magacTu - Florent Torchut
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magacTu > PAR CHRISTOPHE LARCHER, À LYON, ET FLORENT TORCHUT, À ROSARIO (ARGENTINE) Delgado 16 FÉVRIER STADE DE GERLAND 8 DE FINALE ALLER DE LIGUE DES CHAMPIONS LYON-REAL MADRID : 1-0 es UN CÉSAR D’HONNEUR Contre le Real, mardi dernier, le milieu de terrain offensif de l’Olympique Lyonnais, César Delgado, a été l’un des meilleurs. Ultra-combatif, l’Argentin affirme tirer sa force d’une enfance très modeste passée dans un barrio de Rosario. Il l’a fait visiter au « Mag ». HEU-REUX ALAIN MOUNIC 47e minute, Jean II Makoun inscrit le seul but du match. César Delgado se précipite pour féliciter son partenaire. Six minutes plus tôt, sa reprise de volée s’est heurtée au poteau espagnol. 28 >> L ’ É Q U I P E M A G Nº 14 4 0 20 FÉ V R I E R 2 0 10 L ’ É Q U I P E M A G Nº 1 4 4 0 2 0 F É V R I E R 2 0 10 29 magacTu >> AUTOPORTRAIT RICHARD MARTIN « Je suis un joueur offensif doté d’une certaine habileté technique, mais c’est aussi mon devoir de courir beaucoup, de presser, de combler les espaces quand l’adversaire monopolise le ballon. » César Delgado BUTEUR CONTRE LENS 77e minute du match de L1 contre Lens, samedi dernier. Alors que l’OL a tendance à patiner, César Delgado trompe Vedran Runje d’une frappe à ras de terre de l’intérieur du droit. Troisième but de la saison pour le milieu offensif, 1-0 pour l’OL. 30 L ’ É Q U I P E M A G Nº 14 4 0 20 FÉ V R I E R 2 0 10 CRÉDIT PHOTO BERNARD PAPON M CONTRE MADRID, IL RÉALISE SON MEILLEUR MATCH PHOTOS ALAIN MOUNIC ardi soir, ses coéquipiers Makoun et Govou sont passés devant la presse le regard dans le vide et la mâchoire cadenassée comme un soir de défaite. Lui, cheveux humides, dernier sorti du vestiaire, juge qu’un succès contre le Real Madrid de Cristiano Ronaldo et Kakà mérite bien une touche d’allégresse. En espagnol. Avec, très vite, un mot pour sa ville argentine natale. Celle aussi d’Ernesto Guevara. « J’espère qu’à Rosario ma famille a invité beaucoup de gens à la maison pour regarder ce match. Ils auront vu un match plein de ma part. Leur montrer un bon visage, c’est important pour moi. » Quatre heures de décalage horaire, certes, mais César Fabian Delgado Godoy ne s’inquiète pas. Sur les rives du rio Parana, son clan se branche sur Internet ou le satellite pour chaque partie lyonnaise en Ligue des champions. À Rosario, le plus acharné, Leo, un copain d’école, traînait avec lui, le matin avant la classe. Le duo récupérait canettes et bouteilles, histoire de glaner quelques pesos. « Avec l’argent, nous avions acheté un jeu de maillots pour notre équipe, le Deportivo Amistad (l’Amitié Sportive). Non, Chelito, on ne l’a pas oublié. Il est encore venu nous voir à Noël. » Quelques jours de congés pendant les fêtes de fin d’année passées en famille. Et l’occasion d’honorer une tradition de son barrio originel, Las Flores (les Fleurs), bidonville concassé entre deux bretelles d’autoroute à l’entrée de Rosario : le match entre célibataires et mariés. Grâce au Lyonnais, vingt sélections avec l’Argentine, les seconds ont survolé les débats. La grand-mère maternelle de César Delgado et deux tantes vivent toujours dans le quartier, à deux pas de la bâtisse blanche décrépie aux allures de hangar qui servait d’école aux gosses du quartier. Autre ami de Las Flores : Hector. Le Lyonnais a passé des journées entières dans le garage de sa maison à répéter avec son groupe, le Cumbia Contre le Real, « Chelito » a réalisé un match plein. À la fois technique et physique, il a été très présent au combat, pressant sans cesse. Il aurait même pu être le héros de la soirée si sa reprise de volée, à la 41e minute (photo ci-contre), ne s’était pas écrasée sur le poteau d’Iker Casillas. « Je l’ai tentée car je me sens en confiance comme rarement depuis mon arrivée en France », a analysé l’Argentin. >> L ’ É Q U I P E M A G Nº N º 1 4 4 0 2 0 F É V R I E R 2 0 10 31 31 magacTu >> À NOËL, IL NOUS AVAIT GUIDÉS DANS LE BARRIO DE SON ENFANCE Pour le « Mag », César a retracé son enfance passée à Las Flores, un bidonville de Rosario, la troisième ville d’Argentine. Sa grand-mère y vit encore, en face de l’ancienne maison des Delgado (ci-contre). Pour Noël, « Chelito » y est passé, rendant visite à ses anciens voisins (ci-dessus) et retrouvant ses potes. Parmi eux, Hector, qui arbore le maillot ciel et blanc frappé du numéro fétiche du héros local. C’est dans son garage que leur groupe « Cumbia Buena 19 » répète (ci-dessous). Ce jour-là, César se lance dans une impro, ses amis d’enfance maillots de l’OL et de Cruz Azul sur le dos, lui au güiro. On finit la visite chez les parents Delgado, à Perez, dans la première maison que le Lyonnais s’est offerte. C’est là que son père, José, confie : « Je le faisais jouer gardien quand il était petit, car j’avais peur qu’il se blesse… » BERTRAND MAHE Buena 19, et à gratter un güiro, ce cylindre métallique qui donne le rythme. Aujourd’hui, fier de ses racines, il se fait guide dans le dédale de son ancien barrio. Avec les premiers salaires de son contrat à Rosario Central, César Delgado a sorti sa famille de Las Flores et ses modestes baraques de briques et de tôle. Aujourd’hui, à Perez, village posé à dix minutes de Rosario, les sœurs Ayelen et Yanina, et le jeune frère Julio cultivent un petit musée en l’honneur de l’aîné expatrié : photos du sacre olympique de 2004, unes enfiévrées de quotidiens mexicains quand leur Chelito brillait sous 32 L ’ É Q U I P E M A G Nº 14 4 0 20 FÉ V R I E R 2 0 10 ACCLIMATATION « À Lyon, ce n’est pas le même football que chez moi. Ça n’a pas été évident de trouver ma place, mais je n’ai pas baissé les bras. C’est mon caractère. » César Delgado le maillot de Cruz Azul (2003-08) et, depuis peu, clichés du héros en tenue lyonnaise. Le paternel, José, ancien docker, qui a passé deux mois à Lyon l’an dernier, a rapporté quelques babioles. Son fils, avant de passer pro, l’aidait à décharger les caisses de fruits et de légumes sur le marché de Fisherton, à Rosario. « Mon histoire personnelle se retrouve dans mon jeu. Je suis un joueur offensif doté d’une certaine habileté technique mais c’est aussi mon devoir de courir beaucoup, de presser, de combler les espaces quand l’adversaire monopolise le ballon, comme le Real en première mi-temps. Ces sacrifices, il faudra les répéter à Santiago Bernabeu… Je me sens prêt. » Mardi, à Gerland, par son sens du devoir agrémenté de courses rectilignes, de dribbles sobres et de passes dans le juste tempo, César Delgado a récolté les félicitations des deux entraîneurs. « C’est un joueur important quand il prend son couloir, à la fois discipliné et technique », selon le Madrilène Manuel Pellegrini. « Son match a été très bon, plein de générosité. Il a beaucoup progressé ces derniers mois, même s’il faut encore le préserver dans l’enchaînement des L ’ É Q U I P E M A G Nº 14 4 0 20 FÉ V R I E R 2 0 10 33 >> magacTu PROGRÈS « Son match contre le Real a été très bon, plein de générosité. Il a beaucoup progressé ces derniers mois. » ALAIN MOUNIC Claude Puel, son entraîneur REMPLACÉ PAR MICHEL BASTOS À LA 89e, CÉSAR DELGADO EST FÉLICITÉ PAR CLAUDE PUEL. « L’ÉQUIPE » LE CRÉDITE D’UNE NOTE DE 7. >> matches », ajoute Claude Puel, en rappel des nombreux pépins musculaires de l’Argentin depuis son arrivée, en janvier 2008. De fait, cette saison, sur vingt apparitions en Ligue 1, le numéro 19 de l’OL ne compte que onze titularisations. Le week-end dernier, face à Lens, il a marqué sur une offrande de son compatriote Lisandro. Face au Real, le lien s’est encore resserré avec le natif de Buenos Aires. « Avant un match, nous parlons ensemble de notre positionnement, de nos sensations… Sur le terrain, on se cherche. Plus nous jouons ensemble, plus nous sommes performants pour l’équipe. » Un poil de réussite et la soirée face au Real Madrid aurait été une pleine bénédiction pour César Delgado, qui glisse « Gracias a dios » toutes les deux phrases. Peu avant la pause, sa reprise de volée assénée hors de la surface a frappé le poteau d’Iker Casillas. « Je l’ai tentée car je me sens en confiance comme rarement depuis mon arrivée en France. » D’abord, il a dû 34 L ’ É Q U I P E M A G Nº 1 4 4 0 20 FÉ V R I E R 2 0 10 digérer les impacts physiques et la vélocité du jeu à la française. Il a fallu ensuite s’immiscer dans un effectif d’individus bardés de trophées, peu enclins à s’effacer pour le premier Sud-Américain qui passe. « Ici, ce n’est pas le même football que chez moi. Les entraînements étaient âpres. Je ne connaissais personne. Ça n’a pas été évident de trouver ma place mais je n’ai pas baissé les bras. C’est mon caractère depuis toujours. Ça commence à venir. » Son but décisif à Anfield, face à Liverpool, en octobre dernier (2-1) a contribué à réchauffer son statut. Et un tout récent sondage paru dans le Progrès montre que plus de 70 % des fans de l’OL souhaitent qu’il soit aligné plus souvent. Reste à batailler avec la concurrence, pas négligeable : Govou, Bastos, Ederson voire Källström et Lisandro, parfois alignés flanc gauche. « Pour être sûr d’être titulaire, il faudrait que je sois comme Messi… » Un autre petit gars de Rosario. CHRISTOPHE LARCHER (AVEC F.T.) César Fabian Delgado Godoy Milieu de terrain offensif de l’Olympique Lyonnais. 28 ans, né le 18 août 1981 à Rosario (ARG). International argentin, 20 sélections. 1,74 m ; 69 kg. >2001 Débuts en Première Division avec Rosario Central (ARG). 2003 Signe à Cruz Azul (MEX). Première sélection avec l’Argentine, le 16 juillet, contre l’Uruguay (2-2). > >2004 Champion olympique avec l’Argentine. 2008 Signe à Lyon. Champion de France. >