de Lyon d’avoir abusé de sa position de
gestionnaire exclusif de la chambre funéraire municipale et d’organisateur du service public funéraire
municipal pour conclure entre 1994 et 2002, avec les hôpitaux qui n’avaient pas de chambre mortuaire
mais aussi avec ceux d’entre eux qui devaient légalement en posséder, des conventions ou accords
destinés à faire transférer de manière systématique et dans des délais très brefs les corps des
personnes décédées en leur sein. Assortie d’une clause de gratuité du transport et des trois premiers
jours de séjour dans la chambre funéraire appliquée aux familles alors même que ces prestations
n’étaient pas à la charge des établissements hospitaliers, cette pratique a eu pour objet et pour effet
d’empêcher les familles de disposer du temps nécessaire à l’organisation des obsèques et de dissuader
leur choix pour un autre opérateur de transport et pour une autre chambre funéraire. Elle a permis
d’autre part à la régie d’organiser les ¾ des obsèques des personnes ainsi transportées dans sa
chambre funéraire (grief n° 1).
- (…) à la régie municipale des pompes funèbres de s’être concertée entre 1994 et 2002 avec l’hôpital
Saint-Joseph Saint-Luc et les cliniques mutualistes Eugène André et la Sauvegarde pour passer des
accords ou des conventions et mettre en place pour les appliquer des procédures internes de gestion
des décès et d’information des familles qui ont systématiquement privilégié le funérarium municipal
pour le transfert des défunts et empêché aussi bien sur le marché du transport que sur celui de
l’organisation des funérailles dans la ville de Lyon le libre choix de ces familles pour un opérateur
concurrent (grief n° 2).
- (…) à la régie municipale d’avoir, sur le marché des pompes funèbres à Lyon, abusé entre 1997 et
2003 de sa position de gestionnaire exclusif de la seule chambre funéraire existant à Lyon, d’une part,
en donnant les clés de cette installation au seul opérateur choisi par elle et en la refusant aux autres
opérateurs concurrents ; d’autre part, en organisant des conditions d’accueil du public à l’extérieur et à
l’intérieur des locaux et en diffusant, notamment dans la presse et dans les annuaires téléphoniques,
des informations propres à créer une confusion entre son activité commerciale, son activité de
gestionnaire de la chambre funéraire et ses autres activités de service public. Ces pratiques ont eu pour
objet ou pour effet d’écarter des entreprises de pompes funèbres de l’organisation des obsèques des
personnes transportées dans la chambre funéraire et de rendre plus difficile pour les familles le choix
d’un opérateur concurrent (grief n° 3).
- (…) à la société OGF-PFG d’avoir, sur le marché des pompes funèbres de Vénissieux, exploité au cours
des années 1999, 2000, 2001, 2002 et 2003 de façon abusive sa position dominante sur le marché du
transport des corps avant mise en bière et de gestionnaire exclusif de la chambre funéraire d’une part
en signant avec les établissements de santé ne disposant pas de morgue des conventions contraires à
l’article R. 2223-79 du code général des collectivités territoriales qui les incitaient financièrement à faire
transporter le plus rapidement possible les corps des défunts vers le funérarium détenu par la société,
et d’autre part en conduisant les établissements ayant signé avec elle ces conventions à donner aux
familles des informations contraires à leur devoir de neutralité. Cette pratique a eu pour objet et pour
effet de capter la demande des familles endeuillées sur le marché des obsèques (grief n° 4).
- (…) à la société OGF-PFG d’avoir, sur le marché des pompes funèbres de Saint-Priest, exploité au
cours des années 2000, 2001, 2002 et 2003 de façon abusive sa position dominante, d’une part, en
signant avec les établissements de santé ne disposant pas de morgue des conventions contraires à
l’article R. 2223-79 du code général des collectivités territoriales qui les incitaient financièrement à faire
transporter le plus rapidement possible les corps des défunts vers le funérarium détenu par la société,
en proposant parfois la gratuité des trois premiers jours de séjour dans ces installations et, d’autre part,
en conduisant les établissements ayant signé avec elle ces conventions à donner aux familles des
informations contraires à leur devoir de neutralité. Cette pratique a eu pour objet et pour effet de
capter la demande des familles endeuillées sur le marché des obsèques (grief n° 5).
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- (…) à la société OGF-PFG d’avoir, sur le marché des pompes funèbres de Vénissieux, abusé au moins
pour les années 2000 à 2003 de sa position de gestionnaire exclusif de la seule chambre funéraire de la
commune et de sa position dominante sur le marché aval du transport des corps avant mise en bière en
mettant en place, d’une part, des informations sur l’annuaire téléphonique, et d’autre part, une
présentation des locaux susceptibles de créer une confusion entre l’activité de la chambre funéraire
municipale et de rendre ainsi plus difficile le choix des familles pour un opérateur concurrent (grief n°
6).
- (…) à la société OGF-PFG d’avoir, sur le marché des pompes funèbres de Saint-Priest, abusé au moins
pour les années 2000 à 2003 de sa position de gestionnaire exclusif de la seule chambre funéraire de la
commune, en mettant notamment en place des informations sur l’annuaire téléphonique susceptibles de
créer une confusion entre l’activité de la chambre funéraire municipale et son activité de prestataire de
service en matière d’organisation des funérailles et de rendre ainsi plus difficile le choix des familles
pour un opérateur concurrent (grief n° 7).
- (…) à la société OGF-PFG, d’une part, et à la polyclinique Pasteur, la clinique du Grand Large, la
clinique de La Roseraie, la clinique des Minguettes et le centre hospitalier du Vinatier d’autre part, de
s’être entendus entre 1999 et 2003 pour favoriser la société PFG sur le marché du transport des corps
des personnes décédées dans ces établissements vers la chambre funéraire dont elle est gestionnaire,
privant les familles des défunts de leur liberté de choix de l’opérateur de pompes funèbres et
permettant ainsi à la société PFG de capter la clientèle sur le marché de l’organisation des obsèques
(grief n° 8).
- (…) à la régie municipale des pompes funèbres et à la société OGF-PFG de s’être concertées entre
1997 et 2003 pour organiser le transport et l’accueil dans leurs propres chambres funéraires des
personnes décédées dans les établissements de santé de Lyon et de son agglomération afin d’écarter la
concurrence des autres entreprises de pompes funèbres sur le marché de l’organisation des funérailles
à Lyon et dans son agglomération et ainsi de maintenir le partage du marché sur la base de leur
position dominante respective, d’une part, à Lyon pour la régie municipale et, d’autre part, dans
l’agglomération lyonnaise pour les PFG (grief n° 9). »
II. Discussion
A. SUR LA PRESCRIPTION
138. Les pompes funèbres intercommunales de l’agglomération lyonnaise, qui ont répondu pour l’ancienne
régie municipale, soutiennent que les faits décrits dans la notification de griefs, qui trouvent leur origine
dans des conventions antérieures au 26 juillet 1999, soit plus de trois ans avant la saisine du 26 juillet 2002,
sont prescrits. En outre, elles font valoir que plus de trois ans se sont écoulés entre la remise du rapport
d’enquête en février 2004 et la notification des griefs en avril 2007, ce qui constituerait une autre cause de
prescription.
139. Ces arguments doivent être écartés. D’abord, les pratiques en cause sont des pratiques continues
visées par les griefs jusqu’en 2002 ou 2003. Or, la détermination du point de départ de l’écoulement du délai
de prescription de pratiques anticoncurrentielles par rapport aux faits dépend de la manière dont ceux-ci se
sont déroulés dans le temps, ainsi que l’a rappelé de manière détaillée le Conseil dans la décision n° 07-D-15
du 9 mai 2007 relative à des pratiques concernant les marchés publics relatifs aux lycées d’Île-de-France. La
pratique à caractère instantané est réalisée en un trait de temps, dès la commission des faits qui la
constituent. Le point de départ de la prescription se situe dans un tel cas le lendemain du jour où ces faits
ont été commis. La pratique revêt au contraire un caractère continu lorsque l'état délictuel se prolonge dans
le temps par la réitération constante ou la persistance de la volonté coupable de l'auteur après l'acte initial.
Il s'agit de pratiques caractérisées par la continuité de la volonté anticoncurrentielle sans qu'un acte matériel
ait nécessairement à renouveler la manifestation dans le temps, de telle sorte que le calcul du point de
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départ de la prescription ne commencera qu'à compter de la cessation des pratiques (rapport d'activité pour
2002, p. 91).
140. Dans plusieurs décisions, le Conseil a appliqué cette règle, qui permet de retenir des faits antérieurs de
plus de trois ou de cinq ans au premier acte tendant à leur recherche, à leur constatation ou à leur sanction
lorsque la pratique en question est continue, puisque le délai de prescription ne commence alors à courir
que lorsque la situation a pris fin : par exemple, des courriers faisant état du « maintien de la charte de
ère
monte » donnent à la pratique de mise en œuvre de la charte définie dans un courrier
antérieur un caractère continu (décision n° 03-D-40 ) ou des pratiques discriminatoires consistant en une
interdiction faite à des médecins d'accéder à un scanner privé, adoptée à l'issue d'une réunion organisée
sous l'égide de l'ordre des médecins et poursuivie les années suivantes revêtent également un caractère
continu (décision n° 06-D-36 ; sur le point de départ de la prescription voir également 02-D-63 , 05-D-13 ).
Dans la décision dite « Pont de Normandie » du 29 novembre 1995 (95-D-76 ), le Conseil a pris la position
suivante : « Considérant en second lieu que, contrairement à ce qu'avancent les sociétés Dumez et GTM respect de la 1
Entrepose, l'accord qu'elles ont conclu le 25 juin 1986 peut être examiné par le Conseil puisqu'il est resté en
vigueur et a conservé, de façon continue, son objet et ses effets, actuels et potentiels, jusqu'à la conclusion
d'un second accord, le 10 mai 1989, intervenue pendant la période non prescrite à la suite d'un
accroissement de la participation de la société Dumez dans le capital de la société GTM - Entrepose … ».
Cette analyse selon laquelle un accord pouvait être sanctionné bien qu'il soit intervenu plus de trois ans
avant le 28 novembre 1989, date du premier acte interrompant la prescription (date de la première
ordonnance de visites et saisies) n'a pas été remise en cause par les juridictions de contrôle (cour d'appel de
Paris, 6 mai 1997 et 14 janvier 2003 ; Cour de cassation, 5 octobre 1999 et 13 juillet 2004).
141. En l’espèce, le premier acte tendant à la recherche, à la constatation ou à la sanction des faits objet
des griefs a été le dépôt de la saisine des Pompes funèbres Viollet le 26 juillet 2002. Les faits décrits dans la
notification de griefs - qui se rattachent à une pratique continue - n’étaient pas atteints par la prescription,
qui à l’époque était de 3 ans, à cette date.
142. Ensuite, ainsi que l’a indiqué le Conseil notamment dans sa décision n° 06-D-08 du 24 mars 2006
relative à des pratiques mises en œuvre dans le cadre de marchés publics de construction de trois collèges
dans le département de l'Hérault (points 38 à 45) : « l’article 6 de l’ordonnance n° 2004-1173 du 4
novembre 2004 a porté de trois à cinq ans le délai de prescription prévu à l’article L. 462-7 du Code de
commerce. S’agissant d’un texte de procédure et non d’une loi instituant une peine plus sévère, il est
applicable immédiatement, y compris à la poursuite et à la sanction des faits antérieurs à son entrée en
vigueur, sous la seule réserve qu’il ne puisse permettre de poursuivre ou de sanctionner des faits pour
lesquels la prescription a été définitivement acquise en vertu du texte applicable précédemment. »
143. La cour d’appel de Paris, dans un arrêt Toffolutti du 12 décembre 2006, a également jugé : «
Considérant que, lorsque la prescription n'est pas acquise, les lois relatives à la prescription sont applicables
immédiatement aux pratiques commises avant leur entrée en vigueur ; Considérant qu'en l'espèce, il est
constant que le dernier acte tendant à la recherche, à la constatation ou à la sanction des pratiques
dénoncées par Toffolutti, qui en l'état, n'ont pas donné lieu à une notification de griefs, est constitué par le «
soit transmis » du juge d'instruction du tribunal de grande instance de Rouen en date du 7 juillet 2002 et
que la prescription triennale qui résultait des dispositions de l'article L. 462-7 du Code de commerce dans sa
rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2004-1173 du 4 novembre 2004 n'était pas acquise le 6 novembre
2004, date d'entrée en vigueur de ce texte ; Considérant que la requérante est dès lors fondée à soutenir
que les faits dénoncés au Conseil, désormais soumis à une prescription de cinq ans à compter du 7 juillet
2002, n’étaient par voie de conséquence pas prescrits à la date du 7 juillet 2005. »
144. En l’espèce, lorsque l’ordonnance n° 2004-1173 du 4 novembre 2004 est entrée en vigueur, la
prescription de trois ans n’était pas acquise au regard de la date de dépôt du rapport d’enquête de février
2004 et c’est donc le délai de prescription de cinq ans qui s’est alors appliqué. Or, celui-ci n’était pas écoulé
en avril 2007 lorsque les griefs ont été notifiés. Les faits ne sont donc pas prescrits et le Conseil peut les
examiner.
B. SUR LES MARCHÉS PERTINENTS ET LA POSITION DES OPÉRATEURS EN CAUSE
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145. Ainsi que le Conseil l’a estimé dans de nombreuses décisions (voir en particulier les décisions 93-D-14 ,
97-D-04 , 03-D-33 , 04-D-70 ), il existe en ce qui concerne les marchés de produits de services funéraires,
un marché général des services funéraires proposés aux familles. Par exemple, dans la décision n° 07-D-04
relative à des pratiques mises en œuvre à Pontivy et dans les communes environnantes, le Conseil a à cet
égard indiqué : « Considérant (…), que les prestations funéraires comportent les prestations du service
intérieur, celles qui relèvent du service intérieur dans les édifices religieux et enfin des prestations dites
libres ; qu’eu égard au comportement des familles et aux pratiques des opérateurs, l’ensemble des produits
et services funéraires est indissociable ; qu’ainsi, les services assurés dans les chambres funéraires
appartiennent au même marché que celui sur lequel sont proposées les autres prestations de pompes
funèbres. » Cette appréciation a été confirmée par la cour d’appel de Paris dans un arrêt du 27 octobre
1998, société Groupement d’entreprises de services et autres (BOCCRF du 20 novembre 1998, p. 647).
146. Toutefois, cette définition d’un marché, qu’il n’y a pas lieu de remettre en cause, ne vaut que lorsque la
demande est exprimée par les familles et que celles-ci maîtrisent l’ensemble des opérations funéraires à la
suite du décès. D’autres caractéristiques de la demande peuvent conduire à identifier d’autres marchés où se
rencontrent des demandes et des offres différentes. La présente affaire met à cet égard en évidence deux
marchés de produits différents du marché général des services funéraires proposés aux familles.
147. D’une part, il existe celui qui répond à la demande des établissements de soins ou de séjour ne
disposant pas de chambre mortuaire et qui souhaitent organiser le départ des corps des personnes décédées
en leur sein vers une chambre funéraire lorsque les familles ne prennent pas elles-mêmes à bref délai en
mains les opérations funéraires. Sur ce marché l’offre, qui peut juridiquement prendre plusieurs formes et
faire le cas échéant intervenir plus d’un opérateur, allie une prestation de transport du corps avant mise en
bière et son séjour en chambre funéraire avant d’autres opérations.
148. D’autre part, peut être identifié un marché qui correspond à la demande d’organisation d’obsèques de
la part des familles pour les défunts qui ont été transportés en chambre funéraire dans les conditions
caractérisant le marché précédemment évoqué. Un tel marché a déjà en substance été identifié dans la
décision du Conseil n° 04-D-37 du 24 juillet 2004 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur
des pompes funèbres de Saint-Germain-en-Laye. L’existence de ce marché particulier n’est pas à exclure car
les conditions de la demande des familles pour l’organisation des funérailles dans ces circonstances sont le
plus souvent nettement différentes de celles dans lesquelles cette demande s’exprime lorsque le défunt s’est
éteint à son domicile ou lorsque la famille a pris elle-même en mains à bref délai après le décès les
opérations funéraires quand celui-ci est intervenu dans un établissement de soins ou de séjour. La
concurrence entre les opérateurs est en effet généralement beaucoup moins intense vis-à-vis des familles
lorsque le corps a déjà été transporté dans une chambre funéraire gérée par un opérateur sur demande d’un
tiers que lorsque la famille exerce son choix dès le décès.
149. Cette situation se vérifie en l’espèce au vu des statistiques reproduites précédemment qui permettent
de constater qu’environ 70 % des obsèques des personnes dont le corps a été transporté au funérarium de
la ville de Lyon ont été organisées par la régie municipale au cours des années considérées alors que la part
de marché de celle-ci est seulement de l’ordre de 35 à 40 % dans l’organisation des obsèques de l’ensemble
des personnes décédées à Lyon. De même, à Vénissieux, OGF-PFG assure environ 90 % des obsèques des
personnes dont le corps a été transporté au funérarium situé dans cette commune, alors que sa part de
marché est moindre de près de 10 % en ce qui concerne l’organisation des obsèques de l’ensemble des
personnes décédées habitant à Vénissieux, bien qu’elle soit le seul opérateur à y être implanté. En 1999,
l’écart était proche de 17 %. Les éléments figurant au dossier sont moins précis en ce qui concerne SaintPriest, mais alors que OGF-PFG détient entre 65 % et 48 % selon les années examinées de part de marché
en ce qui concerne l’organisation des obsèques de l’ensemble des personnes décédées habitant à SaintPriest, cette entreprise n’a pas indiqué qu’elle assurait une part non majeure des convois funéraires au
départ du funérarium de cette ville, qu’elle gère, ce qui serait étonnant au vu des exemples précédents.
150. Or, ainsi que l’a rappelé le Tribunal de première instance des Communautés européennes dans l’arrêt
du 12 juin 1997, Tiercé Ladbroke/Commission (T-504/93, Rec. p. II-923, point 81) :
« Aux fins de l’application de l’article 86 du traité, le marché du produit ou du service en cause englobe les
produits ou les services qui sont substituables ou suffisamment interchangeables avec celui-ci, en fonction
non seulement de leurs caractéristiques objectives, en vertu desquelles ils sont particulièrement aptes à
satisfaire les besoins constants des consommateurs, mais également en fonction des conditions de
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concurrence et de la structure de la demande et de l’offre sur le marché en cause. » (voir aussi l’arrêt de la
Cour de justice des Communautés européennes du 14 novembre 1996, Tetra Pack/Commission, C-333/94 P,
Rec. p. I-5951, point 13).
C’est cette analyse qui a conduit le Conseil à retenir, dans les avis n° 96-A-09 et 98-A-09 , s’agissant de
boissons, des marchés différents selon le circuit de distribution, dans les commerces alimentaires ou dans les
cafés, hôtels, restaurants et autres collectivités.
151. En ce qui concerne la dimension géographique des marchés de produits identifiés précédemment, s’agissant
d’abord des marchés répondant à la demande des établissements de soins ou de séjour ne disposant pas de
chambre mortuaire, il y a lieu de constater que les établissements situés à Lyon, à savoir le centre
hospitalier Saint-Joseph Saint Luc, la clinique Eugène André et la clinique de la Sauvegarde ont tous recouru
aux services du funérarium de la régie municipale de Lyon pour accueillir les corps des personnes décédées
en leur sein dont les familles ne prenaient pas elles-mêmes à bref délai en mains les opérations funéraires.
Ce choix, qui impliquait aussi systématiquement le recours au transporteur choisi par la régie, a été dicté par
le concours de raisons de proximité et de raisons administratives, la réglementation interdisant le transport
des corps avant mise en bière hors de la commune de décès sans autorisation du maire, c’est-à-dire
l’interdisant en pratique lorsque les services administratifs municipaux sont fermés, en particulier de nuit, en
fin de semaine et les jours fériés. Aucun autre opérateur disposant d’une chambre funéraire n’a contracté
avec les établissements de santé ou de soins de Lyon. Il n’y a d’ailleurs pas d’autre chambre funéraire à
Lyon. De plus, il a été vu aux paragraphes 47, 54 et 62 que l’hôpital Saint-Joseph Saint Luc, les cliniques
Eugène André et la Sauvegarde ont pris des dispositions conduisant la chambre funéraire à recevoir, ainsi
qu’indiqué au paragraphe 37, plus de 90 % des personnes décédées en leur sein. Il en ressort d’une part
qu’il existe un marché géographique spécifique à Lyon pour le marché de services en question et d’autre
part que la régie municipale y est en position dominante.
152. En ce qui concerne l’offre aux établissements de soins ou de séjour des funérarium de Saint-Priest et de
Vénissieux, gérés par OGF-PFG, le ou les marchés géographiques concernés semblent plus larges que
l’étendue de ces deux communes. En effet, la clinique du Grand Large située à Decines-Charpieu utilise le
funérarium de Saint-Priest et le centre hospitalier Le Vinatier, situé à Bron, utilise la chambre funéraire de
Vénissieux, après avoir sollicité différents opérateurs situés à Bron ou ailleurs. Le dossier révèle que le centre
Le Vinatier utilise aussi la chambre funéraire de Bron lorsque les raisons administratives mentionnées
précédemment ne permettent pas le transfert du corps à Vénissieux. Compte tenu de l’analyse suivie ciaprès par le Conseil, il n’est cependant pas nécessaire de se prononcer sur la dimension géographique du ou
des marchés sur lesquels interviennent les prestations des funérarium de Vénissieux et Saint-Priest au profit
des établissements de soins ou de séjour.
Bron
Caluire-et-Cuire
Craponne
Décines-Charpieu
Limonest
Lyon 69003
Lyon 69004
Lyon 69005
Lyon 69007
Lyon 69008
Meyzieu
Neuville/Saône
Pierre Bénite
PFG
ROC’ECLERC
PFG
PFG
PFG
PFG
PF Rozier
PF Municipales
PFG
Roc’Eclerc
PFG
PFG
PF Rozier
PF Municipales
PFG
PF Viollet
PFG
PFG
Roc’Eclerc
5, avenue du Doyen Lépine
52, avenue Franklin Roosevelt
71, rue F. Peissel
22, avenue Edouard Millaud
87, avenue Jean Jaurès
6, place du Griffon
153, cours Albert Thomas
61, rue Philippe de Lassalle
1, rue Victor Fort
89/91, Grande rue de la Croix Rousse
9, avenue Barthélémy Buyer
13, avenue Jean Jaurès
182, avenue Berthelot
177, avenue Berthelot
160, cours Albert Thomas
23, rue de la République
27, rue de la République
3, quai Armand Barbès
14, place Jean Jaurès
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Rillieux-la-Pape
Sainte-Foy-lès-Lyon
Saint-Genis-Laval
Saint-Priest
Tassin-la-Demi-Lune
Vénissieux
Villeurbasse
PF Pinault
PFG
PFG
PFG
PF Viollet
PFG
Entreprise Geay-Giroud
PFG
PF Municipales
PF du Rhône
PFG
PF Villeurbannaises
2, rue Général Brosset
37, chemin de Montray
107, rue Jules Guesde
26, rue de l’Égalité
26, rue Henri Maréchal
14, avenue de la République
21, avenue du nouveau Cimetière
45, chemin de Feyzin
15, rue du Cimetière
61, rue Racine
22, rue Gabriel Péri
18/22, rue du Cimetière
445 000 habitants
2000
2001
2002
AU 30 NOV-03
Données issues du service de l'état civil
4 944
4 851
4 966
4 730
Lyon 1er arrondissement
226
153
130
62
Lyon 2ème arrondissement
182
178
186
139
Lyon 3ème arrondissement
1 630
1 649
1 655
1 587
Lyon 4ème arrondissement
534
493
522
518
Lyon 5ème arrondissement
476
472
515
484
Lyon 6ème arrondissement
338
277
297
262
Lyon 7ème arrondissement
530
595
586
643
Lyon 8ème arrondissement
742
742
738
712
Lyon 10ème arrondissement
286
292
337
323
Décès à Lyon de résidents Lyonnais
2 525
2 458
2 523
2 555
Décès à Lyon de résidents extérieurs
2 419
2 393
2 443
2 175
56 400 habitants
1999
2000
2001
2002
Décès enregistrés
399
352
385
375
Décès sur la commune
200
127
165
161
Décès au domicile
46 %
54 %
48 %
44 %
Décès à la clinique
50 %
32 %
41 %
45 %
dont
ÉTABLISSEMENTS
1999
2000
2001
2002
TOTAL
Le Solidage
13
7
3
9
32
La Roseraie
31
5
15
16
67
Les Minguettes
52
31
52
59
194
H.E.H.
13
5
5
5
28
Neuro-Cardio
3
3
2
1
9
Le Vinatier
17
11
12
11
51
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114
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41 000 habitants
1999
2000
2001
2002
Décès enregistrés
236
240
236
284
Décès sur la commune
102
108
100
107
Décès hors commune
134
132
136
177
Vénissieux
1999
2000
2001
2002
200
127
165
161
Nombre d’admissions à la chambre funéraire
132 (66 %)
110 (86,6 %)
125 (75,7 %)
129 (80,1 %)
Saint-Priest
Décès enregistrés sur la commune
Nombre d’admissions à la chambre funéraire
1999
102
42 (41,1 %)
2000
108
49 (45,3 %)
Décès enregistrés sur la commune
Part des opérateurs
1999
2001
100
36 (36 %)
2000
2002
107
43 (40,1 %)
2001
2002
PF municipales de
Lyon
2 013
22,37 %
1
913
21,256
%
1
859
20,66
%
1
954
21,82
%
PFG (Courly)
3 574
39,71 %
3
555
39,50 %
3
711
41,23
%
3
641
40,46
%
Roc’Eclerc (Courly)
1 033
11,48 %
934
10,38 %
1
033
11,48
%
1
129
12,54
%
PF Rozier
603
6,70 %
665
7,39 %
667
7,41 %
629
6,99 %
PF du Rhône
430
4,78 %
438
4,87 %
409
4,54 %
396
4,40 %
PF Pinault
437
4,86 %
511
5,68 %
492
5,47 %
406
4,51 %
PF Viollet Meyzieu
Établissements rachetés en
2000
PF Viollet Saint-Priest
Total
8 090
Année
PFM Lyon
PFG
Roc’Eclerc
Rozier
Rhône
Musulmanes
Viollet
PFM Villeurbanne
Base
décès
nombre
89,89 %
mars 98 à décembre
1998
34,53
25,59
7,52
9,34
4,75
1,01
0,38
3,29
4 947
163
1,81 %
151
1,67 %
92
0,47 %
69
0,77 %
8
016
89,07 %
8
376
93,07
%
1999
2000
2001
2002
38,42
24,20
7,50
8,23
4,03
0,29
0,65
2,84
37,27
24,53
7,40
8,57
4,48
0,56
0,80
2,79
36,35
24,91
7,24
8,21
3,93
0,82
1,13
2,46
37,83
24,09
8,59
7,78
3,14
1,83
1,35
3,24
5 239
5 133
5 114
5 192
Transferts de corps avant mise en bière effectués par la C.G.P.F.
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8
385
93,17
%
2003 (au 19
septembre)
34,30
27,20
8,76
7,60
3,15
1,96
0,81
3,55
2000
3 974
2001
2002
115
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De la clinique Saint-Joseph & Saint-Luc vers funérarium de Lyon
soit en % des
De la clinique Eugène André vers funérarium de Lyon
soit en % des
De la clinique de la Sauvegarde vers funérarium de Lyon
soit en % des
De l’hôpital du Vinatier vers funérarium de Vénissieux
soit en % des
De la clinique des Minguettes vers funérarium de Vénissieux
soit en % des
De la clinique de la Roseraie vers funérarium de Vénissieux
soit en % des
De la clinique Pasteur vers funérarium de Saint-Priest
soit en % des
Années
Nombre d’admissions traitées
Saint-Priest
Décès enregistrés
PFG Saint-Priest
Part de marché
PF Viollet
Part de marché
Part OGF en %
PFG Vénissieux
Autres PFG
Total OGF
décès
décès
décès
décès
décès
1999
1 577
2000
1 563
2001
1 705
2002
1 881
895
207
32
33
39
19
1 135
258
51
57
42
34
1 114
257
64
51
53
24
1 157
293
61
71
55
68
1 302
309
85
74
55
57
1999
399
290
73 %
1999
236
154
65 %
inconnu
inconnu
1999
80,83
8,64
89,47
décès
1998
1 221
Régie municipale
PFG
Rozier
Roc’Eclerc
PF Rhône
Autres
Vénissieux
Décès enregistrés
Obsèques réalisées
Part de marché
décès
2000
88,80
2,80
91,60
2000
352
298
85 %
2001
385
316
82 %
2000
240
142
59 %
inconnu
inconnu
2001
83,82
8,46
92,28
428
98 %
Pas de données
Pas de données
Pas de données
31
72 %
6
100 %
459
95 %
102
77 %
70
95 %
51
63 %
52
100 %
14
100 %
Pas d’accord
420
97 %
143
91 %
102
97 %
46
79 %
59
100 %
22
86 %
22
100 %
2002
375
309
82 %
2001
236
125
53 %
42
18 %
2002
284
137
48 %
69
24 %
2002
83,07
6,69
89,76
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(Armoiries de la
ville de Lyon)
Centre funéraire
Accueil
Salons funéraires
Salle de cérémonies
Accueil
Pompes funèbres
Cimetière - Concession
Réglementation
Parkings
Accueil
Pompes funèbres
Cimetière - Concession
Réglementation
Accueil
Salons funéraires
Salle de cérémonies
Centre funéraire
Accueil
Entrée parking
Pompes funèbres
Cimetière - Concession
Réglementation
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Accueil des salons funéraires
Accueil des services administratifs - Funérailles - Concessions
153. S’agissant ensuite des marchés des obsèques des personnes transportées dans une chambre funéraire
à l’initiative des établissements de santé ou de soins, l’offre peut être plus ou moins étendue sur le plan
géographique selon les lieux de domicile des défunts et il n’est pas exclu qu’une même chambre funéraire «
desserve » des marchés géographiques distincts, ainsi que l’a illustré la situation ayant donné lieu à la
décision n° 04-D-70, précitée, relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des pompes
funèbres de la région de Saint-Germain-en-Laye, confirmée par l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 13
septembre 2005, n° 2005/03709.
154. Néanmoins, en l’espèce, les conditions de confrontation de l’offre et de la demande sont suffisamment
distinguées selon la chambre funéraire pour qu’en tout état de cause les marchés pertinents soient
distingués selon que les prestations d’obsèques sont apportées aux personnes décédées dont le corps a été
transporté à la chambre funéraire de la ville de Lyon ou bien aux personnes dont le corps a été transporté à
celles de Vénissieux ou Saint-Priest.
155. Pour ce qui est de la chambre funéraire de Lyon, dès lors que 70 % des obsèques des personnes qui y
ont été transportées sont organisés par la régie municipale, il y a lieu de considérer que celle-ci détient une
position dominante, et ce, qu’il existe un marché géographique limité à la ville de Lyon, à côté d’un ou
plusieurs autres marchés géographiques, ou un seul marché géographique de l’agglomération, « desservi »
par la chambre funéraire.
156. Pour ce qui est des chambres funéraires de Vénissieux et Saint-Priest, il est également clair qu’en
organisant 90 % des convois à partir de celle de Vénissieux et également une proportion très importante à
partir de celle de Saint-Priest, la société OGF-PFG détient une position dominante en ce qui concerne les
obsèques des personnes transportées dans ces chambres funéraires, quels que soient, là aussi, l’étendue et
le nombre des marchés géographiques « desservis » par ces chambres funéraires.
157. Il résulte de ce qui précède que tant la régie municipale que la société OGF-PFG disposent de positions
dominantes sur l’un ou l’autre des marchés concernés par la présente affaire.
C. SUR LES PRATIQUES ALLÉGUÉES
158. La discussion portera en premier lieu sur l’ensemble des griefs formulés à l’encontre de la régie
municipale des pompes funèbres, en deuxième lieu sur des griefs formulés à l’encontre d’OGF-PFG et en
troisième lieu sur le grief d’entente entre la régie municipale et OGF-PFG tendant à une répartition entre
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118
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elles des marchés de Lyon et de son agglomération.
159. Il convient de rappeler à titre liminaire qu’une entreprise en position dominante sur un marché peut se
voir reprocher un abus dont les effets affectent d’autres marchés, dès lors que son comportement a un lien
de causalité avec sa position dominante et que le marché sur lequel celle-ci est détenue et ceux sur lesquels
l’abus déploie ses effets sont suffisamment connexes (voir notamment les arrêts de la Cour de justice des
Communautés européennes du 6 mars 1974 Commercial Solvents/Commission, 6/73 et 7/73, Rec. p. 223,
point 22 et du 3 octobre 1985, CBEM, 311/84, Rec. p. 3261, point 26, l’arrêt du Tribunal de première
instance des Communautés européennes du 17 février 2003 British Airways/Commission, T-219/99, Rec. p.
II-5917, points 127, 130 et 132, et l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 22 février 2005, JC Decaux, rendu
sur le recours contre la décision du Conseil de la concurrence n° 04-D-32, BOCCRF 2005-06). En l’occurrence
les griefs d’abus de position dominante notifiés à la régie municipale de la ville de Lyon et à OGF-PFG visent
des effets tant sur le marché général des prestations funéraires proposées aux familles que sur les marchés
particuliers des obsèques des personnes dont le corps a été transporté à la chambre funéraire de Lyon ou à
celles de Vénissieux et de Saint-Priest à la demande des établissements de soins ou de séjour. Des positions
dominantes des opérateurs de pompes funèbres précités ont été identifiées soit sur ces derniers marchés,
soit sur ceux répondant à la demande des établissements de soins ou de séjour ne disposant pas de
chambre mortuaire de services de transfert en chambre funéraire. Ces différents marchés ont tous un lien
de connexité étroit, soit parce qu’ils sont en amont ou en aval les uns des autres, soit parce qu’ils
concernent des prestations semblables, à défaut d’être complètement substituables.
1. SUR LES PRATIQUES REPROCHÉES
ÉTABLISSEMENTS DE SOINS DE LYON
À
LA
RÉGIE
MUNICIPALE
ET
À
DES
a) Sur les accords avec plusieurs établissements de soins (griefs n ° 1 et 2)
160. En substance, il a été fait grief à la régie municipale d’avoir conclu des conventions ou des accords
informels avec l’hôpital Saint Joseph-Saint Luc ainsi qu’avec la clinique Eugène André et la clinique de la
Sauvegarde visant à favoriser le transfert systématique des personnes décédées dans ces établissements à
la chambre funéraire de la ville de Lyon. Cette pratique aurait eu pour objet et pour effet d’inciter les
établissements de soins à dissuader les familles de choisir tout autre opérateur funéraire que la régie
municipale et aurait emprunté des modalités telles que le non-respect du délai réglementaire de
conservation des corps dans l’établissement lorsque la famille ne peut être contactée ou l’incitation
financière à ce que celle-ci laisse l’établissement faire transférer le corps à cette chambre funéraire. Ces
pratiques traduiraient aussi bien des ententes anticoncurrentielles entre la régie et les établissements de
soins concernés, contraires à l’article L. 420-1 du Code de commerce, qu’un abus de position dominante de
la régie contraire à l’article L. 420-2 de ce code.
161. Toutefois, il y a lieu de relever tout d’abord qu’il est légitime que les établissements de soins ou de
séjour ne disposant pas de chambre mortuaire s’assurent qu’une chambre funéraire sera en mesure
d’accueillir les corps des personnes décédées en leur sein lorsque les familles n’auront pas elles-mêmes fait
transporter les défunts en temps utile. Bien entendu, les établissements de soins ou de séjour sont dans ce
contexte soumis à la réglementation en la matière, notamment en ce qui concerne le respect de différents
délais. La signature de conventions écrites ou la conclusion d’accords informels entre de tels établissements
et un ou plusieurs gestionnaires de chambres funéraires ne sont donc pas critiquables dans leur principe au
regard des règles de concurrence.
162. Ensuite, le seul document figurant au dossier qui peut être considéré comme une convention écrite
entre la régie municipale et un établissement de soins est le « règlement d’admission » envoyé au Centre
hospitalier Saint Joseph-Saint Luc (paragraphes 47 et suiv.). Ce document ne contient en lui-même aucune
disposition anticoncurrentielle, ni d’ailleurs aucune disposition contraire à la réglementation. Il expose les
conditions d’accueil des corps au centre funéraire municipal, que le transport soit demandé par les familles
ou par le directeur de l’établissement. Il présente la nature et le prix des prestations et rappelle que si le
transfert du corps vers le funérarium a été demandé par la famille, celle-ci assumera tous les frais, tandis
que si ce transfert a été demandé par l’établissement au sein duquel la personne est décédée, ce dernier
prendra en charge au minimum les frais de transport et de première journée de dépôt. Il indique aussi que
© La lettre du droit des religions n°31 juin / juillet 2008
119
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les frais d’obsèques d’une personne dont le corps n’est pas réclamé seront assumés par l’établissement où
elle est décédée. Aucun terme de ce « règlement d’admission » n’indique qu’il obligeait le Centre hospitalier
à refuser le transfert d’un corps demandé par la famille vers une autre chambre funéraire ou qu’il conduisait
à réduire le délai laissé aux familles pour faire le choix d’une autre chambre funéraire. Si l’hôpital Saint
Joseph-Saint Luc indique dans le document communiqué aux familles avoir conclu une convention avec le
funérarium de la ville de Lyon, il précise mettre à leur disposition une liste non exhaustive des services des
pompes funèbres et être prêt à les aider à trouver les coordonnées d’un autre service de pompes funèbres.
La mention dans ce même document de l’obligation pour l’établissement de transférer les corps des défunts
au funérarium les nuits, dimanches et jours fériés peut s’expliquer par l’impossibilité administrative de faire
transporter le corps d’un défunt hors de la commune avant d’avoir déclaré le décès à la mairie.
163. Les relations entre le funérarium de la ville de Lyon et la clinique Eugène André ainsi que la clinique de
la Sauvegarde n’ont, comme indiqué ci-dessus (paragraphes 55 et suiv.), pas fait l’objet de conventions
écrites présentes au dossier. Seules figurent les notes, internes aux établissements de soins, de procédure
de gestion des décès. Même si ces notes contiennent certaines dispositions qui pourraient être critiquables
au regard d’un souci de neutralité vis à vis des différents opérateurs de pompes funèbres ou gestionnaires
de chambres funéraires ou au regard de la réglementation, aucun élément ne permet de démontrer que ces
dispositions sont le résultat d’une concertation avec la régie municipale ou qu’elles auraient été imposées par
celle-ci. En particulier, s’il est vrai que le « passage par le funérarium municipal » est présenté comme la
solution la plus simple et la plus économique pour les familles qui, lorsqu’elles veulent faire un autre choix,
sont soumises à des démarches administratives et à des frais supplémentaires, l’incitation exercée peut
résulter de l’intérêt propre des hôpitaux à faire transporter hors de leurs locaux dès que possible les
personnes décédées en leurs murs, ce qui parfois les conduit à méconnaître les délais imposés par la
réglementation. Il convient néanmoins de relever que dans sa procédure interne, la clinique mutualiste
Eugène André a fait état d’un « logigramme gestion des décès » qui envisage la possibilité pour une famille
de choisir une destination particulière au défunt (cote 2258-2259). De même dans sa notice interne, la
clinique de la Sauvegarde n’écarte pas la possibilité pour les familles de rapatrier le corps des défunts sans
passer par la chambre funéraire de Lyon (paragraphe 69).
164. Enfin, aucun élément du dossier ne permet non plus de démontrer que les éventuels comportements
peu respectueux de la neutralité vis à vis des différents opérateurs de pompes funèbres qu’a pu adopter le
personnel de tel ou tel établissement de soins résultent d’accords passés entre ces établissements et la régie
municipale ou de manœuvres unilatérales de celle-ci.
165. Dans ces conditions, les griefs n° 1 et n° 2 liés à des accords conclus entre la régie municipale des
pompes funèbres et certains établissements de soins de Lyon ne sont pas établis.
b) Sur l’organisation des services funéraires de la ville de Lyon (grief n° 3)
166. La pratique décisionnelle constante du Conseil de la concurrence, confirmée par la cour d’appel de
Paris, concernant les situations où un même opérateur dominant gère une chambre funéraire et propose
d’autres services de pompes funèbres a été résumée dans la décision n° 04-D-70 , précitée, de la façon qui
suit :
« Comme l’a relevé le Conseil de la concurrence, dans la décision n° 03-D-15 du 17 mars 2003 : « La
possession par un opérateur funéraire d’une chambre funéraire, située à proximité immédiate du magasin où
sont vendues les autres prestations funéraires, constitue un fort avantage commercial et concurrentiel. En
effet, il est constaté qu’il est de plus en plus fréquent que les corps des personnes décédées soient
transférés par les familles en chambre funéraire, où celles-ci peuvent recevoir des conseils et des
préconisations pour l’organisation des funérailles, et, ainsi, déterminer leur choix, nécessairement rapide. Le
possesseur de chambre funéraire bénéficie donc d’un contact privilégié avec les familles auxquelles il peut
proposer une offre globale et cette situation est peu propice à favoriser le jeu de la concurrence surtout
lorsqu’il n’existe qu’une seule chambre funéraire dans la zone géographique concernée ».
Le Conseil de la concurrence sanctionne les pratiques susceptibles de créer la confusion dans l’esprit des
familles des défunts et pouvant les inciter à recourir aux services de la même société, pour l’ensemble des
prestations funéraires.
Dans la décision n° 03-D-15, le Conseil a condamné la société Goupil pour abus de sa position dominante en
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120
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raison de l’absence de distinction pour cette dernière entre son activité de gestionnaire de la chambre
funéraire et ses autres activités de service extérieur. Concernant l’agencement des locaux, il a été constaté
que : « (..) bien que possédant des entrées distinctes, les locaux où s’exercent les activités de funérarium et
ceux où sont offertes les autres prestations funéraires sont reliés par deux portes communicantes, situées au
niveau du hall et de l’accueil du funérarium et permettant d’accéder directement dans le magasin ».
L’enquête avait également permis d’établir, que le numéro d’appel indiqué au public dans les pages jaunes
et le minitel était commun aux deux magasins de la société Goupil et à la chambre funéraire dont elle était la
gestionnaire. » (paragraphes 95 à 98 de cette décision).
167. A fortiori, une confusion entretenue entre l’exercice du service public administratif d’état civil, de police ou de
gestion des cimetières dont l’organisation incombe à l’autorité communale et les activités commerciales d’un
opérateur de pompes funèbres dominant peut fausser la concurrence et tomber sous le coup de l’interdiction
édictée à l’article L. 420-2 du Code de commerce.
168. En l’espèce, il a été fait grief à la régie municipale d’avoir abusé de sa position dominante : d’une part, en
empêchant la nuit et les jours fériés l’accès à la chambre funéraire des opérateurs concurrents d’elle-même
ou de son transporteur dans les conditions indiquées aux paragraphes 104 à 106 ; d’autre part en favorisant
le choix des familles pour ses propres services commerciaux en s’abstenant de distinguer, dans l’information
donnée au public ou dans l’organisation externe et interne des locaux du centre funéraire municipal, ses
activités de gestionnaire du funérarium, ses activités commerciales de prestataire de pompes funèbres et le
service public administratif funéraire ainsi qu’il résulterait des éléments présentés aux paragraphes 107 à
123.
169. S’agissant de l’accès au funérarium hors des heures d’ouverture, qui supposait pour les entreprises de
pompes funèbres concurrentes la possession d’une clé, les Pompes funèbres intercommunales de
l’agglomération lyonnaise, qui ont répondu pour l’ancienne régie municipale, ont indiqué que cette clé était
confiée, pour des raisons de sécurité des locaux, à la société CGPF, titulaire du marché passé pour le
transport des défunts avant mise en bière vers le funérarium. Elles soulignent que cette clé servait
uniquement à ouvrir le funérarium la nuit à un moment où le nombre d’admissions était très limité. Selon
elles, les opérateurs concurrents pouvaient demander cette clé à la société CGPF. Elles indiquent par ailleurs
que depuis 2004 la clé a été reprise par la régie, celle-ci assurant l’accueil au funérarium 24 heures sur 24.
170. Sur cet aspect, le fait d’avoir, entre 1992 et 2004, confié la clé du funérarium seulement à la CGPF et dans un
premier temps aussi à l’entreprise Rozier, a rendu impossible ou difficile, lorsque l’accueil n’était pas assuré
sur place, l’accès d’entreprises concurrentes à la seule chambre funéraire utilisable la nuit et aux autres
moments où, pour des raisons administratives, un corps ne peut pas être transféré dans une autre
commune. Une telle pratique d’exclusion pourrait être considérée comme abusive, sauf à ce que des raisons
sérieuses la justifient. Toutefois, en l’espèce les entreprises concurrentes n’ont évoqué des difficultés qu’en
ce qui concerne la nuit et, dès lors, l’effet de cette pratique n’a vraisemblablement pas été sensible. Faute
d’éléments plus précis au dossier, le Conseil ne retient pas cette composante du grief notifié.
171. S’agissant des autres aspects du grief, les Pompes funèbres intercommunales de l’agglomération lyonnaise
estiment que la régie n’a créé aucune confusion entre ses différentes activités dans l’esprit des familles.
D’abord il serait rare que les familles se rendent elles-mêmes au service administratif, les opérateurs se
chargeant eux-mêmes des formalités dans la majorité des cas. Ensuite la chambre funéraire, située au rezde-chaussée des locaux de l’avenue Berthelot, serait matériellement séparée des autres services situés au
premier étage et serait dépourvue de toute information de nature à diriger les familles vers les services
commerciaux de la régie. Par ailleurs, il serait normal que la régie ait fait connaître dans l’annuaire
téléphonique l’ensemble des prestations qu’elle proposait, y compris celles ayant trait à la chambre funéraire
et au crématorium. La régie municipale aurait veillé à distinguer les numéros de téléphone du funérarium,
des activités administratives et des activités commerciales, comme l’attesteraient les annuaires
téléphoniques de 2004 et 2005. Les Pompes funèbres intercommunales de l’agglomération lyonnaise
soutiennent enfin, qu’alors que la chambre funéraire recevait en moyenne 2000 familles par an, aucun
témoignage crédible d’une famille n’a été apporté, démontrant l’absence de neutralité dans la gestion du
funérarium.
172. Cependant, ces arguments n’emportent pas la conviction.
173. Il résulte des constatations faites par l’enquêteur (paragraphes 111 et suiv.) que la chambre funéraire ne
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dispose pas d’une entrée séparée, qu’elle communique avec les services commerciaux de la régie et qu’à
l’étage du bâtiment les services commerciaux et les services administratifs ne font pas l’objet d’une
distinction claire. L’implantation des services commerciaux et administratifs accessibles par un escalier situé
dans la chambre funéraire et une porte de communication située à son sommet, la présence commune à cet
étage des différents services conduisent nécessairement les familles venues visiter leurs défunts à la
chambre funéraire et accomplir les démarches nécessaires à l’inhumation à passer dans les services
commerciaux de la régie municipale.
174. La présentation des services à l’entrée de l’avenue Berthelot ne sépare pas les activités réglementaires des
activités de pompes funèbres qui figurent ensemble sur les panneaux de signalisation, ainsi qu’il est décrit
au paragraphe 113. Il en est de même dans la cour où d’anciennes signalisations qui subsistent, décrites au
paragraphe 114, présentent sur un même panneau d’accueil les services administratifs, le service des
concessions et les funérailles.
175. A cet égard, deux sociétés concurrentes, les sociétés Rozier et Pinault, qui ont utilisé les services du centre
funéraire municipal ont déclaré sans être démenties que des familles venues à la chambre funéraire étaient
invitées à monter au premier étage pour faire les démarches administratives où des conseillers funéraires de
la régie étaient présents pour les accueillir.
176. À l’occasion de la création des pompes funèbres intercommunales, la signalisation a été modifiée en 2007.
Toutefois cet état des lieux est postérieur à la période visée par le grief (1997-2003) et ne peut être
examiné par le Conseil.
177. Par ailleurs, dans les notices de présentation de ses activités distribuées dans les hôpitaux ou mises
autrement à la disposition du public (voir paragraphes 65 et 108), la ville de Lyon n’a pris aucune précaution
pour distinguer les différentes catégories de services liés aux opérations funéraires selon leur nature.
178. Enfin, si les annuaires téléphoniques pour 2004 et 2005 présentent des numéros de téléphone différents pour
la chambre funéraire, les services administratifs et les activités commerciales de la régie, il n’en reste pas
moins que l’existence d’un seul numéro pour toutes ces activités est démontrée entre 1997 et 2003, ainsi
qu’exposé aux paragraphes 119 à 123. Pendant cette période, le numéro de téléphone spécifique de la
chambre funéraire n’était diffusé ni par la ville de Lyon ni par la régie, le seul numéro d’appel diffusé
couvrant l’ensemble des services de l’avenue Berthelot. Cette confusion dans l’information donnée au public
a rendu plus difficile le choix d’un opérateur concurrent pour les familles venues au centre funéraire
municipal ou cherchant une information depuis leur domicile.
179. Il résulte de l’ensemble de ces éléments que la régie municipale de la ville de Lyon a abusé de sa position
dominante en mettant en place une information et un accueil des familles ainsi qu’une organisation des
locaux qui ne permettaient pas de distinguer clairement les activités de la chambre funéraire, les autres
activités de pompes funèbres et les services administratifs, s’attribuant ainsi un avantage concurrentiel indu
sur les autres opérateurs de pompes funèbres. Le grief n° 3 est par conséquent établi ; la régie municipale
de la ville de Lyon a méconnu les dispositions de l’article L. 420-2 du Code de commerce.
2. SUR LES PRATIQUES REPROCHÉES À LA SOCIÉTÉ OGF-PFG ET À DES ÉTABLISSEMENTS
DE SOINS DE LA BANLIEUE DE LYON
a) Sur les accords avec plusieurs établissements de soins (griefs n° 4, 5 et 8)
180. De la même façon que pour la régie municipale et les établissements de soins de Lyon, il a été fait grief
à OGF-PFG d’avoir conclu des conventions ou des accords informels avec la polyclinique Pasteur, la clinique
du Grand Large, la clinique de La Roseraie, la clinique des Minguettes, et le centre hospitalier Le Vinatier
visant à favoriser le transfert systématique des personnes décédées dans ces établissements aux chambres
funéraires de Vénissieux ou de Saint-Priest. Il est à cet égard tout d’abord renvoyé aux considérations
exprimées aux paragraphes 160 et 161.
181. S’agissant des conventions écrites figurant au dossier, force est de constater que la convention de 2000
mentionnée au paragraphe 68, conclue avec la polyclinique Pasteur de Saint-Priest, ne comporte aucune
stipulation anticoncurrentielle et se réfère à la réglementation. Il en est de même de la convention de 2003
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mentionnée au paragraphe 74 conclue avec la clinique du Grand Large de Décines.
182. Les conventions de 1992 mentionnées aux paragraphes 76 et 82, concernant la clinique de la Roseraie
et la clinique des Minguettes, situées à Vénissieux, posent en revanche un problème dans la mesure,
notamment, où elles méconnaissent explicitement le délai de 10 heures après le décès imposé par la
réglementation pendant lequel l’établissement de soins doit s’efforcer de joindre la famille et ne peut
d’autorité faire transférer le corps en chambre funéraire. Toutefois, ces conventions ont été conclues par la
SRT et non par OGF-PFG.
183. A cet égard, à l’époque de la signature des deux conventions, diverses sociétés du groupe OGF-PFG
détenaient une participation minoritaire dans diverses sociétés du groupe Hygeco parmi lesquelles figurait la
SRT dont 31 % du capital était détenu par OGF-PFG. Selon un protocole d’accord signé le 5 juin 1997, les
sociétés du groupe OGF-PFG ont cédé des actions de sociétés du groupe Hygeco qu’elles détenaient et en
particulier la société OGF a cédé l’ensemble de ses participations dans SRT à l’actionnaire majoritaire de
celle-ci, la société Hygeco. Si OGF-PFG et la SRT ont entretenu d’importantes relations commerciales et si, à
partir de la fin 1997, la CGPF, la filiale d’OGF-PFG spécialisée dans le transport des corps, s’est imposée
comme interlocuteur naturel des deux cliniques à la place de la SRT sans que les établissements de santé
qui avaient conclu des conventions avec celle-ci estiment devoir les dénoncer explicitement pour conclure de
nouvelles conventions écrites avec la CGPF, ces éléments sont insuffisants pour établir qu’OGF-PFG
contrôlait la politique commerciale de la SRT en 1992 et qu’au cours des années 1999 à 2003, visées par les
griefs, OGF-PFG était venue aux droits de la SRT pour l’application des conventions signées par celle-ci ou
que ces conventions aient été encore opposables aux établissements de soins concernés. Dès lors, pour
critiquables qu’elles soient, ces conventions ne peuvent permettre d’établir une infraction aux articles L. 4201 ou L. 420-2 du Code de commerce pour la période 1999-2003 dans le chef d’OGF-PFG ou des
établissements de soins concernés, les éléments du dossier ne permettant pas en particulier pour ces
derniers de démontrer que les conventions s’appliquaient encore pendant ladite période.
184. Aucune convention écrite ne figure au dossier concernant le centre hospitalier Le Vinatier de Bron, qui a
pourtant confié à OGF-PFG le transfert des corps des personnes décédées en son sein après appel d’offres,
ainsi qu’il est exposé aux paragraphes 91 et 92. Néanmoins, le Conseil peut prendre acte des précisions
apportées par la société OGF-PFG, selon laquelle, dans l’offre adressée au centre hospitalier le Vinatier, elle
mentionnait la réglementation et en particulier les dispositions relatives au délai de dix heures sans avoir pu
joindre la famille qui doit être respecté avant que l’établissement demande à son initiative le transfert d’un
corps en chambre funéraire.
185. S’agissant des documents internes aux différents établissements de soins, le compte rendu des
réunions qui ont eu lieu en janvier et février 1996 entre les responsables d’OGF-PFG et la polyclinique
Pasteur, cité paragraphe 71, relate clairement l’existence de relations privilégiées permettant à l’opérateur
de demander à la clinique de favoriser ses services à l’égard des familles en deuil, notamment en signant les
demandes d’admission en chambre funéraire sans les prévenir. Pour convaincre les responsables de la
clinique, le représentant d’OGF-PFG propose de ne facturer aucun frais à la clinique si les familles confient
les obsèques aux PFG de Saint-Priest.
186. Toutefois, cet arrangement qui devait faire l’objet d’une période d’essai n’a pu être mis en œuvre car la
chambre funéraire de Saint-Priest destinée à recevoir les corps des défunts provenant de la polyclinique a
été fermée fin 1996 jusqu’en mars 1998 et rien ne permet de démontrer que sur la période de 2000 à 2003,
visée par les griefs, cet arrangement avait encore cours. En particulier, fin 2000 la convention analysée au
paragraphe 181 a été conclue et la fiche de procédure interne figurant au dossier, présentée paragraphe 73,
a un caractère neutre, même s’il en ressort que le choix par la famille d’un transfert du corps au domicile ou
à un funérarium situé en dehors de la commune de Saint Priest implique des contraintes pratiques ou
administratives.
187. La note de procédure interne de la clinique du Grand Large, tout comme la note d’information de cet
établissement aux familles, citées paragraphes 74 et 75, présentent un caractère fortement incitatif pour les
familles à laisser transporter les défunts au funérarium d’OGF-PFG, puisque la gratuité de cette solution y est
mise en avant, même si le libre choix des familles est souligné. Néanmoins, aucun élément du dossier ne
permet d’établir que c’est là le résultat d’une concertation avec OGF-PFG ou d’une exigence de celle-ci, et
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non d’une initiative de la clinique qui y voit là le moyen d’assurer plus rapidement l’évacuation des corps des
personnes décédées en son sein.
188. Les notes de procédure interne relatives aux décès du centre hospitalier Le Vinatier présentées
paragraphes 93 à 96 imposent une décision des familles dans les deux heures du décès si elles souhaitent
que le corps soit transféré dans une autre chambre que celle de Vénissieux. En particulier, la procédure de
transfert des corps précise : « Quel que soit le jour du décès et quelle que soit l’heure, dans tous les cas
appeler les PFG. »…….« les pompes funèbres générales : … transportent le corps vers une autre chambre
funéraire si la famille le souhaite, à condition que le transport ait lieu impérativement dans les 2 heures
ème
transport de
après le décès. Si le transport a lieu plus de 2 heures après le décès, il faut envisager un 2
corps sans mise en bière. Dans ce cas, les Pompes funèbres générales s’occupent des démarches
administratives auprès de la mairie et tous les frais incombent à la famille. ».
189. La même constatation peut être faite au vu des éléments de l’enquête concernant les modalités suivies
par les cliniques de la Roseraie et des Minguettes. Les familles ne disposent pas du délai raisonnable prévu
par la réglementation pour effectuer leur choix puisque le transfert des corps est imposé au plus tard dans
les deux heures.
190. Les procédures internes suivies par ces trois établissements de santé ne respectent donc pas le délai de
dix heures laissé par la réglementation pour que les familles puissent choisir le lieu du transfert des corps
des défunts. Elles expriment la volonté de ces établissements d’apporter une solution rapide au problème
posé par le décès de personnes hospitalisées mais ne démontrent pas non plus qu’OGF-PFG ait négocié ce
dispositif ou l’ait imposé.
191. Aucun élément du dossier ne fait par ailleurs apparaître qu’OGF-PFG a exigé que les hôpitaux qui
décidaient le transfert des défunts prennent systématiquement en charge les frais de transport et
d’admission à la chambre funéraire et insistent auprès des familles sur le coût qu’elles auraient à supporter
dans le cas où elles décideraient elles-mêmes de ce transfert.
192. Le Conseil, rappelle que, dans sa décision 04-D-70 précitée, il a souligné que « le fait que la prestation
soit à la charge de la famille, lorsque cette dernière demande à ce que le corps soit transféré dans un autre
lieu, résulte des dispositions des articles R. 2223-76 et R. 2223-79 du code général des collectivités
territoriales et ne saurait être analysé comme une pratique visant à permettre à la société OGF de capter la
clientèle provenant de cet établissement de soins ».
193. Les témoignages des familles cités aux paragraphes 81 et 102 sont certes révélateurs des difficultés
rencontrées par celles-ci pour décider du choix de la chambre funéraire et organiser le transport des corps
vers une autre chambre funéraire que celles prévues par les établissements de soins, mais ces difficultés ne
peuvent, au vu des éléments du dossier, être imputées à OGF-PFG qui n’avait pas de contact direct avec
elles à l’hôpital.
194. Enfin, aucun élément du dossier ne permet non plus de démontrer que les éventuels comportements
peu respectueux de la neutralité vis-à-vis des différents opérateurs de pompes funèbres qu’a pu adopter le
personnel de tel ou tel établissement de soins résultent d’accords passés entre ces établissements et OGFPFG ou de manœuvres unilatérales de celle-ci.
195. Dans ces conditions, les griefs n° 4, 5 et 8 liés à des accords conclus entre OGF-PFG et certains
établissements de soins de la banlieue de Lyon ne sont pas établis.
b) Sur l’organisation d’OGF-PFG à Vénissieux et Saint-Priest (griefs n° 6 et 7)
196. Le Conseil se réfère à titre liminaire aux considérations rappelées au paragraphe 166.
197. En l’espèce, il a été fait grief à OGF-PFG d’avoir, d’une part, retenu une présentation et un accueil dans
ses locaux et d’autre part, donné des informations sur ses chambres funéraires de Vénissieux et Saint-Priest
dans l’annuaire téléphonique, susceptibles de créer la confusion entre son activité de gestionnaire de ces
chambres funéraires et son activité de prestataire de service de funérailles, ainsi qu’il résulterait des
éléments présentés aux paragraphes 124 à 132.
198. OGF-PFG a produit des photographies montrant qu’il existe, pour chacune des chambres funéraires
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concernées une entrée distincte du local commercial et qu’il n’apparaît aucune confusion liée à la
signalétique ou aux façades des bâtiments. Elle certifie qu’à l’intérieur des locaux, une information neutre est
fournie aux familles rappelant qu’elles sont libres de choisir leur opérateur de pompes funèbres. S’agissant
plus particulièrement de la chambre funéraire de Vénissieux, la société conteste que le digicode permettant
d’accéder à la chambre funéraire entraîne un risque de confusion. La mention sur le panneau au-dessus du
digicode : « pour obtenir le code d’accès en cas d’absence, merci de prendre contact avec l’entreprise de
pompes funèbres de votre choix. Vous pouvez aussi joindre la maison funéraire en composant le 04 72 90
95 22 » montrerait que les services commerciaux d’OGF-PFG ne sont pas un passage obligé avant la
chambre funéraire. Elle observe aussi que l’enquêteur n’établit pas que, lors de sa visite, il n’a pu obtenir le
code d’accès en s’adressant à un autre opérateur ou en téléphonant au numéro indiqué sur le panneau.
199. Compte tenu de ce qui précède, aucune pratique anticoncurrentielle ne peut être retenue à cet égard.
En particulier en cas d’utilisation d’un digicode comme mode d’accès à la chambre funéraire il faut qu’en cas
d’absence du gestionnaire, le code puisse être accessible facilement. Le témoignage de l’enquêteur présenté
au paragraphe 130 et celui d’une famille présenté au paragraphe 131 pourraient être retenus s’il était
effectivement démontré que ces visiteurs ne pouvaient obtenir le code qu’en allant le chercher au bureau
des PFG. Or il n’est pas discutable que le code d’accès pouvait être obtenu auprès de l’opérateur choisi par
la famille. En l’absence de témoignage contraire ou d’autres déclarations concordantes des familles, ce seul
élément ne peut être retenu à la charge d’OGF.
200. Concernant les annonces téléphoniques, OGF-PFG relève que le Conseil n’a jamais considéré qu’à elle
seule la présentation des encarts dans les annuaires était suffisante pour établir un risque de confusion dans
l’esprit des familles et se réfère à la décision n° 04-D-21 dans laquelle le Conseil a estimé que la
présentation pour les activités de l’opérateur de pompes funèbres en cause « d’un numéro d’appel
téléphonique unique n’apparaît pas, à lui seul, dans les circonstances de l’espèce, de nature à entraîner un
risque de confusion dans l’esprit des personnes désireuses d’organiser les obsèques d’un de leurs proches …
»
201. OGF-PFG observe que la critique porte, non sur une identité de numéros, mais sur la présentation
ensemble de ses différentes activités. Elle estime que l’obligation de neutralité ne peut aller jusqu’à
l’empêcher de faire état de la totalité des services qu’elle assure, y compris ceux des chambres funéraires.
202. Elle fait remarquer que si la publicité contenue dans les pages jaunes en 2002 présente l’ensemble de
ses prestations, la chambre funéraire est indiquée dans les lignes de l’annuaire avec une adresse et un
numéro de téléphone distincts, d’autre part, qu’elle n’a pas la maîtrise de la présentation de ses annonces,
l’éditeur des annuaires lui ayant indiqué en septembre 2007 qu’il lui était impossible d’isoler dans l’annuaire
un classement sous la seule rubrique de la chambre funéraire.
203. Il y a lieu d’admettre l’argumentation d’OGF-PFG en observant que les autres opérateurs présentent
aussi ensemble la prestation relative au passage en chambre funéraire et les autres prestations proposées
aux familles et qu’il n’a pas été démontré par ailleurs qu’OGF pouvait facilement obtenir de l’éditeur de
l’annuaire qu’il sépare complètement l’annonce de la chambre funéraire des autres activités de l’entreprise.
204. En conséquence, les griefs n° 6 et 7 liés à l’organisation d’OGF-PFG à Vénissieux et Saint-Priest ne sont
pas établis.
3. SUR L’ENTENTE POUR LE PARTAGE DU MARCHÉ DE L’ORGANISATION DES OBSÈQUES À
LYON ET DANS SON AGGLOMÉRATION (GRIEF N ° 9)
205. Les éléments, analysés aux paragraphes 23 et suivants et 35 et suivants, relatifs à la possession par la
régie municipale et OGF-PFG de la majeure partie des chambres funéraires au sein de la Courly, à la stabilité
des parts de marché de ces opérateurs, au fait qu’ils ne se font pas concurrence dans la zone géographique
où chacun est plus particulièrement en position dominante sur le marché de l’organisation des obsèques, à
la mise en œuvre d’une collaboration privilégiée pour l’utilisation du funérarium municipal ou à l’attribution
des marchés de la ville de Lyon et de ses hôpitaux à CGPF filiale du groupe OGF, ont été avancés comme
des indices venant à l’appui du grief n° 9.
206. A cet égard, en ce qui concerne l’installation d’une nouvelle chambre funéraire à Lyon, OGF-PFG
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souligne qu’elle a effectué des démarches en ce sens mais qu’elle se serait heurtée à la difficulté d’obtenir
un emplacement respectant les contraintes imposées par la ville. Cependant, elle a pu, comme les autres
opérateurs, utiliser le funérarium municipal et surtout se servir de ses chambres funéraires sur la Courly
pour organiser les obsèques des personnes décédées à Lyon. Elle a, à ce titre, une part de marché située
entre 24 et 27 %. De son côté, la régie municipale, qui ne pouvait créer une chambre funéraire en dehors
de la ville de Lyon, a pu organiser les obsèques de personnes décédées à Lyon mais domiciliées ailleurs
comme des personnes décédées en dehors de Lyon mais dont la mise en bière ou l’inhumation avait lieu à
Lyon. En ce qui concerne le transport des corps des défunts les Pompes funèbres intercommunales de
l’agglomération lyonnaise, pour l’ancienne régie municipale, ont fait valoir que tous les trois ans le marché
de sous-traitance pour le transport des corps vers le funérarium municipal a fait l’objet d’une procédure de
mise en concurrence au terme de laquelle il a été attribué dans des conditions régulières à l’entreprise la
mieux et moins-disante qui s’est trouvée être la CGPF.
207. Ces observations présentées par les opérateurs n’ont pas été contredites au cours de l’instruction. De
plus, le tableau produit au paragraphe 36 montre qu’entre 1998 et 2003 les parts de marché sur la ville de
Lyon ne restent pas figées et évoluent annuellement dans des fourchettes de 4 points pour la régie et de 3
points pour OGF-PFG comme le souligne cette dernière. Par ailleurs, aucun élément du dossier ne permet de
dire que les concurrents comme la société Roc’Eclerc n’ont pas pu développer leur activité.
208. En conséquence, aucune preuve tangible, ni aucun faisceau d’indices suffisamment consistant n’établit
que la régie municipale des pompes funèbres et la société PFG ont mis en œuvre une entente de répartition
des marchés à Lyon et dans son agglomération. Le grief n° 9 n’est donc pas établi.
209. Au terme de l’examen de l’ensemble des griefs, aucune pratique anticoncurrentielle n’est donc retenue
à l’encontre de la société OGF, ni des établissements de soins mis en cause. Mais il est établi un abus de
position dominante de la régie municipale dans la gestion de la chambre funéraire et la diffusion
d’informations aux familles.
D. SUR L’IMPUTABILITÉ DE LA PRATIQUE DE LA RÉGIE MUNICIPALE DE LA VILLE DE
LYON
210. Le Conseil constate que la régie municipale des pompes funèbres était précédemment une structure
administrative, non dotée de la personnalité morale, de la ville de Lyon. En application de la jurisprudence
constante en la matière, les pratiques de la régie sont donc toujours imputables à la ville de Lyon.
211. En effet, selon cette jurisprudence, rappelée en détail dans le rapport du Conseil de la concurrence
pour 2001 (p. 126 et s.), tant que la personne morale responsable de l'exploitation de l'entreprise qui a mis
en œuvre des pratiques anticoncurrentielles subsiste juridiquement, c'est elle qui assume la responsabilité de
ces pratiques, même si les éléments matériels et humains ayant concouru à ces pratiques ont été cédés à
une tierce personne. En revanche, lorsque la personne morale responsable de l'exploitation de l'entreprise a
juridiquement disparu, les pratiques doivent être imputées à la personne morale à laquelle l'entreprise a
juridiquement été transmise c'est-à-dire à la personne morale qui a reçu les droits et obligations de la
personne auteur des pratiques. Enfin, si aucune autre personne n'a reçu transmission de ces droits et
obligations, les pratiques sont imputées à l'entreprise qui assure, en fait, sa continuité économique et
fonctionnelle.
212. Les articles du code général des collectivités territoriales (L. 5211-17 et L. 5212-18) mentionnés par la
ville de Lyon pour soutenir que c’est le nouveau syndicat intercommunal qui devrait assumer les
conséquences du comportement de l’ancienne régie ne peuvent conduire à remettre en cause en l’espèce
cette jurisprudence, car les dispositions invoquées renvoient à l’article L. 1321-2, aux deux premiers alinéas
de l’article L. 1321-2 et aux articles L. 1321-3, L. 1321-4 et L. 1321-5 du même code qui portent uniquement
sur les conditions de transfert de biens meubles et immeubles en cas de transfert de compétence et
nullement sur l’imputabilité de comportements passés de la collectivité cédante, en particulier de
comportements anticoncurrentiels. De même, les arrêts du Conseil d’Etat invoqués ne portent pas davantage
sur cette question. En particulier, il ressort seulement de l’arrêt du 10 octobre 2007, communauté urbaine de
Lyon (n° 305130) qu’une fois une compétence transférée entre collectivités, c’est seulement la collectivité
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bénéficiaire qui peut exercer ladite compétence, même si pour ce faire elle utilise des biens ayant
antérieurement appartenu à la collectivité cédante. Les conséquences de l’exercice passé de la compétence
par la collectivité cédante ne sont pas concernées.
E. SUR LA DÉTERMINATION DE LA SANCTION
213. La ville de Lyon est responsable d’une pratique mise en œuvre entre 1997 et 2003. Il s’agit d’une
infraction continue qui a débuté avant l’entrée en vigueur de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux
nouvelles régulations économiques et qui s’est poursuivie après cette date. La saisine du 26 juillet 2002 est
postérieure à cette entrée en vigueur. Il en résulte que les dispositions du livre IV du Code de commerce
applicables sont celles issues de la loi du 15 mai 2001.
214. Le I de l’article L. 464-2 du Code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 15 mai 2001,
dispose : « Les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l’importance du
dommage causé à l’économie, à la situation de l’organisme ou de l’entreprise sanctionné ou du groupe
auquel l’entreprise appartient et à l’éventuelle réitération des pratiques prohibées (…) Si le contrevenant
n'est pas une entreprise, le montant maximum de la sanction est de 3 millions d'euros. Le montant
maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 10 % du montant du chiffre d’affaires mondial hors
taxes le plus élevé réalisé au cours d’un des exercices clos depuis l’exercice précédant celui au cours duquel
les pratiques ont été mises en œuvre. Si les comptes de l’entreprise concernée ont été consolidés ou
combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d’affaires pris en compte est celui
figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l’entreprise consolidante ou combinante. »
1. SUR LA GRAVITÉ DE LA PRATIQUE
215. La pratique d’abus de position dominante retenue au grief n° 3 émane de la ville de Lyon qui avait la
charge du service public administratif funéraire municipal en même temps qu’elle exploitait le service public
à caractère industriel et commercial des pompes funèbres. Cette collectivité publique disposait de ce fait
d’une position historique prédominante existant avant la fin du monopole des pompes funèbres et
maintenue après la disparition de ce monopole. Elle devait être attentive aux modalités de gestion de la
chambre funéraire dont elle connaissait l’importance sur le marché de l’organisation des obsèques.
216. Alors qu’elle disposait de la seule chambre funéraire existant à Lyon qui lui procurait une force
d’attraction avec laquelle les entreprises concurrentes pouvaient difficilement rivaliser, elle a pendant six ans
abusé de cette position en maintenant une organisation confondant les prestations propres à la chambre
funéraire avec les services commerciaux et administratifs. Cette pratique a eu d’autant plus d’influence sur le
choix des familles des défunts qu’elles se trouvent, au moment où elles accordent leur confiance à un
opérateur, dans un état de dépendance lié à la peine que le deuil est de nature à leur causer et à la
nécessité d’organiser rapidement les funérailles.
217. Ainsi les faits établis revêtent une gravité certaine. Ils sont intervenus après la fin du monopole des
pompes funèbres et témoignent de la résistance de la régie municipale à intégrer dans son comportement
l’ouverture du service des pompes funèbres à la concurrence comme le prescrit la loi du 8 janvier 1993.
218. Il sera cependant tenu compte du fait que la régie municipale a modifié l’annonce des services de la
chambre funéraire dans l’annuaire « Pages jaunes », à compter de l’année 2004, avec la mention d’un
nouveau numéro de téléphone et que de nouvelles dispositions ont été prises en 2006 dans le cadre de la
création du Syndicat intercommunal des pompes funèbres pour mieux séparer les différentes activités
développées dans le centre funéraire municipal.
2. SUR LE DOMMAGE À L’ÉCONOMIE
219. Comme l’a précisé le Conseil de la concurrence dans son rapport annuel pour 1999, le dommage à
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l’économie « ne peut être évalué qu’en comparant la situation résultant de la pratique à la situation qui
aurait prévalu en l’absence de cette pratique ». Le dossier ne contient pas d’élément notamment sur les prix
comparés des prestations funéraires permettant de mesurer le surcoût pour le client lié à la mise en œuvre
de la pratique de la ville de Lyon. Il a été constaté, par ailleurs, qu’elles n’ont pas permis à la régie
municipale d’augmenter sa part de marché. Néanmoins, l’importance du dommage à l’économie, visée au I
de l’article L. 464-2 du Code de commerce, est liée à la taille des marchés affectés et le cas échéant à
l’exemplarité du comportement en cause qui a pu influencer d’autres entreprises. En l’occurrence, le nombre
de décès enregistrés à Lyon était de l’ordre de 5000 par an au cours des années considérées, celui des corps
transportés au funérarium municipal a varié d’environ 1200 à environ 1900 et celui des funérailles
organisées par la régie municipale a été d’un peu plus de 1700 (dont environ 1100 concernant des défunts
préalablement transportés au funérarium). Il faut également tenir compte de la malheureuse valeur
d’exemple donnée par la ville de Lyon qui, collectivité publique, aurait dû clairement distinguer ses
différentes activités.
3. SUR LE MONTANT DE LA SANCTION
220. La ville de Lyon est une personne morale de droit public qui assure la continuité juridique de la régie
municipale des pompes funèbres auteur des pratiques en cause dans le dossier depuis sa disparition le 27
octobre 2005.
221. Elle a abusé de sa position de gestionnaire exclusif de la chambre funéraire municipale pour empêcher
les familles de faire jouer la concurrence avec d’autres opérateurs de pompes funèbres (grief n° 3), pratique
prohibée par les dispositions de l’article L. 420-2 du Code de commerce.
222. N’étant pas une entreprise, le montant maximum de la sanction qui lui est applicable est de 3 millions
d’euros. En fonction des éléments généraux et individuels précédemment constatés, il y a lieu de lui infliger
une amende de 50 000 euros.
DÉCISION
Article 1er : Il n’est pas établi que la société OGF, le centre hospitalier Saint-Joseph Saint-Luc, la clinique
mutualiste Eugène André, la clinique de la Sauvegarde, la polyclinique Pasteur, la clinique du Grand large, la
clinique La Roseraie, la polyclinique des Minguettes et le centre hospitalier Le Vinatier ont enfreint les
dispositions des articles L. 420-1 et L. 420-2 du Code de commerce.
Article 2 : Il est établi que la régie municipale des pompes funèbres de Lyon, dont la ville de Lyon doit
répondre des agissements, a enfreint les dispositions de l’article L. 420-2 du Code de commerce.
Article 3 : Est infligée à la ville de Lyon une sanction pécuniaire de 50 000 euros.
Délibéré sur le rapport de Mme Arcelin et M. Avignon par Mme Aubert, vice-présidente, présidant la séance,
MM. Flichy, Piot et Ripotot, membres.
© La lettre du droit des religions n°31 juin / juillet 2008
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Jurisprudence administrative
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Tribunal administratif de Nantes, ord. Ref., N°08201, 18 janvier 2008, L'ASSOCIATION
SPIRITUELLE DE L'EGLISE SCIENTOLOGIE DU CENTRE OUEST
Pour justifier sa demande tendant à ce que l’arrêté du maire d’Angers soit suspendu,
l'ASSOCIATION SPIRITUELLE DE L'EGLISE SCIENTOLOGIE DU CENTRE OUEST fait valoir que cet
arrêté lui interdit totalement d’exercer la liberté religieuse et qu’il y a urgence à faire cesser cette
situation ; qu’il ressort toutefois des pièces du dossier que le dit arrêté a fait l’objet d’un affichage
régulier en mairie depuis le 6 novembre 2007 ; que ce n’est que le 18 janvier 2008, soit plus de
deux mois après l’affichage que l’association requérante a saisi le tribunal d’une demande en
référé ; que, dans ces conditions l’urgence ne peut être considérée comme établie; que, par suite,
la requête de L’ASSOCIATION SPIRITUELLE DE SCIENTOLOGIE DU CENTRE OUEST doit être
rejetée.
Tribunal administratif de Melun, n°0504859/5 et n° 0603837/5, 25 janvier 2008, Mme
Marie-Henriette E.
Le motif de l’exclusion temporaire de fonctions de Mme E. pour une durée de six mois résulte, non
pas de son appartenance à l’église adventiste du 7ème jour, mais de sa volonté persistante de ne pas
assurer son service le samedi et, ainsi, de ne pas se conformer à la nouvelle organisation du travail
mise en œuvre dans son service fin décembre 2004 ; que, dès lors, Mme E. ne peut utilement, pour
contester la légalité de la décision attaquée, invoquer le principe de la liberté de conscience inscrit
dans la Constitution, ni la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, ni la convention
européenne de sauvegarde des droits de l’homme, ni les dispositions de l’article 1er de la loi du
9 décembre 1905, ni celles de l’article 6 de la loi du 13 juillet 1983 modifiée précitée, ni faire valoir
l’absence de trouble à l’ordre public résultant de ses absences du service le samedi.
Tribunal Administratif de Strasbourg, n° 0404876, 14 avril 2008, M. Metin K.
Il ressort des pièces du dossier qu’un lieu de culte musulman existe depuis 1978 au 41 rue (…) à
Mulhouse ; que l’établissement « Mélissa » pour lequel M. K. a sollicité une autorisation
d’exploitation d’une licence de IVème catégorie, situé au 26 rue (…), se trouve à 90 mètres de ce
lieu de culte ; que les dispositions précitées excluent toute application du Concordat de 1802,
nonobstant la circonstance que celui-ci soit applicable en Alsace-Moselle ; que, dès lors, M. K. n’est
pas fondé à soutenir que c’est à tort que le sous-préfet de Mulhouse lui a refusé l’autorisation
d’exploiter une licence de IVème catégorie pour son établissement.
Tribunal Administratif de Bastia, ord. Ref., n°0800412, 2 mai 2008, M. et Mme Nicolas P.
et autres
Suspension de l’exécution de l’arrêté en date du 23 janvier 2007, par lequel le maire de la commune
de Lucciana a accordé un permis de construire à l’association des témoins de Jéhovah dans la
mesure où les moyens tirés de la méconnaissance de l’article 4 de la loi n° 2000-321 du 12 avril
2000 modifiée, du 7° de l’article R. 421-2 du code de l’urbanisme alors en vigueur, relatif à la notice
permettant d'apprécier l'impact visuel du projet, du II de l’arrêté du 1er août 2006 pris pour
l’application de l’article R. 111-19-2 du code de la construction et de l’habitation et relatif à la
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largeur minimale des portes principales des locaux pouvant recevoir cent personnes ou plus et de
l’insuffisance des emplacements réservés au stationnement sont de nature à faire naître un doute
sérieux quant à la légalité de la décision attaquée.
Tribunal Administratif de Nice, n°0404982, 6 mai 2008, ASSOCIATION « CENTRE
CHRETIEN SOUFFLE NOUVEAU »
Le préfet n’établit pas que l’association n’a pas exclusivement pour objet l’exercice d’un culte,
qu’elle mène d’autres activités que celles en relation avec cet objet et que certaines de ses activités
pourraient porter atteinte à l’ordre public ; que, dans ces conditions, l’association requérante est
fondée à demander l’annulation tant de l’arrêté préfectoral du 26 mai 2004, que de la décision par
laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a implicitement rejeté son recours gracieux .
Tribunal administratif de Marseille, n°0502887, 22 avril 2008, ASSOCIATION
DIOCESAINE DE L'ARCHIDIOCESE D'AIX-EN-PROVENCE et autre
Refus du maire de mettre fin aux visites organisées sur le toit-terrasse de l’église des Saintes-Maries
de la Mer. La commune des Saintes-Maries de la Mer a ouvert au public depuis 1963 le toit-terrasse
de l’église forteresse, dont la gestion de cette activité à caractère touristique a été confiée, dans le
cadre d’une délégation de service public, à une société d’économie mixte, et auquel les visiteurs
accèdent par une tour extérieure au moyen d’un escalier indépendant dépourvu de toute
communication avec les parties de l’église effectivement affectées au culte ; qu’ainsi, en refusant
implicitement de mettre un terme à l’organisation des visites dans la partie de l’édifice non affectée
à l’exercice du culte et dont l’utilisation ne nécessitait pas de ce fait l’accord préalable du ministre
du culte, le maire des Saintes-Maries de la Mer n’a pas méconnu les prescriptions sus-rappelées et
n’a, par suite, pas entaché sa décision d’illégalité.
Tribunal administratif de Melun, n°0700177/5, 26 mars 2008, M. Daljit S.
Le sous-turban sikh, bien que d’une dimension plus modeste que le turban traditionnel et de couleur
sombre, ne peut être qualifié de signe discret ; que, dans ce contexte, l’interdiction légale pouvait
être régulièrement opposée à l’élève dès lors qu’en persistant à porter de façon permanente le
sous-turban, et en refusant d’y renoncer, il adoptait une tenue le faisant reconnaître
immédiatement comme appartenant à la religion sikhe, et cela sans que l’administration n’ait à
s’interroger sur la volonté de l’intéressé d’adopter une attitude de revendication de sa croyance, ni à
établir que son attitude était de nature à troubler l’ordre public ; qu’il s’ensuit qu’en confirmant la
sanction disciplinaire contestée le recteur de l’académie de Créteil a légalement tiré les
conséquences de la violation par Jasmeet S. de l’article L. 141-5-1 du code de l’éducation.
Tribunal administratif de Lyon, n°0602346 et 0602383, 15 mai 2008, M. Jean-Claude D.,
FEDERATION ARDECHOISE DE LIBRE PENSEE
Les associations cultuelles ne peuvent, sous quelque forme que ce soit, recevoir des subventions de
l'Etat, des départements et des communes ; que l’association arabo-musulmane de Tournon-surRhône, dont le but est notamment d’édifier un édifice à caractère cultuel sur le territoire de la
commune est une association cultuelle, au sens des dispositions précitées ; que la mise à
disposition des parcelles litigieuses pour un loyer annuel d’un euro, manifestement inférieur au prix
du marché, constitue une subvention prohibée
Cour administrative d’appel de Lyon, n°05LY01218, 10 juin 2008, Consorts I.
Invoquant ses convictions religieux pour s’opposer durant près de 30 minutes à toute présence
masculine dans la salle d’accouchement, notamment des médecins obstétriciens et anesthésistes et
de l’interne de garde, malgré les demandes instantes de ces derniers, le requérant a ainsi fait
obstacle aux examens nécessaires qui auraient permis de constater la survenue d’une anoxie fœtale
et de prévenir, par une césarienne prophylactique, les graves complications neurologiques dont a
été victime le jeune M. ; qu’en ne faisant pas appel immédiatement aux forces de police pour
expulser M. I., l’hôpital n’a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité ; qu’ainsi
l’état de l’enfant est totalement imputable à l’attitude de M. I. et M. et Mme I. ne peuvent
rechercher la responsabilité pour faute ou sans faute du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse.
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Cour administrative d’appel de Versailles, n° 06VE01149, 14 avril 2008, Mme Jacqueline
H.
Les refus réitérés de Mme H. d’obéir à l’ordre de retirer sa coiffe, qu'elle se borne à justifier par des
considérations d'hygiène, étaient constitutifs d’une faute de nature à justifier une sanction
disciplinaire.
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CE, ord. Ref., n° 315631, 6 mai 2008, M. Mouhamed B.
La fermeture d’un lieu de prière dans une résidence du CROUS fréquenté par des étudiants
musulmans, justifiée par des motifs de sécurité, ne porte aucune atteinte manifestement illégale
aux libertés fondamentales de culte et de réunion, le Conseil d'État souligne que lors des débats au
cours de l’audience publique, l’administration s’est montrée disposée à examiner avec l’association
requérante les conditions dans lesquelles une convention pourrait être conclue pour qu’elle dispose
de locaux permettant aux étudiants de pratiquer leur culte. De ces intentions de trouver une
solution au litige, le Conseil d'État déduit que le dossier ne fait pas ressortir d’atteinte grave et
manifestement illégale à une liberté fondamentale qu’il y aurait urgence à faire cesser.
Conseil d'Etat, n°286798, 27 juin 2008, Mme M.
Si Mme M. possède une bonne maîtrise de la langue française, elle a cependant adopté une
pratique radicale de sa religion, incompatible avec les valeurs essentielles de la communauté
française, et notamment avec le principe d’égalité des sexes ; qu’ainsi, elle ne remplit pas la
condition d’assimilation posée par l’article 21-4 du code civil ; que, par conséquent, le
gouvernement a pu légalement fonder sur ce motif une opposition à l’acquisition par mariage de la
nationalité française de Mme M.
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TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE NANTES
N°08201
___________
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
L'ASSOCIATION SPIRITUELLE DE L'EGLISE
SCIENTOLOGIE DU CENTRE OUEST
___________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
XXXXXXX
Juge des référés
___________
Le juge des référés
Audience du 18 janvier 2008
Ordonnance du 18 janvier 2008
__________
Vu la requête enregistrée le 16 janvier 2008, présentée pour l’ASSOCIATION SPIRITUELLE DE
L'EGLISE DE SCIENTOLOGIE DU CENTRE OUEST, dont le siège social est (…), par Me Salquain ;
L’ASSOCIATION SPIRITUELLE DE L'EGLISE DE SCIENTOLOGIE DU CENTRE OUEST demande au
juge des référés :
- d’ordonner la suspension de l’arrêté du 29 octobre 2007 ;
- de condamner la ville d’Angers à lui verser la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de
l’article L.761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
sur l’urgence à suspendre les effets de la décision attaquée :
- l’arrêté du 29 octobre n’a jamais été publié ;
pénales ;
- l’association n’aurait plus de raison d’être dès lors que ses membres risqueraient des poursuites
sur l’atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales :
- l’arrêté attaqué violerait l’article 9 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de
l’Homme dont la Cour accorde à l’Eglise de Scientologie la protection accordée aux religions ;
- les écrits de L.Ron Hubbard ne sont pas de nature à troubler l’ordre public et la motivation du
maire ne permet pas d’identifier le trouble à l’ordre public invoqué ;
- elle est présente dans la ville d’Angers depuis environ 25 ans sans qu’aucun trouble à l’ordre
public ne puisse lui être reprochés ;
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Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 janvier 2008, présenté pour la commune d'Angers qui
conclut au rejet de la requête et à ce que la société requérante soit condamnée à lui verser la somme de 2
000 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 ;
Elle soutient que :
- L’ASSOCIATION SPIRITUELLE DE L’EGLISE DE SCIENTOLOGIE DU CENTRE OUEST n’a pas intérêt
à agir puisque l’arrêté en cause ne porte pas atteinte à son objet social dont le champ d’application est
beaucoup plus étendu que la seule ville d’Angers ;
- L’ASSOCIATION SPIRITUELLE DE L’EGLISE DE SCIENTOLOGIE DU CENTRE OUEST n’a pas intérêt
à agir puisque son représentant ne justifie pas d’une autorisation pour la représenter en justice ;
- la requête est mal dirigée puisqu’elle vise une mesure prise par une personne morale de droit
public alors qu’il s’agit d’une décision du maire, personne physique ;
- l’urgence ne peut être retenue dès lors que l’action de L’ASSOCIATION SPIRITUELLE DE L’EGLISE
DE SCIENTOLOGIE DU CENTRE OUEST intervient plus de deux mois après que l’arrêté en cause ait fait
l’objet des mesures de publicité nécessaire ;
- l’arrêté n’empêche pas l’association requérante de remplir son objet social mais vise à empêcher
le prosélytisme de l’Eglise de Scientologie sur le domaine public de la ville d’Angers ;
- le Conseil d’Etat a reconnu que la référence à l’Eglise de Scientologie comme mouvement sectaire
ne portait pas atteinte à sa liberté religieuse ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision en date du 1er octobre 2007, par laquelle le président du tribunal a désigné
M. Cadenat, président, pour statuer sur les demandes de référé ;
Après avoir convoqué à une audience publique :
- Me Salquain, représentant l'ASSOCIATION SPIRITUELLE DE L'EGLISE SCIENTOLOGIE DU
CENTRE OUEST,
- la commune d'Angers ;
Vu le procès-verbal de l’audience publique du 18 janvier 2008 à 9 heures 30 au cours de laquelle
ont été entendus :
- le rapport de M. Cadenat, juge des référés,
- Me Salquain, représentant l'ASSOCIATION SPIRITUELLE DE L'EGLISE SCIENTOLOGIE DU
CENTRE OUEST;
- la commune d'Angers ;
Après avoir prononcé, à l’issue de l’audience à la clôture de l’instruction ;
Sur les conclusions présentées au titre de l’article L.521-2 du code de justice administrative :
© La lettre du droit des religions n°31 juin / juillet 2008
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Considérant qu'aux termes de l'article L.521-2 du code de justice administrative : « Saisi d’une
demande en ce sens justifiée par l’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à
la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme
de droit privé chargé de la gestion d’un service public aurait porté, dans l’exercice d’un de ses pouvoirs, une
atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit
heures. » et qu'aux termes de l'article L.522-1 dudit code : “Le juge des référés statue au terme d'une
procédure contradictoire écrite ou orale. Lorsqu'il lui est demandé de prononcer les mesures visées aux
articles L.521-1 et L.521-2, de les modifier ou d'y mettre fin, il informe sans délai les parties de la date et de
l'heure de l'audience publique (...) ” ; que l'article L.522-3 du même code dispose : « Lorsque la demande ne
présente pas un caractère d'urgence ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne
relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée,
le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée sans qu'il y ait lieu d'appliquer les deux
premiers alinéas de l'article L.522-1” ; qu’enfin aux termes du premier alinéa de l’article R.522-1 dudit code :
“La requête visant au prononcé de mesures d’urgence doit (...) justifier de l’urgence de l’affaire » ;
Considérant qu’il résulte des dispositions précitées que la condition d’urgence à laquelle est
subordonné le prononcé d’une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision
contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du
requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre ; qu’il appartient au juge des référés, saisi d’une demande
tendant à la suspension d’une telle décision, d’apprécier concrètement, compte-tenu des justifications
fournies par le requérant, si les effets de celle-ci sur la situation de ce dernier ou, le cas échéant, des
personnes concernées, sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, l’exécution de la décision
soit suspendue ;
Considérant, que pour justifier sa demande tendant à ce que l’arrêté du 29 octobre 2007 du maire
d’Angers soit suspendu ou l'ASSOCIATION SPIRITUELLE DE L'EGLISE SCIENTOLOGIE DU CENTRE OUEST
fait valoir que cet arrêté lui interdit totalement d’exercer la liberté religieuse et qu’il y a urgence à faire
cesser cette situation ; qu’il ressort toutefois des pièces du dossier que le dit arrêté a fait l’objet d’un
affichage régulier en mairie depuis le 6 novembre 2007 ; que ce n’est que le 18 janvier 2008, soit plus de
deux mois après l’affichage que l’association requérante a saisi le tribunal d’une demande en référé ; que,
dans ces conditions l’urgence ne peut être considérée comme établie; que, par suite, la requête de
L’ASSOCIATION SPIRITUELLE DE SCIENTOLOGIE DU CENTRE OUEST doit être rejetée ;
Sur les conclusions présentées au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, que
le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la
somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; le juge tient compte de
l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée ; il peut, même d'office, ou pour des raisons
tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Considérant que ces dispositions font obstacle aux conclusions de l'ASSOCIATION SPIRITUELLE DE
L'EGLISE SCIENTOLOGIE DU CENTRE OUEST dirigées contre la commune d'Angers qui n’est pas, dans la
présente instance de référé, la partie perdante ; qu’il n’ y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de
mettre à la charge de l'ASSOCIATION SPIRITUELLE DE L'EGLISE SCIENTOLOGIE DU CENTRE OUEST, la
somme que la commune d’Angers demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens;
ORDONNE
Article 1er : La requête de l'ASSOCIATION SPIRITUELLE DE L'EGLISE SCIENTOLOGIE DU CENTRE
OUEST est rejetée.
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TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE MELUN
N° 0504859/5 et n° 0603837/5
___________
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Mme Marie-Henriette E.
___________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Mme Thibau-Lévêque
Rapporteur
___________
Le Tribunal administratif de Melun
M. Choplin
Commissaire du gouvernement
___________
(5ème chambre)
Audience du 8 janvier 2008
Lecture du 25 janvier 2008
___________
Vu 1°/ la requête, enregistrée le 19 août 2005 sous le n° 0504859, présentée pour Mme MarieHenriette E., demeurant(…), par Me Valiame ; Mme E. demande au tribunal :
1°) d’annuler, pour excès de pouvoir, la décision n° 77 en date du 23 juin 2005 par laquelle le
directeur opérationnel territorial courrier de La Poste du Val-de-Marne a prononcé à son encontre la sanction
de l’exclusion temporaire de fonctions pour une durée de six mois ;
2°) d’enjoindre à La Poste d’Ile-de-France de la réintégrer dans ses fonctions à compter de la date
de notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de La Poste d'Ile-de-France une somme de 2.500 euros en application
des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 septembre 2006, présenté par La Poste d'Ile-deFrance, qui conclut au rejet de la requête ;
Vu 2°/ la requête, enregistrée le 13 juin 2006 sous le n° 063837, présentée pour Mme MarieHenriette E., demeurant (…), par Me Trouvé ; Mme E. demande au tribunal :
1°) d’annuler, pour excès de pouvoir, la décision n° 78 en date du 17 mai 2006 par laquelle la
directrice opérationnelle territoriale courrier de La Poste du Val-de-Marne a prononcé à son encontre la
sanction de l’exclusion temporaire de fonctions pour une durée de dix-huit mois ;
2°) d’enjoindre à La Poste d’Ile-de-France de la réintégrer dans ses fonctions à compter de la date
de notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de La Poste d'Ile-de-France une somme de 3.000 euros en application
des dispositions de l’article L 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er mars 2007, présenté par La Poste d'Ile-de-France, qui
conclut au rejet de la requête ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la Constitution du 4 octobre 1958 ;
Vu la déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l’Etat ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée, ensemble la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984
modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2008 ;
- le rapport de Mme Thibau-Lévêque ;
- les observations de Me Valiame, pour Mme E. ;
- et les conclusions de M. Choplin, commissaire du gouvernement ;
Considérant que Mme E. demande au tribunal l’annulation, d’une part, de la décision en date du
23 juin 2005 par laquelle le directeur territorial courrier de La Poste du Val-de-Marne a prononcé à son
encontre la sanction de l’exclusion temporaire de fonctions pour une durée de six mois et, d’autre part, de la
décision en date du 17 mai 2006 par laquelle la directrice territoriale courrier de La Poste du Val-de-Marne a
prononcé à son encontre la sanction de l’exclusion temporaire de fonctions pour une durée de dix-huit mois ;
Considérant que les requêtes susvisées présentées par Mme E. présentent à juger les mêmes
questions et ont fait l’objet d’une instruction commune ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul
jugement ;
- Sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision de La Poste en date du 23 juin 2005 :
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier qu’à la suite d’une réorganisation du service mise en
place, après avis du comité technique paritaire local dans sa séance du 17 décembre 2004, au centre
courrier de Créteil fin décembre 2004 et consistant à banaliser la journée du samedi s’agissant de la
distribution du courrier, dans l’objectif d’une meilleure satisfaction des usagers de La Poste, les horaires de
travail de l’ensemble des facteurs de ce centre ont été modifiés, afin que la présence de tous soit assurée le
samedi ; que Mme E., qui exerce les fonctions de facteur dans ce centre depuis 1979, n’a pas assuré son
service les samedis 29 janvier 2005, 12 et 19 février 2005, 5 et 12 mars 2005 ; que, après plusieurs mises
en garde et avertissements relatifs aux sanctions auxquelles l’exposaient ses absences injustifiées du service,
Mme E. a fait l’objet d’un blâme ; que, malgré cette sanction et l’avertissement qui l’accompagnait, Mme E.
a, de nouveau, été absente du service sans justificatif les samedis 9, 16, 23 et 30 avril 2005 ; que, dans le
cadre de la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires, le directeur territorial courrier de La Poste
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du Val-de-Marne a prononcé à son encontre, après avis du conseil de discipline réuni le 16 juin 2005, la
sanction de l’exclusion temporaire de fonctions pour une durée de six mois ;
Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article 19 de la loi du 13 juillet 1983 modifiée relative
aux droits et obligations des fonctionnaires : « (…) Aucune sanction disciplinaire autre que celles classées
dans le premier groupe par les dispositions statutaires relatives aux fonctions publiques de l’Etat, territoriale
et hospitalière ne peut être prononcée sans consultation préalable d’un organisme siégeant en conseil de
discipline dans lequel le personnel est représenté. / L’avis de cet organisme de même que la décision
prononçant une sanction disciplinaire doivent être motivés » ; qu’aux termes de l’article 28 de la même loi :
« Tout fonctionnaire, quel que soit son rang dans la hiérarchie, est responsable de l’exécution des tâches qui
lui sont confiées. Il doit se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique, sauf dans le cas où
l’ordre donné est manifestement illégal (…) » ;
Considérant, d’une part, que, contrairement à ce que soutient la requérante, la décision attaquée
du 23 juin 2005, qui vise les dispositions législatives relatives à la procédure disciplinaire applicable aux
fonctionnaires ainsi que l’avis du conseil de discipline réuni le 16 juin 2005 dont le compte rendu figure au
dossier et qui précise dans son dispositif que la sanction est motivée par son refus d’exercer son service le
samedi de façon récurrente, est suffisamment motivée au regard des dispositions précitées de l’article 19 de
la loi du 13 juillet 1983 modifiée ;
Considérant, d’autre part, qu’il ressort de la décision attaquée et de l’ensemble des pièces du
dossier que le motif de l’exclusion temporaire de fonctions de Mme E. pour une durée de six mois résulte,
non pas de son appartenance à l’église adventiste du 7ème jour, mais de sa volonté persistante de ne pas
assurer son service le samedi et, ainsi, de ne pas se conformer à la nouvelle organisation du travail mise en
œuvre dans son service fin décembre 2004 ; que, dès lors, Mme E. ne peut utilement, pour contester la
légalité de la décision attaquée, invoquer le principe de la liberté de conscience inscrit dans la Constitution,
ni la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, ni la convention européenne de sauvegarde des droits
de l’homme, ni les dispositions de l’article 1er de la loi du 9 décembre 1905, ni celles de l’article 6 de la loi du
13 juillet 1983 modifiée précitée, ni faire valoir l’absence de trouble à l’ordre public résultant de ses
absences du service le samedi ;
Considérant, en deuxième lieu, qu’aux termes de l’article 37 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier
1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat : « Les fonctionnaires
titulaires, en activité ou en service détaché, qui occupent un emploi conduisant à pension du code des
pensions civiles et militaires de retraite peuvent, sur leur demande, sous réserve des nécessités de la
continuité et du fonctionnement du service et compte tenu des possibilités d’aménagement de l’organisation
du travail, être autorisés à accomplir un service à temps partiel, qui ne peut être inférieur au mi-temps, dans
les conditions définies par décret en Conseil d’Etat. (…) » ; que l’article 37 bis de la même loi définit les cas
où le temps partiel est accordé de plein droit aux fonctionnaires ; qu’il résulte de ces dispositions que
l’autorisation d’exercer à temps partiel pour convenances personnelles est soumise à l’intérêt du service ;
Considérant, d’une part, que l’administration de La Poste, qui venait de mettre en place une
restructuration du service de sorte d’assurer la présence de tous les facteurs du centre courrier de Créteil le
samedi, a pu légalement, au regard de l’intérêt du service, refuser d’accorder à Mme E. une modalité
d’exercice à temps partiel de 80% lui permettant, pour convenances personnelles, de ne pas travailler le
samedi et lui proposer une modalité différente d’exercice à temps partiel ; que, d’autre part, à l’appui de ses
allégations selon lesquelles elle aurait demandé une mutation dans un service ou un établissement ne
travaillant pas le samedi, Mme E. ne produit aucune pièce justificative, et notamment aucune fiche de
demande de mutation portant des vœux suffisamment larges pour qu’elle ait quelque chance d’obtenir
satisfaction ; que, dans ces circonstances et compte tenu de l’ensemble des pièces du dossier, alors que la
circonstance que Mme E. aurait bénéficié pendant 19 ans d’arrangements avec son supérieur hiérarchique lui
permettant de ne pas travailler le samedi est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée, le
détournement de pouvoir allégué n’est pas établi ;
Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article 3 de la convention européenne de
sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à
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des peines ou traitements inhumains ou dégradants » ; que ces stipulations sont inopérantes au regard d’une
décision disciplinaire infligeant à un fonctionnaire, pour manquement à ses obligations professionnelles, la
sanction de l’exclusion temporaire de ses fonctions pour une durée de six mois ;
Considérant, enfin, que le moyen tiré de la méconnaissance de la déclaration universelle des droits
de l’homme est inopérant ;
- Sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision de La Poste en date du 17 mai 2006 :
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier qu’à la suite de l’exclusion de fonctions dont elle a
fait l’objet, à titre disciplinaire, du 1er juillet 2005 au 31 décembre 2005, Mme E. a été réintégrée dans ses
fonctions à compter du 2 janvier 2006 ; que l’intéressée n’a pas assuré son service les samedis 7 et 28
janvier 2006, 4, 18 et 25 février 2006 et 4, 11, 18 et 25 mars 2006 ; que, dans le cadre de la procédure
disciplinaire applicable aux fonctionnaires, la directrice territoriale courrier de La Poste du Val-de-Marne a
prononcé à l’encontre de l’intéressée, après avis du conseil de discipline en sa séance du 3 mai 2006, la
sanction de l’exclusion temporaire de fonctions pour une durée de dix-huit mois ;
Considérant, en premier lieu, que les absences injustifiées du service constituent pour un
fonctionnaire une faute professionnelle de nature à justifier une sanction disciplinaire, laquelle n’a pas à être
motivée au regard de l’intérêt du service mais au regard du manquement aux obligations professionnelles
qui a été commis ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision de sanction en date du 17 mai 2006
est illégale en ce que l’administration n’a pas justifié en quoi les absences du service de la requérante le
samedi sont de nature à perturber le bon fonctionnement du service doit être rejeté ;
Considérant, en second lieu, qu’il ressort de la décision attaquée et de l’ensemble des pièces du
dossier que le motif de l’exclusion temporaire de fonctions de Mme E. pour une durée de dix-huit mois
résulte, non pas de son appartenance à l’église adventiste du 7ème jour, mais de sa volonté persistante de ne
pas assurer son service le samedi et, ainsi, de ne pas se conformer à la nouvelle organisation du travail mise
en œuvre dans son service fin décembre 2004 ; que, dès lors, Mme E. ne peut utilement, pour contester la
légalité de la décision attaquée, invoquer le principe de la liberté de conscience inscrit dans la Constitution,
ni les dispositions des articles 1er et 2 de loi du 9 décembre 1905 ; que, dès lors, le détournement de pouvoir
allégué n’est pas établi ; que la circonstance que, pendant dix-neuf ans de service à La Poste, Mme E.
n’aurait jamais travaillé le samedi, est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que Mme E. n’est fondée à demander ni
l’annulation de la décision en date du 23 juin 2005 par laquelle le directeur opérationnel territorial courrier
de La Poste du Val-de-Marne a prononcé à son encontre la sanction de l’exclusion temporaire de fonctions
pour une durée de six mois, ni l’annulation de la décision en date du 17 mai 2006 par laquelle la directrice
opérationnelle territoriale courrier de La Poste du Val-de-Marne a prononcé à son encontre la sanction de
l’exclusion temporaire de fonctions pour une durée de dix-huit mois ; que, par voie de conséquence, ses
conclusions à fin d’injonction et ses conclusions tendant à ce qu’il soit fait application des dispositions de
l’article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu’être rejetées ;
DECIDE:
Article 1er : Les requêtes n° 054859 et n° 063837 présentées par Mme E. sont rejetées.
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TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE STRASBOURG
N° 0404876
___________
M. Metin K.
___________
M. Mony
Rapporteur
___________
M. Simon
Commissaire du gouvernement
___________
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Tribunal administratif de Strasbourg
(4ème Chambre)
Audience du 15 avril 2008
Lecture du 14 mai 2008
___________
Vu la requête, enregistrée le 12 novembre 2004, présentée pour M. Metin K., demeurant (…), par
Me Henri-Paul Stuck, avocat ; M. K. demande au tribunal :
-
d’annuler la décision en date du 13 septembre 2004 par laquelle le sous-préfet de Mulhouse lui
a refusé l’exploitation d’une licence de 4ème catégorie pour l’établissement « Mélissa », sis (…)
à Mulhouse ;
-
de constater qu’il bénéficie d’un droit acquis concernant l’autorisation d’exploiter cette licence
dans cet établissement ;
-
de l’autoriser à exploiter cette licence dans cet établissement ;
-
de statuer sur les frais ;
M. K. soutient qu’il n’existe pas de mosquée dans l’entourage de l’établissement pour lequel il
sollicite l’autorisation d’exploiter une licence de IVème catégorie ; qu’il n’y a de ce fait aucune zone protégée
à l’intérieur de laquelle l’exploitation d’une telle licence serait prohibée ; que l’établissement qui existait
précédemment à la même adresse disposait d’une autorisation d’exploiter une licence ; que cette
autorisation avait été délivrée par le sous-préfet de Mulhouse ; que la décision attaquée doit être annulée ;
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 janvier 2005, présenté par le préfet du Haut-Rhin, qui
conclut au rejet de la requête ;
Le préfet du Haut-Rhin fait valoir que le code de la santé publique l'autorise à fixer la distance à
laquelle un débit de boissons à consommer sur place peut être établi autour d'un édifice consacré à un culte
; que cette distance a été fixée à 125 mètres par l'arrêté préfectoral du 5 décembre 1961 ; qu'il est établi
qu'un lieu de culte musulman est situé au (…); que l'établissement "La Pampa" ne bénéficiait pas d'un droit
acquis, ayant été créé en 1979 ; que l'autorisation d'exploiter une licence de IVème catégorie résulte d'une
erreur, la mosquée de la rue (…) ayant été créée en 1978 ; que toute autorisation administrative étant
délivrée intuitu personnae, le requérant ne peut se prévaloir d'un quelconque droit acquis ; qu'aucune
possibilité de présenter un successeur n'existe en matière de débits de boissons ; que le requérant ne peut
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se prévaloir de l'existence d'une exploitation de licence par l'établissement "La Pampa" pour bénéficier d'une
autorisation d'exploitation pour son propre établissement ;
Vu le mémoire, enregistré le 27 décembre 2006, présenté pour M. K., qui conclut aux mêmes fins
que la requête ; M. K. demande en outre qu'il soit enjoint au préfet de réexaminer sa situation et de lui
délivrer une autorisation d'exploitation, et qu'il soit mis à la charge de l’Etat le paiement de la somme de
1000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
M. K. soutient par ailleurs que l'existence de la mosquée de la rue (…) en 1978 n'est pas établie ;
que, dès lors, l'autorisation d'exploitation d'une licence de IVème catégorie à l'établissement "La Pampa" a
été valablement accordée ; que l'autorisation qu'il sollicite ne peut pas lui être refusée, l'effectivité du
périmètre de protection n'ayant pas été assurée ; que le culte musulman n'est pas reconnu par le concordat
de 1802 applicable en Alsace-Moselle ;
Vu le mémoire, enregistré le 2 février 2007, présenté par le préfet du Haut-Rhin, qui conclut aux
mêmes fins que ses précédentes écritures tendant au rejet de la requête et fait valoir que l'existence d'un
culte quelconque constitue une condition suffisante pour ériger une zone de protection interdisant
l'exploitation d'un débit de boissons, conformément aux dispositions de l'article L. 3335-1 du code de la
santé publique ; que le concordat de 1802 n'a pas à être pris en considération pour la délivrance d'une
autorisation d'exploitation d'un débit de boissons ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu l’arrêté du préfet du Haut-Rhin du 5 décembre 1961 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 avril 2008 :
-
le rapport de M. Mony, rapporteur ;
-
et les conclusions de M. Simon, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’aux termes de l’article L. 3335-1 du code de la santé publique susvisé : « Le
représentant de l’Etat dans le département peut prendre des arrêtés pour déterminer sans préjudice des
droits acquis, les distances auxquelles les débits de boissons à consommer sur place ne peuvent être établis
autour des édifices et établissements suivants dont l’énumération est limitative : 1° Edifices consacrés à un
culte quelconque (…) » ; qu’aux termes de l’article 1er de l’arrêté du préfet du Haut-Rhin du 5 décembre
1961 précité : « Sous réserve des droits acquis les débits de boissons à consommer sur place (…) ne
pourront (…) être installés à une distance moindre 1°) des édifices consacrés à un culte quelconque (…) que
celles indiquées ci-dessous : (…) 125 mètres dans les communes de plus de 20.000 habitants » ;
Considérant que l’arrêté préfectoral du 5 décembre 1961 était, à la date de la décision attaquée,
toujours en vigueur ; qu’il ressort des pièces du dossier qu’un lieu de culte musulman existe depuis 1978 au
41 rue (…) à Mulhouse ; que l’établissement « Mélissa » pour lequel M. K. a sollicité une autorisation
d’exploitation d’une licence de IVème catégorie, situé au 26 rue (…), se trouve à 90 mètres de ce lieu de
culte ; que les dispositions précitées excluent toute application du Concordat de 1802, nonobstant la
circonstance que celui-ci soit applicable en Alsace-Moselle ; que, dès lors, M. K. n’est pas fondé à soutenir
que c’est à tort que le sous-préfet de Mulhouse lui a refusé l’autorisation d’exploiter une licence de IVème
catégorie pour son établissement ;
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Considérant que, si l’instauration d’une zone de protection par l’arrêté préfectoral du 5 décembre
1961 ne fait pas par elle-même obstacle à la poursuite de son activité par un débit de boissons dans les
zones de prohibition visées, il ne saurait cependant être excipé d’un droit acquis au profit d’un débit de
boissons que si l’exploitation du fonds s’est poursuivie au jour où l’arrêté a été publié ; que l’autorisation
d’exploitation d’une licence de IVème catégorie délivrée à l’établissement « La Pampa », lors de sa création
en 1979, ne peut être ainsi regardée, dès lors que cet établissement était situé dans la zone de protection
instaurée par l’arrêté préfectoral du 5 décembre 1961, que comme résultant d’une erreur commise par
l’administration ; qu’ainsi, cette autorisation ne peut pas être considérée comme ayant créé au profit du
requérant, qui n’était pas l’exploitant de cet établissement, de droit acquis au sens de l’article L. 3335-1 du
code de la santé publique précité ; que c’est dès lors à bon droit que l’administration lui a refusé
l’autorisation sollicitée ; que, par suite, M. K. n’est pas fondé à soutenir qu’il disposait d’un droit acquis
concernant l’exploitation d’une licence de IVème catégorie au profit de l’établissement « Mélissa » sis au 26
rue (…) à Mulhouse ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède, que les conclusions à fin d’annulation de la
requête doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d’injonction et
d’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE:
Article 1er :
La requête de M. Metin K. est rejetée.
Le présent jugement sera notifié à M. Metin K. et au préfet du Haut-Rhin. Copie en
Article 2 :
sera adressée au ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales.
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TRIBUNAL ADMINISTRATIF
de BASTIA
N° 0800412
___________
M. et Mme Nicolas P.
et autres
___________
Mme E.
Juge des référés
___________
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le juge des référés,
Ordonnance du 2 mai 2008
__________
Vu la requête, enregistrée le 7 avril 2008, présentée pour M. et Mme Nicolas P., demeurant (…), M.
Pierre-Jean M., demeurant (…), et Mlle Marie-Ange M., demeurant (…), par Me Peres ; M. et Mme P., M. M.
et Mlle M. demandent au juge des référés :
1°) d’ordonner, jusqu’à ce qu’il soit statué au fond, la suspension de l’exécution de l’arrêté en date
du 23 janvier 2007, par lequel le maire de la commune de Lucciana a accordé un permis de construire à
l’association des témoins de Jéhovah ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Lucciana une somme de 1 500,00 euros au titre de
l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que le permis de construire en litige n’a pas été affiché dans des conditions
régulières ; sur l’urgence, que la construction autorisée est en cours de réalisation ; sur le fond, que l’arrêté
ne comporte ni le nom, ni le prénom de son auteur ; qu’il n’est pas justifié de la qualité de propriétaire du
terrain d’assiette du projet de M. T. ; que la notice jointe au dossier ne permet pas d’apprécier l’impact
visuel du bâtiment envisagé ; que les plans font apparaître des discordances dans la hauteur du bâtiment ;
que la réunion conjointe des sous-commissions départementales de sécurité n’était pas compétente pour se
prononcer sur le projet ; qu’en tout état de cause, sa composition était irrégulière ; qu’en effet, les
associations de personnes handicapées du département n’étaient représentées que par une seule personne
au lieu de trois ; que la qualité des représentants de la direction départementale de l’équipement, de la
direction départementale des affaires sanitaires et sociales et de la direction départementale des services
d’incendie et de secours, mais aussi du maire de la commune, n’est pas démontrée ; que la notice
descriptive sommaire des travaux ne permet pas de vérifier que les matériaux de construction sont
suffisamment résistants au feu ; que l’une des issues de secours de la salle de réunion présente une largeur
insuffisante ; que le nombre de P.s de stationnement n’est pas susceptible de répondre aux besoins ;
Vu la décision attaquée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée relative aux droits des citoyens dans leurs rapports
avec l’administration ;
Vu le code de l’urbanisme ;
Vu le code de la construction et de l’habitation ;
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Vu le code de justice administrative ;
Vu la requête numéro 0700376, enregistrée le 28 mars 2008, par laquelle M. et Mme P., M. M. et
Mlle M. demandent l’annulation de l’arrêté susvisé ;
Après avoir, au cours de l’audience publique du 30 avril 2008, présenté son rapport et entendu les
observations de Me Peres pour M. et Mme P., M. M. et Mlle M. ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une
décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge
des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision,
ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en
l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...) » ;
Considérant que les travaux autorisés par l’arrêté en litige sont en cours de réalisation ; qu’ainsi, la
condition d’urgence exigée par les dispositions susvisées doit être considérée comme remplie ;
Considérant qu’en l’état de l’instruction, les moyens tirés de la méconnaissance de l’article 4 de la
loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée, du 7° de l’article R. 421-2 du code de l’urbanisme alors en
vigueur, relatif à la notice permettant d'apprécier l'impact visuel du projet, du II de l’arrêté du 1er août 2006
pris pour l’application de l’article R. 111-19-2 du code de la construction et de l’habitation et relatif à la
largeur minimale des portes principales des locaux pouvant recevoir cent personnes ou plus et de
l’insuffisance des emplacements réservés au stationnement sont de nature à faire naître un doute sérieux
quant à la légalité de la décision attaquée ; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, d’ordonner la
suspension de l’exécution de cette décision ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des
dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la commune
de Lucciana la somme que M. et Mme P., M. M. et Mlle M. demandent au titre des frais exposés et non
compris dans les dépens ;
ORDONNE
Article 1er : L’exécution de l’arrêté en date du 23 janvier 2007, par lequel le maire de la commune
de Lucciana a accordé un permis de construire à l’association des témoins de Jéhovah, est suspendue.
Article 2 : Les conclusions de M. et Mme P., M. M. et Mlle M. tendant à la condamnation de la
commune de Lucciana au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens sont rejetées.
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TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE NICE
N°0404982
___________
ASSOCIATION « CENTRE CHRETIEN SOUFFLE NOUVEAU »
___________
Mlle Gaillard
Rapporteur
___________
M. Orengo
Commissaire du gouvernement
___________
Audience du 15 avril 2008
Lecture du 6 mai 2008
___________
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Tribunal administratif de Nice
(5ème Chambre)
Vu la requête, enregistrée le 9 octobre 2004, présentée par l'ASSOCIATION « CENTRE CHRETIEN
SOUFFLE NOUVEAU », dont le siège est (…) à Nice (06300) ; l'ASSOCIATION « CENTRE CHRETIEN SOUFFLE
NOUVEAU » demande au tribunal :
-
d’annuler l’arrêté du préfet des Alpes-Maritimes, en date du 26 mai 2004, décidant qu’elle n’a
pas un caractère exclusivement cultuel ouvrant droit au bénéfice des dispositions de l’article
238 bis du code général des impôts ;
-
de reconnaître qu’elle a le caractère d’une association cultuelle ;
-
de lui accorder le remboursement de ses frais ;
……………………………………………………………………………………………
Vu l’arrêté attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 19 avril 2005, présenté par l'ASSOCIATION « CENTRE CHRETIEN
SOUFFLE NOUVEAU » ; elle maintient ses conclusions aux fins d’annulation et demande, en outre, que soit
prononcé, en sa faveur, un arrêté accordant le bénéfice des articles 200 et 238 bis du code général des
impôts ;
……………………………………………………………………………………………………
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
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Vu la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l’Etat ;
Vu le décret n°66-388 du 13 juin 1966 relatif à la tutelle administrative des associations, fondations
et congrégations ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 avril 2008 :
- le rapport de Mlle Gaillard ;
- et les conclusions de M. Orengo , commissaire du gouvernement ;
Considérant que l'ASSOCIATION « CENTRE CHRETIEN SOUFFLE NOUVEAU » a sollicité, le 16 mars
2004, auprès du préfet des Alpes-Maritimes, l’autorisation de bénéficier des dispositions des articles 200 et
238 bis du code général des impôts ; que le préfet lui a opposé un refus, portant exclusivement sur le
bénéfice de l’article 238 bis, par arrêté du 26 mai 2004, et a laissé sans réponse le recours gracieux formé
par l’association le 29 juin 2004 ; que l'ASSOCIATION « CENTRE CHRETIEN SOUFFLE NOUVEAU » doit être
regardée comme demandant notamment, par la présente requête, l’annulation, non seulement de l’arrêté du
26 mai 2004, mais aussi de la décision implicite de rejet de son recours gracieux née de l’absence de
réponse du préfet ;
Sur les conclusions aux fins d’annulation :
Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article 1er de la loi du 9 décembre 1905 susvisée : « La
république assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules
restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public » ; qu’aux termes de l’article 18 de la même loi :
"Les associations formées pour subvenir aux frais, à l’entretien et à l’exercice public d’ un culte devront être
constituées conformément aux articles 5 et suivants du titre 1er de la loi du 1er juillet 1901. Elles seront, en
outre, soumises aux prescriptions de la présente loi ." ; qu’aux termes de l’article 19 de la même loi : « Ces
associations devront avoir exclusivement pour objet l’exercice d’un culte …. » ; qu’il résulte des dispositions
précitées, en premier lieu, que les associations revendiquant le statut d’association cultuelle doivent avoir
exclusivement pour objet l’exercice d’un culte, en deuxième lieu, qu’elle ne peuvent mener que des activités
en relation avec cet objet, telles que l’acquisition, la location, la construction, l’aménagement et l’entretien
des édifices servant au culte ainsi que l’entretien et la formation des ministres et autres personnes
concourant à l’exercice du culte et, en troisième lieu, que le fait que certaines des activités de l’association
pourraient porter atteinte à l’ordre public s’oppose à ce que cette association bénéficie du statut
d’association cultuelle ;
Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article 238 bis du code général des impôts, dans la
version alors en vigueur : « 1. Ouvrent droit à une réduction d’impôt égale à 60 % de leur montant les
versements …. effectués par les entreprises assujetties à l’impôt sur le revenu ou à l’impôt sur les sociétés
au profit : … b) …. d’associations cultuelles ou de bienfaisance qui sont autorisées à recevoir des dons et
legs » ; que l’article 1er-1 du décret du 13 juin 1966 susvisé prévoit que les associations cultuelles qui n’ont
pas été autorisées à recevoir des dons et legs peuvent, néanmoins, bénéficier des dispositions de l’article
238 bis du code général des impôts, sous réserve d’ obtenir une autorisation délivrée par le préfet du
département de leur siège ;
Considérant que, pour refuser, par arrêté du 26 mai 2004, à l’ASSOCIATION « CENTRE CHRETIEN
SOUFFLE NOUVEAU » l’autorisation de bénéficier des dispositions de l’article 238 bis du code général des
impôts, le préfet des Alpes-Maritimes s’est fondé sur ce que les activités de la demanderesse ne lui
conféraient pas, dans leur ensemble, en raison de l’objet ou de la nature de certaines d’entre-elles, le
© La lettre du droit des religions n°31 juin / juillet 2008
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caractère d’une association cultuelle et sur ce que les buts de cette association n’étaient pas exclusivement
cultuels et désintéressés ; que ces motifs ont été précisés et explicités dans les écritures en défense ;
Considérant que le préfet indique que l’association mène des activités à « connotation sectaire » et
pas seulement une mission évangélique ; que, toutefois, il n’établit pas, par les pièces produites au dossier,
que ce qu’il qualifie de « séances guérisseuses », incantations, conditionnement psychologique, séances de
« mise en condition » d’environ deux heures avec diffusion de musique assourdissante, chansons, cris et
appels à Jésus donnant lieu à de « véritables scènes d’hystérie collective » corresponde à une autre activité
que l’exercice d’un culte, caractérisé par l’accomplissement de certaines pratiques qui, aux yeux des
croyants, les mettent en communication avec une puissance surnaturelle ;
Considérant que la circonstance que la police soit intervenue, le 15 mai 1996, à la suite de l’appel
de voisins se plaignant de tapage ne suffit pas à démontrer que les activités de l’association porteraient
atteinte à l’ordre public alors, au surplus, que celle-ci soutient, sans être contredite, qu’elle organise
désormais ses réunions moins tard et qu’elle a fait faire des travaux dans ses locaux, ce qui a mis fin à ses
difficultés avec le voisinage ; que le fait, d’une part, que la présidente de l’association et une adhérente
soient connues du service des Renseignements généraux, d’autre part, que le mari de la présidente et un
adhérent aient été mis en cause dans une procédure pénale, sur laquelle aucune précision n’est apportée,
ne permet pas non plus de l’établir ; qu’enfin, le préfet ne justifie pas l’existence d’un dépôt de plainte de la
part d’une personne qui aurait été spoliée par sa fille, adhérente de l’ASSOCIATION « CENTRE CHRETIEN
SOUFFLE NOUVEAU », ni, surtout, que cette spoliation, à la supposer établie, ait été commise à l’instigation
de l’association requérante ;
Considérant que le préfet indique que l’association requérante en a créé deux autres en 1997,
dites « ensemble pour la moisson » ou « source pour les nations » et « Bethléem » ou
« librairie
Bethléem » et en infère qu’elle a pour but de recueillir le maximum de dons et legs ; que la requérante
reconnaît avoir créé au moins l’une des associations précitées, mais indique qu’il s’agit pour elle de pouvoir
exercer, par leur biais, des activités charitables et missionnaires non autorisées aux associations cultuelles ;
qu’en tout état de cause, la création de deux autres associations et la circonstance que ces associations et
l’ASSOCIATION « CENTRE CHRETIEN SOUFFLE NOUVEAU » comportent des dirigeants communs ne suffit
pas à établir, soit que l’association requérante ne se consacrerait pas exclusivement à l’exercice d’un culte,
soit qu’elle mènerait, en liaison avec les deux autres associations ainsi créées, des activités contraires à
l’ordre public ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède qu’il n’est pas établi que l’ASSOCIATION « CENTRE
CHRETIEN SOUFFLE NOUVEAU » n’a pas exclusivement pour objet l’exercice d’un culte, qu’elle mène
d’autres activités que celles en relation avec cet objet et que certaines de ses activités pourraient porter
atteinte à l’ordre public ; que, dans ces conditions, l’association requérante est fondée à demander
l’annulation tant de l’arrêté préfectoral du 26 mai 2004, que de la décision par laquelle le préfet des AlpesMaritimes a implicitement rejeté son recours gracieux ;
Sur les conclusions aux fins d’injonction :
Considérant qu’aux termes de l’article L 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa
décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public … prenne une mesure d’exécution
dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette
mesure assortie, le cas échéant, d’un délai d’exécution » ; qu’aux termes de l’article L 911-2 du même code :
« Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public …. prenne à nouveau
une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la
même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé » ;
Considérant, en premier lieu, que le préfet des Alpes-Maritimes n’a pris aucune décision explicite sur
la demande de l’ASSOCIATION « CENTRE CHRETIEN SOUFFLE NOUVEAU » tendant à être autorisée à
bénéficier des dispositions de l’article 200 du code général des impôts et que ladite association n’a pas
demandé au Tribunal d’annuler une éventuelle décision implicite de rejet ; que, dès lors, le présent
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146
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jugement n’implique aucune mesure d’exécution en ce qui concerne la demande de l’association portant sur
l’article 200 du code général des impôts ;
Considérant, en second lieu, que le présent jugement n’implique pas nécessairement, eu égard à
son motif, que l’administration prenne un arrêté autorisant l’ASSOCIATION « CENTRE CHRETIEN SOUFFLE
NOUVEAU » à bénéficier des dispositions de l’article 238 bis du code général des impôts, ainsi qu’elle le
demande ; qu’il implique seulement, ce qu’elle ne demande pas, même à titre subsidiaire, que le préfet des
Alpes-Maritimes procède à une nouvelle instruction de la demande et prenne à nouveau une décision ; que,
dans ces conditions, les conclusions de l’ASSOCIATION « CENTRE CHRETIEN SOUFFLE NOUVEAU » ne
peuvent également qu’être rejetées en tant qu’elles portent sur l’article 238 bis du code général des impôts ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les
instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre
partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient
compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des
raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. » ; qu’en demandant
le remboursement de ses frais éventuels, l’ASSOCIATION « CENTRE CHRETIEN SOUFFLE NOUVEAU » doit
être regardée comme présentant ses conclusions sur le fondement des dispositions précitées de l’article L
761-1 du code de justice administrative ; qu’il ne peut, toutefois, être fait droit auxdites conclusions qui
n’ont pas été chiffrées ;
DECIDE:
Article 1er : La décision implicite par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté le recours
gracieux de l’ASSOCIATION « CENTRE CHRETIEN SOUFFLE NOUVEAU » dirigé contre l’arrêté du 26 mai
2004, ensemble l’arrêté préfectoral du 26 mai 2004, sont annulés.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de l’ASSOCIATION « CENTRE CHRETIEN
SOUFFLE NOUVEAU » est rejeté.
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147
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TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE MARSEILLE
N°0502887
___________
ASSOCIATION DIOCESAINE DE
L'ARCHIDIOCESE D'AIX-EN-PROVENCE
et autre
___________
M. Steck
Président-rapporteur
___________
M. Gonneau
Commissaire du gouvernement
___________
Audience du 1er avril 2008
Lecture du 22 avril 2008
___________
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Tribunal administratif de Marseille
(8ème chambre)
Vu la requête, enregistrée le 3 mai 2005, présentée pour l'ASSOCIATION DIOCESAINE DE
L’ARCHIDIOCESE D’AIX-EN-PROVENCE, dont le siège est (…), et M. Thierry François DE V., curé de l'église
des Saintes-Maries de la Mer, par Me Guin ;
Les requérants demandent au Tribunal :
- d’annuler la décision implicite par laquelle le maire des Saintes-Marie de la Mer a refusé de mettre
fin aux visites organisées sur le toit-terrasse de l’église des Saintes-Maries de la Mer ;
- d’enjoindre au maire des Saintes-Maries de la Mer de mettre un terme à ces visites dans le délai
de 15 jours à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 1 000 euros par jour de
retard ;
Ils soutiennent que les visites à vocation touristique à partir du toit-terrasse de l’église paroissiale
sont contraires aux principes régissant l’utilisation des édifices cultuels ; que ces visites perturbent les
services religieux ; que le maire en s’abstenant de prendre les mesures nécessaires pour y mettre fin, a failli
aux obligations qui s’imposent à lui en vertu des articles 13 de la loi du 9 décembre 1905 et 5 de la loi du 2
janvier 1907 ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2005, présenté pour la commune des SaintesMaries de la Mer qui conclut au rejet de la requête en faisant valoir que les prescriptions des lois du 9
décembre 1905 et du 2 janvier 1907 ne trouvent pas à s'appliquer dans les parties de l'édifice cultuel qui
sont étrangères à la célébration du culte et dont l'utilisation est, par conséquent, sans effet sur l'affectation
de l'édifice ; que tel est le cas en l'espèce ;
Vu, enregistrées le 8 novembre 2005 et le 9 juin 2005, les productions de pièces
effectuées pour la commune des Saintes-Maries de la Mer ;
Vu, enregistré le 28 mars 2008, le mémoire présenté pour les requérants qui persistent
dans leurs conclusions par les mêmes moyens en les précisant sur certains points ;
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148
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Vu la note en délibéré en date du 2 avril 2008 présentée pour la commune des SaintesMaries de la Mer ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 9 décembre 1905 modifiée concernant la séparation des Eglises et de l’Etat ;
Vu la loi du 2 janvier 1907 concernant l’exercice public du culte ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er avril 2008 :
- le rapport de M. Steck, président ;
- les observations de Me Guin pour l'ASSOCIATION DIOCESAINE DE L’ARCHIDIOCESE D’AIX-ENPROVENCE et les observations de M. DE V. ;
- les observations de Me Arrighi De Cassanova, substituant la SCP Piwnica & Molinié, pour la
commune des Saintes-Marie de la Mer ;
- et les conclusions de M. Gonneau, commissaire du gouvernement ;
Considérant que l'ASSOCIATION DIOCESAINE DE L’ARCHIDIOCESE D’AIX-EN-PROVENCE et M. DE
V., curé des Saintes-Marie de la Mer, demandent l’annulation du refus implicite du maire des Saintes-Marie
de la Mer de mettre fin aux visites organisées sur le toit-terrasse de l’église des Saintes-Maries de la Mer ;
que les requérants soutiennent à cet effet que ces visites à vocation touristique seraient contraires aux
principes régissant l’utilisation des édifices cultuels ;
Considérant qu’en vertu des dispositions combinées de la loi du 9 décembre 1905 et de l’article 5
de la loi du 2 janvier 1907 concernant l’exercice public des cultes, en l’absence d’associations cultuelles et
d’actes administratifs attribuant la jouissance des églises et des meubles les garnissant, ces biens sont
laissés à la disposition des fidèles et des desservants ; que leur occupation doit avoir lieu conformément aux
règles générales d’organisation du culte ; que les ministres du culte sont chargés d’en régler l’usage ; que
les principes ainsi définis ne trouvent à s’appliquer que pour les parties de l’église effectivement affectées au
culte ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que la commune des Saintes-Maries de la Mer a
ouvert au public depuis 1963 le toit-terrasse de l’église forteresse, dont la gestion de cette activité à
caractère touristique a été confiée, dans le cadre d’une délégation de service public, à une société
d’économie mixte, et auquel les visiteurs accèdent par une tour extérieure au moyen d’un escalier
indépendant dépourvu de toute communication avec les parties de l’église effectivement affectées au culte ;
qu’ainsi, en refusant implicitement de mettre un terme à l’organisation des visites dans la partie de l’édifice
non affectée à l’exercice du culte et dont l’utilisation ne nécessitait pas de ce fait l’accord préalable du
ministre du culte, le maire des Saintes-Maries de la Mer n’a pas méconnu les prescriptions sus-rappelées et
n’a, par suite, pas entaché sa décision d’illégalité ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la requête de l'ASSOCIATION DIOCESAINE DE
L’ARCHIDIOCESE D’AIX-EN-PROVENCE et M. DE V. doit être rejetée, y compris les conclusions aux fins
d’injonction sous astreinte ;
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DECIDE :
Article 1er : La requête de l'ASSOCIATION DIOCESAINE DE L’ARCHIDIOCESE D’AIX-EN-PROVENCE et de M.
DE V. est rejetée.
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150
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TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE MELUN
N°0700177/5
___________
M. Daljit S.
___________
Mme Rist
Rapporteur
___________
M. Choplin
Commissaire du gouvernement
___________
Audience du 11 mars 2008
Lecture du 26 mars 2008
___________
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Tribunal administratif de Melun
(5ème chambre)
Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés le 8 janvier 2007 et le 7 février 2007,
présentés par M. Daljit S. agissant au nom de son fils mineur Jasmeet S., demeurant (…) ; M. Daljit S.
demande au tribunal :
- d’annuler la décision en date du 21 novembre 2006 par laquelle le recteur de l'académie de Créteil a
confirmé l’exclusion définitive de son fils Jasmeet S. du lycée professionnel Claude Nicolas Ledoux aux
Pavillons-sous-Bois (93320) ;
- de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice
administrative ;
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 mai 2007, présenté par le recteur de l'académie de
Créteil qui conclut au rejet de la requête ;
Vu le mémoire, enregistré le 6 août 2007, présenté par M. S. qui maintient ses conclusions ;
Vu le mémoire, enregistré le 5 décembre 2007, présenté par le recteur de l'académie de Créteil qui
maintient ses écritures ;
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Vu le mémoire, enregistré le 10 janvier 2008, présenté par le recteur de l'académie de Créteil qui
maintient ses écritures ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789, le Préambule de la
Constitution du 27 octobre 1946 et la Constitution ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
Vu le pacte international du 16 décembre 1966, relatif aux droits économiques, sociaux et
culturels ;
Vu le pacte international du 19 décembre 1966, relatif aux droits civils et politique ;
Vu la convention internationale du 21 décembre 1965 sur l’élimination de toutes les formes de
discrimination raciales ;
Vu la convention du 15 décembre 1990 concernant la lutte contre la discrimination dans le
domaine de l’enseignement ;
Vu le code de l’éducation ;
Vu la loi n° 90-615 du 13 juillet 1990 ;
Vu la loi n°2004-228 du 15 mars 2004 ;
Vu le décret n°85-924 du 30 août 1985 relatif aux établissements publics locaux d’enseignement ;
Vu le décret n°85-1348 du 18 décembre 1985 relatif aux procédures disciplinaires dans les
collèges, les lycées et les établissements d’éducation spéciale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mars 2008 ;
- le rapport de Mme Rist ;
- les observations de M. Michel Ménir, président de l’association « United Sikh » pour M. Jasmeet
S., présent, et devenu majeur ;
- et les conclusions de M. Choplin, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que le conseil de discipline du lycée professionnel
Claude Nicolas Ledoux aux Pavillons-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), a, lors de sa séance du
21 novembre 2006, prononcé la sanction de l’exclusion définitive sans sursis de l’établissement de Jasmeet
S., élève de seconde, pour ne pas avoir respecté la loi du 15 mars 2004 encadrant, en application du
principe de laïcité, le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles,
collèges et lycées publics ; que, par une décision du 22 décembre 2006, prise après avis de la commission
académique d’appel, le recteur de l’académie de Créteil a maintenu cette sanction ; que M. Daljit S., agissant
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152
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en qualité de représentant de son fils mineur Jasmeet, demande l’annulation de la décision rectorale du
22 décembre 2006 ;
Sur la légalité de la décision du recteur du 22 décembre 2006 :
Sur la régularité de la procédure disciplinaire :
Considérant, d’une part, que, si le requérant invoque le caractère inéquitable de la procédure suivie
devant le conseil de discipline et le non respect des droits de la défense devant cette instance, il ressort des
pièces du dossier que la décision du 22 décembre 2006, prise, après avis de la commission académique
d’appel, par le recteur de l’académie de Créteil, qui excluait définitivement l’élève Jasmeet S. de son
établissement, s’est substituée à la décision initiale d’exclusion prononcée par le conseil de discipline ; que,
par suite les moyens tiré du caractère inéquitable de la procédure suivie devant le conseil de discipline et de
la méconnaissance par ledit conseil de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de
l’homme et des libertés fondamentales sont inopérants à l’encontre de la décision rectorale attaquée ; que,
d’autre part, le recteur soutient, sans être contredit, que la commission académique d’appel a entendu le
défenseur de l’élève Jasmeet S. ; qu’enfin la décision rectorale est susceptible d’un recours contentieux
devant la juridiction administrative, et fait l’objet de la présente requête ; que dès lors, les stipulations de
l’article 6 de ladite convention n’ont pas méconnues ;
Sur le moyen tiré de la méconnaissance de la loi n° 2004-228 du 15 mars 2004 :
Considérant qu’aux termes de l’article L. 141-5-1 du code de l’éducation issu de la loi n° 2004-228
du 15 mars 2004 : « Dans les écoles, les collèges et les lycées publics, le port de signes ou tenues par
lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit. / Le règlement
intérieur rappelle que la mise en œuvre d'une procédure disciplinaire est précédée d'un dialogue avec
l'élève » ;
Considérant qu’il résulte tant des termes mêmes de ces dispositions législatives que des travaux
parlementaires qui ont préparé leur adoption, qu’à compter du 1er septembre 2004, d’une part, le port de
certains signes religieux est considéré en lui-même comme manifestant ostensiblement une appartenance
religieuse et peut être interdit même en l’absence d’actes de prosélytisme qui les rendraient provocants ou
ostentatoires, et que, d’autre part, les signes et tenues prohibés sont ceux dont le port conduit à se faire
immédiatement reconnaître par son appartenance religieuse tels que le voile islamique, la kippa ou une croix
de dimension manifestement excessive sans que ces exemples ne déterminent de manière définitive les
religions actuelles ou futures susceptibles d’être concernées ;
Considérant que Jasmeet S. s’est présenté lors de la rentrée scolaire 2006 au lycée professionnel
Claude Nicolas Ledoux avec un sous-turban, dont le requérant, s’il fait valoir qu’il comporte également une
dimension identitaire ethnique ou culturelle, ne conteste pas qu’il présente un caractère religieux ; qu’un tel
couvre-chef, bien que d’une dimension plus modeste que le turban traditionnel et de couleur sombre, ne
peut être qualifié de signe discret ; que, dans ce contexte, l’interdiction légale pouvait être régulièrement
opposée à l’élève dès lors qu’en persistant à porter de façon permanente le sous-turban, et en refusant d’y
renoncer, il adoptait une tenue le faisant reconnaître immédiatement comme appartenant à la religion sikhe,
et cela sans que l’administration n’ait à s’interroger sur la volonté de l’intéressé d’adopter une attitude de
revendication de sa croyance, ni à établir que son attitude était de nature à troubler l’ordre public ; qu’il
s’ensuit qu’en confirmant la sanction disciplinaire contestée le recteur de l’académie de Créteil a légalement
tiré les conséquences de la violation par Jasmeet S. de l’article L. 141-5-1 du code de l’éducation ;
Sur les moyens tirés de la méconnaissance des principes de liberté de conscience et de religion :
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Considérant que la décision d’exclusion attaquée ayant été prise en application de la loi du 15 mars
2004, dont elle n’a pas méconnu les conditions d’application, les moyens tirés de la méconnaissance des
dispositions de l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, et du principe
fondamental de la liberté de conscience reconnu par les lois de la République sont inopérants ;
Considérant qu’aux termes de l’article 9 de la convention européenne de sauvegarde des droits de
l’homme et des libertés fondamentales : «1. Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et
de religion ; ce droit implique ... la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou
collectivement, en public ou en privé, par le culte, l’enseignement, les pratiques et l’accomplissement des
rites. - 2. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l’objet d’autres restrictions que
celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la
sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des
droits et libertés d’autrui » ; que, compte tenu de l’intérêt qui s’attache au respect du principe de laïcité dans
les établissements scolaires publics, la sanction de l'exclusion définitive prononcée à l’égard d’un élève qui
ne se conforme pas à l’interdiction légale du port de signes extérieurs d’appartenance religieuse n’entraîne
pas une atteinte excessive à la liberté de pensée, de conscience et de religion garantie par les stipulations
précitées ; que, pour les mêmes raisons, la décision d’exclusion contestée ne méconnaît pas davantage les
stipulations des autres conventions internationales invoquées par le requérant protégeant également la
liberté de conscience et de religion ;
Sur les moyens tirés du caractère discriminatoire de la décision attaquée :
Considérant qu’aux termes de l’article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de
l’homme et des libertés fondamentales : « La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente
Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la
langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale,
l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation » ;
Considérant que la sanction prise à l’encontre de l’élève Jasmeet S., qui constitue l’application
d’une règle de portée générale, édictée par le législateur, visant à assurer le respect du principe de laïcité
dans les établissements publics scolaires sans discrimination entre les confessions des élèves, ne constitue
pas une mesure de discrimination fondée sur la religion ; que si le requérant soutient que cette sanction
serait constitutive d’une discrimination à l’égard de la minorité nationale que formerait la communauté sikhe
de France, il ressort des pièces du dossier, et notamment des termes mêmes de la décision attaquée, qu’elle
n’a nullement été prise au motif de l’appartenance de l’élève à ladite minorité mais en raison du refus de
l’élève de se conformer à l’interdiction légale du port de signes extérieurs d’appartenance religieuse ; que,
dès lors, en prenant la décision attaquée, le recteur de l’académie de Créteil n’a pas méconnu les
stipulations de l’article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés
fondamentales, non plus que celles des autres conventions internationales invoquées par le requérant
prohibant les discriminations religieuses ou raciales ;
Sur les moyens tirés de la méconnaissance d’autres stipulations de la convention européenne de
sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales :
Considérant que la mesure litigieuse d’exclusion d’un élève ne porte atteinte ni à sa dignité
humaine ni à son droit au respect de la vie privée et familiale au sens des articles 3 et 8 de la convention
européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; que le requérant n’est par
suite pas fondé à soutenir que ces stipulations auraient été méconnues ;
Considérant, en dernier lieu, que si le requérant fait également valoir que son exclusion priverait
son fils de son droit à la scolarité, alors que tous les établissements privés sollicités ont refusé de l’admettre
comme élève, il n’établit pas la réalité de ses démarches auprès d’autres établissements ; qu’en outre il
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ressort des pièces du dossier que l’élève a finalement décliné la proposition qui lui était faite de s’inscrire au
centre national d’éducation à distance pour poursuivre sa scolarité ;
Sur l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative:
Considérant qu’aux termes de l’article L.761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les
instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre
partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient
compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des
raisons tirées de mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. » ;
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas
la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par le
requérant ;
DECIDE:
Article 1er : La requête de M. Daljit S. est rejetée.
© La lettre du droit des religions n°31 juin / juillet 2008
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TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE LYON
ème
(3
chambre)
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Nos 0602346 et 0602383
---------M. Jean-Claude D.
FEDERATION ARDECHOISE DE LIBRE
PENSEE
---------M. Besse
Rapporteur
---------M. Arnould
Commissaire du gouvernement
---------Audience du 30 avril 2008
Lecture du 15 mai 2008
----------
LES DEMANDES
- 1°) M. Jean-Claude D., demeurant (…), a saisi le tribunal administratif d’une requête enregistrée le 10 avril
2006, sous le n° 0602346.
M. D. demande au tribunal d’annuler la délibération du 9 février 2006 par laquelle le conseil municipal de
Tournon-sur-Rhône a autorisé son maire à signer avec l’association culturelle arabo-islamique de Tournonsur-Rhône un bail emphytéotique sur les parcelles cadastrées AS nos 242 et 243, pour un loyer annuel d’un
euro.
..........................................................................
- Par un mémoire présenté par la SCP Flaugère et Drevon, avocats au barreau de l’Ardèche, enregistré le 13
décembre 2007, la commune de Tournon-sur-Rhône conclut au rejet de la requête.
..........................................................................
- 2°) La FEDERATION ARDECHOISE DE LIBRE PENSEE, dont le siège est (…), a saisi le tribunal administratif
d’une requête enregistrée le 11 avril 2006, sous le n° 0602383.
La FEDERATION ARDECHOISE DE LIBRE PENSEE demande au tribunal d’annuler la délibération du 9 février
2006 par laquelle le conseil municipal de Tournon-sur-Rhône a autorisé son maire à signer avec l’association
culturelle arabo-islamique de Tournon-sur-Rhône un bail emphytéotique sur les parcelles cadastrées AS nos
242 et 243, pour un loyer annuel d’un euro.
..........................................................................
- Par un mémoire présenté par la SCP Flaugère et Drevon, avocats au barreau de l’Ardèche, enregistrée le
21 juillet 2006, la commune de Tournon-sur-Rhône conclut au rejet de la requête.
..........................................................................
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- Par des mémoires enregistrés les 9 octobre 2006, 10 janvier et 28 juin 2007, la FEDERATION ARDECHOISE
DE LIBRE PENSEE persiste dans ses conclusions.
..........................................................................
- Par un mémoire présenté par Me Sonier, avocat au barreau de l’Ardèche, enregistré le 14 novembre 2006,
l’association arabo-islamique de Tournon-sur-Rhône, dont le siège est 40, allée des Dames à Tournon-surRhône conclut au rejet de la requête et à la condamnation de l’association requérante à lui verser la somme
de 1 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
..........................................................................
- Par un mémoire enregistré le 14 mai 2007, l’association arabo-islamique de Tournon-sur-Rhône persiste
dans ses conclusions, en portant à 2 000 euros le montant de la condamnation sollicitée au titre de l’article
L. 761-1 du code de justice administrative.
..........................................................................
L'INSTRUCTION DE L'AFFAIRE
L’association arabo-islamique a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, dans l’affaire n°
0602383, par décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 28 février 2007.
En application de l’article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées, par
courrier en date du 17 mars 2008, de ce qu’était susceptible d’être soulevé d’office, dans l’instance n°
0602383, le moyen tiré de l’irrecevabilité de la requête en l’absence d’habilitation régulière du président de
la FEDERATION ARDECHOISE DE LIBRE PENSEE pour agir en justice.
L’AUDIENCE
Les parties ont été régulièrement averties de l’audience publique qui a eu lieu le 30 avril 2008.
A cette audience, le tribunal assisté de Mme Thomas, greffière, a entendu :
- le rapport de M. Besse, premier conseiller,
- les observations de Me Sonier, avocat de l’association arabo-islamique de Tournon-sur-Rhône et de Mme
S., représentant la FEDERATION ARDECHOISE DE LIBRE PENSEE,
- les conclusions de M. Arnould, commissaire du gouvernement.
LA DÉCISION
Après avoir examiné les requêtes, la décision attaquée ainsi que les mémoires et les pièces produits par les
parties et vu :
- la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des Eglises et de l’Etat,
- le code général des collectivités territoriales,
- le code de justice administrative ;
Considérant que M. D., contribuable de la commune de Tournon-sur-Rhône, et la FEDERATION
ARDECHOISE DE LIBRE PENSEE demandent l’annulation de la délibération du 9 février 2006 par laquelle le
conseil municipal de Tournon-sur-Rhône a autorisé son maire à signer avec l’association culturelle araboislamique de Tournon-sur-Rhône un bail emphytéotique sur les parcelles cadastrées AS nos 242 et 243,
pendant une durée de trente années, pour un loyer annuel fixé à un euro ; qu’en raison des liens que
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présentent entre elles les requêtes susvisées, enregistrées sous les nos 0602346 et 0602383, il y a lieu de les
joindre pour statuer par un seul jugement ;
Sur l’exception d’incompétence opposée par l’association arabo-islamique :
Considérant que la délibération par laquelle le conseil municipal de Tournon-sur-Rhône a autorisé la
conclusion d’un bail emphytéotique sur les parcelles cadastrées AS nos 242 et 243 de son domaine privé est
détachable de la gestion dudit domaine ; que, par suite, l’exception d’incompétence opposée par
l’association arabo-islamique doit être écartée ;
Sur la recevabilité de la requête n° 0602383 :
Considérant, d’une part, que la délibération attaquée est un acte détachable du contrat liant la commune de
Tournon-sur-Rhône à l’association arabo-islamique de Tournon-sur-Rhône ; que, par suite, la FEDERATION
ARDECHOISE DE LIBRE PENSEE, tiers au contrat, est recevable à en demander l’annulation ;
Considérant, d’autre part, qu’il ressort des pièces du dossier que l’assemblée générale de la FEDERATION
ARDECHOISE DE LIBRE PENSEE a autorisé son président à contester la délibération litigieuse, le 10 juin
2006 ; que, par suite, ce dernier avait qualité pour introduire la présente requête ;
Sur les conclusions aux fins d’annulation :
Considérant qu’aux termes de l’article 2 de la loi du 9 décembre 1905 : "La République ne reconnaît, ne
salarie ni ne subventionne aucun culte. " ; qu’il résulte des dispositions de l’article 19 de la même loi que les
associations cultuelles ne peuvent, sous quelque forme que ce soit, recevoir des subventions de l'Etat, des
départements et des communes ; que l’association arabo-musulmane de Tournon-sur-Rhône, dont le but est
notamment d’édifier un édifice à caractère cultuel sur le territoire de la commune est une association
cultuelle, au sens des dispositions précitées ; que la mise à disposition des parcelles litigieuses pour un loyer
annuel d’un euro, manifestement inférieur au prix du marché, constitue une subvention prohibée par lesdites
dispositions ; que, par suite, et sans qu’il soit besoin d’examiner l’autre moyen des requêtes, M. D. et la
FEDERATION ARDECHOISE DE LIBRE PENSEE sont fondés à soutenir que la délibération attaquée est
entachée d’illégalité et à en demander l’annulation ;
Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu’aux termes de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : "Dans toutes les
instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre
partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient
compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des
raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’ il n’y a pas lieu à cette condamnation. " ;
Considérant que les dispositions précitées s’opposent à ce que la FEDERATION ARDECHOISE DE LIBRE
PENSEE, qui n’est pas partie perdante, soit condamnée à payer à l’association arabo-musulmane de
Tournon-sur-Rhône la somme qu’elle demande au titre des frais non compris dans les dépens qu’elle a
exposés ;
le tribunal décide :
Article 1er : La délibération du 9 février 2006 du conseil municipal de Tournon-sur-Rhône autorisant son
maire à signer avec l’association culturelle arabo-islamique de Tournon-sur-Rhône un bail emphytéotique sur
les parcelles cadastrées AS nos 242 et 243, pour un loyer annuel d’un euro, est annulée.
Article 2 : Les conclusions de l’association arabo-musulmane de Tournon-sur-Rhône tendant à la
condamnation de la FEDERATION ARDECHOISE DE LIBRE PENSEE au paiement des frais non compris dans
les dépens qu’elle a exposés sont rejetées.
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Article 3 : Le présent jugement sera notifié conformément aux dispositions de l’article R. 751-3 du code de
justice administrative.
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COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL
DE LYON
N° 05LY01218
------------------
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Consorts I.
____________
M. Quencez
Président
____________
M. Picard
Rapporteur
____________
Mme Marginean-Faure
Commissaire du gouvernement
____________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
La Cour administrative d’appel de Lyon
(6ème chambre)
Audience du 20 mai 2008
Lecture du 10 juin 2008
____________
Vu, enregistrée le 26 juillet 2005, la requête présentée pour M. et Mme Radouane I., en leur nom
propre et en celui de leur fils mineur M. I., domiciliés (…) ;
Ils demandent à la Cour :
1°) l’annulation du jugement n° 0306165 du Tribunal administratif de Lyon du 26 mai 2005 qui a
rejeté leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse en réparation des
préjudices dont a été victime l’enfant M. lors de sa naissance le 8 novembre 1998 ;
2°) d’ordonner une expertise afin de déterminer le préjudice subi par l’enfant M. et ses parents ;
3°) de condamner le centre hospitalier de Bourg-en-Bresse à leur verser, en leur qualité de
représentant légaux de leur fils M., une indemnité provisionnelle de 100 000 euros et, à titre personnel, une
somme de 10 000 euros ;
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
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Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 20 mai 2008 :
- le rapport de M. Picard, premier conseiller ;
- les observations de Me Damiano, avocat de M. et Mme I., et de Me Regnoux, avocat du centre
hospitalier de Bourg-en-Bresse ;
- et les conclusions de Mme Marginean-Faure, commissaire du gouvernement ;
Considérant que le 8 novembre 1998 Mme I. a été admise à 5h40 à la maternité du centre
hospitalier de Bourg-en-Bresse pour accoucher, au terme d’une grossesse normale, de son quatrième
enfant ; que l’expulsion de l’enfant s’est déroulée dans des conditions difficiles, le jeune M. étant alors
victime d’une dystocie des épaules, à l’origine d’une anoxie fœtale, dont il a conservé de graves séquelles
neurologiques ; que M. et Mme I. ont demandé au Tribunal administratif de Lyon la condamnation du centre
hospitalier de Bourg-en-Bresse à les indemniser des préjudices subis par eux et leur enfant, atteint d’un taux
d’incapacité de 100 % ; que, par un jugement du 26 mai 2005, le Tribunal a rejeté leur demande ;
Considérant que Mme I., qui a accouché de ses trois premiers enfants par voie basse, ne
présentait à son entrée à l’hôpital aucun symptôme justifiant d’emblée l’intervention d’un médecin et le choix
d’une césarienne ; qu’il résulte de l’instruction, et notamment du rapport d’expertise et des témoignages du
personnel alors en service, que, dès les premiers épisodes de bradycardie fœtale apparus vers 9h40, la sage
femme a appelé l’interne de garde et, qu’invoquant ses convictions religieuses, M. I. s’est, jusqu’à 10h10,
physiquement opposé à toute présence masculine dans la salle d’accouchement, notamment des médecins
obstétriciens et anesthésistes et de l’interne de garde, malgré les demandes instantes de ces derniers ; que
lorsque vers 10h10, après négociation, M. I. ne s’est plus opposé à l’intervention des médecins masculins, il
était trop tard pour commencer une césarienne et l’extraction de l’enfant a dû être effectuée par application
de forceps ; que M. I. a ainsi fait obstacle aux examens nécessaires qui, malgré le caractère totalement
imprévisible de la dystocie des épaules, auraient permis de constater la survenue d’une anoxie fœtale et de
prévenir, par une césarienne prophylactique, les graves complications neurologiques dont a été victime le
jeune M. ; qu’en ne faisant pas appel immédiatement aux forces de police pour expulser M. I., l’hôpital n’a
pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité ; qu’ainsi l’état de l’enfant est totalement
imputable à l’attitude de M. I. et M. et Mme I. ne peuvent rechercher la responsabilité pour faute ou sans
faute du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse ; que, par suite, et sans qu’il soit nécessaire de statuer sur
les fins de non recevoir opposées par le centre hospitalier de Bourg-en-Bresse ni d’ordonner une nouvelle
expertise, M. et Mme I. ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le
Tribunal a rejeté leur demande ;
Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, en application de l’article L. 761-1 du
code de justice administrative, de mettre à la charge de M. et Mme I. le paiement d’une somme de 1 000
euros au centre hospitalier de Bourg-en-Bresse ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme I. est rejetée.
Article 2 : M. et Mme I. verseront une somme de 1 000 euros au centre hospitalier de Bourg-en-Bresse en
application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
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COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL
DE VERSAILLES
N° 06VE01149
---Mme Jacqueline H.
---M. Blin
Président
---Mme Jarreau
Rapporteur
---M. Davesne
Commissaire du gouvernement
---Audience du 31 mars 2008
Lecture du 14 avril 2008
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
La Cour administrative d'appel de Versailles
5ème Chambre
Vu la requête, enregistrée le 29 mai 2006 au greffe de la cour pour Mme Jacqueline H., demeurant
(…), par Me Thiant ; Mme H. demande à la cour :
1°) d’annuler le jugement n° 0500919 en date du 9 décembre 2005 par lequel le Tribunal
administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision en date du 26 novembre
2004 par laquelle le directeur du centre d’accueil et de soins hospitaliers de Nanterre l’a exclue
définitivement de ses fonctions à compter du 29 novembre 2004 et à la condamnation du centre d’accueil et
de soins hospitaliers de Nanterre à lui payer une somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code
de justice administrative ;
2°) d’annuler lesdites décisions ;
3°) de condamner le centre d’accueil et de soins hospitaliers de Nanterre à lui payer une somme de
5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que le jugement est irrégulier dès lors que la formation de jugement était présidée par
le juge des référés ayant statué sur la même affaire ; que la désignation de M. P. comme président de la
commission administrative paritaire pour la titularisation des agents de catégorie C puis comme président du
conseil de discipline était de nature à faire douter de son impartialité ; qu’il a axé les débats sur la question
du port du bonnet et non sur l'hygiène ; que l'empêchement de Mme Y. et M. V. n'est pas avéré et n'a été
justifié que postérieurement ; que les pièces versées n’ont jamais été validées et enregistrées par la
direction des ressources humaines ; que la manipulation des syndicats par la direction des ressources
humaines et donc la partialité de certains membres du conseil de discipline est avérée ; que la fiche
technique à laquelle s’est référé le tribunal administratif n'a jamais été produite, sinon après sa suspension ;
que cette fiche n'a aucune validité dès lors qu'elle a été prise au vu d'un procès-verbal jamais transmis,
malgré l'avis de la commission d’accès aux documents administratifs ; que les différentes personnes ayant
contribué à sa rédaction ne l'ont jamais signée ; que la mesure de suspension est disproportionnée au
regard des faits ; que le centre d'accueil et de soins hospitaliers de Nanterre n'a jamais démontré la gravité
de la faute dont elle s'est rendue coupable ; que cette faute consiste à avoir pris l'initiative de se protéger
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par une coiffe ou charlotte ; que sa décision est conforme aux recommandations de l’Assistance publique Hôpitaux de Paris pour éviter la propagation des maladies nosocomiales ;
………………………………………………………………………………………………..
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statuaires relatives à la fonction
publique hospitalière ;
Vu le décret n° 89-822 du 7 novembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux
fonctionnaires relevant de la fonction publique hospitalière ;
Vu le décret n° 97-487 du 12 mai 1997 fixant les dispositions communes applicables aux agents
stagiaires de la fonction publique hospitalière ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 mars 2008 :
Nanterre ;
-
le rapport de Mme Jarreau, premier conseiller ;
les observations de Me Abécassis pour le centre d’accueil et de soins hospitaliers de
et les conclusions de M. Davesne, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que Mme H. a été recrutée par contrat à compter du
2 avril 2002 par le centre d’accueil et de soins hospitaliers de Nanterre en qualité d’aide-soignante ; que le 2
janvier 2003, elle a été nommée stagiaire dans le grade d’aide-soignante de classe normale et a été affectée
le 17 novembre 2003 dans le service des soins de suite et de réadaptation ; qu’entre le 14 janvier 2004 et le
26 juillet 2004, elle a refusé à plusieurs reprises d’ôter le couvre-chef qu’elle portait sur son lieu de travail ;
qu’elle a été suspendue, à raison de ces faits, par décision du 28 juillet 2004 ; qu'enfin, par décision du 26
novembre 2004, après avoir recueilli l'avis de la commission administrative paritaire réunie en conseil de
discipline, le directeur du centre d'accueil et de soins hospitaliers de Nanterre l'a exclue définitivement de
ses fonctions à compter du 29 novembre 2004 au motif notamment que « le choix de la tenue vestimentaire
des personnels de soins relève de la compétence exclusive de l'administration hospitalière », que « la coiffe
portée par Mme H. dans l'exercice de ses fonctions ne fait pas partie de la tenue réglementaire du travail »
et que son « refus persistant de se conformer aux instructions constituait un manquement à l'obligation
d'obéissance à laquelle est tenu de se conformer tout fonctionnaire » ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'en vertu d'une règle générale de procédure applicable même sans texte, un
membre d'une juridiction administrative qui a publiquement exprimé son opinion sur un litige ne peut
participer à la formation de jugement statuant sur le recours formé contre une décision statuant sur ce litige
; que si, eu égard à la nature de l’office attribué au juge des référés, la seule circonstance qu’un magistrat a
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statué sur une demande tendant à la suspension de l’exécution d’une décision administrative n’est pas, par
elle-même, de nature à faire obstacle à ce qu’il se prononce ultérieurement sur la requête en qualité de juge
du principal, cette règle générale ne s’applique pas au juge des référés dans le cas où il apparaîtrait, compte
tenu notamment des termes mêmes de l’ordonnance, qu’allant au-delà de ce qu’implique nécessairement
son office, il aurait préjugé l’issue du litige ; que, dans un tel cas, ce magistrat ne peut participer à la
formation de jugement statuant sur la légalité de cette décision ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué du 9 décembre 2006, par
lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de Mme H., a été rendu par une formation
présidée par le magistrat qui avait prononcé, le 10 mars 2005, en qualité de juge des référés, la suspension
de la décision du directeur du centre d’accueil et de soins hospitaliers de Nanterre après avoir estimé que le
motif tiré de ce qu’elle a refusé d’ôter son couvre-chef dans l’exercice de ses fonctions « n’est pas de nature
à donner un fondement légal à la décision attaquée » et qu’ainsi le moyen tiré par Mme H. de l’absence de
caractère fautif de son refus d’obtempérer à l’ordre d’ôter sa coiffe était de nature à faire naître un doute
sérieux sur la légalité de ladite décision ; qu’il ressort des termes mêmes de cette ordonnance que le juge
des référés a pris position de manière précise sur la validité des moyens soulevés devant le juge du fond ;
qu’ainsi, le juge des référés a préjugé l’issue du litige ; qu’alors même que le jugement attaqué a rejeté la
demande après avoir notamment écarté le moyen précité, la composition du Tribunal administratif de
Versailles était dès lors irrégulière ; que Mme H. est, par suite, fondée à soutenir que ledit jugement est
entaché d’irrégularité et à en demander l’annulation pour ce motif ;
Considérant qu’il y a lieu, pour la cour, d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande
présentée par Mme H. devant le Tribunal administratif de Versailles ;
Sur la légalité de la décision d’exclusion définitive des fonctions :
En ce qui concerne la légalité externe :
Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article 18 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 :
« Le dossier du fonctionnaire doit comporter toutes les pièces intéressant la situation administrative de
l’intéressé, enregistrées, numérotées et classées sans discontinuité » ; que la requérante fait valoir qu’une
lettre non référencée a été introduite dans son dossier administratif sans qu’elle lui ait été communiquée ;
que, toutefois, il ressort du procès-verbal de la séance du conseil de discipline que cette pièce figurait dans
le dossier communiqué à l’intéressée ; que, dans ces conditions, la circonstance que cette pièce n’a pas été
numérotée, en méconnaissance des dispositions précitées, et que son insertion ne lui avait pas été signalée,
ne peut être regardée comme une irrégularité substantielle de nature à entraîner l’annulation de la décision
attaquée ;
Considérant, en deuxième lieu, qu’il ressort des pièces du dossier que l’ordre de désignation des
membres du conseil de discipline a été respecté ; que Mme L., récusée par la requérante, a été
régulièrement remplacée par M. D., dès lors que Mme Y. et M. V., suivants sur la liste, étaient empêchés
pour cause de congés ; que la requérante n’apporte pas la preuve, qui lui incombe, de leur absence
d’empêchement ; que la circonstance que les autorisations de congés, qu’elles aient été ou non signées par
la direction des ressources humaines, n’aient pas été communiquées au conseil de discipline est sans
influence sur la légalité de la décision contestée ;
Considérant, en troisième lieu, qu’aucune disposition législative ou réglementaire ni aucun principe
général du droit ne faisait obstacle à ce que M. P., qui avait présidé la réunion de la commission
administrative paritaire au cours de laquelle avait été proposée la prolongation du stage de Mme H., préside
également la réunion du conseil de discipline au cours de laquelle a été émis l’avis d’exclure définitivement
Mme H. de ses fonctions ; que la seule circonstance que M. P. a abordé au cours de la réunion du conseil de
discipline la question d’une éventuelle signification religieuse du port de la coiffe ne suffit pas, en tout état
de cause, à établir sa partialité dès lors que cette question n’a pas été abordée de sa propre initiative mais
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avat été évoquée par Mme H. elle-même devant ses supérieurs hiérarchiques, ainsi que le relève un rapport
établi le 12 avril 2002 ; que le moyen tiré de l’absence d’impartialité de M. P. doit, dès lors, être écarté ;
Considérant, en quatrième lieu, que si Mme H. allègue que certains membres du conseil de
discipline ont également fait preuve de partialité à son égard après avoir fait l’objet d’une « manipulation »
par la direction des ressources humaines, une telle circonstance ne ressort pas des pièces du dossier ;
En ce qui concerne la légalité interne :
Considérant qu’aux termes de l’article 28 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 : «Tout fonctionnaire,
quel que soit son rang dans la hiérarchie, est responsable de l'exécution des tâches qui lui sont confiées. Il
doit se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique, sauf dans le cas où l'ordre donné est
manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public. (…) » et qu’aux termes de
l’article 2 du décret du 12 mai 1997 susvisé : « Les agents stagiaires sont soumis aux dispositions des lois du
13 juillet 1983 et du 9 janvier 1986 susvisées et à celles des décrets pris pour leur application dans la
mesure où elles sont compatibles avec leur situation particulière et dans les conditions et sous les réserves
prévues par le présent décret. » ;
Considérant que si aucun texte réglementaire n’imposait, au sein du centre d’accueil et de soins
hospitaliers de Nanterre, de tenue vestimentaire pour les aides-soignantes en dehors des secteurs dits à
risque, le directeur du centre hospitalier, dans le cadre de son pouvoir d’organisation du service, était
compétent pour déterminer la tenue vestimentaire des personnels de soins de son établissement ; que des
recommandations issues des comités de coordination et de lutte contre les infections nosocomiales, dont
Mme H. ne conteste pas les termes, rappelaient l’existence des risques infectieux liés au port de la tenue de
ville et précisaient que les effets personnels, du type foulard ou sous-vêtement à manche longue, doivent
être enlevés à la prise de service ; que la fiche technique « tenue professionnelle de base », validée par le
comité de coordination et de lutte contre les infections nosocomiales du centre d'accueil et de soins
hospitaliers de Nanterre le 4 novembre 2004, a préconisé, s'agissant des personnels participant aux soins, le
port de la tenue professionnelle, et non de la tenue de ville, afin de limiter le risque infectieux, et a prévu
que « la tête est nue, sans port de couvre-chef » ; que si le centre d'accueil et de soins hospitaliers de
Nanterre n'a pas produit, malgré la demande de la requérante, un exemplaire, signé de son président, du
procès-verbal de la réunion du comité de lutte contre les infections nosocomiales en date du 4 novembre
2004 à l'issue de laquelle les préconisations rappelées ci-dessus ont été adoptées et si la réunion de ce
comité ne s'est tenue que 20 jours avant la décision attaquée, la requérante n'ayant eu communication d'un
procès-verbal non signé que postérieurement à la décision de l'exclure du service, cette circonstance est
sans influence sur la légalité de la décision attaquée dès lors que les préconisations du comité de lutte
contre les infections nosocomiales ne constituaient pas un préalable obligatoire aux décisions que le
directeur de cet établissement était susceptible de prendre en ce qui concerne la tenue vestimentaire des
personnels de soins ; que cette autorité n'était pas tenue de déroger aux règles habituelles relatives à la
tenue vestimentaire des personnels de soins en prévoyant notamment des mesures particulières à certains
agents afin de laver et stériliser des coiffes ; que Mme H. n'établit pas que l'ordre qui lui a été donné
d'exercer ses fonctions sans coiffe serait contraire à des nécessités d'hygiène et de lutte contre les infections
nosocomiales ; que, dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'ordre donné par le
directeur du centre d'accueil et de soins hospitaliers de Nanterre à Mme H. de retirer sa coiffe aurait été
manifestement illégal ; qu'en outre, la requérante n’établit pas, ni même n’allègue, que cet ordre aurait été
de nature à compromettre gravement un intérêt public ; que, dès lors, les refus réitérés de Mme H. d’obéir à
l’ordre de retirer sa coiffe, qu'elle se borne à justifier par des considérations d'hygiène, étaient constitutifs
d’une faute de nature à justifier une sanction disciplinaire ; que la sanction de l’exclusion définitive du
service prononcée à raison de ces faits, qui doivent s’apprécier compte tenu du caractère persistant du
comportement de l’intéressée, n’est pas manifestement disproportionnée ; qu’enfin, le détournement de
pouvoir allégué n’est pas établi ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que Mme H. n’est pas fondée à demander l’annulation
de la décision en date du 26 novembre 2004 par laquelle le directeur du centre d’accueil et de soins
hospitaliers de Nanterre l’a exclue définitivement de ses fonctions à compter du 29 novembre 2004 ;
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Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle
à ce que le centre d’accueil et de soins hospitaliers de Nanterre, qui n’est pas, dans la présente instance, la
partie perdante, soit condamné à payer à Mme H. la somme qu’elle demande au titre des frais exposés par
elle et non compris dans les dépens ; qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de condamner
Mme H. à payer au centre d’accueil et de soins hospitaliers de Nanterre la somme qu’il réclame au titre des
frais exposés par lui en première instance et en appel et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 0500919 en date du 9 décembre 2005 du Tribunal administratif de
Versailles est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme H. devant le Tribunal administratif de Versailles et le
surplus des conclusions de sa requête d’appel sont rejetés.
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CONSEIL D'ETAT
Statuant au
contentieux
N° 315631
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
__________
M. Mouhamed B.
__________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Ordonnance du 6 mai 2008
LE JUGE DES RÉFÉRÉS
Vu la requête, enregistrée le 25 avril 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M.
Mouhamed B., demeurant (…), agissant en qualité de président de l’association culturelle musulmane
d’Antony René Guénon ; M. B. demande au juge des référés du Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’ordonnance du 10 avril 2008 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de
Versailles a rejeté sa demande tendant, sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice
administrative, à ce qu’il soit ordonné au centre régional des œuvres universitaires et scolaires (CROUS) de
Versailles de mettre à la disposition des membres de l’association la salle qu’ils utilisaient dans le bâtiment G
de la résidence universitaire (…) à Antony (Hauts-de-Seine) ou toute autre salle d’une superficie
équivalente ;
2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice
administrative ;
il soutient que l’urgence résulte de l’impossibilité pour les membres de l’association d’exercer leur liberté de
réunion et de culte ; que le refus du CROUS de mettre à la disposition des membres de l’association une
salle porte atteinte à la liberté de culte, ainsi qu’à la liberté de réunion et d’association, qui sont des libertés
fondamentales ; que cette atteinte est entachée d’une illégalité manifeste, le CROUS ne pouvant, en
l’absence d’urgence née d’un péril imminent, recourir à l’exécution forcée pour obtenir la libération des
lieux ; que cette atteinte est grave, le CROUS n’ayant pas eu recours au juge pour obtenir l’expulsion des
locaux ; que le CROUS a porté atteinte à ces libertés fondamentales dans l’exercice d’un de ses pouvoirs ;
Vu l’ordonnance attaquée ;
Vu, enregistré, le 29 avril 2008, le mémoire en défense présenté par le CROUS de l’académie de Versailles,
dont le siège est 145 bis, boulevard de la Reine, BP 563, 78005 Versailles Cedex, représenté par sa
directrice, qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de
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M. B. en sa qualité de président de l’association culturelle musulmane d’Antony René Guénon ; le CROUS
soutient que la requête n’est pas recevable, l’association requérante ne produisant ni ses statuts ni les
autorisations de ses organes compétents pour introduire une action contentieuse ; qu’il n’est pas satisfait à
la condition d’urgence, compte tenu de l’intransigeance des membres de l’association qui ont refusé
l’attribution d’une autre salle commune, alors qu’ils avaient détourné la salle litigieuse de son usage en la
transformant en salle de prière réservée à un groupe de personnes ; que l’urgence ne saurait résulter de la
seule négligence de l’appelante ; que le CROUS n’a commis aucun détournement de la procédure
d’expulsion, s’agissant d’une fermeture provisoire en vue de la réalisation de travaux de réhabilitation, que
l’association en a été avertie et qu’une autre salle a été mise à disposition sous réserve du respect des
conditions d’utilisation ordinaire des équipements ; qu’il n’y a pas d’atteinte grave et manifestement illégale
à une liberté fondamentale, la fermeture de la salle commune étant rendue nécessaire par les conditions
d’occupation en termes de sécurité et de régularité, l’appelante n’ayant jamais sollicité l’autorisation
d’occuper une salle ; que le CROUS, en tant que gestionnaire du domaine public de la résidence, a la charge
de la sécurité des usagers et de la libre disposition du domaine public, dans l’intérêt du domaine public ; que
le CROUS a exercé ses compétences de manière proportionnée aux intérêts du domaine ;
Vu, enregistré le 29 avril 2008, les observations formulées par le ministre de l’enseignement supérieur et de
la recherche, qui conclut au rejet de la requête ; le ministre soutient que la requête n’est pas recevable, M.
B. ne justifiant pas de sa qualité de président de l’association lui donnant compétence pour agir ; qu’il n’est
pas satisfait à la condition d’urgence, le juge de première instance ayant estimé à bon droit que l’existence
d’une situation d’urgence n’est pas établie, dès lors que la direction de la résidence universitaire n’avait pas
donné son accord préalable pour l’exercice des activités de l’association, conformément à ce qu’exige l’article
18 du règlement intérieur des résidences universitaires du CROUS de l’académie de Versailles ; qu’il n’a été
porté aucune atteinte grave et manifestement illégale à la liberté de réunion et à la liberté de culte, les
articles L. 822-1 du code de l’éducation et 14 du décret n° 87-155 du 5 mars 1987 relatif aux missions et à
l’organisation des œuvres universitaires ne permettant pas la libre disposition des locaux affectés à la
mission de service public ; que l’association requérante n’a pas été autorisée à occuper cette salle
polyvalente et l’a détournée de son usage ; qu’aucune disposition législative ou réglementaire ne fait
obligation au CROUS de créer des lieux de cultes dans les locaux affectés à cet usage, le CROUS n’étant pas
un collège ou un lycée relevant du champ d’application de la loi du 31 décembre 1959, ou un édifice affecté
à l’exercice d’un culte au sens de la loi du 9 décembre 1905 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l’éducation, notamment ses articles L. 822-1 à L. 822-5 ;
Vu le décret n° 87-155 du 5 mars 1987 relatif aux missions et à l’organisation des œuvres universitaires ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d’une part, M. B. et, d’autre part, le centre régional des
œuvres universitaires et scolaires de l’académie de Versailles et le ministre de l’enseignement supérieur et
de la recherche ;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du mercredi 30 avril 2008 à 11 heures 30 au cours de laquelle ont
été entendus :
- Me de Nervo, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, avocat du requérant ;
- la représentante du ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche ;
- les représentants du centre régional des œuvres universitaires et scolaires de l’académie de Versailles ;
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Considérant qu’aux termes de l’article L. 521-2 du code de justice administrative : « Saisi d'une demande en
ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la
sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de
droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une
atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit
heures » ;
Considérant qu’il résulte de l’instruction que la direction du centre régional des œuvres universitaires et
scolaires (CROUS) de l’académie de Versailles a décidé, en janvier 2008, la fermeture de la salle polyvalente
du bâtiment G de la résidence universitaire d’Antony, qui était précédemment utilisée par des étudiants de
confession musulmane comme lieu de réunion et de prières, afin d’y réaliser des travaux de sécurité ; qu’en
sa qualité de président de l’association culturelle musulmane René Guénon, M. Mouhamed B. a saisi le juge
des référés du tribunal administratif de Versailles, sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice
administrative, en lui demandant d’ordonner que cette salle, ou à défaut une salle de superficie équivalente,
soit mise à la disposition de l’association ; qu’il fait appel de l’ordonnance par laquelle le juge des référés a
rejeté sa requête ;
Considérant qu’aux termes de l’article L. 822-1 du code de l’éducation : « Le réseau des œuvres
universitaires assure une mission d’aide sociale envers les étudiants et veille à adapter les prestations aux
besoins de leurs études… Les décisions concernant l’attribution des logements destinés aux étudiants sont
prises par les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires » ; que le Centre national et les
centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires, établissements publics administratifs placés sous la
tutelle du ministre chargé de l’enseignement supérieur, sont chargés d’assurer la mise en œuvre de cette
mission ; que l’article 14 du décret du 5 mars 1987 précise que les centres régionaux « assurent les
prestations et services propres à améliorer les conditions de vie et de travail des étudiants, créent dans ce
but les structures leur permettant d’adapter et de diversifier les prestations qu’ils proposent aux usagers en
tenant compte de leurs besoins, et peuvent passer des conventions avec des organismes extérieurs de droit
public ou privé pouvant apporter leur collaboration au fonctionnement des services des centres » ;
Considérant que, pour l’exercice des missions qui leur sont confiées par ces dispositions législatives et
réglementaires, il appartient aux centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires d’assurer la
gestion des bâtiments dont ils ont la charge de manière à procurer aux étudiants des conditions de vie et de
travail adaptées aux besoins de leurs études ; qu’il leur incombe en particulier de concilier les exigences de
l’ordre et de la sécurité dans ces bâtiments avec l’exercice par les étudiants des droits et libertés qui leur
sont garantis ; qu’ils peuvent à cette fin conclure des conventions avec des associations regroupant les
étudiants qui ont pour objet de contribuer à une meilleure organisation de la vie collective dans la
résidence ; qu’en l’absence de disposition législative ou réglementaire spécifique à la pratique des cultes
dans les résidences universitaires, le centre doit respecter tant les impératifs d’ordre public, de neutralité du
service public et de bonne gestion des locaux que le droit de chaque étudiant à pratiquer, de manière
individuelle ou collective et dans le respect de la liberté d’autrui, la religion de son choix ;
Considérant, d’une part, qu’il ressort des éléments soumis au juge des référés que les conditions dans
lesquelles la salle polyvalente du bâtiment G de la résidence universitaire d’Antony était utilisée ne
permettaient ni d’assurer que seuls des étudiants de cette cité universitaire en avaient régulièrement l’usage
ni de garantir à l’administration les moyens de veiller à sa sécurité ; qu’en décidant la fermeture de cette
salle pour y réaliser des aménagements nécessaires à sa sécurité, le centre régional des œuvres
universitaires et scolaires de l’académie de Versailles n’a, dans ces conditions, porté aucune atteinte
manifestement illégale aux libertés fondamentales de culte et de réunion ;
Considérant, d’autre part, qu’il résulte de l’instruction, et notamment des débats au cours de l’audience
publique, que l’administration du centre régional est disposée à examiner avec les représentants de
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l’association culturelle musulmane René Guénon les conditions dans lesquelles une convention pourrait être
conclue pour qu’à des jours et heures déterminés, cette association dispose de locaux lui permettant de
réunir, dans le respect des exigences de sécurité, des étudiants qui habitent dans la résidence universitaire
d’Antony pour qu’ils exercent les activités que cette association a pour objet d’organiser, au nombre
desquelles figure la pratique de prières en commun ; que, dès lors, le dossier ne fait pas ressortir d’atteinte
grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale qu’il y aurait urgence à faire cesser ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir
opposées à la requête par le CROUS de l’académie de Versailles et par le ministre de l’enseignement
supérieur et de la recherche, que M. B. n’est pas fondé à se plaindre du rejet de sa requête par le juge des
référés du tribunal administratif de Versailles ; que ses conclusions tendant à l’application de l’article L. 7611 du code de justice administrative doivent, par suite, être rejetées ; qu’il n’y a pas lieu, dans les
circonstances de l’espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. B., en sa
qualité de président de l’association culturelle musulmane d’Antony René Guénon, la somme que demande le
CROUS de l’académie de Versailles ;
ORDONNE:
-----------------Article 1er : La requête de M. Mouhamed B. est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du CROUS de l’académie de Versailles tendant à l’application de l’article L. 761-1
du code de justice administrative sont rejetées.
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CONSEIL D'ETAT
statuant
au contentieux
N° 286798
__________
REPUBLIQUE FRANÇAISE
Mme M.
__________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Mme Sophie-Caroline de Margerie
Rapporteur
__________
Mme Emmanuelle Prada Bordenave
Commissaire du gouvernement
__________
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 2ème et 7ème sous-sections réunies)
Séance du 26 mai 2008
Lecture du 27 juin 2008
__________
Sur le rapport de la 2ème sous-section
de la Section du contentieux
Vu la requête, enregistrée le 10 novembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée
par Mme Faiza M., demeurant (…) ; Mme M. demande au Conseil d'Etat d'annuler le décret du 16 mai 2005
lui refusant l’acquisition de la nationalité française pour défaut d’assimilation ;
…………………………………………………………………………
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code civil, notamment ses articles 21-2 et 21-4 ;
Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Sophie-Caroline de Margerie, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Emmanuelle Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l’emploi, de la cohésion
sociale et du logement :
Considérant qu'aux termes de l'article 21-2 du code civil, dans sa rédaction en vigueur à la date de la
décision attaquée : « L'étranger... qui contracte mariage avec un conjoint de nationalité française peut,
après un délai de deux ans à compter du mariage, acquérir la nationalité française par déclaration à
condition qu’à la date de cette déclaration, la communauté de vie n’ait pas cessé entre les époux et que le
conjoint français ait conservé sa nationalité » ; qu'aux termes de l'article 21-4 du même code : « Le
Gouvernement peut s'opposer, par décret en Conseil d'Etat, pour... défaut d'assimilation, autre que
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linguistique, à l'acquisition de la nationalité française par le conjoint étranger dans un délai d'un an à
compter de la date du récépissé prévu au deuxième alinéa de l'article 26.. » ; qu’enfin, aux termes de
l’article 32 du décret du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de
naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité : « Lorsque le
Gouvernement veut s’opposer par décret en Conseil d’Etat, pour indignité ou défaut d’assimilation autre que
linguistique, à l’acquisition de la nationalité française par le conjoint étranger d’un conjoint de nationalité
française, le ministre chargé des naturalisations notifie les motifs de fait et de droit qui justifient l’intention
de faire opposition… » ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que Mme M. a reçu communication le 10 mars 2005 des
motifs de fait et de droit justifiant l’intention du ministre de l’emploi, du travail et de la cohésion sociale de
faire opposition à son acquisition de la nationalité française conformément aux dispositions précitées de
l’article 32 du décret du 30 mars 1992 ; qu’elle n’est donc pas fondée à soutenir que le principe du
contradictoire aurait été méconnu ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que, si Mme M. possède une bonne maîtrise de la langue
française, elle a cependant adopté une pratique radicale de sa religion, incompatible avec les valeurs
essentielles de la communauté française, et notamment avec le principe d’égalité des sexes ; qu’ainsi, elle
ne remplit pas la condition d’assimilation posée par l’article 21-4 précité du code civil ; que, par conséquent,
le gouvernement a pu légalement fonder sur ce motif une opposition à l’acquisition par mariage de la
nationalité française de Mme M. ;
Considérant que le décret attaqué du 16 mai 2005 n’a ni pour objet ni pour effet de porter atteinte à la
liberté religieuse de l’intéressée ; que, par suite, il ne méconnaît ni le principe constitutionnel de liberté
d’expression religieuse, ni les stipulations de l’article 9 de la convention européenne de sauvegarde des
droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que Mme M. n’est pas fondée à demander l’annulation du décret
du 16 mai 2005 lui refusant l’acquisition de la nationalité française ;
DECIDE:
-------------Article 1er : La requête de Mme M. est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Faiza M. et au ministre de l'immigration, de l’intégration,
de l’identité nationale et du développement solidaire.
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Jurisprudence judiciaire
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Cour de cassation, chambre criminelle, 15 avril 2008, N° de pourvoi: 07-86909
La distance séparant l’église paroissiale et le débit de boissons est de 17,70 mètres. Une telle
distance est si manifestement inférieure à celle fixée par l’arrêté préfectoral, qu’aucune
contestation fondée sur une éventuelle imprécision du plan ne saurait avoir d’incidence sur l’issue
du présent litige.
Cour de cassation, chambre criminelle, 26 mars 2008, N° de pourvoi: 06-87838
La diffamation visant une personne ne peut rejaillir sur une autre que dans la mesure où les
imputations diffamatoires lui sont étendues, fût-ce de manière déguisée ou dubitative, ou par voie
d’insinuation. Tel n’est pas le cas à l’égard du maire d’une commune lorsque les propos par lui
incriminés rendent compte de l’inauguration par ses soins du parvis d’une cathédrale dédié à un
pape, mais ne comportent que des critiques visant les positions attribuées à ce dernier dans le
domaine de la contraception et leurs lourdes répercussions en termes de santé publique
Cour de cassation, chambre criminelle, 6 mai 2008, N° de pourvoi: 07-82251
Francis Y..., maire-adjoint chargé de la communication de la ville d’Asnières, a été poursuivi pour
diffamation envers des particuliers, à la suite de l’expédition par voie postale, en novembre 2003,
aux résidents de la commune d’Asnières, d’un document mettant en cause la fondation Ostad
Elahi - éthique et solidarité humaine et Farhad X... ; que le tribunal correctionnel a condamné le
prévenu pour deux des passages poursuivis.
Pour relaxer le prévenu au bénéfice de la bonne foi, l’arrêt a notamment pris en compte, au titre
du sérieux de l’enquête, les informations contenues dans le rapport déclassifié de la direction
centrale des renseignements généraux daté du 7 septembre 2006, et dans celui de la mission
interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES) qui indique, en
première page, “faire le point à la date du 20 septembre 2006, sur les éléments recueillis depuis
le mois de novembre 2005” ;
EN statuant ainsi, alors que ces documents étaient postérieurs à la diffusion du tract litigieux, la
cour d’appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé.
Cour de cassation, chambre criminelle, 17 juin 2008, N° de pourvoi: 07-86330
La communauté chrétienne des Béthélites et plusieurs associations locales pour le culte des
témoins de Jéhovah ont fait citer Catherine Y..., devant le tribunal correctionnel, du chef de
diffamation publique envers des particuliers, en raison de propos publiés dans la presse ; que le
tribunal a relaxé la prévenue et débouté les parties civiles ; qu’ appel a été interjeté par ces
dernières. Attendu qu’ à l’ audience des débats tenue le 30 mai 2007, la prévenue a excipé de la
prescription de l’ action des parties civiles poursuivantes, en faisant valoir que plus de trois mois s’
étaient écoulés entre leur déclaration d’ appel formée le 31 octobre 2006 et la citation délivrée à
la prévenue, à la requête du ministère public, le 15 mai 2007 ; Attendu que, pour écarter cette
exception, l’ arrêt retient que la signification à la prévenue, par actes d’ huissier des 24 janvier et
23 avril 2007, des conclusions et demandes que les parties civiles entendaient formuler au soutien
de leur appel, constitue une manifestation non équivoque de leur part d’ interrompre la
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prescription et de leur volonté de poursuivre l’ action en diffamation engagée ; Mais attendu qu’
en conférant un effet interruptif de prescription à des conclusions, la cour d’ appel a méconnu le
principe ci- dessus énoncé ; D’ où il suit que la cassation est encourue ; qu’ elle aura lieu sans
renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d’ appliquer directement la règle de droit et de
mettre fin au litige, ainsi que le permet l’ article L. 411-3 du code de l’ organisation judiciaire.
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Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du 15 avril 2008
N° de pourvoi: 07-86909
Non publié au bulletin
Rejet
M. Farge (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président
SCP Choucroy, Gadiou et Chevallier, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Erick,
contre l’arrêt de la cour d’appel d’AIX-EN-PROVENCE, 5e chambre, en date du 5 septembre 2007, qui, pour
ouverture irrégulière d’un débit de boissons à consommer sur place de 3ème ou 4ème catégorie, l’a
condamné à 50 euros d’amende et a prononcé la fermeture du débit ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 112-1 et 121-3 du code pénal, L. 3335-1,
L. 3335-3 et L. 3352-2 du code de la santé publique, des arrêtés du préfet du Var des 18 août 1978 et 22
novembre 2007, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
”en ce que l’arrêt infirmatif attaqué a déclaré le prévenu coupable d’ouverture d’un débit de boissons à
consommer sur place en zone protégée à moins de quarante mètres d’un lieu de culte dans une commune
de 500 à 5 000 habitants, l’a condamné à une amende délictuelle de 50 euros et a prononcé la fermeture du
débit ;
”aux motifs que, par l’arrêté susvisé du 18 août 1978, le préfet du Var a fixé à quarante mètres la distance
d’un quelconque lieu de culte, en deçà de laquelle il est interdit d’établir un débit de boissons à consommer
sur place, dans les communes de 500 à 5 000 habitants de ce département ; qu’en l’espèce, l’église
paroissiale et le Cercle de la Fraternité sont situés de part et d’autre de l’avenue du 15 août 1944 ; que la
distance séparant, sur l’axe de cette voie, les points situés à l’aplomb respectivement de la porte d’accès et
de sortie de chacun de ces deux bâtiments, est de 17,70 mètres, sur les bases du plan établi par le bureau
d’études en bâtiment «AD--Ingénierie» ; qu’une telle distance est si manifestement inférieure à celle fixée
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par l’arrêté préfectoral, qu’aucune contestation fondée sur une éventuelle imprécision du plan ne saurait
avoir d’incidence sur l’issue du présent litige ; que, pour s’opposer aux poursuites dont il fait l’objet, Erick
X... fait valoir qu’un grand nombre de débits de boissons du département avaient été maintenus ou installés,
sans opposition de l’administration et sans poursuite du parquet ; qu’il fait valoir que, dans ces conditions,
l’action publique engagée à son encontre heurte le principe constitutionnel de l’égalité des citoyens devant la
loi auquel l’opportunité des poursuites ne saurait déroger ;mais que, selon l’article 40 du code de procédure
pénale, le Procureur de la République apprécie la suite à donner aux plaintes et dénonciations qui lui sont
adressées ; qu’il n’appartient pas au juge, sous couvert du respect du principe constitutionnel susvisé,
d’exercer un contrôle sur l’exercice par le ministère public de cette prérogative ;(…) ; que l’élément matériel
de l’infraction est constitué en l’espèce ; qu’Erick X... invoque, enfin, l’ordre de l’autorité légitime, faisant
valoir qu’aux termes d’une lettre du maire de La Motte, en date du 26 juillet 2004, la translation du débit de
boissons a été effectuée « à la demande pressante de la commune» et «en parfaite conformité avec l’article
L. 3332-7 du code de la santé publique» ; mais que, d’une part, l’autorisation de l’autorité municipale ne
saurait exonérer de sa responsabilité pénale l’auteur d’une infraction à la législation sur les débits de
boissons, dès lors que le fait matériel constitutif du délit a été constaté ; que, d’autre part, le maire d’une
commune ne dispose d’aucune autorité hiérarchique sur l’exploitant d’un débit de boissons ; que, par
ailleurs, Erick X... ne peut invoquer l’erreur de droit, les réponses et mises en garde de l’administration des
douanes ayant été dépourvues de toute ambiguïté quant au caractère illicite de la translation sollicitée ; que
l’élément moral de l’infraction est, dès lors, constitué ; que, sur la peine, s’il ne supprime pas l’élément moral
de l’infraction, le contexte administratif du transfert litigieux doit être pris en considération dans la
détermination de la peine ; que le maire de La Motte, qui a fait procéder par la commune aux acquisitions
immobilières susmentionnées, qui a donné à bail pour neuf ans aux époux X... le local du Cercle de La
fraternité, qui n’a cessé d’intervenir pour soutenir l’ouverture du débit de boissons dans ces nouveaux locaux
et qui, par lettres du 20 et du 26 janvier 2007, a demandé au procureur de la République d’être cité à
l’audience correctionnelle en qualité de complice du prévenu, apparaît tout à la fois comme le concepteur et
l’instigateur de l’infraction ; que, par ailleurs, le sous-préfet de Draguignan a fait connaître au maire de La
Motte, le 26 novembre 2003, «qu’une nouvelle demande auprès du service des Douanes serait étudiée
favorablement, sous réserve qu’elle soit accompagnée de l’accord express du gérant pour le transfert de son
commerce au Cercle de la Fraternité» ; que, de son côté, le préfet du Var, par note du 13 mai 2004, a invité
le directeur régional des douanes de Provence à soumettre à sa signature une dérogation à l’arrêté du 18
août 1978, par laquelle Eric X... serait autorisé à ouvrir le débit de boissons dans les locaux du Cercle de la
fraternité ; qu’à la suite du refus opposé par le receveur principal du Var, le préfet, par une seconde note en
date du 14 juin 2004, a fait connaître au directeur régional des douanes qu’il était favorable à l’octroi de la
dérogation sollicitée et qu’il attacherait du prix à ce que lui soit indiquée la suite qui pourrait être réservée à
ce dossier ; qu’au sein de l’administration des douanes, une note interne du 29 juin 2004, jointe au dossier
transmis au parquet, fait apparaître que l’adjoint au chef divisionnaire des douanes et droits Indirects du Var
a « contredit téléphoniquement», dans une communication avec le préfet, les conclusions juridiques du
receveur principal susvisé relatives à cette demande de transfert ; que ces palinodies administratives, dont le
prévenu a été largement tenu informé, justifient l’octroi à celui-ci de larges circonstances atténuantes ;
”alors que, d’une part, la cour, qui a constaté qu’avant l’ouverture du débit de boissons litigieux, le souspréfet et le préfet du Var avaient clairement manifesté leur volonté d’autoriser cette ouverture en zone
protégée, dont le prévenu avait été largement tenu informé, a violé les articles 121-3 du code pénal et L.
3335-3 du code de la santé publique et entaché sa décision d’un défaut de motifs en refusant de tenir
compte de cet élément pourtant de nature à exclure l’élément intentionnel de l’infraction poursuivie ainsi que
son élément légal, l’article L. 3335-3 du code de la santé publique permettant, dans les communes de moins
de 2 000 habitants et sous certaines conditions, au préfet d’autoriser le maintien ou l’installation de débits de
boissons à consommer sur place dans les zones protégées ;
”alors, d’autre part, qu’en vertu du dernier alinéa de l’article 112-1 du code pénal, en l’absence de
dispositions contraires expresses, une loi nouvelle, qui abroge une incrimination pénale, s’applique aux faits
commis avant son entrée en vigueur et non définitivement jugés ; qu’en l’espèce, le préfet du Var ayant, par
un arrêté du 22 novembre 2007, abrogé l’arrêté préfectoral du 18 août 1978 servant de fondement aux
poursuites en ce qu’il interdisait l’installation des débits de boissons à consommer sur place dans les
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communes de 500 à 5 000 habitants à une distance inférieure à 40 mètres d’un lieu de culte, l’arrêt attaqué,
qui a fait application de ces dernières dispositions désormais abrogées, doit être annulé en application du
texte précité” ;
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure qu’Erick X... a été poursuivi pour avoir
ouvert irrégulièrement un débit de boissons à consommer sur place de 3eme ou 4eme catégorie dans une
zone protégée ,infraction prévue et réprimée par les articles L. 3335-1, L. 3352-2, et L.3355-6 du code de la
santé publique ; que, par la suite, l’arrêté préfectoral définissant les zones de protection et visant les
établissements protégés, qui servait de soutien aux poursuites, a été abrogé et remplacé par un nouvel
arrêté ne faisant plus obstacle à une telle ouverture ;
Attendu que, devant la cour d’appel, le prévenu a conclu à sa relaxe en faisant valoir qu’il avait été informé
de la volonté des autorités administratives d’autoriser cette ouverture ;
Attendu que, pour écarter cette argumentation et dire la prévention établie, l’arrêt prononce par les motifs
repris au moyen ;
Attendu qu’en cet état, la cour d’appel, qui a répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était
saisie, a donné une base légale à sa décision, dès lors que, d’une part, aucune tolérance administrative ne
peut être opposée devant les juridictions répressives et que, d’autre part, lorsqu’une disposition législative,
support légal d’une incrimination, demeure en vigueur, l’abrogation de textes réglementaires pris pour son
application n’a pas d’effet rétroactif ;
D’où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour,
mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de
procédure pénale : M. Farge conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du
président empêché, M. Le Corroller conseiller rapporteur, M. Blondet conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Décision attaquée : Cour d’appel d’Aix-en-Provence du 5 septembre 2007
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Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du 26 mars 2008
N° de pourvoi: 06-87838
Publié au bulletin
Cassation partielle sans renvoi
M. Cotte, président
Mme Guirimand, conseiller apporteur
M. Charpenel, avocat général
SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- X... Laurent,
- L’ASSOCIATION CAVE CANEM PAYS VIENNOIS,
civilement responsable,
contre l’arrêt de la cour d’appel de GRENOBLE, chambre correctionnelle, en date du 12 septembre 2006, qui,
pour diffamation publique envers un citoyen chargé d’un mandat public, a condamné le premier à 1 000
euros d’amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit commun aux demandeurs ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 10 de la Convention européenne des droits
de l’homme, 29 et 31 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, 591 et 593 du code de procédure
pénale ;
”en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Laurent X... coupable de diffamation envers une personne chargée d’un
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mandat électif à raison de la publication en juillet 2005 du numéro 23 du journal Cave Canem, et l’a
condamné à une amende de 1 000 euros et, sur l’action civile, a condamné Laurent X... à verser à Jacques
Y... la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts et celle de 1 000 euros au titre de l’article 475-1
du code de procédure pénale et a déclaré l’association Cave Canem civilement responsable ;
”aux motifs que Jacques Y... reproche aux prévenus de le présenter, dans l’article incriminé du numéro de
juillet 2005 du journal Cave Canem, comme ayant «honoré la mémoire d’un complice de la pandémie du
SIDA et d’un assassin, en donnant le nom de Jean-Paul II à un parvis de la commune» ; que si, en soi, le
fait d’écrire que Jacques Y... a donné «un gage de plus à son électorat catholique en inaugurant le parvis
«Jean-Paul II» devant la cathédrale Saint-Maurice» ne constitue pas une diffamation, un tel écrit prend un
caractère diffamatoire lorsque, comme en l’espèce, le pape Jean-Paul II y est qualifié, quelques lignes plus
loin, d’assassin et de « complice de la pandémie du SIDA», dès lors que le responsable de la publication de
ce texte a bien eu conscience que cette mise en cause du pape ne pouvait que rejaillir sur celui qui avait
présidé à la cérémonie officialisant la nouvelle désignation d’un lieu public ; que la relation de ce fait précis
que constitue cette inauguration, qui tend à présenter Jacques Y... comme apportant, à des fins électorales,
son adhésion personnelle, à l’action pontificale du pape Jean-Paul II, désigné comme ayant été un assassin
et le complice de la propagation d’une maladie qui touche plus de 42 millions de personnes et tue chaque
jour 10 000 d’entre elles est de nature diffamatoire ; qu’en effet porte atteinte à son honneur et à sa
considération, l’article qui désigne la partie civile comme rendant hommage à une personne qu’il qualifie
d’assassin et laisse ainsi entendre qu’elle est prête, pour des visées électoralistes, à cautionner la
commission d’une des infractions pénales les plus graves ; que le caractère outrancier de cette présentation
est exclusif de toute bonne foi ; que les prévenus ont déclaré à l’audience que la revue Cave Canem est tirée
à 450 exemplaires et diffusée par abonnement à 400 personnes, ce qui établit l’élément de publicité
nécessaire à la caractérisation de l’infraction de diffamation publique ; que Jacques Y... est bien visé à raison
d’un acte (inauguration d’un lieu public communal) qu’il a accompli en sa qualité de maire et qui faisait suite,
ainsi que le rappelle l’article incriminé, à une décision de la municipalité de Vienne ;
”alors que, d’une part, en matière de presse, il appartient à la Cour de cassation d’exercer son contrôle sur
le sens et la portée des propos incriminés au regard des articles de la loi du 29 juillet 1881 servant de base à
la poursuite, ainsi que sur l’identification de la victime de l’infraction ; que les restrictions à la liberté
d’expression sont d’interprétation étroite ; que sont diffamatoires les propos qui portent atteinte à l’honneur
et à la considération de la personne qui se prétend victime ; que les propos doivent reprocher à la personne
qui se prétend victime des faits qui en eux-mêmes portent atteinte à son honneur et à sa considération pour
pouvoir être qualifiés de diffamation ; qu’il résulte des termes de l’article incriminé qu’il rendait compte du
fait que la partie civile avait inauguré un parvis au nom du pape Jean-Paul II pour faire plaisir à son électorat
catholique ; que cet article ajoutait qu’ainsi le député maire honorait un homme qui était complice de la
propagation du SIDA ajoutant sur un ton volontairement polémique et exagéré qu’il s’agissait d’un assassin,
ce qui visait les positions du pape contre la contraception et leur effet sur les politiques de lutte contre le
SIDA, qui avaient déjà fait l’objet d’un large débat et de critiques et ce que confirmait les passages de
l’article non visés à la prévention ; que, si l’article reprochait au député d’avoir inauguré un parvis au nom
d’un homme qui avait pris des positions dangereuses en termes de santé publique, il n’affirme aucunement,
même par insinuation, que le député maire, par l’inauguration du parvis, cautionnait les positions du pape
sur cette question et encore moins des crimes au sens pénal du terme, contrairement à ce qu’affirme la cour
d’appel ; que la seule critique de la décision de procéder à l’inauguration d’un parvis au nom d’une personne
présentée comme ayant pris des positions considérées comme dangereuses ou même qualifiée d’assassin,
n’imputait aucun fait précis à la partie civile de nature à porter atteinte à son honneur et à sa considération ;
”alors que, d’autre part, pour constituer une diffamation, l’allégation ou l’imputation qui porte atteinte à
l’honneur ou à la considération de la victime doit se présenter sous la forme d’une articulation précise d’un
fait de nature à être l’objet d’une preuve ou d’un débat contradictoire ; que la cour d’appel a considéré que
les propos en cause étaient diffamatoires envers la partie civile en ce qu’ils laissaient entendre qu’elle
cautionnait des crimes commis par Jean-Paul II ; que les propos incriminés critiquaient l’inauguration d’un
parvis au nom du Pape Jean Paul II qui était qualifié d’assassin pour sa complicité dans la propagation du
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SIDA, ce que les passages de l’article non visés dans l’acte de prévention confirmaient ; qu’ils exprimaient
uniquement une opinion sur le sens de l’inauguration du parvis au nom du pape en termes injurieux à
l’égard de celui-ci et éventuellement de la partie civile, mais ne comportaient l’imputation à cette dernière
d’aucun fait précis susceptible de faire l’objet d’une preuve autre que l’inauguration du parvis, fait qui n’était
pas en soi de nature à porter atteinte à son honneur ou à sa considération ;
”alors qu’enfin, au regard de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, la protection
de la réputation d’un homme politique doit être conciliée avec la libre discussion de l’activité publique de
cette personne ; que les prises de position contre l’action d’un homme politique, dès lors qu’elles ne
comportent aucune attaque sur sa vie privée, peuvent comporter une certaine dose d’exagération
lorsqu’elles s’inscrivent dans le cadre d’une polémique politique ou d’un sujet d’intérêt général ; que, dès
lors, la cour d’appel qui a considéré que les propos en cause en ce qu’ils affirmaient que le député maire
avait inauguré un parvis au nom du Pape Jean-Paul II qui était un assassin étaient diffamatoires à l’égard de
ce député maire, sans prendre en compte, comme cela était soutenu dans les conclusions déposées pour les
prévenus, le fait que les propos incriminés s’inscrivaient dans le cadre d’un débat d’ordre politique sur les
limites des actions des hommes politiques compatibles avec le principe de laïcité et d’un débat d’intérêt
général, déjà largement diffusé, sur l’influence des prises de position du pape contre la contraception dans la
propagation du SIDA, ce que confirmait les termes de l’article non visés à la prévention et la reproduction
sur la page de l’article de l’affiche d’ACT UP ayant affirmé que le pape était un assassin, ni considérer que
l’article avait été diffusé dans un journal d’opinion satirique défendant une tendance politique opposée à
celle de la partie civile comme l’avaient précisé les conclusions déposées pour le prévenu et l’association
Cave Canem, éditrice d’un journal faisant l’objet d’une diffusion limitée essentiellement à des abonnés, la
cour d’appel a privé sa décision de base légale” ;
Vu les articles 29 et 31 de la loi du 29 juillet 1881 ;
Attendu qu’il appartient à la Cour de cassation d’exercer son contrôle sur le point de savoir si, dans les
propos retenus dans la prévention, se retrouvent les éléments légaux de la diffamation publique tels qu’ils
sont définis par les articles 29 et 31 de la loi précitée ;
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure que Jacques Y..., député et maire de
Vienne (Isère), a fait citer devant le tribunal correctionnel Laurent X..., directeur de publication du journal
Cave Canem, du chef de diffamation envers un citoyen chargé d’un mandat public, notamment à la suite de
la publication, dans le numéro 23 du mois de juillet 2005 dudit journal, des propos suivants : “Fidèle à ses
récentes allégations par lesquelles il rendait gloire à feu Jean-Paul II, ... le Y... n’a pas hésité à donner un
gage de plus à son électorat catholique en inaugurant, le 1er juillet dernier, le parvis “Jean-Paul II” devant la
cathédrale Saint-Maurice. Ainsi la municipalité bien-pensante de Vienne a délibérément pris la lourde
responsabilité d’honorer publiquement la mémoire de celui qui restera dans l’histoire comme le tout premier
complice de la pandémie de SIDA qui touche plus de 42 millions de personnes et tue chaque jour 10 000
d’entre elles... Car, aux antipodes de l’image d’Epinal, véhiculée par le Y..., d’un pape “qui a oeuvré pour que
l’Europe se libère de ses divisions et retrouve pacifiquement les chemins de la liberté”, Jean-Paul II était un
assassin” ; que les premiers juges ont relaxé le prévenu et débouté la partie civile de ses demandes ;
Attendu que, pour infirmer le jugement entrepris et dire Laurent X... coupable du délit poursuivi, les juges
du second degré retiennent que si le fait d’écrire que Jacques Y..., partie civile, a donné un gage de plus à
son électorat catholique en inaugurant le parvis Jean-Paul II devant la cathédrale Saint-Maurice n’est pas en
soi diffamatoire, les propos dénoncés acquièrent un tel caractère dès lors que le pape Jean-Paul II est
qualifié, quelques lignes plus loin dans le même texte, “d’assassin et de complice de la pandémie du SIDA”,
et que cette mise en cause porte nécessairement atteinte à l’honneur et à la considération de la partie civile,
présentée comme prête à cautionner la commission d’une des infractions pénales les plus graves ;
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Mais attendu qu’en décidant ainsi, alors que les propos en cause ne comportaient l’articulation d’aucun fait
précis à l’égard de la partie civile et que la diffamation visant une personne ne peut rejaillir sur une autre
que si les imputations diffamatoires lui sont étendues, fût-ce de manière déguisée ou dubitative, ou par voie
d’insinuation, ce qui n’était pas le cas en l’espèce, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision;
D’où il suit que la cassation est encourue ; que, n’impliquant pas qu’il soit à nouveau statué sur le fond, elle
aura lieu sans renvoi, ainsi que le permet l’article L. 411-3 du code de l’organisation judiciaire ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE en ses seules dispositions ayant dit établi le délit de diffamation envers un citoyen chargé
d’un mandat public, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Grenoble, en date du 12 septembre 2006, toutes
autres dispositions étant expressément maintenues ;
DIT n’y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de
Grenoble et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour,
mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, Mme Guirimand conseiller rapporteur, M.
Joly, Mmes Anzani, Palisse, MM. Beauvais, Guérin conseillers de la chambre, Mme Ménotti conseiller
référendaire ;
Avocat général : M. Charpenel ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Publication :
Décision attaquée : Cour d’appel de Grenoble du 12 septembre 2006
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Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du 6 mai 2008
N° de pourvoi: 07-82251
Publié au bulletin
Cassation
M. Joly (conseiller doyen faisant fonction de président), président
SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, SCP Piwnica et Molinié, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- LA FONDATION OSTAD ELAHI - ETHIQUE ET SOLIDARITÉ HUMAINE ,
- X... Farhad, parties civiles,
contre l’arrêt n° 230 de la cour d’appel de VERSAILLES, 8e chambre, en date du 7 mars 2007, qui les a
déboutés de leurs demandes après relaxe de Francis Y... du chef de diffamation publique envers un
particulier ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation et fausse application des articles 29, alinéa 1, et 32,
alinéa 1, de la loi du 29 juillet 1881, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de
base légale ;
”en ce que l’arrêt attaqué, après avoir constaté le caractère diffamatoire des imputations figurant dans l’écrit
incriminé, a accueilli l’exception de bonne foi invoquée par le prévenu, l’a relaxé des fins de la poursuite du
chef de diffamation publique envers des particuliers et a rejeté les demandes de la fondation Ostad Elahi et
de Farhad X... ;
”aux motifs qu’après avoir souligné la gravité du problème, objet de l’information, la majorité municipale
évoque une tentative d’infiltration des instances municipales ; que le terme d’infiltration se définit comme
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l’action de s’insinuer dans l’esprit de quelqu’un ou de pénétrer furtivement quelque part, ici, dans une
instance démocratiquement élue ; que ce caractère clandestin la situe bien aux antipodes de la clarté et de
la transparence ; que cette accusation est d’ailleurs renforcée par la proclamation de l’influence d’un
mouvement occulte étendant, telle une pieuvre, ses ramifications dans l’ombre ; qu’après l’imputation
relative à l’infiltration, la seconde imputation relative aux menaces et pressions subies par le maire, le
directeur de cabinet et les services de la ville est ouvertement diffamatoire ; que, si la diffamation est
réputée avoir été faite de mauvaise foi, l’admission de l’excuse de bonne foi répond à la réunion de critères
jurisprudentiels désormais bien établis, lorsque la publication poursuivie émane d’un professionnel de
l’écriture, à savoir un journaliste ou l’auteur d’un ouvrage romanesque ou de fiction ; que, bien évidemment,
la réunion de ces critères doit s’apprécier tout à fait différemment lorsqu’il s’agit d’un communiqué destiné à
faire passer auprès de la population une information ou une série d’informations dans le but de l’éclairer sur
l’application d’un programme et de solliciter l’adhésion de tout ou partie de la population dans une
perspective quelque part forcément électorale ; que, dans ce cadre, pour caractériser la bonne foi, la cour se
doit d’apprécier l’acuité, la virulence et la pérennité de la polémique et du débat d’idées engagés au niveau
local par les parties et ce faisant, de déterminer si les propos qualifiés ici de diffamatoires s’inscrivent dans
l’exercice normal de la démocratie locale, au respect des principes de transparence et du contradictoire, sans
attaque de caractère personnel ; que la bonne foi du prévenu devra, dans le cas d’espèce, être appréciée au
regard des responsabilités d’une majorité municipale à qui incombe la gestion des affaires, mais aussi au
regard de ce que tout courant de pensée a vocation à s’étendre, se partager et peut mener au prosélytisme
voire au lobbying, au regard de la déclaration d’utilité publique pouvant être interprétée à la fois comme un
gage de sérieux imposant la prudence mais aussi comme révélant la capacité de la fondation à séduire et
convaincre les instances étatiques dans l’intention de s’introduire dans leurs rouages, au regard enfin de ce
que l’apparence menaçante de l’organisation pourrait résulter de leur éventuel fonctionnement
communautarisé et ésotérique, de plaintes adressées à la mairie, et autres signalements émanant de la
population quant à certaines pratiques et dérives ;
”1°) alors que c’est seulement dans le domaine de la polémique portant sur les opinions et les doctrines
relatives au rôle et au fonctionnement des institutions fondamentales de l’Etat que la bonne foi n’est pas
nécessairement subordonnée à la prudence dans l’expression de la pensée ;
”2°) alors que, si l’intention d’éclairer les électeurs au cours d’une campagne électorale peut, dans certaines
conditions, constituer un fait justificatif de la bonne foi, il en va différemment lorsque, comme en l’espèce,
les imputations diffamatoires ont été publiées hors période électorale et visent des personnes qui n’ont pas
fait acte de candidature ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation et fausse application des articles 29, alinéa 1, et 32,
alinéa 1, de la loi du 29 juillet 1881, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de
base légale ;
”en ce que l’arrêt attaqué, après avoir constaté le caractère diffamatoire des imputations figurant dans l’écrit
incriminé, a accueilli l’exception de bonne foi invoquée par le prévenu, l’a relaxé des fins de la poursuite du
chef de diffamation publique envers des particuliers et a rejeté les demandes de la fondation Ostad Elahi et
de Farhad X... ;
”aux motifs que, sur l’information légitime, compte tenu de ces observations et de ce constat préliminaire,
qu’une municipalité pourrait se voir valablement reprocher de ne pas apporter à la population, forcément
troublée par les activités d’une organisation spiritualiste, ésotérique et culturelle, des éclaircissements de
nature à calmer les inquiétudes ainsi provoquées, ou, à tout le moins, de montrer que la situation est
connue et que l’on est prêt à y faire face ; que, sur l’enquête sérieuse, comme déjà exposé, les exigences
dans ce domaine doivent être appréciées avec une rigueur moindre, compte tenu du contexte local et de la
reconnaissance du principe de liberté d’expression proclamé par la Convention européenne des droits de
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l’homme et la jurisprudence qui en découle ; que le rapport déclassifié émanant de la DCRG énonce que
l’organisation Ostad Elahi a, à l’aune de certains comportements, suscité une inquiétude croissante, déjà
palpable à la date de la diffusion litigieuse ; que le rapport de la DST énonce qu’une certaine vigilance est
maintenue concernant notamment la présence de certains adeptes au sein de structures sensibles ; qu’enfin,
le rapport MIVILUDES évoque un communautarisme exacerbé dont les dérapages ressemblent à des
pratiques sectaires ; que la cour ne peut sérieusement passer sous silence ces constats délivrés par des
organismes à caractère officiel ; que la multiplicité et l’influence des associations ayant gravité depuis 1991
dans la commune d’Asnières-sur-Seine est de nature à légitimer les interrogations et les inquiétudes, la cour
n’occultant bien évidemment pas les préoccupations électoralistes de l’ensemble des intervenants ; que si les
vocations de ces associations apparaissent être complémentaires, les unes avec un objet culturel,
philosophique ou ésotérique, les autres avec l’objectif de défendre les intérêts purement urbanistiques et
socio-économiques, cette distinction, qui peut déjà apparaître ténue pour des initiés, pose véritablement
question aux yeux de la population, ce qui légitime l’action de la majorité municipale ; que la parution du
communiqué litigieux s’inscrit d’ailleurs dans une suite de prises de position, de communiqués, de tracts et
d’appels à la mobilisation entretenant une polémique presque constante ; que la fondation Ostad Elahi
apparaît bien, dans ce contexte, au moins pour partie de ses objectifs, avoir entamé une lutte d’influence
avec l’équipe municipale en vue de la déstabiliser ; que les pièces produites par le prévenu établissent que,
dès 1992, l’influence d’une association qualifiée de « secte » chiite iranienne était évoquée lors de la
démission d’un agent à l’urbanisme ; que, depuis un certain nombres d’années, l’implantation de la fondation
sur le territoire de la commune et d’un certain nombre d’associations relais ont de manière quasipermanente influé de manière plus ou moins ouverte sur la gestion politique, sociale et économique de la
commune ; que le maire en place a engagé un combat plus affirmé depuis l’été 2002, époque de la création
d’une nouvelle association du quartier Zac Métro ayant à sa tête des animateurs de la fondation, dont
Fahrad X... ; que cette lutte emprunte à la fois au champ politique municipal et au souci de contrecarrer
l’expansion d’une organisation qu’il qualifie de sectaire, laquelle aurait acquis des biens immobiliers et de
l’influence grâce à son aisance financière ; que cette situation particulièrement conflictuelle étayée par des
éléments objectifs incontournables justifie la réaction de la majorité municipale qui, pouvant donc
valablement, du fait des informations dont elle disposait, croire la vérité des faits qu’elle a relatés dans son
communiqué dont il apparaissait que la population devait être absolument mise au courant ; que, par
ailleurs, la cour relève le caractère proportionné du dommage causé aux « victimes » par rapport au but
poursuivi ; que, sur la mesure et la prudence dans l’expression : que, s’agissant d’un débat situé au centre
de l’espace politique municipal depuis plusieurs années ayant exacerbé les antagonismes de personnalités de
premier plan, dans le cadre de leurs fonctions politiques ou associatives, le communiqué ne dépasse à aucun
moment, la limite autorisée ; qu’aucune allusion à la vie privée des dirigeants de l’organisation n’est
formulée ; que le ton du communiqué est d’ailleurs à rapprocher de celui des tracts et prises de position
émanant des mouvements associatifs proches de l’organisation Ostad Elahi, l’expression étant celle d’un
débat polémique ; que, sur l’absence d’animosité personnelle, aucun qualificatif désobligeant ou outrageant
ne figure dans le communiqué ; que le caractère presque toujours conflictuel des rapports régissant la vie
publique dans la commune d’Asnières fausse bien évidemment une approche neutre d’une polémique
généralisée qui ne dépasse cependant jamais les limites de l’acceptable ; que Francis Y... doit se voir
admettre au bénéfice de la bonne foi concernant les propos diffamatoires tenus à l’encontre de la fondation ;
que, concernant Farhad X..., l’intéressé a occupé, des années durant, un rôle de premier plan dans la vie
socio-politique de la commune ; qu’il a été impliqué dans la plupart des activités de la fondation et qu’il est
apparu, en première ligne, lors des étapes marquantes du conflit avec la municipalité dans la mesure où il
animait dès le début des années 1990, diverses associations de riverains ainsi et participait activement à des
conférences et débats mettant en cause l’éthique professionnelle du maire ; que la mise en cause nominale
de Farhad X... se situe donc dans le cadre général des tentatives d’infiltration des instances municipales
effectuées par les meneurs de l’organisation ; que son cas ne peut donc être disjoint de celui de la fondation
au regard de l’appréciation de la bonne foi ; que Francis Y... doit se voir également admettre au bénéfice de
la bonne foi concernant les propos diffamatoires tenus à l’égard de Farhad X... ;
”1°) alors, en ce qui concerne la légitimité de l’information, que la Cour de cassation est en mesure de
s’assurer, que contrairement à ce qu’a énoncé la cour d’appel, il ne résulte d’aucune des énonciations de
l’écrit diffamatoire incriminé, que la municipalité d’Asnières-sur-Seine ait eu pour but, en le diffusant, de
calmer les inquiétudes de la population de la commune relativement à un prétendu trouble généré en son
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sein par les activités de la fondation Ostad mais que celle-ci a eu pour but, en attaquant la fondation Ostad,
de faire pièce à une polémique lancée par l’opposition municipale à propos de l’attribution par le maire
d’Asnières d’un permis de construire aux témoins de Jéhovah, en sorte que le prétendu but légitime manque
en fait ;
”2°) alors que des documents postérieurs à l’écrit incriminé ne peuvent légalement servir à établir l’existence
d’une enquête sérieuse, élément constitutif de la bonne foi ; que les parties civiles faisaient valoir dans leurs
conclusions régulièrement déposées devant la cour d’appel que les documents officiels pour la première fois
invoqués par le prévenu en cause d’appel, rapport de la DCRG, rapports de la DST et observations de la
MIVILUDES étaient tous postérieurs à la parution de l’écrit incriminé, étant respectivement datés du 7
septembre 2005 et du 3 octobre 2006 et ne pouvaient dès lors légalement servir à établir l’existence de la
bonne foi et qu’en énonçant, sans s’être préalablement expliquée sur cet argument péremptoire, qu’elle ne
pouvait sérieusement passer sous silence ces constats délivrés par des organismes officiels et en se fondant
expressément sur ces documents pour conclure au sérieux de l’enquête, la cour d’appel a méconnu le
principe susvisé et privé sa décision de base légale ;
”3°) alors que ni l’intention d’éclairer le public ni la croyance dans l’exactitude des faits, fût-elle établie, ne
constituent des circonstances de nature à caractériser l’existence d’une enquête sérieuse et par conséquent
à justifier l’admission de l’exception de bonne foi et que la cour d’appel ne pouvait donc, sans méconnaître
ce principe, alors qu’elle ne constatait pas qu’à la date de l’écrit incriminé le prévenu ait disposé du moindre
élément lui permettant notamment d’affirmer l’existence de prétendues menaces et pressions sur le maire, le
directeur de cabinet et les services de la ville imputables aux parties civiles, faire état de ce que la majorité
municipale, du fait de sa « croyance en la vérité des faits », avait le droit de considérer qu’elle devait mettre
« absolument la population au courant de ces faits » ;
”4°) alors qu’il est impossible de confondre une lutte d’influence exercée par communiqués et tracts et une
infiltration ayant un caractère clandestin et que la cour d’appel, qui constatait que l’écrit incriminé imputait à
la fondation Ostad Elahi d’avoir infiltré une instance démocratique élue, imputation dont elle constatait le
caractère diffamatoire, ne pouvait conclure que cet écrit se situait au terme d’une enquête sérieuse en se
référant à l’existence de prises de position publiques de la part de cette fondation ;
”5°) alors que l’absence de vérifications préalables exclut par elle-même le caractère sérieux de l’enquête et
qu’à supposer que les pièces produites par le prévenu au soutien de son exception de bonne foi établissent
que, « dès 1992, l’influence d’une association qualifiée de « secte chiite iranienne » - dont l’arrêt n’a pas
constaté qu’elle s’assimile à la fondation Ostad Elahi – ait été évoquée lors de la démission d’un agent de
l’urbanisme », le prévenu n’était aucunement autorisé à déduire de ce fait isolé et aléatoire l’existence par la
fondation Ostad Elahi d’une infiltration des instances municipales et de menaces et pressions sur les élus ;
”6°) alors que la prudence dans l’expression de la pensée est exclue dès lors qu’une imputation malveillante
telle que celle d’avoir proféré des menaces et pressions sur les élus est imputée à une personne sans que la
vérité de ces menaces et pressions ait été rapportée dans les conditions prévues par l’article 55 de la loi du
29 juillet 1881 ;
”7°) alors que la cour d’appel n’a pas infirmé les constatations des premiers juges, d’où il résulte que vis-àvis de Farhad X..., le prévenu ne disposait que de documents anciens remontant à plusieurs années qui ne
sont pas de nature à légitimer l’accusation formulée le 13 novembre 2003 d’avoir tenté d’infiltrer le conseil
économique et social de la ville d’Asnières, - en faisant, selon les termes de l’écrit incriminé, entrer « deux
autres adeptes en violation du règlement intérieur du CES » - impliquant l’absence d’enquête sérieuse ;
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”8°) alors que l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme ne saurait faire échec à
l’application des règles de droit interne en matière d’interprétation des principes qui se déduisent de la loi
sur la liberté de la presse, lesquelles ont pour objet la protection de la réputation d’autrui ;
Les moyens étant réunis ;
Vu l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 ;
Attendu que la bonne foi du prévenu ne peut être déduite de faits postérieurs à la diffusion des propos
litigieux ;
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure que Francis Y..., maire-adjoint chargé
de la communication de la ville d’Asnières, a été poursuivi pour diffamation envers des particuliers, à la suite
de l’expédition par voie postale, en novembre 2003, aux résidents de la commune d’Asnières, d’un document
mettant en cause la fondation Ostad Elahi - éthique et solidarité humaine et Farhad X... ; que le tribunal
correctionnel a condamné le prévenu pour deux des passages poursuivis ; qu’appel a été interjeté par
Francis Y... et le ministère public ;
Attendu que, pour relaxer le prévenu au bénéfice de la bonne foi, l’arrêt a notamment pris en compte, au
titre du sérieux de l’enquête, les informations contenues dans le rapport déclassifié de la direction centrale
des renseignements généraux daté du 7 septembre 2006, et dans celui de la mission interministérielle de
vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES) qui indique, en première page, “faire le point à
la date du 20 septembre 2006, sur les éléments recueillis depuis le mois de novembre 2005” ;
Mais attendu qu’en statuant ainsi, alors que ces documents étaient postérieurs à la diffusion du tract
litigieux, la cour d’appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé ;
D’où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Versailles, en date du 7
mars 2007, et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise
en chambre du conseil ;
ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de
Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour,
mois et an que dessus ;
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186
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Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de
procédure pénale : M. Joly conseiller doyen faisant fonction de président en remplacement du président
empêché, Mme Ménotti conseiller rapporteur, Mme Anzani conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Publication :
Décision attaquée : Cour d’appel de Versailles du 7 mars 2007
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Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du 17 juin 2008
N° de pourvoi: 07-86330
Publié au bulletin
Cassation sans renvoi
M. Pelletier (président), président
Me Blanc, Me Blondel, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’ arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Catherine, épouse Y...,
contre l’arrêt de la cour d’ appel de ROUEN, chambre correctionnelle, en date du 18 juillet 2007, qui, dans la
procédure suivie contre elle, du chef de diffamation publique envers des particuliers, a prononcé sur les
intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l’ audience publique du 3 juin 2008 où étaient présents : M. Pelletier
président, Mme Ménotti conseiller rapporteur, M. Joly, Mmes Anzani, Palisse, Guirimand, MM. Beauvais,
Guérin, Straehli, Finidori conseillers de la chambre ;
Avocat général : M. Davenas ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire MÉNOTTI, les observations de Me BLANC et de Me
BLONDEL, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l’ avocat général DAVENAS ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, 8, 486-2, 591, 593 et du code de
procédure pénale, et de l’ article 65 de la loi du 29 juillet 1881 ;
” en ce que l’ arrêt attaqué a déclaré l’ action civile non éteinte par la prescription ;
” aux motifs que les significations effectuées à la requête des parties appelantes, en attente de disposer du
jugement déféré, par les exploits d’ huissier délivrés à la prévenue les 24 janvier 2007 et 23 avril 2007, des
conclusions et des demandes qu’ elles entendaient développer et former devant la juridiction pénale au
soutien de leur appel interjeté le 31 octobre 2006 sur l’ action civile constituaient une manifestation sans
équivoque de leur intention d’ interrompre la prescription ; que ces significations étaient des actes de
procédure réguliers que les parties civiles étaient autorisées à faire ;
1°) “ alors que, en cas d’ inaction du ministère public, les parties civiles ne peuvent interrompre la
prescription qu’ en faisant citer elles- mêmes, avant l’ expiration du délai de prescription, les prévenus à l’
une des audiences de la juridiction du second degré sauf le droit pour cette dernière, de renvoyer la cause à
une audience utile par une décision interruptive de prescription ; qu’ en ayant conféré un tel effet à de
simples conclusions dites « interruptives de prescription », exposant les demandes que les parties civiles
entendaient développer mais ne citant pas la prévenue à comparaître à une audience de la juridiction d’
appel, la cour d’ appel a violé les dispositions susvisées ;
2°) “ alors que l’ absence de dépôt au greffe du jugement de première instance n’ est pas prescrit à peine
de nullité et son inobservation ne cause aucun préjudice aux demandeurs qui, après avoir été informés du
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prononcé de la décision, ont exercé leur recours dans le délai légal ; que la circonstance que les parties
civiles ne disposaient pas encore du jugement ne constituait donc pas un obstacle à la citation de la
prévenue à l’ audience de la juridiction d’ appel, seul acte susceptible d’ interrompre la prescription ; qu’ en
ayant admis que la prescription pouvait avoir été interrompue par la signification de conclusions, et non par
une citation, en se fondant sur la circonstance que les parties civiles ne disposaient pas du jugement
attaqué, la cour d’ appel a statué par un motif inopérant “ ;
Vu les articles 6 et 8 du code de procédure pénale ;
Attendu qu’ en cas d’ inaction du ministère public, il appartient à la partie civile appelante de faire citer ellemême le prévenu, avant l’ expiration du délai de prescription, à l’ une des audiences de la juridiction du
second degré sauf le droit pour cette dernière, de renvoyer la cause à une audience utile par une décision
interruptive de prescription ;
Attendu qu’ il résulte de l’ arrêt attaqué et des pièces de la procédure que la communauté chrétienne des
Béthélites et plusieurs associations locales pour le culte des témoins de Jéhovah ont fait citer Catherine Y...,
devant le tribunal correctionnel, du chef de diffamation publique envers des particuliers, en raison de propos
publiés dans la presse ; que le tribunal a relaxé la prévenue et débouté les parties civiles ; qu’ appel a été
interjeté par ces dernières ;
Attendu qu’ à l’ audience des débats tenue le 30 mai 2007, la prévenue a excipé de la prescription de l’
action des parties civiles poursuivantes, en faisant valoir que plus de trois mois s’ étaient écoulés entre leur
déclaration d’ appel formée le 31 octobre 2006 et la citation délivrée à la prévenue, à la requête du ministère
public, le 15 mai 2007 ;
Attendu que, pour écarter cette exception, l’ arrêt retient que la signification à la prévenue, par actes d’
huissier des 24 janvier et 23 avril 2007, des conclusions et demandes que les parties civiles entendaient
formuler au soutien de leur appel, constitue une manifestation non équivoque de leur part d’ interrompre la
prescription et de leur volonté de poursuivre l’ action en diffamation engagée ;
Mais attendu qu’ en conférant un effet interruptif de prescription à des conclusions, la cour d’ appel a
méconnu le principe ci- dessus énoncé ;
D’ où il suit que la cassation est encourue ; qu’ elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en
mesure d’ appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l’ article L.
411-3 du code de l’ organisation judiciaire ;
Par ces motifs, et sans qu’ il soit besoin d’ examiner le second moyen proposé,
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l’ arrêt susvisé de la cour d’ appel de Rouen, en date du 18
juillet 2007 ;
CONSTATE l’ extinction de l’ action des parties civiles ;
DIT n’ y avoir lieu à renvoi ;
DIT n’ y avoir lieu à application, au profit des parties civiles, de l’ article 618-1 du code de procédure pénale
;
ORDONNE l’ impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’ appel de
Rouen et sa mention en marge ou à la suite de l’ arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix- sept juin
deux mille huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Publication :
Décision attaquée : Cour d’appel de Rouen du 18 juillet 2007
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Jurisprudence
Cour européenne des droits de l’homme
ÕÕÕ
CourEDH, TROISIÈME SECTION, DÉCISION SUR LA RECEVABILITÉ, requête no
15585/06, 4 mars 2008, Fatima EL MORSLI contre la France
L’obligation de retirer son voile à des fins de contrôle de sécurité était nécessairement très limitée
dans le temps. Par ailleurs, quant à la proposition faite par l’intéressée de retirer son voile
uniquement en présence d’une femme, à supposer que les autorités consulaires aient été saisies
de cette question, le fait pour ces dernières de ne pas avoir chargé un agent féminin de procéder
à l’identification de la requérante n’excède pas la marge d’appréciation de l’Etat en la matière. La
Cour conclut que la requérante n’a ainsi pas subi une atteinte disproportionnée dans l’exercice de
son droit à la liberté de religion.
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TROISIÈME SECTION
DÉCISION
SUR LA RECEVABILITÉ
de la requête no 15585/06
présentée par Fatima EL MORSLI
contre la France
La Cour européenne des droits de l’homme (troisième section), siégeant le 4 mars 2008 en une chambre
composée de :
Josep Casadevall, président,
Elisabet Fura-Sandström,
Jean-Paul Costa
Corneliu Bîrsan,
Boštjan M. Zupančič,
Alvina Gyulumyan,
Egbert Myjer, juges,
et de Santiago Quesada, greffier de section,
Vu la requête susmentionnée introduite le 5 avril 2006,
Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :
EN FAIT
La requérante, Mme Fatima El Morsli, est une ressortissante marocaine, née en 1980 à Tagzirt (Maroc) et
résidant à Marrakech.
A. Les circonstances de l’espèce
Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par la requérante, peuvent se résumer comme suit.
La requérante est de confession musulmane et porte le voile. Elle est mariée, depuis 2001, à un
ressortissant français qui réside en France.
Elle expose que le 12 mars 2002, elle se rendit au consulat général de France à Marrakech en vue de
demander un visa d’entrée en France afin de rejoindre son mari et que, ayant refusé de retirer son voile afin
de se soumettre à un contrôle d’identité, elle ne fut pas autorisée à pénétrer dans l’enceinte du consulat. La
requérante présenta alors une demande de visa par lettre recommandée. La délivrance dudit titre de séjour
lui fut refusée.
Le mari de la requérante, au nom de son épouse, introduisit alors un recours auprès de la commission de
recours contre les refus de visa d’entrée en France.
Le 25 juin 2003, la commission rejeta son recours dans les termes suivants :
« Conformément aux dispositions de l’article 5 du décret 2000-1093 du 10 novembre 2000 relatif à la
commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France, j’ai le regret de vous
informer que la Commission a rejeté le recours que vous avez formé le 1er juillet 2002 visant au réexamen
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de la décision par laquelle le Consul Général de France à Marrakech a refusé un visa d’entrée en France à [la
requérante].
En effet, il appartient à [la requérante] de se conformer à la réglementation en vigueur afin de solliciter dans
les formes requises un visa d’entrée en France. »
Le mari de la requérante forma alors un pourvoi en cassation, toujours au nom de son épouse, devant le
Conseil d’Etat, dans le cadre duquel il invoqua notamment le droit de son épouse au respect de sa vie
familiale et à sa liberté de religion.
Le 7 décembre 2005, le Conseil d’Etat rejeta le pourvoi, jugeant notamment comme suit :
« (...)
Considérant que le port du voile ou du foulard, par lequel les femmes de confession musulmane peuvent
entendre manifester leurs convictions religieuses, peut faire l’objet de restrictions notamment dans l’intérêt
de l’ordre public ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que [la requérante] s’est présentée le 12 mars 2002 au
consulat de France à Marrakech en vue de demander un visa, mais qu’ayant refusé de se prêter au contrôle
d’identité établi à l’entrée du consulat pour des motifs de sécurité et d’ordre public, lequel exigeait le retrait
momentané de son voile, elle n’a pas été admise à accéder au consulat ; qu’elle a alors présenté une
demande de visa par lettre recommandée ; que, toutefois, cette demande écrite, qui ne permet pas
l’identification de la personne sollicitant le visa, ne peut être regardée comme une demande de visa dans les
formes requises pour la délivrance des visas, lesquelles exigent une comparution personnelle du
demandeur ; qu’en opposant ce motif pour refuser la demande de visa, la commission, qui n’était pas tenue
d’examiner la demande au regard du droit d’entrée dès lors qu’elle n’était pas présentée dans les formes
requises, lesquelles peuvent légalement imposer une restriction momentanée au port du voile seule de
nature à permettre l’identification du demandeur, n’a ni commis d’erreur de droit ni méconnu l’article 9 de la
Convention (...) ;
Considérant que dès lors que [la requérante] refusait de se prêter à cette restriction momentanée afin de
permettre un contrôle de son identité, elle doit être regardée comme ayant de son propre chef renoncé à
présenter une demande de visa dans les formes requises ; que, par suite, elle n’est pas fondée à se prévaloir
des stipulations de l’article 8 de la Convention (...) ; »
GRIEFS
Invoquant l’article 9 de la Convention, la requérante dénonce une atteinte à son droit à la liberté de religion
par les autorités consulaires. Elle estime que cette atteinte est d’autant plus injustifiée qu’elle était prête à
retirer son voile, mais uniquement en présence d’une femme, et qu’ainsi elle ne refusait pas d’être identifiée.
Invoquant l’article 8 de la Convention, elle se plaint d’une atteinte à son droit au respect de mener une vie
familiale effective.
Elle estime en outre avoir fait l’objet d’une discrimination prohibée par l’article 14 de la Convention, dans la
mesure où la jouissance du droit de manifestation religieuse par la tenue vestimentaire n’a pas été assurée
par l’autorité consulaire.
Invoquant l’article 2 de la Convention, elle se plaint de non-assistance à personne en danger par les
autorités françaises.
Invoquant enfin l’article 2 du Protocole no 1, elle se plaint d’une atteinte au droit à l’instruction pour ses
enfants qui ne peuvent pas venir en France avec elle.
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EN DROIT
1. La requérante dénonce une atteinte à son droit à la liberté de religion imputable aux autorités
consulaires. Elle estime que cette atteinte est d’autant plus injustifiée qu’elle était prête à retirer son voile
uniquement en présence d’une femme et qu’ainsi elle ne refusait pas d’être identifiée. Elle invoque l’article 9
de la Convention, aux termes duquel :
« 1. Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté
de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction
individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l’enseignement, les pratiques et
l’accomplissement des rites.
2. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles
qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité
publique, à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et
libertés d’autrui. »
La Cour rappelle que, selon sa jurisprudence, le port du foulard peut être considéré comme « un acte motivé
ou inspiré par une religion ou une conviction religieuse » (voir Leyla Sahin c. Turquie [GC], no 44774/98,
10 novembre 2005, CEDH 2005-XI, § 78). En l’espèce, la Cour estime que la mesure litigieuse, consistant à
retirer son voile afin de se soumettre à un contrôle d’identité, est constitutive d’une restriction au sens du
second paragraphe de l’article 9 de la Convention. Elle constate ensuite que la requérante ne soutient pas
que cette mesure n’était pas « prévue par la loi », et elle considère qu’elle visait au moins l’un des buts
légitimes énumérés au second paragraphe de l’article 9, à savoir garantir la sécurité publique ou la
protection de l’ordre.
Il reste donc à déterminer si cette ingérence était « nécessaire dans une société démocratique » pour
parvenir à ces buts, au sens du second paragraphe de l’article 9 de la Convention.
Dans une affaire similaire (Phull c. France (déc.), no 35753/03, CEDH 2005-I, 11 janvier 2005), le requérant,
sikh pratiquant, dénonçait une atteinte à son droit à la liberté de religion imputable aux autorités
aéroportuaires qui l’avaient obligé à retirer son turban dans le cadre d’un contrôle de sécurité. La Cour avait
estimé, d’une part, que les contrôles de sécurité dans les aéroports étaient sans aucun doute nécessaires à
la sécurité publique au sens de l’article 9 § 2 et, d’autre part, que les modalités de leur mise en œuvre
entraient dans la marge d’appréciation de l’Etat défendeur, d’autant plus clairement qu’il ne s’agissait que
d’une mesure ponctuelle.
En l’espèce, la Cour ne voit aucune raison de s’écarter de ce raisonnement concernant les contrôles de
sécurité imposés à l’accès aux locaux du consulat, parmi lesquels figure l’identification des personnes
souhaitant y pénétrer, qu’elle estime sans aucun doute nécessaires à la sécurité publique. En outre, et
comme dans l’affaire Phull précitée, la Cour observe que l’obligation de retirer son voile à des fins de
contrôle de sécurité était nécessairement très limitée dans le temps. Par ailleurs, quant à la proposition faite
par l’intéressée de retirer son voile uniquement en présence d’une femme, à supposer que les autorités
consulaires aient été saisies de cette question, le fait pour ces dernières de ne pas avoir chargé un agent
féminin de procéder à l’identification de la requérante n’excède pas la marge d’appréciation de l’Etat en la
matière. La Cour conclut que la requérante n’a ainsi pas subi une atteinte disproportionnée dans l’exercice
de son droit à la liberté de religion.
Il s’ensuit que cette partie de la requête est donc manifestement mal fondée et doit être rejetée en
application de l’article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.
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2. La requérante dénonce une atteinte à son droit au respect de sa vie familiale, dans la mesure où son
mari vit en France. Or, privée de visa, elle n’a pas pu le rejoindre. Elle invoque l’article 8 de la Convention,
aux termes duquel :
« 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...).
2. Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette
ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est
nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de
l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la
protection des droits et libertés d’autrui. »
La Cour rappelle qu’aux termes de l’article 35 § 1 de la Convention, il faut que l’intéressé ait soulevé devant
les autorités nationales « dans les conditions et délais prescrits par le droit interne » les griefs qu’il entend
formuler par la suite à Strasbourg (Cardot c. France, arrêt du 19 mars 1991, série A no 200, p. 18, § 34 ;
Fressoz et Roire c. France [GC], no 29183/95, §§ 36-37, CEDH 1999-I). Or, en l’espèce, dans la mesure où la
requérante n’a pas respecté les conditions posées pour l’introduction d’une demande de visa, elle n’a ainsi
pas placé les autorités internes en mesure d’apprécier ses griefs tirés de l’article 8 de la Convention.
Il s’ensuit que ce grief doit être rejeté pour non-épuisement des voies de recours internes, en application de
l’article 35 §§ 1 et 4 de la Convention.
3. Enfin, la requérante invoque les articles 2 et 14 de la Convention et l’article 2 du Protocole no 1. Elle se
plaint de non-assistance à personne en danger par les autorités françaises, d’avoir fait l’objet d’une
discrimination et d’une atteinte au droit à l’instruction pour ses enfants qui ne peuvent pas venir en France
avec elle.
La Cour relève que la requérante n’a pas soulevé, expressément ou en substance, ces griefs devant les
juridictions nationales.
Partant, ces griefs doivent en tout état de cause être rejetés pour non-épuisement des voies de recours
internes, en application de l’article 35 §§ 1 et 4 de la Convention.
Par ces motifs, la Cour, à la majorité,
Déclare la requête irrecevable.
Santiago Quesada Josep Casadevall
Greffier Président
DÉCISION EL MORSLI c. FRANCE
DÉCISION EL MORSLI c. FRANCE
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Bibliographie / Medias
Web
Revue "Droit & Société"
Dossier "L’affaire du voile : regards croisés"
coordonné par Claire DE GALEMBERT
Pourquoi les Français se sont-ils ralliés à une loi contre le port du foulard à l’école
?/Why Did the French Rally to a Law Against Scarves in Schools?
John R. Bowen
La « loi sur le voile » : une entreprise politique
The Law Banning Islamic Heardscarves at School: A Political Enterprise
Françoise Lorcerie
Le principe de pluralisme face à la question du voile islamique en Belgique
The Principle of Pluralism and the Islamic Headscarf in Belgium
Hugues Dumont, Xavier Delgrange
Production discursive et fabrication juridique : le foulard de l’enseignante en
Allemagne/Discourse Production and Lawmaking: The Headscarf of a Teacher in
Germany
Schirin Amir-Moazami
Égalité complexe : les femmes musulmanes et le voile
Complex Equality : Muslim Women and the ‘Headscarf’
Maleiha Malik
Derrière le voile. Analyse d’un réseau dialogique égyptien
Behind the Veil: Analysis of an Egyptian Dialogical Network
Enrique Klaus, Baudouin Dupret, Jean-Noël Ferrié
Question en débat "L’affaire du voile : qu’en disent les acteurs ?"
Debate Issue "The Headscarf Affair: What Do the Actors Say?"
Le défenseur du voile/The Defender of the Headscarf
Entretien avec Thomas-Abdallah Milcent
Le voile : de l’Hôtel Matignon au Palais-Royal
The Headscarf from the Hôtel Matignon to the Palais-Royal
Entretien avec Renaud Denoix de Saint Marc
Le voile au Conseil d’État/The Headscarf at the Conseil d’État
Entretien avec Jean-Michel Bélorgey
Du Palais-Royal à la commission Stasi
From the Palais-Royal to the Stasi Commission
Entretien avec Rémy Schwartz
Dialogue avec l’abstentionniste de la commission Stasi
Dialogue with the Stasi Commission’s Abstentionist
Entretien avec Jean Baubérot
La tragédie du voile/The Tragedy of the Headscarf
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Entretien avec François Ost
Chronique bibliographique/Book Reviews
http://www.reds.msh-paris.fr/publications/revue/revue-ds.htm
Ouvrages
La laïcité en question. Religion, Etat et société en France et en
Allemagne du 18e siècle à nos jours
par Sylvie Le Grand
Paru le : 22/05/2008
Editeur : PU DU SEPTENTRION
Isbn : 978-2-7574-0033-3 / Ean 13 : 9782757400333
Articles
Note sous CE, ord. réf., 6 mai 2008, n° 315631, Mouhamed B.
JCP Edition Générale n° 23, 4 Juin 2008, IV 2032
A QUAND LA FIN DES " PETITES RETRAITES " ? L'EXEMPLE DES
ANCIENS MINISTRES DU CULTE CATHOLIQUE
Par Philippe COURSIER
Gazette du Palais 2008 22 / 23 février, p. 4.
Revue "Droit & Société"
Dossier "L’affaire du voile : regards croisés"
coordonné par Claire DE GALEMBERT
Pourquoi les Français se sont-ils ralliés à une loi contre le port du foulard à l’école
?/Why Did the French Rally to a Law Against Scarves in Schools?
John R. Bowen
La « loi sur le voile » : une entreprise politique
The Law Banning Islamic Heardscarves at School: A Political Enterprise
Françoise Lorcerie
Le principe de pluralisme face à la question du voile islamique en Belgique
The Principle of Pluralism and the Islamic Headscarf in Belgium
Hugues Dumont, Xavier Delgrange
Production discursive et fabrication juridique : le foulard de l’enseignante en
Allemagne/Discourse Production and Lawmaking: The Headscarf of a Teacher in
Germany
Schirin Amir-Moazami
Égalité complexe : les femmes musulmanes et le voile
Complex Equality : Muslim Women and the ‘Headscarf’
Maleiha Malik
Derrière le voile. Analyse d’un réseau dialogique égyptien
Behind the Veil: Analysis of an Egyptian Dialogical Network
Enrique Klaus, Baudouin Dupret, Jean-Noël Ferrié
Question en débat "L’affaire du voile : qu’en disent les acteurs ?"
Debate Issue "The Headscarf Affair: What Do the Actors Say?"
Le défenseur du voile/The Defender of the Headscarf
Entretien avec Thomas-Abdallah Milcent
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Le voile : de l’Hôtel Matignon au Palais-Royal
The Headscarf from the Hôtel Matignon to the Palais-Royal
Entretien avec Renaud Denoix de Saint Marc
Le voile au Conseil d’État/The Headscarf at the Conseil d’État
Entretien avec Jean-Michel Bélorgey
Du Palais-Royal à la commission Stasi
From the Palais-Royal to the Stasi Commission
Entretien avec Rémy Schwartz
Dialogue avec l’abstentionniste de la commission Stasi
Dialogue with the Stasi Commission’s Abstentionist
Entretien avec Jean Baubérot
La tragédie du voile/The Tragedy of the Headscarf
Entretien avec François Ost
Chronique bibliographique/Book Reviews
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Index
A
acquisition de la nationalité française, 34, 73, 171,
172
algérie, 42, 43, 69
allemagne, 195
alsace-Moselle, 32, 40, 49
assistance spirituelle, 36, 39
association culturelle, 156, 157, 158, 167, 168,
169, 170
associations cultuelles, 145, 146, 149
aumôniers, 35, 36, 39
australie, 16
B
bail emphytéotique, 22, 156, 157, 158
bas-Rhin, 42, 73
bosnie, 24
C
calotte juive, 12
baricatures de Mahomet, 17
centre funéraire municipal, 86, 92, 95, 119, 121,
122, 127
centre hospitalier, 6, 130, 160, 161, 165
CFCM, 13
chambres funéraires, 86, 87, 88, 89, 90, 91, 92,
97, 103, 108, 110, 112, 118, 119, 120, 122,
124, 125, 126
charia, 19, 40
cimetière communal, 55, 58, 59, 60, 107
clinique catholique, 15
cloches, 32
code de commerce, 86, 109, 111, 119, 121, 122,
123, 127, 128
collectivités territoriales, 15, 32, 34, 35, 36, 37,
38, 40, 49, 71, 76, 87, 109, 124, 126, 141, 157
commission Bouchard-Taylor, 11
commission d'enquête relative à l'influence des
mouvements à caractère sectaire et aux
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conséquences de leurs pratiques sur la santé
physique et mentale des mineurs, 32
communauté chrétienne des Béthélites, 7, 173,
189
communautés religieuses, 20, 71
confession musulmane, 12
conseil des droits de l'homme, 19
conseil supérieur de l'audiovisuel, 24, 26
contrat d'association avec l'Etat, 18
convictions religieuses, 161
convictions spirituelles, 69
couvre-chef, 153, 163, 164, 165
CRCM, 13
crémation, 56
crucifix, 11, 15
culte musulman, 13, 34, 35, 36, 39
culte non reconnu, 40, 49
D
danemark, 12, 17
débit de boissons, 1, 6, 139, 140, 141, 173, 175,
176, 177
dérives prosélytes, 39
dérives sectaires, 7, 21, 32, 33, 34, 36, 44, 45,
47, 173, 186
dialogue interculturel, 27, 29
diffamation, 6, 7, 21, 173, 178, 179, 180, 181,
182, 183, 186, 188, 189
diffamation publique, 21, 178, 179, 180, 182, 183
discriminations, 4, 41, 43, 47, 51, 52, 71, 74, 154
dons et legs, 37, 145, 146
droit local, 49
E
édifices cultuels, 148, 149
édifices de culte, 61
édifices religieux, 33, 38
éducation religieuse, 31
église, 12
église adventiste du 7ème jour, 137
198
http://www.droitdesreligions.net
église de Jésus-Christ des Saints des derniers
jours, 36
église de Scientologie, 132, 133
église de scientologie, 34, 38
église orthodoxe autocéphale de Pologne, 20
église paroissiale, 1, 6, 148, 173, 175
églises rurales, 41
élections municipales, 65
élèves, 49
enseignement religieux, 70, 73
F
financement public des religions, 37
fondation Ostad Elahi, 7, 21, 173, 182, 183, 184,
185, 186
forceps, 161
frais d'obsèques, 38
funérailles, 24, 54, 55, 57, 59, 60, 88, 89, 92, 95,
103, 104, 109, 110, 112, 120, 122, 124, 127,
128
G
gîte, 16
grande Mosquée de Paris, 13, 34
grande-Bretagne, 19
grenoble, 15, 181
guatémala, 18
H
HALDE, 41, 42, 43, 47, 71
haut-Rhin, 73, 139, 140, 141
I
imams, 24
inhumation, 55, 56
interdiction des signes religieux à l'école, 42
J
loi de séparation des églises et de l’État, 68, 81
lycée musulman, 18
M
maire, 1, 4, 5, 6, 7, 12, 17, 21, 22, 54, 55, 56, 57,
58, 59, 60, 94, 113, 129, 130, 132, 133, 134,
142, 143, 148, 149, 156, 157, 158, 173, 176,
179, 180, 183, 184, 185, 186
mariage, 6, 9, 10, 19, 22, 42, 49, 131, 171, 172
mécénat, 44, 46
ministre du culte, 12
Miviludes, 15, 21, 33, 44, 47
moselle, 5, 32, 37, 38, 40, 49, 70, 73, 129, 140
N
neutralité, 34, 39, 41, 42, 43, 169
nullité du mariage, 9
O
ONU, 12, 18, 19, 29, 42
Ossuaire, 56
P
parents d'élèves, 41, 42, 43, 47
parti politique, 4, 64, 65, 66
permis de construire, 5, 12, 129, 142, 143
photo de La Cène, 11
pologne, 20
pompes funèbres, 1, 4, 38, 85, 86, 87, 88, 89, 90,
91, 92, 93, 95, 96, 97, 98, 99, 102, 103, 104,
105, 106, 107, 108, 109, 110, 112, 118, 119,
120, 121, 122, 124, 125, 126, 127, 128
port du bonnet, 162
port du foulard à l'Université, 21
pratique radicale, 6, 131, 172
prière, 11
principe d’égalité des sexes, 6, 131, 172
Q
jean-Paul II, 179, 180
JMJ, 16
qualité essentielle, 9
L
laïcité, 4, 12, 17, 21, 34, 37, 41, 42, 43, 46, 47,
49, 58, 64, 65, 66, 67, 69, 70, 71, 72, 73, 74,
75, 78, 79, 80, 81, 152, 154, 180, 195
liberté de conscience, 4, 34, 38, 39, 41, 42, 68,
73, 74, 129, 137, 138, 145, 153, 154
liberté de religion, 12, 19, 27
liberté religieuse, 4, 36, 40, 129, 133, 134
lieu de culte, 12
lieux de sépulture, 4, 51, 54, 55, 57
Livre blanc sur la laïcité, 11
loi « About-Picard », 32
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R
regroupement confessionnels, 54
religion d'un candidat, 18
religion musulmane, 24, 70
religion sikhe, 5, 130, 153
roumanie, 20
S
sanction divine, 13
secte, 184
signes religieux, 11, 12
sikh, 5, 19, 130
199
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sites cinéraires, 56
sous-turban, 5, 130, 153
strasbourg, 1, 5, 13, 65, 129, 139
subvention, 158
symboles religieux, 12, 20
T
témoins de Jéhovah, 5, 7, 12, 37, 129, 142, 143,
173, 185, 189
toit-terrasse, 1, 5, 12, 130, 148, 149
tournoi de basket, 17
trouble à l’ordre public, 4, 129, 132, 137
turban sikh, 12
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Turquie, 13, 21, 24, 31
U
Union européenne, 24, 38, 42
UOIF, 34
V
ville de Lyon, 86, 87, 89, 91, 92, 93, 94, 96, 104,
105, 106, 108, 109, 112, 117, 118, 119, 120,
122, 125, 126, 127, 128
virginité, 1, 2, 8, 9, 22, 46, 49
voile, 192, 195
200
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La lettre du droit des religions
Bimestriel
Juin / Juillet 2008
Responsable administratif et de
publication
SEBASTIEN LHERBIER-LEVY
[email protected]
Remerciements
Apokrif1 (liste droit des religions)
Guillaume Barraud
Réalisation
L et L
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