PROTECTION DU LITTORAL EN ALGERIE ENTRE POLITIQUES ET

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PROTECTION DU LITTORAL EN ALGERIE ENTRE POLITIQUES ET
VertigO – La revue en sciences de l'environnement, Vol7no3, décembre 2006
PROTECTION DU LITTORAL EN ALGERIE ENTRE
POLITIQUES ET POUVOIRS LOCAUX : Le cas du pôle
industriel d’Arzew (Oran- Algérie)
Par Kacemi Malika, Chargée de cours au département d’architecture, Université des Sciences et de la
Technologie d’Oran, Algérie, Courriel : [email protected]
Résumé : si les zones côtières concentrent de nombreuses ressources et opportunités, elles sont aussi exposées aux pollutions, nuisances
et autres dégradations résultant du développement de multiples activités économiques. Les fortes interactions qui existent entre ces
activités et l’environnement côtier impliquent un aménagement rationnel et respectueux qui réussisse à concilier les domaines
économiques et écologiques, conciliation passant parfois nécessairement par la protection impérative d’espaces sensibles.
En Algérie, l’industrie pétrolière est une activité positive et souhaitable, essentielle à la croissance économique et sociale du pays.
Cependant, elle s’est accaparée de nombreux sites présentant d’importantes potentialités paysagères, culturelles et historiques, bloquant
ainsi toute possibilité d’évolution pour d’autres usages liés à la mer, notamment liés au tourisme balnéaire.
L’essor de cette industrie s’est soldé par un aménagement chaotique, issu d’une absence de planification. Les effets résultant de ces
décisions sont aujourd’hui critiqués : par exemple, des communes ont été enclavées et privées de toute initiative sur leurs littoraux, et les
agglomérations qui y sont localisées subissent quotidiennement les effets de la pollution et sont exposées en permanence aux risques
d’explosions et d’incendies. Par ailleurs, de vastes étendues de terres agricoles ont été consommées.
Cet article, vise à dresser un constat de la situation actuelle, et d’identifier les acteurs de la protection du littoral et les limites de leur
pouvoir, afin de mettre en lumière le décalage entre le discours des sphères politiques et la gestion effective par les acteurs locaux.
Mots-clés : Littoral algérien –Pollution– Protection - Développement Durable- Gestion Intégrée
Abstract : If the coastal zones concentrate many resources and economical potentialities, they are also exposed to pollution, harmful
effects and other degradations resulting from the development of multiple economic activities. The strong interactions that exist between
these activities and the coastal environment imply the need for a rational and respectful planning which should reconcile the economic and
ecological needs, a conciliation that often requires the imperative protection of these sensitive spaces.
In Algeria, the oil industry is a positive and desirable activity, essential to the economic and social growth of the country. However, it
monopolized many sites presenting valuable
landscape, cultural and historical potentialities, thus interfering with any potential
development for other uses related to the sea, in particular related to tourism. The expansion of this industry has been chaotic, a result of
an absence of planning. The effects resulting from these decisions are criticized today: for example, villages or districts were wedged and
deprived of any initiative on their littorals, and the agglomerations already established there undergo the effects of pollution daily and are
permanently exposed to the risks of explosions and fires. In addition, vast arable lands were consumed.
In Algeria, the oil industry is a positive and desirable activity, essential to the economic and social growth of the country. However, it
monopolized many sites presenting valuable
landscape, cultural and historical potentialities, thus interfering with any potential
development for other uses related to the sea, in particular related to tourism. The expansion of this industry has been chaotic, a result of
an absence of planning. The effects resulting from these decisions are criticized today: for example, villages or districts were wedged and
deprived of any initiative on their littorals, and the agglomerations already established there undergo the effects of pollution daily and are
permanently exposed to the risks of explosions and fires. In addition, vast arable lands were consumed.
This paper aims at drawing up a report of the current situation, and to identify the actors of the protection of the littoral and the limits of
their authority, in order to identify the gap between the speech of the political spheres and the effective management by local actors.
Keywords : Algerian Littoral, Pollution, Protection, Sustainable Development
Introduction
Depuis l’antiquité, le littoral en Algérie a été particulièrement
convoité. L’ouverture sur la méditerranée en a fait un lieu
d’échanges commerciaux et culturels, son climat et sa position
géographique ont favorisé l’implantation des établissements
humains et des activités. Cette tendance a été renforcée pendant
VertigO, Vol7 No3
l’occupation française par le caractère extraverti de l’économie
coloniale. Après l’indépendance cette pratique s’est perpétuée à
travers d’importants investissements industriels, rendant cette
partie du territoire encore plus attractive.
Du point de vue écologique, le littoral algérien est riche et
diversifié. Sa façade maritime longue de 1200 km alterne rivages
1
VertigO – La revue en sciences de l'environnement, Vol7no3, décembre 2006
rocheux, plages sablonneuses et zones humides. Toutefois, il est
caractérisé par une concentration de la population et des
activités. En effet, en 1998 la population des wilaya littorales a
été estimée à 12 564 151 habitants soit 43% de la population
nationale, résidant en permanence sur une bande du littoral de 50
km de profondeur1 et plus de 5 242 unités industrielles y sont
implantées soit 51% du parc national (MATE, 2000).
etc.), une centrale électrique de capacité 960MV, six unités de
production (Hélium, Azote, engrais liquides, gaz industriel,
emballage…), un réseau de pipe provenant des champs
pétrolifères de Hassi Messaoud et Hassi Rmel et un ensemble
d’unités de prestation de service dans les domaines de
maintenance industrielle, de Génie Civil et de formation de
personnel.
Les problèmes principaux de l’environnement sont la pollution
de l’eau, de l’air et de l’eau souterraine dans et autour des centres
urbains et industriels, l’expansion incontrôlée des zones urbaines
au détriment des terres agricoles (à elles seules les régions
littorales autour des 3 principales villes côtières, à savoir Alger,
Oran et Annaba ont perdu environ 17% du total de leurs terres
agricoles) et l’extraction du sable des dunes et des plages pour les
besoins de construction.
Les acteurs impliqués dans la protection du littoral
Le rôle des industries pétrolières dans l’essor de l’économie
nationale est incontournable, cependant, elles se sont accaparées
les meilleurs sites littoraux et se sont développées au détriment
des autres usages liés à la mer. Elles peuvent en outre, comporter
des risques réels pour les agglomérations limitrophes et le milieu
marin.
Présentation du pôle industriel d’Arzew
Le pôle industriel d’Arzew est situé à 42 Km à l’est d'Oran. Il
s’étend sur environ 12 Km et comporte quatre communes :
Arzew, Ain El Bia, Béthioua et Mers El Hadjadj (figure 1). Le
pôle a eu pour objectif initial de structurer l'ensemble du
territoire dans lequel il est inséré aussi bien au niveau
international, national, que local.
Avant la création de la zone industrielle, la côte Est était bordée
de plages et de dunes vives sur presque toute sa longueur et
s’appuyer sur un riche arrière-pays agricole ; alors que la pêche
côtière était pratiquée au port d’Arzew.
Les communes du pôle industriel ont enregistré des taux de
croissance démographique significatifs, surtout en ce qui
concerne la décennie 1977-1987 : (Arzew : 6.83% ; Ain El Bia :
17,49% ; Béthioua : 1,83%). En effet la population du pôle
industriel est passée de 34 000 en 1977 à 115 000 en 19982.
La zone industrielle qui s’étend sur une superficie de 2800
hectares, comprend deux ports spécialisés et une plate forme
industrielle.
Cette
plate forme industrielle comprend une concentration
élevée de complexes pétrochimiques et de raffinage à haut risque
(05 complexes de liquéfaction, une raffinerie, un complexe de
production de méthanol et résines, un complexe d’ammoniac,
1
2
Source : Office National des Statistiques, RGPH 98.
Source : Office National des Statistiques
VertigO, Vol7 No3
Parmi les acteurs impliqués dans la protection du littoral en
Algérie, ont été retenus dans le cadre de cette étude, ceux
concernés par l’application de la loi 02-02 du 05 février 2002,
relative à la protection et la valorisation du littoral, à savoir : les
services de l’Environnement, de l’urbanisme, du tourisme, de la
santé, des travaux publics, les communes, les gardes côtes et les
services de la protection civile. Au fil du déroulement des
enquêtes, de nouvelles pistes sont apparues, ainsi d’autres acteurs
dont le rôle est tout aussi important ont été approchés. C’est le
cas des entreprises (SONATRACH et EPA), des associations et
des universitaires.
La Direction de l’Environnement
La direction de l’Environnement est chargée de la protection de
l’environnement dans la wilaya d’Oran (protection du littoral et
des espaces sensibles, gestion rationnelle de déchets, lutte contre
la Pollution industrielle par la mise à niveau des unités existantes
et la prévention contre les risques industriels, sensibilisation des
communes sur le décret 98-339 du 03/11/1998 définissant la
réglementation applicable aux installations classées et fixant leur
nomenclature, sensibilisation des communes littorales sur la loi
littoral,
célébration
des
journées
mondiales :
Eau,
Environnement, Désertification, Arbre…etc.
Dans le cadre des missions qui lui sont attribuées, la protection
du littoral constitue un volet important. Elle est chargée de
l’application de la loi 02-02 du 05 février 2002 dite loi
« littoral », du suivi de l’étude du Plan d’Aménagement Côtier3
(PAC) d’Oran, de la préservation des zones naturelles4 et de la
lutte contre les pollutions accidentelles du milieu marin5.
3
Le PAC est un instrument d’aménagement initié par le ministère
d’aménagement du territoire et de l’environnement (MATE) et piloté par
la direction de l’environnement au niveau de chaque wilaya littorale.
4
En l’occurrence, Les îles Habibas, classées réserve naturelle marine
par le décret 03-147 du 29 mars 2003. Ce site a été retenu dans le cadre
de la coopération Algéro- Française comme site pilote qui fera l’objet
d’un financement par le biais du Fond Français pour l’Environnement
Mondial FFEM qui a désigné le conservatoire français pour mener ce
projet.
5
Le MATE est chargé de coordonner l’ensemble des tâches et missions
du comité « Telbahr » national, d’assurer le secrétariat permanent du
comité « Telbahr » national, et veiller à la mise à jour des plans
d’urgence « Telbahr » national, régionaux et de wilaya.
2
VertigO – La revue en sciences de l'environnement, Vol7no3, décembre 2006
Figure 1. Situation du pôle industriel d’Arzew, Source ANAT.
En réalité la direction de l’Environnement souffre d’un déficit en
moyens humains et matériels, en comparaison au volume et à la
complexité des missions dont elle a la charge. Il faut aussi
signaler que la gestion des tâches citées est centralisée. Par
ailleurs la loi « littoral » ne s’applique pas à la zone industrielle
déclarée « établissement industriel à caractère national » 6.
La Direction de l’Urbanisme et de la Construction
Administration compétente pour l’approbation des instruments
d’urbanisme (PDAU et POS) et l’instruction des actes
d’urbanismes (certificat d’urbanisme, certificat de morcellement,
certificat de conformité et permis de construire, de lotir et de
démolir). Cependant certaines incohérences sont à signaler :
•
La loi littoral est considérée par les services de
l’urbanisme comme restrictive à l’aménagement (la
zone inconstructible des 300 mètres) et comportant
beaucoup de notions floues.
6
« Dans le littoral, sont interdites toute implantation d’activités
industrielles nouvelles. Sont exclues de la présente disposition,
les activités industrielles et portuaires d’importance nationale
prévus par les instruments d’aménagement du territoire ».
VertigO, Vol7 No3
•
Les textes juridiques et les instruments d’urbanisme
doivent se soumettre à la zone industrielle d’Arzew,
déclarée établissement industriel à caractère national.
La Direction des Travaux publics
Parmi les tâches que doit assurer la direction des Travaux
publics, la gestion du Domaine Public Maritime (DPM). Il faut
signaler que cette structure ne dispose pas de données exactes
sur les occupations et les exploitations du Domaine Public
Maritime (DPM), ni de cartographie précise délimitant cet
espace.
La Direction de la Santé et de la Population
La Direction de la Santé et de la Population d’Oran veille à la
préservation de la salubrité publique. En dehors des zones de
baignade et de la saison estivale, le milieu marin ne fait l’objet
d’aucun contrôle. Le contrôle effectué n’est pas conforme aux
dispositions de la circulaire N° 445/MSP/DP/SDRSE du 04 juin
1998 établissant les normes de qualité pour les eaux de baignade
et donnant des indications générales sur les mesures à prendre
pour en assurer la surveillance qui stipulent un contrôle
microbiologique et physico-chimique continu des eaux de
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VertigO – La revue en sciences de l'environnement, Vol7no3, décembre 2006
baignade. Cependant, on note l’absence de contrôle physicochimique7 des eaux marines. Les ressources du littoral ne font
l’objet d’aucun contrôle.
La Direction du Tourisme et de l’Artisanat
La direction du tourisme est chargée de l’instruction des Permis
de construire des établissements touristiques situés dans les
Zones d’Expansion Touristique8 (ZET), et des établissements
hôteliers. Elle Préside la commission de la saison estivale et
contrôle les installations hôtelières. C’est l’Agence Nationale du
Développement Touristique (ANDT) qui initie et assure le suivi
des études des ZET. Il faut signaler que cet organisme établi à
Alger assure une gestion centralisée, puisqu’il n’a pas de
structures qui le représentent au niveau des Wilayas littorales.
commune. A la commune de Mers El Hadjadj, la superficie
occupée par la zone industrielle est relativement faible par
rapport aux autres communes du pôle industriel, les impôts
locaux versés ne sont pas conséquents. Paradoxalement, ceci est
perçu par la commune comme une sanction. Le versement de ces
taxes n’a pas été systématique, les communes ont du établir des
expertises de leur foncier, qu’elles ont soumis aux gestionnaires
de la zone industrielle. La commune d’Arzew a adressé plusieurs
écrits à la direction de l’Environnement et au Wali d’Oran, ce
qui lui a donné finalement droit à la taxe de pollution dont le
montant est insignifiant par rapport aux autres taxes versées
(voir tableau 1). Il faut signaler que les actions engagées par les
communes sont séparées, malgré les intérêts et les liens qui les
associent.
Les gardes côtes
Les communes
Malgré un pluralisme politique institué par la constitution de
1989, les Communes
sont pratiquement gérées par les
administrations centrales et sont écartées du processus de
décision. A titre d’exemple les communes du pôle industriel
d’Arzew ont appris la nouvelle de classement de leur territoire
zone à haut risque par la presse. Les études des instruments
d’Urbanisme sont initiées et financées par la Direction de
l’Urbanisme.
Les communes du pôle industriel, à l’instar de la majorité des
communes algériennes, disposent dans le cadre de l’Agenda 21
de chartes communales de l’environnement. Dans les faits, les
engagements pris, ne sont pas honorés.
Les communes du pôle industriel perçoivent des impôts locaux
(taxe sur l’activité professionnelle et taxes foncières et
d’assainissement) conséquents de la part de la zone industrielle.
A titre d’exemple, ces taxes se sont élevées pour la commune de
Ain El Bia à 88 276 003 DA pour l’année 2005. Ceci représente
à peu près l’essentiel des ressources financières de cette
7
Le contrôle physico-chimique en Algérie, est effectué par
l’Agence Nationale des Ressources Hydriques (ANRH),
organisme régional sous la tutelle du ministère de l’Hydraulique,
couvrant dans la zone ouest du pays 13 wilaya, chargé de la
surveillance de la qualité physico chimique des eaux potables au
niveau des barrages, des forages et des sources. Il peut être
sollicité de façon exceptionnelle pour analyser la qualité
physico- chimique de l’eau de mer.
8
Les Z.E.T ont été crées par l’ordonnance du 26 mars 1966. On
compte 173 unités spatiales dont 141 localisées sur le littoral
(soit 74%), classées par décret 88-232 du 05-11 1988 dans 14
Wilaya littorales
VertigO, Vol7 No3
Le Service National des Gardes Côtes (SNGC) est chargé de
l’application des lois et règlements relatifs à la navigation
maritime, à la pêche et à la douane conformément aux accords
internationaux ratifiés par l’Algérie. Il assure la police des eaux
territoriales et du domaine public maritime. Il participe à
l’assistance et au sauvetage en mer. Il contribue à la lutte
préventive ou répressive contre la pollution de la mer par les
hydrocarbures9.
Les inspecteurs de la navigation maritime mènent régulièrement
des patrouilles, en vue de constater les déversements en mer et
contrôler les équipements des navires et l’état des citernes des
eaux usées et des eaux de ballast. Ces eaux doivent être évacuées
dans des stations de réception des eaux de ballast installées au
niveau des ports.
En Algérie, il n’existe que deux stations de réception des eaux de
ballast. L’une située au port d’Arzew, l’autre au port de Skikda.
Malheureusement la station d’Arzew est à l’arrêt. Cet état de fait
contraint les navires à déverser leurs eaux usées en mer. Les
inspecteurs de la navigation maritime n’agissent qu’en cas de
flagrant délit.
Dans le cadre du dispositif « Telbahr », le SNGC doit assurer la
direction et la coordination des opérations de lutte contre la
pollution en mer, la réception et la diffusion de l’alerte. Il doit en
outre procéder à l’estimation de l’ampleur de la pollution,
demander le déclenchement du plan « Telbahr », désigner un
commandant sur scène et de mettre le matériel nécessaire à la
disposition du comité « telbahr"10.
9
Article 3 de l’ordonnance 73-12 portant création du service
national des gardes côtes.
10
Il s’agit du comité « Telbahr » de Wilaya, présidé par le Wali
territorialement compétent. Il est composé du service national des
gardes côtes qui doit assurer les opérations de lutte en mer, de la
protection civile chargée des opérations de lutte à terre, de la
direction de l’Environnement de Wilaya qui doit assurer le
4
VertigO – La revue en sciences de l'environnement, Vol7no3, décembre 2006
En réalité, ces forces de l’ordre déplorent le manque de personnel
formé à cet effet, et de moyens adéquats pour assurer une bonne
surveillance maritime. A titre d’exemple les aéronefs facilitent la
détection de la pollution marine. En effet ces appareils sont
munis de dispositifs de télédétection, permettant de déceler les
nappes, contribuer à l’évaluation scientifique des risques,
contrôler la diffusion de la pollution et guider les équipements
d’intervention. Les gardes côtes ne disposent pas actuellement de
tels appareils.
Dans le cadre de la nouvelle politique HSE (Health-SafetyEnvironnement / Hygiène – sécurité –Environnement),
SONATRACH doit se conformer aux exigences légales et
réglementaires pour la mise en œuvre d’une politique
réglementaire et normative et la satisfaction de l’ensemble des
exigences du statut de l’entreprise et des autres partis intéressés.
Elle doit en outre développer une démarche préventive de gestion
des risques et d’atteintes à l’environnement et procéder à
l’amélioration continue des performances.
Le matériel disponible au niveau du SNGC a été recensé, mais
n’a pas été complété à ce jour.
Dans la zone industrielle d’Arzew, la direction HSE de
SONATRACH est une structure récemment créée (décembre
2005), elle ne dispose pas actuellement de toutes les données
précises relatives à l’ampleur de la pollution et des risques et les
solutions et moyens pour y faire face. Certains complexes
industriels, en l’occurrence les complexes GL1Z, GL2Z, GP1Z
ont fait l’objet d’une triple certification management qualité ISO
9001/2000, environnement ISO 14001/2004 et OHSAS
18001/1999 par le bureau belge AIB Vinçote associé à
l’organisme certificateur IQNET (International Certification
Network).
Les services de la Protection civile
Les services de la protection civile sont chargés du sauvetage des
vies humaines. Dans le cadre du dispositif « Telbahr », ils
doivent assurer la direction et la coordination des opérations de
lutte contre la pollution à terre, et mettre à la disposition du
comité des équipes de plongeurs. Ils sont en outre responsables
de la mise en œuvre du plan ORSEC.
Les entreprises
SONATRACH
Le poids de SONATRACH demeure important dans l’économie
du pays tant par le niveau des investissements (propres ou en
partenariat) qu’elle réalise que par le volume des affaires et des
emplois qu’elle génère dans d’autres secteurs d’activités
nationales et par sa contribution au budget de l’Etat.
SONATRACH, pour des raisons multiples a toujours été
considérée comme le prolongement de l’Etat, le caissier
principal de l’économie nationale.
La nouvelle loi relative aux hydrocarbures11 vise essentiellement
la séparation entre l’Etat et une entreprise publique, en
l’occurrence SONATRACH. Elle définit le régime juridique des
activités de toute la chaîne pétrolière et gazière (de la rechercheexploration à la distribution des produits raffinés) et également
les droits et obligations de toutes les personnes (au sens
juridique) appelées à exercer ces activités. Ces dispositions
mettent fin au monopole qu’exerçait SONATRACH. Dorénavant
toutes les activités de la chaîne relèvent de l’acte commercial
susceptible d’être exercé par tout agent économique national ou
étranger.
secrétariat et des Entreprises Portuaires chargées de mettre à la
disposition du Comité le matériel et les équipements nécessaires.
11
La procédure de certification ne constitue pas un critère de
performance. Lorsqu’une entreprise vise la performance, elle n’a
qu’à se conformer aux normes et règles légales pour atteindre son
objectif. Elle n’a nullement besoin de faire venir un organisme
certificateur de l’étranger et le payer pour attester qu’elle est
performante.
La SONATRACH est un établissement industriel à caractère
national. Les impacts de ses activités sur l’environnement ne sont
pas évalués ni contrôlés. Sa récente politique environnementale
(politique HSE) a été imposée dans le cadre de la concurrence
internationale.
L’Entreprise Portuaire d’Arzew (EPA)
L’EPA est le gestionnaire du port d’Arzew. Elle dispose d’un
service antipollution, intégré au département police et sécurité de
la direction de la capitainerie.
Dans le cadre du dispositif « Telbahr », l’EPA est chargée de
mettre à la disposition du comité « Telbahr » les moyens
nécessaires (vedettes, barrage, écrémeurs, absorbants…) pour
lutter contre la pollution.
Les moyens actuellement disponibles dans le port d’Arzew sont
destinés à lutter contre une pollution par les hydrocarbures au
niveau du périmètre portuaire. Ils sont insuffisants en cas de
pollution de grande ampleur.
Loi 05-07 du 28 avril 2005 relative aux hydrocarbures
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Tableau 1. Impôts locaux versés par la zone industrielle. Source : tableau établi à partir des prévisions des recettes
budgétaires d’origine fiscales de l’année 2005 des quatre communes.
Commune
Arzew
Ain El Bia
Béthioua
Mers El Hadjadj
Taxe foncière
(DZD)
14 633 364
19 566 084
9 451 272
-
Taxe sur l’activité
professionnelle (DZD)
421 762 193
68 709 919
306 132 000
24 738 670
Taxe sur la
pollution (DZD)
220 000
-
Total perçu
(DZD)
436 615 557
88 276 003
315 583 272
24 738 670
1,0 DZD = 0,0143056 CAD = 0,0104072 EUR
Les associations
Plusieurs associations de protection de l’environnement activent
au niveau de la wilaya d’Oran. On note une faible implication de
ces associations par les pouvoirs publics. Leurs actions sont
ponctuelles et n’ont pas une réelle capacité à mobiliser l’opinion
publique. Elles se limitent dans la majorité des cas à publier des
articles dans la presse pour dénoncer certaines situations
flagrantes d’abus.
Les scientifiques
Malgré la présence de nombreux laboratoires de recherche
spécialisés dans des domaines très diversifiés, au niveau
national, les scientifiques ne sont pas consultés dans la prise de
décision.
Nous avons signalé précédemment l’absence en Algérie,
d’organismes chargés de la surveillance permanente ou
occasionnelle de la qualité physico-chimique de l’eau de mer et
des ressources marines. Il faut néanmoins souligner, qu’une étude
préliminaire de la contamination du littoral oranais par les
différentes formes de pollution a été réalisée par les chercheurs
de l’université d’Es Senia12.
Lecture critique de la gestion actuelle du littoral en Algérie à
travers le cas du pôle industriel d’Arzew
L’analyse des rôles des différents acteurs et les répercussions sur
le littoral permet de mettre en évidence les limites et les
insuffisances de leur gestion.
Manque d’intérêt environnemental
Le caractère récent de l’intérêt porté à l’environnement en
général (loi relative à la protection de l’environnement
12
Etude dirigée par Boutiba Z., Taleb, M., Z. et Abi Ayad S.,
M. dans le cadre du Laboratoire de Biologie et Pollution Marines.
Département de biologie. Faculté des sciences. Université d’Es
Senia intitulée « Etat de la pollution marine de la côte oranaise ».
Cette étude a fait l’objet d’une publication à Dar El Gharb en
2003.
VertigO, Vol7 No3
promulguée en 1983, révisée en 2003, création du ministère de
l’Environnement en 2000) et le littoral en particulier (loi
« littoral » promulguée en 2002), peut expliquer un certain
manque de maturité et d’affirmation dans le domaine de
protection de l’environnement. À titre d’exemple l’interdiction de
construire sur la bande des 100 mètres13 n’est pas perçue par
certains représentants des administrations (Urbanisme, Tourisme,
communes…) et par les investisseurs potentiels comme une
mesure visant à protéger les milieux naturels du littoral et les
biens, mais plutôt comme une action restrictive qui inhibe le
développement. Plusieurs projets se trouvent bloqués à cause de
cette mesure.
Le littoral, par les fortes pressions et les transformations qui s’y
produisent, souligne plus que tout autre espace, les effets de ce
manque d’intérêt pour l’environnement, il faut aussi signaler
l’absence d’évaluation de l’état de l’environnement par les
organismes compétents, hormis quelques études menées par les
universitaires.
Prédominance de l’aspect économique au détriment de
l’environnement
L’activité industrielle se développe malgré les impacts négatifs
qu’elle génère. La perception des impôts locaux (taxe foncière,
taxe sur l’activité professionnelle) constitue l’essentiel des
ressources des communes
du pôle industriel. Lorsque
l’occupation industrielle est réduite, ces taxes diminuent, c’est le
cas de la commune de Mers El Hadjadj qui aurait préféré
augmenter l’occupation industrielle et renflouer ses caisses.
Le principe de substitution (choix de l’action qui présente le
moins de risque ou de danger environnemental même si elle
entraîne des coûts plus élevés) institué par la loi 03-10 du 19-072003 relative à la protection de l’environnement dans le cadre du
développement durable est en contradiction avec la déclaration
des zones industrielles des hydrocarbures, zones à haut risque.
En Algérie c’est l’aspect économique qui prime, ce n’est
13
La bande inconstructible des 100 mètres a été instaurée par la
loi 90-29. La loi 02-02 du 05 février 2002 prévoit l’extension de
cette bande, qui peut atteindre 300 mètres à partir du rivage pour
des motifs liés au caractère sensible du milieu côtier.
6
VertigO – La revue en sciences de l'environnement, Vol7no3, décembre 2006
sûrement pas la zone industrielle qui va être délocalisée, malgré
les impacts négatifs qu’elle génère sur un environnement fragile
et menacé (le littoral et le milieu marin) mais les populations.
Le principe du pollueur payeur (toute personne dont les activités
causent ou sont susceptibles de causer des dommages à
l’environnement assume les frais de toutes les mesures de
prévention de la pollution) n’est pas appliqué. Hormis la taxe
foncière et la taxe sur l’activité professionnelle, la taxe liée à la
pollution n’est pas versée systématiquement par les industriels.
Dans le cas étudié, seule la commune d’Arzew perçoit la taxe de
pollution, dont le montant n’est pas conséquent (Tableau 1). La
situation financière des entreprises entrave en partie l'application
du principe pollueur payeur.
Limites de la législation
La mise en place des normes et des règlements et l’application
effective de ces derniers n’est pas simultanée. La loi « littoral »
a été promulguée suite au constat des dégradations. Une fois la
loi votée, la pression se relâche et les décrets tardent à venir.
Ainsi la loi « littoral » nécessite pour son application effective
pas moins de 11 décrets. De même pour la loi 90-29 du 1er
décembre 1990 relative à l’aménagement et à l’urbanisme qui a
prescrit la zone inconstructible des 100 mètres, « toutefois, les
constructions nécessitant la proximité de la mer sont autorisées »
le décret spécifiant ces activités n’a pas été promulgué à ce jour.
Cette « brèche » dans la loi 90-29 a permis bien des abus. En
l’absence de textes clairs la loi est plus contournée qu’appliquée
strictement.
Les textes juridiques doivent être clairs et précis et ne comporter
aucune notion floue qui donnerait lieu à un contournement de la
loi. Ils doivent définir clairement les notions
et les
responsabilités de chacun et donner la possibilité d’adapter la
réglementation aux réalités territoriales locales par la géographie.
Les décrets d’application ne doivent pas tarder après la
promulgation de la loi.
D’après A. Miossec (2004), de toutes les disciplines avec
lesquelles les géographes ont successivement envisagé de
collaborer, la science juridique et la science politique sont
sûrement celles qui ont semblé exercer le moins d’attrait. Cette
situation est paradoxale car à mesure que les géographes se
faisaient aménageurs, la part du droit restait et reste largement
limitée ». Ceci se traduit dans les faits par des définitions
réglementaires peu adaptées aux entités spatiales, enfreignant une
protection efficace de l’environnement.
Etablir plus de complémentarité entre les scientifiques des
diverses disciplines d’une part et les décideurs politiques d’autre
part, associée à une large diffusion peut constituer un nouveau
rapport à la prise de décision.
L’absence de contrôle dans la pratique
VertigO, Vol7 No3
Alors que la zone industrielle est caractérisée par une forte
activité industrielle basée sur l’utilisation massive des produits
chimiques et des hydrocarbures, on signale l’absence de
structures de contrôle des installations industrielles d’une part, et
l’absence de contrôle physico-chimique du milieu marin et de
ses ressources, d’autre part. Il faut indiquer aussi que plusieurs
stations de dessalement de l’eau de mer ont été réalisées à
proximité de la zone industrielle (Arzew, Béthioua), alors que
l’épuration des eaux usées n’est pas encore prévue.
Le contrôle microbiologique n’est pas permanent. Il ne concerne
que les zones de baignade.
Par ailleurs, on déplore l’absence de données sur l’ampleur de la
pollution marine et atmosphérique générées par l’activité
industrielle et ses répercussions sur l’environnement et les
populations.
Qui doit s’acquitter de cette tâche ? SONATRACH ! Mais
même si cette dernière détient ce genre d’informations, est-il de
son intérêt de révéler les impacts générés par son activité ?
SONATRACH comme tout autre installation industrielle doit
être auditée et contrôlée par un organisme compétant en la
matière. Dans les faits SONATRACH, en tant qu’entreprise à
caractère national n’est pas contrôlée. Aucun instrument de
planification ne s’applique à elle.
Défaillance de l’administration
La direction de l’Environnement constitue indéniablement
l’acteur principal, sinon le seul de la protection de
l’environnement. De nombreuses tâches lui sont confiées
(littoral, établissements classés, établissements industriels à
risques majeurs, gestion des déchets, gestion des zones
naturelles..). Cette structure dispose t-elle des moyens humains et
matériels nécessaires pour faire face à toutes ces tâches et
pressions? La réponse est bien entendu négative. Si la Direction
de l’Environnement assure le suivi de certaines missions, elle ne
peut dans les faits garantir un contrôle permanent.
En réalité, tout repose sur la bonne volonté de cet organisme.
Toutes ces tâches sont nouvelles, elles émanent de dispositions
juridiques récentes. Le fonctionnement de la Direction de
l’Environnement est en inadéquation avec le nombre de tâches
qu’elle doit gérer. Au final seuls les dossiers les plus importants,
en l’occurrence, ceux initiés par le Ministère de l’Aménagement
du Territoire et de l’Environnement (étude du plan
d’aménagement côtier d’Oran, dispositif « Telbahr »..) ou les
projets qui suscitent l’intérêt de la coopération internationale (les
îles Habibas) sont pris en charge.
La gestion du secteur de l’environnement ne découle pas d’une
concertation locale des différentes administrations et autorités.
C’est une gestion bureaucratique et centralisée du Ministère de
7
VertigO – La revue en sciences de l'environnement, Vol7no3, décembre 2006
l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement. A titre
d’exemple les études des Plans d’Aménagement côtiers des
wilayas sont initiées et financées par le MATE, les premières
présentations des études ont eu lieu au siège de ce dernier. Le
PAC d’Oran a d’abord été présenté au siège du MATE, les
présentations qui ont suivi se sont déroulées au siège de la
Wilaya, ce n’est qu’à la fin, que l’étude a été présentée aux
autorités locales des communes concernées, à la demande de ces
derniers. Plusieurs incohérences ont été relevées ainsi que le
manque d’actualisation de l’information. Ceci aurait pu être
évité si dès le début, les acteurs locaux ont été consultés.
La Direction de l’Urbanisme peut avec les instruments dont elle
a la charge, intervenir pour la protection du littoral. En effet dans
le cadre des règlements des PDAU et des POS peuvent être
interdites certaines activités et occupations, ainsi que la
préservation des espaces sensibles, notamment par l’interdiction
de construire. En réalité la Direction de l’Urbanisme reste
passive, alors que la loi « littoral » est avant tout une loi
d’aménagement et d’Urbanisme. La révision des instruments
d’urbanisme approuvés pour les mettre en conformité avec la loi
« littoral » n’a pas été engagée. Aucun POS n’a été lancé dans les
zones littorales depuis l’année 2001. Malheureusement les
instruments d’urbanisme, et les textes juridiques
doivent se
soumettre aux installations industrielles d’intérêt national.
La direction de la Santé n’effectue pas les contrôles des eaux
conformément à la réglementation en vigueur. Le contrôle
physico chimique est absent, le contrôle microbiologique n’est
pas permanent, et ne concerne que les zones de baignade.
La direction des Travaux Publics chargée de la gestion et la
protection du DPM ne dispose pas de données exactes sur les
occupations et les exploitations illicites de ce dernier, ni de
cartographie précise délimitant cet espace. La procédure de
délimitation actuellement en vigueur est obsolète. En effet la
délimitation du DPM conformément au décret 91-454 exige la
convocation d’une commission à un jour donné, qui ne coïncide
pas nécessairement aux conditions correspondant à la définition
du décret. « La délimitation côté terre du domaine public
maritime, est appréciée et constatée par la limite du rivage,
atteinte par les flots, à leur plus haut niveau de l’année, dans des
conditions météorologiques normales. La surface du littoral ainsi
couvert par les flots fait partie intégrante du domaine public
maritime naturel (…). La procédure de constat est réalisée par les
services techniques compétents, au moment ou les flots ont
atteint le niveau le plus élevé. Elle donne lieu à l’établissement
d’un procès verbal de constat»14. Cette procédure de délimitation
doit être révisée, elle devrait plutôt être basée sur des procédés
scientifiques tels que des critères topographiques (falaises,
14
Article 99 et 100 du décret 91-454 du 23 novembre 1991 fixant
les modalités d’administration et de gestion du domaine privé et
du domaine public de l’Etat.
VertigO, Vol7 No3
plages sableuses..),
historiques.
géomorphologiques,
botaniques
ou
La direction du tourisme responsable de l’instruction des permis
de construire et du contrôle des établissements touristiques et
hôteliers est écartée de la gestion des ZET. C’est l’ANDT qui
initie et suit les études de ZET. Il faut signaler que cet organisme
établi à Alger assure une gestion centralisée, puisqu’il n’a pas de
structures qui le représentent au niveau des Wilayas littorales.
Les communes sont écartées du processus de décision. Les
instruments d’urbanisme sont initiés et approuvés par la direction
de l’urbanisme (non-conforme à la loi 90-29 du 1er décembre
1990 et le décret d’application 91-177 du 28 mai 1991). La
Charte communale n’est pas appliquée. Il n’existe pas de
concertation et de coordination entre les communes malgré les
intérêts et les liens qui les associent.
La gestion du littoral n’est pas seulement sectorielle mais au sein
de chaque secteur existent des dysfonctionnements.
Exclusion du public
Certaines associations de protection de l’Environnement ont été
crées récemment, leur implication reste timide. Elle se limite
dans la majorité des cas à publier des articles dans la presse pour
dénoncer certaines situations flagrantes d’abus. Elles sont parfois
invitées par les pouvoirs publics, à certaines manifestations, plus
pour montrer qu’on fait de la démocratie que pour les impliquer
réellement. Les actions de ces associations restent ponctuelles et
n’ont pas une réelle capacité à mobiliser l’opinion publique. Ces
associations sont par ailleurs confrontées au manque
d’information, elles sont exclues, comparativement aux
possibilités d’intervention des autres acteurs sectoriels.
L’implication effective des associations dans la protection de
l’environnement reste peu probable, encore faut-il impliquer les
autorités locales.
Conclusion
Si les différents acteurs disposent d’importantes compétences en
matière de protection du littoral et lutte contre la pollution, ces
compétences ne sont pas coordonnées. Ces administrations ne
jouent pas les rôles qui leurs sont assignés. Le manque d’intérêt
environnemental est aussi à signaler. Le littoral, par les fortes
pressions et les transformations qui s’y produisent, souligne plus
que tout autre espace, les effets de ce manque d’intérêt pour
l’environnement, marquant de façon évidente, les effets de ces
inadéquations. Il faut aussi noter l’absence d’évaluation de l’état
de l’environnement par les organismes compétents, hormis
quelques études menées par les universitaires. A l’heure actuelle,
il n’existe aucun dispositif assurant une surveillance permanente
du milieu marin et de ses ressources ni d’installations de mesure,
de contrôle et d’alerte de la pollution atmosphérique.
8
VertigO – La revue en sciences de l'environnement, Vol7no3, décembre 2006
L’efficacité du régime juridique relatif à la lutte contre la
pollution industrielle dépend de la volonté politique au plus haut
niveau. L’examen du cas de la zone industrielle d’Arzew fait
apparaître un grand nombre de problèmes d’organisation :
L’incapacité de certaines administrations à changer leur mode de
travail et leurs modèles de décision face à de nouvelles exigences
et prendre les initiatives nécessaires pour prévenir la dégradation
future du milieu naturel ; la dispersion des compétences dans le
domaine de la lutte contre la pollution et l’incapacité à fixer de
nouveaux objectifs et définir une véritable politique à long terme.
Par ailleurs la bonne application des textes exige une évaluation
précise de la situation présente et future, la définition d’objectifs
qualitatifs relatifs aux polluants et aux milieux récepteurs, et une
coopération entre les différentes administrations.
Les associations et la société civile sont exclues, leur implication
se limite dans la majorité des cas à publier des articles dans la
presse pour dénoncer certaines situations flagrantes d’abus. Les
actions de ces associations restent ponctuelles et n’ont pas une
réelle capacité à mobiliser l’opinion publique.
En Algérie, la gestion du littoral est non seulement sectorielle
mais au sein de chaque secteur existent
aussi des
dysfonctionnements.
La gestion intégrée du littoral suppose une étroite coordination
entre les divers intervenants. Ne faut-il pas créer des organismes
spécialement chargés de la gestion du littoral ? Une allusion en
est faite à l’article 34 de la loi littoral. « Dans les zones littorales
ou côtières sensibles ou exposées à des risques
environnementaux particuliers et afin de mobiliser l’ensemble
des moyens requis, il est institué un conseil de coordination
côtière. La coordination et le fonctionnement de ce conseil sont
fixés par voie réglementaire ».
Tant de choses expliquent cet état de fait, entre autre, le manque
de moyens humains et financiers et l’inefficacité de la
législation et des instruments mis en œuvre. Dans les faits la zone
industrielle, en tant qu’installation à caractère national n’est pas
contrôlée. Les dispositions de la loi « littoral » relatives au
« transfert vers des sites appropriés, des installations
industrielles existantes dont l’activité est considérée comme
préjudiciable à l’environnement côtier » ne lui sont pas
appliquées.
On est loin du processus de gestion intégrée décrit par les
auteurs, et mis en œuvre dans la majorité des Etats côtiers
européens et américains. Cependant, beaucoup d’efforts ont été
consentis par l’Etat algérien ces dernières années :
•
•
Un diagnostic de l’état de l’environnement en général et
du littoral en particulier a été établi à travers tout le
territoire national.
Sur le plan législatif et réglementaire, des textes
juridiques prenant en compte la dimension
VertigO, Vol7 No3
•
•
environnementale et le développement durable ont été
promulgués.
Des instruments d’aménagement du territoire prenant en
compte les caractéristiques physiques et géographiques
des régions (SNAT 2025, SRAT 2005, PAC…etc.) sont
en cours d’élaboration.
Des dispositions relatives à la lutte contre la pollution
(études d’impacts, audits…) et la protection du milieu
marin contre les pollutions accidentelles (dispositif
« Telbahr ») ont été mis en place.
Reste la question de l’intégration des différents intervenants,
dans le cadre d’une politique concertée et coordonnée. A ce titre
nous rappelons les cinq « dimensions d’intégration » citées par
Cicin-Sain et Knecht (1998) :
1.
2.
3.
4.
5.
L’intégration intersectorielle
entre les différents
secteurs d’activité.
L’intégration intergouvernementale entre les différents
niveaux de gouvernements
L’intégration spatiale entre les domaines marin et
terrestre.
L’intégration internationale entre pays dont les actions
respectives ont des effets sur le littoral de leurs voisins.
L’intégration scientifique entre disciplines différentes
mais aussi entre scientifiques et gestionnaires.
Enfin, l’éducation et la sensibilisation à l’environnement reste un
problème majeur dans notre société. Les priorités sont toujours
économiques et sociales, il faut obtenir que l’environnement en
général et le littoral en particulier ne soient ni omis, ni oubliés,
ni sciemment exclus. La préservation de l’environnement doit
constituer la préoccupation de tous, il faut éviter d’en parler
uniquement dans les discours des hautes sphères politiques.
Bibliographie
Cicin-Sain, B. et R.W. Knecht, 1998, Integrated coastal and ocean management,
Concepts and practises, Island Press, Washington, D.C, 517p.
Ministère de l’aménagement du territoire et de l’environnement (MATE), 2000,
Rapport sur l’état et l’avenir de l’environnement.
Miossec, A., 2004, Encadrement juridique, aménagement du littoral, gestion du
littoral : les géographes et le droit, B.A.G.F. N° 3.
Semmoud, B., 1986l Industrialisation et espace régional en Algérie. Le cas de
l’Oranie littorale. 2 tomes Office des Publications Universitaires.
Liste des sigles
DPM Domaine Public Maritime
EPA Entreprise Portuaire d’Arzew
MATE Ministère de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement
ONS office national des statistiques
PAC Plan d’Aménagement Côtier
PDAU Plan Directeur d’Aménagement et d’Urbanisme
POS Plan d’Occupation des Sols
SNAT Schéma National d’Aménagement du Territoire
SNCG Service National des Gardes Côtes
SRAT Schéma Régional d’Aménagement du Territoire
ZET Zones d’Expansion Touristique
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