Julie Gaillot de Saintignon et Antoine Deutsch

Transcription

Julie Gaillot de Saintignon et Antoine Deutsch
Arrêt du tabac dans le traitement des cancers :
Pourquoi et comment systématiser son accompagnement ?
SFT – 3 novembre 2016
Julie Gaillot-de Saintignon
Antoine Deutsch
Arrêt du tabac dans le traitement des cancers :
Pourquoi et comment systématiser son accompagnement ?
Documents de référence sur e-cancer.fr :
synthèse
argumentaire
Constat : tabagisme des patients atteints de cancer
Enquête VICAN 2 (2014)
• 22% des patients atteints de cancer sont fumeurs dans l’année de leur diagnostic
• Diagnostic : moment opportun pour l’arrêt du tabac, McBride (2003); Demark-Wahnefried (2005)
70% des patients déclare être « …prêt à se priver de certains plaisirs de l’existence, comme trop
manger, boire de l’alcool et fumer pour gagner des années de vie»
• Fréquence d’arrêt très variable selon la localisation du cancer
37% des patients fumeurs ont arrêté deux ans après le diagnostic, avec :
o cancer poumon : 69 %
o cancer sein : 26%
Bénéfices de l’arrêt du tabac pour les patients atteints de
cancer à tous les temps du parcours
Réduction des risques
périopératoires
L’arrêt est toujours bénéfique avant chirurgie quelque soit le délai de sevrage :
•
Poursuite du tabagisme : risque plus important d’infections au site opératoire, de
nécroses (opération cancers du sein, VADS) et de complications respiratoires
(opération cancers du poumon ou digestifs)
• Bénéfice du sevrage de courte durée (2-4 semaines) (opération cancers du poumon,
VADS, estomac)
Nakagawa (2001); Sardari (2005); Mason (2009); Kuri (2005); Jung (2014)
Interaction avec les
traitements 1/2
Le tabagisme modifie les propriétés pharmacologiques de certains traitements par
activation des enzymes du cytochrome P450 (ex: erlotinib) O’Malley (2014)
La fumée de cigarette modifie in vitro (modèles cellulaires et animaux) l’efficacité de traitements:
o Mécanismes de chimio résistance :
 inhibition de voies apoptotiques (ex: 5-Fluoracil, camptothecine, gemcitabine, cisplatine, …)
 activation des voies d’efflux cellulaire (ex: doxorubicine, mitoxantrone)
Dasgupta (2006); Nishioka (2010); banerjee (2013); Dinicola (2013); An (2013)
o Réduction de l’efficacité de la radiothérapie par augmentation de l’hypoxie tissulaire, Warren (2012)
Interaction avec les
traitements 2/2
La poursuite du tabagisme est associée à une aggravation des risques liés à l’irradiation :
o
o
o
o
Irradiation des tumeurs des voies aérodigestives : dégradation de la qualité vocale,
persistante de mucite, œdème, nécrose à long terme
Irradiation pelvienne : toxicités rectales, gastro-intestinales à long terme
Reconstruction mammaire en terrain irradié : toxicités cutanés
Irradiation thoracique (cancer du sein) : cancer du poumon
Van der Voet (1998); Hocevar-Boltezar (2009); Wedlake (2010); Eifel (2002); Alsadius (2011); Lilla (2007); Travis (2002); Van
Leeuwen (1995); Prochazka (2005); Ford (2003); Tucker (1997); Neugut (1994)
Réduction des risques
de progression tumorale
et de second cancer
La fumée de cigarette exercerait aussi un rôle direct sur la pathologie tumorale déclarée:
activation de voies de signalisation cellulaires favorisant la prolifération; l’angiogenèse; la
migration; la modulation du système immunitaire; l’inhibition des voies apoptotiques.
Warren (2014)
Le risque de second cancer primitif est plus élevé chez les patients fumeurs:
INCa (2013); Shiels (2014); Méta analyse de Parsons (2010); Ricceri (2015)
o + 59% de risque pour les fumeurs/non fumeurs
o - 18% de risque pour les patients ayant arrêté récemment/fumeurs
Tabuchi (2013)
Amélioration du
pronostic
L’arrêt du tabac est associé à une diminution de la mortalité toutes causes ainsi que de la
mortalité spécifique par cancer
• Mortalité globale observée dans les études de cohortes (toutes localisations de cancer):
o Tao (2013) : HR fumeurs actifs/ arrêt post-diagnostic = 2,36 (1,36-3,42)
o Warren (2013) : HR fumeurs actifs/arrêt récent = 1,17 (1,03-1,32)
• Mortalité spécifique :
Références
SEIN
Braithwaite (2012); Warren (2013); Pierce (2014); Bjerkaas (2014); Méta analyse Bérubé
(2014)
COLORECTAL
Parajuli (2014), Yang (2015); Phipps (2013), Parajuli (2014)
POUMON (stades localisés)
Warren (2013)
Amélioration de la
qualité de vie
La poursuite du tabagisme est associée, pour les patients atteints de cancers localisés
comme avancés, à une moins bonne qualité de vie :
o physique (ex: fonctionnement physique, symptômes respiratoires, douleurs, « performance status », …)
o psychique, émotionnelle et sociale
Duffy (2002 et 2007); Garces (2004); Jensen (2007); Jang (2011); Chen (2012); McDonnell (2014); Gonzalez (2014)
Comment intervenir auprès des patients ?
 Dépliant professionnels de santé:
Les facteurs favorisant l’arrêt
• Un délai court entre le moment du diagnostic et la mise en place du programme
d’arrêt du tabac augmente les chances de succès
Sanderson et al., (2002); Mcbride et al., (2003); Gritz et al., (2006)
• L’intervention d’un professionnel de santé est efficace:
- Méta analyses de Nayan et al. 2011 et 2013:
 Combinaison approche comportementale et substitution gratuite : OR= 1,40 (0,93-1,87)
 Période péri opératoire : OR= 2,31 ( 1,32-4,07)
Les patients doivent recevoir rapidement un discours médical clair sur l’intérêt de
l’arrêt du tabac dans le cadre du traitement de leur cancer et se sentir soutenu par
les professionnels de santé rencontrés tout au long du parcours
Une démarche simple et efficace
à intégrer dans sa pratique
Initiation du sevrage
QUELQUES CONSEILS D’ARRÊT
Quel dosage pour commencer ?
1 cigarette=1mg de nicotine
Les TNS sont remboursés sur prescription
médiale dédiée à hauteur de 150 euros/an
pour les patients atteints de cancer
Systématiser cette approche pour tous les patients
Il est important de lever certaines barrières qui peuvent empêcher l’intervention
auprès de tous les patients :
Patients atteints de cancers
non connus pour être
associés au tabac
Il n’est pas question de parler des causes du cancer et de culpabiliser le patient
mais bien d’évoquer l’impact du tabagisme sur la qualité et l’efficacité du
traitement à venir.
Patients âgés
Les personnes de plus de 60 ans n’ont pas plus de difficultés à arrêter le tabac
que les autres. De nombreux bénéfices en termes de santé et de qualité de vie
peuvent être attendus.
Systématiser cette approche pour tous les patients
Présence de troubles anxiodépressifs
Le niveau d’anxiété augmente au cours des 2 premières semaines du sevrage
puis diminue à un niveau plus faible qu’avant l’arrêt du tabac. L’identification de
troubles anxio-dépressifs peut conduire à une orientation vers un spécialiste
(psychiatre/addictologue).
Patients exprimant une
réticence à l’arrêt
La réticence vis-à-vis du sevrage, exprimée par certains patients, ne doit pas être
considérée comme un obstacle à l’intervention, mais bien comme une
ambivalence face à la dépendance et à la peur de l’échec, sur laquelle il est
nécessaire d’agir pour susciter le désir d’arrêt.
Sensibiliser les patients
Mettre à disposition la brochure patient dans l’établissement pour :
- sensibiliser/informer les patients
- Faciliter le dialogue entre professionnels de santé et patients
Etablissement
Démarche globale de l’établissement en matière de lutte contre le tabac
Informer, convaincre et
mobiliser les équipes
soignantes
Etablir un schéma d’intervention
systématique auprès des
patients fumeurs
Identifier une personne référente
Formations courtes
Apporter une aide à l’arrêt
à l’ensemble du personnel
« exemplarité »
Assurer le recueil du statut tabagique
dans le dossier médical
Faciliter la délivrance des substituts
Partager l’information avec le médecin traitant
Créer un environnement favorable
(affichages/documentations, espaces fumeurs non visibles, accès aux substituts dans les services…)
En synthèse
L’accompagnement à l’arrêt du tabac doit :
• devenir un élément à part entière du traitement du cancer
• être proposé le plus tôt possible
• être proposé à tous, quels que soient la localisation et le stade du cancer
• impliquer l’ensemble des professionnels de santé
• s’inscrire dans une démarche collective à l’échelle de l’établissement
Mesure 8.4 : Systématiser l’accompagnement au sevrage tabagique
des malades atteints de cancer
Merci de votre attention
Groupe de travail:
Relecteurs:
›Laurence BOT
›Anne BORGNE
›Anne CHILLES-WANG
›Sarah DAUCHY
›Bertrand DAUTZENBERG
›Jean-Luc GALLAIS
›Estelle LAVIE
›Maria MELCHIOR
Patrick MERLE
›Frédéric PIERRU
›Jean Louis RADET
›Françoise RIMAREIX
›Anne STOEBNER- DELBARRE
›Virginie WESTEEL
›Nathalie WIRTH
›Ivan BERLIN
›Nicolas BONNET
›Anne GANGLER
Dan BENHAMOU
Francis GUILLEMIN